Mise en place d'un Agenda rural européen (PPR) - Texte déposé - Sénat

N° 839 rect. bis

SÉNAT


SESSION ORDINAIRE DE 2020-2021

                                                                                                                                             

Enregistré à la Présidence du Sénat le 21 septembre 2021

PROPOSITION DE RÉSOLUTION



en application de l’article 34-1 de la Constitution,


demandant la mise en place d’un Agenda rural européen,


présentée

Par M. Patrice JOLY, Mmes Gisèle JOURDA, Viviane ARTIGALAS, Laurence HARRIBEY, MM. Jean-Michel HOULLEGATTE, Didier MARIE, Olivier JACQUIN, Mmes Florence BLATRIX CONTAT, Nicole BONNEFOY, MM. Franck MONTAUGÉ, Jean-Claude TISSOT, Jean-Jacques LOZACH, Christian REDON-SARRAZY, Jean-Yves LECONTE, Victorin LUREL, Patrick KANNER, Maurice ANTISTE, David ASSOULINE, Joël BIGOT, Denis BOUAD, Hussein BOURGI, Mme Isabelle BRIQUET, M. Rémi CARDON, Mmes Marie-Arlette CARLOTTI, Catherine CONCONNE, Hélène CONWAY-MOURET, MM. Thierry COZIC, Michel DAGBERT, Gilbert-Luc DEVINAZ, Mme Marie-Pierre de LA GONTRIE, MM. Jérôme DURAIN, Vincent ÉBLÉ, Mme Frédérique ESPAGNAC, M. Rémi FÉRAUD, Mme Corinne FÉRET, M. Jean-Luc FICHET, Mme Martine FILLEUL, M. Hervé GILLÉ, Mme Victoire JASMIN, MM. Éric JEANSANNETAS, Bernard JOMIER, Éric KERROUCHE, Mmes Annie LE HOUEROU, Claudine LEPAGE, Monique LUBIN, MM. Jacques-Bernard MAGNER, Serge MÉRILLOU, Mme Michelle MEUNIER, M. Jean-Jacques MICHAU, Mme Marie-Pierre MONIER, M. Sebastien PLA, Mmes Émilienne POUMIROL, Angèle PRÉVILLE, M. Claude RAYNAL, Mme Sylvie ROBERT, M. Gilbert ROGER, Mme Laurence ROSSIGNOL, MM. Lucien STANZIONE, Jean-Pierre SUEUR, Rachid TEMAL, Jean-Marc TODESCHINI, Mickaël VALLET, André VALLINI, Mme Sabine VAN HEGHE et M. Yannick VAUGRENARD,

Sénateurs





Proposition de résolution demandant la mise en place d’un Agenda rural européen

Le Sénat,

Vu l’article 34-1 de la Constitution,

Vu l’article 174 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne,

Vu la déclaration de Cork 2.0 « Pour une vie meilleure en milieu rural » de 2016,

Vu la résolution du Parlement européen du 13 juin 2017 sur les éléments fondamentaux d’une politique de cohésion de l’Union pour l’après-2020,

Vu la déclaration de Venhorst du 21 octobre 2017 publiée par le Parlement rural européen 2017, qui vise à promouvoir la coopération dans des domaines tels que la connectivité, les infrastructures, les services, le renforcement des économies locales ainsi qu’à lutter contre la pauvreté et l’exclusion sociale,

Vu la résolution du Parlement européen du 17 avril 2018 sur le renforcement de la cohésion économique, sociale et territoriale au sein de l’Union européenne : le 7e rapport de la Commission européenne,

Vu la résolution du Parlement européen du 3 octobre 2018 sur la prise en compte des besoins spécifiques des zones rurales, montagneuses et isolées,

Vu la communication du 30 juin 2021 de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions sur une vision à long terme pour les zones rurales de l’Union européenne intitulée : « Vers des zones rurales plus fortes, connectées, résilientes et prospères à l’horizon 2040 »,



