SOMMAIRE


PRÉSIDENCE DE M. JACQUES VALADE

1. Procès-verbal (p. 0 ).

2. Décès d'un sénateur (p. 1 ).

3. Candidatures à un organisme extraparlementaire (p. 2 ).

4. Dépôt d'un rapport du Gouvernement (p. 3 ).

5. Retrait de questions orales sans débat (p. 4 ).

6. Questions orales sans débat (p. 5 ).

CONSÉQUENCES ET COMPENSATIONS
LIÉES AU DÉPART DE PLUSIEURS RÉGIMENTS
DE LA VILLE DE VERDUN (p. 6 )

Question de M. Rémi Herment. - MM. Rémi Herment, Alain Richard, ministre de la défense.

AVION DE TRANSPORT FUTUR (ATF) (p. 7 )

Question de M. Fernand Demilly. - MM. Fernand Demilly, Alain Richard, ministre de la défense.

BONIFICATIONS POUR CAMPAGNE DOUBLE
ACCORDÉES AUX ANCIENS COMBATTANTS
D'AFRIQUE DU NORD (p. 8 )

Question de Mme Marie-Claude Beaudeau. - Mme Marie-Claude Beaudeau, M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat aux anciens combattants.

DÉLOCALISATION DE LA SONACOTRA (p. 9 )

Question de M. Dominique Braye. - M. Dominique Braye, Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

AVENIR DE LA CAISSE NATIONALE DE RETRAITES
DES AGENTS DES COLLECTIVITÉS LOCALES (CNRACL) (p. 10 )

Question de M. Bernard Barraux. - MM. Bernard Barraux, Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.

RÉMUNÉRATIONS COMPLÉMENTAIRES
DES AGENTS DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES (p. 11 )

Question de M. Daniel Hoeffel. - MM. Daniel Hoeffel, Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.

TARIF AÉRIEN SUR LA LIGNE AVIGNON-PARIS (p. 12 )

Question de M. Alain Dufaut. - MM. Alain Dufaut, Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

RYTHMES SCOLAIRES (p. 13 )

Question de M. Franck Sérusclat. - M. Franck Sérusclat, Mme Ségolène Royal, ministre délégué chargé de l'enseignement scolaire.

APPLICATION DE LA LOI
SUR LES PRÉLÈVEMENTS D'ORGANES (p. 14 )

Question de M. Jean-Marc Pastor. - MM. Jean-Marc Pastor, Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé.

RÉGIME DE LA TAXE D'HABITATION
APPLICABLE AUX RÉSIDENTS
DES FOYERS DE TRAVAILLEURS (p. 15 )

Question de Mme Marie-Madeleine Dieulangard. - Mme Marie-Madeleine Dieulangard, M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement.

TAUX DE TVA
APPLICABLE AUX TRAVAUX DE RÉNOVATION
DES MAISONS DE RETRAITE ET FOYERS-LOGEMENTS (p. 16 )

Question de M. Jacques de Menou. - MM. Jacques de Menou, Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement.

ÉVOLUTION DES PRÉLÈVEMENTS SOCIAUX
SUR LES INDEMNITÉS DES ÉLUS LOCAUX (p. 17 )

Question de M. Michel Mercier. - M. Michel Mercier, Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication.

PROBLÈMES DES RÉFUGIÉS KURDES (p. 18 )

Question de M. José Balarello. - M. José Balarello, Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication.

FOUILLES ARCHÉOLOGIQUES DANS L'EMPRISE
DE LA NOUVELLE LIAISON PERPIGNAN-CANET (p. 19 )

Question de M. René Marquès. - M. René Marquès, Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication.

7. Nomination de membres d'un organisme extraparlementaire (p. 20 ).

Suspension et reprise de la séance (p. 21 )

PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE

8. Conférence des présidents (p. 22 ).

9. Profession de transporteur routier. - Adoption d'un projet de loi déclaré d'urgence (p. 23 ).
Discussion générale : MM. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement ; Jean-François Le Grand, rapporteur de la commission des affaires économiques ; Lucien Lanier, rapporteur pour avis de la commission des lois ; Joseph Ostermann, Charles Descours, Pierre Lefebvre, Jacques Bellanger, Léon Fatous.
M. le président.

Suspension et reprise de la séance (p. 24 )

PRÉSIDENCE DE M. JEAN DELANEAU

MM. Guy Cabanel, Pierre Hérisson, Jean-Paul Emin, le ministre.
Clôture de la discussion générale.

Article 1er (p. 25 )

Amendement n° 16 de M. Hérisson. - MM. Pierre Hérisson, le rapporteur, le ministre, Jacques Bellanger. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article additionnel après l'article 1er (p. 26 )

Amendement n° 15 de M. Descours. - MM. Charles Descours, le rapporteur, le ministre, Pierre Lefebvre. - Retrait.

Article 2 (p. 27 )

Amendements identiques n°s 17 de M. Hérisson et 28 de M. Raffarin ; amendements n°s 1 de la commission et 25 de M. Lefebvre. - MM. Pierre Hérisson, Jean-Paul Emin, le rapporteur, Guy Fischer, le ministre. - Retrait des amendements n°s 17, 28 et 25 ; adoption de l'amendement n° 1.
Amendement n° 2 rectifié de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre, Jacques Bellanger. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article additionnel après l'article 2 (p. 28 )

Amendement n° 23 de M. Fatous. - MM. Léon Fatous, le rapporteur, le ministre. - Retrait.

Article 3 (p. 29 )

Amendement n° 3 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre, Pierre Lefebvre. - Adoption.
Amendements n°s 4 et 5 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 3 bis (p. 30 )

Amendement n° 26 de M. Lefebvre. - MM. Guy Fischer, le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 3 ter (p. 31 )

Amendements n°s 12 de M. Lanier, rapporteur pour avis, 29 du Gouvernement et 6 rectifié bis de la commission. - MM. le rapporteur pour avis, le ministre, le rapporteur, Pierre Lefebvre. - Rejet des amendements n°s 12 et 29 ; adoption de l'amendement n° 6 rectifié bis.
Adoption de l'article modifié.

Article 3 quater (p. 32 )

Amendement n° 7 rectifié de la commission et sous-amendement n° 18 rectifié de M. Hérisson. - MM. le rapporteur, Pierre Hérisson, le ministre. - Adoption du sous-amendement et de l'amendement modifié.
Adoption de l'article modifié.

Article 3 quinquies (p. 33 )

Amendements identiques n°s 13 de M. Lanier, rapporteur pour avis, et 21 de M. Hérisson ; amendements n°s 30 rectifié du Gouvernement, 8 et 9 de la commission. - MM. le rapporteur pour avis, Pierre Hérisson, le ministre, Pierre Lefebvre, Jacques Bellanger. - Retrait des amendements n°s 8, 9 et 30 rectifié ; adoption des amendements n°s 13 et 21 supprimant l'article.

Article 3 sexies (p. 34 )

Amendement n° 14 de M. Lanier, rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur pour avis, le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Articles 4 et 5. - Adoption (p. 35 )

Articles additionnels après l'article 5 (p. 36 )

Amendements n°s 22 rectifié, 19 rectifié, 20 rectifié de M. Hérisson, 24 de M. Fatous, 10 de la commission et sous-amendement n° 31 du Gouvernement ; amendement n° 27 de M. Lefebvre. - MM. Pierre Hérisson, Jacques Bellanger, le rapporteur, le ministre, Pierre Lefebvre. - Retrait des amendements n°s 10, 27, 19 rectifié et 20 rectifié, le sous-amendement n° 31 devenant sans objet ; adoption de l'amendement n° 22 rectifié insérant un article additionnel ; rejet de l'amendement n° 24.

Article 6. - Adoption (p. 37 )

Article 6 bis (p. 38 )

Amendement n° 11 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre, Pierre Lefebvre. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.

Article 7. - Adoption (p. 39 )

Vote sur l'ensemble (p. 40 )

MM. Jacques Bellanger, Jean Bizet, Pierre Hérisson, Pierre Lefebvre, le rapporteur, le ministre.
Adoption du projet de loi.

10. Nomination de membres d'une commission mixte paritaire (p. 41 ).

11. Communication de l'adoption définitive de propositions d'acte communautaire (p. 42 ).

12. Dépôt d'une proposition de loi (p. 43 ).

13. Dépôt de propositions d'acte communautaire (p. 44 ).

14. Dépôt d'un rapport (p. 45 ).

15. Ordre du jour (p. 46 ).



COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. JACQUES VALADE
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

1

PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le procès-verbal de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté.

2

DÉCÈS D'UN SÉNATEUR

M. le président. J'ai le profond regret de faire part au Sénat du décès de notre collègue Pierre Croze, sénateur représentant les Français établis hors de France, survenu le 19 janvier 1998.

3

CANDIDATURES
A` UN ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE

M. le président. Je rappelle au Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation de sénateurs appelés à siéger au sein d'un organisme extraparlementaire.
La commission des affaires économiques et du Plan propose la candidature de M. Jacques Rocca Serra et la commission des affaires sociales propose la candidature de M. Marcel Lesbros pour siéger au sein du Conseil supérieur de l'établissement national des invalides de la marine.
Ces candidatures ont été affichées et seront ratifiées, conformément à l'article 9 du règlement, s'il n'y a pas d'opposition, à l'expiration du délai d'une heure.

4

DÉPÔT D'UN RAPPORT DU GOUVERNEMENT

M. le président. J'informe le Sénat que M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le rapport sur l'application du supplément de loyer de solidarité, établi conformément aux dispositions de l'article L. 441-10 du code de la construction et de l'habitation.
Acte est donné du dépôt de ce rapport.

5

RETRAIT
DE QUESTIONS ORALES SANS DÉBAT

M. le président. J'informe le Sénat que la question orale sans débat n° 151 de M. Charles de Cuttoli est retirée et que la question orale sans débat n° 21 de M. Jean-Paul Delevoye est retirée, à la demande de son auteur, de l'ordre du jour de la présente séance.

6

QUESTIONS ORALES SANS DÉBAT

M. le président. L'ordre du jour appelle les réponses à des questions orales sans débat.

CONSÉQUENCES ET COMPENSATIONS LIÉES AU DÉPART
DE PLUSIEURS RÉGIMENTS DE LA VILLE DE VERDUN

M. le président. La parole est à M. Herment, auteur de la question n° 147, adressée à M. le ministre de la défense.
M. Rémi Herment. Monsieur le ministre, je souhaite que vous m'apportiez des précisions sur les restructurations et les compensations après le départ de Verdun du 3e RAMa, l'arrondissement des travaux, la dissolution de l'établissement des subsistances et la dissolution du centre mobilisateur n° 62.
Il apparaît en effet que les soutiens financiers et les remplacements en personnes n'ont pas été à la hauteur des attentes qu'avaient fait naître les promesses et de la dette morale de la nation à l'égard de l'agglomération verdunoise, qui traverse actuellement une situation particulièrement difficile.
Considérant que cette situation a été largement aggravée avec la dissolution du 151e régiment d'infanterie, considérant que, sur les dossiers de compensation liés aux restructurations militaires, la plus grande transparence doit être de règle, considérant, enfin, que la professionnalisation du 2e régiment de chasseurs et la perspective de l'accueil du char Leclerc sont des éléments positifs non négligeables, voici les requêtes que je vous adresse, monsieur le ministre.
Premièrement, je demande qu'un bilan chiffré et complet soit établi de la première phase de restructuration, mettant en exergue les pertes réelles de population de l'agglomération verdunoise, les sommes dépensées par l'autorité militaire avant le départ du 3e RAMa et d'autres unités, et les compensations financières réelles obtenues - FRED, fonds de restructuration de la défense, KONVER, Etat, région et collectivités territoriales concernées.
Deuxièmement, je demande qu'un rapport précis soit réalisé, à la suite de la dissolution du 151e régiment d'infanterie, faisant apparaître notamment les sommes dépensées par l'autorité militaire et la perte de population.
Troisièmement, je demande qu'un rapport détaillé des opérations et des financements soit établi sur les projets dits de compensations après le départ du 151e RI - KONVER II, FRED, etc.
Enfin, quatrièmement, je demande que soient recensées les perspectives de compensations en personnels au travers de délocalisations de services nationaux.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Alain Richard, ministre de la défense. Monsieur le sénateur, l'application à l'agglomération verdunoise d'un certain nombre de mesures est le résultat d'une politique de l'Etat choisie par l'ensemble des autorités institutionnelles et s'appliquant dans la continuité. Il ne m'est donc en rien difficile d'assumer les décisions prises par mes prédécesseurs. De même, dans la durée des politiques de restructuration nécessaires à la logique et à l'efficacité de notre outil de défense, je suis persuadé que mes successeurs pourront, à leur tour, donner toutes les informations nécessaires et assumer les justifications des décisions que j'aurai été amené à prendre.
Je rends justice à votre demande de transparence cencernant l'ensemble de ces décisions, leurs motivations en termes d'efficacité militaire, leur coût et leur choix d'accompagnement. Ces décisions, qui font partie du domaine public, si j'ose dire, sont tout naturellement accessibles aux parlementaires et aux élus locaux.
Pour faire face aux restructurations militaires intervenues en 1992, à savoir la dissolution de l'établissement des subsistances, et en 1994, c'est-à-dire la dissolution du centre mobilisateur n° 62 et du 3e régiment d'artillerie de marine, la ville de Verdun a bénéficié d'une enveloppe de 20 millions de francs de fonds européen sur le programme dit KONVER, sur lesquels 18,4 millions de francs ont été engagés. Ces crédits, auxquels se sont ajoutés 9,1 millions de francs du fonds pour les restructurations de la défense, le FRED, ont notamment permis la création de la zone industrielle des Souhesmes et l'attribution de subventions de création à diverses entreprises. Là encore, sur les 110 emplois dont la création avait été envisagée grâce à ces crédits publics, 98 ont été effectivement créés.
L'été dernier, en fonction des décisions prises par le gouvernement précédent, nous avons procédé à la dissolution du 151e régiment d'infanterie. L'impact de cette restructuration sur l'économie de l'agglomération verdunoise restera heureusement limité. En effet, dans le même temps, vous l'avez dit, nous transformons le 2e régiment de chasseurs en régiment à quatre-vingts chars. Cette opération, qui nécessite l'acquisition de nouveaux terrains et la réalisation d'importantes infrastructures, pérennisera l'implantation dans la ville de Verdun de 1 125 professionnels dont le poids économique sera équivalent à celui qui préexistait.
Lorsque j'aurai à présenter la deuxième vague des restructurations militaires, celles qui portent sur les établissements, sur les échelons territoriaux, les états-majors, je m'efforcerai de bien décrire devant les parlementaires la méthode de chiffrage de l'impact économique des différentes mesures pour que la transparence soit complète.
Bien entendu, mes services feront droit à toutes vos demandes d'évaluations complémentaires, mais, pour s'en tenir aux chiffres essentiels, sachez que le 151e régiment d'infanterie représentait 406 militaires d'active, correspondant à un impact financier pour la ville de Verdun de 50 millions de francs par an. Ces 406 postes de professionnels seront remplacés par 393 postes au titre du 2e régiment de chasseurs, soit 363 militaires d'active et 30 personnels civils de la défense.
En outre, je précise que les perspectives d'accompagnement des restructurations pour Verdun et la Meuse s'inscrivent dans un cadre plus large, qui a d'ailleurs donné lieu à une convention avec la région Lorraine.
Les restructurations militaires liées à la professionnalisation sont, pour l'ensemble de la Lorraine, globalement positives. Un programme est en cours d'élaboration, en application de la convention, entre les représentants de l'Etat et les collectivités locales.
Ce programme prévoit trois axes principaux : donner une nouvelle destination économique, sociale ou culturelle aux emprises libérées par les armées ; accroître l'effort de diversification économique des bassins d'emploi touchés par une mesure liée à la restructuration de défense ; enfin, favoriser la diversification économique ou la conversion des entreprises sous-traitantes de la défense.
Ce programme est de nature à bien prendre en compte les problèmes posés par l'évolution des activités de défense en Lorraine puisqu'il prévoit de traiter les difficultés liées à la libération d'un certain nombre d'emprises militaires et de faciliter la création de nouvelles activités sur les bassins touchés. Je me réjouis de la concertation qui a eu lieu avec le conseil général de la Meuse et la ville de Verdun, qui sont étroitement associés à l'élaboration de ce programme régional. Nous pourrons ainsi atténuer grandement l'impact négatif de certaines restructurations mises en oeuvre.
Il faut, enfin, rappeler que, malgré ces restructurations militaires, la Meuse restera un département de forte implantation de la défense puisque trois escadrons de gendarmerie mobile et trois régiments de l'armée de terre y sont stationnés - et ce dans un département où la population est assez réduite par rapport à la moyenne - et que la professionnalisation de l'ensemble de ces unités accroîtra significativement leur impact économique.
M. Rémi Herment. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Herment.
M. Rémi Herment. Je vous remercie, monsieur le ministre, des précisions chiffrées que vous m'avez apportées. J'ai notamment relevé avec intérêt l'annonce de l'arrivée de quatre-vingts chars au 2e régiment de chasseurs à Verdun.
Vous avez évoqué l'implication des collectivités territoriales, dont le conseil général, que j'ai l'honneur de représenter. Nous sommes souvent vos partenaires, monsieur le ministre, car nous tenons beaucoup à une présence forte de la défense nationale sur notre territoire. Le nom de Verdun est évocateur et, s'il est vrai qu'il y a une certaine disproportion entre les effectifs et notre modeste population, vous savez aussi que nous payons, aujourd'hui encore, le poids d'une histoire qui, dans notre département, fut lourde de conséquences.

