SOMMAIRE


PRÉSIDENCE DE M. MICHEL DREYFUS-SCHMIDT

1. Procès-verbal (p. 0 ).

2. Désignation d'un sénateur en mission (p. 1 ).

3. Scrutin pour l'élection d'un vice-président du Sénat (p. 2 ).

4. Candidature à la délégation du Sénat pour l'Union européenne (p. 3 ).

5. Lutte contre le travail illégal. - Suite de la discussion d'un projet de loi (p. 4 ).
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué pour l'emploi.

Articles additionnels avant l'article 1er A (p. 5 )

Amendements n°s 30 à 32 de Mme Dieulangard. - Mme Marie-Madeleine Dieulangard, M. Louis Souvet, rapporteur de la commission des affaires sociales ; Mme le ministre délégué. - Rejet des trois amendements.

Article 1er A (p. 6 )

Amendements identiques n°s 1 de la commission et 47 de M. Masson, rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur, Paul Masson, rapporteur pour avis de la commission des lois ; Mme le ministre délégué, M. Guy Fischer. - Adoption des amendements rédigeant l'article.

Article 1er B. - Adoption (p. 7 )

Article 1er (p. 8 )

Amendement n° 68 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre délégué. - Adoption.
Amendements identiques n°s 2 de la commission, 23 de M. Ostermann et 48 de M. Masson, rapporteur pour avis. - M. le rapporteur, Mme le ministre délégué. - Adoption des trois amendements.
Adoption de l'article modifié.

Article 1er bis (p. 9 )

Amendement n° 3 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre délégué. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.

Article 2 (p. 10 )

Amendement n° 4 de la commission et sous-amendements n°s 33 de Mme Dieulangard et 61 rectifié de M. Jourdain. - M. le rapporteur, Mme Marie-Madeleine Dieulangard, M. André Jourdain, Mme le ministre délégué, M. Guy Fischer. - Rejet du sous-amendement n° 33 ; adoption du sous-amendement n° 61 rectifié et de l'amendement n° 4 modifié.
Amendement n° 5 de la commission. - M. le rapporteur, Mmes le ministre délégué, Marie-Madeleine Dieulangard. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 2 bis. - Adoption (p. 11 )

Article 3 (p. 12 )

Amendements n°s 62 de M. Jourdain et 56 de M. Fischer. - MM. André Jourdain, Guy Fischer, le rapporteur, Mme le ministre délégué. - Retrait de l'amendement n° 62 ; rejet de l'amendement n° 56.
Amendement n° 6 de la commission. - MM. le rapporteur, Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. - Adoption.
Amendements n°s 34 et 35 de Mme Dieulangard. - MM. Georges Mazars, le rapporteur, le ministre. - Rejet des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.

Article 3 bis (p. 13 )

Amendement n° 49 rectifié de M. Masson, rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur pour avis, le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article additionnel après l'article 3 bis (p. 14 )

Amendement n° 24 de M. Ostermann. - MM. Joseph Ostermann, le rapporteur, le ministre. - Retrait.

6. Election d'un vice-président du Sénat (p. 15 ).

7. Nomination d'un membre de la délégation du Sénat pour l'Union européenne (p. 16 ).

8. Lutte contre le travail illégal . - Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi (p. 17 ).

Article 4 (p. 18 )

M. Bernard Plasait.
Amendement n° 57 de M. Fischer. - MM. Guy Fischer, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 63 de M. Jourdain. - MM. Jourdain, le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendements n°s 7 rectifié et 8 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption des deux amendements.
Amendement n° 50 de M. Masson, rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur pour avis, le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 64 de M. Jourdain et sous-amendement n° 36 rectifié de Mme Dieulangard ; amendement n° 58 de M. Fischer. - MM. André Jourdain, Georges Mazars, Guy Fischer, le rapporteur, le ministre, Mme Marie-Madeleine Dieulangard. - Rejet du sous-amendement n° 36 rectifié, adoption de l'amendement n° 64, l'amendement n° 58 devenant sans objet.
Amendement n° 9 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 51 de M. Masson, rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur pour avis, le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Articles additionnels après l'article 4 (p. 19 )

Amendement n° 59 de M. Fischer. - MM. Guy Fischer, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 25 de M. Ostermann. - MM. Joseph Ostermann, le rapporteur, le ministre, Claude Estier, Guy Fischer, Jean-Pierre Fourcade, président de la commission des affaires sociales. - Retrait.
Amendement n° 37 de Mme Dieulangard. - MM. Marcel Debarge, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Article 5. - Adoption (p. 20 )

Article 6 (p. 21 )

Amendement n° 38 de Mme Dieulangard. - MM. Marcel Debarge, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 10 rectifié de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
M. Guy Fischer.
Adoption de l'article modifié.

Article 6 bis. - Adoption (p. 22 )

Article 6 ter (p. 23 )

Amendement n° 11 de la commission et sous-amendement n° 45 de Mme Dieulangard. - MM. le rapporteur, le ministre. - Retrait du sous-amendement ; adoption de l'amendement rédigeant l'article.

Articles 6 quater à 6 sexies (p. 24 )

Amendements n°s 12 à 14 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption des amendements supprimant les trois articles.

Article 6 septies (p. 25 )

Amendement n° 15 de la commission et sous-amendement n° 46 de Mme Dieulangard. - MM. le rapporteur, le ministre. - Retrait du sous-amendement ; adoption de l'amendement rédigeant l'article.

Articles 6 octies à 6 decies (p. 26 )

Amendements n°s 16 à 18 de la commission. - Adoption des amendements supprimant les trois articles.

Articles 6 undecies
et 6 duodecies . - Adoption (p. 27 )

Article 6 terdecies (p. 28 )

Amendement n° 52 de M. Masson, rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur pour avis, le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Articles 6 quaterdecies,
6 quindecies et 7. - Adoption (p. 29 )

Articles additionnels après l'article 7 (p. 30 )

Amendements n°s 39 à 41 de Mme Dieulangard. - MM. Claude Estier, le rapporteur, le ministre. - Rejet des trois amendements.

Article 7 bis (p. 31 )

Amendement n° 42 de Mme Dieulangard. - MM. Claude Estier, le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 7 ter (p. 32 )

Amendement n° 53 de M. Masson, rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur pour avis, le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.

Article additionnel avant l'article 8 (p. 33 )

Amendement n° 55 rectifié de M. Jean-Jacques Robert. - MM. Joseph Ostermann, le rapporteur, le ministre. - Retrait.

Article 8 (p. 34 )

Amendements identiques n°s 19 rectifié de la commission et 54 de M. Masson, rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur, le rapporteur pour avis, le ministre, Jacques Habert. - Adoption des deux amendements rédigeant l'article.

Article additionnel avant l'article 9 (p. 35 )

Amendement n° 43 de Mme Dieulangard. - MM. Marcel Debarge, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Article 9 (p. 36 )

Amendement n° 44 de Mme Dieulangard. - MM. Marcel Debarge, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 20 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Articles additionnels après l'article 9 (p. 37 )

Amendements n°s 26 à 29 de M. Ostermann. - MM. Joseph Ostermann, le rapporteur, le ministre. - Retrait des quatre amendements.

Article 10 (p. 38 )

Amendement n° 21 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 65 de M. Jourdain. - MM. André Jourdain, le rapporteur, le ministre, le président de la commission, Jean-Jacques Hyest, Marcel Debarge, Jean Delaneau. - Adoption.
M. le ministre.
Adoption de l'article modifié.

Article additionnel après l'article 10 (p. 39 )

Amendement n° 67 de M. Jourdain. - MM. André Jourdain, le rapporteur, le ministre. - Retrait.

Article 11. - Adoption (p. 40 )

Vote sur l'ensemble (p. 41 )

MM. Jean Madelain, Joseph Ostermann, Guy Fischer, Mme Marie-Madeleine Dieulangard, MM. Jean Delaneau, Jacques Habert, le rapporteur.
Adoption du projet de loi.

9. Communication de l'adoption définitive d'une proposition d'acte communautaire (p. 42 ).

10. Transmission d'une proposition de loi (p. 43 ).

11. Dépôt de rapports (p. 44 ).

12. Dépôt d'un avis (p. 45 ).

13. Ordre du jour (p. 46 ).



COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. MICHEL DREYFUS-SCHMIDT
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures cinq.)

1

PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

2

DÉSIGNATION D'UN SÉNATEUR EN MISSION

M. le président. Monsieur le président a reçu de M. le Premier ministre une lettre en date du 14 janvier 1997 l'informant qu'il avait décidé de placer M. Henri Revol, sénateur de la Côte-d'Or, en mission temporaire auprès du ministre de l'industrie, de la poste et des télécommunications.
Acte est donné de cette communication.

3

SCRUTIN POUR L'ÉLECTION
D'UN VICE-PRÉSIDENT DU SÉNAT

M. le président. L'ordre du jour appelle le scrutin pour l'élection, par suite de vacance, d'un vice-président du Sénat.
En application de l'article 3, alinéa 7, du règlement, l'élection a lieu au secrutin secret.
Conformément à l'article 61 du règlement, il va être procédé à ce scrutin dans la salle des conférences.
Ce scrutin sera ouvert pendant une heure.
Je rappelle qu'aux termes de l'alinéa 8 de l'article 3 du règlement, si la majorité absolue des suffrages exprimés n'a pas été acquise au premier ou au second tour, au troisième tour la majorité relative suffit ; en cas d'égalité des suffrages, le président proclame élu le plus âgé.
Je prie M. Ambroise Dupont, secrétaire du Sénat, de bien vouloir présider le bureau de vote.
Il va être procédé au tirage au sort de quatre scrutateurs titulaires et de deux scrutateurs suppléants qui opéreront le dépouillement du scrutin.
Sont désignés : Scrutateurs titulaires : MM. Guy Fischer, Nicolas About, Jean-Louis Lorrain et Jacques Bimbenet.
Scrutateurs suppléants : MM. Alain Gournac et Pierre Hérisson.
Le scrutin pour l'élection d'un vice-président est ouvert.
Il sera clos dans une heure.

4

CANDIDATURE À LA DÉLÉGATION DU SÉNAT
POUR L'UNION EUROPÉENNE

M. le président. L'ordre du jour appelle la nomination d'un membre de la délégation du Sénat pour l'Union européenne, en remplacement de M. Yves Guéna, nommé membre du Conseil constitutionnel.
J'informe le Sénat que le groupe du Rassemblement pour la République a proposé la candidature de M. Yann Gaillard.
Cette candidature a été affichée et sera ratifiée s'il n'y a pas d'opposition dans le délai d'une heure.

5

LUTTE CONTRE LE TRAVAIL ILLÉGAL

Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi (n° 152, 1996-1997), adopté par l'Assemblée nationale, relatif au renforcement de la lutte contre le travail illégal. [Rapport n° 157 (1996-1997).]
Je vous rappelle que la discussion générale a été close hier.
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué pour l'emploi. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué pour l'emploi. Mesdames et messieurs les sénateurs, je tiens, tout d'abord, à remercier à nouveau vos deux rapporteurs, MM. Souvet et Masson, pour la qualité des rapports qu'ils nous ont présentés hier.
Je veux aussi les remercier pour la clarté de leur exposé lors de la discussion générale.
Je me félicite, bien entendu, de l'appui de la majorité des groupes au texte qui vous est soumis et qu'au cours de l'examen article par article vous allez, mesdames, messieurs les sénateurs, encore améliorer.
Je veux d'ailleurs souligner dès à présent que le Gouvernement appuiera un très grand nombre des amendements qui ont été déposés, notamment ceux de vos deux commissions.
Même si l'examen article par article nous permettra, à Jacques Barrot et à moi-même, de revenir sur toutes vos préoccupations et toutes vos interrogations, je vais maintenant m'efforcer de répondre brièvement aux questions que m'ont posées les orateurs.
Je voudrais tout d'abord rappeler avec force et solennité que le Gouvernement entend bien faire de la lutte contre le travail illégal une priorité nationale en s'en donnant les moyens, qu'ils soient législatifs ou opérationnels.
Plusieurs orateurs ont abordé une question sémantique qui a donné lieu à des débats très animés à l'Assemblée nationale.
L'Assemblée nationale, vous le savez, a substitué à la notion de « travail clandestin » celle de « travail dissimulé », et a souhaité changer l'intitulé de ce projet de loi pour utiliser l'expression « travail illégal », qui recouvre non seulement le travail dissimulé, mais aussi, notamment, le marchandage, le prêt illicite de main-d'oeuvre et l'emploi d'étrangers sans titre.
Le Gouvernement a soutenu ces modifications terminologiques, même si je suis d'accord avec MM. Masson, Souvet, Hyest et un certain nombre d'entre vous pour dire que la rédaction actuelle des deux premiers articles pourrait sans doute être améliorée. C'est d'ailleurs ce que nous allons faire à l'occasion de la discussion des articles.
Les infractions de travail dissimulé, de marchandage, de prêt illicite de main-d'oeuvre et d'emploi d'étrangers sans titre constituent bien, sans aucun doute, une catégorie spécifique d'infractions qu'il est opportun de rapprocher entre elles. La future délégation interministérielle sera responsable de la lutte contre l'ensemble de ces infractions, et d'elles seules, contrairement à ce que vous avez affirmé hier, monsieur Fischer, et le projet que nous examinons aujourd'hui vise bien, je le répète, toutes ces infractions et non pas seulement le travail dissimulé.
Je dois confirmer clairement devant le Sénat que le Gouvernement veut éviter tout amalgame entre lutte contre l'immigration clandestine et lutte contre le travail illégal, tout simplement parce que, comme je l'ai rappelé hier à cette tribune, 10 % seulement des procès-verbaux concernent l'emploi d'étrangers sans titre.
Monsieur Fischer, madame Dieulangard, incontestablement, vos accusations sur ce point ne tiennent pas, je tiens à vous le répéter tout à fait solennellement.
M. Guy Fischer. L'intention y était !
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. Point du tout, monsieur Fischer !
En réponse à votre intervention, monsieur Souvet, j'aimerais revenir sur quelques points.
Je ne peux que vous féliciter et vous remercier pour le travail que vous avez effectué avec les membres de la commission sur ce projet. D'ailleurs, tous vos amendements seront acceptés par le Gouvernement. Je ne citerai qu'un exemple, que vous avez évoqué hier, celui de l'utilisation de l'ordonnance pénale pour défaut de déclaration préalable à l'embauche, de façon à ne pas pénaliser outre mesure la négligence de certains employeurs. Bien entendu, je pourrais en citer bien d'autres, et l'examen du texte nous en donnera l'occasion.
Vous avez aussi insisté sur l'importance de la prévention et, là aussi, vous le savez, nous sommes parfaitement d'accord : elle est tout à fait essentielle.
Monsieur Masson, vous avez évoqué, au nom de la commission des lois, le développement important du secteur tertiaire, qui est, en effet, une des raisons pour lesquelles les formes du travail illégal évoluent rapidement aujourd'hui. C'est bien ce qui a motivé nombre des dispositions de ce projet de loi.
Vous m'avez interrogée également sur les intentions du Gouvernement en ce qui concerne le cumul d'emplois par les agents publics. Le problème que vous soulevez est un vrai problème ; heureusement, il ne concerne qu'un très petit nombre de fonctionnaires.
Contre le comportement de ceux-ci, vous avez rappelé vous-même que l'article 6 du décret-loi du 29 octobre 1936 prévoit des sanctions disciplinaires très lourdes, ainsi que des retenues sur traitement. Dans ces conditions, la création d'une nouvelle sanction pénale ne paraît peut-être pas nécessaire. Avant tout, il convient de mettre en oeuvre les dispositions existantes, et ce avec la plus grande rigueur, ce qui n'est peut-être pas le cas aujourd'hui.
M. Plasait a insisté fort justement sur le fait que le travail illégal rompt l'égalité économique entre les entreprises. Le travail illégal est bien une source de concurrence déloyale ; c'est incontestable. M. Plasait a raison de souligner que la lutte contre le travail illégal, qui est un impératif social, est également un moyen d'empêcher que se crée une dangereuse fracture économique dans le tissu de nos entreprises.
La nouvelle organisation interministérielle de lutte contre le travail illégal va, comme M. Plasait le souhaite, permettre une meilleure mobilisation des agents de contrôle dans les départements. Cette mobilisation se fera sous l'impulsion du corps préfectoral et du nouveau délégué interministériel.
M. Plasait a également souhaité aller plus loin en matière de prévention du travail illégal et a appelé de ses voeux, comme M. Hyest notamment, un mouvement significatif de diminution des prélèvements obligatoires.
Faut-il le rappeler, la démarche est d'ores et déjà engagée par le Gouvernement. Les ménages vont s'en rendre compte très bientôt à l'occasion du premier tiers provisionnel de l'impôt sur le revenu. Il est clair qu'il faut poursuivre dans ce sens, sans déséquilibrer les finances publiques. La prévention du travail illégal est un axe tout à fait majeur de la stratégie conduite par le Gouvernement sur ce point.
Monsieur Plasait, vous craignez que le développement de l'aménagement du temps de travail n'encourage certaines formes de travail illégal ; c'est vrai, il faut être attentif à ce risque, sans néanmoins le surestimer, car tout dépend des conditions pratiques de cet aménagement-horaires, semaines de travail. Nous serons évidemment très vigilants à cet égard.
Monsieur Hyest, vous avez raison : la complexité administrative favorise le développement du travail illégal. Nous travaillons à y remédier. J'ai rappelé hier l'état d'avancement des réformes en la matière, je n'y reviendrai pas.
Vous avez insisté fort justement sur les difficultés récurrentes qu'il y a à coordonner la police générale et les polices spéciales. C'est là un réel obstacle à l'amélioration de la lutte contre le travail illégal. Mais les dispositions du projet de loi qui visent à harmoniser les pouvoirs de contrôle, ainsi que la réforme du dispositif interministériel de lutte contre le travail illégal, sur le plan national et sur le plan local, vont permettre de le surmonter ; j'y veillerai personnellement dans le cadre de la mission particulière qui m'est confiée.
En ce qui concerne les aides à la formation et à l'emploi, je voudrais vous dire qu'il me paraît bien préférable que l'administration puisse en suspendre le bénéfice au vu d'un procès-verbal et non pas d'une décision de justice. Il s'agit là, en effet, non pas d'une sanction - il y aurait alors cumul de peines, ce qui n'est pas opportun - mais d'une mesure de prévention.
Je vous remercie, monsieur Gournac, de vos observations et du souci que vous manifestez, avec d'autres orateurs, que soit bien marquée la distinction qu'il convient de faire entre lutte contre l'immigration clandestine et lutte contre le travail illégal.
J'ai bien noté, par ailleurs, votre proposition d'étendre l'utilisation du chèque emploi-service à d'autres secteurs d'activité et votre appel à imaginer de nouvelles mesures de simplification incitatives à l'embauche. Telle est effectivement l'orientation dans laquelle Jacques Barrot et moi-même nous nous inscrivons.
Madame Dieulangard, j'ai l'impression que nous n'avons pas lu le même projet de loi ! Je suis au regret de le dire.
Ce texte n'est ni pauvre ni squelettique. Les débats qui ont eu lieu à l'Assemblée nationale, comme ceux qui ont commencé dans votre Haute Assemblée, montrent bien que vous vous trompez. Ce projet de loi constitue une avancée importante, notamment par rapport aux dispositions que vous aviez votées quand la majorité que vous souteniez était au pouvoir, vous l'avez vous-même reconnu.
Quand vous affirmez que le projet de loi serait « à la limite dangereux pour les salariés », je me demande, là encore, si nous avons bien lu le même texte !
M. Jean Chérioux. Mme Dieulangard doit changer de lunettes !
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. Qu'est-ce qui vous permet de dire que la lutte contre le travail dissimulé et contre le travail illégal ne s'appuiera pas assez sur l'inspection du travail ?
C'est une contrevérité que d'affirmer que le projet de loi entretient l'amalgame entre l'immigration clandestine et le travail illégal ; je me suis déjà exprimée longuement à ce sujet, de même que les rapporteurs et les différents orateurs.
Je suis vraiment au regret de dire, madame Dieulangard, que vous nous dressez un procès d'intention au lieu de participer à un débat sur un sujet qui constitue une priorité nationale et sur lequel devrait se dégager un consensus. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants et du RPR.)
En réalité, c'est vous qui faites un amalgame quand vous assimilez développement du temps partiel, du travail indépendant ou de l'intérim et travail illégal.
Pourquoi dites-vous que le projet de loi ne s'attache pas aux nouvelles formes de travail illégal ? Plusieurs dispositions très importantes de ce texte concernent la prévention et la répression du marchandage et du prêt illicite de main-d'oeuvre, qui - nous le savons bien - se sont beaucoup développés et contre lesquels nous devons lutter d'une manière très concrète.
M. Fischer a rejeté le texte de la même manière. Honnêtement, je n'ai vraiment pas compris pourquoi. Je suis persuadée qu'il approuve nos propositions, même s'il ne l'avoue pas.
Je suis très étonnée de l'entendre affirmer que le texte se limite à une seule forme de travail illégal, le travail dissimulé, alors que - je viens de le souligner - nombre de ses dispositions visent d'autres infractions, telles que le marchandage, le prêt illicite de main-d'oeuvre et l'emploi d'étrangers sans titre.
De même, comment soutenir qu'il est préférable de ne pas légiférer tout en déplorant que le texte soit - je reprends l'expression de M. Fischer - « trop timide » ?
Vous aussi, monsieur le sénateur, vous nous accusez de faire l'amalgame entre immigration clandestine et travail clandestin.
Vous avez longuement contesté une disposition relative au droit d'entrée des officiers de police judiciaire, qui ne figure pas dans le projet : vous vous trompez de débat.
Enfin, que signifie cet amalgame entre exonération de charges, zones franches et travail illégal ?
Une fois de plus, je ne puis que regretter que nous ne puissions parvenir à un consensus alors que les enjeux de ce texte sont de portée nationale.
Monsieur Ostermann, je sais que vous avez beaucoup travaillé - vous avez même déposé une proposition de loi - sur ce sujet.
Vous souhaitez rendre plus dissuasives les peines et les amendes existantes. Je comprends tout à fait votre souci ; mais il ne me paraît pas nécessaire de les accroître encore ; elles sont déjà variées et très importantes. Je rappelle qu'en 1993 quatre personnes condamnées pour recours au travail clandestin sur dix l'ont été à des peines d'emprisonnement.
Je crois qu'il faut tout mettre en oeuvre pour que les agents de contrôle puissent effectivement rechercher et constater les infractions, faire en sorte que les peines existantes soient effectivement prononcées et accroître les mesures préventives à portée financière, comme le refus d'aides à l'emploi ou les mesures relatives à l'accès aux marchés publics.
Vous soulignez que le salarié devrait lui aussi, dans certains cas, être mis en cause. Vous soulevez là un problème délicat. Il faut préciser que les salariés sont les victimes du travail illégal, car celui-ci remet en cause leurs droits sociaux. Au demeurant, la décision d'embauche appartient toujours, en dernière analyse, à l'employeur.
Le droit du travail est un droit protecteur des salariés et il serait dangereux d'altérer ce principe fondamental.
Pour autant, certaines dispositions visent déjà les salariés : le cumul d'une rémunération et d'une indemnité de chômage, ainsi que le cumul d'emplois pour les fonctionnaires font déjà l'objet de sanctions.
Enfin, vous proposez de créer dans chaque département, sous la responsabilité directe du préfet, une structure pluridisciplinaire spécialement chargée de lutter contre le travail dissimulé.
Les mesures qui vont être prises par le Gouvernement et la priorité que nous donnons à la mobilisation de tous les moyens de lutte répondent, je le pense, à votre souci ; nous pourrons en reparler.
Monsieur Bimbenet, je suis heureuse que le projet de loi qui vous est soumis réponde à la préoccupation que vous aviez exprimée l'année dernière, à l'occasion d'une question.
J'ai bien compris votre souhait de voir poursuivre les réflexions sur un dispositif de présomption de recours au travail dissimulé. Nous devons être d'autant plus prudents dans ce domaine que le régime des présomptions est d'un maniement inhabituel en matière pénale, où prévaut un régime de preuve bien spécifique.
Mais cela ne doit pas nous interdire de faire preuve d'imagination s'il s'agit d'assurer une répression efficace et bien ciblée des fraudes les plus graves.
Vous avez également exprimé la crainte que ne soit pas affecté à la lutte contre le travail illégal un nombre suffisant d'agents.
Ce projet de loi va bien dans le sens d'une mobilisation générale de tous les corps de contrôle disponibles, dont la liste est d'ailleurs complétée.
Cette mobilisation sera renforcée par la mise en place d'un dispositif, lui-même renforcé, de coordination interministérielle.
Soyez assuré que je veillerai personnellement à cette mobilisation permanente et à la coopération de tous les services concernés.
Vous insistez, enfin, sur l'information et la responsabilisation de nos concitoyens, qui, trop souvent, considèrent le travail au noir - pour utiliser le vocabulaire courant - comme normal. Je le dis une nouvelle fois, le Gouvernement s'emploiera à faire informer de la meilleure manière possible nos concitoyens des conséquences et des risques de cette forme d'emploi. L'information va de pair avec la prévention, et nous y sommes trés attachés.
Enfin, M. Jourdain a soulevé, comme M. Ostermann, le problème posé par les salariés dissimulés par leur employeur à leur demande et avec leur complicité.
Dans ce domaine, le principe reste celui de l'absence de responsabilité pénale du salarié. Quelle que soit, en effet, son attitude, la décision d'embauche et de non-déclaration appartient, en dernier recours, à l'employeur. C'est donc sur ce dernier que la responsabilité doit peser.
Vous avez également évoqué, monsieur Jourdain, le risque d'un alourdissement des tracasseries administratives à l'égard des entreprises. Je souhaite vous rassurer : toute la philosophie de ce projet consiste à mieux cibler la répression sur les fraudes les plus graves ou les plus complexes et à rendre cette répression la plus efficace possible.
Il s'agit donc non pas de multiplier les formalités et les tracasseries, mais, en s'appuyant sur celles qui existent déjà, de permettre aux agents de contrôle d'aller directement à l'essentiel, notamment pour identifier les donneurs d'ordre. Nous aurons l'occasion de revenir, au cours de ce débat, sur ce point important du projet de loi.
En revanche, il faut incontestablement simplifier les tâches administratives des entreprises ; je le disais tout à l'heure en répondant à un autre des intervenants. Hier, j'ai dressé la liste de toutes les actions qui sont actuellement en cours à cette fin car elles participent aussi d'une démarche de prévention. Hélas, les choses ne vont toujours pas aussi vite que nous le souhaiterions, mais, soyez-en sûr, monsieur le sénateur, le Gouvernement est tout à fait déterminé à avancer dans cette voie.
L'extension du chèque-service peut en être un très bel exemple. Nous mettons en place le chèque « salarié agricole » et nous étudierons l'extension de ce principe à d'autres professions qui le justifient.
Telles sont, mesdames, messieurs les sénateurs, les réponses que je voulais vous apporter avant que nous entamions l'examen des articles.
Je tiens à vous remercier une nouvelle fois pour la qualité des travaux que vous avez menés et la qualité de vos interventions.
J'espère que le débat qui va s'ouvrir maintenant nous permettra d'enrichir ce texte en vue d'assurer une plus grande efficacité à la lutte que nous avons l'intention d'engager tous ensemble, contre le travail illégal. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Nous passons à la discussion des articles.

