Tempête Xynthia : pour assurer une gestion effective du risque de submersion marine, une proposition de loi met en oeuvre les recommandations de la mission sénatoriale d’information

MM. Bruno Retailleau (Vendée – NI) et Alain Anziani (Gironde –SOC), qui ont été respectivement président et rapporteur de la mission sénatoriale d’information sur les conséquences de la tempête Xynthia, ont présenté, mercredi 15 décembre 2010, une proposition de loi « tendant à assurer une gestion effective du risque de submersion marine ». Cette proposition de loi formalise les recommandations de la mission sénatoriale d’information qui sont de nature législative. Elle est cosignée par les sénateurs qui ont été membres de cette mission d’information.

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Le 28 février dernier, le littoral atlantique a été durement frappé par la tempête Xynthia, qui a touché particulièrement les départements de Vendée et de Charente-Maritime. Deux mois plus tard, la Côte d’Azur a subi à son tour un épisode inquiétant, avant que des inondations ne fassent 25 victimes dans le département du Var. Notre pays est ainsi de plus en plus fréquemment confronté à des phénomènes météorologiques extrêmes qui provoquent de nombreuses inondations ou submersions marines.

Pour comprendre ce qui s’est passé et s’assurer que de tels drames ne se reproduisent plus, le Sénat a décidé dès le 31 mars 2010, la création d’une mission commune d’information du Sénat sur les conséquences de la tempête Xynthia. A l’issue de trois mois d’investigations, la mission sénatoriale d’information a rendu public, le 8 juillet, son rapport final intitulé « Xynthia : Une culture du risque pour éviter de nouveaux drames».

Dans ce rapport, les membres de la mission ont souhaité mettre en avant la mobilisation rapide des services de l’Etat. Cette rapidité a été positive lorsqu’il s’est agi de mettre en place une indemnisation efficace des victimes. En revanche, comme la mission sénatoriale l’a souligné à la fois lors de son déplacement en Vendée et en Charente-Maritime et dans son rapport, cette rapidité a été synonyme de précipitation lorsqu’il s’est agi de délimiter les périmètres des zones de solidarité.

Mais surtout, la mission sénatoriale d’information a formulé un constat sans appel : si la tempête Xynthia était inévitable, le drame qu’elle a provoqué aurait pu, lui, être évité. La mission a pointé une responsabilité largement collective :
- la France est mal préparée aux risques de submersion marine,
- la culture du risque est dans notre pays quasi-inexistante.  

Pour la mission, une véritable révolution des mentalités et des pratiques s’impose. La France sera de nouveau soumise à des phénomènes de submersion marine. Elle doit s’y préparer en anticipant mieux l’existence de ce risque.

Cette révolution est d’autant plus nécessaire que des enjeux considérables existent sur le littoral. Dans ce contexte, la mission d’information a dégagé 92 propositions pour l’avenir afin non seulement d’adopter une approche globale de la gestion de l’espace littoral soumis à un risque de submersion marine, mais également de faire émerger dans notre pays une véritable culture du risque.

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La proposition de loi permet de donner une traduction concrète à celles de ces propositions qui relèvent de la loi.

1/ En premier lieu, la proposition de loi veut promouvoir une approche globale du risque de submersion marine (chapitre Ier)

A cette fin, la proposition de loi prévoit trois innovations :

Tout d’abord, elle crée une nouvelle catégorie de plans de prévention des risques naturels (PPRN), les « plans de prévention des risques de submersion marine » (PPRS) dont le contenu sera adapté à la spécificité de ce risque.

Ensuite, elle ajoute au chapitre du code de l’environnement consacré à la prévision des crues, un mécanisme de prévision des submersions marines. Cela permettra non seulement d’adapter la notion de bassin hydrographique aux spécificités du littoral en créant les « zones littorales homogènes » mais également de faciliter les opérations de recensement des zones à risques en créant pour chaque zone littorale homogène un schéma directeur de prévision des submersions marines.

Enfin, le contenu des plans de gestion des risques d’inondation sera complété. Ces documents, véritables pivots de la gestion des risques d’inondation, seront dotés d’un volet stratégique sur le littoral. Pour ce faire, la proposition de loi leur confie non seulement un rôle d’évaluation de l’ensemble des mesures de gestion du risque mais également un pouvoir d’injonction en cas de défaillance constatée lors de l’évaluation.