AVION DE TRANSPORT FUTUR (ATF)

M. le président. La parole est à M. Demilly, auteur de la question n° 149, adressée à M. le ministre de la défense.
M. Fernand Demilly. Monsieur le ministre, dans une déclaration conjointe, le Président de la République, M. Jacques Chirac, le Premier ministre, M. Lionel Jospin, le Chancelier allemand, M. Helmut Kohl, et le Premier ministre britannique, M. Tony Blair, ont souhaité, début décembre, une réorganisation urgente des industries aérospatiales, tant civiles que militaires, pour aboutir à une intégration européenne fondée sur un partenariat équilibré.
Dans ce contexte, quel est, monsieur le ministre, l'avenir du futur avion de transport de troupes, l'ATF ? La supériorité de l'ATF a été clairement démontrée. Six pays européens se sont engagés dès le mois de juin à lancer un appel d'offres auprès des industriels. Cependant, sans un engagement fort de la France dans les prochains mois, avec une commande globale possible d'une cinquantaine d'appareils, ce programme ATF serait fortement compromis. C'est ce que prétend le rapport remis en juin dernier à M. le Premier ministre par M. Pierre Lelong, président de chambre à la Cour des comptes.
Dans ces conditions, quelles sont, monsieur le ministre, les intentions de votre ministère ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Alain Richard, ministre de la défense. Monsieur le sénateur, je vous remercie d'avoir mentionné la déclaration intergouvernementale du 9 décembre dernier à laquelle nous attachons beaucoup d'importance. Nous souhaitons qu'elle soit véritablement pour les prochaines années un choix d'orientation de restructuration de nos industries de défense.
J'observe que nos amis américains importent moins de 1 % de leurs acquisitions militaires chaque année. L'objectif n'est pas forcément que l'Europe atteigne à un tel niveau d'autosuffisance, mais il est clair que, si nous ne prenons pas des mesures structurelles hardies, compte tenu de la puissance acquise par les industries américaines qui sont assurées d'un marché intérieur extrêmement puissant, le niveau de capacité industrielle et technologique lié à la défense de l'ensemble de l'Europe risque d'être atteint.
S'agissant des avions de transport, le renouvellement de notre propre flotte d'appareils de la force aérienne de projection, visera à remplacer, à partir de 2005, les avions dont nous disposons aujourd'hui, pour l'essentiel des Transall et des C 130, qui nous donnent entière satisfaction, et qui permettent aux unités françaises de s'installer dans des terrains difficiles de façon très efficace.
Le rassemblement des programmes est facilité par le fait que nos principaux partenaires européens ont également des impératifs de renouvellement de leur flotte de transport à peu près à la même période, c'est-à-dire entre 2003 et 2004, au plus tôt, et 2010.
Parmi les solutions envisagées figure le développement d'un nouvel avion en coopération avec les partenaires de l'aéronautique européenne, appelé ATF par nous et FLA par nos partenaires anglophones.
La loi de programmation militaire, qui a été votée par le Parlement en juin 1996, ne prévoit malheureusement pas de financement pour développer cet avion, ce qui veut dire que même son développement devrait être financé après 2002 ; cela nous pose un problème difficile.
La France est intéressée par la construction d'un modèle européen. Elle a donc proposé à ses partenaires européens une nouvelle approche de financement et de conduite de ce programme inspirée de celle qui s'applique aux avions civils.
Dans cette perspective, M. Lelong, ancien président de la deuxième chambre de la Cour des comptes, a remis à M. le Premier ministre, le 13 juin dernier, un rapport préliminaire dans lequel il propose des méthodes de financement compatibles avec l'approche commerciale envisagée pour ce programme ; huit Etats acheteurs sont disposés à s'engager. Les propositions de M. Lelong sont actuellement examinées par mes services.
En outre, la France, avec ses partenaires européens, étudie deux autres solutions.
La première consiste à acheter des avions américains C 130 et C 17 qui sont déjà développés, ce qui peut, après une négociation intense, aboutir à une certaine économie, surtout si l'Europe démontre sa capacité à développer un modèle alternatif.
L'autre solution consisterait à associer la filiale militaire commune d'Airbus - Airbus Military Company - aux industries russes et ukrainiennes qui ont développé un appareil maintenant prêt à passer en fabrication et présentant des performances très intéressantes, l'Antonov 70, en soulignant que si les industriels européens ne proposent pas un partenariat aux industriels russes ou ukrainiens, il est vraisemblable qu'un jour ou l'autre ce sont les industriels américains qui le feront.
Les études préliminaires au lancement du contrat de réalisation, envisagé à l'horizon de l'année 1999, porteront donc sur trois solutions : l'achat d'avion C 130 ou C 17, d'ailleurs, pour les plus gros besoins de transport, le développement de l'ATF et la coopération avec la Russie et l'Ukraine.
Pour permettre, en tout cas, de financer les études préparatoires au projet européen ATF et disposer des éléments d'appréciation techniques et financiers nécessaires à la préparation du contrat de réalisation, j'ai prévu, dans le budget de 1998 du ministère de la défense, dont pourtant vous connaissez les limites, le financement de 50 % des travaux de ce que l'on appelle le « prélancement de l'ATF ».
Ainsi, 64 millions de francs figurent dans les crédits d'études amont du ministère pour 1998. Je n'ai pas souhaité les individualiser, parce qu'au fond il y aura une ligne ATF dans le budget du ministère de la défense lorsque le choix de développer l'ATF aura été décidé. Les crédits d'études préalables, qui sont partagés à 50 % avec Airbus, ont été prévus et seront versés au cours de l'année 1998.
M. Fernand Demilly. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Demilly.
M. Fernand Demilly. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse. Ce projet d'avion européen de transport militaire du futur offre, vous le savez, une opportunité exceptionnelle pour l'avenir de notre industrie aéronautique.
Tout est prêt à Toulouse pour lancer ce programme européen, qui va concerner 35 000 emplois, dont 8 000 en France, et ce pendant plusieurs années. Ce programme est qualifié d'essentiel et de vital pour l'industrie aéronautique, y compris les sous-traitants et les fournisseurs, et a des retombées économiques dans presque tous nos départements. En Picardie, ce projet concerne 1 400 salariés.
Tout est prêt mais manque la décision politique. Or la France est concernée par l'ATF qui s'inscrit effectivement, vous l'avez rappelé, monsieur le ministre, dans l'effort d'amélioration des capacités de projection de nos forces.
« Nous avons tous besoin de cet avion de transport », avez-vous dit, monsieur le ministre, début octobre 1997, et vous avez ajouté : « Il y a un accord complet entre un grand nombre de pays européens sur les spécifications et les objectifs opérationnels de cet avion. »
Je souhaite avec vous, monsieur le ministre, que le projet d'ATF européen, en panne depuis un an, soit, après le prélancement que vous avez annoncé, vivement relancé.

BONIFICATIONS POUR CAMPAGNE DOUBLE
ACCORDÉES AUX ANCIENS COMBATTANTS
D'AFRIQUE DU NORD

M. le président. La parole est à Mme Beaudeau, auteur de la question n° 12, adressée à M. le secrétaire d'Etat aux anciens combattants.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Une nouvelle fois, j'interviens en faveur du droit des anciens combattants fonctionnaires, cheminots et agents des services publics. J'ai d'ailleurs déposé cette question le 23 juin 1997. Il ne s'agit donc pas d'une revendication nouvelle, subite et injustifiée.
La demande tendant à faire reconnaître le bénéfice de la campagne double en Afrique du Nord pour les personnels que j'ai cités se fonde sur des éléments incontestables de notre législation.
La loi du 14 avril 1924 reconnaît les bonifications pour campagne double comme un droit à réparation et celle du 9 décembre 1974 affirme, quant à elle, le droit à égalité pour les anciens combattants d'Afrique du Nord avec ceux des conflits antérieurs.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous demande non pas une législation nouvelle mais simplement de faire appliquer la loi existante. A trop tarder, celle-ci deviendrait inutile !
Est-il normal, républicain, que des lois, expression souveraine du Parlement, puissent rester lettre morte ?
J'aurais pu faire référence à d'autres lois, notamment à celle du 6 août 1948 ou à celle du 26 septembre 1951 qui doivent être applicables à tous du fait de l'égalité reconnue des anciens combattants d'Afrique du Nord avec ceux des conflits antérieurs.
Aujourd'hui, des considérations financières - il ne faut pas se le cacher - s'opposent au droit républicain. Je pense que le chiffrage du coût annuel de la dépense ne doit pas dépasser 500 millions de francs selon l'association nationale des cheminots anciens combattants.
Tout de même, monsieur le secrétaire d'Etat, il ne faudrait pas qu'au nom des exigences maastrichiennes de monnaie unique le droit de l'ancien combattant soit bafoué ! Même si la dépense nouvelle dépassait cette somme, cet engagement n'a-t-il pas été pris par le Parlement en toute connaissance de cause ?
Le 3 juillet dernier, vous avez reçu une délégation du comité d'entente de la fonction publique. Vous avez donné votre accord pour que la mission d'évaluation du chiffrage soit confiée à l'inspection générale des finances.
Le 24 octobre dernier, M. Pozel, inspecteur général adjoint, a répété qu'il ferait le point avec les différentes administrations pour évaluer le coût de la mesure. En fait, trois mois et demi ont été perdus, trois nouveaux mois viennent de s'écouler, et nous ne connaissons pas encore les conclusions de ces nouvelles études qui se succèdent toujours dans leur principe mais jamais dans leur application.
Monsieur le secrétaire d'Etat, ce matin ma question est double : d'abord, quel est le coût de l'application de la loi ; ensuite, quel est le plan prévu par le Gouvernement pour une application de celle-ci dès 1998 ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat, que j'ai plaisir à saluer ce matin au Sénat.
M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat aux anciens combattants. Je vous remercie, monsieur le président.
Madame Beaudeau, quand je suis arrivé au département ministériel des anciens combattants, trois dossiers importants concernant le sort des anciens combattants d'Afrique du Nord étaient encore en suspens : la carte d'ancien combattant et l'extension du droit à cette carte, la retraire anticipée et ce qu'il convient d'appeler la campagne double qui fait l'objet de votre question.
Sur les deux premiers sujets, nous avons avancé avec le Parlement lors de la dernière discussion budgétaire.
S'agissant de la campagne double, ainsi que vous l'avez indiqué, j'ai confié à un inspecteur général la mission de faire une estimation. Dans quelques jours, voire dans quelques semaines, cette estimation me sera rendue.
Pourquoi cette estimation requière-t-elle un certain temps ? Parce que tout ne dépend pas du secrétariat d'Etat aux anciens combattants. Cette question relève à la fois de la fonction publique, de la caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales et d'un certain nombre de partenaires qui sont concernés par l'estimation de la mesure et la définition de son coût. Cette disposition engage donc l'ensemble du Gouvernement.
Les estimations n'ont jamais été faites. Les associations en ont fait une approche, que vous avez indiquée, mais je n'ai pas trouvé dans les dossiers du secrétariat d'Etat aux anciens combattants une estimation de ce type. J'ai donc souhaité, sur ce sujet comme sur d'autres, faire procéder à une estimation financière avant d'engager la discussion. Le contexte budgétaire, il est vrai, n'est pas simple.
J'indiquerai à la représentation nationale quel est le dispositif actuel.
Un fonctionnaire ou assimilé qui aura passé en Afrique du Nord dix-huit mois, par exemple, obtiendra une bonification pour sa retraite de trente-six mois en réalité. En revanche, s'agissant des personnes qui ont été engagées en Afrique du Nord et qui ressortissent aux caisses privées, le temps de campagne retenu est le temps de présence réel, simplement majoré de trois mois pour dix-huit mois de présence, et retenu en totalité au-delà de dix-huit mois.
Personnellement, je suis d'abord confronté à cette inégalité de situations entre les anciens combattants qui relèvent de la fonction publique et les anciens combattants qui relèvent du droit privé. Je souhaiterais plutôt essayer de traiter cette inégalité en priorité.
Par ailleurs, il faut que nous prenions en compte les dispositions légales, ce qui n'est pas tout à fait aussi simple. L'article L. 12 du code des pensions et son application réglementaire, l'article R. 14, déterminent les conditions d'appréciation de ces campagnes selon la situation de guerre, de pied de guerre ou les conditions d'insalubrité. Pour l'Afrique du Nord, c'est ce troisième point qui a été retenu.
Même si nous retenons le concept de guerre, il n'est pas évident que nous puissions passer à la qualification campagne double. En tout cas, moi, je suis ouvert à la discussion.
Je me préoccupe en priorité des anciens combattants qui n'ont pas d'activité, qui connaissent des difficultés sociales. Il ne s'agit pas de s'occuper de Pierre avant de s'occuper de Paul ! Ma responsabilité politique en général m'impose d'apporter d'abord des réponses aux anciens combattants qui sont en réelle difficulté sociale, au chômage - notamment de longue durée - et qui manquent de ressources.
C'est pourquoi la majorité actuelle a pris, lors de la dernière discussion budgétaire, des dispositions ; nous allons poursuivre dans cette voie.
Je ne suis pas hostile à la mesure que vous proposez. Cependant, en fonction des estimations financières, je rendrai des arbitrages, je déterminerai des priorités et, le moment venu, je vous rendrai compte de la suite qu'il est possible de donner à cette revendication.
Très honnêtement - je le dis très tranquillement - il me semble qu'il y a des situations plus préoccupantes que nous devons traiter en priorité. Cela ne veut pas dire que la revendication n'est pas légitime. Cela signifie que, dans un contexte budgétaire donné, qui n'a d'ailleurs pas de relations avec le traité de Maastricht, il faut faire des choix. Or, nos choix doivent porter en priorité sur la réparation d'injustices et prendre en compte les difficultés sociales du monde ancien combattant.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Monsieur le secrétaire d'Etat, je ne sous-estime pas l'ampleur des dossiers que vous avez trouvés à votre arrivée au Gouvernement. Il n'en demeure pas moins que je trouve votre réponse quelque peu imprécise, voire dilatoire. Les anciens combattants, plus particulièrement les agents de certains services publics qui ont combattu en Afrique du Nord, n'accepteront pas votre réponse, parce qu'elle méconnaît un droit sur lequel les textes sont pourtant clairs, à moins qu'il ne faille se mettre d'accord une fois pour toutes sur ces textes !
Vous le savez bien, monsieur le secrétaire d'Etat, beaucoup d'élus ont reconnu ce droit. Ainsi, le 3 avril 1981, il y a donc près de dix-sept ans, François Mitterrand écrivait au président de l'Union française des associations d'anciens combattants et de victimes de guerre, l'UFAC : « Si je suis élu à la Présidence, j'inspirerai mes actions des mêmes principes. La question de l'attribution du droit à la campagne double aux anciens combattants d'Afrique du Nord, fonctionnaires ou assimilés, sera examinée dans un esprit favorable. » Rassurez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, M. Chirac a fait la même promesse !

Monsieur le secrétaire d'Etat, une clarification de votre part s'impose. Les anciens combattants ont en effet constaté que, dans la plaquette parue le 21 octobre 1997, la campagne double ne figure pas. Leur inquiétude est donc grande et je ne crois pas que votre réponse les rassurera. En tout cas, une nouvelle négociation avec eux s'impose.

