Régulation de la plateformisation du travail et de l'emploi (PPR) - Texte déposé - Sénat

N° 265

SÉNAT


SESSION ORDINAIRE DE 2021-2022

                                                                                                                                             

Enregistré à la Présidence du Sénat le 7 décembre 2021

PROPOSITION DE RÉSOLUTION



en application de l’article 34-1 de la Constitution,


pour une véritable régulation de la plateformisation du travail et de l’emploi et le rétablissement des droits sociaux des travailleurs des plateformes numériques de travail,


présentée

Par M. Olivier JACQUIN,

Sénateur





Proposition de résolution pour une véritable régulation de la plateformisation du travail et de l’emploi et le rétablissement des droits sociaux des travailleurs des plateformes numériques de travail

Le Sénat,

Vu le Règlement du Sénat,

Vu l’article 34-1 de la Constitution du 4 octobre 1958,

Vu le huitième alinéa du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946,

Vu le code du travail,

Vu le code de la sécurité sociale,

Vu le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) et son article 101,

Vu le règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE (règlement général sur la protection des données),

Vu la loi  78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés,



Vu l’ordonnance  2007-329 du 12 mars 2007 relative au code du travail,



Vu la loi  2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie et son article 11,



Vu la décision  2018-769 DC du Conseil constitutionnel du 4 septembre 2018 sur la loi  2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel,



Vu la loi  2019-1428 du 24 décembre 2019 d’orientation des mobilités et ses articles 44 à 48,



Vu la décision  2019-794 DC du Conseil constitutionnel sur la loi  2019-1428 du 24 décembre 2019 d’orientation des mobilités,



Vu la proposition de loi  717 (2018-2019) relative au statut des travailleurs des plateformes numériques présentée par MM. Pascal SAVOLDELLI, Fabien GAY, Mmes Cathy APOURCEAU-POLY, Laurence COHEN, Michelle GRÉAUME et plusieurs de leurs collègues et déposée au Sénat le 11 septembre 2019,



Vu la proposition de loi  155 (2019-2020) visant à rétablir les droits sociaux des travailleurs numériques, présentée par Mmes Monique LUBIN, Nadine GRELET-CERTENAIS, MM. Olivier JACQUIN, Patrick KANNER, Jacques BIGOT et plusieurs de leurs collègues et déposée au Sénat le 28 novembre 2019,



Vu le rapport d’information  452 (2019-2020) fait par M. Michel FORISSIER, Mmes Catherine FOURNIER et Frédérique PUISSAT au nom de la commission des affaires sociales sur le droit social applicable aux travailleurs indépendants économiquement dépendants, intitulé « Travailleurs des plateformes : au-delà de la question du statut, quelles protections ? » et déposé le 20 mai 2020,



Vu la proposition de loi  187 (2020-2021) relative à la protection des travailleurs indépendants par la création d’un devoir de vigilance, à la défense du statut de salarié et à la lutte contre l’indépendance fictive, présentée par M. Olivier JACQUIN et plusieurs de ses collègues et déposée au Sénat le 4 décembre 2020,



Vu la proposition de loi  426 (2020-2021) visant à lutter contre l’indépendance fictive en permettant des requalifications en salarié par action de groupe et en contrôlant la place de l’algorithme dans les relations contractuelles, présentée par M. Olivier JACQUIN, Mme Monique LUBIN, MM. Franck MONTAUGÉ, Didier MARIE et plusieurs de leurs collègues et déposée au Sénat le 4 mars 2021,



Vu l’ordonnance  2021-484 du 21 avril 2021 relative aux modalités de représentation des travailleurs indépendants recourant pour leur activité aux plateformes et aux conditions d’exercice de cette représentation,



Vu le projet de loi  868 (2020 – 2021) ratifiant l’ordonnance  2021-484 du 21 avril 2021 relative aux modalités de représentation des travailleurs indépendants recourant pour leur activité aux plateformes et aux conditions d’exercice de cette représentation et portant habilitation du Gouvernement à compléter par ordonnance les règles organisant le dialogue social avec les plateformes, déposé au Sénat le 29 septembre 2021,



Vu le rapport  4481 (quinzième législature) fait par Mme Carole GRANDJEAN au nom de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale sur le projet de loi ratifiant l’ordonnance  2021-484 du 21 avril 2021 précitée, déposé le 21 septembre 2021,