Articles additionnels avant l'article 1er A

M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 30, Mme Dieulangard et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, avant l'article 1er A, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 120-3 du code du travail est abrogé. »
Par amendement n° 31, Mme Dieulangard et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, avant l'article 1er A, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans le second alinéa de l'article L. 120-3 du code du travail, après les mots : "subordination juridique", le mot : "permanente" est supprimé.
« II. - Dans le premier alinéa de l'article L. 311-11 du code de la sécurité sociale, après les mots : "subordination juridique", le mot : "permanente" est supprimé. »
La parole est à Mme Dieulangard, pour défendre ces deux amendements.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Une luttre efficace contre le travail clandestin passe par la suppression de l'article L. 120-3 du code du travail. Il s'agit là d'une disposition récente puisque son insertion dans le code du travail résulte de la loi du 11 février 1994 relative à l'initiative et à l'entreprise individuelle, dite « loi Madelin ». Il a néanmoins été possible, depuis lors, de constater que cet article réduit les possibilités de lutte contre la pratique particulièrement choquante du faux artisanat, dont de nombreux salariés sont aujourd'hui victimes. C'est, en effet, cette pratique qui se développe de préférence à toute autre. Il est donc nécessaire de revenir sans plus attendre à la présomption qui permettrait l'extension du domaine du contrat de travail dès lors qu'un contrat avait pour objet la fourniture d'un travail.
Nous n'avons qu'un infime espoir de voir le Sénat adopter cet amendement et nous tenons surtout, en le présentant, à manifester notre opposition à cette disposition de la loi Madelin.
En la votant, la majorité a renversé la tendance jurisprudentielle qui prévalait jusqu'alors. Désormais, il est présumé que les personnes inscrites au registre du commerce ou au répertoire des métiers ne sont pas liées par des contrats de travail pour l'exécution de leur activité.
Cela est extrêmement grave dans la mesure où cette disposition encourage le faux travail indépendant. Nous sommes ici au coeur de ces dérives qui vont s'accentuant depuis une dizaine d'années. Il s'agit non de travail dissimulé à proprement parler, mais de travail salarié dissimulé, pour le plus grand bénéfice de donneurs d'ordre qui sont en fait des employeurs puisqu'ils fournissent à la fois le travail, les matériaux et l'outillage.
Les exemples ne manquent pas : les coursiers qui, juchés sur leur scooter ou au volant de leur camionnette, traversent les villes à toute vitesse parce que l'on exige d'eux toujours plus de rapidité et qui découvrent à l'occasion d'un accident qu'ils n'ont jamais été salariés par l'entreprise qu'ils croyaient être leur employeur ; les routiers qui louent leur véhicule à une entreprise qui n'a pour salariés qu'une secrétaire et un comptable, mais qui dispose d'une flotte d'une vingtaine de camions ; les bûcherons qui travaillent toujours avec la même entreprise ; les artisans du BTP qui travaillent toujours sur les chantiers de la même multinationale. La liste complète serait trop longue à établir ! Qu'il me suffise de dire que cette pratique est particulièrement répandue dans les secteurs où le travail à accomplir n'est pas sans risque pour le pseudo-artisan.
C'est ainsi que les entreprises s'exonèrent à bon compte du poids réel de leurs cotisations sociales. C'est ainsi que le SMIC est contourné par l'établissement de contrats qui permettent tout juste aux victimes de payer leurs charges et de s'assurer une rémunération, tout en les maintenant prisonnières de cette situation. Quant à l'existence d'horaires légaux, elle est purement et simplement ignorée. On en viendrait presque à s'interroger sur la nécessité de négociation dans ce domaine : pourquoi ne pas transformer immédiatement tous les salariés en travailleurs indépendants, isolés, à qui on pourra faire croire qu'ils sont seuls responsables de leur misère ?
La loi Madelin a permis un élargissement de cette pratique du faux travail indépendant ; elle a surtout fait en sorte que les entreprises qui obligent leurs salariés à démissionner pour travailler ensuite avec eux en tant qu'artisans ne soient plus inquiétées. Auparavant, l'inspection du travail pouvait demander au juge la requalification du contrat. Tel n'est plus le cas aujourd'hui puisqu'il lui faut établir l'existence d'un lien de subordination juridique permanent, ce qui est souvent impossible en raison de la grande précarité de cette main-d'oeuvre.
Pour mettre un terme à cette dérive scandaleuse, la solution la plus simple consiste à supprimer cette disposition du code du travail.
L'amendement n° 31 est un amendement de repli. Ne reconnaître l'existence d'un contrat de travail, comme le prévoit l'article L. 120-3 du code du travail, que dans le cas où le travailleur indépendant est placé vis-à-vis du maître d'ouvrage dans un lien de subordination juridique permanente restreint les possibilités de requalification et favorise le développement du faux travail indépendant, qui est illégal.
Notre amendement reprend une indication donnée par la jurisprudence.
J'ajoute que le caractère permanent de la subordination ne laisse subsister aucun doute quant à la véritable nature de la relation de travail.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements ?
M. Louis Souvet, rapporteur de la commission des affaires sociales. La commission a estimé que l'amendement n° 30 n'avait pas de rapport avec le projet de loi et qu'il remettait en cause une disposition d'une loi récente, dont on ne peut encore juger pleinement les effets. La commission ne saurait se désavouer en approuvant un amendement qui supprime une disposition votée voilà moins de deux ans.
Quant à l'amendement n° 31, également sans rapport avec le présent projet, il recrée l'insécurité juridique du statut du travailleur indépendant à laquelle, avec la loi Madelin, on a souhaité mettre un terme.
Par ailleurs, la notion de permanence a été définie par une circulaire. Elle ne semble pas poser de problème et la commission ne voit donc pas pourquoi il conviendrait de revenir sur cette notion.
La commission est donc défavorable aux deux amendements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. Le Gouvernement est également défavorable à ces deux amendements.
Les explications fournies par M. le rapporteur me confortent dans l'idée selon laquelle ces amendements ne pourraient en rien contribuer à la répression du travail illégal.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 30, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 31, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 32, Mme Dieulangard et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, avant l'article premier A, un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans la seconde phrase du premier alinéa de l'article L. 121-1 du code du travail, les mots : " Il peut être constaté" sont remplacés par les mots : "Il est constaté par écrit". »
La parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Dans le cadre des dispositions générales relatives au contrat de travail, cet amendement a pour objet de préciser que le contrat de travail qui est soumis aux règles de droit commun doit être constaté par écrit, dans les formes qu'il convient aux parties contractantes d'adopter, c'est-à-dire faire l'objet d'un document écrit, comme le prévoit la directive européenne 91/533/CEE du 14 octobre 1991 relative à l'obligation de l'employeur d'informer le travailleur des conditions applicables au contrat ou à la relation de travail. La déclaration préalable à l'embauche, quels que soient ses mérites - et nous savons qu'ils sont grands - ne permet pas de remplir cette obligation.
L'existence d'un document écrit permet de mieux contrôler s'il y a ou non existence d'une relation de travail illégale. Le contrat de travail écrit permet de donner connaissance, notamment, de l'identité des parties, du lieu de travail ou du siège de l'employeur, de la qualité de l'emploi et de la date de début du contrat. Il existe d'ailleurs des contrats-types qui peuvent être utilisés par les employeurs afin de leur éviter tout souci.
Par conséquent, il s'agit non d'une paperasserie supplémentaire mais d'une protection nécessaire pour le salarié. La plupart des salariés croient d'ailleurs de bonne foi que le caractère écrit du contrat de travail est déjà obligatoire.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable. Elle a noté que la directive européenne 91/533 est considérée comme appliquée à travers la déclaration préalable à l'embauche et le bulletin de paie ; aller au-delà alourdirait les contraintes administratives et pourrait se retourner contre le salarié.
Je rappelle en outre qu'il y a présomption de contrat à durée indéterminée si le contrat n'est pas écrit.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Même en l'absence de contrat écrit, les garanties du salarié sont assurées conformément aux dispositions de la directive européenne, car l'employeur doit remettre la déclaration préalable à l'embauche et un bulletin de paie. Ces deux documents permettent de répondre efficacement à notre préoccupation d'aujourd'hui, peut-être plus que le contrat de travail.
Cet amendement va incontestablement dans le sens d'un alourdissement des formalités, sans présenter d'utilité pratique.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 32, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 1er A

M. le président. « Art. 1er A. _ Le troisième alinéa de l'article L. 320 du code du travail est ainsi rédigé :
« Le non-respect de l'obligation de déclaration, constaté par les agents mentionnés à l'article L. 324-12, donne lieu au versement par l'employeur d'une contribution spéciale dont le montant est égal à cinq cents fois le taux horaire du minimum garanti prévu à l'article L. 141-8. Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du présent alinéa. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 1 est présenté par M. Souvet, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 47 est présenté par M. Masson, au nom de la commission des lois.
Tous deux tendent à rédiger comme suit l'article 1er A :
« Au troisième alinéa (1°) de l'article 524 du code de procédure pénale, après les mots : "prévue par le code du travail", sont ajoutés les mots : ", à l'exception de celle prévue à l'article L. 320 dudit code". »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 1.
M. Louis Souvet, rapporteur. Cet amendement vise à autoriser, s'agissant des contraventions au code du travail, le recours à une procédure interdite jusqu'à présent.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° 47.
M. Paul Masson, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Cet amendement me paraît particulièrement opportun dans une matière où fort peu de sanctions sont prononcées par rapport au nombre d'infractions constatées, la sanction paraissant en effet inadaptée au regard de la procédure.
La solution préconisée par l'Assemblée nationale pour remédier à cette situation nous paraît à la fois lourde et rigide.
La procédure que nous proposons conjointement avec la commission des affaires sociales est celle de l'ordonnance pénale, qui a déjà fait ses preuves puisqu'elle trouve à s'appliquer quotidiennement pour les infractions au code de la route. Elle paraît plus souple et plus rapide ; elle est donc mieux adaptée.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements ?
Mme Anne-Marie Courderc, ministre délégué. Le Gouvernement y est favorable.
La procédure simplifiée de l'ordonnance pénale, qui accélère le traitement des dossiers et qui doit donc aboutir à un prononcé plus rapide de la sanction pénale, permet également d'atteindre les objectifs que l'Assemblée nationale visait en créant une amende administrative destinée à se substituer à la contravention pour défaut non intentionnel de déclaration préalable à l'embauche.
M. le président. Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s 1 et 47.
M. Guy Fischer. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. L'article 1er A, qui résulte du vote d'un amendement à l'Assemblée nationale, constitue une réponse à un fait incontestable : l'amende sanctionnant le défaut de déclaration préalable à l'embauche est peu appliquée.
Il a donc été proposé, afin de renforcer l'efficacité de la déclaration préalable en matière de lutte contre le travail clandestin, de remplacer l'amende pénale de 10 000 francs par une sanction administrative automatique d'environ 9 000 francs, inspirée de celle qui s'applique en cas de non-respect du monopole de l'Office des migrations internationales.
Il s'agit, à notre sens, d'une disposition réellement efficace, et mes collègues du groupe communiste républicain et citoyen et moi-même approuvons cette proposition de nos collègues de l'Assemblée nationale.
C'est pourquoi nous nous opposons à la suggestion de M. Souvet, qui souhaite supprimer cette disposition et lui substituer la procédure d'ordonnance pénale, qui constitue une procédure simplifiée que l'on peut supposer plus efficace que la procédure actuelle.
En effet, c'est justement l'automaticité de la sanction qui constitue à mon sens une réelle incitation à la déclaration préalable à l'embauche.
Certes, M. le rapporteur et Mme le ministre nous rétorquent que la mise en oeuvre de cette mesure ne permettrait pas de prendre en compte la bonne foi de l'employeur, mais n'oublions pas la situation des salariés qui, eux, ne bénéficient nullement d'une telle mansuétude quand ils ne remplissent pas leurs obligations.
En outre, l'adoption en l'état de cet article 1er A aboutirait, selon certains, à un cumul des peines, ce qu'interdisent les engagements internationaux de la France. Il est dommage qu'un tel souci ne s'exprime pas dans tous les cas, en particulier au bénéfice des étrangers dits en « situation irrégulière » qui subissent trop souvent ces « doubles peines », les gouvernements se préoccupant alors moins des « engagements internationaux de la France » !
En fait, vous reculez devant l'adoption d'une mesure réellement efficace contre le travail illégal, mais qui a le tort, à vos yeux, de viser les véritables responsables de l'extension de celui-ci, à savoir les entreprises qui ne respectent pas leurs obligations vis-à-vis de la société et de leurs salariés.
Pour ces raisons, nous voterons contre les amendements identiques n°s 1 et 47.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 1 et 47, acceptés par le Gouvernement.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l'article 1er A est ainsi rédigé.

Article 1er B

M. le président. « Art. 1er B. _ I. _ L'intitulé du chapitre IV du titre II du livre III du code du travail est ainsi rédigé : "Cumuls d'emplois. Travail dissimulé".
« II. _ L'intitulé de la section 2 du chapitre IV du titre II du livre III du code du travail est ainsi rédigé : "Travail dissimulé". » - (Adopté.)

Article 1er

M. le président. « Art. 1er. _ I. _ Le premier alinéa de l'article L. 324-9 du code du travail est ainsi rédigé :
« Le travail dissimulé est la dissimulation partielle ou totale, dans les conditions prévues à l'article L. 324-10, d'une activité ou de l'emploi d'un salarié. »
« II. _ Dans la première phrase du deuxième alinéa du même article, le mot : "clandestin" est remplacé par le mot : "dissimulé".
« III. _ Dans la deuxième phrase du deuxième alinéa du même article, le mot : "sciemment" est supprimé. »
Par amendement n° 68, M. Souvet, au nom de la commission des affaires sociales, propose :
A. - De rédiger comme suit le I de cet article :
« I. - Le premier alinéa et le début du deuxième alinéa de l'article L. 324-9 du code du travail sont remplacés par les dispositions suivantes :
« Le travail totalement ou partiellement dissimulé, défini et exercé dans les conditions prévues par l'article L. 324-10, est interdit ainsi que... (le reste sans changement). »
B. - En conséquence, de supprimer le II de cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet, rapporteur. Avant de présenter l'amendement n° 68, je rappellerai simplement à M. Fischer qu'il s'agissait précédemment non pas de l'amendement de M. Souvet, mais de celui de la commission.
M. Guy Fischer. Je vous prie de m'excuser, monsieur le rapporteur. Cette imprécision est due à mon inexpérience !
M. Louis Souvet, rapporteur. L'amendement n° 68 a pour objet d'éviter des redites.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. Le Gouvernement est favorable à cet amendement.
Nous avons longuement débattu, à plusieurs reprises, de la terminologie ; cet amendement me semble apporter une amélioration rédactionnelle.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 68, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis maintenant saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 2 est présenté par M. Souvet, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 23 est déposé par MM. Ostermann, Grignon et Vasselle.
L'amendement n° 48 est présenté par M. Masson, au nom de la commission des lois.
Tous trois tendent à supprimer le III de l'article 1er.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 2.
M. Louis Souvet, rapporteur. Les dispositions de l'article L. 324-9 du code du travail ont un champ d'application extrêmement large et ne visent pas que les professionnels. Le particulier pourrait notamment être sanctionné par manque d'information ou en raison de l'impossibilité pour lui d'aller vérifier l'intervention de sous-traitants.
Il paraît donc opportun de maintenir le terme « sciemment », qui est utilisé depuis très longtemps ; le nouveau code pénal a d'ailleurs posé le principe du caractère nécessairement intentionnel des délits. Le supprimer ici pourrait introduire une confusion juridique, d'autant que le mot « intentionnellement » est maintenu dans d'autres articles réprimant le travail clandestin.
M. le président. La parole est à M. Ostermann, pour défendre l'amendement n° 23.
M. Joseph Ostermann. Je considère que cet amendement est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° 48.
M. Paul Masson, rapporteur pour avis. Je n'ai rien à ajouter aux propos de M. le rapporteur.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les trois amendements identiques n°s 2, 23 et 48 ?
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. Le Gouvernement est favorable à ces trois amendements. La suppression du mot « sciemment » n'est effectivement ni utile, ni opportune.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 2, 23 et 48, acceptés par le Gouvernement.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er, modifié.
(L'article 1er est adopté.)

Article 1er bis

M. le président. « Art. 1er bis . _ Après l'article L. 324-9 du code du travail, il est inséré un article L. 324-9-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 324-9-1 . _ Est présumé avoir recours aux services de celui qui exerce un travail dissimulé celui qui n'a pas fait agréer son sous-traitant en application de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance. »
Par amendement n° 3, M. Souvet, au nom de la commission des affaires sociales, propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet, rapporteur. La commission propose de supprimer cet article. En effet, elle a jugé qu'il était peu clair et qu'il posait plusieurs problèmes.
D'une part, la loi de 1975 requiert non pas un agrément des sous-traitants, mais un agrément par le maître d'ouvrage des conditions de paiement.
D'autre part et surtout, l'article 1er bis institue une présomption qui lie le juge, et il est susceptible d'entraîner des conséquences d'ordre pénal qui se répercuteraient sur le donneur d'ordre ou le maître d'ouvrage, tenus solidairement, sans que puissent jouer les mécanismes de régularisation prévus à l'article L. 324-14-1 du code du travail.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. Il est vrai que le régime des présomptions est certainement assez mal adapté à la matière pénale, où le juge décide d'après son intime conviction, au vu des preuves qui lui sont apportées au cours des débats et qui sont contradictoirement discutées devant lui.
Je m'en remets à la sagesse de la Haute Assemblée sur ce point.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 3, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 1er bis est supprimé.

Article 2

M. le président. « Art. 2. _ L'article L. 324-10 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 324-10 . _ Est réputé travail dissimulé :
« _ soit l'exercice à but lucratif d'une activité de production, de transformation, de réparation ou de prestation de services ou l'accomplissement d'actes de commerce par toute personne physique ou morale qui, se soustrayant intentionnellement à ses obligations :
« a) N'a pas requis son immatriculation au répertoire des métiers ou, dans les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, au registre des entreprises, ou au registre du commerce et des sociétés, lorsque celle-ci est obligatoire ou à l'ordre professionnel dont relève son activité, ou a poursuivi l'une de ces activités après refus d'immatriculation au répertoire des métiers ou, dans les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, au registre des entreprises, ou au registre du commerce et des sociétés, ou postérieurement à une radiation,
« b) Ou n'a pas procédé aux déclarations qui doivent être faites aux organismes de protection sociale ou aux déclarations qui doivent être faites à l'administration fiscale en vertu des dispositions législatives et réglementaires en vigueur ;
« _ soit le fait pour tout employeur de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de l'une des formalités prévues aux articles L. 143-3 et L. 320.
« L'employeur qui remet un bulletin de paie mentionnant une rémunération qui ne correspond pas à la totalité des heures de travail effectuées se rend coupable de l'infraction mentionnée à l'alinéa précédent. »
Par amendement n° 4, M. Souvet, au nom de la commission des affaires sociales, propose de remplacer les cinq premiers alinéas du texte présenté par cet article pour l'article L. 324-10 du code du travail par quatre alinéas ainsi rédigés :
« Est réputé travail dissimulé par dissimulation d'activité l'exercice à but lucratif d'une activité de production, de transformation, de réparation ou de prestation de services ou l'accomplissement d'actes de commerce par toute personne physique ou morale qui, se soustrayant intentionnellement à ses obligations :
« a) N'a pas requis son immatriculation au répertoire des métiers ou, dans les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, au registre des entreprises, ou au registre du commerce et des sociétés, lorsque celle-ci est obligatoire, ou a poursuivi son activité après refus d'immatriculation, ou postérieurement à une radiation ;
« b) Ou n'a pas procédé aux déclarations qui doivent être faites aux organismes de protection sociale ou à l'administration fiscale en vertu des dispositions législatives et réglementaires en vigueur.
« Est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait, pour tout employeur, de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de l'une des formalités prévues aux articles L. 143-3 et L. 320. »
Cet amendement est assorti de deux sous-amendements.
Le sous-amendement n° 33, présenté par Mme Dieulangard et les membres du groupe socialiste et apparentés, tend :
I. - Dans le premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 4, à supprimer le mot : « intentionnellement ».
II. - Dans le dernier alinéa du même texte, à supprimer le mot : « intentionnellement ».
Le sous-amendement n° 61 rectifié, déposé par M. Jourdain, vise, dans le dernier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 4 pour remplacer les cinq premiers alinéas de l'article L. 324-10 du code du travail, à remplacer les mots : « tout employeur » par les mots : « toute personne physique ou morale ».
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 4.
M. Louis Souvet, rapporteur. Cet amendement, qui vise à récrire l'ensemble de l'article 2, se justifie par son texte même.
M. le président. La parole est à Mme Dieulangard, pour présenter le sous-amendement n° 33.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Il s'agit, par ce sous-amendement, de réintroduire le terme « intentionnellement » dans le texte de l'article 2.
Se soustraire à l'immatriculation au répertoire des métiers ou au registre du commerce, à la déclaration préalable à l'embauche, aux déclarations aux organismes de protection sociale ou à l'administration fiscale ne saurait être sérieusement considéré comme une simple négligence.
De plus, le prétexte souvent opposé par les employeurs aux inspecteurs et aux contrôleurs du travail qui constatent l'infraction est que le salarié n'est présent dans l'entreprise que depuis quelques heures, ce qui est le plus souvent faux.
Il convient de colmater cette brèche qui permet à certains d'échapper aux sanctions.
M. le président. La parole est à M. Jourdain, pour présenter le sous-amendement n° 61 rectifié.
M. André Jourdain. A l'article 2 du projet de loi, dans la première définition du travail dissimulé, l'expression « toute personne physique ou morale » est employée, alors que, dans la seconde définition, la formule utilisée est « tout employeur ».
Je propose que l'on retienne la même expression dans les deux définitions, à savoir « toute personne physique ou morale ».
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les sous-amendements n°s 33 et 61 rectifié ?
M. Louis Souvet, rapporteur. En ce qui concerne le sous-amendement n° 33, la commission émet un avis défavorable.
En effet, la position des auteurs de ce sous-amendement est contraire à celle qui a été adoptée par la commission, laquelle souhaite conserver la mention du caractère intentionnel dans la définition du comportement fautif, par exemple le non-accomplissement des formalités d'immatriculation et les infractions du même type.
S'agissant du sous-amendement n° 61 rectifié, la commission donne un avis favorable, par souci de symétrie avec l'expression employée au début de l'article L. 324-10 du code du travail. C'était une inattention et nous sommes heureux qu'elle soit réparée.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 4, ainsi que sur les sous-amendements n°s 33 et 61 rectifié ?
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 4, car il permet d'améliorer la rédaction du texte.
Par ailleurs, les cas de défaut d'inscription à un ordre professionnel sont d'ores et déjà visés par les délits spécifiques d'exercice illégal de la profession ou de port illégal du titre.
En ce qui concerne le sous-amendement n° 33, le Gouvernement lui est défavorable pour le motif invoqué à l'instant par M. le rapporteur.
Enfin, s'agissant du sous-amendement n° 61 rectifié, je serais tentée de dire que l'expression « employeur » est plus précise, puisqu'elle vise toute personne physique ou morale.
Cela étant, le Gouvernement partage le souci de cohérence de M. Jourdain et s'en remet sur ce point à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 33.
M. Guy Fischer. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Je voudrais réaffirmer ici que, dans les affaires de travail clandestin, il est très difficile de faire la preuve de l'intention frauduleuse.
Par ailleurs, je suis d'accord avec ma collègue Mme Dieulangard quand elle affirme que l'on ne peut sérieusement considérer comme une simple négligence le fait de se soustraire à l'immatriculation au répertoire des métiers, à la déclaration préalable à l'embauche ou encore aux déclarations aux organismes de protection sociale.
Nous voterons donc ce sous-amendement.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 33, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 61 rectifié, accepté par la commission et pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, l'amendement n° 4, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 5, M. Souvet, au nom de la commission des affaires sociales, propose de rédiger comme suit le dernier alinéa du texte présenté par l'article 2 pour l'article L. 324-10 du code du travail :
« La mention sur le bulletin de paie d'un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué constitue, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord conclu en application du chapitre II du titre Ier du livre II du présent code, une dissimulation d'emploi salarié. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet, rapporteur. Cet amendement vise à ce que ne soit pas considérée comme une dissimulation d'emploi salarié la mention, sur le bulletin de paie, d'un nombre total d'heures de travail inférieur au nombre d'heures réellement effectuées lorsque cette mention est faite en application d'une convention ou d'un accord d'annualisation du temps de travail.
L'alinéa inséré par l'Assemblée nationale vise à combattre une pratique qui est de plus en plus répandue, celle de la sous-évaluation des heures réellement effectuées.
Sans remettre en cause cet objectif, l'amendement tend à tenir compte des pratiques liées au lissage des rémunérations résultant des accords d'annualisation du temps de travail.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. Le Gouvernement est favorable à cet amendement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 5.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Nous ne voterons pas cet amendement, même si nous en comprenons l'argumentation et ne voulons pas faire de procès d'intention à quiconque.
De fait, les méthodes de lissage qui sont couramment employées dans le cas de préretraite ou de temps partiel annualisé - même si nous réprouvons cette annualisation - conduisent à porter sur le bulletin de paie des mentions horaires fausses. Il est de l'intérêt du salarié que sa rémunération soit lissée, mais cela conduit l'employeur à se mettre en contradiction avec la lettre de la loi.
Nous préférerions que la réglementation relative aux mentions portées sur le bulletin de paie soit modifiée plutôt que de voir apparaître cette disposition dans le code du travail. Cela n'est-il pas envisageable ? Un récapitulatif des heures travaillées ou qui seront travaillées ne pourrait-il, par exemple, être annexé au bulletin de paie ? Ou encore, le nombre prévisionnel d'heures annuelles ne pourrait-il être calculé en début d'exercice et adressé par document écrit à chaque salarié concerné ? Ne peut-on réactiver la commission Turbot - vous y avez fait allusion hier, madame le ministre - qui vous a récemment fait des propositions sur la simplification du bulletin de paie pour qu'elle étudie cette question ?
Nous sommes particulièrement soucieux des garanties dont disposeront les salariés, et ne pouvons voter une mesure qui entérine une forme de fraude, fût-elle acceptée par tous.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 5, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 2, modifié.

