M. le président. Je suis saisi, par M. Metzinger et les membres du groupe socialiste et apparentés, d'une motion n° 5, tendant à opposer la question préalable.
Cette motion est ainsi rédigée :
« En application de l'article 44, alinéa 3, du règlement, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération du projet de loi organique, adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, relatif aux lois de financement de la sécurité sociale (n° 433, 1995-1996). »
Je rappelle que, en application du dernier alinéa de l'article 44 du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l'auteur de l'initiative ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d'opinion contraire, pour quinze minutes, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.
La parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n'excédant pas cinq minutes, à un représentant de chaque groupe.
La parole est à M. Metzinger, auteur de la motion.
M. Charles Metzinger. Monsieur le ministre, de qui se moque-t-on ? Vous parlez de renforcer les pouvoirs du Parlement. Or, au moment où nous discutons en deuxième lecture d'un texte important, le ministre du travail et des affaires sociales n'est pas présent et le secrétaire d'Etat à la santé et à la sécurité sociale a quitté l'hémicycle avant même d'avoir pu entendre tous les membres de l'opposition !
M. Emmanuel Hamel. M. Romani est le plus éminent des ministres et les représente tous !
M. Charles Metzinger. De qui vous moquez-vous quand vous dites que vous attendez une seule de nos propositions ? Tous les amendements qui ont été déposés par les membres du groupe socialiste comme par ceux du groupe communiste républicain et citoyen ont été repoussés. Alors n'affirmez pas que nous n'avons pas fait de propositions ! C'est inacceptable ! (M. Mélenchon applaudit.)
De toute manière, faut-il encore délibérer puisque tout est décidé ?
Il est extraordinaire de lire dans une publication de ce jour, intitulée Liaisons sociales, que « les députés de la majorité se sont rangés à la position du Sénat sur le calendrier d'examen à l'automne des projets de loi de financement » - avant même que le Sénat ait fait connaître sa position en deuxième lecture ! - et ce au cours d'une réunion, M. Pagès l'a déjà signalé, qui a eu lieu le 18 juin dernier, à l'hôtel Matignon, autour du Premier ministre. De qui se moque-t-on ?
M. Jean-Luc Mélenchon. C'est le Gouvernement hôtelier !
M. Charles Metzinger. Mes chers collègues, il n'y a donc pas de raison que nous délibérions encore puisque tout a été décidé à Matignon !
Mais nous allons faire comme si l'Assemblée nationale n'était pas manipulée, car nous sommes respectueux des pouvoirs du Parlement. Nous proposons donc d'opposer à ce projet la question préalable, motion de procédure réglementaire, et nous allons argumenter, comme cela se doit.
Nous ne sommes pas, monsieur le ministre, opposés à une réforme de la sécurité sociale ; nous sommes opposés à votre réforme, qui n'est pas bonne dans l'ensemble.
M. Jean-Luc Mélenchon. Exactement !
M. Charles Metzinger. D'ailleurs, 51 p. 100 des Français la jugent inefficace.
M. Emmanuel Hamel. Ils sont mal informés !
M. Jean-Luc Mélenchon. Ils voient clair !
M. Charles Metzinger. Avec le déficit fleuve de 1996, pour rééquilibrer les comptes de la sécurité sociale, il faudra de nouvelles mesures.
Jusqu'à présent, le Parlement a délibéré pour renforcer les pouvoirs du Gouvernement afin de lui permettre de gouverner en la matière par ordonnances.
Le Gouvernement compte sur le Parlement pour proposer, à travers la loi de financement, le rééquilibrage des comptes de la sécurité sociale. Il n'a pas accepté qu'au préalable le Parlement définisse les objectifs de la sécurité sociale découlant des objectifs d'une politique sanitaire à mener.
Nous n'avons pas accepté la contribution au remboursement de la dette sociale, ou RDS ; nous n'avons pas voulu accorder des pouvoirs exorbitants au Gouvernement ; nous n'avons pas approuvé la réforme constitutionnelle, car nous doutions d'emblée que le renforcement des pouvoirs parlementaires mis en perspective aurait lieu et nous craignions dans le même temps l'affaiblissement de la démocratie sociale.
