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N° 379

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1996-1997

Rattaché pour ordre au procès-verbal de la séance du 26 juin 1997.

Enregistré à la Présidence du Sénat le 2 juillet 1997.

PROPOSITION DE LOI

relative aux pactes d'actionnaires ,

PRÉSENTÉE

Par M. Philippe MARINI,

Sénateur.

(Renvoyée à la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)

Sociétés

EXPOSÉ DES MOTIFS

MESDAMES, MESSIEURS,

On entend par « pactes d'actionnaires » les conventions conclues entre actionnaires dont l'objet consiste à réglementer l'exercice des droits individuels des actionnaires (droit de vote, cession des droits sociaux). Cherchant à organiser, généralement pour une longue période, le contrôle de la gestion d'une société, la composition de son capital ou encore la sortie d'un actionnaire de la société, ces accords extrastatutaires présentent une indéniable utilité. Ils contribuent notamment à assurer la stabilité indispensable à la réalisation d'objectifs complexes, de moyenne ou longue durée, notamment dans le cadre des groupes de sociétés, des holdings, et plus spécifiquement encore dans le cadre des filiales communes. De même, leur utilité en ce qui concerne les sociétés familiales n'est plus à démontrer. Les pactes d'actionnaires permettent alors d'organiser le contrôle du capital et de conserver le caractère propre de ces entreprises.

Concrètement, les pactes d'actionnaires peuvent être conclus entre actionnaires majoritaires et ils contribuent à assurer la stabilité de l'actionnariat, notamment s'il s'agit de sociétés cotées, pour écarter l'éventualité d'une offre publique inamicale. Intervenant entre des minoritaires, les pactes d'actionnaires peuvent tendre à protéger leurs intérêts en subordonnant leur apport en société à certaines conditions ou encore en prévoyant leur sortie du contrat social.

En l'état actuel du droit, le code civil méconnaît les pactes d'actionnaires dont la validité dépend des analyses de la jurisprudence. Leur utilité indéniable et un besoin naturel de sécurité juridique exprimé par les différents acteurs des sociétés conduisent à créer, par le biais de cette proposition de loi, un régime juridique stable en la matière.

Cette réforme doit s'accompagner d'un volet fiscal. Le législateur a en effet tout intérêt à favoriser les pactes d'actionnaires eu égard à leur intérêt pratique. Au-delà d'un certain seuil, les actions et parts sociales détenues par des associés liés durablement par un pacte d'actionnaires doivent être considérées comme des biens professionnels au sens de l'article 885-0 du code général des impôts. Ce nouveau régime fiscal présentera un effet d'autant plus vertueux qu'il incitera les épargnants à investir dans le capital des sociétés notamment petites et moyennes dont le besoin en fonds propres est crucial.

La proposition de loi se compose de quatre articles, le premier concernant une disposition fiscale relative à l'impôt de solidarité sur la fortune, les deux suivants concernant des dispositions du droit civil reconnaissant expressément certains pactes d'actionnaires et sanctionnant leur méconnaissance, et le dernier comportant l'aménagement d'une disposition pénale de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 relative aux sociétés commerciales.

I. - DISPOSITIF FISCAL

A. - L'article 1 er de la proposition de loi crée un article 885-O bis 1 nouveau du code général des impôts qui étend le régime des biens professionnels, au regard de l'impôt de solidarité sur la fortune, aux parts et actions détenues par des associés liés par une convention de vote.

Les alinéas 2 et suivants de l'article 885-0 bis 1 proposé établissent les conditions et modalités d'application de ce régime fiscal, ainsi que la sanction de leur rupture.

1. Conditions d'application

a) Détention par les associés liés par la convention de vote de 25 % des droits financiers et des droits de vote attachés aux titres émis par la société.

Ces associés liés par une convention de vote doivent collectivement détenir 25 % des droits financiers et des droits de vote attachés aux titres émis par la société. Ce pourcentage correspond au seuil d'éligibilité au régime des biens professionnels, s'agissant de la détention par les associés dirigeants sociaux de parts ou actions de sociétés assujetties à l'impôt sur les sociétés.

b) Engagement par les associés liés par la convention de vote de conserver les titres pendant une période de cinq ans au moins.

Ce régime est subordonné à une condition de durée, l'engagement par les associés liés par la convention de vote de conserver les titres pendant une période de cinq ans au moins.