(L'article 2 est adopté.)

Article 2 bis

M. le président. « Art. 2 bis . _ Le premier alinéa de l'article L. 620-3 du code du travail est complété par les mots : "et de façon indélébile". » - (Adopté.)

Article 3

M. le président. « Art. 3. _ I. _ Dans l'article L. 324-11-1 du code du travail, les mots : "un mois" sont remplacés par les mots : "six mois" .
« II. _ L'article L. 324-11-1 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans des conditions définies par décret, le salarié obtient des agents de contrôle mentionnés à l'article L. 324-12 les informations relatives à l'accomplissement par son employeur de la déclaration préalable à l'embauche le concernant. Dans le cas où cette formalité n'est pas accomplie par l'employeur, ces agents sont habilités à communiquer au salarié les informations relatives à son inscription sur le registre unique du personnel. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 62, MM. Jourdain et Ostermann proposent de rédiger comme suit le I de cet article :
« I. - Dans l'article L. 324-11-1 du code du travail, les mots : "un mois de salaire" sont remplacés par les mots : "six mois de salaire, sauf dans le cas où le salarié a sciemment accepté cette situation". »
Par amendement n° 56, MM. Fischer et Pagès, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, à la fin du paragraphe I de l'article 3, de remplacer les mots : « six mois » par les mots : « un an ».
La parole est à M. Jourdain, pour défendre l'amendement n° 62.
M. André Jourdain. L'Assemblée nationale a porté l'indemnité forfaitaire à six mois de salaire.
Cela est tout à fait justifié lorsque le salarié ignorait sa situation de travailleur dissimulé. En revanche - et cela a été dit lors de la discussion générale - chacun connaît des cas de « salariés » qui acceptent de ne pas être déclarés, voire qui demandent à ne pas l'être. Si un contrôle survient alors qu'ils sont dans cette situation, ils auraient une prime supplémentaire égale à six mois de salaire.
M. Ostermann et moi-même avons déposé un amendement qui vise à appliquer les dispositions adoptées par l'Assemblée nationale, sauf lorsque le salarié a sciemment accepté la situation de travailleur dissimulé.
Je reconnais d'emblée la difficulté d'application de cette disposition. Cependant, je voulais attirer l'attention du Gouvernement et la vôtre, mes chers collègues, sur cette situation. J'attends la réponse du Gouvernement, connaissant déjà celle de la commission des affaires sociales.
M. le président. La parole est à M. Fischer, pour défendre l'amendement n° 56.
M. Guy Fischer. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, cet amendement vise à renforcer les droits des travailleurs qui sont employés clandestinement et qui sont victimes d'une rupture de la relation de travail, en portant à un an de salaire l'indemnité forfaitaire dont ceux-ci bénéficient.
Nous proposons donc d'aller encore plus loin que l'Assemblée nationale, qui a déjà fait passer cette indemnité de un mois à six mois de salaire. En fait, nous proposons de renforcer le caractère dissuasif de cette mesure. Il s'agit de sommes particulièrement importantes et, comme le note M. le rapporteur, cette indemnité compensera, le cas échéant, l'absence d'allocation de chômage. Pour un grand nombre de chômeurs, un an est, compte tenu de la situation actuelle de l'emploi, un délai minimal pour retrouver un emploi.
Plus que de pénaliser les entreprises, il s'agit avant tout, selon moi, de contribuer à la défense des salariés qui sont les premières victimes du travail illégal.
Leur offrir des droits supplémentaires, c'est aussi les aider à refuser cette situation et agir contre leur employeur malhonnête.
Il n'existe donc nul désir de surenchère dans notre proposition. Il s'agit d'offrir une réelle réparation aux principales victimes de ces pratiques, le plus souvent taillables et corvéables à merci.
Sous le bénéfice de ces explications, je vous invite, mes chers collègues, à approuver cet amendement, qui durcit le dispositif d'un article dont nous approuvons les dispositions.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 62 et 56 ?
M. Louis Souvet, rapporteur. L'amendement n° 62 comporte en quelque sorte deux parties. La première, qui prévoit une indemnité égale à six mois de salaire, est satisfaite. S'agissant de la seconde, qui vise à exclure le versement de cette indemnité lorsque le salarié a sciemment accepté la situation de travailleur dissimulé.
M. Jourdain a dit qu'il attendait la réponse du Gouvernement ; il connaît en effet déjà celle de la commission, qui s'est réunie ce matin.
Vous l'avez dit, monsieur Jourdain, se posera un très important problème de preuve. Il est évident que tout tourne autour de cette question. Comment apprécier, par exemple, la vulnérabilité de la personne, la difficulté à trouver un travail déclaré ? C'est la raison pour laquelle, ce matin, la commission a souhaité que vous retiriez votre amendement, sinon elle émettra un avis défavorable.
Le dispositif prévu par l'amendement n° 56 serait dur, monsieur Fischer. Pour autant, je ne suis pas sûr qu'il protégerait les salariés. En effet, l'indemnité serait avantageuse et pourrait inciter certains salariés à se satisfaire d'un emploi dissimulé quand ils pourraient faire autrement. C'est la raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 62 et 56 ?
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. Le Gouvernement souhaiterait, lui aussi, que M. Jourdain retire l'amendement n° 62. Il est vrai que la situation est assez difficile, comme l'a très bien dit à l'instant M. le rapporteur, et je sais que les débats qui ont eu lieu ce matin en commission ont été très instructifs. J'ajoute qu'il s'agit, là aussi, d'une mesure dissuasive à l'égard de l'employeur. Le Gouvernement souhaite donc le retrait de cet amendement. A défaut, il émettra un avis défavorable.
Par ailleurs, le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 56, l'indemnité ayant déjà été portée d'un mois à six mois de salaire à l'Assemblée nationale. La proposition présentée par M. Fischer est, à l'évidence, excessive.
M. le président. Monsieur Jourdain, l'amendement n° 62 est-il maintenu ?
M. André Jourdain. Comme je l'ai dit, je connais les difficultés d'application d'une telle proposition, mais je voulais attirer l'attention sur le problème qui se pose. Il faut trouver un moyen de le résoudre. Je suis bien conscient que cet amendement ne permettra pas d'y parvenir. Aussi, je le retire, en espérant que l'on réfléchira à un dispositif permettant de sanctionner les comportements que j'ai mentionnés tout à l'heure.
M. le président. L'amendement n° 62 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amdement n° 56, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 6, M. Souvet, au nom de la commission des affaires sociales, propose de rédiger comme suit le début du paragraphe II de l'article 3 : « II. - Ce même article est complété... ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel, qui s'explique par son texte même.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Monsieur le président, Mme Couderc devant assister à une réunion à Matignon, permettez-moi de prendre le relais. Ce sera peut-être moins plaisant pour vous, mais, je l'espère, tout aussi sympathique ! (Sourires.)
M. le président. Vous me gênez, monsieur le ministre ! (Nouveaux sourires.)
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Cela étant, le Gouvernement émet un avis favorable sur l'amendement n° 6.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 6, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 34, Mme Dieulangard et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, après les mots : « le concernant », de rédiger comme suit la fin du texte présenté par le II de l'article 3 pour compléter l'article L. 324-11-1 du code du travail : « ... ainsi que des obligations prévues à l'article L. 324-10. Le cas échéant, il obtient également les informations relatives à l'identification du donneur d'ordre, lorsque cedernier peut être mis en cause au titre de la solidarité financière. »
La parole est à M. Mazars.
M. Georges Mazars. L'indemnité due au salarié concerne tous les cas de travail illégal. Le projet de loi ne prévoit de lui communiquer que les informations relatives à la déclaration préalable à l'embauche et, éventuellement, les informations concernant la tenue du registre du personnel.
En revanche, il n'est pas prévu d'informer le salarié dans les hypothèses de non-conformité du livre de paie, d'absence d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés, au répertoire des métiers, de déclarations fiscales et sociales ; autant de formalités qui doivent constituer l'élément matériel du délit de travail illégal et qui ouvrent, par conséquent, droit à indemnité pour le salarié dont la relation de travail est rompue.
Par ailleurs, il est important que le salarié puisse faire valoir ses droits par la connaissance du donneur d'ordre dans le cas de sous-traitance lorsque son employeur est insolvable, voire quand il a organisé son insolvabilité.
Le salarié est la première victime de l'employeur qui a eu recours à ses services en omettant de le déclarer régulièrement. Il est donc souhaitable, pour obtenir plus facilement réparation et reconnaissance de ses droits, qu'il puisse disposer de l'ensemble des informations qui le concernent.
Le projet de loi ne prévoit de lui communiquer que les informations relatives à la déclaration préalable à l'embauche et, éventuellement, au registre du personnel. En revanche, il n'est pas prévu d'informer le salarié sur le livre de paie, l'absence d'immatriculation auprès des organismes consulaires, l'état des déclarations fiscales et sociales. Ces formalités peuvent constituer l'élément matériel du délit de travail illégal ou dissimulé et, par conséquent, elles doivent être prises en compte dans l'ouverture du droit à indemnité.
En outre, il est important que le salarié puisse aussi faire valoir ses droits lorsque l'employeur est insolvable ou a organisé son insolvabilité, en se retournant contre le ou les éventuels donneurs d'ordre qui sont à l'origine du délit. Le salarié doit donc avoir la possibilité d'identifier celui-ci et d'exercer un recours à son encontre.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 34 ?
M. Louis Souvet, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement. Elle considère que cette pratique transformerait le salarié en un véritable agent de contrôle, ce qui n'est pas le but que l'on cherche à atteindre.
S'agissant des renseignements dont il pourrait avoir besoin pour son indemnisation, le corps de contrôle auquel il s'adressera ou le tribunal pourront les lui fournir.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Le Gouvernement considère, lui aussi, qu'une telle disposition ne doit pas être adoptée.
Cet amendement vise, notamment, à élargir l'information du salarié à toutes les données relatives au respect, par son employeur, de ses obligations déclaratives, commerciales, fiscales et sociales. Une telle disposition ne peut pas être acceptée car il ne s'agit pas, pour le salarié, d'obtenir des informations qui dépassent largement sa situation personnelle dans l'entreprise. On comprend qu'il ait accès à ce qui le concerne ; il ne serait pas raisonnable de lui permettre d'accéder à toutes les données de l'entreprise. Un tel amendement serait sans doute très mal accueilli par l'entreprise.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 34, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 35,Mme Dieulangard et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de compléter l'article 3 par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - Les agents de contrôle mentionnés à l'article L. 324-12 sont habilités à délivrer une attestation au salarié. Cette attestation mentionnant les constats d'infraction à l'article L. 324-10 s'impose aux organismes en charge de la gestion de l'indemnisation des demandeurs d'emploi et de protection sociale. »
La parole est à M. Mazars.
M. Georges Mazars. Cet amendement tend à assurer une meilleure protection au salarié victime du travail clandestin, particulièrement dans ses relations avec l'ASSEDIC.
Cet amendement est également fondé sur le principe suivant lequel le salarié est la première victime du travail dissimulé. En tant que tel, il ne doit pas être sanctionné pour les délits commis par un autre puisque, en fait, il est la victime de ce dernier.
La relation de travail étant rompue, le salarié devra très certainement s'inscrire auprès de l'ASSEDIC. Il paraît donc de bonne justice que les périodes durant lesquelles il a travaillé sans avoir été déclaré puissent être prises en compte.
Il en est de même en ce qui concerne les organismes sociaux qui délivrent les prestations d'assurance maladie ou de retraite. Sur ce dernier point, le salarié peut être gravement lésé si sa situation clandestine s'est poursuivie plusieurs années. C'est pourquoi nous proposons que l'agent de contrôle puisse délivrer cette attestation.
J'appelle votre attention sur le fait que nous souhaitons que les agents soient habilités à délivrer cette attestation et qu'il ne s'agisse pas pour eux d'une obligation. Ainsi pourront-ils apprécier au cas par cas l'opportunité de délivrer ce document, et ne pas le faire en cas de doute.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur l'amendement n° 35. La logique retenue tant dans le code du travail que dans le projet de loi est de ne pas mettre les conséquences financières de la découverte du travail dissimulé, notamment l'indemnisation du salarié, à la charge de la collectivité publique. C'est pourquoi une indemnité de six mois dédommage le salarié.
L'adoption de l'amendement n° 35 aboutirait à changer la logique : l'attestation aurait nécessairement pour conséquence de mettre à la charge des salariés légaux, non dissimulés, la prestation versée aux salariés dissimulés.
La commission émet donc un avis défavorable sur l'amendement n° 35.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. L'explication que vient de donner M. le rapporteur me paraît tellement claire que j'ai quelque scrupule à y ajouter des arguments.
La mise en oeuvre de la proposition de Mme Dieulangard reviendrait à généraliser l'appréciation faite actuellement au cas par cas par les Assedic. Elle poserait des problèmes importants.
Surtout, l'objectif de protection des salariés dissimulés puis licenciés est déjà satisfait, comme vient de le dire M. le rapporteur, par le versement d'une indemnité forfaitaire dont le montant a été porté de un à six mois de salaire.
Cet amendement ne semble donc pas opportun. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 35, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 3, modifié.

(L'article 3 est adopté.)

Article 3 bis

M. le président. « Art. 3 bis . _ Après l'article L. 341-6-3 du code du travail, il est inséré un article L. 341-6-4 ainsi rédigé :
« Art. L. 341-6-4 . _ Toute personne qui ne s'est pas assurée, lors de la conclusion d'un contrat dont l'objet porte sur une obligation d'un montant au moins égal à 20 000 francs en vue de l'exécution d'un travail, de la fourniture d'une prestation de services ou de l'accomplissement d'un acte de commerce, que son cocontractant s'acquitte de ses obligations au regard des dispositions du premier alinéa de l'article L. 341-6 sera tenue solidairement responsable avec ce dernier, sans préjudice de l'application des dispositions des articles L. 324-14 à L. 324-14-2, au paiement de la contribution spéciale prévue à l'article L. 341-7.
« Les modalités selon lesquelles sont effectuées les vérifications imposées par le présent article ainsi que la répartition de la charge de la contribution en cas de pluralité de cocontractants sont précisées par décret. »
Par amendement n° 49, M. Masson, au nom de la commission des lois, propose, après le premier alinéa du texte présenté par cet article pour l'article L. 341-6-4 du code du travail, d'insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions de l'alinéa précédent ne sont pas applicables à la personne physique qui conclut un contrat pour son usage personnel ou professionnel, celui de son conjoint, de ses ascendants ou descendants. »
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Paul Masson, rapporteur pour avis. Cet amendement a pour objet de supprimer une disposition qui ne figurait pas dans le texte initial et qui a été introduite par l'Assemblée nationale après l'article L. 341-6-3 du code du travail.
Le texte adopté par l'Assemblée nationale dispose que « toute personne qui ne s'est pas assurée, lors de la conclusion d'un contrat dont l'objet porte sur une obligation d'un montant au moins égal à 20 000 francs... que son cocontractant « - c'est-à-dire son entrepreneur - » s'acquitte de ses obligations au regard des dispositions du premier alinéa de l'article L. 341-6 » - ce texte précise qu'une entreprise ne doit pas employer un étranger qui ne soit pas en situation régulière - « sera tenue solidairement responsable avec ce dernier... au paiement de la contribution spéciale prévue à l'article L. 341-7 », qui est la contribution spéciale versée à l'office des migrations internationales et dont le montant ne saurait être inférieur à environ 9 000 francs.
La commission des lois a estimé que cette disposition, dans sa rigueur, était peut-être de nature à contrarier l'objectif tout à fait justifié qui est de poursuivre le travail clandestin. En effet, il nous semble assez déraisonnable d'exiger d'un particulier qu'il s'assure que tous les salariés étrangers de son cocontractant sont titulaires d'un titre de travail.
Imaginez qu'un particulier veuille faire réaliser des travaux dans sa salle de bains : il s'adresse à une entreprise de bâtiment et de travaux publics de son quartier. Si l'entreprise n'a pas fait figurer dans son registre un travailleur en situation irrégulière, le particulier qui a passé un contrat avec cette entreprise et qui ne s'est pas assuré de la véracité du registre du travail de l'intéressé se trouve automatiquement engagé dans une contribution spéciale, puisqu'il est responsable solidairement avec l'entreprise.
Nous estimons que c'est un peu draconien et que cette disposition risque de pénaliser les petites entreprises en créant un phénomène de distorsion en faveur des entreprises plus importantes.
C'est pourquoi la commission des lois a déposé un amendement n° 49 tendant à préciser que les dispositions que je viens d'exposer ne sont pas applicables à la personne physique qui conclut un contrat pour son usage personnel ou professionnel, celui de son conjoint, de ses ascendants ou descendants. Cet amendement ne met à mon avis pas en péril la structure, l'ossature du texte, et paraît au contraire de nature à éviter bien des contentieux à la fois inutiles et injustes.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. La commission des affaires sociales a émis un avis défavorable sur l'amendement n° 49 au motif que, en faisant référence à l'usage professionnel, il changerait trop la portée du dispositif.
Néanmoins, si M. le rapporteur pour avis acceptait de rectifier son amendement afin de supprimer cette référence à l'usage professionnel et de préciser que « les dispositions de l'alinéa précédent ne sont pas applicables au particulier qui conclut un contrat pour son usage personnel, celui de son conjoint, de ses ascendants ou descendants », expression que l'on retrouve à plusieurs reprises dans le code du travail, la commission des affaires sociales émettrait alors un avis très favorable.
M. le président. Monsieur le rapporteur pour avis, que pensez-vous de la suggestion de M. le rapporteur ?
M. Paul Masson, rapporteur pour avis. Monsieur le président, je ne vais pas demander la réunion de la commission des lois pour savoir si l'on peut rectifier l'amendement n° 49, déposé par son rapporteur avec son mandat.
A titre personnel - j'en prends la responsabilité vis-à-vis de mes collègues - je pense que la proposition émise par le rapporteur de la commission des affaires sociales, en supprimant la notion de l'usage professionnel et en laissant simplement subsister l'usage personnel, est de nature à restreindre un peu le dispositif que nous avions imaginé.
Mais, pour tenir compte des observations de la commission suivie au fond, je pense pouvoir rectifier l'amendement n° 49, qui se lirait ainsi :
« Les dispositions de l'alinéa précédent ne sont pas applicables au particulier qui conclut un contrat pour son usage personnel, celui de son conjoint, de ses ascendants ou descendants. »
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 49 rectifié, présenté par M. Masson, au nom de la commission des lois, et tendant, après le premier alinéa du texte présenté par l'article 3 bis pour l'article L. 341-6-4 du code du travail, à insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions de l'alinéa précédent ne sont pas applicables au particulier qui conclut un contrat pour son usage personnel, celui de son conjoint, de ses ascendants ou descendants. »
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 49 rectifié ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Le Gouvernement ne peut que s'incliner devant la partition à deux voix si bien jouée qui a abouti à un texte répondant tout à fait au souci du Gouvernement. Ce dernier émet donc un avis favorable sur l'amendement n° 49 rectifié.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 49 rectifié, accepté par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 3 bis , ainsi modifié.

(L'article 3 bis est adopté.)

Article additionnel après l'article 3 bis

M. le président. Par amendement n° 24, MM. Ostermann, Grignon, Vasselle et Lorrain proposent d'insérer, après l'article 3 bis, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article L. 324-14-1 du code du travail, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. ... - Les organisations professionnelles d'employeurs et de travailleurs indépendants légalement constituées, ainsi que les syndicats de salariés, sont habilités à exercer devant toutes les juridictions une action civile relative à des faits de travail dissimulé. »
La parole est à M. Ostermann.
M. Joseph Ostermann. Jusqu'à présent, les tribunaux n'ont eu à connaître que de peu de cas de travail clandestin. Cela est dû, notamment, à la réticence des artisans, même s'ils en sont directement victimes, à porter plainte contre leurs « concurrents » qui ont recours au travail dissimulé.
La possibilité, pour des organisations professionnelles patronales, voire des syndicats, d'intenter une action en justice contre les fraudeurs constituerait certainement une avancée notable dans ce domaine.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. La commission des affaires sociales a émis un avis défavorable sur l'amendement n° 24, qui est satisfait à la fois par le code du travail, par nos traditions juridiques et par la jurisprudence.
Les organisations professionnelles et les syndicats ont vocation à défendre en justice les intérêts de leurs mandants, individuellement ou collectivement. Je citerai, par exemple, l'article L. 411-11 du code du travail.
Je souhaiterais donc que, après avoir éventuellement entendu les explications du Gouvernement, notre collègue Joseph Ostermann accepte de bien vouloir retirer son amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. M. Ostermann n'a pas eu tort de soulever de nouveau la question à travers cet amendement. Mais ce dernier - je partage ainsi l'avis de M. le rapporteur - ne me paraît pas utile.
L'article L. 411-11 du code du travail prévoit que les syndicats professionnels « ont le droit d'ester en justice. Ils peuvent, devant toutes les juridictions, exercer tous les droits réservés à la partie civile relativement aux faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession qu'ils représentent. »
J'ajoute, monsieur Ostermann, que la jurisprudence a également admis que les syndicats professionnels sont recevables à poursuivre soit directement, soit par constitution de partie civile, les fraudes ou les agissements susceptibles de nuire à l'intérêt de la profession.
Par conséquent, ces dispositions devraient désormais pouvoir être opérationnelles. Vous avez souligné à juste titre, monsieur le sénateur, que tel n'était pas toujours le cas jusqu'à présent. Mais, à l'avenir, elles pourront porter tous leurs fruits, me semble-t-il.
Cet amendement me paraît donc inutile, je le répète. Je vous invite donc à le retirer au vu de ce qu'a dit M. le rapporteur et des précisions que je vous ai apportées.
M. le président. Monsieur Ostermann, l'amendement n° 24 est-il maintenu ?
M. Joseph Ostermann. Compte tenu des explications et des précisions qui m'ont été fournies par M. le rapporteur et par M. le ministre, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 24 est retiré.

6

ÉLECTION D'UN VICE-PRÉSIDENT DU SÉNAT

M. le président. Voici le résultat du scrutin pour l'élection d'un vice-président : :

Nombre de votants

19912

Nombre de suffrages exprimés
187
Majorité absolue des suffrages 94

A obtenu :
M. Gérard Larcher : 187 voix. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Gérard Larcher ayant obtenu la majorité absolue des suffrages exprimés, je le proclame vice-président. (Nouveaux applaudissements sur les mêmes travées.)
Permettez-moi, mon cher collègue, de vous présenter mes félicitations personnelles.
M. Gérard Larcher. Merci, monsieur le président !

7

NOMINATION D'UN MEMBRE DE LA DÉLÉGATION
DU SÉNAT POUR L'UNION EUROPÉENNE

M. le président. Je rappelle au Sénat que le groupe du Rassemblement pour la République a présenté une candidature pour la délégation du Sénat pour l'Union européenne.
La présidence n'a reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par l'article 9 du règlement.
En conséquence, cette candidature est ratifiée et je proclame M. Yann Gaillard membre de la délégation du Sénat pour l'Union européenne, en remplacement de M. Yves Guéna. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

8

LUTTE CONTRE LE TRAVAIL ILLÉGAL

Suite de la discussion
et adoption d'un projet de loi

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, relatif au renforcement de la lutte contre le travail illégal.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'article 4.