Vu le rapport  140 (2021 – 2022) fait par Mme Frédérique PUISSAT au nom de la commission des affaires sociales du Sénat sur le projet de loi ratifiant l’ordonnance  2021-484 du 21 avril 2021 précitée, déposé le 10 novembre 2021,



Vu le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 et ses articles 105 et 106,



Vu le projet de loi de finances pour 2022 et son article 32 créant une taxe sur les exploitants de plateformes de mise en relation par voie électronique en vue de fournir certaines prestations de transport,



Vu la résolution 2019/2186 du Parlement européen du 16 septembre 2021 sur des conditions de travail, des droits et une protection sociale juste pour les travailleurs de plateformes – nouvelles formes d’emploi liées au développement numérique,



Vu le rapport d’information  867 (2020-2021) fait par M. Pascal SAVOLDELLI au nom de la mission d’information sur « l’ubérisation de la société : quel impact des plateformes numériques sur les métiers et l’emploi ? », intitulé « plateformisation du travail : agir contre la dépendance économique et sociale » et déposé le 29 septembre 2021,



Vu le rapport de M. Jean-Yves Frouin intitulé « Réguler les plateformes numériques de travail » et remis au Gouvernement le 1er décembre 2020,



Vu les consultations de la Commission Européenne sur les travailleurs des plateformes numériques, qui ont eu lieu entre le 24 février 2021 et le 15 septembre 2021,



Vu les arrêts de la chambre sociale de la Cour de cassation sur le pourvoi  17-20.079 du 28 novembre 2018 (Take Eat Easy) et  19-13.316 du 4 mars 2020 (Uber),



Vu la décision du Parquet de Milan en date du 24 février 2021 enjoignant à plusieurs plateformes de procéder à la « requalification contractuelle » de leurs relations avec leurs 60 000 chauffeurs en « travailleurs »,



Vu la décision du tribunal du district d’Amsterdam en date du 13 septembre 2021 affirmant que « la relation juridique entre Uber et ces chauffeurs répond à toutes les caractéristiques d’un contrat de travail »,



Vu les enquêtes et études du Laboratoire Ville Mobilité Transport de l’Université Gustave Eiffel sur les « livreurs instantanés » dirigées par Mmes Laetitia DABLANC et Anne AGUILÉRA,



Vu la consultation auprès de 2 284 chauffeurs Uber menée par Harris Interactive pour Uber entre le 14 octobre 2021 et le 2 novembre 2021,



Constatant la transformation profonde de la société à l’aune de la révolution numérique et la digitalisation d’un nombre toujours plus important des activités quotidiennes, privées comme professionnelles, de nos concitoyens ;



Constatant que le monde du travail est pleinement intégré à cette révolution ;



Constatant l’accélération de la digitalisation de l’économie, singulièrement du travail et des modes de consommation, du fait de la crise sanitaire ;



Constatant les excès et le dévoiement du statut d’autoentrepreneur, notamment en période de crise économique ;



Considérant les décisions de justice britannique, italienne et néerlandaise sur les requalifications de centaines de chauffeurs de voitures de transport avec chauffeur (VTC) et de milliers de livreurs à vélo ;



Considérant le projet de loi du gouvernement espagnol de suppression de la présomption d’indépendance et son remplacement par une présomption de salariat avec une reconnaissance de la place centrale de l’algorithme et de la responsabilité sociale des plateformes numériques de travail ;



Considérant l’adoption par le Parlement européen de la résolution 2019/2186 du 16 septembre 2021 précitée, présentée par une députée européenne issue du parti majoritaire en France et reprenant la principale mesure de la proposition du groupe socialiste, écologiste et républicain qu’est l’inversion de la charge de la preuve en introduisant une présomption de salariat pour les travailleurs des plateformes ;



Considérant la multiplicité des initiatives visant à réguler le phénomène d’externalisation du travail par des plateformes dans de nombreux États, et notamment celle de la Commission européenne menée par le commissaire Nicolas SCHMIT visant à apporter une réponse communautaire à ce phénomène.