Considérant que les zones rurales constituent l’espace de vie de 137 millions d’Européens, soit 30 % de la population, répartis sur 80 % du territoire de l’Union ;



Considérant que l’économie de l’Europe, ses villes, son industrie (y compris touristique) et ses citoyens dépendent dans une large mesure de ces zones pour l’alimentation, les sols, l’énergie, l’eau, l’air qu’ils respirent et les matières premières ;



Considérant que les zones rurales seront indispensables pour réaliser de manière ambitieuse toutes les transitions auxquelles feront face les membres : transition énergétique, climatique, environnementale, sanitaire et alimentaire ;



Considérant que les zones rurales jouent un rôle essentiel dans la réalisation des objectifs du Pacte vert de l’Union européenne ;



Considérant que les confinements successifs ont réanimé un vif désir de campagne chez les citoyens européens, qui privilégient de plus en plus la qualité de vie sur toute autre préoccupation ;



Considérant les difficultés importantes des territoires ruraux et les inégalités qui perdurent entre les campagnes et les zones urbanisées, notamment en matière d’accès aux mobilités, aux soins, à l’emploi, aux services et au numérique ;



Considérant qu’il y a des écarts importants entre les hommes et les femmes dans le taux d’emploi dans les zones rurales et que les femmes se retrouvent très souvent plongées dans des situations de grandes précarités accentuant leur vulnérabilité ;



Considérant que la jeunesse représente l’avenir des territoires ruraux, elle doit avoir les mêmes opportunités et chances dans leur développement personnel et professionnel ;



Considérant qu’il est important de soutenir les zones rurales afin que les nombreux citoyens vivant en dehors des zones urbaines puissent avoir l’assurance de se voir offrir les mêmes possibilités que ceux vivant dans les zones urbaines ;



Considérant que la Commission européenne entend investir cette problématique en proposant une vision à long terme pour les zones rurales de l’Union européenne ;



Considérant la volonté de la Commission de faire de ces campagnes des zones « fortes, connectées, résilientes et prospères » ;



Considérant les interdépendances entre espaces ruraux et urbains justifiant des coopérations nécessaires à la résolution des enjeux communs (logements, déplacements, transition…) ;



Considérant que, dans la stratégie que dessine la Commission, aucun moyen financier supplémentaire n’est prévu pour atteindre les ambitions affichées et qu’elle n’est composée que de dispositifs financiers déjà existants ;



Considérant qu’une vision à long terme ne peut se limiter à l’installation de groupes de travail ni à l’échange de bonnes pratiques ;



Considérant qu’un sentiment d’abandon se fait toujours plus prononcé chez les citoyens ruraux et qu’il est nourri par les réorganisations réduisant l’accessibilité des services d’État ou d’opérateurs ;



Considérant l’intérêt réciproque à l’instauration d’une véritable dimension territoriale dans les champs de l’action publique européenne, notamment au regard des effets directs qu’elle produirait sur la vie quotidienne des habitants de ces territoires fragiles et isolés, et de la légitimité de l’Union qui s’en trouverait ainsi renforcée ;



Considérant qu’il y a une urgence impérieuse à agir pour les zones rurales, en investissant dans ces territoires au travers d’actions concrètes, perceptibles par les citoyens, dans un contexte où les sentiments d’isolement, d’exclusion et d’abandon des habitants grandissent ;



Regrette que la Commission européenne n’ait pas pu profiter des opportunités nouvelles post-pandémie pour dessiner sa vision. La crise de la covid-19 a montré un désir de campagne de la part de la population qui a bien compris que, sur ces territoires, se trouve une partie des réponses à la crise que nous vivons. Cette crise sanitaire a souligné également les possibilités offertes par les territoires ruraux grâce au télétravail ;



Estime que l’établissement d’un Agenda rural européen constitue un préalable indispensable à la réalisation des objectifs de cohésion de l’Union européenne à l’horizon 2040 ;



Considère que la promotion du développement local est essentielle pour stabiliser et compenser les pressions sur le marché immobilier, sur les ressources naturelles et pour accompagner ou compenser les dynamiques démographiques ;