Article 4

M. le président. « Art. 4. _ L'article L. 324-12 du code du travail est ainsi modifié :
« 1° Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« Les infractions aux interdictions mentionnées à l'article L. 324-9 sont recherchées par les officiers et agents de police judiciaire, les agents de la direction générale des impôts et de la direction générale des douanes, les agents agréés à cet effet et assermentés des organismes de sécurité sociale et des caisses de mutualité sociale agricole, les inspecteurs du travail et fonctionnaires de contrôle assimilés au sens de l'article L. 611-10, les officiers et les agents assermentés des affaires maritimes ainsi que les contrôleurs et les adjoints de contrôle des transports terrestres, et constatées par ces agents au moyen des procès-verbaux transmis directement au parquet. Ces procès-verbaux font foi jusqu'à preuve contraire. » ;
« 2° et 3° Supprimés ;
« 4° Au second alinéa, les mots : " Pour effectuer cette constatation " sont remplacés par les mots : " Pour la recherche et la constatation de ces infractions " ;
« 5° L'article est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
« A l'occasion de la mise en oeuvre de ces pouvoirs, ils peuvent se faire présenter :
« a) Les documents justifiant que l'immatriculation, les déclarations et les formalités mentionnées à l'article L. 324-10 ont été effectuées ;
« b) Les documents justifiant que l'entreprise s'est assurée, conformément aux dispositions des articles L. 324-14 ou L. 324-14-2, que son ou ses contractants se sont acquittés de leurs obligations au regard de l'article L. 324-10 ou, le cas échéant, des réglementations d'effet équivalent de leur pays d'origine ;
« c) Les documents commerciaux relatifs aux prestations exécutées en violation des dispositions de l'article L. 324-9.
« Les agents agréés susmentionnés des organismes de sécurité sociale et des caisses de mutualité sociale agricole et les agents de la direction générale des impôts sont en outre habilités à interroger en quelque lieu que ce soit et avec son consentement toute personne rémunérée par l'employeur ou par un travailleur indépendant, afin de connaître la nature de ses activités, ses conditions d'emploi et le montant des rémunérations s'y rapportant, y compris les avantages en nature.
« Les magistrats de la Cour des comptes et des chambres régionales des comptes peuvent, à l'occasion de leurs contrôles, rechercher et constater des infractions relatives au travail dissimulé. »
Sur l'article, la parole est à M. Plasait.
M. Bernard Plasait. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, si j'interviens sur cet article 4, c'est qu'il est, à mon sens, un des articles clés de ce projet de loi. Il vise, en effet, à accroître les compétences des agents de contrôle et à mieux préciser la procédure dudit contrôle.
Une innovation d'importance réside dans la modification de l'article L. 324-12 du code du travail en vue de permettre aux agents de contrôle non plus seulement de constater les infractions au travail clandestin, mais également de les rechercher ainsi que de se faire communiquer les documents nécessaires à leurs investigations.
Ces dispositions seront donc de nature à améliorer l'efficacité du contrôle et à remédier à l'impuissance de certaines catégories d'agents confrontés à des indices de travail clandestin à l'occasion de leur mission principale.
Comme je le rappelais hier dans la discussion générale, c'est l'impuissance de certains services qui m'avait conduit à déposer une proposition de loi tendant à renforcer les pouvoirs des agents de contrôle de l'URSSAF et de la mutualité sociale agricole.
Bien évidemment, cette proposition de loi n'avait pas pour ambition de traiter la question de la lutte contre le travail clandestin dans son ensemble, mais de mettre en relief une difficulté particulière.
En effet, les agents des URSSAF et de la MSA effectuent des opérations de contrôle au cours desquelles ils découvrent des fraudes au droit du travail, puisque leur mission est de contrôler le respect des dispositions du code de la sécurité sociale, le recouvrement des cotisations en matière d'assurances sociales et l'application de certaines dispositions du code du travail telles que celles qui sont relatives au travail clandestin.
Le contrôle des agents de l'URSSAF, en matière sociale, ne porte que sur l'assiette des cotisations et les contrôleurs ont compétence, au même titre que les inspecteurs du travail, pour vérifier que tous les salariés sont bien déclarés.
L'article R. 243-59 du code de la sécurité sociale permet aux fonctionnaires et agents du contrôle de poser des questions directement aux salariés, notamment pour leur demander leur nom, leur adresse et le montant de la rémunération, y compris les avantages en nature, dont ils bénéficient. Il ne précise ni où ni quand cet interrogatoire peut avoir lieu.
Se fondant sur cet article, la chambre sociale de la Cour de cassation, dans un arrêt du 6 juin 1996, a considéré que : « Attendu qu'il résulte de ce texte que les agents de contrôle de l'URSSAF ne sont autorisés qu'à entendre les salariés eux-mêmes, dans l'entreprise ou sur les lieux de travail ; que les auditions opérées en violation de ce texte entraînent la nullité du contrôle... »
Bref, l'interprétation ainsi faite de l'article R. 243-59, qui ne mentionne expressément aucune condition particulière de lieu ou de temps, est un peu étonnante, sauf à comprendre que les dispositions de cet article émanent d'un décret du 31 janvier 1996 pris en application de la loi du 25 juillet 1994 - article L. 243-11 du code de la sécurité sociale - qui organise le contrôle dans l'entreprise.
C'est pourquoi, tant dans un souci de protection sociale des salariés que dans celui d'une concurrence loyale, il m'a paru souhaitable de permettre aux agents de contrôle d'interroger les salariés à leur domicile, étant entendu que les intéressés y parlent évidemment plus librement.
Je suis heureux de constater que cette proposition trouve globalement satisfaction dans la rédaction du paragraphe 5 de l'article 4, à la nuance près qu'il n'est plus fait référence au domicile puisqu'il est précisé que l'audition peut se faire « en quelque lieu que ce soit ».
Je tiens quand même à préciser que, dans mon esprit, cette audition au domicile du salarié n'avait, bien entendu, rien d'attentatoire à la vie privée : je suis trop soucieux du respect des libertés fondamentales pour qu'il puisse en être autrement. J'avais d'ailleurs indiqué que les conditions de cette audition seraient fixées par un décret en Conseil d'Etat. Peut-être eût-il mieux valu préciser que l'audition ne pourrait se faire sans le consentement du salarié, mais, avec la rédaction qui a été retenue, c'est maintenant chose faite.
Néanmoins, et même si je comprends parfaitement l'expression « en quelque lieu que ce soit », je m'interroge sur sa portée. Peut-on, en effet, imaginer que les agents de contrôle s'adressent au salarié, sur le domaine public ou ailleurs, avant que celui-ci exprime son consentement ? Ne serait-ce pas, alors, attentatoire à une autre liberté tout aussi fondamentale, celle d'aller et venir librement ? Dans ce cas, quelles seraient les garanties de discrétion pour le salarié ?
Dans son rapport, au premier paragraphe de la page 37, notre collègue Louis Souvet indique que ces contrôles devraient pouvoir se faire sur place ou sur convocation du salarié. Soit ! Mais, sauf précision contraire, l'article 4 ne le prévoit pas.
Enfin, la commission des affaires sociales nous proposera de remplacer le verbe « interroger » par le verbe « entendre », lequel est, en effet, moins inquisitorial. Je n'y vois, évidemment, aucune objection.
En conclusion, je suivrai les suggestions de M. le rapporteur.
Par ailleurs, monsieur le ministre, je vous remercie d'avoir tenu les engagements que vous aviez pris devant l'Assemblée nationale le 12 décembre dernier concernant les pouvoirs des officiers et des agents de police judiciaire en la matière, puisque les dispositions de l'article 4 bis, supprimées en seconde délibération, sont intégralement reprises à l'article 10 du projet de loi portant diverses dispositions relatives à l'immigration, que nous examinerons dans quelques jours.
M. le président. Par amendement n° 57, MM. Fischer et Pagès, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent :
I. - Dans la première phrase du texte présenté par le 1° de l'article 4 pour le premier alinéa de l'article L. 324-12 du code du travail, de remplacer les mots : « sont recherchés » par les mots : « sont constatés ».
II. - En conséquence, de supprimer le 4° de cet article.
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Cet amendement vise à supprimer la disposition introduite par l'article 4 et modifiant l'article L. 324-12, qui élargit la mission légale des corps de contrôle compétents depuis la loi du 3 janvier 1991 contre le travail clandestin - police nationale, gendarmerie, fisc, douanes, URSSAF, affaires maritimes, inspection du travail, contrôleurs des transports terrestres - en leur donnant, au-delà de leur mission traditionnelle, celle de rechercher le travail illégal.
Cette notion nouvelle me paraît, ainsi qu'au représentant des inspecteurs du travail que j'ai pu rencontrer, bien trop floue et permet toutes les interrogations sur l'utilisation qui pourrait en être faite.
Je crains que cet élargissement à la « recherche » de l'infraction, qui concerne donc également les forces de police, ne soit, en fait, le pendant, dans le code du travail, des dispositions figurant dans le projet de loi relatif à l'immigration et modifiant le code de procédure pénale, dispositions qui permettraient l'intervention de la police et de la gendarmerie dans les entreprises au prétexte de lutter contre le travail clandestin : elles pourront contrôler l'identité des salariés, vérifier leur inscription sur le registre du personnel et leur déclaration préalable à l'embauche.
Cela se fera hors des garanties et contrôles judiciaires normaux, c'est-à-dire non pas sous la responsabilité du juge d'instruction intervenant parce que des présomptions d'infraction existent, mais sur simple réquisition du parquet.
A terme, on permet, et pour la première fois, aux forces de police d'intervenir dans les conflits du travail, d'organiser de véritables rafles contre les travailleurs étrangers, a priori suspects, et ensuite - pourquoi pas ? - de déclencher la répression contre les délégués syndicaux et contre le droit de grève.
Ces dispositions rappellent certaines périodes noires de notre histoire.
J'ai montré, dans la discussion générale, à quel point les deux textes, le projet sur le travail illégal et le projet sur l'immigration, sont liés. C'est en les rapprochant que l'élargissement à la « recherche » des infractions, qui peut paraître de prime abord relativement anodin, prend toute sa dimension et révèle sa dangerosité.
Au-delà du problème de l'intervention de la police, ce sont les compétences exclusives de l'inspection du travail, son indépendance par rapport à la police, sa mission de contrôle de l'ensemble de la législation du travail en vigueur qui sont en jeu. Je crains que sa mission protectrice des travailleurs, ses moyens et prérogatives d'action ne soient ainsi atteints.
Avec la rédaction proposée par le présent projet de loi pour le premier alinéa de l'article L. 324-9, ne risque-t-on pas de transformer la mission des inspecteurs du travail, qui n'est pas avant tout de poursuivre les fraudeurs ou de contrôler et de soupçonner les salariés, mais de défendre les salariés ?
Les inspecteurs du travail, ainsi que les autres corps énumérés, seront-ils cantonnés au rang de supplétifs de la police dans la chasse aux travailleurs illégaux immigrés ?
En tout cas, je ne pense pas que le fait de garder sur ce point la législation actuelle soit un obstacle à une lutte efficace contre le travail illégal.
Les représentants des inspecteurs du travail, avec qui nous avons eu des contacts, nous l'ont confirmé : si l'efficacité dans la lutte contre le travail illégal est insuffisante, il faut leur donner des moyens supplémentaires, alors que l'on supprime des postes dans la loi de finances pour 1997. Il faut que le parquet mène jusqu'au bout les procédures contre les donneurs d'ordre et les entreprises ayant recours au travail clandestin !
C'est sous le bénéfice de ces explications que je vous demande, mes chers collègues, d'approuver notre amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. J'ose espérer, mon cher collègue, que le tableau que vous venez de décrire n'existe que dans votre esprit.
M. Guy Fischer. Nous l'espérons aussi !
M. Louis Souvet, rapporteur. La commission a donné un avis défavorable à cet amendement n° 57, parce qu'il est contraire à la philosophie d'un texte qui vise à renforcer les pouvoirs de contrôle des agents.
Si nous suivions votre proposition, mon cher collègue, nous en reviendrions à la situation actuelle, qui ne nous donne pas satisfaction - pas plus qu'à vous.
J'ajoute que les pouvoirs des corps de contrôle sont définis par les textes qui leur sont applicables, et non pas par le code du travail. Votre souhait ne serait donc pas satisfait par votre amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. En principe, monsieur Fischer, il est préférable que le contrôle serve à rechercher plutôt qu'à constater ! Je suis donc, comme M. le rapporteur, défavorable à cet amendement.
Par ailleurs, je souhaite faire une mise au point : nous n'avons pas réduit le nombre des inspecteurs du travail dans la loi de finances, mais certains inspecteurs qui étaient rattachés au ministère du travail le sont maintenant au ministère des transports, tout en exerçant les mêmes fonctions. Il s'agit simplement d'assurer une meilleure lisibilité des tâches des uns et des autres.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 57, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 63, MM. Jourdain et Ostermann proposent, dans la première phrase du texte présenté par le 1° de l'article 4 pour le premier alinéa de l'article L. 324-12 du code du travail, après les mots : « inspecteurs du travail », d'insérer les mots : « , les contrôleurs du travail ».
La parole est à M. Jourdain.
M. André Jourdain. Il s'agit d'un amendement de précision : il semble que les contrôleurs du travail aient été oubliés dans la rédaction de l'article 4, alors qu'ils sont mentionnés à l'article L. 611-10 du code du travail, article auquel l'article 4 fait référence.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. La commission émet un avis favorable et remercie nos deux collègues MM. Jourdain et Ostermann, car cette précision enrichit le texte en complétant utilement la liste des agents de contrôle.
Je rappelle d'ailleurs que, même s'ils ne sont pas expressément mentionnés dans le texte, les contrôleurs du travail effectuaient déjà le contrôle du travail clandestin ou dissimulé.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Le Gouvernement est lui aussi favorable à l'amendement de MM. Jourdain et Ostermann : bien que les missions de ces contrôleurs recouvrent déjà ces activités, il est bon de souligner leur rôle.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 63, accepté par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 7 rectifié,M. Souvet, au nom de la commission des affaires sociales, propose, dans la première phrase du texte présenté par le 1° de l'article 4 pour le premier alinéa de l'article L. 324-12 du code du travail, après les mots : « affaires maritimes », d'insérer les mots : « , les fonctionnaires des corps techniques de l'aviation civile commissionnés à cet effet et assermentés ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet, rapporteur. Avec cet amendement, nous contribuons à la lutte contre le travail dissimulé dans un secteur où il est loin d'être absent.
Pourquoi l'avons-nous rectifié ? Parce que, parmi les agents des corps techniques de l'aviation civile, 2 000 fonctionnaires environ sont chargés, notamment, de la formation et des contrôles. Or, point n'est besoin de 2 000 personnes pour effectuer lesdits contrôles ! L'aviation civile assermentera et commissionnera donc le nombre de contrôleurs dont elle aura besoin.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Le Gouvernement est, bien entendu, favorable à cet amendement, qui permet d'associer un autre corps de l'Etat à cette mission d'intérêt public.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 7 rectifié, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 8, M. Souvet, au nom de la commission des affaires sociales, propose, dans le premier alinéa du 5° de l'article 4, de remplacer le mot : « trois » par le mot : « six ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet, rapporteur. Il s'agit d'un simple amendement rédactionnel relatif au décompte des alinéas.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 8, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 50, M. Masson, au nom de la commission des lois, propose, dans le troisième alinéa b du texte présenté par le 5° de l'article 4, de remplacer le mot : « contractants » par le mot : « cocontractants ».
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Paul Masson, rapporteur pour avis. Cet amendement est purement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 50, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis maintenant saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 64, MM. Jourdain et Ostermann proposent, dans le quatrième alinéa c du texte présenté par le 5° de l'article 4 pour compléter l'article L. 324-12 du code du travail, de remplacer les mots : « les documents commerciaux relatifs » par les mots : « les devis, les bons de commande ou de travaux, les factures et les contrats commerciaux relatifs ».
Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 36 est présenté par Mme Dieulangard et les membres du groupe socialiste et apparentés.
L'amendement n° 58 est déposé par MM. Fischer et Pagès, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Tous deux tendent, dans le c) du texte proposé par le 5° de l'article 4 pour compléter l'article L. 324-12 du code du travail, après les mots : « les documents commerciaux », à insérer les mots : « et comptables ».
La parole est à M. Jourdain, pour défendre l'amendement n° 64.
M. André Jourdain. Par cet amendement, je propose que l'on en revienne à la rédaction initiale du projet, qui me paraît beaucoup plus précise que l'expression « documents commerciaux ». Je me demande d'ailleurs si cette expression a un fondement juridique.
M. le président. La parole est à M. Mazars, pour défendre l'amendement n° 36.
M. Georges Mazars. L'accès aux documents comptables est indispensable pour s'assurer que les salaires versés correspondent bien à des emplois déclarés et pour contrôler les versements aux organismes de protection sociale. Ces éléments indispensables à la protection des salariés ne se trouvent pas dans les documents commerciaux.
Bien que très court, cet amendement est important si l'on veut lutter efficacement contre le travail clandestin, illégal ou dissimulé.
L'accès aux documents comptables est, en effet, le principal moyen pour les agents de contrôle de remonter les filières jusqu'aux donneurs d'ordre. Cette possibilité est demandée par l'ensemble des agents. En effet, si l'infraction est caractérisée à partir de l'existence d'une prestation ou d'une vente, dans l'hypothèse d'un travail dissimulé, il est fort possible que les documents commerciaux fassent défaut. En revanche, il existe nécessairement des documents comptables, relatifs aux salaires versés par exemple.
Dans le même temps, il est possible, par le seul accès aux documents comptables, de constater si les relations avec l'URSSAF sont en règle. Il est évident que cela ne se trouvera pas dans des documents purement commerciaux.
Dans le cas d'une sous-traitance, le problème est le même : il faut avoir accès aux documents comptables du donneur d'ordre comme du sous-traitant pour s'assurer que les masses financières en jeu ne transitent pas sur des comptes bancaires « taxis » qui servent à blanchir l'argent du travail clandestin.
M. le président. La parole est à M. Fischer, pour défendre l'amendement n° 58.
M. Guy Fischer. Cet amendement vise à élargir aux documents comptables les documents mis à la disposition des agents luttant contre le travail illégal.
J'ai dit, à propos de l'amendement n° 57, que la principale question était celle des moyens mis à la disposition de ces agents. Nous proposons de leur permettre l'accès à tous les documents nécessaires aux enquêtes. Ils devraient donc avoir accès aux documents comptables quand il y a présomption de travail illégal.
Il ne s'agit nullement d'une pratique inquisitoriale pour les entreprises, mais d'un moyen réellement efficace, facilitant notamment la tâche des inspecteurs du travail, qui doivent faire face à des organisations de plus en plus complexe entre les entreprises ayant recours au travail illégal, que ce soient les faux travailleurs indépendants ou les sous-traitants en cascade.
Comment vérifier que les sommes versées aux sous-traitants correspondent à des emplois déclarés si l'on ne peut avoir accès aux documents comptables ?
Des amendements identiques ont été refusés par le Gouvernement et l'Assemblée nationale. Cette position nous conduit à nous interroger sur la réalité de la détermination du Gouvernement à remonter jusqu'aux gros bonnets du secteur. Il est vrai qu'il est plus facile de s'en prendre aux salariés victimes du travail clandestin !
Le résultat du vote sur notre amendement constituera un indice sérieux de la volonté de notre assemblée de lutter réellement contre le travail illégal et de celle du Gouvernement de faire de cette lutte une priorité nationale.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 64, ainsi que sur les amendements identiques n°s 36 et 58 ?
M. Louis Souvet, rapporteur. La commission est favorable à l'amendement n° 64 parce qu'il lève toute ambiguïté sur ce que l'on entend par documents commerciaux.
Elle est défavorable aux amendements n°s 36 et 58, car ils donnent au contrôle un caractère inquisitorial qui va à l'encontre des libertés publiques. De plus, ils sont inutiles - c'est du moins le sentiment de la commission - puisqu'il s'agit, en l'espèce, d'établir le lien juridique susceptible d'exister entre les divers cocontractants et que, de ce point de vue, les documents comptables n'apportent absolument rien.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Le Gouvernement partage l'avis de la commission.
Il est favorable à l'amendement n° 64, qui reprend, en effet, la rédaction originelle du Gouvernement.
Faisant siens les arguments que vient de développer M. le rapporteur, il s'oppose aux amendements n°s 58 et 36, dont on voit bien qu'ils sont inutiles.
Il n'est pas besoin d'envisager un droit de communication plus étendu. Le projet de loi prévoit les investigations nécessaires aux agents de contrôle pour effectuer les recherches en leur donnant accès aux documents commerciaux. Par conséquent, il n'y a pas lieu de procéder à une extension.
Ce que je veux dire au Sénat, c'est que, s'il est une loi à l'application de laquelle nous devrons veiller avec le plus grand soin, c'est bien celle-là.
C'est d'ailleurs pour cette raison que Mme Couderc sera, par délégation du Premier ministre et avec l'autorité qui s'attache à cette procédure, chargée d'animer un véritable comité interministériel pour coordonner l'action de l'Etat.
Nous entendons faire en sorte que cette loi ait des conséquences tout à fait pratiques, qu'elle soit efficace. J'y veillerai personnellement, car, pour le parlementaire que je suis resté dans mon coeur, ce qui importe, c'est non pas d'avoir un arsenal de mesures toujours plus vaste, mais d'avoir des outils et de s'en servir.
M. Jean-Pierre Fourcade, président de la commission des affaires sociales et M. Paul Masson, rapporteur pour avis. Très bien !
M. le président. Je viens d'être informé par MmeDieulangard et les membres du groupe socialiste et apparentés qu'ils souhaitaient transformer leur amendement en un sous-amendement à l'amendement de M. Jourdain.
Il s'agit du sous-amendement n° 36 rectifié, qui tend, dans le texte de l'amendement n° 64, après les mots : « les factures », à insérer les mots : « les documents comptables ».
La parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Nous tenons à maintenir dans ce texte l'accès, à la demande, bien entendu, des agents de contrôle, aux documents comptables, qui, selon nous, est absolument indispensable, dans un certain nombre de cas, pour remonter la filière du travail dissimulé, frauduleux, clandestin, bref, du travail illégal.
Voilà pourquoi nous avons transformé notre amendement en sous-amendement à l'amendement n° 64 de M. Jourdain, qui mentionne les documents commerciaux : nous ajoutons les documents comptables.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 36 rectifié ?
M. Louis Souvet, rapporteur. Je ne vois pas en quoi le fait de déplacer la demande changerait l'avis de la commission !
M. le président. Le règlement du Sénat m'obligeait à vous poser la question, monsieur le rapporteur.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Le Gouvernement partage l'avis, plein de bon sens, lui semble-t-il, du rapporteur.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 36 rectifié, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 64, accepté par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 58 n'a plus d'objet.
Par amendement n° 9, M. Souvet, au nom de la commission des affaires sociales, propose, dans le cinquième alinéa du texte proposé par le 5° de l'article 4 pour compléter l'article L. 324-12 du code du travail, de remplacer les mots : « à interroger » par les mots : « à entendre ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet, rapporteur. Il apparaît à la commission que le verbe : « interroger » confère aux agents des organismes de contrôle des prérogatives qu'ils n'ont pas, alors que le verbe : « entendre » semble moins inquisitorial et mieux adapté.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Favorable.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 9, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 51, M. Masson, au nom de la commission des lois, propose de supprimer le dernier alinéa du texte proposé par le 5° de l'article 4.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Paul Masson, rapporteur pour avis. A l'Assemblée nationale, on a ajouté, par amendement, à la liste des agents qui pourraient être habilités à opérer dans ces matières, les magistrats de la Cour des comptes et des chambres régionales des comptes. Ainsi, ces derniers pourraient, à l'occasion de leur contrôle, rechercher et constater les infractions relatives au travail dissimulé.
La commission des lois s'est interrogée sur le sens de cet amendement. En effet, de quel travail dissimulé peut-il s'agir, en l'espèce ?
S'il s'agit de celui qui est commis par les entreprises privées, manifestement, je ne vois pas ce que la Cour des comptes et les chambres régionales pourraient avoir à faire en cette matière !
S'il s'agit du travail dissimulé qui serait effectué dans le secteur public, j'observe, et la commission avec moi, que la plupart des agents du secteur public ne relèvent pas du code du travail.
Certes, il y a, dans le secteur public, des agents de droit privé. Mais chacun sait ici que ces agents de droit privé ne peuvent être payés, en vertu du principe de la séparation des ordonnateurs et des comptables, que sur mandat d'un receveur, qui peut alors exercer un contrôle.
J'ajoute qu'une disposition de cette nature doit être précédée ou d'une décision du maire ou d'une délibération du conseil municipal et que, là aussi, un contrôle de légalité s'opère en amont.
J'ajoute, enfin, que la Cour des comptes ou une chambre régionale est obligée, de par la loi et en vertu de l'article 40, alinéa 2, du code de procédure pénale, de saisir le procureur de la République si elle s'aperçoit, au cours d'un contrôle, qu'il y a infraction.
En conséquence, la commission des lois suggère de supprimer purement et simplement le dernier alinéa du texte proposé par le paragraphe 5° de l'article 4.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. Pour les raisons qui viennent d'être excellemment développées par M. le rapporteur pour avis, la commission est favorable à l'amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Le Gouvernement s'en était remis à la sagesse de l'Assemblée nationale sur ce point, tout en faisant des observations qui n'étaient pas sans ressembler aux observations pertinentes de M. Masson.
Je ne peux donc qu'adopter la même attitude devant le Sénat : je m'en remets à sa sagesse.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 51, accepté par la commission et pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 4, modifié.

(L'article 4 est adopté.)

