M. le président. La parole est à Mme Dusseau.
Mme Joëlle Dusseau. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le ministre de la défense.
En octobre dernier, le chef d'état-major de l'armée de l'air a publiquement dénoncé l'attitude inacceptable d'officiers chargés de l'instruction des engagés militaires techniciens de l'air, qui sont, cette année, au nombre de 1 400, parmi lesquels de nombreux jeunes issus de milieux défavorisés, souvent d'origine immigrée.
Leur arrivée a déclenché des mouvements d'officiers et de sous-officiers, qui les ont traités de « voyous » ou de « bons à rien ». Le sigle MTA, qui signifie « militaire technicien de l'air », a été traduit dans les bases aériennes par « Marocain, Tunisien, Algérien ».
Ces propos racistes, scandaleux en tant que tels, sont inadmissibles dans une armée qui prétend jouer un rôle intégrateur et qui est au service de la République.
Un second exemple vient de défrayer la chronique, qui a été porté à la connaissance du public par un journal satirique paraissant le mercredi.
Il concerne les brutalités commises par les officiers de Saint-Cyr sur des élèves au cours de l'instruction militaire : cinq heures de creusement de trous de combat, de vingt heures à une heure du matin, pour toute une section parce qu'un élève-officier avait des rangers sales ; refus des permissions à temps de convalescence ; jeunes invités à se gifler mutuellement quand ils ont tendance à s'endormir pendant les cours - effectivement, cela réveille ! - insultes diverses, coups de lattes pour rectifier une position entraînant des fêlures de côtes. Aucune plainte, bien sûr, n'a été déposée.
De tels faits, monsieur le ministre, ne sont pas des exceptions. On sait qu'ils se déroulent dans de nombreuses casernes. Quelles décisions pensez-vous prendre pour empêcher de telles pratiques et, plus largement, pour que l'armée de la République cesse d'être ce qu'elle est trop souvent : une zone de non-droit ? (Applaudissements sur les travées socialistes. - Protestations sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Alain Richard, ministre de la défense. Je vous remercie, madame le sénateur, de soulever ce point d'actualité, même si je suis en désaccord avec certaines de vos affirmations, notamment lorsqu'elles tendent, de façon d'ailleurs incertaine, à la généralisation. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et indépendants et de l'Union centriste.)
M. Pierre Lefebvre. La droite applaudit !
M. Alain Richard, ministre de la défense. En ce qui concerne l'emploi de termes portant atteinte à la dignité humaine lors du recrutement de jeunes militaires techniciens de l'air, c'est le chef d'état-major lui-même, informé par les chefs d'unité responsables, qui a porté à la connaissance du public, avec mon plein accord, les comportements discutables, et ceux-ci ont été sanctionnés.
M. José Balarello. Très bien !
M. Alain Richard, ministre de la défense. En ce qui concerne les faits touchant à la dignité humaine dans deux sections d'instruction de l'école militaire de Coëtquidan, c'est également par la voie normale que le ministère a été informé et c'est avec mon accord que le chef d'état-major de l'armée de terre a prononcé sans délai les sanctions qui se justifiaient.
Il est en effet du rôle du Parlement de la République de s'informer et de porter à la connaissance du public d'éventuels manquements aux règles démocratiques ou au respect de la dignité humaine dans nos armées.
Il est, en revanche, important que chacun, ici, ait bien conscience qu'il s'agit, madame, de cas isolés, de cas exceptionnels, et que l'ensemble des responsables de nos unités, derrière leur état-major, respectent scrupuleusement la déontologie et croient sincèrement que leur armée est celle de la République. (Vifs applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants. - Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du RDSE.)

CAUSES DE LA VIOLENCE DANS LA JEUNESSE