1. Sécuriser le statut des travailleurs subordonnés



Estime que la position du Gouvernement crée une grave insécurité juridique. En usant d’artifices destinés à faire entrave au droit des travailleurs, pourtant placés dans un lien de subordination avec des plateformes, il les empêche d’obtenir la reconnaissance du statut juridique de travailleur salarié ;



Estime que le gouvernement renvoie à la négociation collective le soin de déterminer les principes fondamentaux des droits de travailleurs salariés de plateformes, « indépendants fictifs », en violation de l’article 34 de la Constitution ;



Estime que la position du Gouvernement fait obstacle au droit à un recours juridictionnel effectif des droits des travailleurs à l’encontre des plateformes, concernant leurs données personnelles relatives à leurs conditions d’emploi et de travail, en violation du règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 précité ;



Estime que la position du Gouvernement crée de graves distorsions de concurrence entre les entreprises, selon qu’elles sont ou ne sont pas qualifiées de « plateformes », concernant l’étendue de leurs responsabilités à l’égard de leurs travailleurs ;



Estime que la position du Gouvernement conduisant à traiter des travailleurs comme des entrepreneurs indépendants, tout en organisant une négociation collective, est de nature à porter atteinte à l’article 101 du TFUE qui interdit toutes pratiques concertées, qui sont susceptibles d’affecter le commerce entre États membres et qui ont pour objet ou pour effet d’empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l’intérieur du marché ;



Estime que la position du Gouvernement est contraire aux positions jurisprudentielles et aux évolutions normatives en cours au sein de l’Union européenne ;



Estime nécessaire de faire évoluer dès à présent la législation française afin de garantir aux travailleurs des plateformes des droits sociaux effectifs, comme l’atteste la multiplicité des propositions portées par les sénateurs socialistes, écologistes et républicains depuis novembre 2019 ;



Dénonce la volonté du Gouvernement de persister dans sa volonté de davantage protéger les plateformes plutôt que les travailleurs qu’elles emploient ;



Demande au Gouvernement de changer sa doctrine en matière de protection des travailleurs des plateformes en ce qu’il continue de promouvoir sans le dire la création d’un tiers statut entre salariat et indépendance, comme les auteurs de la présente proposition de résolution l’ont révélé lors de l’examen du projet de loi ratifiant l’ordonnance  2021-484 du 21 avril 2021 précitée ;



Enjoint le Gouvernement à reconsidérer sa position de refus de remplacer la présomption de non-salariat prévue à l’article L. 8221-6-1 du code du travail par une présomption de salariat organisant une inversion de la charge de la preuve de l’existence d’un contrat de travail liant un travailleur à une plateforme ;



Affirme qu’il revient aux plateformes de prouver que les travailleurs sont réellement indépendants et non à ces derniers d’apporter la preuve de leur subordination ;



Appelle l’Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales à reprendre les poursuites contre les plateformes soupçonnées de travail dissimulé et de recourir à des « indépendants fictifs » ;



Appelle l’inspection de travail à intensifier ses enquêtes contre le travail dissimulé ;



Appelle les directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement à contrôler les licences de transport des deux roues motorisées utilisés par les livreurs ;


2. Garantir une représentation effective des travailleurs de plateformes



Demande au Gouvernement de renoncer aux dispositions de l’ordonnance  2021-484 du 21 avril 2021 précitée concernant la représentation de ces travailleurs de plateformes numériques de travail qui ne concerne que les chauffeurs VTC et les livreurs à vélo, alors que ces travailleurs sont justement placés dans un rapport de subordination à l’égard de plateformes ;



Demande au Gouvernement de mettre en cohérence le statut de ces travailleurs avec leur statut juridique, tel que défini par la Cour de Cassation dans son arrêt du 4 mars 2020 sur le pourvoi  19-13.316 ;



Estime nécessaire que les représentants de ces travailleurs se voient reconnaître le droit de participer, par l’intermédiaire de leurs délégués, à la gestion des plateformes, conformément au huitième alinéa du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, et doivent être représentés aux conseils d’administration ou de surveillance des plateformes avec voix consultative, qu’ils puissent y soumettre des vœux et qu’ils disposent à cet effet de l’ensemble des documents adressés aux autres membres ;



Estime par ailleurs que l’ordonnance  2021-484 du 21 avril 2021 précitée est contraire à l’article 101 du TFUE en ce qu’elle enjoindrait des représentants d’indépendants à négocier avec des représentants de leurs cocontractants, à savoir les plateformes, mettant à mal le principe de concurrence et de non-entente entre les parties ;