Articles additionnels après l'article 4

M. le président. Par amendement n° 59. MM. Fischer et Pagès, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, proposent d'insérer, après l'article 4, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 432-1 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le comité d'entreprise a accès aux documents communiqués aux fonctionnaires et agents de contrôle prévus par l'article L. 324-12 du code du travail dans leur mission de lutte contre le travail illégal. »
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Avec cet amendement, nous proposons d'offrir aux institutions représentatives du personnel la possibilité d'avoir accès aux renseignements et aux documents communiqués aux fonctionnaires et aux agents dans leur mission de lutte contre le travail clandestin.
Pour nous, il est important d'assurer la prévention et la transparence en matière de lutte contre le travail illégal, ce qui exige des pouvoirs réels des comités d'entreprise.
En effet, les représentants des travailleurs sont particulièrement bien placés pour connaître les cas de dissimulation de travail dans leur entreprise et surtout chez leurs sous-traitants.
Dans cet objectif, ils pourraient favoriser notamment les coopérations entre les représentants des salariés des grandes entreprises et des sous-traitants dans les secteurs particulièrement touchés comme le textile, le bâtiment, et ce au niveau local, départemental, régional et national.
En outre, il paraît justifié que tous les documents que les administrations peuvent consulter à l'occasion de contrôles puissent être transmis aux élus des salariés.
Puisque le projet de loi affirme vouloir agir résolument contre le travail clandestin et reconnaît dans ses intentions que les salariés en sont les premières victimes, il me semble opportun d'offrir de nouveaux droits aux représentants des travailleurs afin de contribuer à la lutte contre ce fléau national.
C'est le sens de cet amendement que je vous invite, mes chers collègues, à approuver.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable à l'amendement n° 59. En effet, le comité d'entreprise - M. Fischer le sait bien - reçoit déjà beaucoup d'informations, notamment sur l'emploi. Aller plus loin le transformerait quasiment en une instance de jugement puisque l'amendement concerne le travail illégal, ce qui, bien sûr, est très large.
Il est préférable de s'en remettre aux professionnels du contrôle. Il est évident que le comité d'entreprise ne sera pas tenu dans l'ignorance d'une éventuelle condamnation, vous l'imaginez bien.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 59.
Il ne paraît pas opportun de donner aux comités d'entreprise l'accès aux documents communiqués aux fonctionnaires et agents de contrôle. Cette institution n'a pas pour finalité d'exercer une mission de lutte contre le travail illégal. Elle a par ailleurs la possibilité de saisir certaines institutions de contrôle, notamment l'inspection du travail, lorsqu'elle a connaissance d'une situation de travail dissimulé dans l'entreprise.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 59, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 25, MM. Ostermann, Grignon et Vasselle proposent d'insérer, après l'article 4, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article L. 611-9 du code du travail, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art... - Une stucture spécialement chargée de lutter contre le travail dissimulé est instituée dans chaque département. Elle porte le nom de « brigade de lutte contre le travail clandestin ».
« Elle est composée d'inspecteurs du travail, d'une part, et de policiers et gendarmes, d'autre part, qui appliquent conjointement les dispositions du code du travail et des codes pénal et de procédure pénale.
« Elle intervient sur simple demande afin de constater immédiatement l'infraction de travail dissimulé et d'engager les poursuites à l'égard des contrevenants.
« Son organisation et son fonctionnement seront définis par décret en Conseil d'Etat. »
La parole est à M. Ostermann.
M. Joseph Ostermann. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, hier, dans la discussion générale, j'ai longuement expliqué le sens de cet amendement.
La constatation des infractions en matière de travail clandestin est rendue difficile par l'éclatement des compétences entre les divers services concernés : inspection du travail, d'une part, police et gendarmerie, d'autre part.
Les inspecteurs du travail disposent d'un droit d'entrée à tout moment et de visite des établissements où s'applique le code du travail. Ils ont le pouvoir de consulter les documents rendus obligatoires par le code du travail et celui d'interroger les salariés. En revanche, ils ne sont pas compétents pour procéder aux contrôles d'identité et à la vérification des titres de séjour.
Quant aux officiers et agents de police judiciaire, en dehors de trois cas, ils ne peuvent pénétrer dans les locaux professionnels, alors qu'ils sont seuls habilités à procéder aux contrôles d'identité et à la vérification des titres de séjour.
Aussi, le présent amendement tend à instituer une structure nouvelle plus efficace, composée d'inspecteurs du travail, d'une part, et de policiers et gendarmes, d'autre part. Cette structure aurait l'immense avantage d'allier deux types de compétences pour constater les infractions.
Par rapport à la disposition proposée à l'article 10 du projet de loi sur l'immigration, le présent amendement, qui entre dans le cadre du code du travail, permettrait de satisfaire tant les inspecteurs du travail, qui conserveraient l'intégralité de leurs compétences, que les policiers et les gendarmes, qui pourraient intervenir à tout moment, sans autorisation, et ce sans porter atteinte aux libertés.
Enfin, cette structure opérationnelle serait à même de compléter, au niveau local, le travail de coordination effectué par la future commission nationale de lutte contre le travail clandestin.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. Il existe déjà des structures de coordination de lutte contre le travail illégal. Il en est ainsi de la mission de liaison interministérielle pour la lutte contre le travail clandestin, l'emploi non déclaré et les trafics de main-d'oeuvre, ou MILUTMO, cela à l'échelon national, et des commissions départementales.
Le Gouvernement - mais il le redira lui-même, je pense - envisage de renforcer ces dispositifs qui, d'ailleurs, sont d'ordre réglementaire. L'amendement est donc, je crois, déjà satisfait, raison pour laquelle la commission souhaite que son auteur veuille bien le retirer.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Monsieur Ostermann, il s'agit de l'organisation des services de l'Etat, et cela relève du domaine réglementaire.
Certes, je comprends votre intention. Mais, je vous le demande : une telle brigade ne servirait-elle pas de prétexte aux autres corps pour ne pas s'engager comme ils le doivent - et comme nous souhaitons qu'ils le fassent - dans la bataille ?
En conséquence, tout en comprenant votre désir d'efficacité, le Gouvernement n'est pas favorable à votre amendement.
M. le président. Monsieur Ostermann, votre amendement est-il maintenu ?
M. Joseph Ostermann. Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, je vais vous décevoir.
J'ai déposé une proposition de loi dont la brigade spécialisée constitue le point essentiel. J'ai proposé ce texte avec l'accord des chambres de métiers, qui estiment que la lutte du Gouvernement contre le travail illégal et clandestin est essentielle et qu'une brigade spécialisée serait un élément déterminant dans chaque département.
Dans ces conditions, malgré l'insistance de la commission et malgré les explications et apaisements apportés par M. le ministre, je maintiens cet amendement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 25.
M. Claude Estier. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Estier.
M. Claude Estier Nous sommes évidemment totalement opposés à cet amendement, qui, contrairement à ce que vient de dire M. Ostermann, s'il était adopté, constituerait une grave atteinte aux libertés publiques.
Sur le principe, nous sommes contre l'entrée des officiers de police judiciaire dans les entreprises ou sur les lieux de travail de manière générale, s'ils n'y ont pas été autorisés dans les formes régulièrement prévues : flagrant délit, commission rogatoire, ordonnance du président du tribunal. De ce point de vue, la notion de domicile est très nette et a justement pour objet la protection des droits fondamentaux du citoyen.
Je rappelle que les inspecteurs du travail peuvent déjà entrer dans les ateliers de jour et de nuit, mais pas au domicile privé.
La procédure applicable aux officiers de police judiciaire est, bien entendu, plus restreinte. En ce qui concerne l'identité des personnes, s'il est exact que les inspecteurs du travail ne peuvent contrôler les identités, l'employeur ne peut pas refuser de leur communiquer l'identité des personnes qui travaillent sur le site. Mais on préfère souvent oublier ce détail pour ne prôner que l'intervention des officiers de police judiciaire.
De même, les inspecteurs du travail ont le droit de ne pas transmettre toutes les informations dont ils disposent au parquet, ce qui permet avant tout de protéger les salariés, ce qui est leur raison d'être.
Il a été beaucoup question depuis hier, et cela va sans doute continuer, de la liberté des entreprises, en réalité des seuls employeurs, et de la nécessité d'éviter des contrôles que l'on qualifie systématiquement de tatillons. Il est, au contraire, fort peu question des droits des salariés. C'est d'abord l'inspection du travail qui, dans le champ de ce projet de loi, est concernée par leur défense, et voilà bien l'occasion de le rappeler. L'approche de la relation de travail en entreprise par l'inspection du travail tient d'abord compte de la subordination obligée du salarié, qui a besoin d'un revenu. Et cette subordination est d'autant plus forte, vous le comprenez, mes chers collègues, dans le contexte actuel.
Quels que soient leurs mérites par ailleurs, les officiers de police judiciaire n'ont pas la même conscience de ce fait. Ils n'ont pas reçu la même formation. Leur optique est d'abord celle de la répression, et la distinction n'est pas toujours évidente alors entre l'employeur et le salarié.
Cela étant dit, nous nous refusons à imaginer l'utilisation qui pourrait être faite de ces brigades de « cow boys » qui feraient des descentes dans les entreprises, de préférence sans doute devant des caméras de télévision et, par exemple, lorsque des immigrés en situation irrégulière sont en cause. On transformerait l'application de la loi en instrument de propagande pour montrer que l'on peut faire aussi bien dans ce domaine que le Front national.
Je n'invente rien, puisque, dans un journal du soir, vous pouvez lire, aujourd'hui même, une déclaration d'un dirigeant de ce parti, qui demande, précisément, la création d'une « brigade anti-immigration clandestine dont une des missions serait de lutter contre le travail clandestin ». Voyez que les choses se rejoignent !
En réalité, l'efficacité de la lutte contre le travail clandestin passe d'abord par un renforcement des moyens qui y sont consacrés. Or, rien de tel dans le budget pour 1997 ! Il y faut d'abord une volonté politique.
C'est ce qui crée le malaise qu'exprime avec une certaine forme de naïveté et de brutalité cet amendement : nous examinons un texte d'affichage qui ne vise pas à renforcer la lutte contre le travail clandestin, mais à dire qu'on le fait et que l'on sera impitoyable à l'égard des étrangers sans titre de travail. On ne chasse pas les donneurs d'ordre, qui sont les vrais responsables, on ne se donne à aucun moment les moyens de remonter les filières, on se contente de montrer du doigt les 6 % d'étrangers sans titre de travail. Cela s'appelle la logique du bouc émissaire, et les conséquences politiques peuvent être lourdes.
C'est bien pourquoi nous sommes totalement opposés à cet amendement.
M. Guy Fischer. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Ce matin, lors de la réunion de la commission des affaires sociales, j'ai qualifié cet amendement de « scélérat ». (Protestations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Jacques Habert. Il ne faut pas exagérer !
M. Joseph Ostermann. Oh !
M. Henri de Raincourt. On s'est ému de ce propos !
M. Guy Fischer. C'est peut-être caricatural mais, de toute évidence, cet amendement vise à faire rentrer par la fenêtre la disposition que le Conseil d'Etat avait disjointe de ce texte et réintégrée sous la forme de l'article 10 dans le projet de loi sur l'immigration.
L'amendement, manifestement illégal, présenté par MM. Ostermann, Grignon et Vasselle, qui n'a pas été retiré, en dépit de la demande formulée par M. le rapporteur et par le M. le ministre et qui reprend le texte de l'article 5 d'une proposition de loi du 7 août 1996 présenté par M. Ostermann est d'une extrême gravité.
Il s'agit d'une attaque frontale contre les droits des travailleurs et contre le code du travail, une de plus, serais-je tenté de dire.
J'ai dénoncé, à propos de l'article 4 - je n'étais pas hors sujet - les risques d'une dérive de la mission des inspecteurs du travail.
Il faut avouer que l'amendement de M. Ostermann est bien plus clair : il s'inscrit explicitement dans une logique d'instrumentalisation de l'inspection du travail sous prétexte de lutte contre le travail clandestin.
En réalité, il inscrit cette institution républicaine chargée de veiller au respect d'une législation protectrice des travailleurs dans une logique policière de contrôle des individus - et non plus des entreprises, comme le veut la philosophie du projet de loi - et, en premier lieu, des étrangers.
Il faut dire qu'en la matière le Gouvernement donne le mauvais exemple. En effet, cette même logique a déjà conduit le Gouvernement à créer l'Office central pour la répression de l'immigration irrégulière et de l'emploi d'étrangers sans titre, et cela, comme par miracle, le jour où M. Ostermann déposait sa proposition de loi, à savoir le 7 août 1996.
M. Paul Masson, rapporteur pour avis. Il a été inspiré par le Saint-Esprit !
M. Guy Fischer. Quelle coïncidence chronologique entre la proposition de loi de notre collègue Ostermann et la création de l'Office chargé de coordonner l'action dans ce domaine, y compris celle des inspecteurs du travail !
Et qui met-on à la tête de cette structure ? On pourrait penser à quelqu'un du ministère du travail. Or, vous le savez fort bien, monsieur Ostermann, le directeur de cet office est le grand patron de la direction centrale du contrôle de l'immigration et de la lutte contre l'emploi des clandestins, laquelle dépend non pas du ministère du travail, mais du ministère de l'intérieur !
Les syndicats ont « attaqué » devant le Conseil d'Etat ce décret qui place, de fait, l'inspection du travail sous la houlette des préfets et du ministre de l'intérieur. Nous savons que l'office central est en train d'essaimer dans tous les consulats afin d'effectuer un contrôle à la source, qui relevait plutôt, jusqu'à présent, du ministère des affaires étrangères, ce que j'ai dit hier.
Allez-vous accepter une telle évolution, vous qui représentez ici, monsieur le ministre, le ministère du travail ? C'est grave !
Nous refusons cet amendement qui s'attaque aux droits de l'ensemble des travailleurs et qui cherche à liquider le rôle protecteur de l'inspection du travail à l'égard des salariés. Pour sa part, le groupe communiste républicain et citoyen appelle à rejeter cet amendement scandaleux.
Aujourd'hui, nous sommes au coeur d'un débat qui, de toute évidence, tend de plus en plus, surtout à la lumière de l'article paru dans la presse cet après-midi, a démontrer qu'il s'agit peut-être d'un texte en trompe-l'oeil, d'un texte alibi, en tout cas d'un texte qui vise d'autres objectifs, des objectifs d'ailleurs clairement exprimés dans un tract émanant d'un parti majoritaire de ce pays. L'amalgame existe donc bien !
Pour ces raisons, je demande un scrutin public sur cet amendement.
M. Jean-Pierre Fourcade, président de la commission des affaires sociales. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Jean-Pierre Fourcade, président de la commission des affaires sociales. Je savais qu'à un moment ou à un autre ce débat déboucherait sur une grande controverse politique.
De quoi s'agit-il ? Il s'agit d'adopter un texte qui améliore les procédures actuelles de lutte contre le travail illégal.
Le travail illégal est dû soit à l'embauche clandestine de personnes qui sont au chômage, qui touche le RMI et qui, comme l'on dit, travaillent au noir - il peut parfaitement s'agir de citoyens français, qui sont d'ailleurs très nombreux - soit à des particuliers qui font travailler à leur domicile des personnes sans les déclarer ni payer leurs cotisations sociales, et même en oubliant parfois toute forme de déclarations, notamment en matière d'accidents du travail, soit à l'utilisation de travailleurs qui sont en situation irrégulière - mais ces derniers, dont personne n'est capable d'évaluer le nombre, ne sont visés que par une partie du texte dont nous discutons.
Monsieur Estier, je ne crois pas, surtout compte tenu de l'article paru ce soir sur ce sujet dans Le Monde ... pardon : dans un quotidien que chacun lit, qu'il faille faire, sur cet amendement n° 25, un débat à scandale !
Ce que veut M. Ostermann, et ce qui était d'ailleurs un des motifs de la proposition de loi qu'il avait déposée conjointement avec un certain nombre de collègues, notamment MM. Plasait et de Raincourt, c'est mieux coordonner la lutte contre le travail que je qualifierai pour ma part de frauduleux, à savoir le travail offert par des personnes qui ne satisfont ni à leurs obligations fiscales ni à leurs obligations sociales.
Quels que soient les chiffres que l'on a en tête, il est clair que si l'ensemble de ceux qui emploient aujourd'hui dans ce pays des travailleurs s'acquittaient de leurs obligations fiscales et sociales, il n'y aurait pas de déficit des régimes de protection sociale et le déficit budgétaire serait moins élevé. Par conséquent, c'est un objectif national que de limiter et de réduire le travail dissimulé que, pour ma part, j'appelle le travail frauduleux.
M. Ostermann veut donc assurer de manière structurelle une coordination entre toutes les administrations intéressées afin d'arrêter la progression du travail clandestin ou illégal.
Si la commission des affaires sociales n'a pas accepté cet amendement et si elle demande au Sénat de ne pas l'adopter, ce n'est ni pour une raison de fond ni pour une raison de politique nationale ou internationale ; c'est parce qu'il lui apparaît que, compte tenu de la séparation des pouvoirs qui est un principe fondamental de notre République, il appartient au Gouvernement d'organiser les services publics et non au Parlement de décider de la création d'une brigade, d'une structure, d'une section nouvelle. Il ne faut pas mélanger les fonctions du Gouvernement et celles du Parlement.
Voilà la raison pour laquelle nous vous demandons de ne pas adopter cet amendement. M. Ostermann pourrait d'ailleurs parfaitement le retirer, puisqu'il est manifestement sorti du domaine législatif pour entrer dans le domaine réglementaire.
Pour le reste, j'ai cru comprendre, dans l'intervention flamboyante de M. Estier - et je rends hommage à son talent, bien connu de nous tous - que le seul intérêt de ce texte serait de trouver des boucs émissaires. Non ! On peut lutter contre le travail frauduleux autrement qu'en renforçant les pouvoirs de l'inspection du travail ! L'inspection du travail est un service de l'Etat chargé de contrôler l'application du code du travail et de protéger les salariés ; elle n'est pas chargée de juger de l'opportunité de toutes les actions des entreprises.
Le fait de mieux définir le travail illégal ou dissimulé, de mieux coordonner l'action des services publics qui concourent à contrôler ce qui se passe aussi bien chez les particuliers, on l'a déjà dit, que dans les entreprises, de modifier les sanctions - puisque nous examinerons tout à l'heure une partie du texte consacrée aux sanctions - va, selon nous, dans le bon sens et permettra de réduire l'importance du travail dissimulé, ou frauduleux.
Alors, je vous en prie, pas d'amalgame ! Il ne s'agit pas d'un texte d'apparence ; il s'agit d'un texte qui renforce les moyens que s'est donnés le Gouvernement. Je crois que la majorité de cette assemblée doit accepter, dans son ensemble, l'esprit de ce texte, corrigé par les deux commissions, qui ont oeuvré en parfaite harmonie pour éviter qu'on n'aille trop loin et que l'on ne transforme des mécanismes de lutte contre certaines faiblesses de notre sustème économique en un dispositif rigide qui permettrait à n'importe qui d'aller consulter les documents comptables, qui renforcerait les pouvoirs de tel ou tel.
Je souhaite que M. Ostermann retire son amendement, qui n'a ni le caractère scandaleux ni le caractère politique qu'on a bien voulu lui prêter sur certaines travées. Manifestement, il est hors du domaine législatif ! conformément à la Constitution de la Ve République, il faut laisser au Gouvernement la tâche fondamentale d'organiser les services publics.
M. le président. Monsieur Ostermann, l'amendement est-il maintenu ?
M. Joseph Ostermann. M. Fourcade a fort bien résumé la situation, et brillamment comme toujours.
M. Henri de Raincourt. Comme d'habitude !
M. Joseph Ostermann. Tout d'abord, s'agissant du terme « brigade », nous disposons dans ce pays de brigades fluviales et elles ne choquent personne. Il est bizarre que, tout à coup, des cris effarouchés s'élèvent pour dénoncer la brigade de lutte contre le travail clandestin que je propose.
Ensuite, monsieur Fischer, je ne me suis absolument pas concerté avec le Gouvernement lorsque j'ai déposé cet amendement. Vous connaissez l'adage : « Tout ce qui est exagéré est insignifiant ». Précisément, votre propos est exagéré, et je voulais vous le dire.
Enfin, monsieur Estier, avec tout le respect que je vous dois, ne pratiquez pas l'amalgame entre cet amendement et les problèmes liès à l'immigration. Vous savez très bien que ce n'est l'objet ni de l'amendement ni du projet de loi. Comme je l'ai dit hier, le travail clandestin ne concerne pas plus de 10 % de travailleurs immigrés.
Monsieur le président, je retire l'amendement, mais je considère que la discussion était nécessaire et utile.
MM. Paul Masson, rapporteur pour avis, et Jean-Pierre Fourcade, président de la commission des affaires sociales. Très bien !
M. le président. L'amendement n° 25 est retiré.
Par amendement n° 37, Mme Dieulangard et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 4, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après le quatrième alinéa (2°) de l'article L. 611-9 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« 3° les documents commerciaux et comptables relatifs aux prestations contrôlées. »
La parole est à M. Debarge.
M. Marcel Debarge. Sans être brillant ni flamboyant, (Sourires), je dirai que cet amendement de coordination que nous présentons vise à une plus grande transparence de l'action possible, transparence à laquelle tout le monde est, me semble-t-il, sensible et qui peut aider les inspecteurs du travail à remonter plus aisément les filières du travail clandestin.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable, par coordination avec les votes précédents.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Le Gouvernement partage l'avis de la commission.
Je ne crois pas que les inspecteurs du travail souhaitent que nous revenions sur leurs attributions. Ils ont à jouer un rôle qui est important et qui n'est pas facile. Il n'est pas nécessaire de leur compliquer encore la tâche.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 37, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 5

M. le président. « Art. 5. _ Il est inséré, après l'article L. 10 du livre des procédures fiscales, un article L. 10 A ainsi rédigé :
« Art. L. 10 A . _ Dans le cadre des procédures prévues au présent livre, les agents de la direction générale des impôts peuvent rechercher et constater les infractions aux interdictions mentionnées à l'article L. 324-9 du code du travail, dans les conditions prévues par l'article L. 324-12 de ce code. » - (Adopté.)

Article 6

M. le président. « Art. 6. _ I. _ A la fin de l'article L. 324-13 du code du travail, le mot : "clandestin" est remplacé par le mot : "dissimulé". »
« II. _ L'article L. 324-13 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Sur demande écrite, ils obtiennent de la part des organismes chargés d'un régime de protection sociale ou des caisses assurant le service des congés payés mentionnées au livre VII du présent code tous renseignements et tous documents utiles à l'accomplissement de cette mission. Ils transmettent à ces organismes, sur leur demande écrite, tous renseignements et tous documents leur permettant de recouvrer des sommes impayées ou d'obtenir le remboursement de sommes indûment versées. »
Par amendement n° 38, Mme Dieulangard et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de rédiger comme suit le début de la seconde phrase du texte présenté par le paragraphe II de cet article pour compléter l'article L. 324-13 du code du travail :
« Ils sont habilités à transmettre à ces organismes... ».
La parole est à M. Debarge.
M. Marcel Debarge. Il s'agit de préserver la libre et traditionnelle appréciation des agents de contrôle qui peuvent ou non choisir de transmettre les renseignements et documents dans l'intérêt du salarié. De plus, cette rédaction met l'article en concordance avec les autres articles du projet de loi tels qu'ils ont été adoptés par l'Assemblée nationale.
J'ajoute que les agents de contrôle tiennent manifestement beaucoup à cette liberté, pour des raisons déontologiques, car ils sont là, avant tout, pour protéger les salariés.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement qui aurait pour conséquence d'obliger les organismes sociaux à transmettre leurs informations alors que les agents de contrôle ne seraient pas tenus de le faire.
De plus, quels critères devraient-ils adopter ? Faut-il les transformer en juges de l'opportunité - personne, ici, ne le pense - et surtout, comment organiser une véritable coopération entre les différents corps de contrôle pour gagner en efficacité si l'on permet à certains de s'affranchir de cette règle de l'information réciproque ?
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Le Gouvernement pense que cet amendement affaiblirait le dispositif puisqu'il laisserait une marge d'appréciation aux agents de contrôle. Il n'est donc pas souhaitable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 38, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 10 rectifié, M. Souvet, au nom de la commission des affaires sociales, propose :
I. - De compléter le paragraphe II de l'article 6 par un alinéa ainsi rédigé :
« Les fonctionnaires et agents de contrôle mentionnés ci-dessus sont habilités, lorsque le siège de l'entreprise est domicilié dans des locaux occupés en commun en application de l'article premier bis de l'ordonnance n° 58-1352 du 27 décembre 1958 réprimant certaines infractions en matière de registre du commerce et des sociétés, à se faire communiquer par l'entreprise domiciliataire, tous documents détenus dans ses locaux, nécessaires à l'accomplissement de leur mission de lutte contre le travail clandestin. »
II. - En conséquence, de rédiger comme suit le premier alinéa du paragraphe II :
« II. - Ce même article est complété par deux alinéas ainsi rédigés : ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet, rapporteur. Cet amendement vise à donner aux différents corps de contrôle les moyens d'obtenir les renseignements nécessaires à leur contrôle quand l'entreprise est domiciliée dans une autre entreprise dite « domiciliataire ». Les agents de contrôle peuvent alors s'adresser directement au responsable de l'entreprise domiciliataire.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Le Gouvernement est favorable à cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 10 rectifié, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'article 6.
M. Guy Fischer. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. L'article 6 du présent projet de loi complète l'article L. 324-13 du code du travail.
Les dispositions actuelles de cet article prévoient déjà que les fonctionnaires et agents des différents corps de contrôle sont habilités à se communiquer réciproquement tous les documents nécessaires à l'accomplissement de leur mission de lutte contre le travail clandestin.
L'article 6 vise à autoriser la levée du secret professionnel entre les différents corps de contrôle et les organismes de protection sociale.
Je vois bien l'efficacité de telles mesures, mais ne faut-il pas manipuler le problème de l'échange d'informations avec circonspection ?
En effet, avec cet article, n'est-ce pas l'accès des services de polices aux fichiers sociaux qui risque de se préparer ? Peut-être cette interrogation est-elle un peu trop caricaturale, mais j'ai l'habitude de dire ce que je pense.
Toutes les craintes sont permises lorsque l'on sait que, par ailleurs, sous prétexte d'harmoniser la loi « informatique et liberté » de 1978 avec la directive européenne de 1995, qui est très en deçà par rapport à la législation française, il est question d'amoindrir considérablement les règles qui interdisent l'interconnexion des fichiers et organisent les pouvoirs de la CNIL, la commission nationale de l'informatique et des libertés.
A notre sens, il est nécessaire d'agir avec prudence. C'est pourquoi nous ne voterons pas l'article 6 du projet de loi.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article 6, modifié.

(L'article 6 est adopté.)

Article 6 bis

M. le président. « Art. 6 bis . _ L'article L. 223-17 du code du travail est ainsi modifié :
« 1° Les deux premiers alinéas sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :
« Les caisses de congés payés peuvent nommer des contrôleurs chargés de collaborer à la surveillance de l'application de la législation sur les congés payés par les employeurs intéressés. Ceux-ci sont tenus à tout moment de fournir aux contrôleurs toutes justifications de nature à établir qu'ils se sont acquittés de leurs obligations. » ;
« 2° Le troisième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Tout obstacle à l'accomplissement de cette mission est passible des sanctions prévues à l'article L. 631-1. » - (Adopté.)

Article 6 ter

M. le président. « Art. 6 ter . _ Dans le premier alinéa de l'article L. 324-13-1 du code du travail, le mot : "clandestin" est remplacé par le mot : "dissimulé". »
Par amendement n° 11, M. Souvet, au nom de la commission des affaires sociales, propose de rédiger comme suit cet article :
« L'article L. 324-13-1 du code du travail est ainsi modifié :
« 1° Dans le premier alinéa, le mot : "clandestin" est remplacé par le mot : "dissimulé".
« 2° Dans le deuxième alinéa (1°), après le mot : "obligatoires", sont insérés les mots : "ainsi que des pénalités et majorations".
« 3° Dans l'avant-dernier alinéa (3°), après le mot : "rémunérations", est inséré le mot : ", indemnités".
« 4° Après les mots : "fait l'objet", la fin de ce même alinéa (3°) est ainsi rédigée : "de l'une des formalités prévues aux articles L. 143-3 et L. 320". »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 45, présenté par Mme Dieulangard et les membres du groupe socialiste et apparentés, et tendant, dans le troisième alinéa (3°) du texte présenté par l'amendement n° 11 pour modifier l'article L. 324-13-1 du code du travail, après le mot : « indemnités », d'insérer les mots : « de rupture de la relation de travail ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 11.
M. Louis Souvet, rapporteur. Cet amendement vise à regrouper en un seul article les dispositions des articles 6 ter à 6 sexies , que nous proposerons de supprimer par ailleurs.
M. le président. La parole est à M. Estier, pour présenter le sous-amendement n° 45.
M. Claude Estier. Nous le retirons.
M. le président. Le sous-amendement n° 45 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 11 ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 11, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 6 ter est ainsi rédigé.

Article 6 quater

M. le président. « Art. 6 quater . _ Dans le deuxième alinéa (1° ) de l'article L. 324-13-1 du code du travail, après le mot : "obligatoires", sont insérés les mots : "ainsi que des pénalités et majorations". »
Par amendement n° 12, M. Souvet, au nom de la commission des affaires sociales, propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination, qui consiste à supprimer un article dont les dispositions figurent maintenant à l'article 6 ter .
J'indique d'ores et déjà que cette explication vaut pour les amendements n°s 13 et 14.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 12, ainsi qu'aux amendements n°s 13 et 14, déposés respectivement à l'article 6 quinquies et à l'article 6 sexies .
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 12, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 6 quater est supprimé.