DÉLOCALISATION DE LA SONACOTRA

M. le président. La parole est à M. Braye, auteur de la question n° 119, adressée à Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.
M. Dominique Braye. Madame le ministre, le 10 avril 1997, le comité interministériel pour l'aménagement et le développement du territoire réuni à Auch annonçait plusieurs mesures de délocalisation d'administrations ou d'établissements publics au profit de sites en reconversion industrielle et de sites d'intervention prioritaire de la politique de la ville.
Parmi ces sites, la ville de Mantes-la-Jolie était désignée pour accueillir le siège national de la SONACOTRA, établissement public industriel et commercial, actuellement situé à Paris.
Mantes-la-Jolie, ainsi que l'ensemble de l'agglomération mantaise, tout le monde le sait, est dans une situation économique et sociale extrêmement difficile, qui va en se dégradant malgré les efforts incessants des élus locaux, et renforcés depuis trois ans par ceux de l'Etat, de la région et du département des Yvelines dans le cadre de nombreuses actions, notamment un grand projet urbain. Nous devons d'ailleurs signer demain matin un contrat d'aménagement régional et un contrat de développement urbain avec M. Besson, secrétaire d'Etat au logement.
Mais force est de constater que, malgré leur ampleur, ces efforts convergents restent, hélas ! encore insuffisants.
En effet, 800 emplois industriels ont été supprimés dans l'agglomération mantaise ces deux dernières années et plusieurs entreprises importantes sont actuellement en grande difficulté, comme New Sulzer Diesel, à Mantes-la-Ville, qui perdra 230 emplois en 1998, menaçant 750 emplois indirects chez ses sous-traitants, ou comme le Pari mutuel urbain, qui perdra 60 emplois sans parler de l'abandon par France Télécom du réseau câblé de Mantes, le seul de notre pays dont la disparition est programmée sans la moindre concertation avec les élus locaux !
L'exercice budgétaire 1998 de la commune de Mantes-la-Jolie aurait été marqué par la perte annuelle de 9 millions de francs de ressources fiscales et de dotations si deux amendements, l'un proposé par M. Gilles Carrez sur le Fonds national de la taxe professionnelle, le FNTP, et l'autre par M. Didier Migaud, concernant le fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle, n'avaient pas été adoptés par le Parlement, dans le cadre de la loi de finances pour 1998.
Ces dispositions budgétaires permettront de pallier en partie la baisse sensible des ressources fiscales de Mantes-la-Jolie, qui perdra quand même annuellement plus de 1 800 000 francs.
L'équilibre du budget de Mantes-la-Jolie, même s'il est partiellement préservé pour l'année 1998 grâce aux mesures parlementaires que j'évoquais précédemment, reste donc très menacé pour les années suivantes, en raison de perspectives économiques locales inquiétantes et en l'absence de nouvelles ressources fiscales pérennes.
Par ailleurs, la ville de Mantes-la-Jolie est confrontée à d'importants problèmes sociaux liés à la présence sur son territoire d'un très important quartier difficile, connu de tous, le Val-Fourré : classé en zone franche urbaine, celui-ci représente 25 000 habitants sur une population communale totale de 45 000 habitants et constitue la plus grande ZUP de France.
Pour toutes ces raisons, il était apparu indispensable de faire bénéficier Mantes-la-Jolie des retombées économiques positives de la politique de délocalisation, et donc d'y maintenir le transfert du siège de la SONACOTRA.
Cette délocalisation permettrait en effet l'arrivée dans la commune de près de deux cent cinquante emplois, sans compter les emplois induits, les conséquences positives pour le commerce local et, bien sûr, générerait une taxe professionnelle annuelle de l'ordre de 5 millions de francs, véritable ballon d'oxygène, indispensable à l'avenir de cette ville-centre.
Il convient de préciser que l'ensemble des maires des huit communes du district urbain de Mantes, que j'ai l'honneur de présider, quelle que soit leur appartenance politique, y compris Mme Peulvast-Bergeal, député-maire socialiste de Mantes-la-Ville, et leurs conseillers municipaux ont tous voté, à l'unanimité, une motion demandant que ce transfert du siège de la SONACOTRA à Mantes-la-Jolie soit maintenu.
Il a semblé indispensable à tous les élus locaux de rappeler ce que M. le Premier ministre a affirmé lui-même récemment, à savoir que les engagements pris par le précédent gouvernement doivent être honorés, en vertu du principe républicain de continuité.
J'ajouterai, madame le ministre, que la décision de délocaliser le siège de la SONACOTRA à Mantes-la-Jolie s'inscrit dans le cadre très spécifique de la politique d'aménagement du territoire que vous défendez, à savoir le rééquilibrage de la région d'Ile-de-France. En effet, au sein d'un département comme celui des Yvelines, coexistent des territoires aisés et d'autres très défavorisés. C'est ce que la politique d'aménagement du territoire a le devoir de corriger.
Cette délocalisation symbolisait par ailleurs la victoire du pouvoir politique sur la technocratie et l'administration centrale, lesquelles oeuvraient pour que cette délocalisation se fasse en Seine-Saint-Denis, pour s'y retrouver ainsi « en famille », aux côtés des autres administrations relevant de la politique de la ville.
En conséquence, madame le ministre, afin que la survie économique d'une commune et de tout un bassin d'emploi soit prise en compte, afin que la parole de l'Etat soit tenue et afin d'affirmer que la décision du politique prime celle de l'administration, je vous demande instamment de maintenir cette délocalisation du siège de la SONACOTRA à Mantes-la-Jolie et de bien vouloir me préciser la date à laquelle celle-ci sera effectivement mise en oeuvre.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Monsieur le sénateur, vous m'interrogez sur le projet de délocalisation du siège de la Société nationale de construction de logements pour les travailleurs, la SONACOTRA, à Mantes-la-Jolie.
Je voudrais tout d'abord rappeler l'historique des travaux sur une nouvelle implantation de cet organisme.
Une expertise, relative à la faisabilité de la délocalisation du siège de la SONACOTRA, avait été demandée par le comité interministériel d'aménagement du territoire de Troyes du 20 septembre 1994.
Cette expertise, réalisée en 1995 par M. Jean-Paul Lacaze, ingénieur général des Ponts et Chaussées, concluait à la possibilité de réaliser un tel transfert dès lors qu'un certain nombre de précautions étaient prises, notamment la concertation poussée avec le personnel, un projet élaboré en interne, un délai de réalisation d'au moins quatre à cinq ans, la recherche d'un site en Ile-de-France.
La situation a ensuite peu évolué. Lors du CIADT d'Auch du 10 avril 1997, auquel vous avez fait allusion, une proposition d'affecter la SONACOTRA à Mantes-la-Jolie a été inscrite dans un document préparatoire, mais elle n'a pas fait l'objet d'une décision de ce Comité. Aucun engagement n'a donc été pris.
Il ne s'agit donc pas là d'une exception. Sans vouloir polémiquer, je pourrais citer d'autres exemples d'annonces de délocalisation qui ont suscité d'énormes espoirs dans les territoires destinés à accueillir tel ou tel équipement. La déception n'en fut que plus grande lorsque les élus locaux et les partenaires territoriaux se rendirent compte que rien n'était conçu pour crédibiliser l'engagement médiatique d'un jour.
Tel avait été le cas pour le CNASEA, le Centre national pour l'aménagement des structures des exploitations agricoles, pour lequel le CIADT du 15 décembre 1997 a confirmé l'engagement de délocalisation à Limoges. Cet engagement avait été pris plusieurs années auparavant, mais il n'avait connu aucun début de concrétisation.
Lors de ce CIADT de 1997, les grands principes d'une politique équilibrée d'implantation des emplois publics ont été précisés. Parmi ceux-ci figurent la concertation renforcée, l'accompagnement social juste, cohérent et lisible, et la constitution de pôles de compétences.
C'est en s'appuyant sur ces principes et sur le rapport de M. Jean-Paul Lacaze que ce CIADT a invité plusieurs organismes, dont la SONACOTRA, à soumettre à leurs instances dirigeantes un projet de réimplantation de leur siège à Saint-Denis pour conforter le pôle d'administration sociale qui y a été constitué.
Je comprends cependant tout à fait votre inquiétude. Vous attendez en effet que de nouveaux organismes s'implantent à Mantes-la-Jolie pour contribuer à diminuer les difficultés auxquelles cette ville est confrontée.
Je tiens en tout état de cause à vous faire part de ma disponibilité pour examiner avec vous les différentes possibilités.
A Mantes-la-Jolie comme à Saint-Denis, les taux de chômage sont très élevés et les difficultés sont très importantes. Le Gouvernement auquel j'appartiens y attache évidemment une attention toute particulière, et il est prioritaire pour mon ministère de faire en sorte que les équipements soient répartis de façon homogène, équitable à l'est comme à l'ouest de Paris, au nord comme au sud.
Notre travail consiste en l'occurrence à constituer des pôles d'excellence, des pôles de compétences qui soient cohérents, fonctionnels, économes des fonds publics.
Je suis sûre que vous partagez cette ambition avec moi et je vous confirme que je me tiens à votre disposition pour travailler avec vous aux solutions qui pourraient permettre de répondre aux difficultés spécifiques de votre ville.
M. Dominique Braye. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Braye.
M. Dominique Braye. Madame le ministre, il est inutile de vous faire part de notre déception à l'égard d'une décision que nous sentions venir depuis un certain temps : la délocalisation de la SONACOTRA se fera non pas à Mantes-la-Jolie mais à Saint-Denis.
Nous estimons quant à nous que la décision de délocalisation avait été prise par le CIADT de 1997 - je ne partage donc pas votre analyse - comme en témoignent les « bleus » des réunions de ces comités interministériels.
Je souligne l'inquiétude et la déception de tous les élus locaux de la région mantaise. Manifestement, malgré les efforts de l'Etat et de nos autres partenaires, le département et la région, pour l'instant, cette région, que tout le monde connaît pour ses problèmes économiques et sociaux, ne fait malheureusement qu'enregistrer des départs et aucune arrivée.
Le transfert de la SONACOTRA à Saint-Denis marque le non-respect du principe de continuité de la part d'un Gouvernement par rapport aux décisions prises par le gouvernement précédent.
Par ailleurs, ce transfert traduit - vous ne m'empêcherez pas de le dire - la victoire de la technocratie et de l'administration centrale sur le politique parce que la décision qui avait été prise à l'occasion du CIADT d'Auch était manifestement une volonté politique forte.
Peut-être cette décision allait-elle à l'encontre des désirs du personnel qui ne souhaitait pas s'expatrier ? Mais n'est-ce pas le propre de toute délocalisation !... Je regrette que le Gouvernement ait cédé à ces pressions qui n'ont rien à voir avec le respect des principes régissant l'aménagement du territoire.

AVENIR DE LA CAISSE NATIONALE DE RETRAITES
DES AGENTS DES COLLECTIVITÉS LOCALES (CNRACL)

M. le président. La parole est à M. Barraux, auteur de la question n° 60, adressée à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.
M. Bernard Barraux. Ma question concerne la situation financière de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales, mieux connue sous l'appellation barbare de CNRACL.
Malgré un rapport démographique relativement favorable, de l'ordre d'un retraité pour trois actifs, la Caisse risque de connaître des difficultés financières grandissantes. Ce phénomène est la conséquence directe de la participation de la CNRACL au mécanisme de compensation entre les régimes de base de la sécurité sociale et au système de « surcompensation » liant les régimes spéciaux de retraite entre eux.
Ainsi, s'agissant de la compensation entre régimes de base, la Caisse est contributrice à hauteur d'environ 10 milliards de francs. Quant à la « surcompensation », elle est constituée à 53 % par le versement de la CNRACL.
Au total, les versements de cette dernière s'élevaient donc, en 1997, à 19,5 milliards de francs, soit le tiers des recettes du régime et près de 50 % du montant des prestations servies.
Des solutions à caractère tout à fait exceptionnel ont permis jusqu'ici de maintenir le fragile équilibre financier de la Caisse.
L'année dernière, l'Etat a eu recours à la mobilisation d'une partie des réserves structurelles du fonds des allocations temporaires d'invalidité.
Pour 1998, la loi de financement de la sécurité sociale prévoit la possibilité d'un recours à l'emprunt dans la limite de 2,5 milliards de francs.
Dans les deux cas, le Sénat a exprimé ses plus grandes réserves, estimant à juste titre qu'il s'agissait là de solutions à court terme.
D'après les prévisions dont nous disposons, le déficit de trésorerie de la CNRACL devrait atteindre 2,4 milliards de francs en 1999. En outre, le rapport démographique tendrait vers seulement 1,2 actif pour un retraité en 2015.
Dans ces conditions, il paraît indispensable que les modalités des compensations soient revues afin d'alléger les prélèvements qui pèsent sur la CNRACL, faute de quoi le problème de l'augmentation des cotisations risque de se poser à nouveau, augmentation qui serait particulièrement inopportune, voire injuste, alors que les charges globales qui pèsent sur les collectivités locales connaissent une progression continue depuis plusieurs années.
Monsieur le ministre, nous attendons donc des solutions concrètes et durables. Nous aimerions savoir sur quelles hypothèses travaille actuellement le Gouvernement.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Le Gouvernement est particulièrement sensible aux préoccupations des élus et des fonctionnaires des collectivités locales quant à la situation de la CNRACL.
Il a veillé à ne pas augmenter les charges des collectivités locales en ce domaine. En effet, pour l'année 1998, le Gouvernement s'est engagé à ce que le taux de la cotisation des employeurs à la CNRACL ne subisse pas de hausse.
En ce qui concerne les surcompensations, le souci du Gouvernement est de rechercher un équilibre entre les besoins financiers propres de la CNRACL et la nécessaire solidarité à l'égard des régimes spéciaux de retraite les plus gravement déficitaires.
Cette surcompensation vise en effet à compenser les disparités des rapports démographiques des différents régimes spéciaux de retraites. Elle repose sur des critères objectifs comme la pension moyenne servie par ces régimes, leurs effectifs de pensionnés de plus de soixante ans ainsi que la capacité contributive de leurs cotisants.
Elle ne concerne pas seulement la CNRACL. Elle concerne aussi l'ensemble des régimes spéciaux, y compris celui des pensions de l'Etat, qui apporte à ce dispositif une contribution importante.
Il faut également rappeler que les difficultés financières de la CNRACL ne proviennent pas uniquement des surcompensations ; elles proviennent également de la dégradation du rapport démographique de cette Caisse. La montée en charge de cette dernière a, en effet, conduit à ce que le rapport cotisants - retraités, qui était de 3,59 en 1990, ne soit plus que de 2,88 en 1996. On sait que cette évolution défavorable ira en s'accentuant.
A la fin de l'exercice 1998, la CNRACL devrait disposer de 1,4 milliard de francs de réserves, en comptant les réserves du fonds d'action sociale, qui s'élèvent à 550 millions de francs.
Le Gouvernement, qui comprend votre souci, ne fera pas l'économie - il y est d'ailleurs tout à fait déterminé - d'une mise à plat en 1998 de cette pension pour étudier les conditions dans lesquelles l'équilibre financier de la CNRACL peut être garanti à plus long terme, car nous ne pouvons plus, en effet, nous contenter de solutions à court terme.
M. Bernard Barraux. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Barraux.
M. Bernard Barraux. Je vous remercie, monsieur le ministre, des précisions que vous m'avez données.
Je ferai une simple petite remarque, car je n'ai pas de solution miracle à proposer.
L'évolution de la situation démographique est connue. Le rapport démographique, comme je le disais tout à l'heure, a même été calculé pour 2015. Quant au déficit de trésorerie de la CNRACL, il va encore s'aggraver. Tout le monde est pleinement conscient de la situation.

Les mécanismes de compensation et de surcompensation reviennent, jusqu'à maintenant, à déshabiller Pierre pour habiller Paul, comme on dit chez nous. Il faudrait tout de même parvenir à une certaine modération des prélèvements qui pèsent sur la Caisse afin de garantir l'équilibre financier de celle-ci à long terme.

RÉMUNÉRATIONS COMPLÉMENTAIRES DES AGENTS
DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

M. le président. La parole est à M. Hoeffel, auteur de la question n° 117, adressée à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.
M. Daniel Hoeffel. Ma question comporte trois volets.
Premièrement, les régimes indemnitaires mis en place par certaines collectivités avant l'entrée en vigueur de la loi du 26 janvier 1984 peuvent-ils concerner tous les agents de ces collectivités, titulaires ou non titulaires, et cela indépendamment de la date de leur recrutement, qu'elle soit antérieure ou postérieure au 26 janvier 1984 ?
Deuxièmement, compte tenu des inégalités pouvant exister entre les agents des diverses collectivités, serait-il possible de régulariser la situation des collectivités qui ont institué des primes de fin d'année après l'entrée en vigueur de cette loi de 1984 ?
Troisièmement, enfin, les établissements publics de coopération intercommunale créés postérieurement pourraient-ils profiter de cette réforme pour mettre en place un complément de rémunération ?
L'interprétation des dispositions législatives en vigueur a été, à la fin de 1997, variable selon les zones géographiques. A l'occasion d'une question sur ce sujet, vous aviez bien voulu préciser antérieurement, et je vous en remercie, monsieur le ministre, qu'il était envisagé de clarifier la rédaction des textes en vigueur afin de lever les ambiguïtés portant sur les agents qui peuvent bénéficier de ces compléments de rémunération.
Cette clarification vous paraît-elle possible, ce qui serait évidemment souhaitable, avant la fin de 1998 ? Se fera-t-elle par le biais de la proposition de loi Grignon, déposée sur le bureau du Sénat, ou d'un amendement dont vous accepteriez la discussion à l'occasion de l'examen du projet de loi relatif aux collectivités territoriales que le Gouvernement envisage de déposer au printemps de 1998 ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Monsieur le sénateur, voilà quelques mois, répondant à une question portant sur le même sujet, j'avais effectivement laissé entendre qu'il serait procédé, vers la fin de l'année 1997, à une clarification, mais elle n'a pas été aussi complète que vous le souhaitez.
Toutefois, un pas a été accompli. En effet, l'article 70 de la loi du 16 décembre 1996 relative à l'emploi dans la fonction publique et à diverses mesures d'ordre statutaire, article issu d'un amendement parlementaire, a remplacé le troisième alinéa de l'article 111 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale.
Comme le révèlent les débats parlementaires, cette nouvelle rédaction a eu pour objet de répondre à deux types de difficultés précédemment rencontrées par les collectivités dans l'attribution d'avantages indemnitaires à leurs fonctionnaires sur la base des situations antérieures à l'intervention du statut de la fonction publique territoriale.
Cela a deux conséquences.
D'une part, à compter de la loi du 16 décembre 1996, les compléments de rémunération collectivement acquis ne peuvent être valablement maintenus que si les collectivités et établissements les intègrent dans leur budget. Cette modification répond à un objectif de clarification des comptes des collectivités locales compte tenu des difficultés suscitées par le recours à des associations et des risques qu'il peut comporter à l'égard notamment de la gestion de fait.
D'autre part, le caractère propre des compléments de rémunérations visés par l'article 111, s'agissant d'avantages collectivement acquis constitués avant la mise en place du statut de la fonction publique territoriale, justifie que le maintien s'effectue par exception à la limite prévue par référence aux corps de l'Etat par l'article 88 de la loi du 26 janvier 1984 précitée et le décret du 6 septembre 1991 pris pour son application.
Ces avantages présentent, de par la loi, un caractère collectif. Le champ d'application de l'article 111, alinéa 3, de la loi du 26 janvier 1984, s'agissant de la nature des avantages et des bénéficiaires, demeure donc inchangé tel qu'il a été précisé antérieurement par le ministère et la jurisprudence. Autrement dit - il faut être clair - il concerne, quelle que soit leur date de recrutement, l'ensemble des agents des collectivités qui ont institué ces avantages avant l'entrée en vigueur de la loi du 26 janvier 1984 ; c'est le revers de la médaille.
En conséquence, les collectivités qui n'avaient pas créé ce type d'avantages avant l'entrée en vigueur de la loi du 26 janvier 1984 ne peuvent pas, sur le fondement de l'article 111 de la loi précitée, accorder ces avantages ayant le caractère de complément de rémunération à leurs fonctionnaires.
Toutefois - et c'est là l'élément nouveau - la publication du décret du 26 décembre 1997 portant création d'une indemnité d'exercice des missions des préfectures au profit de fonctionnaires des différentes filières présentes dans les préfectures autorise, en élargissant le champ indemnitaire des personnels de préfecture, les assemblées délibérantes des collectivités à augmenter les limites des régimes indemnitaires de leurs propres fonctionnaires, puisqu'elles peuvent transposer les mêmes avantages au profit de leurs personnels. Cette possibilité est désormais ouverte aux établissements publics de coopération intercommunale, alors même qu'ils n'entrent pas obligatoirement dans le champ de l'article 111, notamment lorsqu'ils sont de création récente.
C'est une piste à suivre pour essayer d'améliorer la situation et de réduire les disparités que vous avez relevées et dont l'existence ne peut être contestée.
La réflexion est toujours ouverte, mais je voulais vous faire part de cette possibilité offerte par le décret de décembre 1997.
M. Daniel Hoeffel. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Hoeffel.
M. Daniel Hoeffel. Je vous remercie, monsieur le ministre, de m'avoir apporté une information complémentaire par la mention du décret de décembre 1997.
Il serait toutefois opportun que, dans le courant de l'année 1998, à l'occasion de la discussion d'un prochain texte, les dernières ambiguïtés soient levées de façon que toutes les collectivités puissent, dès la fin de 1998, envisager des compléments de rémunération sans risquer de voir leurs délibérations remises en cause.
M. Jacques Oudin. Très bien !