Appelle en outre à la coordination renforcée des politiques de l’Union et de ses pays membres pour assurer le développement des territoires ruraux à ces fins ;



Demande que l’Agenda rural européen stimule le développement socio-économique, la croissance et la diversification de leur économie, le bien-être social, la protection de la nature et la préservation de la qualité de vie ainsi que la coopération et l’interconnexion avec les zones urbaines afin de favoriser la cohésion et d’éviter le risque de fragmentation territoriale ;



Soutient la Commission européenne dans son souhait d’aider les femmes à participer à la prise de décision, à développer leur esprit d’entreprise et à investir dans les services permettant de concilier vie professionnelle et vie privée, et, enfin, d’accroître l’intégration des femmes sur le marché du travail ;



Invite la Commission européenne à proposer des solutions innovantes pour créer davantage d’opportunités pour la jeunesse dans les zones rurales et éloignées en s’appuyant sur les bonnes pratiques existantes et en organisant une consultation avec les jeunes ;



Encourage les organisations institutionnelles publiques ou privées et associatives rurales à développer des projets en tirant parti de leurs atouts et de leurs forces et en offrant de nouvelles perspectives telles que des services décentralisés, des solutions énergétiques et des technologies et innovations numériques, territoriales et sociales ;



Appelle instamment à garantir une meilleure efficacité ainsi qu’une intégration plus poussée des politiques de développement rural de l’Union européenne, en y associant tous les niveaux de pouvoir au sein des États membres ;



Demande, en outre, que cet Agenda rural européen pour les régions rurales soit assorti d’un cadre stratégique pour le développement des zones rurales, coordonné avec les stratégies en faveur des régions défavorisées et des régions périphériques ;



Insiste sur la mise en place de mesures concrètes qui prennent en compte l’interdépendance entre zones rurales et urbaines et de leurs influences réciproques ;



Considère notamment qu’il devient nécessaire d’appréhender la valeur des services rendus écosystémiques apportés à la société par les territoires ruraux et de les traduire par une valorisation financière de ses aménités ;



Insiste sur la nécessité de soutenir la poursuite du développement du tourisme rural et de l’agrotourisme de montagne, tout en préservant les spécificités de ces zones, par exemple leurs traditions et leurs produits locaux traditionnels, étant donné que le tourisme y joue un rôle social, économique et culturel important ;



Plaide pour mettre en place un cadre concret d’évaluation avec des mesures chiffrées précises et des indicateurs définis pour évaluer l’impact des grandes politiques européennes sur les zones rurales dans le cadre de la mise en place d’un mécanisme « rural proofing » (évaluation de l’impact rural de chaque dispositif européen) ;



Appelle la Commission à prendre en compte de manière renforcée le rôle essentiel et à leur juste place respective des différents niveaux de collectivités locales et des opportunités de développement des synergies qu’offre l’économie social et solidaire pour ce qu’elle représente comme potentiel de coopération publique-privée ;



Souligne que les investissements visant à intégrer les zones rurales dans toutes les politiques sont nécessaires pour réaliser les priorités de l’Union notamment, mais pas exclusivement, pour une croissance durable, pour la création d’emplois, la transition numérique et l’efficacité du marché intérieur ;



Invite la Commission à inclure, dans ses futures propositions législatives, des dispositions visant à mieux prendre en compte les spécificités de ces zones et à leur octroyer un financement suffisant, en particulier au titre des Fonds structurels et d’investissement européens, dans le cadre de la politique de cohésion pour l’après-2020, élaborés en concertation avec les protagonistes ;



Demande à la Commission qu’elle s’assure que la ruralité bénéficie d’une part de crédit correspondant à son poids démographique et spatial dans l’Union européenne ;



Demande à la Commission que chaque État membre soit en situation de se doter d’un agenda rural national ;



Invite le Gouvernement français à porter l’Agenda rural européen à l’occasion de la présidence française du Conseil de l’Union européenne qui débutera en janvier 2022.

Les thèmes associés à ce texte

Page mise à jour le