Nous n'avons pas adopté en première lecture un projet de loi organique qui, visiblement, met en place un carcan empêchant le Parlement de discuter dans de bonnes conditions des lois de financement.
M. Jean-Luc Mélenchon. Bien sûr !
M. Charles Metzinger. Votre réforme fait encore la une des journaux, elle n'a pas pris. « La sécurité sociale renoue avec son déficit chronique », « Le plan Juppé s'avère insuffisant », « La sécurité sociale sombre à nouveau, faute de recettes ». Voilà quelques-uns des gros titres de ces derniers jours, et j'en passe.
En revanche, je ne puis passer sous silence la réponse que M. Gaymard a faite le 25 avril dernier à ma question d'actualité, à l'occasion de laquelle je m'inquiétais de savoir si le déficit prévisible de la sécurité sociale pour 1996 serait de 46 milliards de francs. M. Gaymard affirmait alors : « Les chiffres qui circulent ici ou là n'ont rien de scientifique ; ils sont, la plupart du temps, fantaisistes ou résultent d'extrapolations. »
M. Jean-Luc Mélenchon. Ah !
M. Charles Metzinger. Merci pour la commission des comptes de la sécurité sociale ! Elle a sans doute apprécié, comme j'ai apprécié moi-même le jugement que M. le ministre porte sur ces prévisions, qui, elles, en tout état de cause, étaient bonnes, contrairement à celles de M. le Premier ministre. Alors qu'il prévoyait 17 milliards de francs de déficit, presque trois fois plus ont été réalisés : 48,6 millards de francs, dont 32,3 milliards de francs pour la branche maladie, 11,4 milliards de francs pour la branche famille, et ce malgré une non-revalorisation des allocations familiales pour 1996.
En réalité, c'est parce que le Gouvernement, au moment où il annonçait son plan de réforme, refusait de tenir compte du ralentissement de l'activité économique que la prévision a été fausse.
Si le projet de loi organique est adopté, le Parlement devra, à l'automne, prévoir les mesures nécessaires pour ramener les comptes de la sécurité sociale à l'équilibre financier. Le déficit record de 48,6 milliards de francs en 1996, proche des déficits des années précédentes, ne pourra pas être effacé.
Curieusement, le Gouvernement a demandé que la commission des comptes s'abstienne de tout pronostic pour 1997. Pourquoi cette recommandation ?
M. Jean-Luc Mélenchon. Bien sûr !
M. Charles Metzinger. Tout le monde sait, depuis, que les experts du ministère des affaires sociales avaient transmis à ladite commission des éléments qui laissaient penser qu'en 1997 le déficit serait encore, et au moins, de 35 milliards de francs.
Le taux de progression imposé aux dépenses des médecins libéraux et des hôpitaux publics, soit 2,1 p. 100, ne sera pas tenu. Il risque fort de dépasser la barre des 3 p. 100, ne vous en déplaise, monsieur le ministre.
Actuellement, pour 1996, nous en sommes à un taux de progression de 7,5 p. 100 pour les honoraires et de 6,1 p. 100 pour le médicament.
L'addition de tous ces facteurs aura le résultat suivant : au lieu de 48,6 milliards de francs, le déficit atteindra sans doute les 60 milliards de francs, élevant toujours plus la dette sociale totale jusqu'à la crête des 300 milliards de francs.
Si vous nous dites que ce dérapage est essentiellement dû au fait qu'il correspond à une partie de l'année où les ordonnances n'étaient pas encore publiées, je répondrai que vous tardez à prendre la plupart des décrets d'application des ordonnances. Combien en manque-t-il ? Quelques dizaines ? Qu'en sera-t-il des sanctions financières ? Qu'attendez-vous pour agir ?