TARIF AÉRIEN SUR LA LIGNE AVIGNON-PARIS

M. le président. La parole est à M. Dufaut, auteur de la question n° 121, adressée à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.
M. Alain Dufaut. Monsieur le ministre, je voudrais aujourd'hui attirer votre attention sur le coût beaucoup trop élevé du billet d'avion Avignon-Paris. Je pense que nous devons détenir le record de France du prix rapporté aux kilomètres parcourus.
En effet, pour emprunter cette desserte régionale, il convient de débourser la somme de 2 354 francs pour un aller-retour alors que le même billet sur la ligne Marseille-Paris revient à 2 050 francs, soit environ 15 % de moins pour une distance supérieure d'à peu près 60 kilomètres.
La longueur insuffisante de la piste de l'aéroport Avignon-Caumont imposant des dérogations pour l'atterrissage de certains appareils justifiait le maintien de tarifs beaucoup plus élevés que sur l'aéroport de Marignane.
Cette particularité n'existe plus puisque des travaux destinés à allonger la piste de 200 mètres ont été réalisés récemment : ils ont été inaugurés voilà cinq mois environ.
C'est donc à bon droit que les collectivités locales et la chambre de commerce et d'industrie d'Avignon et de Vaucluse, dont l'apport financier a été considérable - 14 millions de francs - souhaitent ardemment qu'il s'ensuive une baisse importante des tarifs au profit des usagers de la ligne, particulièrement rentable pour Air France puisque des listes d'attente existent pratiquement pour chaque vol.
Dans cet objectif, le président de la chambre de commerce et d'industrie d'Avignon et de Vaucluse, M. Jean-Paul Bouisse, et moi-même avons rencontré les dirigeants d'Air France le 16 juillet 1997. Ces derniers ont refusé d'accéder à notre demande.
Aussi, monsieur le ministre, ne doutant pas un instant de votre attachement à l'aménagement de notre territoire, je vous serais reconnaissant de bien vouloir faire état de cette légitime requête auprès de la direction d'Air France et de l'inciter, si possible, à remédier rapidement à cette situation qui, je l'avoue, est devenue tout à fait intolérable pour les Avignonnais et les Vauclusiens utilisateurs de ces vols.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le sénateur, il convient de rappeler, tout d'abord, que, en vertu des dispositions du règlement CEE n° 2409/92 du Conseil du 23 juillet 1992 sur les tarifs de passagers et de fret des services aériens, les transporteurs aériens communautaires sont libres de pratiquer la politique tarifaire qui leur semble la plus adaptée commercialement aux liaisons qu'ils exploitent. Ces dispositions sont applicables à l'intégralité des liaisons intérieures à la France depuis le 1er janvier 1996, date d'expiration de la convention conclue entre l'Etat et la compagnie Air Inter, à l'exception des tarifs pratiqués sur les liaisons où des obligations de service public tarifaires ont été imposées.
Ce règlement communautaire prévoit toutefois des mesures permettant aux Etats de refuser les tarifs excessivement élevés ou d'arrêter des baisses de tarifs, importantes et répétées, dommageables à l'ensemble de la profession. Force est de constater que, même si l'on observe des différences de niveaux entre la structure tarifaire de la liaison Paris-Avignon et celle d'une liaison proche Paris-Marseille, exploitée également par la compagnie Air France, les tarifs appliqués sur la liaison Paris-Avignon ne peuvent relever du domaine d'application de ces mesures de sauvegarde.
En effet, la différence de niveaux tarifaires entre les liaisons Paris-Avignon et Paris-Marseille provient, pour l'essentiel, d'un coût d'exploitation supérieur.
La mise en place de tarifs plus bas que ceux qui sont pratiqués actuellement sur la liaison Paris-Avignon ne pourrait s'envisager qu'en imposant des obligations de service public comportant un volet tarifaire ; je reviendrai sur cette question.
Les conditions requises pour l'édiction d'obligations de service public figurent, vous le savez, dans l'article 4 du règlement n° 2408/92 concernant l'accès des transporteurs aériens communautaires aux liaisons aériennes intracommunautaires.
La proximité des aéroports de Nîmes et de Marseille, où sont proposés des services aériens permanents et fréquents à destination et en provenance de Paris-Orly permet de répondre dans des conditions acceptables aux besoins de transports entre la région d'Avignon et Paris.
Il apparaît que les conditions imposées par le règlement communautaire ne peuvent être remplies pour procéder à l'édiction d'obligations de service public sur la liaison aérienne Avignon-Paris-Orly.
Considérons par ailleurs qu'avec le TGV la région d'Avignon dispose de liaisons efficaces, régulières et confortables, non pas seulement avec Paris d'ailleurs, mais avec Lyon, Marseille et, au-delà, je pourrais même dire avec Lille.
Il appartient donc aux transporteurs aériens opérant sur cette liaison de prendre en compte le volume de passagers qui semble connaître une évolution intéressante, comme c'est le cas des différents modes de transports sur l'ensemble du pays, pour rechercher le meilleur équilibre entre l'exploitation commerciale et les besoins de la clientèle, en intégrant bien évidemment les possibilités opérationnelles nouvelles résultant de l'allongement de la piste.
Bien entendu, monsieur le sénateur, je ferai état de votre requête aux responsables d'Air France.
M. Alain Dufaut. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Dufaut.
M. Alain Dufaut. Monsieur le ministre, au-delà de l'exemple d'Avignon, c'est, vous l'aurez compris, la situation des petits aéroports de province face à la concurrence des grands aéroports qui est en cause.
Si l'on veut conduire une véritable politique d'aménagement du territoire, il faut s'efforcer de réduire les déséquilibres qui portent atteinte au bon fonctionnement des aéroports de province.
Certes, monsieur le ministre, Avignon est située entre Marignane et Nîmes et, dans quelques mois, le TGV nous mettra à deux heures trente-cinq de Paris. Nous n'en restons pas moins attachés au maintien de notre aéroport, qui correspond à un véritable besoin. En effet, il fonctionne à plein rendement et les appareils assurant la liaison entre Avignon et Paris sont toujours pleins.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je le sais.
M. Alain Dufaut. Nous souhaitons bénéficier d'un tarif inférieur qui nous replacerait dans une situation de concurrence avec l'aéroport de Marignane. Il n'est pas normal que les utilisateurs de l'aéroport d'Avignon paient 15 % de plus que les utilisateurs de l'aéroport de Marignane, situé 60 kilomètres plus loin.

RYTHMES SCOLAIRES

M. le président. La parole est à M. Sérusclat, auteur de la question n° 141, adressée à M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
M. Franck Sérusclat. Madame la ministre, vous avez engagé, je le sais, de nombreux chantiers, importants et diversifiés, qui marqueront, selon moi, l'évolution scolaire de façon durable. Aussi ai-je quelques scrupules à prendre de votre temps pour évoquer les rythmes scolaires.
Il me semble cependant qu'il y aurait aujourd'hui une réflexion à mener sur les rythmes scolaires, mais il conviendrait auparavant de bien définir le sujet sur lequel porterait cette réflexion.
En effet, la notion de rythmes scolaires porte sur trois grands secteurs.
Il s'agit d'abord des rythmes annuels. Nous vivons encore sous la conception de Jules Ferry, alors que la France était essentiellement rurale. Les options qui ont été prises alors garantissaient aux enfants la possibilité de travailler au moment de la moisson et des vendanges. On a également tenu compte à cette époque des fêtes religieuses car, si Jules Ferry voulait arracher l'enseignement à la religion, il n'était pas hostile aux manifestations de celles-ci.
Aujourd'hui, une discussion est engagée sur ce rythme annuel. Le monde du tourisme tient à conserver la répartition actuelle pour des raisons commerciales. Le monde des enseignants y tient aussi, et l'on peut dire que l'existence de vacances importantes en cours ou en fin d'année est justifiée dans la mesure où les enseignants, et plus particulièrement les professeurs des écoles, sont soumis à de multiples difficultés, en tout cas à des atteintes psychologiques, quand ce n'est pas à des manifestations de violence.
Est-ce à cet aspect des choses que vous pensez quand vous parlez des rythmes scolaires ?
D'un autre côté, il serait peut-être intéressant d'envisager une conception de la vie scolaire calquée sur la vie civile.
Tous les conseillers municipaux savent combien il est difficile de faire coïncider l'annualité budgétaire avec le découpage en années scolaires.
En d'autres pays d'Europe, l'articulation en deux semestres répartie sur l'année civile est fréquente.
J'en viens au rythme de la semaine.
Pendant de longues années, le jeudi fut jour de repos ; on est passé au mercredi. Le samedi est devenu une demi-journée de repos, tout au moins pour la formation des enseignants. Petit à petit, le travail a été supprimé le samedi pour harmoniser le travail scolaire avec la vie des salariés, la plupart d'entre eux disposant du samedi et du dimanche comme jours de repos.
Aujourd'hui, dans certains endroits, on envisage la semaine de quatre jours, pour une semaine de quatre jours et demi ailleurs.
En l'occurrence, il faut tenir compte de la capacité d'attention et d'éveil de l'enfant. La fraction de temps scolaire ne doit pas être longue au point que l'enfant, trop fatigué, n'en profite pratiquement pas pour apprendre quelque chose.
En ce domaine particulier, des décisions ministérielles seraient nécessaires, pour organiser la semaine sur quatre jours et demi, par exemple : lundi, mardi, mercredi matin, jeudi et vendredi ; cette solution me semble la plus équilibrée.
Enfin, il y a les rythmes du temps périscolaire. Autrefois, quand il y avait des devoirs, ce temps était utilisé par l'étude surveillée. Or, en principe, il n'y a plus de devoirs, le temps périscolaire pourrait donc être organisé de façon à offrir à l'enfant des activités dans lesquelles il trouve des centres d'intérêts originaux en relation avec l'activité scolaire. Cela fait l'objet d'une expérience à Saint-Fons - expérience au sujet de laquelle je vous ai envoyé quelques documents, madame la ministre - mais aussi à Epinal : toutes deux montrent que l'on peut donner ainsi à l'enfant des chances de trouver un secteur d'activités dans lequel il a envie d'exceller. De retour à l'école, il apprend peut-être plus facilement à lire.
Voilà l'essentiel des points sur lesquels je souhaitais vous interroger et recueillir des précisions quant à vos propres réflexions. J'y attache, en effet, beaucoup d'importance étant donné les initiatives que vous avez prises depuis que vous êtes en charge de ce secteur, initiatives qui me paraissent toutes bienvenues.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Ségolène Royal, ministre délégué chargé de l'enseignement scolaire. Monsieur le sénateur, je vous remercie de votre question. Il s'agit d'un sujet que vous connaissez parfaitement, et je ne suis pas certaine que ma réponse aura autant de densité et de richesse que le propos que vous venez de tenir.
Les expériences que vous avez menées à Saint-Fons vous ont permis de saisir toute la portée de l'aménagement des rythmes scolaires, et vous avez fort bien souligné combien le problème était complexe, à la mesure de la complexité même de l'enfant. Le problème est complexe aussi parce qu'il faut prendre en compte l'ensemble de la journée de l'enfant : à la fois ce qui se passe à l'intérieur de l'école et ce qui se passe en marge de l'école, c'est-à-dire les activités périscolaires.
Selon les spécialistes des « biorythmes », même s'ils ne sont pas tous d'accord entre eux, certaines heures sont plus propices à l'apprentissage des savoirs et d'autres aux activités culturelles, sportives ou éducatives complémentaires.
Nous avons repris ce chantier à bras-le-corps, en liaison très étroite avec le ministère de la jeunesse et des sports et celui de la culture. Aux conflits sur le terrain entre ces deux ministères, j'essaie de substituer un travail en commun, de manière que les efforts des uns et des autres puissent converger.
Plusieurs réunions se sont déjà tenues au ministère de l'éducation nationale en vue d'une définition commune des objectifs que l'Etat doit viser pour que les moyens publics soient utilisés au mieux, même si une certaine liberté d'action doit être permise sur le terrain.
Un débat, par exemple, s'est engagé sur l'opportunité d'un développement de la semaine de quatre jours. Mon souci, à cet égard, est de laisser une relative liberté aux initiatives locales, tout en faisant remarquer que ce n'est pas nécessairement la meilleure solution pour les enfants.
Je me préoccupe plutôt de l'assouplissement de l'emploi du temps à l'intérieur de la journée, d'une meilleure harmonisation de la semaine et d'une réflexion sur les rythmes scolaires durant l'année, tendant à une régularisation de l'écart entre les différentes vacances scolaires, ainsi que de l'occupation des enfants pendant celles-ci.
Le dispositif sur lequel nous réfléchissons sera bientôt prêt. Bien entendu, les parlementaires et, au premier chef, ceux qui, comme vous, monsieur Sérusclat, sont en quelque sorte des spécialistes de cette question seront consultés.
Il s'agirait de mettre en place une sorte de modèle de contrat local d'éducation. Ce modèle indiquera les grandes lignes de ce que l'éducation nationale souhaite, dans l'intérêt des enfants. Il sera suivi d'un appel à projets dans l'ensemble des départements. Ainsi, nous ferons remonter les propositions des écoles qui veulent aller de l'avant en la matière.
Les emplois-jeunes dans les écoles primaires permettent déjà d'accélérer l'aménagement des rythmes scolaires dans certains établissements.
Je suis également soucieuse d'associer les collèges à cet aménagement parce que des besoins intenses sont exprimés par les élèves, les parents et la communauté éducative des collèges. La nouvelle organisation instituée ici ou là à l'école primaire doit pouvoir s'appliquer aussi au collège, où les élèves sont également confrontés à une certaine lourdeur de la charge de travail.
Tel est, monsieur le sénateur, l'état actuel de notre réflexion sur ce sujet.
M. Franck Sérusclat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Sérusclat.
M. Franck Sérusclat. Je vous remercie, madame la ministre, de cet exposé, même s'il n'apporte pas d'indication précise sur l'issue des travaux qui sont actuellement menés.
Permettez-moi de formuler une observation.
A mon sens, l'Etat ne doit pas laisser une trop grande liberté locale d'organisation des rythmes scolaires. En effet, il arrive que les enfants d'une même famille fréquentent des écoles différentes ; si les rythmes scolaires observés dans ces différentes écoles sont sensiblement différents, l'organisation de la vie de famille devient très difficile, voire impossible.
Il faudrait donc que, au terme des discussions qui sont ou vont être menées, une décision équilibrée soit prise au niveau national, de façon que les familles ne rencontrent pas des problèmes insurmontables dans l'organisation de leurs vacances ou de leur vie en général.
J'attends avec impatience les résultats des discussions sur le point qui me paraît le plus important, à savoir la répartition annuelle des temps de vacances. La durée des grandes vacances d'été a été réduite, et c'est une bonne chose. J'ai en effet vécu une époque où l'on cessait toute activité scolaire entre le 1er juillet et le 1er octobre : beaucoup d'élèves oubliaient ce qu'ils avaient appris, parfois avec beaucoup de difficultés, durant l'année scolaire.
En tout cas, je vous remercie, madame la ministre, de l'intérêt que vous portez à cette question, que je continuerai de suivre avec beaucoup d'attention.

