PROJET DE LOI

adopté

le 19 juin 1996

N° 155

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1995-1996

PROJET DE LOI

tendant à renforcer la répression du terrorisme et des atteintes aux personnes dépositaires de l'autorité publique ou chargées d'une mission de service public et comportant des dispositions relatives à la police judiciaire.

(Texte définitif.)

Le Sénat a adopté, dans les conditions prévues à l'article 45 (alinéas 2 et 3) de la Constitution, le projet de loi dont la teneur suit :

___________________________

Voir les numéros :

Assemblée nationale (10e législ.) : 1re lecture : 2302, 2406 et TA. 442.

2e lecture : 2521, 2638 et TA. 521.

2793 et C.M.P. : 2833 et T.A. 559.

Sénat : 1re lecture : 156, 178 et T.A. 71 (1995-1996).

2 e lecture : 321 et 345 (1995-1996).

C.M.P. : 402(1995-1996).

Chapitre premier Dispositions tendant à renforcer la répression du terrorisme.

Section 1 Dispositions modifiant le code pénal.

Article premier.

L'article 421-1 du code pénal est ainsi modifié :

1° Dans le premier alinéa, après les mots : « lorsqu'elles sont », il est inséré le mot : « intentionnellement » ;

2° Il est inséré, entre le 2° et le 3°, qui devient le 4°, un 3° ainsi rédigé :

« 3° Les infractions en matière de groupes de combat et de mouvements dissous définies par les articles 431-13 à 431-17 et les infractions définies par les articles 434-6 et 441-2 à 441-5 ; »

3° Au 4°, les mots : « définis aux articles 31 et 32 du décret-loi précité » sont remplacés par les mots : « définis aux articles 24, 28, 31 et 32 du décret-loi précité » ;

4° Le 4° est complété par un alinéa ainsi rédigé :

«-- l'aide à l'entrée, à la circulation ou au séjour irréguliers d'un étranger, définie à l'article 21 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ; »

5° Il est ajouté un 5° ainsi rédigé :

« 5° Le recel du produit de l'une des infractions prévues aux 1° à 4° ci-dessus. »

Art. 2.

Dans le premier alinéa de l'article 421-2 du même code, après les mots : « lorsqu'il est », il est inséré le mot : « intentionnellement ».

Art. 3.

Il est inséré, après l'article 421-2 du même code, un article 4212-1 ainsi rédigé :

«Art. 421-2-1. -Constitue également un acte de terrorisme le fait de participer à un groupement formé ou à une entente établie en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, d'un des actes de terrorisme mentionnés aux articles précédents. »

Art. 4.

Au premier alinéa de l'article 421-3 du même code, les mots :

« aux 1°, 2° et 3° de l'article 421-1 » sont remplacés par les mots : « à l'article 421-1 ».

Art. 5.

Il est inséré, après l'article 421-4 du même code, un article 421-5 ainsi rédigé :

« Art. 421-5. - L'acte de terrorisme défini à l'article 421-2-1 est puni de dix ans d'emprisonnement et de 1 500 000 F d'amende.

« Les deux premiers alinéas de l'article 132-23 relatif à la période de sûreté sont applicables au délit prévu par le présent article. »

Art. 6.

Au premier alinéa de l'article 422-3 du même code, les mots :

« par les articles 421-1 et 421-2 » sont remplacés par les mots : « par le présent titre ».

Art. 7.

Au premier alinéa de l'article 434-6 du même code, après les mots : « auteur ou complice d'un crime », il est inséré les mots : « ou d'un acte de terrorisme puni d'au moins dix ans d'emprisonnement ».

Aux 1° et 2° du même article, après les mots : « de l'auteur ou du complice du crime », il est inséré les mots : « ou de l'acte de terrorisme ».

Section 2 Dispositions modifiant le code de procédure pénale.

Art. 8.

