Réunie le 16 avril 2015, sous la présidence de Michèle ANDRÉ (Soc - Puy-de-Dôme), la commission des finances du Sénat a entendu une communication de son rapporteur général, Albéric de MONTGOLFIER (UMP - Eure-et-Loir), sur le projet de programme de stabilité pour les années 2015 à 2018.

Albéric de MONTGOLFIER a relevé que :

  • Le programme de stabilité repose sur un scénario macroéconomique jugé prudent par le Haut Conseil des finances publiques, mais l’autre variable essentielle de la programmation, l’évolution des dépenses publiques en volume, repose sur des hypothèses ambitieuses, notamment au regard de l’exécution des derniers exercices.
  • Par rapport à la loi de programmation des finances publiques de décembre 2014, la variation du déficit effectif figurant dans le programme de stabilité est revue à la baisse (2,1 points de PIB contre 2,7 points de PIB) sur la période 2014-2018.
  • En revanche, par rapport à la programmation votée en décembre 2014, l’ajustement structurel serait plus important sur la période (2 points de PIB contre 1,6). Cependant, ce résultat est obtenu grâce à une modification de l’hypothèse de croissance potentielle qui permet de majorer l’ajustement structurel de 0,4 point de PIB sur la période, et, ainsi, d’atteindre le minimum requis par les traités pour les pays en situation de déficit excessif, tout en restant éloigné des recommandations du Conseil européen du 10 avril dernier.
  • Cette révision des hypothèses de croissance potentielle n’est pas conforme à l’esprit de la loi organique du 17 décembre 2012 selon lequel les lois de programmation des finances publiques devaient fixer le niveau de la croissance potentielle retenu dans l’ensemble des documents budgétaires pendant les deux années à venir, afin de permettre d’apprécier dans le temps la réalité des efforts réalisés. Avec ce programme de stabilité, le Gouvernement "casse le thermomètre" sans fournir aucun élément permettant de justifier une révision des hypothèses de croissance potentielle entre le mois de décembre 2014 et aujourd’hui.
  • Les différents engagements du Gouvernement ne sont pas cohérents entre eux : d’une part, le quantum d’économies annoncé par le Gouvernement – 50 milliards d’euros – demeure invariable alors même qu’il annonce des mesures nouvelles coûteuses et que les autorités européennes demandent des économies supplémentaires ; d’autre part, le Gouvernement s’engage, dans le programme de stabilité, à prendre les mesures complémentaires nécessaires pour atteindre les objectifs prévus par la trajectoire de solde effectif, le cas échéant. Cet engagement demeure, néanmoins, incertain compte tenu des reports obtenus à deux reprises pour atteindre le seuil de 3 % de déficit public.
  • Si le Gouvernement estime que sa trajectoire "offre une marge de sécurité" par rapport aux cibles de déficit nominal, elle reste fragile :
    • toutes choses égales par ailleurs, si l’évolution des dépenses publiques en volume restait jusqu’en 2018 à son niveau de 2014 (1,1 %), le déficit effectif ne reviendrait pas sous le seuil de 3 % pendant la période de programmation. Si l’évolution des dépenses sur la période était de 0,7 % par an en moyenne au lieu de 0,5 % prévu par le Gouvernement, le déficit ne reviendrait sous le seuil de 3 % qu’en 2018 ;
    • si la croissance du PIB était inférieure de 0,5 point aux hypothèses retenues par le Gouvernement pour chacune des années de la programmation, le déficit ne reviendrait au seuil de 3 % qu’en 2018 (la dette publique atteignant alors 99,7 % du PIB).

La crédibilité de la programmation du Gouvernement au regard des engagements pris vis-à-vis de nos partenaires européens reste incertaine, compte tenu notamment de son choix de réduire les efforts à accomplir, dès lors que la conjoncture se révèle plus favorable, et de les majorer artificiellement, en révisant la croissance potentielle qui détermine leur mesure. En outre, sur les 50 milliards d’euros d’économies annoncés, seuls 25 milliards d’euros ont été jugés suffisamment documentés par la Commission européenne, soulignant les efforts qui restent à consentir pour "matérialiser" ses annonces concernant la maîtrise des dépenses publiques.

Maria PIGHINI
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