APPLICATION DE LA LOI
SUR LES PRÉLÈVEMENTS D'ORGANES

M. le président. La parole est à M. Pastor, auteur de la question n° 152, adressée à M. le secrétaire d'Etat à la santé.
M. Jean-Marc Pastor. Monsieur le secrétaire d'Etat, ma question concerne la législation relative aux prélèvements d'organes et, plus particulièrement, aux prélèvements post mortem.
Je rappelle que la loi du 22 décembre 1976, dite « loi Caillavet », a défini les modalités du principe du consentement résumé, qui, depuis, prévaut dans notre pays. Cela signifie que toute personne qui, de son vivant, n'a pas fait connaître son opposition au prélèvement d'organes est considérée comme un donneur potentiel. De ce fait, le prélèvement peut être effectué sans qu'on ait à recueillir l'autorisation de quiconque, sauf s'il s'agit du cadavre d'un mineur ou d'un incapable ; dans ce cas très précis, l'autorisation du représentant légal est requise.
Notre système diffère de celui dit du « consentement explicite », qui s'applique notamment en Grande-Bretagne et selon lequel toute personne doit, de son vivant, exprimer son accord concernant des prélèvements.
Sans remettre en cause le principe qui prévaut en France, les lois sur la bioéthique, qui ont été adoptées en 1994 et sont intervenues dans un contexte de pénurie croissante de greffons, due pour une grande part à l'opposition des familles, ont, en conséquence, prévu la création d'un registre national informatisé des refus.
Ce n'est qu'au début de novembre 1997 que l'Etablissement français des greffes a lancé une campagne d'information sur la mise en place de ce registre.
Toutefois, on peut légitimement se poser la question de l'utilité d'un tel registre. En effet, si le nom du défunt ne figure pas dans le registre, l'équipe médicale pourra continuer, comme par le passé, à demander l'accord de la famille et devra respecter sa décision. Je souhaite, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous nous précisiez votre position sur ce sujet.
Par ailleurs, considérant, d'une part, la pénurie de greffons et le nombre croissant de receveurs en attente, et, d'autre part, les difficultés psychologiques que connaissent les familles confrontées à l'urgence des décisions à prendre, le lancement d'une vaste campagne d'information et de sensibilisation sur la législation en vigueur me paraît actuellement plus que souhaitable.
Pourriez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, nous faire connaître vos intentions à cet égard ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé. Monsieur le sénateur, vous avez raison de souligner combien cette question est délicate.
Ainsi que vous l'avez rappelé, la loi de bioéthique du 29 juillet 1994 a adopté le principe du consentement présumé. Ainsi, toute personne est considérée comme consentant au don d'éléments de son corps après sa mort, en vue de greffe, si elle n'a pas manifesté son opposiiton de son vivant. La loi donne donc le droit de décider personnellement en la matière, sauf en ce qui concerne les mineurs et les majeurs protégés, pour lesquels le consentement écrit de chacun des titulaires de l'autorité parentale ou du représentant légal est requis.
En conséquence, si une personne veut, de son vivant, s'opposer à un tel prélèvement, elle peut le manifester de trois manières : soit par inscription sur le registre national des refus, dont la création est prévue par cette même loi et qui devrait être mis en oeuvre en juin 1998 - une campagne sera lancée auparavant - par l'Etablissement français des greffes ; soit par volonté exprimée par écrit, sur papier libre, sur une carte ou tout autre support ; soit par information orale donnée à sa famille, et l'on perçoit immédiatement les problèmes que cela soulève.
La loi prévoit cependant également que le médecin est tenu de s'efforcer de recueillir le témoignage - et non la décision - de la famille. Mais vous savez dans quelles conditions la famille est généralement amenée à répondre : à l'hôpital, souvent après un accident, alors qu'elle est sous le choc et au comble du chagrin.
Monsieur le sénateur, vous avez également évoqué la pénurie de greffons et il est vrai qu'environ 350 personnes décèdent chaque année en France en attente d'une greffe.
Toutefois, il convient de souligner que, depuis deux ans, la liste d'attente ne s'accroît pas ; nous avons même le sentiment que, petit à petit, elle a tendance à s'amenuiser. Bref, la situation est en train de changer.
A titre d'information, je vous signale que, en 1996, il a été procédé à environ 3 000 transplantations : 408 ont concerné le coeur, 22 le coeur et les poumons, 81 les poumons seuls, 646 le foie, 1 644 les reins et 55 le pancréas. En 1997, on a enregistré environ 40 transplantations supplémentaires.
Si l'on veut bien se souvenir des événements dramatiques qui, en 1992, ont conduit à une chute inquiétante des dons d'organe, on conviendra que cet acte fondamentalement noble du don d'organe doit reposer sur la confiance : confiance de l'ensemble des Français vis-à-vis de nos équipes médicales et de notre système de greffe, qui est excellent.
C'est parce qu'on n'avait pas pris le temps d'écouter une famille - je fais allusion à l'affaire Damien - que l'émotion avait saisi notre pays. A l'époque, j'étais ministre de la santé et je me suis souvent posé la question de savoir si j'avais eu raison ou non de recommander dans la loi de bioéthique, qui était alors en discussion, une révision de notre dispositif d'information et de consentement.
Plusieurs faits militaient en faveur d'une révision.
Tout d'abord, dans d'autres pays, le système de l'inscription sur un registre, soit pour accepter, soit pour refuser le prélèvement, était bien enraciné et fonctionnait parfaitement.
Par ailleurs, le nombre de patients en attente de greffe augmentait sensiblement ; s'agissant de la greffe de cornée, la chute des dons était spectaculaire.
A cela s'ajoutait l'absence de contrôle de sécurité sanitaire. Alors même que certains virus nous causaient les plus graves préoccupations, dans la pratique, des prélèvements étaient réalisés sans qu'on ait procédé à d'élémentaires contrôles virologiques.
Par-dessus tout, l'affaire Damien avait soulevé une profonde émotion dans notre pays : la famille avait protesté contre un prélèvement excessif et, de manière tout à fait scandaleuse, elle s'était vu adresser la facture du prélèvement !
Dans un domaine aussi sensible, la plus grande attention est requise. C'est pourquoi la mise en place du registre national des refus me paraît extrêmement importante. Ce registre permettra à ceux qui le souhaitent - une petite fraction de la population - d'exprimer clairement son opposition, ce qui est tout à fait respectable. Ainsi, tout sera parfaitement clair. En outre, l'installation du registre va fournir l'occasion d'apporter à chacun une information en dehors de tout contexte dramatique.
Voilà pourquoi je pense qu'il faut maintenir le registre national des refus.
Je vous rappelle que, avant l'été, dans toutes les pharmacies, sera présenté un document très précis et très clair sur les dons et les greffes d'organes. Des informations complémentaires pourront être recueillies auprès du pharmacien.
Dans chaque pharmacie française, des fiches seront mises à disposition. Celles qui auront été remplies seront centralisées à l'Etablissement français des greffes, et, grâce à une transmission électronique, les hôpitaux pourront savoir si telle ou telle personne est inscrite sur le registre, dans le respect, bien sûr, de la confidentialité.
L'Etablissement français des greffes a développé un plan triennal d'éducation sanitaire. La campagne a débuté en 1996 par les établissements de santé publics et privés avec une information ciblée sur les professionnels hospitaliers que nous avons voulu viser en premier. Cette campagne s'est poursuivie en 1997 dans le secteur des professionnels de la santé libérale. En 1998 enfin, une grande action nationale destinée au grand public est prévue. Trois cas de refus seront possibles : le refus du don, le refus des prélèvements scientifiques et le refus des autopsies. Il n'y aura envoi d'une fiche à l'Etablissement français des greffes qu'en cas de refus.
L'attention du secrétaire d'Etat à la santé avait également été attirée sur la diminution du nombre des autopsies, et sur la position très particulière qu'avait prise le professeur Claude Got. Nous en avons donc tenu compte. Le Conseil d'Etat avait d'ailleurs demandé que ces trois cas de refus, don, prélèvement scientifique et autopsie, soient explicitement précisés.
Votre légitime préoccupation, monsieur Pastor, est donc aussi celle du Gouvernement, qui soutient financièrement la campagne d'information. Je prendrai d'ailleurs la parole sur ce sujet lors du lancement de cette campagne dans le public.
Enfin, et l'essentiel est peut-être là, si la campagne se révèle insuffisante et que le fichier des refus ne fonctionne pas de manière satisfaisante, il nous sera possible d'en tenir largement compte lors de la révision de la loi sur la bioéthique que nous allons entreprendre en 1999 et à laquelle, bien entendu, la représentation nationale sera associée.
M. Jean-Marc Pastor. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Pastor.
M. Jean-Marc Pastor. Monsieur le secrétaire d'Etat, je tiens à vous remercier de vos propos, car ils apportent une réponse rassurante à cette délicate question.
La campagne d'information, qui ne fait que commencer, revêt une importance toute particulière, notamment à l'école où j'espère que, comme la campagne d'information sur le sida, elle sensibilisera les enfants et les convaincra de la nécessité de cet acte de solidarité qu'est le don d'organes. Ce pourrait être le début d'un vaste mouvement humanitaire.
Reste pour les équipes médicales - qui interviennent, vous l'avez rappelé à juste titre, à des moments particulièrement critiques et très sensibles pour les familles - la difficulté de faire ou non le choix de prélever un organe.
Certes, le registre de l'Etablissement français des greffes devrait les aider mais sa consultation sera-t-elle suffisamment rapide ?
Je me demande s'il ne faudrait pas que chacun de nous porte, par exemple sur sa carte d'identité, un signe distinctif afin de permettre aux équipes médicales d'intervenir immédiatement, sans faire de recherches.

REGIME DE LA TAXE D'HABITATION APPLICABLE
AUX RESIDENTS DES FOYERS DE TRAVAILLEURS

M. le président. La parole est à Mme Dieulangard, auteur de la question n° 79, adressée à M. le secrétaire d'Etat au logement
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Je souhaite attirer votre attention, monsieur le secrétaire d'Etat, sur les conséquences souvent inéquitables de l'application des règles de droit commun aux foyers de jeunes travailleurs en matière de taxe d'habitation.
La mission de ces foyers est d'offrir à certains jeunes des solutions d'hébergement et de logement afin de leur permettre d'accéder ensuite, en toute autonomie, à des logements individuels, et de leur assurer, si cela s'avère nécessaire, un accompagnement social individualisé durant cette période qui, souvent, est déterminante dans leur parcours d'insertion.
Il découle donc de la nature même de cette mission qu'il s'agit de séjours de courte durée, souvent inférieurs à une année.
En appliquant aux foyers le régime légal de la taxe d'habitation, c'est-à-dire en se fondant sur la seule date du 1er janvier pour déterminer l'assujetti, la réglementation fait donc abstraction de la durée effective du séjour et induit des inégalités de traitement entre les occupants, qui, souvent, ont de faibles ressources.
Les foyers tentent de trouver des solutions, certains en répartissant la taxe d'habitation entre l'ensemble des résidents. Cette option offre l'avantage de faire jouer une certaine solidarité entre les résidents. Elle présente toutefois l'inconvénient d'assujettir des personnes qui, en raison de ressources insuffisantes, seraient normalement exonérées.
On le voit, chaque solution présente ses propres imperfections. C'est pourquoi, monsieur le secrétaire d'Etat, il serait intéressant d'étendre l'exonération qui est aujourd'hui appliquée aux cités universitaires aux foyers de jeunes travailleurs.
Certes, ces structures sont de nature juridique différente. D'un côté, il s'agit d'établissements publics que l'on peut assimiler à des établissements d'assistance puisqu'ils interviennent en aide aux étudiants alors que, de l'autre, il s'agit le plus souvent d'établissements privés où cependant les collectivités locales, ainsi que les caisses d'allocations familiales, sont souvent parties prenantes.
Ajoutons que, dans les deux cas, l'objectif est identique : offrir un logement à des prix supportables à des jeunes dont les revenus souvent modestes ne permettent pas d'assumer la charge d'un loyer dans le parc privé.
Monsieur le secrétaire d'Etat, le logement s'impose de façon de plus en plus prépondérante comme un facteur essentiel de l'insertion de nos concitoyens dans notre société. Les foyers et les résidences sont donc les éléments d'une politique du logement qui se doit d'intervenir sur plusieurs fronts, sur celui de l'offre à proprement parler mais aussi sur celui de l'accompagnement social.
Ne serait-il pas possible, monsieur le secrétaire d'Etat, d'améliorer en leur faveur la réglementation en vigueur dans le domaine, ô combien délicat ! de la fiscalité locale ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement. Madame le sénateur, l'article 1407 du code général des impôts soumet à la taxe d'habitation les locaux meublés conformément à leur destination, occupés à titre privatif par des sociétés, des associations ou des organismes privés et qui ne sont pas retenus par l'établissement de la taxe professionnelle.
Les associations à but non lucratif, dont font partie les foyers de jeunes travailleurs, sont placées hors du champ d'application de la taxe professionnelle, en vertu de l'article 1447 du code général des impôts.
Le résident du foyer de jeunes travailleurs n'est passible de la taxe que lorsqu'il dispose d'une habitation ou d'un local imposable, c'est-à-dire lorsqu'il peut à tout moment s'y installer. Les résidents des foyers sont donc imposables à la taxe d'habitation lorsque la durée de leur séjour et les conditions d'occupation des locaux permettent de considérer qu'ils en ont la disposition privative.
La jouissance à titre privatif d'un local suppose qu'il y ait usage à titre personnel d'un logement distinct. Il en est de même lorsque l'occupation des logements est de courte durée.
En ce qui concerne l'extension du régime de droit commun au régime en vigueur pour les cités universitaires, il est vrai que les étudiants logés en résidence ou en cité universitaire ne sont pas soumis à la taxe d'habitation. Mais c'est parce que les cités universitaires sont des établissements publics d'assistance et qu'à ce titre elles sont exonérées de la taxe d'habitation.
Les résidents des foyers de jeunes travailleurs sont, eux, imposables à la taxe d'habitation dans les conditions de droit commun. Les exonérer de cette taxe sans dégrèvement entraînant compensation diminuerait sans contrepartie les ressources des collectivités locales, sauf à en transférer la charge sur les autres habitants.
Conformément à l'article 1415 du code général des impôts, la taxe d'habitation est établie pour l'année entière au nom de la personne qui a la disposition ou la jouissance d'un logement meublé au 1er janvier de l'année d'imposition, même si cette personne ne l'occupe effectivement qu'une partie de l'année.
Je concède qu'il s'agit d'une date de référence purement conventionnelle, mais, même si une personne ne loge plus dans la résidence qu'elle occupait au 1er janvier, elle loge sans doute ailleurs, et, là, elle n'est pas assujettie à la taxe professionnelle.
Par ailleurs, l'application de cette règle est heureuse, et même indispensable si l'on veut que les collectivités locales puissent disposer du produit fiscal qui résulte de l'application du taux d'imposition qu'elles ont voté aux bases qui leur sont notifiées en début d'année par les services fiscaux.
J'ajoute qu'une exonération des jeunes travailleurs logés en foyers créerait une inégalité à l'égard d'autres jeunes travailleurs logés isolément.
Cela étant, diverses dispositions permettent déjà d'exonérer et de dégrever de la taxe d'habitation des personnes de condition modeste et d'adapter la cotisation de taxe d'habitation aux capacités contributives des personnes, dispositions qui valent, bien sûr, pour les jeunes travailleurs.
Ces dégrèvements portent sur la fraction de la cotisation de taxe d'habitation qui, pour les impositions dues au titre de 1997, excède 2 066 francs. En 1998, les personnes disposant de très faibles revenus pourront bénéficier du dégrèvement total de la fraction de leur cotisation qui excède 1 500 francs au lieu de 2 066 francs. La loi de finances de 1998, que vous avez votée, madame le sénateur, a donc pris en compte les situations telles que celle que vous avez évoquée.
Enfin, les collectivités locales peuvent également participer à l'allégement des cotisations de taxe d'habitation en instituant un abattement en faveur des personnes dont le montant des revenus n'excède pas celui qui est fixé pour bénéficier du dégrèvement prévu à l'article 1414 A du code général des impôts, soit 43 550 francs pour la première part de quotient familial majoré de 11 650 francs pour chaque demi-part supplémentaire. Cet abattement est particulièrement favorable aux contribuables logés dans des foyers de jeunes travailleurs dont la valeur locative des logements est généralement faible.
Ces mesures permettent actuellement d'alléger sensiblement la cotisation de taxe d'habitation mise à la charge des intéressés.
Néanmoins, le Gouvernement conscient du poids de la taxe d'habitation pour les contribuables de condition modeste procédera, cette année, à une réflexion globale sur les conditions dans lesquelles cette taxe pourrait être aménagée.
Vos préoccupations seront bien entendu intégrées dans cette réflexion. Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Monsieur le secrétaire d'Etat, les missions des foyers de jeunes travailleurs ont évolué au fil de ces dernières années : de simples logeurs, ils sont devenus des partenaires dans l'insertion des jeunes qui est au centre des préoccupations du Gouvernement auquel vous appartenez. Sans prétendre régler l'ensemble des problèmes de chômage des jeunes, celui-ci a fait la preuve de sa détermination en la matière avec la loi sur les emplois-jeunes.
Or tous les intervenants sur le terrain perçoivent aujourd'hui l'importance du logement comme élément essentiel et déterminant de l'insertion des jeunes.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez rappelé les diverses possibilités d'allégements de la taxe d'habitation. La quasi-totalité de ces jeunes travailleurs seront exonérés de la taxe d'habitation.
Mais, monsieur le secrétaire d'Etat, l'administration a-t-elle bien réalisé tout le poids des formulaires que devront remplir les demandeurs d'exonération et des démarches qu'ils devront accomplir tant auprès des services fiscaux que des collectivités locales ?
Vous avez certes annoncé pour 1998 une réflexion concernant la fiscalité locale, donc la taxe d'habitation, en tenant compte des situations les plus modestes, mais ne serait-il pas utile de mener une réflexion spécifique pour le cas des foyers de jeunes travailleurs ?

TAUX DE TVA APPLICABLE
AUX TRAVAUX DE RÉNOVATION
DES MAISONS DE RETRAITE ET FOYERS-LOGEMENTS

M. le président. La parole est à M. de Menou, auteur de la question n° 132, adressée à M. le secrétaire d'Etat au logement.
M. Jacques de Menou. Monsieur le secrétaire d'Etat, c'est avec satisfaction que j'ai pris acte de votre décision de réduire le taux de TVA sur les travaux de réhabilitation des logements sociaux conventionnés de 20,6 % à 5,5 %. Cette demande ancienne des offices d'HLM permettra de limiter les hausses de loyers et de relancer le programme de réhabilitation.
Toutefois, ma question vise à obtenir une précision et une confirmation importantes : cette mesure concerne-t-elle bien aussi tous les établissements qui ont conclu des conventions avec l'Etat, ouvrant droit à l'aide personnalisée au logement, l'APL, tels que les foyers-logements, les maisons de retraite, les centres pour handicapés, quel que soit le propriétaire, qu'il s'agisse des organismes d'HLM, des collectivités locales, des associations agréées ou des centres communaux d'action sociale, les CCAS.
Mon expérience de président de l'OPAC-HLM du Finistère m'a conduit à me battre pour une politique de logement social en milieu rural. Allant sur le terrain depuis quinze ans, j'ai constaté en effet à quel point le logement pouvait constituer une arme d'intégration, contre la désertification rurale. Or, ce rôle social du logement est particulièrement manifeste avec les foyers-logements et les maisons de retraite, qui ont vu leur fonction se modifier depuis quelques années. La mise en place de services de maintien à domicile - aides-soignantes, infirmières et portage de repas - retarde l'entrée en établissement de personnes de plus en plus âgées et dépendantes.
Cette dépendance croissante des résidents impose de très strictes mises aux normes de sécurité, qui supposent des travaux coûteux. Il faut savoir que les services de sécurité assimilent les foyers-logements recevant des personnes dépendantes à des établissements accueillant du public de type U, c'est-à-dire relevant de la même réglementation que les hôpitaux.
Il serait donc logique que ces logements conventionnés pour personnes âgées et handicapées, essentiels à l'équilibre social, puissent bénéficier de la baisse de TVA annoncée. Votre collègue M. Sautter a déclaré que cette demande avait été satisfaite par une disposition budgétaire, dont les conditions d'application doivent être définies prochainement dans un décret en Conseil d'Etat. J'aimerais que vous m'en donniez confirmation définitive.
De plus, les établissements de foyers-logements, les maisons de retraite ou les centres pour handicapés non encore conventionnés à l'APL mais relevant de l'allocation logement ne pourraient-ils pas, à l'occasion de travaux de mise aux normes, être conventionnés à l'APL et ainsi être éligibles à cette réduction de TVA ? C'est une question de justice sociale dont doivent bénéficier ces établissements, au même titre que les établissements conventionnés. Je vous remercie par avance, monsieur le secrétaire d'Etat, de bien vouloir m'apporter une réponse sur ce point.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement. Monsieur le sénateur, vous avez appelé l'attention du Gouvernement sur des similitudes accrues entre les logements-foyers et les maisons de retraite sur le plan, d'une part, des personnes accueillies et, d'autre part, de la réglementation en matière de prévention des incendies. Votre souhait de faire bénéficier en conséquence ces différents types d'établissements d'un taux de TVA réduit appelle de ma part les éléments de réponse ci-après.
Il y a lieu d'indiquer que les logements-foyers ont été construits comme des bâtiments d'habitation et ils sont, pour un certain nombre d'entre eux, utilisés essentiellement pour des personnes âgées, comme vous l'avez vous-même précisé, de plus en plus dépendantes, soit qu'elles y aient vieilli, soit qu'elles y entrent plus tardivement.
Certaines commissions de sécurité souhaitent imposer dans les logements-foyers les prescriptions applicables aux établissements recevant du public de type sanitaire U. Pour les établissements existants, il convient d'avoir à l'esprit que la notion de « mise aux normes » en référence à une réglementation faite pour le neuf est la plupart du temps irréaliste, pour des raisons techniques et/ou financières. Elle n'a d'ailleurs pas de caractère réglementaire.
Il convient de rechercher les dispositions qui permettront d'adapter les logements-foyers à l'évolution de leur utilisation, dans le cadre de la réglementation.
J'ai prévu de réaliser, au cours de l'année 1998, un répertoire des difficultés qui sont rencontrées par les propriétaires et les gestionnaires lors de la mise en conformité demandée à la suite des visites périodiques des commissions de sécurité dans les logements-foyers pour personnes âgées, afin d'éviter l'application pour un trop grand nombre de foyers des prescriptions de type U.
De surcroît, tous les logements-foyers ne sont pas éligibles à un taux réduit de TVA. L'article 14 de la loi de finances pour 1998 prévoit l'application du taux réduit de TVA de 5,5 % aux travaux d'amélioration réalisés dans les seuls logements sociaux à usage locatif visés aux 2° et 3° de l'article L. 351-2 du code de la construction et de l'habitation, c'est-à-dire des logements conventionnés ouvrant droit à l'aide personnalisée au logement, l'APL. Ainsi, les logements-foyers non conventionnés, dont les occupants bénéficient de l'allocation de logement sociale, l'ALS, n'entrent effectivement pas dans le champ du dispositif.
En revanche, en application du 5° de l'article L. 351-2 du code de la construction et de l'habitation, les logements-foyers conventionnés peuvent être assimilés à des logements locatifs sociaux mentionnés aux 2° et 3° de l'article L. 351-2 dudit code.
En conséquence, comme l'avait fait M. Sautter, le secrétaire d'Etat au budget, je peux vous confirmer, monsieur le sénateur, que, à condition que le maître d'ouvrage soit l'un de ceux qui sont mentionnés à l'article R. 323-1 du code de la construction et de l'habitation, c'est-à-dire bénéficiaires de la PALULOS, la prime à l'amélioration des logements à usage locatif et à occupation sociale - organismes d'HLM ou collectivités territoriales - les travaux d'amélioration réalisés dans des logements-foyers ouvrant droit à l'APL peuvent bénéficier, à compter du 1er janvier 1998, de l'application du taux réduit de TVA à 5,5 %.
M. Jacques de Menou. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. de Menou.
M. Jacques de Menou. Monsieur le secrétaire d'Etat, je tiens à vous remercier des précisions que vous venez de m'apporter sur un dossier très important. En effet, nous sommes dans l'obligation de revoir le confort d'un certain nombre de maisons de retraite et de foyers-logements. C'est une nécessité pour les personnes qui y sont accueillies.
Si je comprends bien, le problème est aujourd'hui résolu pour tous les établissements qui sont conventionnés à l'APL, donc qui dépendent d'une collectivité locale ou d'un organisme d'HLM. En revanche, le problème reste entier pour ceux qui relèvent de l'ALS.
Je souhaiterais ouvrir la réflexion sur le point suivant : dans le cadre de travaux de rénovation nécessaires et obligatoires, on peut très bien admettre que des logements ou des foyers qui relevaient de l'ALS soient conventionnés à l'APL. Si le préfet accepte ce conventionnement à l'APL lors de la rénovation, ces travaux ne pourraient-ils pas bénéficier du taux réduit de la TVA ? Il est très important de passer de 20,6 % à 5,5 % car il s'agit de gros travaux. La démarche est alors totalement différente.