À l'article 706-16 du code de procédure pénale, les mots : « Les actes de terrorisme incriminés par les articles 421-1, 421-2 et 421-4 du code pénal, le délit de participation à une association de malfaiteurs prévu par l'article 450-1 du même code lorsqu'il a pour objet de préparer l'une de ces infractions » sont remplacés par les mots : « Les actes de terrorisme incriminés par les articles 421-1 à 421-5 du code pénal ».

Art. 9.

L'article 706-16 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Ces dispositions sont également applicables à la poursuite, à l'instruction et au jugement des actes de terrorisme commis à l'étranger lorsque la loi française est applicable en vertu des dispositions de la section 2 du chapitre III du titre premier du livre premier du code pénal. »

Art. 10.

L'article 706-24 du même code est complété par quatre alinéas ainsi rédigés :

« Si les nécessités de l'enquête ou de l'instruction l'exigent, les visites, perquisitions et saisies peuvent être opérées en dehors des heures prévues par l'article 59.

« Les opérations prévues à l'alinéa précédent doivent, à peine de nullité, être autorisées sur requête du procureur de la République par le président du tribunal de grande instance ou le juge délégué par lui, à moins qu'elles ne soient autorisées par le juge d'instruction ; les autorisations sont données pour des perquisitions déterminées.

Chaque autorisation fait l'objet d'une décision écrite, précisant la qualification de l'infraction dont la preuve est recherchée ainsi que l'adresse des lieux dans lesquels les visites, perquisitions et saisies peuvent être effectuées, et motivée par référence aux éléments de fait justifiant que ces opérations sont nécessaires. Celles-ci sont effectuées sous le contrôle du magistrat qui les a autorisées, et qui peut se déplacer sur les lieux pour veiller au respect des dispositions légales.

« Ces opérations ne peuvent, à peine de nullité, avoir un autre objet que la recherche et la constatation des infractions entrant dans le champ d'application de l'article 706-16.

« Pour l'application des dispositions du présent article, le président du tribunal de grande instance est le président du tribunal de grande instance dans le ressort duquel les opérations sont effectuées ou le président du tribunal de grande instance de Paris, ce dernier exerçant alors ses attributions sur toute l'étendue du territoire national. »

Art. 11.

I. - Au deuxième alinéa de l'article 706-28 du même code, le mot : « ordonnées » est remplacé par le mot : « autorisées ».

II. - Le deuxième alinéa du même article est complété par deux phrases ainsi rédigées :

« Chaque autorisation fait l'objet d'une décision écrite, précisant la qualification de l'infraction dont la preuve est recherchée ainsi que l'adresse des lieux dans lesquels les visites, perquisitions et saisies peuvent être effectuées, et motivée par référence aux éléments de fait justifiant que ces opérations sont nécessaires. Celles-ci sont effectuées sous le contrôle du magistrat qui les a autorisées, et qui peut se déplacer sur les lieux pour veiller au respect des dispositions légales. »

Section 3 Disposition modifiant le code civil.

Art. 12.

Le deuxième alinéa (1°) de l'article 25 du code civil est complété par les mots : « ou pour un crime ou un délit constituant un acte de terrorisme ».

Chapitre II

Dispositions tendant à renforcer la répression

des atteintes aux personnes dépositaires

de l'autorité publique ou chargées d'une mission

de service public.

Art. 13.

Aux 4° des articles 221-4, 222-3, 222-8, 222-10, 222-12 et 22213 du code pénal, après les mots : « un officier public ou ministériel », il est inséré les mots : « , un militaire de la gendarmerie, un fonctionnaire de la police nationale, des douanes, de l'administration pénitentiaire ».

Au 3° de l'article 322-3 du même code, après les mots : « d'un officier public ou ministériel », il est inséré les mots : « , d'un militaire de la gendarmerie, d'un fonctionnaire de la police nationale, des douanes, de l'administration pénitentiaire ».

Art. 14.