Vous avez obtenu, contre la volonté de l'opposition au Parlement, la liberté de recourir aux ordonnances. Le soutien de votre majorité, en l'occurrence, n'a rien apporté au pays : les Français souffrent de devoir contribuer au RDS, craignent de nouveaux dérapages, redoutent votre cotisation maladie universelle. L'allongement de la période de remboursement de la dette sociale de treize ans à quinze ans - à plus, même, éventuellement est une perspective redoutable.
Et vous avez fait accroire au Parlement que, désormais, en vertu de fallacieux nouveaux pouvoirs que lui confère la Constitution en la matière, les problèmes se régleraient plus facilement.
Le Sénat a affirmé, à propos de l'article L.O. 113-1, que le Parlement déterminait les conditions générales de l'équilibre financier de la sécurité sociale en fixant des choix et des orientations de santé. C'était, à mon sens, encore imparfait.
L'Assemblée nationale nous renvoie à un texte qui résulte d'ailleurs d'un amendement gouvernemental et dans lequel on se contente de dire que le Parlement « approuve les orientations de la politique de santé et de sécurité sociale ».
Dans ces conditions, le Parlement ne gagne pas en pouvoirs : il en donne davantage à l'Etat, puisque c'est le Gouvernement qui présente le rapport à approuver !
Nos collègues de l'Assemblée nationale me semblent bien optimistes lorsqu'ils considèrent qu'à l'occasion du vote sur ce rapport ils pourront opérer des choix et déterminer des orientations ! En tout état de cause, dans notre esprit, avant d'aborder la loi de financement, il faut définir et déterminer la politique de santé et de sécurité sociale que le Parlement souhaite pour le pays. Le Sénat, encore plus que l'Assemblée nationale - je regrette de devoir le constater - donne à la loi de financement une tournure trop comptable.
Dans son rapport à l'occasion de la première lecture, M. le rapporteur a rappelé les propos que M. Barrot a tenus, le 25 avril dernier à l'appui de cet amendement gouvernemental, à savoir que « les lois de financement doivent approuver l'explication des politiques qui est donnée dans le rapport du Gouvernement ». Et il craignait alors que, dans cette optique, le Gouvernement se contente de déposer un projet de loi de financement constitué d'un article unique rédigé de la sorte : « Le rapport annexé à la présente loi est approuvé ».
« La commission des lois ne saurait souscrire à une condition aussi restrictive », avait ajouté M. le rapporteur. Apparemment, cette crainte a disparu. C'est dommage !
Par ailleurs, l'Assemblée nationale reprend l'article L.O. 111-6 tel qu'elle l'avait rédigé en première lecture, sans tenir compte du dilemme exprimé par les sénateurs qui ne voient pas comment aborder dans des conditions convenables l'étude de la loi de financement. Cela prouve que M. le ministre n'a pas réussi à persuader sa majorité à l'Assemblée nationale du bien-fondé de la crainte des sénateurs en ce qui concerne le calendrier imposé !
C'est à Matignon, avant-hier, que l'accord aura été trouvé, loin du Parlement et en dehors de toute procédure réglementaire. Et vive les pouvoirs du Parlement, monsieur le ministre !
Rien que ces deux constats suffiraient à justifier notre question préalable : il n'y a vraiment pas lieu de délibérer sur un texte qui fait si peu de cas des droits du Parlement.
Mais, en plus de ces considérations, nous le redisons : changez de politique économique ! Vous avez tout fait pour gripper la machine de la consommation ; vous continuez à alourdir la dette publique. Fin 1995, estimée à 4 000 milliards par des experts, elle sera de 5 400 milliards en 1998 au rythme où vous allez.
Monsieur le ministre, dans ces conditions, le Gouvernement est censurable.
M. Jean-Luc Mélenchon. C'est exact !
M. Charles Metzinger. Ce n'est pas au Sénat que cela peut se faire institutionnellement, mais la Haute Assemblée peut donner des signaux de profond mécontentement en écho au désarroi de nos compatriotes en refusant de délibérer de ce projet de loi organique.
