La mission d’information sur la position de la France à l’égard de l’accord de mars 2016 entre l'Union européenne et la Turquie relatif à la crise des réfugiés et sur les conditions de mise en œuvre de cet accord, présidée par M. Jacques Legendre (Les Républicains - Nord), publie aujourd’hui le rapport de M. Michel Billout (Communiste, Républicain et Citoyen - Seine-et-Marne), intitulé : "Accord UE-Turquie du 18 mars 2016 : une réponse fragile, ambiguë et partielle à la question migratoire", adopté à l’unanimité le 12 octobre dernier.

Confrontée depuis plusieurs mois à un flux migratoire massif en Méditerranée orientale et à la difficulté d’y répondre, l’UE a conclu dans l’urgence, le 18 mars 2016, un accord avec la Turquie. La signature de cet accord a suscité polémiques et inquiétudes, liées notamment au rôle déterminant joué par l’Allemagne dans les négociations, à la crainte d’une remise en cause du droit d’asile et aux concessions faites à une Turquie en position de force.

Au terme de ses travaux, qui lui ont permis de clarifier un certain nombre de points, la mission reconnaît que l’accord, si imparfait soit-il, était nécessaire, compte tenu de la crise humanitaire en Grèce. Le rapport constate qu’il produit des effets en termes de flux et souligne également l’amélioration de la situation des réfugiés à laquelle il contribue grâce au versement de l’aide financière.

Il n’en relève pas moins sa très grande fragilité, du fait notamment de la paralysie du dispositif de renvoi et des difficultés qui en découlent dans les hotspots grecs, où séjournent désormais, dans l’attente du traitement de leur demande d’asile, plus de 15 000 migrants dans des conditions humanitaires difficiles. Il est urgent d’obtenir un déblocage de la situation, notamment par l’envoi de renforts au Bureau européen d’appui en matière d’asile. Le risque d’une reprise des arrivées n’est, en outre, pas totalement écarté, du fait de la persistance de l’activité des réseaux de trafiquants et des menaces récurrentes de la Turquie de réactiver les traversées. Il importe donc, pour consolider l’accord, de renforcer la protection des frontières, avec l’aide de Frontex.

Le rapport met également l’accent sur un certain nombre d’insuffisances et de zones d’ombres : le nombre encore trop faible des réinstallations (1 614 sur 72 000 envisagées), l’absence de certitudes sur l’effectivité de la protection internationale en Turquie, la situation humanitaire difficile des migrants arrivés en Grèce avant l’entrée en vigueur de l’accord, mais aussi la fermeture de la frontière turco-syrienne alors que la situation au Levant laisse craindre de nouveaux mouvements de populations, ou encore les recours engagés contre la légalité de l’accord.

Revenant sur les "contreparties politiques" que sont la libéralisation des visas et la relance des négociations d’adhésion, il estime que l’application de l’accord ne doit pas conduire à assouplir les conditions initialement posées à la mise en œuvre de ces processus politiques et plaide pour leur dissociation. Il préconise en revanche de mettre en œuvre sans tarder nos engagements sur les volets de l’accord strictement liés à la question des réfugiés, en accélérant le versement de l’aide financière et en procédant rapidement aux réinstallations promises.

Enfin, le rapport recommande de renforcer le soutien à la Grèce, notamment par la mise en œuvre des relocalisations, le déploiement de l’aide humanitaire et la prise en compte dans les négociations sur sa dette de sa difficile situation humanitaire.

Pour consulter l’intégralité du rapport : http://www.senat.fr/notice-rapport/2016/r16-038-notice.html

Mathilde Dubourg
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