ÉVOLUTION DES PRÉLÈVEMENTS SOCIAUX
SUR LES INDEMNITÉS DES ÉLUS LOCAUX

M. le président. La parole est à M. Michel Mercier, auteur de la question n° 144, adressée à M. le ministre de l'intérieur.
M. Michel Mercier. La loi de financement de la sécurité sociale qui a été adoptée par le Parlement à la fin de l'année dernière a bien sûr des conséquences pour chacun d'entre nous.
Ma question concerne les conséquences de cette loi au regard de la situation indemnitaire des élus locaux.
Les élus locaux perçoivent des indemnités qui, depuis quelques années, sont soumises à l'impôt sur le revenu - ce qui est tout à fait normal - soit en les intégrant dans la déclaration des revenus, soit en recourant à un régime de prélèvement libératoire.
Mais la dernière loi de financement de la sécurité sociale va avoir des conséquences quant à la situation indemnitaire des élus locaux, en raison de la généralisation de la CSG, la contribution sociale généralisée, et des nouvelles règles relatives au paiement des allocations familiales.
L'indemnité des élus locaux va devoir supporter la CSG au nouveau taux. Jusque-là, il n'y a rien que de très normal. Cependant, le législateur s'est appliqué à faire en sorte que le changement du mode de financement de l'assurance maladie, c'est-à-dire le remplacement de la cotisation par la CSG, soit neutre pour l'assujetti, sauf lorsqu'il s'agit d'un produit d'épargne. Or, rien de particulier n'ayant été prévu pour les élus locaux, leur indemnité sera assimilée à un produit d'épargne. En outre, elle n'ouvrira aucun droit à l'assurance maladie.
S'agissant du calcul du plafond de ressources au-delà duquel les allocations familiales ne seront plus versées, les termes très généraux de l'article 19 de la loi de financement de la sécurité sociale ne permettent pas la non-prise en compte, pour le calcul de ce plafond, de l'indemnité que perçoit l'élu local pour remplir son mandat.
Par conséquent, un élu local, notamment le maire d'une petite commune, qui passe beaucoup de temps pour accomplir son mandat et qui n'est qu'imparfaitement défrayé à ce titre, pourra se voir supprimer les allocations familiales.
Lors du vote de la loi, les conséquences au regard de la situation indemnitaire des élus locaux n'en ont probablement pas été perçues.
Madame le ministre, quelles mesures le Gouvernement, désormais informé de cette situation, entend-il prendre pour que les jeunes élus locaux chargés de famille ou les mères de famille qui veulent s'engager dans la vie publique ne soient pas pénalisés par l'exercice de leur mandat dans leur vie quotidienne ?
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais tout d'abord présenter les excuses de mon collègue M. Chevènement, qui est retenu par son audition devant la commission des lois du Sénat.
Monsieur Mercier, la loi de financement de la sécurité sociale, adoptée par le Parlement le 2 décembre 1997, comporte des mesures dont la finalité est de concourir à l'équilibre financier des différentes branches de la sécurité sociale.
Les dispositions qui majorent les taux de la contribution sociale généralisée, la CSG, de même que celles qui subordonnent les allocations familiales à des conditions de ressources, contribuent à la réalisation de cet objectif.
Je rappelle que la mise en oeuvre d'un plafond de ressources pour le versement des allocations familiales est transitoire. Le Gouvernement préparera, comme la loi le prévoit, la réforme d'ensemble du système des prestations et des aides aux familles.
Par ailleurs, il faut souligner que la majoration du taux de la CSG doit s'accompagner, pour les assurés sociaux, d'une diminution des taux des cotisations d'assurance maladie, vous l'avez vous-même rappelé.
Les élus locaux bénéficieront de cette baisse de leurs cotisations maladie lorsqu'ils seront affiliés, au titre de leur mandat électif local, au régime général de la sécurité sociale.
Le problème que vous soulevez est celui que pose la situation des élus locaux qui ne sont pas affiliés au régime général. La hausse du taux de la CSG n'aura pas pour eux la contrepartie que prévoit la loi de financement de la sécurité sociale en matière de cotisations maladie.
Cependant, tous les élus locaux, dont les indemnités sont soumises à imposition, bénéficieront de la déduction fiscale d'une partie de la CSG, à savoir 5,1 % à partir du 1er janvier 1998.
Néanmoins, le Gouvernement est tout à fait conscient de la diversité des situations des élus locaux. C'est pourquoi il examine avec une attention particulière les modalités de mise en oeuvre des dispositions qui ont été prévues par la loi, afin de répondre à leurs préoccupations.
M. Michel Mercier. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Michel Mercier.
M. Michel Mercier. Je vous remercie, madame le ministre, des perspectives que vous ouvrez dans votre réponse.
Il est normal que les élus locaux ou nationaux soient soumis à la loi commune - c'est bien le moins que nous puissions demander ! Cependant, il ne faudrait pas faire une catégorie particulière des élus locaux, tant il est difficile de s'engager dans la gestion des collectivités locales. Le travail réalisé par les élus locaux dans notre pays est admirable. On leur demande beaucoup. Je souhaite, je le répète, qu'on ne fasse pas de ces élus une catégorie particulière plus imposée ou plus contributive que d'autres : autant, oui ; plus, sûrement pas !
Je souhaite que les perspectives ouvertes par votre réponse trouvent très rapidement leur traduction, réglementaire ou législative.

PROBLÈME DES RÉFUGIÉS KURDES

M. le président. La parole est à M. Balarello, auteur de la question n° 150, adressée à M. le ministre de l'intérieur.
La parole est à M. Balarello.
M. José Balarello. Madame le ministre, lorsque, le 30 décembre 1997, j'ai interrogé M. le ministre de l'intérieur sur le problème des réfugiés kurdes à la frontière franco-italienne de Vintimille, notre presse nationale ne s'en était point encore fait l'écho.
Depuis, de nombreux articles ont été publiés, tant dans la presse française que dans la presse internationale, et la presse locale des Alpes-Maritimes a fait état des instructions données par le ministère de l'intérieur afin qu'une compagnie de la CRS 6, forte d'une centaine de fonctionnaires, vienne à Menton afin de renforcer les effectifs de la direction centrale du contrôle de l'immigration et de la lutte contre l'emploi des clandestins, la DICCILEC.
J'avais également demandé à M. le ministre de l'intérieur s'il ne lui semblait pas urgent de saisir INTERPOL afin que tous les pays de l'espace Schengen recherchent les filières mafieuses qui rackettent ces réfugiés pour organiser leur transfert en masse depuis la Turquie ou l'Irak vers l'Europe occidentale.
En effet, d'après les renseignements obtenus auprès des autorités italiennes, pour la seule année 1997, ce sont 4 500 Kurdes qui ont été refoulés de la frontière française en territoire italien d'où ils arrivaient. Et le phénomène va en s'amplifiant.
Les Kurdes étant en conflit ouvert tant avec les autorités de la Turquie, pays dont ils représentent un cinquième de la population, soit 12 millions d'habitants, qu'avec les autorités de l'Irak, où l'on en dénombre 4 millions, j'avais demandé en outre à M. le ministre de l'intérieur s'il ne lui apparaissait pas urgent de définir une politique commune de l'Union européenne, tout au moins des pays appartenant à l'espace Schengen, au regard des flux migratoires, sans attendre la réalisation des recommandations du traité d'Amsterdam.
Par ailleurs - c'est une question importante, au vu de l'article 31 du projet de loi relatif à l'entrée et au séjour des étrangers en France, tel qu'il vient d'être adopté par l'Assemblée nationale - ces populations seront-elles considérées comme devant bénéficier de l'asile politique ?
Cette question me paraît d'autant plus d'actualité que, voilà quelques jours, lors de la réunion de la commission d'enquête parlementaire sur la régularisation des étrangers en situation irrégulière, dont je suis le rapporteur, j'ai fait part à M. Chevènement de la décision rendue le 13 janvier 1998 par le tribunal administratif de Nice annulant l'arrêté préfectoral de reconduite à la frontière d'un Algérien, au motif que celui-ci, exerçant la profession d'agriculteur dans la région de Relizane, où un massacre important vient de se produire, pouvait invoquer l'article 27 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945.
Or, ce qui vient de se passer pour un Algérien peut être appliqué à un Kurde. Aussi ai-je interrogé M. le ministre de l'intérieur afin de savoir s'il ne lui paraissait pas opportun de saisir les instances internationales, particulièrement l'Organisation des Nations unies, afin de faire pression sur la Turquie et sur l'Irak pour obliger ces pays à cesser les actes militaires qu'ils exercent contre ces populations et à engager le dialogue avec leurs représentants modérés. Il est bon, en effet, de rappeler que les Kurdes représentent une population de 25 millions d'habitants partagés entre la Turquie, l'Irak, la Syrie et les Républiques du Caucase.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur, l'immigration irrégulière kurde concerne des ressortissants de nationalités turque, iranienne et principalement irakienne. Elle a connu depuis le second semestre de 1996 une forte poussée. L'augmentation a été particulièrement sensible au cours des onze premiers mois de 1997, au cours desquels 5 088 Irakiens ont été non admis, et 4 300 irréguliers ont été interpellés sur le territoire contre respectivement 538 et 285 durant la même période de l'année 1996.
Ce flux, particulièrement observé à la frontière franco-italienne et sur l'axe ferroviaire Vintimille-Strasbourg, se manifeste de plus en plus comme un exode massif de populations.
La réponse apportée par les services de police à ce phénomène se situe à deux niveaux.
Elle se situe tout d'abord au niveau national, grâce à l'accentuation des efforts portés par les services spécialisés dans la lutte contre l'immigration irrégulière, et au premier titre par l'Office central pour la répression de l'immigration irrégulière et de l'emploi des étrangers sans titre, de la DICCILEC. C'est ainsi que, sur le plan national, de janvier à octobre 1997, soixante-dix passeurs et logeurs ont fait l'objet de procédures judiciaires et vingt et un d'entre eux ont été écroués.
Parallèlement, la coordination des actions a été développée au niveau international, tant sous l'angle judiciaire, notamment dans le cadre de commissions rogatoires internationales, que sous celui de la maîtrise des flux, grâce à un meilleur échange d'informations entre les partenaires européens.
Dans ce cadre, une réunion s'est tenue à Rome le 8 janvier 1998 entre les directeurs généraux des services de police de six pays européens : Allemagne, Autriche, Grèce, Italie, Turquie et France. Les décisions prises faciliteront la circulation des renseignements permettant d'accentuer la lutte contre les réseaux et les filières.
Le comité exécutif Schengen, qui s'est réuni à Vienne le 15 décembre dernier, a par ailleurs adopté une décision comportant une série de mesures concrètes destinées à remplacer la coopération entre les Etats membres en vue de mieux surveiller les frontières extérieures.
Un groupe opérationnel a été constitué pour veiller à la mise en oeuvre de ces mesures ; il s'est réuni dès le 13 janvier dernier.
Les services de police compétents sont pleinement mobilisés pour faire face à ce problème sur le plan national et pour appliquer sans délai les résolutions prises au plan international.
La France compte naturellement sur un engagement de même ampleur de la part des pays adhérant à la convention de Schengen les plus concernés, à savoir l'Italie et la Grèce. Il importe, enfin, que la Turquie s'associe complètement à l'action internationale ainsi mise en oeuvre, comme elle a commencé à le faire à Rome.
M. José Balarello. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Balarello.
M. José Balarello. Madame le ministre, je vous remercie de votre réponse très détaillée.
Je suis inquiet des disparités de réglementation et de législation au niveau européen, disparités que vous connaissez puisque vous êtes l'élue d'une commune qui est voisine de l'Allemagne, alors que, pour ma part, je suis maire d'une ville située à la frontière italienne ; nos deux communes sont donc particulièrement touchées par l'axe ferroviaire Vintimille-Strasbourg que vous avez évoqué.
Vous savez mieux que quiconque que, en 1993, l'Allemagne a réformé sa législation sur le droit d'asile, excluant, aux termes de l'article 16-a-II de la loi fondamentale, les demandeurs ayant transité dans un pays sûr.
L'Italie, pour sa part, est en voie d'adopter les mêmes mesures, alors que les Pays-Bas l'ont déjà fait.
Je crains, en réalité, que les Kurdes, dont l'Italie ne veut pas et dont elle se débarrasse vers la France, ne soient interdits d'accès en Allemagne, c'est-à-dire qu'une immigration importante kurde ne se stabilise sur notre territoire.

FOUILLES ARCHÉOLOGIQUES DANS L'EMPRISE
DE LA NOUVELLE LIAISON PERPIGNAN-CANET

M. le président. La parole est à M. Marquès, auteur de la question n° 89, adressée à Mme le ministre de la culture et de la communication.
M. René Marquès. Madame le ministre, l'itinéraire reliant Perpignan au littoral est court, maix extrêmement dangereux. Le trafic y est considérable en période estivale et, la nuit, les jeunes, à la sortie des boîtes de nuit, y roulent à grande vitesse, à tel point que, en quelques années, soixante jeunes ont été tués.
Le conseil général des Pyrénées-Orientales a donc décidé, en 1989, d'aménager cette liaison de sept kilomètres en une route à deux fois deux voies ; mais les travaux ne sont pas terminés.
Le chantier a commencé en 1995 et s'est trouvé retardé depuis par des fouilles archéologiques, le hasard ayant voulu que l'on mette à jour des vestiges d'époque médiévale. Le montant des fouilles étant évalué à plus de 300 000 francs, une procédure d'appel d'offres a été instituée.
Au bout de dix-huit mois de procédure, force est de constater que la concurrence n'a pas pu s'exercer du fait d'un monopole qui serait détenu par l'association pour les fouilles archéologiques nationales, l'AFAN, monopole renforcé par le fait que l'autorisation indispensable au responsable de la fouille archéologique est accordée par le ministre de la culture, qui rejette, par l'intermédiaire des commissions interrégionales de recherche archéologique, les propositions étrangères à l'AFAN.
Cette entrave à la concurrence paraît aujourd'hui abusive et non garante des meilleures conditions financières puisque, sur le chantier en cause, le conseil général va devoir dépenser pour les seules fouilles archéologiques - ne parlons pas des travaux considérables nécessités par l'aménagement des voies - 160 000 francs de plus du fait du recours à l'AFAN. En effet, une société espagnole, possédant d'excellentes références en archéologie médiévale, était disposée à effectuer les mêmes prestations que l'AFAN pour 391 000 francs au lieu de 552 000 francs.
En conséquence, madame le ministre, je vous demande si vous envisagez de remédier à cet état de fait et à cette apparence de monopole dont dispose actuellement l'AFAN.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur, la procédure suivie dans l'examen du dossier archéologique du Mas Miraflor, si elle n'a différé en rien de celle qui a été suivie dans le cas d'opérations de même nature, a toutefois bien révélé les problèmes qui pouvaient se poser dans ce dossier, comme dans d'autres.
Le souhait du conseil général de procéder à un appel d'offres pour la réalisation des fouilles archéologiques, formulé voilà deux mois, a été exaucé, puisque quatre candidatures ont été examinées par la commission interrégionale de la recherche archéologique du Sud-Est, lors des séances des 1er et 2 octobre 1997.
Au terme de cet examen, la commission a retenu le dossier de l'association pour les fouilles archéologiques nationales, qui apportait la meilleure réponse au cahier des charges scienfiques établi par les services déconcentrés du ministère de la culture. Le conseil général, après concertation avec le ministère, a donc décidé de retenir l'AFAN.
Il convient de rappeler que les conditions de la prise en compte du patrimoine archéologique dans les opérations d'aménagement font l'objet de réflexions et d'études en vue de donner à l'archéologie préventive à la fois une légitimité renforcée et un nouvel élan.
Des questions très judicieuses ont d'ailleurs été posées à la fois sur le financement et sur les garanties pouvant être apportées dans le cadre des procédures habituelles.
Après qu'ont été constatés des points de consensus lors des concertations entre les parties prenantes engagées au cours du premier semestre 1997, et qu'a notamment été relevée la nécessité de disposer d'un opérateur de taille suffisante pour répondre immédiatement à toutes les demandes d'intervention archéologique, des questions juridiques ponctuelles et économiques font l'objet d'études afin de préparer les décisions. Tel est le cas de la question du statut des opérations de recherche archéologique, dont il convient de s'assurer à quel régime, concurrentiel ou non, elles sont aujourd'hui soumises et doivent être à l'avenir soumises.
Il s'agit d'éviter autant de procédures, d'hésitations et d'interrogations justifiées de la part des élus.
C'est la raison pour laquelle j'ai souhaité engager un travail de fond reprenant l'ensemble de ces questions, notamment celles que vous avez bien voulu rappeler dans cette enceinte.
Dans ce cadre général de recherche de sécurité juridique et de concertation s'inscrit mon objectif de pouvoir proposer au Parlement un ensemble de textes au cours de l'année 1998. En effet, nous ne pouvons pas continuer d'envisager d'attribuer des travaux dans de telles conditions qui ne satisfont pas les élus, qui ne garantissent pas une sécurité juridique suffisante et qui entraînent des délais et des coûts pouvant être remis en question.
Monsieur le sénateur, c'est bien à partir de ce cas, et d'autres dont j'ai eu à connaître, que j'ai décidé d'engager cette réforme et de donner à l'avenir toute transparence et toute garantie dans ce domaine.
M. René Marquès. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Marquès.
M. René Marquès. Madame le ministre, vous nous dites que vous avez l'intention de remettre à plat certains problèmes, et je vous en remercie.
Permettez-moi simplement de rappeler brièvement que l'arrêt des travaux dû aux recherches archéologiques entraîne pour le département un coût supplémentaire certain, car il faut indemniser les entreprises. De plus, les règles des marchés publics sont draconiennes vis-à-vis des collectivités : le contrôle de légalité est parfois tatillon, nous le savons tous.
Par ailleurs, madame le ministre, vous avez évoqué la libre concurrence. A l'heure où l'idée européenne se développe, je regrette que les archéologues espagnols, qui avaient présenté un dossier de qualité très compétitif, n'aient pas été retenus. Nous pensions que le principe du marché public l'emporterait, mais tel n'a pas été le cas.
Vous nous avez cependant donné des apaisements pour l'avenir, et je vous en remercie, madame le ministre.