Vous n'avez pas réduit le déficit comme vous l'avez promis, vous avez alourdi les prélèvements en créant le RDS.
Les ordonnances n'ont pas eu les effets annoncés, mais votre maîtrise des dépenses s'avère bien comptable.
La démocratie politique n'a pas vraiment de pouvoir de contrôle accru, mais l'Etat, à coup sûr, se voit renforcé dans ses prérogatives et, en même temps, la démocratie sociale est affaiblie.
Non, vous n'êtes pas le sauveur de la sécurité sociale. Il ne suffit pas de dire que, « en l'absence » du plan Juppé, le déficit pour 1996 aurait encore été plus fort. Ces affirmations sont des conjectures.
Malgré des taux de croissance économique de 2,6 p. 100, 2,1 p. 100 et 1,3 p. 100, vous n'avez obtenu que des résultats catastrophiques depuis 1994 alors que les gouvernements socialistes avaient réussi à limiter le déficit de la sécurité sociale à 15 milliards de francs en 1991 et 1992 avec une croissance qui n'était que de 0,8 p. 100 et de 1 p. 100.
M. Jean-Luc Mélenchon. Et voilà !
M. Charles Metzinger. Le déterminant principal des recettes à propos duquel vous vous êtes leurrés et avez essayé de leurrer tout le monde, la masse salariale, a progressé non pas de 5,3 p. 100, comme vous l'aviez prévu voilà huit mois, mais de 2,4 p. 100 à peine.
Empêchez les licenciements, faites progresser la masse salariale, augmentez le pouvoir d'achat, alors la consommation redémarrera et la machine économique reprendra du souffle ! En effet 52 p. 100 des Français souhaitent une relance de la consommation. Pourtant, vous continuez à pratiquer une politique économique libérale anglo-saxonne enragée, nuisible surtout aux salariés.
Il n'y a pas lieu de vous approuver, il n'y a pas lieu de délibérer ce projet de loi organique, d'autant que tout se règle, apparemment, à l'Hôtel Matignon et non au Parlement.
C'est le sens de la question préalable que j'ai opposée et que je défends au nom du groupe socialiste. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. Y a-t-il un orateur contre la motion ?
Quel est l'avis de la commission ?
M. Patrice Gélard, rapporteur. La présentation faite par notre excellent collègue M. Metzinger va exactement à l'encontre de ce qu'il voudrait démontrer, puisqu'il vient d'engager le débat sur la loi de financement de la sécurité sociale avec quelques mois d'avance,...
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. Tout à fait !
M. Patrice Gélard, rapporteur. ... faisant ainsi la démonstration de l'utilité de cette loi de financement.
Au demeurant, comme la Constitution nous fait l'obligation d'en débattre, je vous propose, mes chers collègues, de rejeter la question préalable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, M. Metzinger nous avait habitués à une meilleure connaissance de sa part des procédures parlementaires.
M. Emmanuel Hamel. Il ne l'a pas perdue, il peut se tromper !
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. Il vient de critiquer ma présence à ce banc en regrettant que ni le ministre des affaires sociales ni le secrétaire d'Etat à la santé ne soient présents.
Je voudrais simplement vous faire observer, monsieur le sénateur, qu'actuellement le Sénat examine un projet de loi organique, texte de procédure qui, selon les termes de la Constitution, doit organiser les conditions dans lesquelles le Parlement vote les projets de loi de financement de la sécurité sociale.
M. Jean-Luc Mélenchon. C'est mesquin !
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. Non, monsieur Mélenchon, ce qui est mesquin - et c'est la première fois que j'entends cela dans cette enceinte, où l'on a le respect de certaines convenances - c'est de reprocher la présence ou l'absence de tel ou tel ministre.
Au demeurant, monsieur Mélenchon, je tiens à dire qu'au même titre que mes deux collègues je suis très concerné par ce projet de loi, car le ministre des relations avec le Parlement est tout à fait compétent en matière de procédure parlementaire. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. Emmanuel Hamel. Votre compétence est inégalable, monsieur le ministre ! (Sourires.)
