M. le président. Mme Michelle Demessine attire l'attention de Mme le ministre délégué pour l'emploi sur la suppression des subventions aux associations féminines. Les conséquences d'une telle décision mettant gravement en cause l'avenir de celles-ci, elle demande ce que compte faire le Gouvernement pour garantir leur survie. (N° 563.)
La parole est à Mme Demessine.
Mme Michelle Demessine. Comme chaque année, dans quelques jours, le 8 mars exactement, se déroulera la Journée internationale des femmes.
La question de la place des femmes dans la vie publique, au sens large, commence à être appréhendée, en France, comme un sujet politique à part entière.
Le Gouvernement a annoncé la tenue, à l'occasion de la Journée internationale des femmes, d'un débat consécutif au dépôt du rapport sur la parité à l'Assemblée nationale.
Aujourd'hui, plus aucun parti politique ne peut éluder cette question ou, comme c'était souvent jadis le cas, la tourner en boutade.
A Pékin, lors de la quatrième Conférence mondiale des femmes, à laquelle assistaient 600 Françaises, représentant plus de 100 associations, les 181 Etats participants ont convenu qu'il n'y aurait pas de développement durable sur la planète sans émancipation des femmes.
La prise en compte de ce fait majeur de société ne doit pas se limiter au discours. Or il se trouve que certains actes viennent contredire ce discours.
Pour la préparation de la Conférence mondiale, le Gouvernement s'était fortement appuyé sur les associations féminines, ne tarissant pas d'éloges, à l'époque, sur leur rôle et leur efficacité. Hélas, aujourd'hui, le dispositif gouvernemental censé soutenir et aider le mouvement associatif dans ses actions sur le terrain connaît un inquiétant processus d'affaiblissement : une délégation aux droits des femmes qui s'effiloche et dont on ne perçoit plus très bien les objectifs, une ligne budgétaire en diminution pour 1997. Aujourd'hui, c'est la pérennité des associations féminines qui se trouve mise en cause par la diminution, voire la suppression de leurs subventions.
En particulier, l'association contre les violences faites aux femmes au travail, malgré ses multiples démarches, voit diminuer d'un tiers sa subvention, ce qui pourrait la contraindre à supprimer un poste et demi à l'accueil des femmes victimes de violences au travail.
Pourtant, les atteintes aux droits de la personne que les mouvements des femmes ont réussi à révéler au grand jour ne sont pas, malheureusement, en diminution.
Au demeurant, une terrifiante actualité nous montre que les violences sexuelles sont loin d'avoir disparu. Le moment n'est donc pas venu de réduire la pression pour les faire reculer.
Autre association à implantation nationale, l'Union des femmes françaises, s'est déjà vu privée en 1996 de la subvention de 300 000 francs qui lui était allouée auparavant. Aucune réponse ne lui a été apportée pour 1997.
La présidente de l'Union féminine civique et sociale a souligné ce problème lors de son audition par la mission d'information du Sénat sur la place des femmes dans la vie publique.
Il y a bien là, monsieur le secrétaire d'Etat, une situation qui contredit les objectifs affichés par le Gouvernement.
Cette rigueur devrait, paraît-il, être mise en relation avec la perspective du prochain gel budgétaire affectant le service des droits des femmes lui-même. Comment peut-on geler les crédits d'un budget « peau de chagrin » sans le faire imploser ?
Enfin, les demandes de subvention seraient examinées à partir de critères de rentabilité. Mais on se demande qui peut arrêter de tels critères quand on sait que la discrimination envers les femmes a des racines millénaires.
En conclusion, monsieur le secrétaire d'Etat, je vous demande d'entendre la protestation qui monte devant cette situation. Nombre de militantes bénévoles de ces associations acceptent mal ce qu'elles interprètent comme un manque de considération et de reconnaissance. Je souhaite donc que les demandes de subvention pour 1997 soient réexaminées. Il serait en outre heureux qu'une représentante de chacune des associations concernées soit reçue par le service des droits des femmes afin qu'elle puisse rendre compte de l'action menée et évoquer les difficultés rencontrées.
M. Gérard Delfau. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Hervé Gaymard, secrétaire d'Etat à la santé et à la sécurité sociale. Madame le sénateur, je vous prie tout d'abord d'excuser l'absence d'Anne-Marie Couderc, ministre délégué pour l'emploi, qui m'a chargé de vous transmettre sa réponse.
Contrairement à ce que vous avez indiqué, il n'est absolument pas question de remettre en cause la pérennité des associations de femmes ni de supprimer les subventions qui leur sont allouées. Chacun est conscient du travail extraordinaire qu'accomplissent ces associations, et il ne doit y avoir aucune ambiguïté à ce sujet.
Cela étant, chaque année, comme dans le budget d'un ménage, d'une commune, d'un département ou d'une région, des choix doivent être opérés dans le budget de l'Etat, et cela touche aussi les subventions versées aux associations. Mme Couderc, après avoir procédé à une large concertation, est en train d'effectuer ces arbitrages.
Je puis vous indiquer que chaque association qui, à ce jour, a fait une demande de subvention au service des droits des femmes recevra, dans les prochains jours, un courrier lui précisant le montant accordé et les raisons des choix qui ont été faits.
Deux critères ont été pris en compte : la nécessaire maîtrise des dépenses publiques et, surtout, les objectifs visés par les associations au regard des priorités du Gouvernement, à savoir l'emploi et la formation, l'égalité professionnelle et la promotion sociale des femmes.
Je vous précise en outre que, pour 1997, le budget affecté aux financements des projets associatifs permettra au Gouvernement d'assumer ses responsabilités vis-à-vis des associations féminines.
Il n'en demeure pas moins que nous devons nous efforcer d'améliorer l'efficacité de ces associations en accompagnant leur recherche d'un plus grand professionnalisme dans leurs interventions, lesquelles sont particulièrement indispensables à la cohésion sociale de notre pays.
Tels sont, madame le sénateur, les éléments de réponse que m'a chargé de vous transmettre Mme Couderc.
Mme Michelle Demessine. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme Demessine.
Mme Michelle Demessine. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'Etat, de m'avoir fait part de la réponse de Mme Couderc.
Je tiens à insister sur la faiblesse des crédits réservés au service des droits des femmes. Au demeurant, ils ont toujours été insuffisants. Dès lors, ce ne sont jamais que de très maigres économies qui pourront être réalisées si l'on décide de les rogner encore. En revanche, ces économies mettront en péril des actions montées avec beaucoup de difficultés, car la plupart des associations féminines ont des budgets extrêmement serrés.
S'agissant des critères d'attribution que vous avez cités, monsieur le secrétaire d'Etat, je note qu'ils correspondent généralement au travail de ces associations. Toutefois, selon moi, il ne serait pas judicieux de se montrer trop contraignant à cet égard. Il faut faire confiance aux femmes et à leurs associations, leur permettre de mener des actions qui ne sont pas nécessairement prévues par le Gouvernement mais qui pourraient certainement ouvrir de nouvelles voies d'émancipation.

Financement des lits de section de cure médicale
autorisés mais non financés