Appelle le Gouvernement à attendre les propositions de la Commission européenne sur la révision de l’interprétation de l’article 101 du TFUE et à se concentrer sur les enjeux de régulation des plateformes ainsi que sur une véritable amélioration du statut des « vrais » indépendants ;


3. Renforcer les pouvoirs et les moyens de la CNIL pour une régulation effective des algorithmes



Affirme que les algorithmes utilisés par les plateformes numériques de travail occupent une place centrale et, par conséquent, prépondérante dans les relations contractuelles qu’elles entretiennent avec les travailleurs numériques ;



Estime, à l’instar de la résolution 2019/2186 du Parlement européen du 16 septembre 2016 précitée et du rapport d’information du Sénat  867 (2020-2021) précité, nécessaire de réguler les algorithmes et leur utilisation afin de garantir le respect de la législation ;



Estime qu’il est fondamental que les travailleurs ou leurs représentants soient en mesure de connaître la nature des données collectées et l’exploitation qui en est faite ;



Estime nécessaire de rendre ces algorithmes plus transparents afin de comprendre l’usage des données collectées et traitées. Ces éléments sont déterminants dans la définition précise de la place de cet outil informatique et impersonnel dans l’exécution des tâches des travailleurs prétendument indépendants ;



Estime que les algorithmes des plateformes numériques de travail doivent, à compter d’une certaine taille, être certifiés préalablement à leur exploitation et vérifiés régulièrement puisque cet outil informatique est auto-apprenant, ceux des plateformes intermédiaires et petites devront être conformes à des référentiels édictés par secteur d’activité ;



Estime que la commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) est l’autorité la plus qualifiée pour assumer cette tâche en ce qu’elle regroupe déjà de nombreuses prérogatives en matière de libertés informatiques et de protection des données personnelles, opère comme un gendarme du numérique, dispose de relais européens au sein d’un véritable réseau à consolider ;



Demande au Gouvernement de présenter dans les meilleurs délais un projet de loi d’extension des missions et prérogatives de la CNIL ;



Demande au Gouvernement d’augmenter en conséquence les moyens financiers et humains nécessaires à la CNIL pour qu’elle soit en mesure d’exercer l’ensemble de ses missions, d’abord en poursuivant le recrutement des personnels hautement qualifiés tels des mathématiciens, des data scientists, des programmeurs… ;



Souhaite que la CNIL soit sollicitée autant que de besoin par les juridictions qui ont à traiter des procédures en requalification des travailleurs des plateformes numériques de travail ou leurs représentants afin d’apporter une expertise sur le rôle et la place qu’occupent les algorithmes dans les relations contractuelles entre plateformes et travailleurs et, ainsi, contribuer notamment à la collecte des éléments constitutifs d’un lien de subordination ;



Appelle à l’instauration d’un devoir de vigilance contraignant sur les algorithmes utilisés par les plateformes afin d’assurer le respect des principes de transparence, de pertinence et de loyauté. Ainsi, une fois saisie par les travailleurs ou leurs représentants, la plateforme aura l’obligation de vérifier et corriger les dysfonctionnements de son algorithme sous peine de poursuites ;



Demande que les programmeurs, data scientists et l’ensemble des professionnels appelés à créer, modifier et travailler sur les algorithmes suivent des formations régulières sur les questions de droit du travail, de santé-sécurité, de discriminations, d’éthique ou de tout autre domaine qui pourrait être la cause de dysfonctionnement dans la programmation des algorithmes et de leur auto-évolution afin que l’humain reste maître de la machine ;


4. Renforcer les pouvoirs et les moyens d’une autorité garantissant la vigilance des entreprises à l’égard des travailleurs indépendants



Défend l’idée qu’en parallèle du renforcement des pouvoirs et prérogatives de la CNIL, il est indispensable de bâtir un système de contrôle des plateformes numériques de travail et de l’ensemble des relations contractuelles qu’elles entretiennent avec les travailleurs indépendants, dont la pierre angulaire sera une nouvelle autorité indépendante ;