7

NOMINATION DE MEMBRES
D'UN ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE

M. le président. Je rappelle que la commission des affaires économiques et du Plan et la commission des affaires sociales ont proposé leurs candidatures pour un organisme extraparlementaire.
La présidence n'a reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par l'article 9 du règlement.
En conséquence, ces candidatures sont ratifiées et je proclame MM. Jacques Rocca Serra et Marcel Lesbros membres du Conseil supérieur de l'établissement national des invalides de la marine.
Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à seize heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures quarante-cinq, est reprise à seize heures quinze, sous la présidence de M. Jean Faure.)

PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE
vice-président

M. le président. La séance est reprise.

8

CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS

M. le président. Mes chers collègues, la conférence des présidents a décidé que la séance d'aujourd'hui se poursuivrait le soir.
Elle a par ailleurs établi comme suit l'ordre du jour des prochaines séances du Sénat :

A. - Mercredi 21 janvier 1998, à quinze heures :

Ordre du jour prioritaire

Projet de loi, adopté avec modifications par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à l'entrée et au séjour des étrangers en France et au droit d'asile (n° 188, 1997-1998) ;
La conférence des présidents a fixé à cinq heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ; l'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort auquel il a été procédé au début de la session et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant dix-sept heures, le mardi 20 janvier 1998.

B. - Jeudi 22 janvier 1998 :

Ordre du jour prioritaire

A neuf heures trente :
1° Deuxième lecture de la proposition de loi, adoptée avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, relative au fonctionnement des conseils régionaux (n° 207, 1997-1998) ;
La conférence des présidents a fixé au mercredi 21 janvier 1998, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à cette proposition de loi.
2° Suite du projet de loi, adopté avec modifications par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à l'entrée et au séjour des étrangers en France et au droit d'asile (n° 188, 1997-1998).
A quinze heures et, éventuellement, le soir :
3° Eventuellement, suite de l'ordre du jour du matin ;
4° Déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, sur la réforme de la justice ;
La conférence des présidents a fixé :
- à dix minutes le temps réservé au président de la commission des lois ;
- à quatre heures la durée globale du temps dont disposeront, dans le débat, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort auquel il a été procédé au début de la session et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant dix-sept heures, le mercredi 21 janvier 1998.

C. - Mardi 27 janvier 1998, à seize heures :

Ordre du jour prioritaire

Suite du projet de loi relatif à l'entrée et au séjour des étrangers en France et au droit d'asile (urgence déclarée) (n° 188, 1997-1998) ;
La conférence des présidents a fixé au lundi 26 janvier 1998, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi.

D. - Mercredi 28 janvier 1998, à quinze heures :

Ordre du jour prioritaire

Suite du projet de loi relatif à l'entrée et au séjour des étrangers en France et au droit d'asile (urgence déclarée) (n° 188, 1997-1998).
E. - Jeudi 29 janvier 1998 :
A neuf heures trente :

Ordre du jour prioritaire

1° Conclusions de la commission mixte paritaire ou nouvelle lecture du projet de loi tendant à améliorer les conditions d'exercice de la profession de transporteur routier ;
2° Suite du projet de loi relatif à l'entrée et au séjour des étrangers en France et au droit d'asile (urgence déclarée) (n° 188, 1997-1998).
A quinze heures :
3° Questions d'actualité au Gouvernement ;
L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant onze heures.

Ordre du jour prioritaire

4° Suite du projet de loi relatif à l'entrée et au séjour des étrangers en France et au droit d'asile (urgence déclarée) (n° 188, 1997-1998).
F. - Mardi 3 février 1998 :
A neuf heures trente :
1° Quinze questions orales sans débat ;

L'ordre d'appel des questions sera fixé ultérieurement.

N° 11 de M. Daniel Hoeffel à M. le ministre de l'intérieur (conditions d'exercice de la profession de taxi) ;
N° 21 de M. Jean-Paul Delevoye à Mme le ministre de la culture et de la communication (financement de l'archéologie préventive) ;
N° 63 de M. Jean Bizet à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche (développement des cultures de protéines végétales) ;
N° 101 de M. Gérard Roujas à M. le ministre de la défense (avenir du centre de recherche aéronautique de Le Fauga-Mauzac) ;
N° 113 de M. François Lesein transmise à M. le secrétaire d'Etat au budget (taux de TVA applicable au gaz, à l'électricité et au fuel domestique) ;
N° 129 de Mme Nicole Borvo à M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie (désamiantage de Jussieu) ;
N° 145 de M. Georges Mouly à M. le secrétaire d'Etat au logement (difficultés des associations de restauration immobilière) ;
N° 146 de M. Charles Descours à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité (développement des professions liées à l'aide aux personnes âgées) ;
N° 148 de M. Rémi Herment à M. le ministre de l'intérieur (organisation des scrutins professionnels) ;
N° 153 de M. Léon Fatous à M. le secrétaire d'Etat au logement (garantie communale accordée aux organismes HLM) ;
N° 154 de M. Roland Courteau à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche (classement de communes de l'Aude en zone de montagne) ;
N° 155 de Mme Anne Heinis à M. le ministre des affaires étrangères (problèmes de la pêche aux abords des îles anglo-normandes et du Cotentin) ;
N° 156 de M. Bernard Plasait à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement (statut des commissionnaires de transports) ;
N° 158 de M. Jean-Jacques Robert à M. le ministre de la défense (redéploiement de certaines forces de gendarmerie en Essonne) ;
N° 162 de M. Jacques Valade à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement (création et réalisation du chantier du terminal de transport combiné de Bordeaux Hourcade).
A seize heures :

Ordre du jour prioritaire

2° Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, tendant à ouvrir le droit à une allocation spécifique aux chômeurs âgés de moins de soixante ans ayant quarante annuités de cotisations d'assurance vieillesse (n° 220, 1997-1998) ;
La conférence des présidents a fixé au lundi 2 février 1998, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à cette proposition de loi.
G. Mercredi 4 février 1998, à quinze heures :

Ordre du jour prioritaire

1° Sous réserve de sa transmission, proposition de loi portant diverses mesures urgentes relatives à la sécurité et à la promotion d'activités sportives (urgence déclarée) (A.N., n° 599) ;
La conférence des présidents a fixé au mardi 3 février 1998, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à cette proposition de loi ;
2° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification de l'accord portant modification de la quatrième convention entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et le groupe des Etats d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique, d'autre part (dite convention ACP-CE de Lomé) (n° 199, 1997-1998) ;
3° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification du protocole à la quatrième convention entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et le groupe des Etats d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique, d'autre part (dite convention ACP-CE de Lomé), à la suite de l'adhésion de la République d'Autriche, de la République de Finlande et du Royaume du Suède à l'Union européenne (n° 198, 1997-1998) ;
4° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification de l'accord interne entre les représentants des gouvernements des Etats membres, réunis au sein du Conseil relatif au financement et à la gestion des aides de la Communauté dans le cadre du second protocole financier de la quatrième convention ACP-CE (n° 197, 1997-1998) ;
La conférence des présidents a décidé qu'il sera procédé à une discussion générale commune de ces trois projets de loi n°s 199, 198 et 197 ;
5° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification d'un traité d'entente, d'amitié et de coopération entre la République française et la République d'Albanie (n° 202, 1996-1997) ;
6° Projet de loi autorisant l'approbation de l'avenant à la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Canada tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune, signée le 2 mai 1975 et modifiée par l'avenant du 16 janvier 1987 (n° 172, 1996-1997) ;
7° Projet de loi autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Mongolie en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune (ensemble un protocole) (n° 396, 1996-1997).
H. Jeudi 5 février 1998 :

Ordre du jour prioritaire

A neuf heures trente :
1° Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, relative à la responsabilité du fait des produits défectueux (n° 260, 1996-1997) ;
La conférence des présidents a fixé au mercredi 4 février 1998, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à cette proposition de loi.
A quinze heures :
2° Suite éventuelle de l'ordre du jour du matin ;
3° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant habilitation du Gouvernement à prendre, par ordonnances, les mesures législatives nécessaires à l'actualisation et à l'adaptation du droit applicable outre-mer (n° 196, 1997-1998) ;
La conférence des présidents a fixé à l'ouverture de la discussion générale le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi.
I. Mardi 10 février 1998, à neuf heures trente et à seize heures :

Ordre du jour établi en application de l'article 48,
troisième alinéa, de la Constitution

1° Conclusions de la commission des lois (n° 314, 1996-1997) sur la proposition de loi de M. Serge Vinçon et de plusieurs de ses collègues tendant à autoriser les élus des communes comptant 3 500 habitants au plus à conclure avec leur collectivité des baux ruraux ;
La conférence des présidents a fixé au lundi 9 février 1998, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;
2° Conclusions de la commission des lois (n° 20, 1997-1998) sur :
- la proposition de loi de M. Nicolas About, tendant à modifier les dispositions du code civil relatives à la prestation compensatoire en cas de divorce (n° 151, 1996-1997) ;
- la proposition de loi de M. Robert Pagès et plusieurs de ses collègues, relative à l'attribution de la prestation compensatoire en cas de divorce (n° 400, 1996-1997) ;
La conférence des présidents a fixé au lundi 9 février 1998, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;
3° Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, permettant aux organismes d'habitations à loyer modéré d'intervenir sur le parc locatif privé en prenant à bail les logements vacants pour les donner en sous-location (n° 185, 1997-1998).
J. - Mercredi 11 février 1998, à neuf heures trente et à quinze heures :

Ordre du jour prioritaire

Projet de loi relatif à l'application de la convention du 13 janvier 1993 sur l'interdiction de la mise au point, de la fabrication, du stockage et de l'emploi des armes chimiques et sur leur destruction (n° 291, 1996-1997) ;
La conférence des présidents a fixé au mardi 10 février 1998, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi.
K - Jeudi 12 février 1998 :
A dix heures :

Ordre du jour prioritaire

1° Deuxième lecture de la proposition de loi, modifiée par l'Assemblée nationale, relative au renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité sanitaire des produits destinés à l'homme (n° 222, 1997-1998) ;
La conférence des présidents a fixé au mercredi 11 février, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à cette proposition de loi.
A quinze heures :
2° Questions d'actualité au Gouvernement ;
L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant onze heures ;

Ordre du jour prioritaire

3° Suite de l'ordre du jour du matin.
Y a-t-il des observations en ce qui concerne les propositions de la conférence des présidents relatives à la tenue des séances ?...
Y a-t-il des observations en ce qui concerne les propositions de la conférence des présidents s'agissant de l'ordre du jour établi en application de l'article 48, alinéa 3, de la Constitution ?...
Ces propositions sont adoptées.