I. - L'avant-dernier alinéa de l'article 222-12 du même code est complété par deux phrases ainsi rédigées :

« Les peines sont portées à sept ans d'emprisonnement et 700 000 F d'amende lorsque cette infraction est commise dans deux des circonstances prévues aux 1° à 10° du présent article. Les peines sont portées à dix ans d'emprisonnement et 1 000 000 F d'amende lorsqu'elle est commise dans trois de ces circonstances. »

II. - Au dernier alinéa de cet article, les mots : « à l'infraction » sont remplacés par les mots : « aux infractions ».

Art. 15.

I. - Au premier alinéa de l'article 222-13 du même code, les mots : « Les violences n'ayant pas entraîné une incapacité totale de travail pendant plus de huit jours » sont remplacés par les mots : « Les violences ayant entraîné une incapacité de travail inférieure ou égale à huit jours ou n'ayant entraîné aucune incapacité de travail ».

II. - Le dernier alinéa de cet article est complété par deux phrases ainsi rédigées :

«Les peines sont également portées à cinq ans d'emprisonnement et 500 000 F d'amende lorsque cette infraction, ayant entraîné une incapacité totale de travail inférieure ou égale à huit jours, est commise dans deux des circonstances prévues aux 1° à 10° du présent article. Les peines sont portées à sept ans d'emprisonnement et 700 000 F d'amende lorsqu'elle est commise dans trois de ces circonstances. »

Art. 16.

I. - Dans l'intitulé de la section II du chapitre III du titre troisième du livre quatrième du code pénal, après le mot : « des », sont insérés les mots : « menaces et ».

II. - L'article 433-3 du même code est ainsi rédigé :

« Art. 433-3. - Est punie de deux ans d'emprisonnement et de 200 000 F d'amende la menace de commettre un crime ou un délit contre les personnes ou les biens proférée à rencontre d'un magistrat, d'un juré, d'un avocat, d'un officier public ou ministériel, d'un militaire de la gendarmerie, d'un fonctionnaire de la police nationale, des douanes, de l'administration pénitentiaire ou de toute autre personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, lorsqu'elle est soit réitérée, soit matérialisée par un écrit, une image ou tout autre objet. La peine est portée à cinq ans d'emprisonnement et 500 000 F d'amende lorsqu'il s'agit d'une menace de mort ou d'une menace d'atteinte aux biens dangereuse pour les personnes.

« Est puni de dix ans d'emprisonnement et de 1 000 000 F d'amende le fait d'user de menaces, de violences ou de commettre tout autre acte d'intimidation pour obtenir d'une personne mentionnée au premier alinéa ou investie d'un mandat électif public soit qu'elle accomplisse ou s'abstienne d'accomplir un acte de sa fonction, de sa mission ou de son mandat, ou facilité par sa fonction, sa mission ou son mandat, soit qu'elle abuse de son autorité vraie ou supposée en vue de faire obtenir d'une autorité ou d'une administration publique des distinctions, des emplois, des marchés ou toute autre décision favorable. »

Art. 17.

L'article 433-5 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsqu'il est commis en réunion, l'outrage prévu au premier alinéa est puni de six mois d'emprisonnement et de 50 000 F d'amende, et l'outrage prévu au deuxième alinéa est puni d'un an d'emprisonnement et de 100 000 F d'amende. »

Art. 18.

Au 5° de l'article 398-1 du code de procédure pénale, après la référence : « 322-14, », il est inséré la référence : « 433-3, premier alinéa, ».

Art. 19.

L'article 132-75 du code pénal est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« L'utilisation d'un animal pour tuer, blesser ou menacer est assimilée à l'usage d'une arme. En cas de condamnation du propriétaire de l'animal ou si le propriétaire est inconnu, le tribunal peut décider de remettre l'animal à une oeuvre de protection animale reconnue d'utilité publique ou déclarée, laquelle pourra librement en disposer. »

Chapitre III Dispositions relatives à la police judiciaire.

Art. 20.

