Service des Commissions 

Notre programme fiscal : plus loin, plus vite, plus fort

Au moment où le Gouvernement formule ses hypothèses de finances publiques pour l’année 2000, le Président Alain Lambert (UC - Orne) et le rapporteur général, Philippe Marini (RPR - Oise) de la commission des finances du Sénat rappellent leurs propositions.

Le niveau historiquement élevé atteint par les prélèvements obligatoires en 1999 (45,6 % du PIB) est à nos yeux infiniment plus important que le mythe de la " cagnotte ". Au-delà des vraies-fausses hésitations du gouvernement qui cherche à éviter tout débat fiscal sérieux, l’intérêt de la France commande aujourd’hui la mise en œuvre d’un programme clair et déterminé de diminution du poids de la fiscalité et des charges sociales, organisé autour d’un objectif simple : ne plus être le mauvais élève de la zone Euro, en réduisant davantage notre déficit et notre endettement.

Ce préalable posé, notre pays doit atteindre dans les 3 ans à venir le même niveau de prélèvements que l’Allemagne, soit 42,4 % du produit intérieur brut. Pour cela nous préconisons une méthode : des baisses massives et durables d’impôts et de cotisations sociales à hauteur de 250 milliards de francs, soit le double de ce qu’envisage actuellement, sans fournir pour autant d’indications précises, le Gouvernement.

Cet effort nous conduira à réaliser sur 3 ans ce que le gouvernement social démocrate de M. Gerhard Schroëder a décidé de mettre en œuvre sur 5 ans à savoir 250 milliards de francs de baisse d’impôts. Afin de rattraper notre retard, il nous faut aller plus loin, plus vite et plus fort que les timides préconisations de Christian Sautter.

Pour cela nous avons deux objectifs : il s’agit d’une part, de corriger les erreurs commises par le gouvernement depuis 1997 et d’autre part, d’entamer une réforme structurelle de notre système de prélèvements obligatoires.

S’agissant des ajustements à réaliser, il est indispensable de lutter contre toutes les formes de prélèvements rampants ou de doubles impositions qui, de façon insidieuse, accroissent la charge fiscale pesant sur les Français. Supprimons le mécanisme qui consiste pour l’Etat à continuer à prélever à son profit une partie excessive du produit de la fiscalité locale afin de financer les frais d’assiette et de recouvrement. Faisons surtout bénéficier les Français des fruits de la croissance, en indexant le barème de l’impôt sur le revenu sur l’évolution du PIB et non plus seulement sur celle de l’inflation. Il convient également d’aménager notre fiscalité pétrolière afin d’éviter que toute augmentation du cours du dollar n’entraîne mécaniquement un renchérissement du coût des carburants et ipso facto un surcroît de recettes fiscales pour l’Etat aux dépens de l’ensemble des ménages français et tout particulièrement de ceux de condition modeste : ainsi toute augmentation de 1 % du prix de l’essence entraîne au titre de la TVA, 410 millions de recettes supplémentaires.

En outre, dans une économie ouverte et de plus en plus mondialisée, mettre fin à l’alourdissement continuel depuis 1997 de la pression fiscale est une priorité pour nos entreprises : ce sont elles qui tirent la croissance et qui assurent l’embellie conjoncturelle actuelle. Supprimons par exemple les mécanismes de double imposition ou revenons sur la réduction du taux de l’avoir fiscal décidés dans la dernière loi de finances. De même, le mode de financement des 35 heures, qui relève de " l’usine à gaz ", compromet la compétitivité de nos entreprises par rapport à leurs partenaires : supprimons tant la contribution sociale sur les bénéfices (CSB) que la Taxe Générale sur les Activités Polluantes (TGAP).

S’agissant des premières mesures structurelles applicables à notre système de prélèvements obligatoires, trois réformes doivent être immédiatement mises en œuvre. Il s’agit d’abord de réduire dès maintenant le poids de l’impôt sur le revenu acquitté par chaque contribuable en diminuant son montant de 5 %. Ensuite, il est impératif de diminuer la charge de TVA qui touche uniformément tous les Français quel que soit leur niveau de revenus. Cette diminution pourrait consister soit en une baisse ciblée du taux applicable au secteur de la restauration alimentaire, soit en la diminution immédiate d’un point du taux normal qui passerait de 20,6 à 19,6 % et nous rapprocherait de la moyenne de nos partenaires européens. Enfin, il faut continuer à oeuvrer en faveur de la baisse du coût du travail peu qualifié et notamment des charges sociales qui pèsent sur celui-ci en étendant le champ de la ristourne dégressive sur les bas salaires. Ainsi, la croissance retrouvée profitera à tous.

En contrepartie de cet effort significatif et durable de réduction du poids des prélèvements, il est urgent d’entreprendre une vraie limitation des dépenses publiques, qu’il s’agisse de celles de l’Etat ou du secteur social. Là aussi nous pouvons nous inspirer de l’exemple allemand : à niveau de développement équivalent et à structure économique comparable, les dépenses publiques représentent dans ce pays 46,9 % du PIB alors qu’elles s’élèvent à 54,5 % chez nous. Pour réduire cet écart, il faut avoir le courage de s’attaquer à la réforme des retraites publiques, le cas échéant en allongeant la durée de cotisation, mais également aux postes de dépenses les plus lourds : les rémunérations, les transferts sociaux et les charges d’emprunts. L’Etat qui est trop souvent un mauvais employeur comme l’a encore récemment rappelé la Cour des Comptes doit redéfinir ses structures et ses modes d’action : nous préconisons ainsi le non remplacement d’un départ à la retraite sur quatre afin de faire enfin décroître les effectifs publics et cela sans nuire à la qualité du service puisque, dans les 10 ans à venir près de la moitié des 1,6 million de fonctionnaires de l’Etat vont partir à la retraite. S’agissant des transferts sociaux, il convient de promouvoir une autre logique, celle de l’efficacité et du dynamisme aux dépens de l’assistanat et de l’immobilisme. Nous avons ainsi préconisé la mise en place d’un revenu minimum d’activité (RMA) qui viendrait se substituer à une large partie des prestations d’assistance et qui contribuerait à moyens budgétaires constants à la réduction du chômage structurel.

Réduisons les charges d’emprunts que nous acquittons chaque année en allant beaucoup plus vite dans la réduction de l’endettement public et donc des déficits pour dégager des marges de manoeuvre budgétaire nouvelles. Une telle politique suppose une réduction du champ de la sphère publique. La maîtrise des finances publiques ne se réduit pas à la gestion courante des recettes fiscales et à la reconduction des dépenses publiques mais nécessite aussi une approche patrimoniale. L’Etat doit se comporter en actionnaire intelligent : alors que sa dette est estimée à plus de 4 000 milliards de francs et coûte chaque année au contribuable 220 milliards de francs, la valeur de ses seules participations cotées représenterait près de 1.100 milliards de francs, soit plus du quart de son endettement. Il doit donc profiter des perspectives économiques et financières présentes pour réduire sa participation dans France Télécom, Air France, Thomson-CSF, Renault et dans toute une série d’autres sociétés. Il faut aussi transformer les statuts d’EDF ou de GDF et ouvrir largement leur capital. Les sommes obtenues sont à consacrer en premier lieu au remboursement de la dette et en second lieu, aux dépenses en capital de l’Etat dans ses domaines prioritaires d’action qu’il s’agisse des investissements civils ou du respect de la loi de programmation militaire.