L'interdiction du Bisphénol A dans les plastiques alimentaires :
une réponse manifestement excessive à des préoccupations légitimes

Réunie le 23 février sous la présidence de Muguette Dini (UC - Rhône), la commission des affaires sociales a suivi les conclusions de son rapporteur, Gérard Dériot (UMP - Allier), sur une proposition de loi déposée par Yvon Collin (RDSE - Tarn-et-Garonne) et plusieurs membres de son groupe tendant à interdire le Bisphénol A (BPA) dans les plastiques alimentaires.

Ce matériau, constituant de base du plastique de type polycarbonate, entre aussi dans la composition des résines époxydes. Ses utilisations sont extrêmement nombreuses depuis quarante ans : bouteilles, biberons, fûts, canettes, boîtes de conserve etc. Le BPA est également présent dans plusieurs autres produits industriels ou de consommation courante.

Bien qu'il soit commercialisé dans tous les pays occidentaux dans le respect des législations sanitaires en vigueur, des études scientifiques récentes, diverses et encore discutées, soulèvent la question de la pertinence de l'approche toxicologique classique pour apprécier l'innocuité de ce type de produit, qui fait partie de la famille des perturbateurs endocriniens. En effet, ces molécules, peu analysées jusque-là sur le moyen-long terme et à faible dose, sont assimilées par le corps à des hormones naturelles. Ceci explique que les bébés, dont le système hormonal est immature, y seraient particulièrement sensibles.

Pour ces motifs, et dans l'attente du résultat prochain de nouvelles expertises, la commission des affaires sociales ne s'est pas déclarée favorable à l'interdiction pure et simple du BPA mais elle demande au Gouvernement d'amplifier les mesures visant à diminuer l'exposition humaine aux perturbateurs endocriniens. En raison des sources multiples d'exposition, du nombre et de la nature des substances incriminées, il est en effet nécessaire de développer une politique globale, incluant notamment un dialogue avec les industriels et le développement de la recherche pour mieux évaluer les effets des produits et pour en trouver d'éventuels substituts, l'amélioration de l'étiquetage des produits de consommation courante et la communication d'informations au public sur les « bonnes pratiques » d'utilisation (publicités, site internet etc.).

Dans l'immédiat, des mesures temporaires pourraient être envisagées pour certains produits ciblés, identifiés comme présentant un risque potentiel : les biberons, par exemple, car ils sont susceptibles d'être chauffés.

L'application du principe de précaution est légitime mais doit constituer une réponse adaptée à un risque suffisamment documenté : la précipitation pourrait s'avérer de mauvais conseil si elle devait accélérer la mise sur le marché de molécules de substitution au Bisphénol A dont l'impact sur l'être humain aurait été trop peu évalué.

A l'issue de ses débats, la commission des affaires sociales a décidé de ne pas établir de texte pour la proposition de loi, procédure qui permet de faire porter le débat sur le texte initial tel que déposé par ses auteurs, lors de l'examen en séance publique prévu pour le mercredi 24 mars 2010.

Contact presse : Yvelise Lapasin 01.42.34.22.90   y.lapasin@senat.fr