2. Modalités d'application

L'alinéa 2 de l'article 885-O bis du code général des impôts précise les modalités de communication et de notification des documents qui conditionnent le bénéfice du régime fiscal proposé. L'engagement de conserver les titres pendant cinq ans au moins et la convention de vote doivent en effet être notifiés par les intéressés à la société émettrice des titres, tout en précisant le nombre de titres visés. Dans un souci de transparence entre associés, ces documents doivent pouvoir être communiqués à tout associé qui en fait la demande. Ils doivent être naturellement transmis à l'administration fiscale.

3. Sanctions de la rupture des conditions d'application

La rupture de l'engagement de conservation des titres pendant cinq ans au moins entraîne l'obligation pour l'associé à l'origine de cette rupture de souscrire des déclarations rectificatives sur les trois années précédentes, assorties d'intérêts de retard et de la pénalité prévue à l'article 1731 du code général des impôts.

Dans ce dernier cas, dans l'hypothèse où le seuil de 25 % de détention des droits de vote et financiers n'est plus atteint par les actionnaires « pactes » au 31 décembre de l'année d'imposition, les autres associés concernés perdent le bénéfice de ce régime fiscal, jusqu'à ce que ce seuil soit de nouveau franchi.

B. - L'article 1 er II de la présente proposition de loi compense les pertes de recettes de l'État résultant du régime nouveau par une majoration, à due concurrence, des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts, conformément à l'article 40 de la Constitution.

II. DISPOSITIF CIVIL

Les pactes d'actionnaires recouvrent des réalités variées telles que les conventions relatives à l'exercice du droit de vote et les pactes de préemption et de préférence (plus généralement encore les conventions comportant des conditions préférentielles de cession ou d'acquisition des droits sociaux). Ces deux objets de pactes d'actionnaires sont envisagés expressément par la présente proposition de loi ( ( * )1) . Suscitant des problèmes juridiques distincts, ils font l'objet d'articles distincts.

A. - Le droit des conventions de vote

1. Exposé du droit positif

La question de la validité des conventions de vote est une des plus irritantes du droit français. D'un point de vue juridique, le régime des conventions de vote subit en effet l'influence de deux concepts contradictoires. Si la liberté contractuelle autorise en principe ce type d'engagement (article 1134 du code civil), certaines dispositions propres au droit des sociétés compromettent fâcheusement leur validité et, par suite, la sécurité juridique de ces opérations. Ainsi, le fait que le droit de vote, prérogative personnelle de l'associé, doive être librement exprimé ( ( * )2) et le fait que l'article 440-3 de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 incrimine le trafic de suffrage fragilisent la validité de telles conventions.

Inversement, on peut citer en faveur de la validité des conventions de vote certaines dispositions légales récentes qui leur reconnaissent certaines conséquences. Ainsi, l'article 355-1 de la loi n° 66-537 ( ( * )3) du 24 juillet 1966 fait référence aux conventions de vote en ce qui concerne l'un des critères de contrôle. De plus, en matière de comptes consolidés, la notion de contrôle exclusif d'une société par une autre peut résulter notamment « du droit d'exercer une influence dominante sur une entreprise en vertu d'un contrat » (il s'agit vraisemblablement d'une référence aux conventions de vote). Enfin, les références aux actions de concert prévues dans la loi de 1966 désignent en grande partie les conventions de vote.

Il en résulte que le droit français adopte une opinion contrastée, ne tranchant pas définitivement sur la question de savoir si les conventions de vote sont valides ou non, et ce contrairement à la plupart des droits étrangers (américain, canadien et allemand). L'attitude de la jurisprudence française met les praticiens français face à une incertitude regrettable. Faute de texte général applicable au cas de l'espèce, la jurisprudence commerciale porte sur des dispositions fragmentaires donnant des indices contradictoires sur le sort des conventions de vote.

Concrètement, la jurisprudence a commencé par agréer la validité des conventions de vote dès lors qu'elles étaient fondées sur l'intérêt social, voire l'intérêt du groupe. Elle a admis par la suite que les conventions de vote étaient licites, sous réserve de ne pas porter atteinte au principe reconnaissant à chaque actionnaire le droit de participer aux délibérations sociales. En conclusion, cette jurisprudence, utile dans la mesure où l'on côtoie le pire et le meilleur dans le domaine des conventions de vote, présente le vice rédhibitoire d'être fondée sur des critères variables et par suite défavorables à la sécurité juridique.

2. Exposé de la réforme proposée

a) La reconnaissance expresse de la validité des conventions de vote.