L'article 16 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Au 2°, les mots : « quatre ans » sont remplacés par les mots :

« trois ans » et les mots : « des ministres de la justice et des armées » sont remplacés par les mots : « des ministres de la justice et de la défense » ;

2° Au 3°, les mots : « les fonctionnaires du corps des inspecteurs de police de la police nationale titulaires et les commandants, les officiers de paix principaux ainsi que, sous réserve qu'ils comptent au moins deux ans de services effectifs en qualité de titulaires, les officiers de paix de la police nationale » sont remplacés par les mots :

« les fonctionnaires titulaires du corps de commandement et d'encadrement de la police nationale ».

Art. 21.

Les 2°, 3°, 4° et 5° de l'article 20 du même code sont ainsi rédigés :

« 2° Les fonctionnaires titulaires du corps de commandement et d'encadrement de la police nationale n'ayant pas la qualité d'officier de police judiciaire ainsi que les fonctionnaires stagiaires de ce même corps, et les élèves lieutenants de police ;

« 3° Les fonctionnaires du corps de maîtrise et d'application de la police nationale qui comptent au moins deux ans de service en qualité de titulaires, sous réserve des dispositions concernant les fonctionnaires visés au 4° et au 5° ci-après ;

« 4° Les gardiens de la paix issus de l'ancien corps des gradés et gardiens de la police nationale nommés stagiaires avant le 31 décembre 1985, lorsqu'ils comptent au moins deux ans de service en qualité de titulaires et ont satisfait aux épreuves d'un examen technique dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État ou détiennent les qualifications professionnelles permettant l'accès au grade supérieur ;

« 5° Les gardiens de la paix issus de l'ancien corps des enquêteurs de police, nommés stagiaires avant le 1er mars 1979, lorsqu'ils comptent au moins deux ans de service en qualité de titulaires et remplissent les conditions d'aptitude prévues par la loi n° 78-788 du 28 juillet 1978 portant réforme de la procédure pénale sur la police judiciaire et le jury d'assises ou ont satisfait aux épreuves d'un examen technique dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État ou détiennent les qualifications professionnelles permettant l'accès au grade supérieur. »

Art. 22.

I. - À l'article 46 du même code, les mots : « inspecteurs divisionnaires ou principaux de la police nationale » sont remplacés par les mots : « commandants ou capitaines de police ».

II. - À l'article 48 du même code, les mots : «inspecteur divisionnaire ou principal de la police nationale » sont remplacés par les mots : « commandant ou capitaine de police ».

Art. 23.

I. - Dans le premier alinéa de l'article L. 23-1 du code de la route, les mots : « corps des officiers de paix » sont remplacés par les mots : « corps de commandement et d'encadrement de la police nationale ».

II. - Dans le quatrième alinéa du même article, les mots : « Les commandants et officiers de paix » sont remplacés par les mots :

« Les fonctionnaires du corps de commandement et d'encadrement de la police nationale ».

Art. 24.

Le troisième alinéa (2°) de l'article L. 237 du code électoral est ainsi rédigé :

« 2° De fonctionnaire des corps de conception et de direction et de commandement et d'encadrement de la police nationale ; ».

Chapitre IV Dispositions diverses.

Art. 25.

L'article 21 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France est complété par un III ainsi rédigé :

« III. - Sans préjudice de l'article 19, ne peut donner lieu à des poursuites pénales sur le fondement du présent article l'aide au séjour irrégulier d'un étranger lorsqu'elle est le fait :

« 1° D'un ascendant ou d'un descendant de l'étranger ;

« 2° Du conjoint de l'étranger, sauf lorsque les époux sont séparés de corps ou autorisés à résider séparément. »

Art. 26.

À l'article 229 de la loi n° 93-2 du 4 janvier 1993 portant réforme de la procédure pénale, la date : « 1er mars 1996 » est remplacée par la date : « 1er janvier 1997 ».

Art. 27.

La présente loi est applicable dans les territoires d'outre-mer où elle entrera en vigueur le 1er mai 1996. Elle est également applicable dans la collectivité territoriale de Mayotte où elle entrera en vigueur le 1er mai 1997.

Délibéré, en séance publique, à Paris, le 19 juin 1996.

Le Président,

Signé : René MONORY.

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