Article 6 quinquies

M. le président. « Art. 6 quinquies. - Dans l'avant-dernier alinéa (3° ) de l'article L. 324-13-1 du code du travail, après le mot : "rémunérations", est inséré le mot : ", indemnités". »
Par amendement n° 13, M. Souvet, au nom de la commission des affaires sociales, propose de supprimer cet article.
Nous savons qu'il s'agit d'un amendement de coordination.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 13, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 6 quinquies est supprimé.

Article 6 sexies

M. le président. « Art. 6 sexies . _ Après les mots : "fait l'objet", la fin du quatrième alinéa (3° ) de l'article L. 324-13-1 du code du travail est ainsi rédigée : "de l'une des formalités prévues aux articles L. 143-3 et L. 320". »
Par amendement n° 14, M. Souvet, au nom de la commission des affaires sociales, propose de supprimer cet article.
Il s'agit encore d'un amendement de coordination.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 14, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 6 sexies est supprimé.

Article 6 septies

M. le président. « Art. 6 septies. - A la fin du premier alinéa de l'article L. 324-14 du code du travail, les mots : "le travailleur clandestin" sont remplacés par les mots : "celui qui exerce un travail dissimulé". »
Par amendement n° 15, M. Souvet, au nom de la commission des affaires sociales, propose de rédiger comme suit cet article :
« L'article L. 324-14 du code du travail est ainsi modifié :
« 1° A la fin du premier alinéa, les mots : "le travailleur clandestin" sont remplacés par les mots : "celui qui exerce un travail dissimulé".
« 2° Au deuxième alinéa (1°), après le mot : "obligatoires", sont insérés les mots : "ainsi que des pénalités et majorations".
« 3° Dans le quatrième alinéa (3°), après le mot : "rémunérations", est inséré le mot : ", indemnités".
« 4° Après les mots : "fait l'objet", la fin de ce même alinéa (3°) est ainsi rédigée : "de l'une des formalités prévues aux articles L. 143-3 et L. 320". »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 46, présenté par Mme Dieulangard et les membres du groupe socialiste et apparentés, et tendant, dans le 3e alinéa (3°) du texte proposé par l'amendement n° 15 pour modifier l'article L. 324-14 du code du travail, après le mot : « indemnités », à insérer les mots : « de rupture de la relation de travail ».
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 15.
M. Louis Souvet, rapporteur. Il s'agit exactement du même exercice que précédemment ; nous proposons ici de regrouper les dispositions des articles 6 octies à 6 decies dans un seul et même article.
M. le président. La parole est à M. Estier, pour défendre le sous-amendement n° 46.
M. Claude Estier. Je le retire.
M. le président. Le sous-amendement n° 46 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 15 ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 15, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 6 septies est ainsi rédigé.

Article 6 octies

M. le président. « Art. 6 octies. - Dans le deuxième alinéa (1°) de l'article L. 324-14 du code du travail, après le mot : "obligatoires", sont insérés les mots : "ainsi que des pénalités et majorations". »
Par amendement n° 16, M. Souvet, au nom de la commission des affaires sociales, propose de supprimer cet article.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Le Gouvernement est favorable à cet amendement de coordination, ainsi qu'aux amendements n°s 17 et 18.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 16, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 6 octies est supprimé.

Article 6 nonies

M. le président. « Art. 6 nonies. - Dans le quatrième alinéa (3°) de l'article L. 324-14 du code du travail, après le mot : "rémunérations", est inséré le mot : ", indemnités". »
Par amendement n° 17, M. Souvet, au nom de la commission des affaires sociales, propose de supprimer cet article.
C'est un amendement de coordination.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 17, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 6 nonies est supprimé.

Article 6 decies

M. le président. « Art. 6 decies. - Après les mots : "fait l'objet", la fin du quatrième alinéa (3°) de l'article L. 324-14 du code du travail est ainsi rédigée : "de l'une des formalités prévues aux articles L. 143-3 et L. 320". »
Par amendement n° 18, M. Souvet, au nom de la commission des affaires sociales, propose de supprimer cet article.
Encore un amendement de coordination.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 18, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 6 decies est supprimé.

Articles 6 undecies et 6 duodecies

M. le président. « Art. 6 undecies. - Dans l'intitulé de la section 2 du chapitre II du titre VI du livre III du code du travail, le mot : "clandestin" est remplacé par le mot : "dissimulé". » - (Adopté.)
« Art. 6 duodecies. - Après l'article L. 341-6-3 du code du travail, il est inséré un article L. 341-6-4 ainsi rédigé :
« Art. L. 341-6-4. - Les agents de contrôle visés aux articles L. 611-1 et L. 611-15 sont habilités à se communiquer tous renseignements et tous documents relatifs aux dispositions du chapitre premier du titre IV du livre III du présent code. » - (Adopté.)

Article 6 terdecies

M. le président. « Art. 6 terdecies. - L'article L. 516-2 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« A cet effet, les conseillers rapporteurs obtiennent également sur demande écrite tous renseignements et tous documents nécessaires à l'accomplissement de la mission dont ils sont chargés par le conseil de prud'hommes. »
Par amendement n° 52, M. Masson, au nom de la commission des lois, propose de rédiger comme suit le texte présenté par cet article pour compléter l'article L. 516-2 du code du travail :
« Les agents de contrôle mentionnés à l'article L. 324-12 doivent communiquer aux conseillers rapporteurs, sur la demande de ceux-ci et sans pouvoir opposer le secret professionnel, les renseignements et documents relatifs au travail dissimulé dont ils disposent. »
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Paul Masson, rapporteur pour avis. Il s'agit de proposer une autre rédaction que celle qui a été retenue par l'Assemblée nationale pour l'article L. 516-2 du code du travail.
En effet, si la commission des lois a bien compris l'objectif de l'Assemblée nationale, qui était d'éviter que ne soit opposé aux conseillers rapporteurs des prud'hommes le secret professionnel, tel qu'il est rédigé, l'article 6 terdecies me semble passible de trois séries de critiques.
J'observe d'abord qu'il s'applique à toutes les questions susceptibles d'être soumises aux conseillers rapporteurs et non au seul travail illégal.
J'observe également qu'il constitue une brèche dans le principe de la séparation des juridictions d'instruction et de jugement puisque le conseiller rapporteur peut faire partie de la formation de jugement.
J'observe enfin que cet article oublie le principe traditionnel de procédure civile, qui est applicable aux conseils de prud'hommes, selon lequel la production d'un élément de preuve peut déjà être ordonnée par le président du tribunal de grande instance.
La commission des lois a donc souhaité limiter le champ de l'article 6 terdecies à la stricte mise en place de l'objectif recherché par l'Assemblée nationale. Cet objectif étant de permettre au conseiller rapporteur de surmonter l'obstacle du secret professionnel, l'article 6 terdecies pourrait se limiter à imposer aux agents chargés du contrôle en matière de travail dissimulé de communiquer au conseiller rapporteur les documents qu'ils détiennent.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. La commission est favorable à cet amendement, dont la rédaction semble moins inquisitoriale que la rédaction qui nous vient de l'Assemblée nationale.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Le Gouvernement est également favorable à cet amendement, qui précise le champ d'application de la disposition adoptée par l'Assemblée nationale. En la précisant, on donne toute sa force à la mesure.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 52, accepté par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 6 terdecies , ainsi modifié.

(L'article 6 terdecies est adopté.)

Articles 6 quaterdecies, 6 quindecies et 7

M. le président. « Art. 6 quaterdecies . - Dans l'article L. 611-15 du code du travail, après les mots : "sont compétents pour", sont insérés les mots : "rechercher et". » - (Adopté.)
« Art. 6 quindecies . - Après l'article L. 243-13 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 243-13-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 243-13-1 . - L'autorité judiciaire est habilitée à communiquer aux organismes de sécurité sociale et aux caisses de mutualité sociale agricole cités à l'article L. 324-12 du code du travail ainsi qu'aux caisses assurant le service des congés payés mentionnées au livre VII du même code toute indication qu'elle peut recueillir de nature à faire présumer une fraude commise en matière sociale ou une manoeuvre quelconque ayant eu pour objet ou ayant pour résultat de frauder ou de compromettre le recouvrement des cotisations sociales, qu'il s'agisse d'une instance civile ou commerciale ou d'une information criminelle ou correctionnelle même terminée par un non-lieu. » - (Adopté.)
« Art. 7. - Il est inséré, au chapitre Ier du titre Ier du livre VI du code du travail, après l'article L. 611-15, un article L. 611-15-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 611-15-1 . - Les agents de la direction générale des douanes sont compétents pour rechercher et constater, au moyen de procès-verbaux transmis directement au parquet, les infractions aux dispositions de l'article L. 341-6. Ils disposent à cet effet des pouvoirs d'investigation prévus par les textes qui leur sont applicables. » - (Adopté.)

Articles additionnels après l'article 7

M. le président. Je suis saisi de trois amendements présentés par Mme Dieulangard et les membres du groupe socialiste et apparentés.
L'amendement n° 39 vise à insérer, après l'article 7, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après le premier alinéa de l'article L. 125-1 du code du travail, il est inséré un nouvel alinéa ainsi rédigé :
« A l'exception des activités exécutées dans le cadre d'une mission par le salarié d'une entreprise de travail temporaire, les tâches confiées par un chef d'entreprise industriel ou commercial au salarié d'une entreprise prestataire de services avec laquelle il a passé un contrat à cet effet, ne peuvent relever de l'objet principal de l'activité de l'entreprise utilisatrice. »
L'amendement n° 40 tend à insérer, après l'article 7, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après le premier alinéa de l'article L. 125-1 du code du travail, il est inséré un nouvel alinéa ainsi rédigé :
« Le délit de marchandage prévu au premier alinéa est caractérisé dès l'instant que les salariés mis à disposition ne bénéficient pas des mêmes avantages et des mêmes garanties légales et conventionnelles que les salariés permanents de l'entreprise. »
Enfin, l'amendement n° 41 a pour objet d'insérer, après l'article 7, un article additionnel ainsi rédigé :
« Les pouvoirs d'investigation des agents de contrôle visés à l'article L. 324-12 du code du travail et prévus par ce même article s'appliquent également pour le contrôle de l'application des articles L. 125-1 et L. 125-3 du code du travail relatifs au marchandage et au prêt de main-d'oeuvre ainsi que des dispositions de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relatives à la sous-traitance. »
La parole est à M. Estier, pour présenter ces trois amendements.
M. Claude Estier. L'amendement n° 39 tend à lutter contre la pratique de fourniture de main-d'oeuvre déguisée en contrat de prestation de services qui se développe dans certains secteurs.
Ce faisant, il suit la jurisprudence qui recherche régulièrement si l'entreprise prestataire de services a une activité spécifique nettement différenciée de l'activité de l'entreprise cliente. Si tel n'est pas le cas, il s'agit d'une fourniture de main-d'oeuvre prohibée.
L'amendement n° 40 a pour objet de protéger les salariés des entreprises prestataires de services contre des différences de traitement avec les salariés des entreprises qui les accueillent. L'emploi de ces personnes ne doit pas servir à des fins de contournement des garanties conventionnelles.
Quant à l'amendement n° 41, il vise à étendre les pouvoirs d'investigation des agents de contrôle en direction des infractions de marchandage et de prêt illicite de main-d'oeuvre.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ces trois amendements ?
M. Louis Souvet, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur l'amendement n° 39. En instituant cette présomption, monsieur Estier, vous privez le juge de la possibilité de déterminer au cas par cas si les faits qui lui sont soumis constituent des infractions de marchandage ou de prêt illicite de main-d'oeuvre.
Dans un contexte de pénurie d'emplois, cette rigidité risque de se retourner contre l'emploi.
La commission est défavorable à l'amendement n° 40 pour les mêmes raisons. J'ajouterai que nous sommes là dans un débat sur la flexibilité du travail, qui dépasse largement le cadre du présent texte.
La commission a aussi émis un avis défavorable sur l'amendement n° 41 parce qu'il est partiellement satisfait, les inspecteurs et les contrôleurs du travail, les agents des impôts et ceux des douanes ayant déjà ces pouvoirs. Aller au-delà et les donner à tous les agents mentionnés à l'article L. 324-12 paraît à la commission excessif et inutile.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. L'amendement n° 39 tend à interdire à une entreprise de sous-traiter les activités relevant de son objet social. Comme l'a dit M. Souvet, cela dépasse très largement le cadre de ce texte.
Il me semble, en outre, pouvoir discerner là un risque d'atteinte à la liberté du commerce et de l'industrie. C'est pourquoi je suis conduit à ne pas accepter cet amendement.
L'amendement n° 40 ne paraît pas nécessaire puisqu'il porte sur un élément constitutif du délit de marchandage qui n'est pas contesté et qui fait l'objet d'une jurispridence claire et constante, parfaitement conforme à la lettre et à l'esprit de l'article L. 125-1. Dès lors, mieux vaut laisser cette jurisprudence poursuivre son oeuvre.
Je ne peux accepter non plus l'amendement n° 41 dans la mesure où, à mes yeux, les agents de contrôle ne sont pas démunis pour procéder à la recherche du marchandage : je crois sincèrement qu'ils disposent à cet effet des pouvoirs d'investigation qui leur sont propres.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 39, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 40, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 41, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 7 bis

M. le président. « Art. 7 bis. - Après l'article L. 125-3-1 du code du travail, il est inséré un article L. 125-3-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 125-3-2 . - Les agents de contrôle visés aux articles L. 611-1 et L. 611-15 du présent code sont habilités à se communiquer réciproquement tous renseignements et tous documents nécessaires à l'accomplissement de leur mission de lutte contre le marchandage.
« Dans le cadre de cette mission, ils peuvent également obtenir les contrats commerciaux, les devis, les bons de commande et les bons de travaux relatifs aux opérations de marchandage. »
Par amendement n° 42, Mme Dieulangard et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent :
I. - De compléter in fine le premier alinéa du texte présenté par cet article pour l'article L. 125-3-2 du code du travail par les mots suivants : « et le prêt illicite de main-d'oeuvre. »
II. - De compléter in fine le second alinéa dudit texte par les mots suivants : « et de prêt illicite de main-d'oeuvre. »
La parole est à M. Estier.
M. Claude Estier. Il s'agit d'un amendement de précision.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. La commission a jugé cette précision utile. Elle a donc accepté l'amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Le Gouvernement considère également qu'est justifiée l'extension à tous les agents de contrôle de la communication des renseignements et documents nécessaires à la lutte contre le prêt illicite de main-d'oeuvre.
Cela me donne l'occasion de souligner, notamment à l'intention de M. Estier et de Mme Dieulangard, que ce texte organise, et c'est tout de même très important, la mobilisation de l'ensemble des corps de contrôle et d'un certain nombre de fonctionnaires qui ne pouvaient pas véritablement, jusqu'à présent, participer à cette lutte. Les différents éléments de chaque dossier pourront ainsi être recoupés, ce qui permettra de remonter au donneur d'ordre.
Ce texte contient en outre une disposition à laquelle je tiens beaucoup parce que mon collègue allemand m'a assuré que, outre-Rhin, une disposition semblable a donné des résultats très appréciables : il s'agit du refus d'accorder des aides à l'emploi aux entreprises qui ont, de près ou de loin, fait appel au travail clandestin.
Je crois que c'est grâce à de telles dispositions que nous pourrons marquer des points contre le travail dissimulé, qui ne prive pas seulement la sécurité sociale de ressources, mais qui est aussi un fléau moral.
Quelles que soient nos sensibilités dans ce débat, que le Sénat a su parfaitement distinguer d'un autre débat, celui qui porte sur l'immigration, nous aurons, me semble-t-il, fait oeuvre utile, à la lumière de l'expérience acquise en la matière, en vue de l'amélioration du dispositif de lutte contre ce fléau. Je suis en effet convaincu que ce texte le rendra nettement plus efficace.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 42, accepté par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 7 bis, ainsi modifié.

(L'article 7 bis est adopté.)

Article 7 ter

M. le président. « Art. 7 ter. - Après l'article L. 341-7-2 du code du travail, il est inséré un article L. 341-7-3 ainsi rédigé :
« Art. L. 341-7-3 . - L'employeur qui aura occupé un travailleur étranger en violation des dispositions du premier alinéa de l'article L. 341-6 pourra être tenu de prendre en charge les frais afférents à la procédure d'éloignement susceptible d'être engagée à l'encontre de ce travailleur étranger.
« Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions d'application du présent article. »
Par amendement n° 53, M. Masson, au nom de la commission des lois, propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Paul Masson, rapporteur pour avis. Le premier alinéa de l'article L. 341-6 du code du travail dispose :
« Nul ne peut, directement ou par personne interposée, engager, conserver à son service ou employer pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France. »
L'Assemblée nationale a adopté un article additionnel tendant à introduire un article L. 341-7-3 qui précise que « l'employeur qui aura occupé un travailleur étranger en violation des dispositions du premier alinéa de l'article L. 341-6 pourra être tenu de prendre en charge les frais afférents à la procédure d'éloignement susceptible d'être engagée à l'encontre de ce travailleur étranger. »
La commission des lois n'a pas pris position sur le fond. Il lui a simplement semblé que cette disposition ne relevait pas du texte qui nous occupe. Elle concerne en effet beaucoup plus la lutte contre l'immigration clandestine que la lutte contre le travail illégal.
C'est la raison pour laquelle la commission des lois propose la suppression pure et simple de l'article 7 ter, considérant qu'il convient de renvoyer au débat sur le projet de loi modifiant l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative à l'entrée et au séjour des étrangers en France l'insertion éventuelle de dispositions similaires ou identiques.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. La commission est favorable à cet amendement : la disposition présentée à l'article 7 ter ne lui paraît effectivement pas avoir sa place dans le présent texte.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Le Gouvernement est également favorable à cet amendement.
En effet, comme nous l'avions indiqué à l'Assemblée nationale, la mesure que celle-ci a adoptée se heurte au principe de l'interdiction des doubles peines. Le Conseil d'Etat a déjà eu l'occasion de préciser qu'ils n'était pas possible d'imputer à l'employeur les conséquences de l'irrégularité du séjour du salarié, qui est sans lien avec la relation de travail.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 53, accepté par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 7 ter est supprimé.

Article additionnel avant l'article 8

M. le président. Par amendement n° 55 rectifié, MM. Jean-Jacques Robert et Ostermann proposent d'insérer, avant l'article 8, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans le quatrième alinéa (3°) de l'article L. 362-4 du code du travail, après le mot : "confiscation" sont insérés les mots : "et la destruction".
« II. - Dans le quatrième alinéa (3°) de l'article L. 364-8 du code du travail, après le mot : "confiscation" sont insérés les mots : "et la destruction". »
La parole est à M. Ostermann.
M. Joseph Ostermann. Il apparaît que, de temps à autre, lorsqu'un atelier clandestin est démantelé, le matériel saisi étant revendu, il peut être récupéré et que, ainsi, un nouvel atelier clandestin se trouve très rapidement opérationnel. C'est pourquoi nous proposons que ce matériel soit détruit.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. La commission considère que les observations de nos collègues Jean-Jacques Robert et Joseph Ostermann sont tout à fait pertinentes. Néanmoins, elle ne souhaite pas se prononcer avant d'entendre le Gouvernement. Celui-ci pourrait en effet leur répondre en proposant des solutions imaginatives : je pense, par exemple, à la revente à des travailleurs n'ayant aucun lien avec l'atelier qui a été démantelé ou à des entreprises ayant pignon sur rue.
M. le président. Quel est, donc, l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Monsieur Ostermann, vous évoquez le cas où un outil de production est saisi, puis revendu à un prix assez modique par les Domaines et, enfin, récupéré au bénéfice d'un nouvel atelier clandestin.
Bien sûr, cela pourrait justifier la destruction pure et simple du matériel, mais on peut aisément entrevoir à quoi une telle mesure pourrait conduire : imaginons un camion qui aurait été conduit dans des conditions, pour reprendre l'expression du président Fourcade, « frauduleuses ou dissimulées » ; ce camion doit-il, une fois saisi, être brûlé en place de Grève ? (Sourires.) Sans doute nous faut-il envisager d'autres solutions, quel que soit le bien-fondé de vos observations, monsieur Ostermann.
J'ai tendance à penser que, si les Domaines organisent une vente, ils pourraient être amenés à surveiller l'acquéreur éventuel pour s'assurer qu'il n'a aucun lien avec des donneurs d'ordre ou des entreprises cocontractantes qui ont, d'une manière ou d'une autre, touché au travail clandestin.
Quoi qu'il en soit, la navette va nous donner la possibilité de réfléchir à une réponse adaptée à la question qui est soulevée par cet amendement.
Bien sûr, on peut aussi imaginer, par exemple, le cas de machines à coudre totalement obsolètes ayant servi à des ateliers clandestins. Dans un tel cas, le matériel en cause ne répondant pas aux normes de sécurité - et cela vient souvent, par surcroît, avec le recours au travail illégal - peut sans inconvénient, au contraire, être retiré de la circulation, voire détruit purement et simplement.
Cette solution ne doit donc pas être totalement écartée. Mais il faut sans doute ouvrir une alternative et faire en sorte, si les Domaines doivent revendre un matériel saisi, ils appliquent l'esprit de ce texte : aucune faveur ne peut être accordée par la puissance publique à des gens qui ont, de près ou de loin, participé à cette grande fraude qu'est le travail dissimulé.
Voilà pourquoi, monsieur Ostermann, je me permets de vous inviter à retirer votre amendement, étant entendu que la réflexion sur cette question va se poursuivre.
M. le président. Monsieur Ostermann, retirez-vous votre amendement ?
M. Joseph Ostermann. Compte tenu des assurances qui m'ont été données par M. le ministre quant à la recherche d'une solution appropriée, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 55 rectifié est retiré.

Article 8

M. le président. « Art. 8. _ L'article L. 362-4 et le premier alinéa de l'article L. 364-8 du code du travail sont complétés par un 5° ainsi rédigé :
« 5° L'interdiction, suivant les modalités prévues par l'article 131-26 du code pénal, des droits civiques et civils. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 19 rectifié est présenté par M. Souvet, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 54 est déposé par M. Masson, au nom de la commission des lois.
Tous deux tendent à rédiger comme suit l'article 8 :
« I. - L'article L. 362-4 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« 5° L'interdiction, suivant les modalités prévues par l'article L. 131-26 du code pénal, des droits civiques, civils et de famille. »
« II. - Après le cinquième alinéa (4°) de l'article L. 364-8 dudit code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« 5° L'interdiction, suivant les modalités prévues par l'article L. 131-26 du code pénal, des droits civiques, civils et de famille. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 19 rectifié.
M. Louis Souvet, rapporteur. L'Assemblée nationale a supprimé la mention des droits de famille, ce qui ouvre à des auteurs des infractions visées la possibilité d'exercer une tutelle ou une curatelle. Nous proposons de rétablir cette mention.
Ces droits correspondant à un mandat de justice, il paraît bien peu opportun de les confier à une personne condamnée pour infraction au travail dissimulé. L'amendement rétablit donc la possibilité, pour le juge, de priver le contrevenant du droit d'être tuteur ou curateur.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° 54.
M. Paul Masson, rapporteur pour avis. Je voudrais éviter toute redondance avec les propos de M. le rapporteur, mais je rappelle que le projet de loi, dans sa rédaction initiale, tendait à ajouter aux peines prévues par le code du travail pour les infractions de travail clandestin et d'emploi de main-d'oeuvre étrangère dans des conditions irrégulières l'interdiction des droits civiques, civils et de famille.
L'Assemblée nationale a supprimé l'interdiction des droits de famille. Mais rappelons tout de même que l'article 131-26 du code pénal, auquel il est fait référence, forme un tout.
Alors, de deux choses l'une : ou bien on ne s'y réfère pas, et donc on n'ajoute l'interdiction ni des droits civiques, ni des droits civils, ni des droits de famille, ou bien on s'y réfère, et dans ces conditions il faut prendre en compte toutes les conséquences qu'il emporte, notamment l'interdiction des droits de famille.
J'observe également que l'application de ces peines supplémentaires est laissée à l'appréciation du juge et que, bien entendu, elle n'est donc pas automatique et peut être modulée.
Je suggère donc, en accord avec la commission des affaires sociales, de rétablir la mention de l'interdictioin des droits de famille qui a été supprimée par l'Assemblée nationale.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. L'amendement qui a été adopté par l'Assemblée nationale ne manquait pas de pertinence, car il est vrai qu'il ne faut pas tout mélanger.
Cela étant, comme vient de très bien le dire M. Masson, il faut laisser au juge une certaine latitude, car celui-ci est vraisemblablement mieux à même d'apprécier des situations complexes sur les plans personnel et familial, et la loi ne peut tout régenter.
Une situation familiale peut en effet exiger que le juge module ses décisions. C'est pourquoi je m'en remets à la sagesse du Sénat surces amendements.
M. le président. Je vais mettre aux voix les amendements n°s 19 rectifié et 54.
M. Jacques Habert. Je demande la parole contre les amendements.
M. le président. La parole est à M. Habert.
M. Jacques Habert. J'espérais que le Gouvernement adopterait ici la même attitude qu'à l'Assemblée nationale, où il avait donné un avis favorable à un amendement tendant à supprimer l'interdiction des droits de famille.
En effet, je trouve absolument extraordinaire la lourdeur des peines que l'on prévoit pour des personnes, certes délinquantes, mais qui peuvent déjà être condamnées à de longues années de prison et à des amendes dont nous avons augmenté le montant. L'application de ces peines très sévères place à elle seule ces personnes - et c'est justice - dans des situations réellement terribles et lamentables. Et, en plus, on veut les priver de leurs droits de famille. Ainsi, ils n'auront par exemple plus le droit d'être tuteurs ou curateurs.
Telle personne condamnée devra être autorisée, après avis conforme du juge des tutelles et du conseil de famille, à être tuteur ou curateur de ses propres enfants. C'est tout de même un peu fort ! Songez aux familles qui seront brisées ! Le chef de famille est coupable, certes, il passera des années en prison, mais qu'advient-il de ses enfants ? N'aura-t-il plus même le droit de s'en occuper ?
L'Assemblée nationale, de façon tout à fait opportune, avait décidé de supprimer l'interdiction des droits de famille. Que les coupables soient privés pour longtemps de tous leurs droits civiques et de tous leurs droits civils constitue déjà une punition énorme, y ajouter la privation des droits de famille serait excessif, et l'Assemblée nationale a eu tout à fait raison de supprimer cette disposition.
Que nos deux rapporteurs veulent bien excuser mes propos, mais j'ai été sidéré de découvrir tout à coup que les deux commissions avaient décidé de la rétablir par souci de conformité ou, en ce qui concerne M. Masson, afin de respecter la teneur de l'article 131-26 du code pénal.
Pour des raisons juridiques, on place les personnes concernées dans une situation familiale impossible. Je pense que nous allons beaucoup trop loin, et je suggère donc à nos deux rapporteurs de retirer ces amendements ou de les rectifier en supprimant toute référence aux droits de famille. Sinon, de quelle sévérité extraordinaire ferions-nous preuve !
Je demande instamment au Sénat de réfléchir. Je ne vois pas pourquoi, tout à coup, nous voudrions nous comporter en féroces justiciers. Il faut penser aux familles, et adopter la même attitude que l'Assemblée nationale.
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Je voudrais lever toute équivoque. En effet, je m'en suis remis à la sagesse du Sénat, et je n'ai donc pas pris position.
Cependant, je reconnais que les arguments de M. Masson m'ont paru intéressants, et il ne faudrait quand même pas se tromper de débat : il s'agit non pas de remettre en cause les liens qui unissent un père et ses enfants, mais de savoir si l'on peut confier à la personne condamnée la curatelle ou la tutelle des enfants d'un autre. Cette disposition ne concerne donc pas la famille naturelle.
Pour ma part, je laisse les deux assemblées se mettre d'accord sur un texte. Soit on défend au juge de prononcer l'interdiction des droits de famille, soit, dans des cas en nombre à mon avis limité, si vraiment un employeur a abusé de personnes en les faisant travailler clandestinement dans des conditions souvent attentatoires à leur dignité de travailleurs, on décide que le juge - cela ne me paraîtrait pas choquant - pourra lui refuser d'assurer la curatelle ou la tutelle d'enfants qui ne sont pas les siens.
Par conséquent, ce débat doit être ramené à de justes proportions. Ma formation d'avocat m'incite à faire confiance au pouvoir judiciaire pour apprécier au cas par cas des situations toujours particulières.
Le Gouvernement s'en remet donc à la sagesse du Sénat, car il ne veut pas se déjuger dans cette affaire, il laisse au Parlement le soin de choisir la meilleure option.
M. Paul Masson, rapporteur pour avis. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Paul Masson, rapporteur pour avis. Je crois, mes chers collègues, que ce débat n'est pas inutile, car il permet à chacun de préciser ses positions, et je remercie notre collègue Jacques Habert d'avoir attiré notre attention sur le point qu'il a soulevé.
Je viens de relire l'article 131-26 du code pénal, car c'est à ce texte dans son ensemble qu'il est fait référence et non simplement à l'une ou l'autre de ses dispositions.
Il faut d'abord avoir bien présent à l'esprit que cette peine ne peut concerner que les employeurs, et en aucun cas les salariés.
M. Jacques Habert. Effectivement.
M. Paul Masson, rapporteur pour avis. Le 5° de l'article 131-26 du code pénal, qui nous intéresse ici, concerne le droit d'être tuteur ou curateur. Mais il est précisé que « cette interdiction n'exclut pas le droit, après avis conforme du juge des tutelles, le conseil des familles entendu, d'être tuteur ou curateur de ses propres enfants. »
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Voilà !
M. Paul Masson, rapporteur pour avis. Le cas que vous avez évoqué à juste titre, monsieur Habert, trouve donc sa solution dans le texte. Le juge, dans sa sagesse, peut condamner ou non à cette peine complémentaire. Même s'il prononce cette condamnation, il peut faire une exception pour tenir compte de la situation familiale du prévenu.
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Très bien !
M. Jacques Habert. Je demande la parole.
M. le président. A titre exceptionnel, je vous donne de nouveau la parole, monsieur Habert !
M. Jacques Habert. Je soulignerai simplement que, dans le cas où l'intéressé est tuteur ou curateur d'un ou de plusieurs enfants, il en perd automatiquement le droit après sa condamnation. Cette interdiction ne l'empêche pas, après avis conforme du juge des tutelles et le conseil de famille une fois entendu, d'être tuteur ou curateur de ses propres enfants, mais il n'aura plus le droit de jouer le même rôle vis-à-vis d'autres enfants.
En tout état de cause, une décision du juge, après avis du juge des tutelles et du conseil de famille, sera nécessaire pour qu'il conserve la tutelle ou la curatelle de ses propres enfants. Cela va donc très loin !
M. Jean Delaneau. Oui !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 19 rectifié et 54, pour lesquels le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l'article 8 est ainsi rédigé.

