La commission des affaires européennes du Sénat, présidée par M. Jean Bizet (Manche - Les Républicains), a adopté une proposition de résolution européenne, déposée par Mme Gisèle Jourda (Aude - Socialiste et républicain) et portant sur l’accès aux Indemnités Compensatoires de Handicaps Naturels (ICHN).

Sur le rapport de Mme Gisèle Jourda et de M. Michel Raison (Haute-Saône - Les Républicains), cette résolution demande, en premier lieu, une renégociation des critères d’éligibilité des Zones soumises à contraintes naturelles (ZSCN), de façon à "ajouter des critères obligatoires aux huit critères biophysiques existants".

Le Sénat sollicite, dès maintenant, la validation par la Commission européenne du critère de continuité territoriale pour la définition du périmètre des Zones soumises à contraintes spécifiques (ZSCS). L’objectif recherché consiste à intégrer "des territoires plus étendus et non uniquement des communes isolées dans le zonage à contrainte spécifique".

En effet, les négociations, aujourd’hui en voie de finalisation, entre la Commission européenne et la France sur les nouveaux périmètres des zones dites à contraintes "naturelles" ou "spécifiques" pourraient se traduire par de nombreuses et douloureuses modifications, un peu partout sur le territoire national. Certes, le nombre des communes "classées", pour l’ensemble de notre pays, passerait de 10 429 à 14 133, soit un solde positif de 3 704, car il y aurait 5 045 "entrées" et 1 341 "sorties".

Pour autant, au regard de ce constat général en apparence satisfaisant, deux conclusions s’imposent. En premier lieu, même pour les territoires gagnants, le risque de "saupoudrage" budgétaire ne peut être ignoré, puisque l’enveloppe globale est inchangée. En second lieu, et surtout, il y aurait beaucoup de territoires perdants, avec des conséquences très dures sur le plan économique, social et humain : sans ICHN, les agriculteurs des 1 341 communes privées du dispositif risqueraient bel et bien de ne pas pouvoir poursuivre longtemps leur activité. Au-delà du secteur agricole, il en va, plus largement, de l’aménagement du territoire et de la préservation du tissu économique dans de vastes espaces ruraux, en particulier dans les zones de piémont.

L’ICHN constitue un dispositif clé de la Politique agricole commune (PAC), permettant de compenser les surcoûts liés aux difficultés d’exploitation dans les zones défavorisées. L’aide budgétaire ainsi apportée aux agriculteurs français est financée à hauteur de, respectivement, 75 % par l’Union européenne et 25 % par la France. Au total, elle s’élève à un milliard d’euros par an.

La réforme de l’ICHN vient s’ajouter aux récentes annonces de la Commission européenne proposant, tout à la fois, une diminution de 5 % en euros courants du budget de la PAC 2021/2027, à laquelle s’ajouteront les effets non compensés de l’inflation, ainsi que la poursuite du processus de convergence des paiements directs entre les États membres, mettant mécaniquement la France à contribution.

Dans ce contexte, la perspective de la "sortie" du périmètre de l’ICHN de 1 341 communes représente la mesure de "trop" pour l’agriculture française : cette décision mérite d’être reconsidérée.

Tina MIQUEL
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