Estime que l’autorité des relations sociales des plateformes d’emploi créée par l’ordonnance  2021-484 du 21 avril 2021 précitée ne sera pas en mesure de porter l’ensemble des actions nécessaires à une régulation économique et sociale ambitieuse du modèle des plateformes numériques de travail en ce qu’elle ne concernera que les chauffeurs VTC et les livreurs à vélo ;



Estime que les propositions du rapport de M. Jean-Yves Frouin, remis au Gouvernement le 1er décembre 2020, concernant cette autorité de régulation des plateformes, en ce qu’elles lui confiaient la mission de « (i) présider à la mise en place du dialogue social au sein des plateformes, de jouer un rôle de médiateur en cas de litiges entre plateformes et travailleurs de plateformes, (ii) prendre position sur la détermination et le calcul du tarif minimum fixé par la loi, (iii) rendre un avis sur les décisions d’octroi, de suspension ou de suppression des licences aux plateformes, (iv) autoriser ou non la rupture des relations contractuelles à l’initiative des plateformes concernant les représentants des travailleurs, (v) organiser la négociation avec les plateformes sur le partage des frais de structuration collective via le recours à un tiers et (vi) d’une manière générale réunir et centraliser les éléments d’information statistique sur les plateformes de travail pour disposer en permanence de l’ensemble des éléments d’appréciation », doivent être appliquées ;



Propose que cette autorité soit chargée des missions précitées mais également :



– de veiller, en collaboration avec l’administration du travail et les organismes de sécurité sociale, à l’absence de pratique de dissimulation d’emploi salarié,



– de la vérification et du contrôle des mécanismes de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs indépendants,



– de la mise en place de mesures de vigilance contraignantes pour prévenir les risques d’atteinte aux droits et libertés fondamentaux des travailleurs (rémunération, discrimination, non-respect du droit à la déconnexion, incitation à la prise de risque en matière de sécurité routière…) ou des atteintes à l’environnement. Une fois saisie par les travailleurs ou leurs représentants, la plateforme aura l’obligation de vérifier et corriger les dysfonctionnements de son algorithme sous peine de poursuites,



– de veiller aux règles de fixation de la tarification, de l’effectivité des versements des prestations et de la rémunération,



– de s’assurer de la loyauté du dialogue social au sein des plateformes comme au niveau sectoriel,



– d’un pouvoir de sanction allant jusqu’au refus de l’octroi d’une licence d’activité, voire la suspension ou la cessation de l’activité d’une plateforme en France si des dysfonctionnements sont signalés et avérés ;



Propose qu’elle puisse transmettre ses observations et rapports à l’inspection du travail et à l’Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales lorsqu’elle identifierait un risque de dissimulation d’emploi salarié ;



Demande que cette autorité dispose des moyens financiers et humains nécessaires à l’exercice de l’ensemble de ces missions, et notamment d’inspecteurs en capacité d’y répondre ;



Propose d’augmenter, en conséquence des besoins de cette autorité, la nouvelle « taxe sur les exploitants de plateformes de mise en relation par voie électronique en vue de fournir certaines prestations de transport » créée par le projet de loi de finances pour 2022 ;


5. Au niveau européen et international



Estime qu’une même lecture de ces dévoiements apparaît aux niveaux européen et international, et est en train de changer la donne après les décisions de la Cour de cassation française, de la Cour Suprême britannique, de la Cour d’appel de Milan, du tribunal du district d’Amsterdam, ainsi que les lois californiennes et espagnoles ;



Estime que le caractère transnational des entreprises exploitant des plateformes commande une régulation européenne et internationale complémentaire de la régulation nationale proposée ;



Demande à la Commission européenne de reprendre les propositions de la résolution 2019/2186 du Parlement Européen du 16 septembre 2021 précitée et notamment la présomption de salariat pour les « indépendants fictifs », l’inversion de la charge de la preuve en matière de requalification afin qu’il revienne aux plateformes de prouver l’indépendance des travailleurs et non à ces derniers de démontrer leur subordination devant les prud’hommes, ainsi que la reconnaissance de la place des algorithmes dans la relation contractuelle ;



Appelle la Commission européenne à présenter une directive ambitieuse pour garantir un socle de droits sociaux effectifs pour les travailleurs de plateformes ;



Appelle le Bureau international du travail à préparer et à soumettre à la Conférence internationale du travail, une convention internationale destinée à garantir aux travailleurs de plateformes un socle de droits fondamentaux effectifs.

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