Article additionnel avant l'article 9

M. le président. Par amendement n° 43, Mme Dieulangard et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, avant l'article 9, un article additionnel ainsi rédigé :
« Il est inséré, après l'article L. 620-7 du code du travail, un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. ... - Sans préjudice des poursuites judiciaires qui pourront être engagées, l'autorité administrative compétente peut refuser les aides publiques à l'emploi ou à la formation professionnelle à toute personne ayant commis une infraction délictuelle aux dispositions du droit du travail. »
La parole est à M. Debarge.
M. Marcel Debarge. Cet amendement, dont l'objet peut sembler excéder quelque peu celui du présent projet de loi, concerne les aides à l'emploi ou les dispositifs qui sont considérés comme tels, qui peuvent constituer parfois un véritable pactole et alimenter les controverses.
Nous connaissons tous - cela est d'ailleurs rappelé dans un rapport de l'Assemblée nationale, même si nous ne souscrivons pas à toutes ses conclusions - l'importance des effets d'aubaine et la formidable déperdition due à l'attribution d'aides qui n'aboutissent qu'à subventionner des emplois précaires. Je n'insisterai donc pas sur ce point.
Par notre amendement, nous demandons que la possibilité pour l'administration de refuser une aide à l'emploi ou à la formation professionnelle soit étendue, au-delà des cas d'infraction en matière de travail clandestin, à tous les auteurs d'infraction délictuelle en matière de droit du travail. En effet, il n'est pas normal qu'un employeur qui aura, par exemple, commis une infraction ayant provoqué un accident du travail puisse bénéficier ensuite d'une aide de l'Etat.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. La commission est défavorable à l'amendement n° 43.
En visant l'ensemble des infractions au code du travail, cet amendement dépasse très largement l'objet du présent projet de loi.
J'ajoute que, très souvent, le juge peut prescrire le remboursement des aides publiques à titre de peine complémentaire. La commission ne voit donc pas l'utilité de cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. L'objet de ce texte, monsieur Debarge, est précisément d'instaurer une très grande fermeté en matière de répression du travail clandestin. Ne mélangeons donc pas les choses, parce que nous atténuerions la portée de ce dispositif.
En outre, la complexité de la mise en oeuvre de la mesure proposée se retournerait, dans certains cas, contre des salariés qui travaillent sous contrat d'apprentissage ou de qualification.
Tenons-nous-en donc à cette interdiction de l'attribution de toute aide publique à ceux qui, directement ou non, ont eu recours au travail clandestin ; l'extension proposée ne me paraît ni possible ni souhaitable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 43, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 9

M. le président. « Art. 9. - Il est inséré, au chapitre IV du titre II du livre III du code du travail, un article L. 324-13-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 324-13-2 . - Lorsque l'un des agents de contrôle mentionnés à l'article L. 324-12 a constaté par procès-verbal l'existence d'une infraction définie aux articles L. 324-9 et L. 324-10 ainsi qu'aux articles L. 125-1 et L. 125-3, l'autorité administrative compétente, eu égard à la gravité des faits constatés, à la nature des aides sollicitées et à l'avantage qu'elles procurent à l'employeur, peut, pendant une durée maximale de cinq ans, refuser d'accorder les aides publiques à l'emploi ou à la formation professionnelle mentionnées par décret à la personne physique ou morale ayant fait l'objet de cette verbalisation, sans préjudice des poursuites judiciaires qui pourront être engagées. Elle peut également, dans les mêmes conditions, en suspendre le versement. »
Par amendement n° 44, Mme Dieulangard et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, dans la première phrase du texte présenté par cet article pour l'article L. 324-13-2 du code du travail, après les mots : « par procès-verbal », d'insérer les mots : « ou mise en demeure ».
La parole est à M. Debarge.
M. Marcel Debarge. L'intervention de l'inspection du travail aboutit le plus souvent non pas à un procès-verbal, mais à des observations ou à une mise en demeure, qui relèvent l'existence d'infractions dont l'employeur s'engagera à supprimer les causes dans les meilleurs délais. Il paraît donc opportun d'envisager que cette procédure plus fréquente puisse entrer dans le champ considéré par l'administration pour refuser une aide.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement. En effet, la mise en demeure a pour objet de permettre au contrevenant de régulariser sa situation. S'il le fait, il n'y a alors pas de raison de supprimer les aides.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Comme vient de le dire M. le rapporteur, par définition, on peut mettre quelqu'un en demeure de mettre en conformité une machine ; mais, en l'occurrence, l'amendement n° 44 ne me paraît pas souhaitable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 44, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 20, M. Souvet, au nom de la commission des affaires sociales, propose de supprimer la dernière phrase du texte présenté par l'article 9 pour l'article L. 324-13-2 à insérer dans le code du travail.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet, rapporteur. Il n'est pas opportun de supprimer une aide à l'emploi octroyée, même si un procès-verbal pour infraction à la législation relative au travail dissimulé est dressé par la suite. En effet, dans une entreprise, on trouve aussi des jeunes en contrat de qualification ou en contrat d'apprentissage, des personnes en contrat initiative-emploi, etc. Ces personnes-là seraient également sanctionnées en cas de suspension des aides, qui ne me paraît pas normal.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Le Gouvernement a déjà argumenté dans le sens de M. le rapporteur, à l'Assemblée nationale. Dieu sait si je tiens, personnellement, à la disposition consistant à interdire l'accès aux aides publiques à toutes les entreprises qui ont été impliquées dans une affaire de travail clandestin !
Mais interrompre une aide qui a été accordée serait absurde. Vous avez d'ailleurs donné un bon exemple, monsieur le rapporteur. J'ai en effet dû intervenir récemment dans une affaire : l'administration voulait supprimer l'aide déjà accordée en matière de contrat de qualification à une entreprise devant faire l'objet d'une mise en demeure. Pour ma part, je n'ai pas voulu sanctionner le jeune à la place de l'entreprise.
Par conséquent, le Sénat a raison : si la sévérité doit être absolue en la matière, il faut cependant tenir compte du fait que, lorsqu'un contrat a été passé, finalement au profit du salarié, l'application immédiate du dispositif aboutirait à pénaliser non pas seulement l'employeur de main-d'oeuvre clandestine, mais également la personne qui a obtenue l'aide.
A la limite, la meilleure punition consiste à demander à l'entreprise de poursuivre ce contrat quoi qu'il arrive. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis favorable sur l'amendement n° 20.
M. le président. Personne ne demande la parole ? ...
Je mets aux voix l'amendement n° 20, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ? ...
Je mets aux voix l'article 9, ainsi modifié.

(L'article 9 est adopté.)

Articles additionnels après l'article 9

M. le président. Par amendement n° 26, MM. Ostermann, Grignon et Vasselle, proposent d'insérer après l'article 9, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 362-3 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 362-3. - Toute infraction aux interdictions définies à l'article L. 324-9 est punie de quatre ans d'emprisonnement et de 400 000 francs d'amende. »
La parole est à M. Ostermann.
M. Joseph Ostermann. Monsieur le président, si vous le permettez, je présenterai en même temps les amendements n°s 27, 28 et 29, qui ont le même objet.
M. le président. J'appelle donc en discussion avec l'amendement n° 26 les amendements n°s 27, 28 et 29.
Par amendement n° 27, MM. Ostermann, Grignon et Vasselle proposent d'insérer, après l'article 9, un article additionnel ainsi rédigé :
« La fin de l'article 225-13 du code pénal est ainsi rédigée : "... est puni de quatre ans d'emprisonnement et de 1 000 000 francs d'amende". »
Par amendement n° 28, MM. Ostermann, Grignon et Vasselle proposent d'insérer, après l'article 9, un article ainsi rédigé :
« La fin de l'article 225-14 du code pénal est ainsi rédigée : "... est puni de quatre ans d'emprisonnement et de 1 000 000 francs d'amende". »
Par amendement n° 29, MM. Ostermann, Grignon et Vasselle proposent d'insérer, après l'article 9, un article ainsi rédigé :
« L'article 225-15 du code pénal est ainsi rédigé :
« Art. 225-15 . - Les infractions définies aux articles 225-13 et 225-14 sont punies de dix ans d'emprisonnement et de 2 000 000 francs d'amende lorsqu'elles sont commises à l'égard de plusieurs personnes." »
La parole est à M. Ostermann, pour défendre ces quatre amendements.
M. Joseph Ostermann. Ces amendements visent, grâce à un doublement des peines et amendes prévues par le code pénal, à rendre plus dissuasive toute infraction en matière de travail.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 26, 27, 28, et 29 ?
M. Louis Souvet, rapporteur. Ces amendements prévoient des sanctions qui sont totalement disproportionnées avec l'objet de l'infraction et qui n'ont plus rien à voir avec ce qui se pratique régulièrement : ainsi, par exemple, l'homicide involontaire est puni d'une sanction maximale de trois ans d'emprisonnement et de 300 000 francs d'amende. Or, si les amendements présentés par M. Ostermann étaient adoptés, les peines concernant le travail dissimulé pourraient s'élever jusqu'à dix ans d'emprisonnement et à 2 millions de francs d'amende, c'est-à-dire au même niveau que les peines punissant le proxénétisme aggravé, le trafic de stupéfiants, la violence ayant entraîné une infirmité, et d'autres délits de ce type !
Il faut en toute chose raison garder et, là, nous dépassons ce que la raison peut admettre. La commission émet donc un avis défavorable sur les amendements n°s 26, 27, 28 et 29.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 26, 27, 28 et 29 ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. J'aurais aimé retrouver un précepte latin pour traduire ma pensée. Pour l'instant, seule me vient à l'esprit cette phrase de l'Evangile : « Il faut convertir le pécheur, et non le faire mourir. » (Sourires.)
Monsieur Ostermann, les sanctions très lourdes que vous proposez traduisent une volonté que je partage profondément : vous voulez y aller, et pas par quatre chemins !
Cela dit, la sagesse alsacienne et la sagesse auvergnate doivent pouvoir se rejoindre. Punissons justement, fermement, et tenons-nous-en là ! Le mieux étant parfois l'ennemi du bien - ce n'est pas tout à fait la formule qui convient en l'occurrence - je considère très sincèrement que, sous réserve de la navette, qui nous permettra de voir si quelques éléments supplémentaires ne doivent pas être apportés à ce texte, nous sommes arrivés à une rédaction assez sérieuse et solide.
Je vous invite donc à retirer ces amendements, sur lesquels le Gouvernement ne peut émettre qu'un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Ostermann, les amendements n°s 26, 27, 28 et 29 sont-ils maintenus ?
M. Joseph Ostermann. Non, monsieur le président, je les retire.
M. le président. Les amendements n°s 26, 27, 28 et 29 sont retirés.

Article 10

M. le président. « Art. 10. - Dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat, tout candidat à un contrat ou marché passé par une personne morale de droit public ainsi que tout sous-traitant d'un titulaire de contrat ou de marché doit attester qu'il n'a pas fait l'objet, au cours des cinq dernières années, d'une condamnation inscrite au bulletin n° 2 du casier judiciaire pour les infractions visées aux articles L. 324-9, L. 324-10 et L. 341-6 du code du travail.
« Lorsque leur montant est supérieur à un montant fixé par décret en Conseil d'Etat, les contrats et marchés passés par les personnes morales de droit public comportent une clause leur permettant de s'assurer que le cocontractant n'a pas recours au travail illégal au cours de l'exécution du contrat ou du marché. »
Par amendement n° 21, M. Souvet, au nom de la commission des affaires sociales, propose, dans le premier alinéa de cet article, de remplacer la référence : « et L. 341-6 », par les références : « L. 341-6, L. 125-1 et L. 125-3 ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet, rapporteur. Les articles L. 324-9, L. 324-10 et L. 341-6 du code du travail visent le travail dissimulé et l'emploi d'étrangers sans titre de travail. Le projet de loi contenant également les dispositions sur le marchandage, il paraît opportun d'y faire référence ici.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 21, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 65, M. Jourdain propose de supprimer le second alinéa de l'article 10.
La parole est à M. Jourdain.
M. André Jourdain. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, autant le premier alinéa de l'article 10 me satisfait pleinement, autant le second, introduit par l'Assemblée nationale, me conduit à m'interroger. En effet, comment une collectivité publique pourra-t-elle s'assurer que le cocontractant a recours, pendant l'exécution du marché, au travail illégal ? J'ai peur des responsabilités encourues par les acteurs de cette collectivité.
Telle est la raison pour laquelle je demande la suppression du second alinéa de l'article 10.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. La commission, après un très long débat, a émis un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Quel que soit le prix que j'attache à l'avis du Sénat, j'émets un avis défavorable sur cet amendement.
Nous ne pouvons pas ne pas nous sentir tous mobilisés dans cette affaire, et je crois que les élus locaux que nous sommes sont obligés de participer d'une manière ou d'une autre.
Monsieur Jourdain, je comprends bien que votre intention est tout à fait louable et que vous ne voulez pas trop compliquer la vie de nos collectivités publiques, laquelle l'est déjà assez souvent, surtout en matière de marchés publics. A cet égard, le Gouvernement envisage certaines améliorations.
Toutefois, s'agissant du travail clandestin, pourquoi ne pas demander cette vérification aux entrepreneurs privés ? Très honnêtement, je maintiens qu'il faut engager tout le monde. Cela exige peut-être un effort un peu plus grand. Mais autant je pense, comme d'autres, que les marchés publics devraient faire l'objet de modifications en vue d'une simplification, autant, s'agissant d'un problème éthique comme celui-là, je maintiens ma position. Je souhaite donc que le Sénat n'adopte pas cet amendement.
M. Jean-Pierre Fourcade, président de la commission des affaires sociales. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Jean-Pierre Fourcade, président de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, mes chers collègues, je comprends la motivation de M. le ministre consistant à dire qu'une responsabilité collective doit exister pour essayer de prévenir le travail dissimulé ou illégal.
Cependant, l'auteur de la disposition adoptée par l'Assemblée nationale n'a aucune connaissance de la réalité pratique de nos collectivités territoriales. Imaginer qu'une clause dans les marchés passés par les régions, les départements et les communes permet de s'assurer que le cocontractant, quel qu'il soit - grand, petit ou moyen - n'a pas recours au travail illégal montre bien une méconnaissance absolue des mécanismes.
Par conséquent, après un grand débat ce matin, la commission a soutenu la position de M. Jourdain, considérant qu'il est inutile de faire figurer dans des textes législatifs des dispositions manifestement inapplicables.
Mais je vous fais une proposition, monsieur le ministre : compte tenu de la navette qui va avoir lieu, je ne verrais aucun inconvénient, afin de bien marquer la volonté commune du Parlement et du Gouvernement de lutter contre le travail dissimulé, à envisager une annulation des marchés passés par une collectivité locale - je pense notamment aux marchés de prestations de services, au nettoyage des locaux et de la voirie - si les corps de contrôle parvenaient à démontrer le recours par le cocontractant à de la main-d'oeuvre clandestine, à du travail dissimulé.
Cela donnerait à la collectivité territoriale un droit de dénonciation de ces marchés.
En revanche, vouloir confier une nouvelle responsabilité aux élus par la simple insertion d'une clause dans un marché public serait faire preuve d'une attitude parfaitement juridique, mais totalement irréaliste, car un tel dispositif serait inapplicable sur le terrain. Ce serait tirer avec un fusil à un seul coup, ce qui n'aurait aucune efficacité.
M. Jean Delaneau. C'est tirer en l'air !
M. Jean-Pierre Fourcade, président de la commission des affaires sociales. Je propose, quant à moi, que nous suivions M. Jourdain et que nous supprimions la disposition ajoutée par l'Assemblée nationale sur l'initiative de personnes pleines de bonnes intentions, mais bien peu au fait de la réalité des choses ! Il est vrai que tout cela s'apprend, et qu'il faut un certain temps pour savoir comment tout cela fonctionne ! (Rires.)
Je demande donc au Gouvernement de profiter de la navette pour nous proposer un système qui permettrait aux collectivités territoriales de mettre fin, avant le terme prévu, à un marché de prestation de services ou d'exécution de travaux, dans l'hypothèse où l'un quelconque des corps de contrôle que nous avons cités dans le texte démontrerait que le cocontractant de la collectivité intéressée a fraudé et a eu recours à du travail dissimulé. Ainsi, nous aurions une responsabilité solidaire des collectivités territoriales par rapport à l'ensemble du secteur économique, et le dispositif serait applicable.
Autrement dit, l'entreprise s'engageant auprès d'une collectivité à nettoyer des locaux ou à fournir toute prestation saurait que, indépendamment de la durée prévue du contrat et des clauses normales de dénonciation, le contrat pourrait être annulé en cas d'infraction à la législation interdisant le travail dissimulé.
Voilà la proposition que je fais, de manière à ne pas laisser dire que nous refusons d'impliquer les collectivités territoriales dans cette responsabilité. Mais on ne peut pas non plus imposer à l'ensemble des acteurs des collectivités territoriales l'inscription dans leurs contrats d'une clause qui ne servira à rien et qui aura un effet nul sur le plan pratique.
Telle est, monsieur le ministre, la proposition honnête que j'essaie de vous faire, au nom de la commission et, je le pense, de l'ensemble du Sénat.
MM. Jacques Machet et Georges Mouly. Très bien !
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Je maintiens, bien sûr, ma position, même si je sais que, lorsque la majorité du Sénat fait un choix, il est difficile pour le Gouvernement de gagner la partie.
Cela dit, je demande vraiment à M. Fourcade et à MM. les rapporteurs de se mettre en relation avec les membres de l'Assemblée nationale. Mes services sont d'ailleurs prêts eux aussi à participer à cette réflexion, et nous demanderons également le concours du ministère de l'économie. Je ne peux en tout cas accepter que les collectivités locales et les collectivités publiques - même si je reconnais que les modalités doivent alors être adaptées - soient dispensées d'un devoir que je considère, pour ma part, comme un devoir national.
Cher président Fourcade, il m'est arrivé moi-même de mettre en garde, dans mon propre département, tel ou tel entrepreneur qui avait eu la tentation de sous-traiter un marché dans des conditions douteuses en le menaçant de l'inscrire, s'il continuait, sur une liste noire. Je l'ai fait avant même le dépôt de ce texte, parce qu'il faut qu'à un moment donné - notamment en matière de marchés publics, où sont engagés des fonds publics - nous fassions savoir que nous sommes nous aussi, comme les entrepreneurs privés, astreints à faire respecter une certaine éthique, une éthique qui doit regagner toute sa place dans ce pays.
Voilà pourquoi je ne peux que prendre acte de la proposition de M. Fourcade : je crois que son intervention permettra de mieux faire comprendre la position sénatoriale, tout en laissant ouvert le choix d'un dispositif mieux adapté d'ici à la fin de la discussion de ce texte.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 65.
M. Jean-Jacques Hyest. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Hyest.
M. Jean-Jacques Hyest. Je ne comprends pas, intellectuellement, comment une clause permettrait de s'assurer de la situation. Il appartient aux services de police, de l'inspection du travail, etc., d'assurer le contrôle !
Le premier alinéa de l'article 10 permet d'exclure des marchés publics quelqu'un qui a déjà été condamné pour infraction. C'est tout à fait logique ! Mais aucune collectivité locale n'est en mesure, par une simple clause, de s'assurer, au cours de l'exécution d'un contrat, qu'il y a ou non travail clandestin ! Je ne suis d'ailleurs même pas certain que, dans d'éminentes institutions comme la nôtre, ceux qui lavent les carreaux soient à même de vérifier en permanence que l'entreprise qui les emploie est parfaitement régulière ! Ou alors il faudrait vérifier heure par heure, ce qui semble très difficile.
En revanche, s'il y a constatation d'infraction au cours du chantier, on doit pouvoir, comme le propose M. Fourcade, annuler le marché - c'est une sanction immédiate - ou bien, comme nous l'avons décidé tout à l'heure, retirer les aides publiques.
Dans des textes de ce genre, monsieur le ministre, il faut prévoir des solutions efficaces. Or il m'a semblé, parfois, que certaines dispositions n'avaient d'autre objet que de se faire plaisir ou se donner bonne conscience. Si elles n'ont aucune efficacité, nous devrons légiférer à nouveau dans six mois, dans un an. Ce n'est pas ce que nous souhaitons !
M. André Jourdain. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Jourdain.
M. André Jourdain. Monsieur le ministre, il n'était pas du tout dans mon intention de soustraire les collectivités publiques à la lutte contre le travail clandestin, bien au contraire ! Tel qu'il était rédigé, l'alinéa qui nous est proposé posait cependant un problème.
M. Fourcade, avec l'excellence que nous lui connaissons, a fait une proposition. Pour que la discussion puisse se poursuivre au cours de la navette, je souhaite donc que mon amendement soit voté. J'aurais aimé trouver une meilleure solution, mais je dois reconnaître que je n'ai pas eu, en cette saison de l'année, la possibilité d'y réfléchir davantage.
M. Marcel Debarge. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Debarge.
M. Marcel Debarge. Je reprendrai les propos de M. Fourcade et de M. le ministre.
Il est évident qu'il y a la théorie et la pratique ! Arrêter un contrat est possible, mais, si l'affaire est très engagée, cela soulève d'autres difficultés en aval. Nous avons en effet parlé de sociétés prestataires de services, mais je ne suis pas sûr que, pour certaines réalisations ou constructions, ce genre de problème ne se pose pas également. Arrêter un contrat dans de telles conditions me paraît difficile.
Il peut arriver, en revanche, que l'on suspende un contrat : lorsque, par exemple - je puis en témoigner, ayant été maire plusieurs années - les conditions de sécurité ne sont pas respectées sur un chantier, un arrêté municipal stoppe le chantier jusqu'à ce que toutes les garanties soient apportées.
Je ne veux pas non plus me faire le complice d'une quelconque malversation de la part d'une entreprise, qu'elle soit sous-traitante ou non, mais il est très difficile, pour un maire, d'arrêter brutalement un chantier ou de rompre un contrat avec une société prestataire de services chargée, par exemple, de la restauration scolaire. La suspension ou l'avertissement, la mise en demeure me paraissent suffisants.
Par ailleurs, les organismes de contrôle ont parfois de grandes difficultés à découvrir les délits en la matière.
Pour ces différentes raisons, je suis donc favorable à une réflexion approfondie en ce domaine.
Que les collectivités locales aient leur mot à dire et qu'un effort doive être accompli pour lutter contre le travail illégal, j'en suis tout à fait d'accord, mais il faut leur laisser une certaine souplesse - ce qui ne signifie pas un manque de fermeté - pour parvenir, si l'entreprise persiste, à la sanction qui s'impose et qui peut aller jusqu'à la rupture du contrat avec le prestataire de services ou la cessation de la construction.
Un délai de réflexion me semble utile. Je vois en tout cas dans notre échange la preuve d'un certain pragmatisme, monsieur Fourcade, de la part de celui qui a géré un peu les affaires des collectivités locales ! (M. Fourcade sourit.)
M. Jean Delaneau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Delaneau.
M. Jean Delaneau. Si un contrat est rompu en matière de prestations de services, les collectivités territoriales - et je rejoins là les propos tenus à l'instant par M. Debarge - trouvent en général d'autres sociétés pour le reprendre !
M. Marcel Debarge. C'est la règle du marché !
M. Jean Delaneau. Quand une construction est en cours, c'est plus difficile.
Cela étant, nous payons fort cher des coordinateurs de chantier, qui ont pour mission de veiller au respect des règles de sécurité et qui sont donc investis d'un certain pouvoir de contrôle. Pourquoi - c'est une suggestion que je fais pour la suite du débat - ne seraient-ils pas investis, complémentairement et pour le même prix, j'espère, de la surveillance de la régularité des gens qui travaillent sur le chantier ?
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 65, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Maintenant que le vote a eu lieu, je ne peux que saluer la qualité du débat. Ce que nous voulons - M. Hyest, M. Fourcade, M. Debarge et tous les orateurs qui se sont exprimés l'ont dit - c'est que ce débat soit utile. Or nous en avons eu une démonstration évidente avec la discussion qui vient d'avoir lieu.
Nous sentons bien qu'il y a un objectif à atteindre, et je reconnais que le texte issu de l'Assemblée nationale péchait par maladresse et probablement par méconnaissance des données exactes de la situation.
Quoi qu'il en soit, je souhaite vivement l'introduction d'une clause permettant de viser ces situations.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 10, modifié.