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. Pour ce qui est de la question préalable, ou plutôt de ce qui est apparu au début comme une question préalable mais dont la discussion ensuite, comme l'a dit excellement M. le rapporteur, a pris le tour d'une discussion générale sur la prochaine loi de financement de la sécurité sociale, je dirai qu'elle est tout à fait inopportune dans la mesure où son adoption différerait la possibilité pour le Parlement d'intervenir dans la gestion et dans la régulation de notre régime de protection sociale.
Vous le savez, monsieur Metzinger, mais je le répète, cette réforme a pour objet d'impliquer et de responsabiliser chacun des acteurs, et le Parlement a un rôle important à jouer en la matière.
Je rappelle donc encore une fois que la loi organique vise à mettre en oeuvre la réforme constitutionnelle que les assemblées, réunies solennellement en Congrès, ont votée le 19 février 1996, et qu'il s'agit donc tout simplement d'appliquer la Constitution.
Je ne vais pas me lancer dans une polémique, ni répondre à ce que M. Metzinger a affirmé sur l'évolution des comptes sociaux et de la dette publique.
Toutefois, monsieur Metzinger, je dirai que, malgré votre talent, qui est grand, pendant au moins une décennie, les socialistes ont tellement alourdi la dette publique de notre pays - nous pourrions quasiment l'appeler la dette socialiste - (Protestations sur les travées socialistes.) que vous ne convaincrez personne !
M. Jean-Luc Mélenchon. Oh si !
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. Nous payons les dettes que les socialistes ont contractées. (Nouvelles protestations sur les mêmes travées.)
Utilisez donc n'importe quel argument, monsieur Metzinger, mais, je vous en prie, n'évoquez pas la dette publique, car vous et vos amis êtes responsables de l'ampleur des déficits publics. M. le Premier ministre en a rappelé hier, à juste titre, l'importance année après année ! Alors, ayez un peu de délicatesse - je ne dirai pas de décence - et n'évoquez pas certaines maladies qui sont chroniques chez les socialistes, qui font même partie de leur nature et qui, chaque fois qu'ils ont été au gouvernement,...
M. Jean-Luc Mélenchon. C'est odieux !
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. ... les ont toujours atteints, je veux parler de l'alourdissement de la dette publique et de l'alourdissement du déficit public. (Les protestations s'amplifient sur les travées socialistes.)
Je voulais quand même remettre les choses en place ! (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. Je vais mettre aux voix la motion n° 5.
M. Jean-Luc Mélenchon. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Mélenchon.
M. Jean-Luc Mélenchon. Monsieur le ministre, nous vous avons connu plus convaincant, et nous avons toujours apprécié vos qualités de débatteur. Or ce que vous venez de dire sur les déficits ne peut tenir que dans une salle mal informée, mais pas au Parlement.
Sous le gouvernement Balladur, vous avez augmenté le déficit et la dette publique de 1 000 milliards de francs, soit, en l'espace d'un an, le total des déficits enregistrés pendant les quatre années précédentes, alors que nous avions connu, nous, la dépression.
M. Emmanuel Hamel. Delors a fait plus !
M. Jean-Luc Mélenchon. Aujourd'hui, c'est 1 milliard de francs par jour !
En ce qui concerne la sécurité sociale, vous n'êtes pas fondé à nous mettre au défi car, lorsque nous étions aux affaires, la moyenne des déficits courants était de 1 p. 100 par an. Vous en êtes à 4 p. 100 !
Depuis votre retour en 1993, le déficit a été multiplié par quatre pour l'ensemble du système et par six pour l'assurance maladie.
En outre, pour la première fois en 1995, et sous votre responsabilité, la branche familles est passée dans le « rouge », avec 13 milliards de francs de déficit.
Ces chiffres font justice de l'arrogance avec laquelle vous vous réfugiez derrière des arguments de tribune pour masquer le sérieux et la difficulté de la situation dans laquelle votre politique nous a plongés !
Monsieur le ministre, vous m'avez mis au défi tout à l'heure de faire une proposition.