2/ La proposition de loi garantit la mise en place d’un droit des sols adapté au risque de submersion marine (chapitre II)

Pour permettre une meilleure prise en compte des risques naturels par le code de l’urbanisme, elle prévoit que, parmi les buts généraux poursuivis par les documents locaux d’urbanisme, un objectif de prévention des risques naturels et de protection des vies humaines face à ces mêmes risques devra être intégré.

En conséquence, et afin d’assurer une plus grande cohérence entre documents d’urbanisme et plans de prévention, elle propose que les plans de prévention des risques naturels (PPRN) soient désormais pleinement et directement opposables aux documents locaux d’urbanisme. De la même manière, le « porter à connaissance » dévolue au préfet sera renforcé : ce dernier devra à l’avenir communiquer aux maires, chaque année, une synthèse sur les risques naturels auxquels leur commune est exposée.

Cette réforme permettra de promouvoir une vision proactive et partenariale de la gestion des risques naturels, qui doivent faire l’objet d’une coopération entre l’État et les élus locaux.

3/ La proposition de loi améliore la gestion des digues et de la défense contre la mer  (chapitre III)

Elle clarifie le régime de propriété des digues. Elle envisage à cette fin un transfert de propriété aux collectivités territoriales, ce qui permettra de mieux déterminer les responsabilités.

De plus, pour offrir une meilleure lisibilité aux décideurs publics, elle prévoit, comme c’est le cas aux Pays-Bas, un rapport d’évaluation sur les ouvrages de défense contre la mer tous les six ans, qui serve de base aux plans d'investissements.

En outre, la proposition de loi confie au comité technique permanent des barrages et ouvrages hydrauliques le soin d'élaborer les prescriptions nécessaires à la construction et à l'entretien des digues.

Enfin, pour financer les ouvrages de protection contre les risques naturels majeurs, et notamment les ouvrages de protection contre la mer, elle prévoit de porter de  5 % à 20 % le taux maximal de la taxe locale d’équipement.

4/ Les systèmes d’alerte, la préparation de la population au risque et l’organisation des secours seront renforcés et adaptés à la nature du risque (chapitre IV)

Pour assurer une meilleure préparation de la population, la proposition de loi rend obligatoire l’adoption par une commune d’un plan communal de sauvegarde (PCS) dès lors que la réalisation d’un plan de prévention du risque (PPR) lui a été prescrite.

Elle crée une journée nationale de la prévention des risques naturels afin de mieux sensibiliser la population aux risques naturels prévisibles.

Enfin, pour assurer une meilleure coordination des secours, elle prévoit d’imposer aux opérateurs de téléphonie mobile l’accès non seulement gratuit mais également prioritaire aux services d’urgence.

5/ La proposition de loi met en place des régimes d’indemnisation juste et efficace qui sont indispensables pour assurer la réparation des dommages causés par une submersion marine (chapitre V)

Elle institue une compensation des pertes de recettes fiscales induites pour les collectivités territoriales touchées par la démolition des maisons situées en zone d’acquisition amiable ». Elle précise que la faculté offerte à l’Etat de procéder au versement d’avances au profit du fonds « Barnier » vise en particulier à faire face aux cas de financement de dépenses exceptionnelles. Les opérations d’envergure de rachat de logements dans des zones soumises à un risque naturel grave rentreront dans ce cadre.

La proposition de loi renforce également le financement du fonds « Barnier » en portant de 12 à 14% le taux du prélèvement sur le produit des primes et cotisations additionnelles relatives à la garantie contre le risque de catastrophes naturelles qui finance ce fonds. Afin de renforcer les politiques de prévention elle rend possible la modulation des primes et des cotisations additionnelles relatives à la garantie contre le risque de catastrophes naturelles.

6/ La gestion du risque de submersion marine devra être conçue en lien avec la préoccupation d’aménagement et le développement des zones littorales (chapitre VI)

A cette fin, la proposition de loi crée un schéma d’aménagement des zones littorales à risque permettant de mettre en place une distribution spatiale des activités, adaptée au risque de submersion marine. Le droit de préemption « espace naturel sensible » et le droit de préemption « protection et mise en valeur des espaces agricoles et naturels périurbains » pourront être utilisés en vue de réduire l’exposition des populations aux risques naturels.

Contact presse : Ali Si Mohamed    01 42 34 25 11   a.si-mohamed@senat.fr

Texte de la proposition de loi : http://www.senat.fr/leg/ppl10-173.html ou http://www.senat.fr/leg/ppl10-172.html