(L'article 10 est adopté.)

Article additionnel après l'article 10

M. le président. Par amendement n° 67, M. Jourdain propose d'insérer, après l'article 10, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article L. 121-17 du code des assurances, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. L... - ... Sauf en cas de perte du bien assuré, l'indemnité n'est due par l'assureur que sur présentation par l'assuré des justificatifs des frais exposés pour la remise en état du bien. »
La parole est à M. Jourdain.
M. André Jourdain. Nous avons adopté, lors de l'examen de la loi de finances pour 1997, une disposition ouvrant droit à des réductions d'impôt pour les travaux effectués dans la résidence principale, à condition de pouvoir présenter des factures. Il s'agissait pour nous de relancer les activités du bâtiment, mais aussi de réduire le travail clandestin.
Or il se trouve que, dans bien des cas, les compagnies d'assurance règlent sur devis les dégâts occasionnés par un sinistre alors que les travaux ou bien ne sont pas faits ou bien peuvent l'être par des entreprises qui, éventuellement, utiliseraient des travailleurs dissimulés.
C'est donc dans un esprit d'harmonisation que je vous propose cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. M. Jourdain, je l'espère, ne m'en voudra pas si, sur ce dernier amendement - mais il le sait - la commission a donné un avis défavorable.
Cet amendement pourrait être qualifié d'amendement « anti-bricoleurs ». En effet, outre qu'il est contraire au principe du caractère indemnitaire de l'assurance dommages, il obligerait à passer par un professionnel agréé, celui qui réparerait lui-même son bien n'étant pas indemnisé ou l'étant très peu. Je me demande s'il n'y aurait pas là une atteinte aux libertés individuelles !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Monsieur Jourdain, vous ne vous étonnerez pas que le Gouvernement ait la même position que la commission.
J'ajoute que mon collègue chargé des finances, qui gère notamment les assurances, ne me pardonnerait pas d'avoir en la matière - fût-ce pour vous être agréable, monsieur Jourdain, et c'est important pour moi - la moindre indulgence.
Je suis donc obligé de dire que je suis opposé à cet amendement.
M. le président. Monsieur Jourdain, l'amendement est-il maintenu ?
M. André Jourdain. Devant cette réprobation unanime, je le retire.
M. le président. Vos amendements ne peuvent pas tous être acceptés, monsieur Jourdain ! (Sourires.)
L'amendement n° 67 est retiré.

Article 11

M. le président. « Art. 11. - Le Gouvernement dépose au Parlement, chaque année, au mois de janvier, un rapport qui retrace l'action des pouvoirs publics et des organisations professionnelles et les résultats obtenus dans la lutte contre le travail dissimulé. » - (Adopté.)

Vote sur l'ensemble

M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Madelain pour explication de vote.
M. Jean Madelain. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, chacun des intervenants dans la discussion générale a souligné la nocivité du travail clandestin et la nécessité d'intensifier la lutte à son encontre. Le projet de loi du Gouvernement s'inscrit bien dans cette orientation.
Grâce au travail de la commission des affaires sociales, de la commission des lois et de leurs éminents rapporteurs respectifs, le texte se trouve amélioré, précisé et, nous l'espérons, rendu plus efficace.
Il convient de se féliciter après vous, monsieur le ministre, que ce texte n'ait pas fait l'objet de la procédure d'urgence car, nous l'avons vu lors de l'examen de l'article 10, la navette permettra certainement encore de nouvelles améliorations.
Quoi qu'il en soit, en l'état actuel du texte, le groupe de l'Union centriste le votera à l'unanimité. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Ostermann.
M. Joseph Ostermann. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'ai personnellement été conduit à retirer un certain nombre d'amendements. L'un d'entre eux a suscité une discussion quelque peu passionnée, mais il n'est jamais mauvais que les positions des uns et des autres s'affirment. C'est en effet par la discussion et les échanges que l'on construit de bons textes de loi.
Ainsi, le projet de loi que nous venons d'examiner permettra incontestablement de combattre plus efficacement le travail illégal ou dissimulé.
Il vient s'inscrire dans le cadre de la lutte pour l'emploi et contre l'évasion des recettes fiscales et sociales, qui aggrave notre déficit public.
Je tiens à féliciter nos deux rapporteurs, MM. Louis Souvet et Paul Masson, du travail remarquable qu'ils ont effectué et qui a permis à la Haute Assemblée d'examiner ce texte dans les meilleures conditions et de l'améliorer.
Je remercie également le Gouvernement, en la personne de Mme Anne-Marie Couderc et de M. Jacques Barrot, pour la qualité d'écoute dont il a été fait preuve pendant l'examen de ce projet de loi.
Ainsi, la définition du délit de travail illégal est désormais clarifiée, dissociant définitivement les questions relevant du droit du travail de celles qui sont liées à l'immigration.
En outre, je pense qu'il était important que le Sénat réintroduise dans cette définition le caractère intentionnel du délit de travail dissimulé afin de ne pas modifier la charge de la preuve, ce qui aurait pu être source de difficultés lors de l'application de la loi.
Par ailleurs, les pouvoirs des différents agents de contrôle sont harmonisés, mieux coordonnés et renforcés.
Ainsi que l'a souligné notre rapporteur, M. Louis Souvet, il est mis fin à l'impuissance de certaines catégories d'agents de contrôle : lorsqu'ils découvriront des indices de travail dissimulé à l'occasion de leur mission principale, ils pourront constater et, désormais, rechercher les infractions.
Toutefois, je me réjouis que, sur l'initiative de notre rapporteur, M. Louis Souvet, le Sénat ait modifié la rédaction du texte concernant l'audition des salariés par les agents des organismes de sécurité sociale et des impôts ; ainsi, il est prévu qu'ils peuvent les entendre plutôt que les interroger, ce dernier terme ayant une connotation un peu trop vigoureuse.
Ce texte renforce également la prévention et les sanctions du travail dissimulé. Il est tout particulièrement intéressant, à mes yeux, qu'il ouvre la possibilité à l'administration de refuser pendant cinq ans l'accès aux aides à l'emploi ou à la formation à ceux qui auraient fait l'objet d'un procès-verbal constatant une infraction à la législation du travail dissimulé.
Pour conclure, le projet de loi ainsi modifié, contrairement à ce qu'affirme un quotidien du soir, constitue un progrès dans la lutte contre le travail dissimulé. C'est pourquoi le groupe du Rassemblement pour la République le votera. (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. La discussion du projet aura confirmé ce que je déclarais lors de la discussion générale : il s'agit d'un texte en trompe-l'oeil, qui ne permettra pas de s'attaquer réellement aux donneurs d'ordre, aux « gros bonnets », comme l'on dit populairement, aux intérêts économiques et à la partie du patronat qui couvrent ces pratiques.
Je ne nie pas que certains articles apportent quelques améliorations ; nous les avons d'ailleurs approuvés. Néanmoins, le texte, déjà très timide, voté par l'Assemblée nationale est encore amoindri dans ses effets après son passage devant le Sénat.
Comme le note Le Monde d'aujourd'hui, « la droite sénatoriale semble s'être fixé pour premier objectif de supprimer les quelques audaces introduites par les députés et jugées trop contraignantes pour les entreprises ».
Ainsi, vous supprimez l'amende administrative en cas de non-respect de l'obligation de déclaration préalable à l'embauche.
Vous supprimez la disposition renversant la charge de la preuve, qui obligeait l'entreprise à prouver sa bonne foi en cas de recours au travail clandestin par l'un de ses sous-traitants.
Vous supprimez la possibilité offerte à l'administration de suspendre le versement des aides à l'emploi en cas de verbalisation pour travail clandestin.
De même, vous avez refusé la plupart des propositions faites par mon groupe ou par nos collègues socialistes pour mener une lutte efficace contre le travail illégal.
Je pense, notamment, à notre proposition d'élargir aux documents comptables les documents mis à la disposition des agents luttant contre le travail illégal, proposition que vous avez rejetée en arguant de son caractère inquisitorial.
En fait, vous refusez de mettre en cause les entreprises qui sont les vrais profiteurs du système. On ne peut, en conséquence, que s'interroger, pour le moins, sur la réalité de la détermination du Gouvernement à remonter jusqu'aux véritables responsables, jusqu'aux donneurs d'ordre. D'ailleurs, n'est-ce pas le onzième texte sur le sujet que vous allez voter et qui risque de rester sans effet ? Cette attitude prouve que nous sommes bien en présence d'un texte alibi.
Si l'efficacité de la lutte contre le travail illégal est insuffisante, c'est d'abord, pensons-nous, par manque de moyens humains. Or, alors que le projet de loi instaure de nouvelles missions, il ne prévoit aucun renforcement sensible des effectifs de l'inspection du travail, dont les agents ont pourtant vocation à être les principaux acteurs de la lutte contre le travail illégal. La loi de finances pour 1997 a même restreint les moyens du ministère.
Dans ces conditions, les nouvelles mesures proposées risquent bien de se limiter, une fois encore, à un pur effet d'annonce.
Il ne s'agit nullement de faire de la lutte contre le travail illégal une « priorité nationale », comme l'affirme le Gouvernement ; il s'agit, selon nous, de caresser un certain électorat dans le sens du poil en utilisant l'équation : travail clandestin égale immigration clandestine, égale travailleurs en situation irrégulière.
C'est tellement vrai que, si le Gouvernement affirme vouloir rejeter cet amalgame, il présente, par ailleurs,l'actuel projet comme étant inséparable du projet de loi sur l'immigration.
Comment le Gouvernement pourrait-il être qualifié quand il encourage, de fait, le travail illégal par une politique sociale et économique de réduction du coût du travail, par un système d'exonération des charges et de réduction des cotisations sociales, par une flexibilité accrue, ou encore par l'annualisation du temps de travail ?
Pour toutes ces raisons, le groupe communiste républicain et citoyen ne peut dédouaner le Gouvernement et sa majorité de leurs responsabilités actuelles en la matière, en votant un texte qui, de toute façon, ne permettra pas de lutter réellement contre le travail clandestin. C'est pourquoi il votera contre.
M. le président. La parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Nous voici donc au terme de ce débat sur un projet que nous, socialistes, jugions très important, tant les problèmes qu'il entendait régler prennent aujourd'hui de l'ampleur.
Nous étions donc décidés à travailler, avec le Gouvernement et avec sa majorité, à l'amélioration d'un texte qui, dans sa forme initiale, nous semblait bien pauvre compte tenu de l'importance des problèmes économiques et sociaux, des effets sur les comptes de la nation et des drames humains que peut susciter le travail clandestin, le travail dissimulé, le travail frauduleux, pour reprendre la terminologie de M. le président Fourcade.
Or, le texte que le Sénat va voter ce soir est bien en retrait de celui qu'a voté l'Assemblée nationale. Le Sénat revient notamment sur les améliorations que l'Assemblée nationale avait retenues sur la suggestion des députés socialistes.
Le projet de loi comportait deux volets importants. Nous voulions faire en sorte que chacun d'eux soit traité de façon efficace.
Le premier consistait à traquer le travail clandestin, à le combattre et à se donner les moyens de ce combat.
Le second visait à préserver l'intérêt des travailleurs victimes du travail clandestin.
Que constatons-nous ? Qu'il n'y a pas de véritable volonté politique de lutter contre le travail clandestin.
Nous avons proposé que les agents de contrôle aient accès aux documents comptables. Compte tenu des formes complexes que peut prendre aujourd'hui le travail clandestin, cela nous paraissait essentiel pour remonter les filières des donneurs d'ordre, qui sont, bien souvent, les principaux responsables et bénéficiaires du travail clandestin. Le Sénat ne nous a pas suivis sur ce point.
Par ailleurs, aucun moyen supplémentaire n'est prévu. Vous nous avez dit, monsieur le ministre, que, dans le projet de budget pour 1997, un transfert de crédits avait été opéré de votre budget sur celui des transports. Ainsi, votre ministère se trouve privé de sommes importantes - tous les rapports en témoignent et vous ne l'avez pas démenti - ce qui se traduit par la suppression de soixante-douze postes de fonctionnaires.
Je relève aussi, comme M. Fischer, qu'il y a eu inversion de la charge de la preuve ; celle-ci incombe maintenant aux agents de contrôle. Ainsi, tout ce qui relève de l'intentionnel disparaît. Voilà qui ne témoigne guère d'une véritable volonté de rechercher les donneurs d'ordre !
Pour ce qui est de la préservation des intérêts des travailleurs et des salariés victimes du travail clandestin, nous n'enregistrons aucun progrès. Bien au contraire, nous décelons plutôt une régression.
Nous assistons à une remise en cause insidieuse du rôle des inspecteurs du travail et des contrôleurs du travail au sein de l'entreprise : ils avaient en quelque sorte le leadership , au sein de l'entreprise, en matière de préservation de l'intérêt des salariés parce qu'ils avaient le choix d'informer ou non les autres administrations de leurs constatations ; maintenant, ils devront transmettre l'ensemble des constatations qu'ils auront faites. Ils n'ont plus de libre arbitre.
Nous avions demandé, considérant que c'était important, que des attestations soient fournies aux salariés victimes du travail clandestin pour qu'ils puissent bénéficier d'une protection sociale, ce qui supposait, bien sûr, une prise en charge par la collectivité nationale.
En effet, ces salariés, n'étant pas reconnus, n'ayant pas de statut, n'étant pas déclarés, n'ont aucune protection sociale et ne touchent aucune indemnité des ASSEDIC. Au prétexte que personne n'a cotisé pour eux, on va leur refuser le bénéfice de ces prestations !
Certes, ils auront six mois d'indemnités ; mais ce n'est pas suffisant quand on sait que les ASSEDIC indemnisent pendant plus d'un an en cas de perte de travail. Il y a donc discrimination par rapport aux autres salariés.
M. le président. Vous avez épuisé votre temps de parole, madame Dieulangard. Je vous prie de conclure.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. J'en termine, monsieur le président, en informant le Sénat que le groupe socialiste votera contre ce texte, qui lui semble bien trop modeste au regard de l'ampleur des problèmes qu'il prétend vouloir traiter. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Delaneau.
M. Jean Delaneau. Monsieur le ministre, nonobstant les arguments que viennent d'avancer M. Fischer et Mme Dieulangard, le groupe des Républicains et Indépendants votera votre projet, modifié par l'Assemblée nationale et amélioré encore, sur l'initiative, notamment, de nos deux commissions, par nos votes.
Je tiens, à cette occasion, à souligner l'excellent travail des commissions des affaires sociales et des lois. Grâce à nos rapporteurs, quelques dispositions parfois inefficaces, voire dangereuses, auront été gommées du texte. Le travail ainsi réalisé témoigne du rôle important du Sénat dans l'examen des projets.
On a dit tout à l'heure que le texte était amoindri, que c'était un trompe-l'oeil. Non !
Vous l'avez bien vu, monsieur le ministre, lorsque nous avons abordé le problème de la responsabilité des collectivités territoriales, tout le monde s'est engagé à participer à cette lutte contre le travail clandestin.
Bien sûr, un texte n'est jamais parfait, il peut toujours aller plus loin. Mais, comme on le dit, jusqu'où faut-il aller trop loin pour rester efficace ? C'était aussi un élément de notre débat.
Des progrès sont faits, certes, mais ils ne seront rien sans la volonté de tous de lutter de façon opiniâtre et sans relâche contre le travail clandestin.
Il faut cependant veiller à ce que, en menant cette lutte, on n'aille pas jusqu'à tuer certaines entreprises où travaillent aussi des salariés en situation régulière. Il faut donc faire en sorte qu'il ne leur en coûte pas trop. Il faut dissuader, mais non pas aller jusqu'à détruire des entreprises, même si, parmi elles, il y a des coupables.
Les mesures qui seront prises seront suffisamment dissuasives pour permettre de progresser encore dans cette lutte de chaque instant, et de tous, de façon à défendre l'emploi, car c'est, au bout du compte, notre seul objectif. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants et du RPR.)
M. le président. La parole est à M. Habert.
M. Jacques Habert. Je tiens tout d'abord à remercier le Gouvernement d'avoir présenté ce projet de loi relatif au renforcement de la lutte contre le travail illégal. Ce texte est fort important, tous les orateurs l'ont souligné.
Je ne crois pas un seul instant qu'il soit un trompe-l'oeil, comme l'a dit de façon très exagérée M. Fischer.
Je ne partage pas non plus toutes les critiques de Mme Dieulangard.
La navette qui va s'instaurer entre les deux assemblées devra pourtant permettre d'étudier de plus près les dispositions que nous avons votées, en particulier pour remonter les filières des responsables qui envoient des travailleurs illégaux en France. Sur ce point, peut-être, le texte ne répond pas à toutes les attentes.
Je remercie, par ailleurs, nos deux commissions et leur rapporteur. Je veux m'excuser auprès d'eux d'avoir été, pour la première fois de ma longue carrière parlementaire, contre deux commissions à la fois, position tout à fait surhumaine, qui ne pouvait qu'aboutir au résultat que nous avons constaté.
L'Assemblée nationale avait voté une disposition qui - je le répète - me paraissait intéressante. Peut-être, là encore, la navette donnera-t-elle l'occasion de revoir cette question, en particulier le libellé de l'article 131-26 du code pénal, car vos arguments juridiques, messieurs Souvet et Masson, sont tout à fait fondés ; en même temps, il y a là des éléments humains qui pourraient nous amener à une réflexion nouvelle.
En tout cas, nos travaux ont été fructueux. Les non-inscrits voteront, bien entendu, ce texte tel qu'il ressort des travaux du Sénat. (Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. Louis Souvet, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet, rapporteur. Je serai bref.
Un journal du soir nous a reproché d'avoir assoupli certaines dispositions du projet de loi. Je m'interroge : est-ce notre rôle d'élaborer des lois qui ne sont pas applicables ? Nous avons bien vu que, dans le texte qui nous venait de l'Assemblée nationale, certains points n'étaient pas applicables. Il ne s'agit pas de courtiser un certain électorat, puisque 10 % seulement des travailleurs en défaut sont étrangers. Il ne s'agit donc évidemment pas de cela, contrairement à ce qui a été prétendu.
Le Sénat a mis en place des règles strictes. Il a rendu plus sévères, dans certains cas, celles qui existaient ; il a supprimé celles qui ne lui paraissaient pas pouvoir être mises en oeuvre. C'est pour cela que le Sénat peut être fier du travail qu'il a effectué.
Je cite de mémoire quelques points.
Il a ajouté, par exemple, les pouvoirs de contrôle dans les pépinières d'entreprises, dans les entreprises domiciliataires ; le projet de loi ne le prévoyait pas. En outre, cette disposition est plus sévère que celle qui existait.
Il a rétabli l'interdiction des droits de famille - ce point a été longuement débattu.
Il a ajouté le délit de marchandage, notamment pour la passation des marchés publics. Cette disposition, qui n'était pas prévue initialement, est plus sévère que celle qui existait.
Il a renforcé la coordination des corps de contrôle. Cette mesure, qui n'était pas initialement prévue n'est pas inutile.
Il a ajouté des corps de contrôle à ceux qui existaient.
On peut donc affirmer que, sur certains points, le Sénat a accompli un travail très important et a aggravé les dispositions présentées.
Je ne pense pas, par ailleurs, que ce texte soit en retrait par rapport à celui qui a été adopté par l'Assemblée nationale, même si nous avons retiré des dispositions qui ne collaient pas avec la réalité de la vie tout court ou de celle des entreprises.
Notre rôle, monsieur le ministre, nous l'avons bien compris, est de lutter à vos côtés afin de faire diminuer autant que possible ce fléau qu'est le travail au noir - j'emploie cette expression afin de recouvrir l'ensemble des dispositions contraires au travail au grand jour. Vous nous trouverez toujours à vos côtés à cette fin. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)

9

COMMUNICATION DE L'ADOPTION DÉFINITIVE

D'UNE PROPOSITION D'ACTE COMMUNAUTAIRE
M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre une communication, en date du 14 janvier 1997, l'informant que : la proposition d'acte communautaire E 737 - « proposition de directive du Conseil modifiant la directive 92/12/CEE relative au régime général, à la détention, à la circulaire et aux contrôles des produits soumis à accises » a été adoptée définitivement par les instances communautaires par décision du Conseil du 30 décembre 1996.

10

TRANSMISSION
D'UNE PROPOSITION DE LOI

M. le président. J'ai reçu de M. le président de l'Assemblée nationale une proposition de loi, adoptée avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, créant les plans d'épargne retraite.
La proposition de loi sera imprimée sous le numéro 179, distribuée et renvoyée à la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.

11

DÉPOT DE RAPPORTS

M. le président. J'ai reçu de M. Luc Dejoie un rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, modifiant les articles 54, 62 et 66-5 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques (n° 163, 1996-1997).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 176 et distribué.
J'ai reçu de M. François Gerbaud un rapport fait au nom de la commission des affaires économiques et du Plan sur le projet de loi portant création de l'établissement public « Réseau ferré national » (n° 35, 1996-1997).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 177 et distribué.

12

DÉPOT D'UN AVIS

M. le président. J'ai reçu de M. Hubert Haenel un avis présenté au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation sur le projet de loi portant création de l'établissement public « Réseau ferré national » (n° 35, 1996-1997).
L'avis sera imprimé sous le numéro 178 et distribué.

13

ORDRE DU JOUR

M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au jeudi 16 janvier 1997 à quinze heures :
1. - Discussion du projet de loi (n° 137, 1996-1997), adopté par l'Assemblée nationale autorisant la ratification de l'accord de partenariat et de coopération entre les communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et la République de Moldova, d'autre part.
Rapport (n° 158, 1996-1997) au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
2. - Discussion du projet de loi (n° 138, 1996-1997), adopté par l'Assemblée nationale autorisant la ratification de l'accord de partenariat et de coopération entre les communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et la République kerghize, d'autre part.
Rapport (n° 158, 1996-1997) au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
3. - Discussion du projet de loi (n° 139, 1996-1997), adopté par l'Assemblée nationale autorisant la ratification de l'accord de partenariat et de coopération entre les communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et la république du Kazakhstan, d'autre part (ensemble trois annexes, un protocole et un acte final.)
Rapport (n° 158, 1996-1997), au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
4. - Discussion du projet de loi (n° 140, 1996-1997), adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification de l'accord de partenariat et de coopération entre les communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et la Fédération de Russie, d'autre part.
Rapport (n° 158, 1996-1997), au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
5. - Discussion du projet de loi (n° 141, 1996-1997), adopté par l'Assemblée nationale autorisant la ratification de l'accord de partenariat et de coopération entre les communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et l'Ukraine, d'autre part.
Rapport (n° 158, 1996-1997), au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
La conférence des présidents a décidé qu'il sera procédé à une discussion générale commune de ces cinq projet de loi.
6. - Discussion de la proposition de loi (n° 11, 1996-1997), adoptée par l'Assemblée nationale, relative à l'examen des pourvois devant la Cour de cassation.
Rapport (n° 160, 1996-1997) de M. Charles Jolibois, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Aucun amendement n'est plus recevable.

Délais limites

Projet de loi portant création de l'établissement public « Réseau ferré national » (n° 35, 1996-1997).
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 20 janvier 1997, à dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 20 janvier 1997, à dix-sept heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures cinq minutes.)

Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON





ÉLECTION D'UN VICE-PRÉSIDENT DU SÉNAT

Gérard Larcher vice-président, en remplacement de M. Yves Guéna, nommé membre du Conseil constitutionnel.

DÉLÉGATIONS PARLEMENTAIRES
DÉLÉGATION DU SÉNAT POUR L'UNION EUROPÉENNE

(En application de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires).
Yann Gaillard membre de la délégation du Sénat pour l'Union européenne, en remplacement de M. Yves Guéna, nommé membre du Conseil constitutionnel.



Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)


Réalisation de la deuxième tranche de la déviation
de la ville de Salon-de-Provence

535. - 15 janvier 1997. - M. André Vallet attire l'attention de M. le ministre de l'équipement, du logement, des transports et du tourisme sur la situation de la ville de Salon-de-Provence au regard des grands axes de circulation. Il lui rappelle que depuis près de trente ans, la première tranche de la déviation Nord-Sud de la ville de Salon-de-Provence a été achevée. Depuis cette date, il lui indique que la ville attend la réalisation de la deuxième tranche qui permettrait de désengorger les quartiers les plus peuplés de Salon par lesquels transite ce trafic. Il lui indique que la construction de cette deuxième tranche de la déviation de la ville constitue la priorité absolue de la ville qui est étouffée par cette circulation de transit. Dès lors, il lui demande si la réalisation de ce projet doit être, dans les prochains mois, prise en compte par le ministère de l'équipement.