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. Absolument !
M. Jean-Luc Mélenchon. Mais, monsieur le ministre, c'est que vous n'avez écouté ni mon discours, ni celui de M. Pagès, ni surtout celui de M. Metzinger, pas plus que vous n'avez écouté notre argumentation sur les amendements que nous avons présentés en première lecture !
Eh bien, si vous voulez des propositions, je vais vous en faire plusieurs.
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. Allez-y !
M. Jean-Luc Mélenchon. Engagez la réduction du temps de travail sans perte de salaire, ce qui créera 1,5 million d'emplois, car, aujourd'hui, ce sont 150 milliards qui manquent en cotisations à la sécurité sociale du fait de l'existence de 3 millions de chômeurs.
Supprimez 80 milliards de francs d'exonérations que vous avez accordées.
Augmentez les salaires, car 1 p. 100 d'augmentation de salaire produit 8 milliards de francs de recettes supplémentaires dans les caisses de la sécurité sociale.
Faites verser les dettes impayées du patronat, qui s'élevaient à 8 milliards de francs en 1994 et dont le total atteint aujourd'hui plus de 90 milliards de francs, dont la moitié peut être d'ores et déjà récupérée.
Voilà mes propositions. En cinq minutes, j'en ai déjà fait cinq !
Ne prenez pas le risque, monsieur le ministre, de nous demander quelle politique alternative nous sommes capables de proposer aux Français, car bientôt ils sauront tout seuls faire la différence entre la gauche et la droite, et le genre de propos que vous avez tenus, sommaires et provocateurs, seront rejetés !
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. Oh !
M. Emmanuel Hamel. A la fin de la gestion socialiste, en mars 1993, il y avait déjà trois millions de chômeurs. C'est hélas vous, les chômeurs !
M. Robert Pagès. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Pagès.
M. Robert Pagès. Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, votre duo est quelque peu manichéen. Ce n'est plus, aujourd'hui, de bonne méthode.
Monsieur le ministre, vous nous avez reproché, dans un premier temps, de ne pas avoir fait de propositions. Puis, à M. Metzinger, M. le rapporteur a fait remarquer combien le débat était nécessaire puisque, déjà, il formulait des propositions. Alors, s'il vous plaît, harmonisez vos propos !
M. Patrice Gélard, rapporteur. Je n'ai pas dit cela !
M. Robert Pagès. Je n'avais pas l'intention d'allonger ce débat de deuxième lecture. Je m'étais donc efforcé de ne pas répéter les arguments que j'avais déjà développés, avec mes amis, à cette tribune en d'autres temps. Mais, si M. le ministre veut des propositions, je lui rappellerai qu'avec ses amis du Gouvernement il a repoussé, de façon très sèche, celles que nous avions formulées. Je pensais qu'il les avait encore en mémoire ! Nous avions alors proposé de taxer les revenus du capital au même taux que les revenus du travail. On trouverait là quelques dizaines de milliards de francs qui, très rapidement, pourraient équilibrer les comptes de la sécurité sociale !
Je m'en tiendrai là, pour ne pas encourir de nouveau les reproches de M. le rapporteur d'avoir, déjà, entamé le débat, mais nous sommes disposés, mes amis et moi, à vous faire connaître mieux encore nos autres propositions. (M. Mélenchon applaudit.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix la motion n° 5, repoussée par la commission et par le Gouvernement.
Je rappelle que son adoption entraînerait le rejet du projet de loi organique.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 117 ::

Nombre de votants 315
Nombre de suffrages exprimés 315
Majorité absolue des suffrages 158
Pour l'adoption 93
Contre 222

En conséquence, nous passons à la discussion des articles.
Je rappelle qu'aux termes de l'article 42, alinéa 10, du règlement, à partir de la deuxième lecture au Sénat des projets ou propositions de loi, la discussion des articles est limitée à ceux pour lesquels les deux chambres du Parlement n'ont pas encore adopté un texte identique.

Article 2