L'article 2 de la présente proposition de loi consiste à créer un article 1844-A nouveau du code civil consacrant expressément la validité des conventions de votes.

Toutefois, il ne s'agit pas de reconnaître la validité de toutes les conventions de vote dans la mesure où certaines d'entre elles pourraient être susceptibles de porter atteinte à des dispositions impératives du droit des sociétés, voire à l'intérêt social. Devant ce risque particulièrement inopportun, il convient de prévoir des hypothèses de nullité des conventions de vote, qui s'ajouteront aux causes classiques de nullité des conventions. La proposition de loi envisage deux causes spéciales de nullité des conventions de vote.

L'une a trait à la violation des dispositions impératives du droit des sociétés. Elle concerne principalement le droit pour chaque associé de participer aux délibérations sociales. Ce droit, sanctionné pénalement (article 440-3° de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966) ne doit pas pouvoir être annihilé par une convention de vote. L'autre cause de nullité des conventions de vote concerne une éventuelle atteinte à l'intérêt social. Certes, l'intérêt social constitue une notion vague, mais il correspond à une réalité bien appréhendée par la jurisprudence commerciale actuelle. Cette notion utile contribuera à modérer l'ardeur et l'imagination de praticiens tentés d'être plus portés sur la technique que sur l'éthique.

Cette consécration doit s'accompagner d'un mécanisme de sanction efficace qui fait cruellement défaut actuellement. Il est en effet particulièrement difficile de sanctionner les manquements aux conventions de vote autrement que par l'allocation de dommages-intérêts dont la détermination n'est guère aisée dans ce domaine. La violation d'une convention de vote mérite une sanction plus adéquate qui fait l'objet de l'alinéa 4 de l'article 1844-A proposé.

b) La sanction de la méconnaissance des conventions de vote licites.

Les conventions de vote traduisent des obligations de faire. En vertu de l'article 1142 du code civil, tout manquement à une obligation de faire entraîne l'allocation de dommages-intérêts, à l'exclusion de toute autre sanction que contractuelle. Toutefois, la vocation de toute obligation consiste à être exécutée de la manière exacte dont elle a été contractée, sachant que les juges eux-mêmes sont libres de fixer la réparation la plus adéquate au dommage contractuel causé.

Enfin, on ne peut comprendre l'article 1142 du code civil sans en référer à l'adage nemo praecise cogi potest adfactum (nul ne peut être contraint à l'accomplissement direct d'un fait), lequel illustre l'intangibilité de la personne humaine et de sa liberté lorsque des rapports patrimoniaux de droit privé sont seuls en cause. Il paraît alors raisonnable de penser que l'article 1142 du code civil, qu'il convient de ne pas appliquer au pied de la lettre, n'a vocation à s'appliquer que si l'exécution forcée en nature d'une obligation de faire est impossible sans atteinte à la liberté individuelle du débiteur. Il en résulte que tout procédé juridique destiné à organiser l'exécution forcée en nature d'une obligation de faire, prévu par la loi, est possible dès lors que la liberté individuelle du débiteur n'est pas atteinte. Là réside tout l'enjeu de la technique proposée à l'alinéa 4 de l'article 1844-A proposé.

La sanction la plus évidente paraît être la nullité des votes émis en méconnaissance d'une convention de vote. Toutefois, plus efficace encore apparaissent l'annulation du vote irrégulier et sa substitution par un vote conforme à ce qu'exige la convention de vote. Il s'agirait alors d'une exécution forcée en nature d'une obligation de faire, celle de voter conformément à la convention de vote. Cette application du principe de réparation adéquate renforcerait manifestement avec éclat l'efficacité du pacte, et ce d'autant plus qu'un précédent jurisprudentiel a admis une logique d'exécution forcée en nature, en matière de droit de vote, dans le domaine des abus de minorité.

c) Sanction et opposabilité du pacte.

Ce problème d'opposabilité ne semble pouvoir être résolu que par la publicité de la convention de vote dont les modalités pourront être fixées par le pouvoir réglementaire (article 1844-A alinéa 3 proposé). Cette publicité des conventions de vote, dont l'initiative est laissée à la liberté des signataires, déterminera l'étendue et la nature de la sanction de la méconnaissance des conventions de vote.

La violation d'une convention de vote publiée entraînera la nullité de la délibération, et le juge pourra désigner un mandataire aux fins de représenter l'actionnaire défaillant à une nouvelle assemblée et de voter en son nom dans le sens de décisions conformes à la convention de vote. En revanche, la violation d'une convention de vote non publiée entraînera la sanction de droit commun des manquements aux obligations de faire, c'est-à-dire l'allocation de dommages-intérêts (article 1142 du code civil).

