Disponible au format Acrobat (99 Koctets)

N° 498

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1995-1996

Rattaché pour ordre au procès-verbal de la séance du 27 juin 1996.

Enregistré à la Présidence du Sénat le 8 août 1996.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

tendant à créer une commission d'enquête chargée d'évaluer les conséquences sanitaires et économiques de l' encéphalopathie spongiforme bovine (E.S.B.) en France et de rechercher les responsabilités dans la propagation de l'épizootie,

PRÉSENTÉE

Par MM. Yvon COLLIN, Jean-Michel BAYLET, André BOYER, Mme Joëlle DUSSEAU, MM. François LESEIN, Georges BERCHET, Georges MOULY et Bernard JOLY,

Sénateurs.

(Renvoyée à la commission des Affaires sociales et, pour avis, à la commission des Lois

Constitutionnelles, de Législation, du Suffrage universel, du Règlement et d'Administration générale.)

Agriculture. - Élevage - Maladies du bétail.

EXPOSÉ DES MOTIFS

MESDAMES, MESSIEURS,

De polémiques en révélations, les conséquences de la découverte de l'encéphalopathie spongiforme bovine (ESB) s'avèrent de plus en plus dramatiques. D'un phénomène vétérinaire, on est passé à un problème économique. Un pan entier de notre agriculture se trouve dans une situation très critique. Parallèlement, à mesure que les recherches scientifiques relatives à l'ESB progressent, on s'oriente peut-être vers une grave question de santé publique.

L'inquiétude des Français, qui se concrétise par une désaffection croissante à l'égard de la viande bovine, invite les parlementaires à répondre à un certain nombre de questions.

L'ESB ou maladie de la « vache folle » est apparue au Royaume-Uni en novembre 1986. Depuis cette date, sur un cheptel comprenant 11,5 millions de têtes, 163 000 bovins britanniques ont été touchés par l'infection. A ce jour, la France a répertorié une vingtaine de cas sur un cheptel de plus de 21 millions de bêtes. Les enquêtes épidémiologiques ont démontré que l'alimentation des animaux avec des farines d'équarrissage fabriquées à partir de cadavres ruminants infectés était responsable de cette situation. Un changement dans le processus de fabrication de ces farines, intervenu au Royaume-Uni au début des années 1980, expliquerait la brusque exposition à l'agent pathogène des cheptels anglais et l'évolution exponentielle de la maladie au cours des années suivantes.

Si l'origine de la maladie a été clairement identifiée, certaines de ses répercussions sanitaires demeurent incertaines. Aucune donnée scientifique ne permet actuellement de confirmer la transmission de l'ESB à l'espèce humaine. Néanmoins, l'équipe française du Professeur Dormont (service de santé des armées, Commissariat de l'énergie Atomique), en collaboration avec des chercheurs britanniques, a établi des similitudes entre l'ESB et la maladie de Creutzfeldt-Jakob.

Dans le doute et dans l'attente de nouveaux résultats scientifiques, il serait souhaitable de lever certaines interrogations. Quelle est la diffusion de l'ESB en France, en Europe et partout dans le monde ? Quels produits issus directement ou indirectement de la viande bovine présentent un danger pour la santé des consommateurs ?

Ces incertitudes pèsent très lourdement sur les activités liées à l'élevage. La santé publique est une priorité. La survie d'une filière entière de notre agriculture en est une autre. Depuis la circulation d'informations sur la maladie de la « vache folle », la consommation de viande bovine connaît une décroissance continue. Les éleveurs, les commerçants et les industries de transformation se trouvent confrontés à des difficultés sans précédents.

Dans ces conditions, une commission d'enquête pourrait évaluer avec exactitude les répercussions économiques de l'épidémie sur l'élevage bovin ainsi que sur toutes les industries et les entreprises de négoce qui en dépendent.

Par ailleurs, devant la gravité de la crise déclenchée par l'ESB, il est du ressort de la représentation nationale de rechercher les responsabilités, qu'elles soient publiques ou privées. L'examen de la chronologie des décisions nationales et communautaires permettraient de vérifier si, en connaissance de cause, tout a été entrepris pour enrayer l'épizootie.

Au regard de récentes révélations, il semble que cela n'a pas été le cas. Les chiffres officiels des douanes britanniques ont apporté la preuve que la Grande-Bretagne, qui avait interdit depuis 1988 l'utilisation par ses agriculteurs de farines alimentaires potentiellement infectées, a continué à les exporter vers la France et d'autres pays.

L'attitude des instances communautaires impose également certaines clarifications. Bien que la maladie ravage les troupeaux anglais depuis une dizaine d'années, la Commission européenne n'a pas sommé les autorités britanniques de prendre les mesures adéquates. Le principe de libre-circulation des marchandises est-il incompatible avec la prévention des risques ?

Ces insuffisances décisionnelles, qui promettent des répercussions financières très lourdes à la fois pour l'Europe et pour chacun des États concernés, requièrent toute l'attention des parlementaires.

Pour toutes ces raisons et parce que l'apaisement des craintes passe par une exigence de transparence, nous vous demandons, Mesdames, Messieurs, de bien vouloir procéder à la création d'une commission d'enquête en adoptant la proposition de résolution dont la teneur suit :

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

Article premier.

En application de l'article 11 du Règlement du Sénat et de l'article 6 de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, il est créé une commission d'enquête chargée :

- de mesurer l'étendue de la propagation de l'encéphalopathie spongiforme bovine ;

- de déterminer l'ampleur des conséquences sanitaires et économiques déclenchées par l'épizootie ;

- et de rechercher les responsabilités publiques et privées qui ont contribué à sa propagation sur le territoire national.

Art. 2.

Cette commission est composée de 21 membres.

Page mise à jour le

Partager cette page