N°228

SENAT

SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998

Annexe au procès-verbal de la séance du 21 janvier 1998.

PROPOSITION DE LOI

relative aux pouvoirs de police des maires en matière de messages écrits ou illustrés à caractère violent, pornographique ou de nature à porter gravement atteinte à la dignité humaine,

PRÉSENTÉE

Par MM. Jean-Paul DELEVOYE, Luc DEJOIE, Christian DEMUYNCK, Patrice GÉLARD, Lucien LANIER, René-Georges LAURIN, Michel RUFIN et Jean-Pierre SCHOSTECK,

Sénateurs.

(Renvoyée à la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par te Règlement)

Ordre public. - Code pénal - Code générai des collectivités territoriales.

EXPOSÉ DES MOTIFS

MESDAMES, MESSIEURS,

Vous le savez sans doute, les affichages violents, pornographiques ou gravement attentatoires aux bonnes moeurs, prolifèrent dans nombre de communes, quelles que soient leur taille et leur situation. Ces affichages sont interdits et réprimés par le premier alinéa de l'article 227-24 du nouveau code pénal, mais le dispositif législatif n'apparaît pas, en réalité, applicable dans ces communes, pour deux raisons :

- il est le plus souvent très difficile de déterminer l'identité de l'éditeur et du diffuseur de ces affiches, malgré la loi de 1881 sur la liberté de la presse, ce qui rend presque impossible le démarrage de l'action publique, à l'initiative du parquet, comme du maire ou de n'importe quel citoyen ;

- le code général des collectivités territoriales ne confère aux maires aucun pouvoir de police en la matière. Dès lors, et très logiquement, tous les arrêtés municipaux d'interdiction sont annulés par les juridictions administratives, faute qu'il soit apporté la preuve d'un trouble effectif de l'ordre public, compte tenu des circonstances locales déterminées, et dans un secteur géographique délimité. Au demeurant, ces arrêtés inefficaces ne constituent pas non plus une réponse juridiquement satisfaisante. Pourquoi interdire par arrêté ce qui est déjà en vertu du code pénal ?

Mais, de fait, on aboutit à une situation paradoxale : le maire, officier de police judiciaire, investi de nombreux pouvoirs de police, se trouve désarmé face à la prolifération d'affichages illégaux qui ne sont pas sanctionnés.

La présente proposition de loi vise à résoudre ce paradoxe en conférant au maire un pouvoir de police spécial en matière d'affichage violent, pornographique ou gravement attentatoire aux bonnes moeurs en insérant un article L. 2213-32 (nouveau) dans le code général des collectivités territoriales, dans le chapitre 3 du titre I er du livre 2 de la deuxième partie, consacré aux pouvoirs de police portant sur des objets particuliers.

Cet article fait également référence, à titre complémentaire, à l'article 227-23 du nouveau code pénal, relatif aux images à caractère pornographique représentant des mineurs. Il a un double objet :

- permettre aux maires de prescrire, sous le contrôle des juridictions administratives, et indépendamment de l'action publique qui peut être déclenchée concomitamment, toutes les mesures nécessaires pour que l'article 227-24 du nouveau code pénal soit effectivement appliqué, sur tout ou partie du territoire de la commune, là où des affichages, comportant des messages écrits ou illustrés à caractère violent, pornographique ou de nature à porter gravement atteinte à la dignité humaine pourraient être vus ou perçus par des mineurs. Le dispositif est voisin de ceux notamment de la police des édifices menaçant ruine, la police des puits et excavations dangereuses, la police des mares... ;

- ouvrir aux maires la faculté de l'exécution d'office de ces mesures, aux frais de l'éditeur ou du distributeur du message, lorsque ceux-ci ne les ont pas mises en oeuvre de leur plein gré dans un délai de vingt-quatre heures, ou lorsqu'ils n'ont pu être identifiés à temps.

Ce double dispositif permettra de rendre cohérents, et surtout complémentaires, sur ce point, le code pénal et le code général des collectivités territoriales.

Pour ces raisons, nous vous demandons d'adopter la présente proposition de loi.

PROPOSITION DE LOI

Article unique

Après l'article L. 2213-31 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article L. 2213-32 ainsi rédigé :

«Art. L. 2213-32. - Sans préjudice de l'application des articles 227-23 et 227-24 du nouveau code pénal, le maire prescrit toutes les mesures nécessaires pour que des messages écrits ou illustrés à caractère violent, pornographique ou de naturel porter gravement atteinte à la dignité humaine ne puissent être vus ou perçus par des mineurs, sur tout ou partie du territoire de la commune.

«Faute, pour l'éditeur ou le distributeur, d'avoir été identifiés dans un délai de vingt-quatre heures, ou d'avoir mis en oeuvre, dans le même délai, les mesures ainsi prescrites, celles-ci sont exécutées d'office, à leurs frais ».

Page mise à jour le

Partager cette page