B. - Les pactes comportant des conditions préférentielles

de cession ou d'acquisition de droits sociaux

Ces pactes obligent un actionnaire désireux de céder ses titres à en informer les autres actionnaires, ces derniers (ou certains d'entre eux) disposant d'une priorité pour acquérir les actions aux conditions offertes. En l'absence de texte, la jurisprudence commerciale a admis la validité de tels pactes qui ne semblent donc pas poser les mêmes problèmes que les conventions de vote. Là encore, la nature particulière de ces conventions nécessite un aménagement des sanctions découlant de leur violation.

1. La sanction de la violation des pactes de préemption et de préférence

Selon la jurisprudence, la violation d'un pacte de préemption ou de préférence est sanctionnée normalement par l'allocation de dommages-intérêts, sauf s'il existe une collusion frauduleuse entre le vendeur et le tiers acquéreur, auquel cas l'annulation de la cession peut être prononcée. Toutefois, dans ce dernier cas, l'annulation ne permet pas au juge de substituer les bénéficiaires de la clause à l'acquéreur évincé.

Un pacte de préemption ou de préférence engendre en effet une obligation de faire soumise en tant que telle à l'article 1142 du code civil. Cette obligation de faire consiste pour l'actionnaire cessionnaire à proposer prioritairement la cession de ses actions à l'autre actionnaire membre du pacte. Il en résulte que l'inexécution d'une obligation issue d'un pacte de préférence doit se résoudre en principe par des dommages-intérêts.

L'introduction d'une autre sanction telle que la nullité des actes juridiques faits en méconnaissance de ces conventions doit donc faire l'objet d'une disposition de la loi. Tel est l'objet de l'article 1844-B alinéa 2 du code civil (article 3 de la proposition de loi).

Une fois ce préalable posé, la question du sort du tiers acquéreur des actions en violation du pacte de préemption ou de préférence apparaît. S'agissant d'un pacte non publié (donc occulte aux yeux du tiers acquéreur), on ne voit pas comment le bénéficiaire du pacte pourrait se substituer au tiers acquéreur, dans la mesure où le pacte lui est inopposable (effet relatif des conventions).

S'agissant en revanche d'un pacte de préemption ou de préférence dont le tiers acquéreur a eu connaissance, le fait qu'il ait contracté de mauvaise foi permet d'envisager favorablement l'annulation de la cession d'actions. L'alinéa premier de l'article 1844-B proposé favorise la mise en connaissance des tiers en prévoyant un système de publicité des pactes de préemption et de préférence.

2. La publicité des pactes de préemption et de préférence

Il convient de souligner que l'article 356-1-4 de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 applicable aux sociétés cotées impose déjà la publicité des pactes de préemption et de préférence. Ces pactes doivent en effet être transmis au Conseil des marchés financiers qui en assure la publicité.

La présente proposition de loi offre aux actionnaires une technique de publication des pactes d'actionnaires (article 3 portant création d'un article 1844-B alinéa premier du code civil). Si la publication des pactes d'actionnaires des sociétés non cotées demeure facultative, il n'en demeure pas moins qu'elle détermine leur effet essentiel à l'égard des tiers.

En effet, dans le cas où le pacte de préemption ou de préférence est publié, il devient opposable aux tiers. Dès lors, si les tiers ont accepté la cession de droits sociaux à leur profit, en méconnaissance d'un pacte de préemption ou de préférence, le contrat de cession des droits sociaux est nul.

III. - DIPOSITIF PÉNAL

L'article 4 de la proposition de loi modifie l'article 440-3 de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 qui qualifie de délit le trafic de suffrage. Ce délit sanctionne d'un emprisonnement de deux ans et d'une amende de 60 000 F « ceux qui se sont fait accorder, garantir ou promettre des avantages pour voter dans un certain sens ou pour ne pas participer au vote, ainsi que ceux qui auront accordé, garanti ou promis ces avantages ».

Il ne s'agit en aucun cas de dépénaliser ce délit destiné à sanctionner des comportements qui peuvent nuire gravement à l'intérêt social, et à l'ordre public. Toutefois, dans l'hypothèse où la loi autorise certaines conventions de vote, il convient de modifier l'article 440-3 de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 de manière à exclure (du champ d'application de l'incrimination les conventions autorisées par la loi ( ( * )4) .

Telles sont les raisons pour lesquelles je vous propose d'adopter la présente proposition de loi.

PROPOSITION DE LOI

Article 1 er

I. - Après l'article 885-O bis du code général des impôts, il est inséré un article 885-O bis- 1 ainsi rédigé :

« Art. 885-O bis-1.. - Sont également considérées comme des biens professionnels au sens de l'article 885-0 bis les parts ou actions détenues par des associés détenant collectivement au moins 25 % des droits financiers et des droits de vote attachés aux titres émis par la société, à condition qu'ils soient liés par une convention de vote, conformément aux dispositions de l'article 1844-A du code civil, et qu'ils s'engagent à ne pas céder leurs titres pendant une période de cinq ans au moins.

« L'engagement de conservation, ainsi que la convention de vote sont notifiés à la société émettrice des titres, en précisant le nombre de titres visés. Ces documents sont délivrés à tout associé qui en fait la demande. Ils sont communiqués à l'administration fiscale.

« L'associé qui rompt l'engagement de conservation souscrit des déclarations rectificatives de l'impôt de solidarité sur la fortune au titre des trois années précédentes et acquitte, dans le mois suivant la rupture de l'engagement, le supplément d'impôt en résultant augmenté de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 du présent code et de la pénalité visée à l'article 1731 du présent code.

« Dans le cas où le seuil fixé au premier alinéa n'est plus respecté au 31 décembre de l'année d'imposition, les associés ayant souscrit l'engagement de conservation perdent le bénéfice de la présente disposition jusqu'à ce que le seuil soit de nouveau franchi.

« Un décret en Conseil d'État précise les conditions d'application du présent article. »

II. - Les pertes de recettes pour l'État résultant du I ci-dessus sont compensées par une majoration, à due concurrence, des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Article 2

Après l'article 1844 du code civil, il est inséré un article 1844-A ainsi rédigé :

« Art. 1844-A. - L'exercice du droit de vote peut faire l'objet de conventions entre associés.

« Toutefois, les conventions contraires à une disposition légale impérative, et notamment celles par lesquelles un associé s'engage à user de son droit de vote conformément aux directives données par la société, par l'un de ses organes ou par une société contrôlée au sens de l'article L. 335-1, ou encore à toujours approuver les propositions de ceux-ci, ou encore contraires à l'intérêt social sont nulles.

« Les conventions relatives à l'exercice du droit de vote sont opposables aux tiers dès leur publication, d'un commun accord, dans des conditions fixées par décret.

« La violation d'une convention relative à l'exercice du droit de vote, publiée dans les conditions de l'alinéa précédent, entraîne le prononcé de la nullité du vote par le juge qui peut désigner un mandataire aux fins de représenter l'actionnaire défaillant à une nouvelle assemblée et de voter en son nom dans le sens de décisions conformes à la convention de vote. »

Article 3

Après l'article 1844 du code civil, il est inséré un article 1844-B ainsi rédigé :

« Art. 1844-B. - Les conventions comportant des conditions préférentielles de cession ou d'acquisition de droits sociaux sont opposables aux tiers dès leur publication, d'un commun accord, dans des conditions fixées par décret.

« La violation d'une convention comportant des conditions préférentielles de cession ou d'acquisition de droits sociaux, publiée dans les conditions de l'alinéa précédent, entraîne le prononcé par le juge de la nullité des actes juridiques faits en méconnaissance de cette convention. »

Article 4

Au début du quatrième alinéa (3°) de l'article 440 de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 relative aux sociétés commerciales, après les mots : « ceux qui », sont insérés les mots : «, en dehors d'une convention de vote régie par les dispositions de l'article 1844-A du code civil ».

* (1) Ph. Marini. Rapport sur la modernisation du droit des sociétés, pages 64 à 68, propositions n os 77 et 78.

* (2) Idée de bon sens tirée généralement de l'article 1844 alinéa 1 du code civil en vertu duquel « tout associé a le droit de participer (sous-entendu librement) aux décisions collectives ».

* (3) Article 357-1 de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1996

* (4) Certes, il existe en droit pénal un fait justificatif tenant à l'autorisation de la loi (article 122-4 du code pénal) qui permettrait d'exonérer de responsabilité les auteurs agissant en vertu d'une convention de vote autorisée. Toutefois, cette modification de l'article 440-3 aura le mérite de lever toute ambiguïté sur cette question, et d'être juridiquement claire, et par suite d'éviter tout contentieux inutile.

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