9

PROFESSION DE TRANSPORTEUR ROUTIER

Adoption d'un projet de loi déclaré d'urgence

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 161, 1997-1998), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, tendant à améliorer les conditions d'exercice de la profession de transporteur routier. [Rapport n° 176 (1997-1998) et avis n° 215 (1997-1998).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de loi tendant à améliorer les conditions d'exercice de la profession de transporteur routier constitue l'un des engagements que j'ai pris, au nom du Gouvernement de Lionel Jospin, lors du conflit routier qui, vous le savez, s'est déroulé à l'automne dernier. J'ai donc l'honneur de présenter ce texte aujourd'hui devant vous.
On me permettra, d'abord, de remercier pour leur travail M. Jean-François Le Grand, rapporteur de la commission des affaires économiques et du Plan, et M. Lucien Lanier, rapporteur pour avis de la commission des lois.
Vous le savez, nous traitons d'une profession dont les caractéristiques sont particulièrement difficiles et complexes.
Dans un secteur économique longtemps administré, le Gouvernement a décidé, en 1987, de prendre des mesures de libération et de déréglementation. Il a répondu ainsi aux attentes, d'une partie de la profession. La tarification routière obligatoire, la TRO, a alors été supprimée brutalement.
Certains, dont je fais partie, voient dans ces décisions une explications des trois conflits de 1992, 1996 et 1997. En tout cas, cela témoigne d'un problème, d'un malaise persistant dans un secteur pourtant vital pour l'activité nationale et internationale du pays et qui, c'est une chance, est assuré d'une croissance durable.
Le transport routier n'a pas encore réussi à substituer à l'ancienne réglementation administrative de nouveaux modes de régulation. Tel est le constat unanime qu'ont fait les observateurs lors du dernier conflit et à sa suite.
Mon objectif, vous vous en doutez, est non pas de revenir en arrière, mais de contribuer à une modernisation économique, sociale, nationale et européenne de ce secteur. Cela suppose que l'on prenne en compte la spécificité de la profession, qui ne peut pas toujours, aujourd'hui, adapter l'offre à la demande, créant ainsi les conditions d'un risque de sous-tarification permanente.
La libéralisation que je viens d'évoquer s'est traduite par un double mouvement de concentration des entreprises autour des sociétés les plus dynamiques et de fragilisation des unités les plus petites, voire des unités moyennes. Cette libéralisation ne s'est toutefois pas accompagnée de la mise en place d'outils de régulation sociale et économique efficaces. Tel est le constat que j'ai fait et qu'a fait la profession elle-même.
La modernisation nécessaire doit être le résultat d'un vrai dialogue entre les représentants des entreprises et ceux des salariés mais aussi d'un assainissement économique de la profession. J'observe, même si je sais que tout est loin d'être réglé, que le dernier conflit a, dans une certaine mesure, permis d'avancer dans ce sens. C'est un encouragement à s'engager dans la voie du paritarisme.
Je ne dis pas cela pour dédouaner l'Etat, qui a un rôle important à jouer. Ses institutions doivent, me semble-t-il, garantir les accords conclus, le respect de la réglementation, mais aussi la reconnaissance du rôle indispensable des transports et des échanges dans tout progrès de civilisation.
Cette dimension, posée avec force lors du dernier conflit, appelle, outre le texte que nous allons examiner, d'autres avancées convergentes mais complexes. Je pense, en particulier, aux relations entre transporteurs et chargeurs et à l'harmonisation à l'échelon européen.
Les relations entre les transporteurs et les chargeurs concernent l'évolution des prix de transport, les conditions de paiement des prestations, l'organisation des opérations de livraison, la prise en charge des délais d'attente et bien d'autres aspects encore.
Dans un certain nombre de cas, tout le monde le sait, des chargeurs peuvent exercer une pression anormale sur les prix du transport. L'autorégulation par la profession et l'unité de cette dernière devraient concourir à une résistance au dumping économique et social.
Certains dysfonctionnements, comme les paiements tardifs, par exemple, mettent en péril certaines entreprises. D'autres, comme la manutention par les conducteurs ou les délais d'attente non rémunérés, contribuent à aggraver les conditions sociales et à exacerber les tensions.
N'attendons pas que les conflits surgissent. Ecoutons ce que disent les uns et les autres. Sur tous ces sujets, je propose d'ouvrir une concertation avec l'ensemble des partenaires intéressés. J'ai d'ailleurs convoqué une table ronde avec les chargeurs le 13 février prochain.
Le second volet, tout aussi déterminant, est celui de l'Europe, et plus spécialement des conditions d'une harmonisation sociale européenne.
J'ai remis, le 19 novembre dernier, à M. Neil Kinnock, commissaire européen aux transports, au nom du Gouvernement français, un mémorandum reprenant la position française.
Les débats au conseil européen des transports de décembre dernier laissent penser - c'est en tout cas la position qui a été arrêtée - que cette question sera inscrite au programme de travail de la Commission dès le premier trimestre de cette année. C'est une bataille à gagner !
J'ajoute que la bonne régulation dans le transport routier participe de mon objectif prioritaire, qui est d'améliorer la sécurité routière.
Vous connaissez la situation peu enviable qui est la nôtre sur le plan européen. Avec plus de 8 000 morts par an, nous restons, malgré les progrès réalisés depuis vingt ans, parmi les pays les moins sûrs d'Europe.
Il importe que nous agissions sur tous les plans possibles pour changer la donne. Nous connaissons la plupart des causes, difficilement tolérables, des accidents. Nous avons pris une orientation claire visant à agir sur les comportements en privilégiant l'éducation et la formation. Cette priorité donnée à l'éducation ne doit pas nous faire fermer les yeux sur le rapport direct qui existe trop souvent entre les conditions de travail dans le transport routier et la sécurité sur les routes.
J'en viens au projet de loi qui vous est aujourd'hui soumis.
Ce projet se caractérise par deux grands types de dispositions qui affirment mes priorités : le renforcement des conditions d'accès à la profession et l'amélioration des dispositifs de contrôle et de sanction.
Concernant le premier point, le renforcement des conditions d'accès à la profession, l'action du Gouvernement ne se limite pas, là encore, au cadre du projet de loi important qui vous est soumis.
Il y a quelques semaines a en effet été publié un décret renforçant les conditions financières et d'honorabilité requises pour l'accès à la profession, et ce conformément, j'y insiste, à un voeu émanant de toutes les parties concernées de la profession.
Le projet de loi lui-même prévoit d'ailleurs des dispositions dans ce sens, qui complètent et modifient diverses lois en vigueur.
La première d'entre elles, prévue à l'article 1er du projet, consiste à généraliser l'obligation de formation professionnelle pour l'ensemble des conducteurs de véhicules de transport routier.
La formation professionnelle, vous le savez, est actuellement obligatoire pour une seule catégorie de conducteurs routiers : les salariés qui exercent leur activité dans les entreprises de transport routier de marchandises pour compte d'autrui, en application d'un accord collectif de branche signé le 20 janvier 1995 et du décret n° 97-608 du 31 mai 1997. Il en résulte une différence de traitement entre les travailleurs indépendants et entre les salariés des entreprises effectuant du transport routier de marchandises pour compte propre.
Les mesures proposées étendent donc cette obligation de formation professionnelle à tous les conducteurs de transport routier de marchandises et de voyageurs. Elles ont pour objet de conférer une qualification professionnelle minimale aux conducteurs routiers professionnels, et, par là même, d'introduire une plus grande égalité dans les règles de concurrence, de renforcer la sécurité et de favoriser l'insertion professionnelle.
La qualification des conducteurs devra porter sur les règles de sécurité, notamment de sécurité routière, et sur la connaissance des réglementations sociales dans lesquelles s'exerce l'activité du conducteur, en particulier des règles relatives à la durée du travail ainsi qu'aux temps de conduite et de repos. Elle contribuera ainsi, j'en suis convaincu, à améliorer la qualité des prestations des entreprises de transport, dans une perspective européenne positive.
Ces nouvelles mesures concerneront : les conducteurs non salariés exerçant une activité de transport routier, principalement de marchandises, mais aussi de voyageurs, en qualité de travailleurs indépendants.
Elles concerneront aussi, bien sûr, les conducteurs salariés exerçant leurs fonctions dans les entreprises effectuant du transport routier de marchandises pour compte propre.
Elles concerneront, enfin, les conducteurs salariés exerçant leur activité dans le transport de voyageurs, même si des modalités spécifiques devront être retenues en ce qui les concernent.
Pour les non-salariés, un décret en Conseil d'Etat précisera les dispositions applicables. Pour les salariés, les branches visées disposeront d'un délai d'un an pour négocier le dispositif le mieux adapté à leur activité. A défaut d'accords de branche étendus satisfaisant aux objectifs fixés par la loi, un décret en Conseil d'Etat y suppléera.
La seconde disposition du projet de loi, l'article 2, concerne la modification du régime des autorisations en matière de transport routier.
L'achèvement du marché unique du transport dans l'Union européenne est prévu pour cette année, précisément le 1er juillet 1998, date de la libéralisation du cabotage. En conséquence, le régime de l'accès au marché du transport intérieur doit être revu.
Il ne sera plus possible, en effet, d'astreindre les transporteurs à un régime d'autorisations alors que le cabotage sera librement autorisé avec la seule licence communautaire.
Il avait été envisagé que l'inscription des entreprises au registre des transporteurs ou des loueurs donne lieu, pour toutes les entreprises, à la délivrance de la licence communautaire. Les copies conformes auraient alors valu attestation d'inscription au registre au sens de la loi d'orientation des transports intérieurs, la LOTI.
Cette solution n'a pas été retenue car le règlement européen de 1992 ne concerne que les transports effectués par des véhicules dont le poids total en charge autorisé dépasse six tonnes.
Le Gouvernement a donc proposé de modifier l'article 36 de la LOTI pour créer une licence de transport intérieur pour les véhicules compris entre 6 tonnes et 3,5 tonnes de poids total en charge.
Mais, dans le même temps, le conseil européen des ministres des transports a retenu le principe en vigueur en France d'un abaissement du seuil de 6 tonnes à 3,5 tonnes et demandé à la Commission de préparer un règlement communautaire dans ce sens.
Ainsi, dans cette situation qui est en évolution - mais à titre temporaire - les véhicules dont le poids dépasse 3,5 tonnes mais est inférieur à 6 tonnes détiendront une licence de transport intérieur. Ils relèveront ensuite du régime de la licence communautaire.
Par ailleurs, un amendement adopté par l'Assemblée nationale a étendu aux véhicules d'au moins deux essieux, quel que soit leur tonnage et, assurant du transport pour compte d'autrui, l'obligation de détenir une licence de transport intérieur.
Un décret d'application précisera que les copies conformes de la licence de transport intérieur seront utilisées pour les transports assurés par des véhicules dont le poids est actuellement inférieur à 6 tonnes puis à 3,5 tonnes après abaissement du seuil. Les copies conformes de la licence communautaire couvriront les transports assurés par des véhicules dépassant ce poids.
Ces dispositions instaureront ainsi la présence dans chaque véhicule d'un titre administratif de transport similaire, quel que soit le trafic effectué, en national ou en intracommunautaire. Il s'agira donc soit de la licence communautaire, soit de la licence de transport intérieur. C'est une mesure de simplification.
Parallèlement, le champ de compétences des commissions des sanctions administratives va être adapté à l'instauration de la licence communautaire. Ces commissions auront la possibilité de retirer ces licences, non seulement aux 12 000 entreprises qui effectuent des trafics internationaux ou de zone longue, mais à l'ensemble des entreprises inscrites au registre. Il s'agit là d'une mesure d'équité !
J'aborderai maintenant la deuxième orientation de mon action en direction des transports routiers, à savoir l'amélioration du contrôle et des sanctions.
Le projet de loi vise, par ses articles 3 et suivants, à renforcer les mesures de contrôle et de sanction.
Dans son projet de loi initial, le Gouvernement avait proposé la création d'une sanction administrative d'immobilisation de véhicule - article 3 - la création d'une commission des sanctions administratives dans la région d'Ile-de-France - article 4 - enfin, le renforcement des pouvoirs d'investigation des contrôleurs des transports - articles 5 et 6.
Ces dispositions ont été renforcées par la définition de motifs supplémentaires d'immobilisation immédiate des véhicules, en particulier en cas d'absence des documents de route ou de non-conformité de ces derniers - articles 3 ter et 3 quinquies.
Lors de l'examen de ce texte par l'Assemblée nationale, le Gouvernement, considérant que le débat ne faisait que s'amorcer et que les propositions des parlementaires étaient pertinentes, a proposé la mise en place d'un groupe de travail afin de rendre plus opératoires et juridiquement plus fiables les dispositions des articles 3 ter et 3 quinquies.
Ce groupe de travail a permis de déboucher sur des textes équilibrés dont votre commission a eu connaissance. Avec ce dispositif, s'il est retenu, la responsabilité du donneur d'ordre, le transporteur ou le chargeur, pourra être recherchée pour une infraction commise par un conducteur.
Comme je l'ai dit, notre action en matière de contrôle et de sanctions ne se résume pas aux dispositions prévues dans ce projet de loi. D'autres mesures ont déjà été prises ou sont en voie de l'être et, afin que vous ayez une vision d'ensemble du dispositif, je veux vous informer de plusieurs décisions.
Les mesures portant sur les moyens de contrôle sont les suivantes.
Le nombre des contrôleurs des transports terrestres a été accru de 23 dans la loi de finances pour 1998, ce qui portera leur nombre à 405 et, avec la création de 35 autres postes, les contrôleurs seront 440 en l'an 2000.
L'inspection du travail est également renforcée. Des moyens supplémentaires ont été dégagés pour 1998 avec la création de quinze nouveaux postes de contrôleurs et cinq nouveaux postes d'inspecteurs. Ultérieurement, trente nouveaux postes de contrôleurs et d'inspecteurs seront créés d'ici à l'an 2000.
Par ailleurs, une meilleure coordination entre les corps de contrôle relevant du ministère des transports sera mise en oeuvre.
Un observatoire des conditions économiques et sociales du transport routier sera créé au sein du Conseil national des transports. Il m'informera de l'évolution des relations sociales au sein des entreprises de transport routier ainsi que des conditions économiques dans lesquelles les entreprises évoluent. Ces informations seront, bien entendu, communiquées à l'ensemble des parlementaires.
Cet observatoire fera toutes propositions permettant le développement, la compétitivité et la modernisation du transport routier dans le respect des règles de concurrence qui garantissent, au plan européen, une rémunération normale du service de transport.
Les rapports de la profession vis-à-vis des donneurs d'ordres et des chargeurs ainsi que vis-à-vis des autres modes de transport seront examinés.
Enfin, une circulaire interministérielle concernant l'application des dispositions de l'article R. 278 du code de la route, relatif à l'immobilisation des véhicules de transport de marchandises et de voyageurs, a été adressée aux préfets à la fin du mois de décembre dernier.
Elle a pour objet, d'une part, d'actualiser les instructions applicables en matière d'immobilisation conservatoire des véhicules de transport de marchandises et de transport en commun de personnes, d'autre part, de renforcer, auprès des corps de contrôle, le recours à la procédure d'immobilisation.
En effet, il s'agit d'un moyen efficace pour lutter avec fermeté contre les pratiques qui tendent à fausser les conditions de la concurrence dans ce secteur d'activité.
L'immobilisation des véhicules permet de responsabiliser les différents acteurs de la chaîne transport : chargeurs, commissionnaires, transporteurs, conducteurs et destinataires.
Vous le voyez, les dispositions législatives que je vous propose d'adopter aujourd'hui font partie d'un plan d'action plus vaste. L'ensemble de ces mesures devrait nous permettre d'améliorer la situation du transport routier en France. En disant cela, je pense à la fois à la situation de nos transporteurs et à celle des salariés du secteur.
Le transport routier, c'était, enfin, un certain retard dans les négociations paritaires. Des efforts importants ont récemment été accomplis par les partenaires sociaux. Il s'agit, notamment, de la question du congé de fin d'activité pour les conducteurs voyageurs, du futur décret en cours de préparation concernant les temps de travail de la courte distance, des classifications et du droit syndical.
Je conclurai, enfin, en rappelant que l'article 7 du projet de loi prévoit la présentation au Parlement à la fin de cette année d'un bilan sur les conditions d'exercice de la profession.
Le Parlement pourra ainsi apprécier le respect des engagements pris par le Gouvernement au cours du récent conflit et l'effet des mesures annoncées. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen et sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-François Le Grand, rapporteur de la commission des affaires économiques et du Plan. Monsieur le ministre, tout d'abord, vous m'avez inquiété ; puis, vous m'avez rassuré, et, enfin, j'ai loué votre sagesse.
Vous m'avez tout d'abord inquiété, parce que, lors du conflit des transporteurs routiers qui s'est déroulé voilà maintenant quelques semaines, vous vous êtes rendu sur le terrain pour rencontrer ceux qui étaient en grève et vous avez annoncé qu'un projet de loi serait soumis au Parlement. J'étais inquiet parce que les lois de circonstance sont rarement bonnes.
Mais j'ai été aussitôt rassuré. En effet, le texte a été déposé sur le bureau du Sénat, la commission des affaires économiques et du Plan a été saisie au fond et m'a nommé rapporteur. Je l'ai alors étudié et je me suis aperçu qu'il était pour l'essentiel pertinent, qu'il traitait le conflit de façon convenable, qu'il proposait des solutions à certaines difficultés et qu'il n'y avait lieu que d'y apporter quelques modifications pas forcément fondamentales et de corriger quelques omissions.
J'ai enfin été tenté de louer votre sagesse. Je me suis en effet aperçu, en étudiant les archives, que vous vous étiez largement inspiré d'un travail réalisé par vos prédécesseurs. Le fait est suffisamment rare pour qu'on le souligne.
Je recommanderai donc au Sénat de voter votre projet de loi sous réserve de l'adoption d'un certain nombre d'amendements que j'aurai l'honneur de vous présenter au nom de la commission des affaires économiques et du Plan et d'amendements pertinents proposés par la commission des lois, qui vous seront exposés par mon excellent collègue M. Lucien Lanier.
Parler de la pertinence des réflexions de la commission des lois tend au pléonasme. C'est la raison pour laquelle, mon cher collègue, je n'insisterai pas sur les légères divergences qui nous séparent et à propos desquelles nous aboutirons, j'en suis sûr, à un accord au terme de la discussion. Il s'agit plus particulièrement, à l'article 3 ter, de l'amendement n° 6 rectifié bis, présenté par la commission des affaires économiques, et de l'amendement n° 12, déposé par la commission des lois.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, avant de préconiser un traitement, il est nécessaire de connaître les origines du mal et donc, en la matière, la situation du secteur des transports routiers.
Je traiterai très brièvement de l'historique législatif et des préoccupations des gouvernements successifs et des divers organismes du secteur du transport routier. Je le ferai essentiellement non pas pour relever des contradictions mais pour souligner les évolutions.
En 1934, les pouvoirs publics ont encadré le développement de la profession de transporteur routier uniquement pour protéger les transports ferroviaires, la SNCF en l'occurrence, il n'est pas inintéressant de le souligner. Un régime de contingentement a notamment été mis en place.
Ce système a ensuite été modifié en 1949 puis en 1973 et les classes A, B et C correspondant à différents tonnages ont été instituées.
Il y avait deux catégories : la licence en zone courte et la licence en zone longue, qui correspondaient en fait chacune à un transport routier spécifique et qui témoignaient de la fixité de ce secteur économique à cette époque par rapport au fort caractère évolutif qu'il a acquis de nos jours.
Des exceptions étaient déjà également prévues par la loi : le transport pour compte propre, le transport réalisé par les intermédiaires du commerce, le transport assuré par des véhicules légers, des véhicules agricoles et des engins de travaux publics. Les locations de véhicules de longue durée n'étaient pas soumises au contingentement et elles étaient souvent utilisées en compte propre.
Toujours est-il que les transports en zone courte et les véhicules de 3,5 à 6 tonnes n'étaient soumis qu'à un certificat d'inscription.
L'autorisation de transport ne concernait que les véhicules de 6 tonnes des transporteurs professionnels et dont l'activité s'effectuait en zone longue.
En 1986, un certain nombre de modifications ont été introduites. Tout d'abord, le décret du 14 mars 1986 a substitué au contingentement l'attribution d'autorisations de transport en zone longue fondées sur les besoins des entreprises et les catégories de transports. C'était déjà une première évolution.
En 1990, c'est l'ensemble de l'encadrement quantitatif de la délivrance des autorisations qui a été abandonné.
Rappelons par ailleurs pour mémoire - mais c'est toujours d'actualité - qu'en 1995 on comptait 91 500 autorisations de transport, dont plus de 62 000 pour la classe A, près de 21 000 pour la classe B et 8 344 pour la classe C.
Je rappelle très brièvement que la classe A correspond à tous les véhicules ou ensembles routiers dont la circulation est autorisée par le code de la route, c'est-à-dire jusqu'aux véhicules de 44 tonnes, que la classe B regroupe les ensembles autorisés inférieurs ou égaux à 26 tonnes et que la classe C représente la catégorie des véhicules inférieurs ou égaux à 13 tonnes.
Il convient de ne pas confondre ce classement avec celui qui est retenu sur le plan européen. Vous avez fait allusion à cette question, monsieur le ministre, et j'abonde totalement dans votre sens : il est nécessaire de procéder dès maintenant à une harmonisation.
S'agissant de la tarification, il convient de remarquer qu'en 1961 celle-ci a été rendue obligatoire à la demande de la profession des transporteurs.
En 1988, c'est exactement l'inverse qui s'est produit, puisque les mêmes intervenants ont réclamé une libéralisation des prix et l'abrogation de la tarification obligatoire.
Cette disposition a plutôt entraîné les prix vers le bas, contrairement à ce que l'on pouvait imaginer, et la tendance à la baisse a été constante.
Je n'ai procédé à ce rappel que pour mémoire, sachant, mes chers collègues, que vous pouvez vous référer au rapport pour obtenir plus de précisions.
Je traiterai maintenant de la situation des transports routiers.
A cet instant de mon exposé, je m'adresserai tout particulièrement à tous les professionnels du secteur que j'ai rencontrés, qu'il s'agisse des entrepreneurs du transport routier, des loueurs de véhicules industriels, des commissionnaires de transport, des représentants des syndicats de salariés du transport routier, des représentants de la profession des « chargeurs » et des contrôleurs des transports terrestres. Je tiens à leur dire à tous un grand merci, d'abord pour leur parfaite connaissance de leur secteur d'activité, ensuite pour leur extrême sens des responsabilités. Je tenais d'autant plus à leur adresser ces remerciements qu'un certain nombre d'entre eux sont dans les tribunes.
Les responsables de ce secteur que nous avons reçus se sont toujours préoccupés, à chaque instant, de l'intérêt général, faisant abstraction des intérêts particuliers, corporatistes, qui sont quelque peu réducteurs quand il s'agit d'élaborer un texte législatif.
Grâce à eux, grâce aussi à nos collaborateurs, j'ai pu découvrir le transport routier, domaine que j'ignorais dans une large mesure.
La situation des transports doit être appréciée non seulement par rapport au contexte économique, mais aussi par rapport à l'environnement législatif et réglementaire d'aujourd'hui, ainsi qu'au regard de l'aspect géostratégique de notre pays et du transport routier, ce qui me conduira à présenter des considérations européennes.
Pour situer l'ampleur de cette activité, je citerai quelques chiffres. Ce secteur emploie 260 000 personnes, salariées et non salariées, pour un chiffre d'affaires d'environ 140 milliards de francs, soit quatre fois le chiffre d'affaires des transports urbains et routiers de voyageurs, y compris les taxis, 36 000 entreprises sont concernées par le transport routier, 25 000 d'entre elles emploient de un à cinq salariés et représentant 16 % du chiffre d'affaires de la profession et 90 d'entre elles emploient 200 salariés et plus, représentant 31 % de ce montant.
Immédiatement pour situer l'ampleur de la difficulté, je me permets d'attirer votre attention sur le fait qu'il y a 14 % de faillites dans ce secteur contre 8 % dans le secteur marchand en général.
Je note par ailleurs que 10 000 nouvelles entreprises se sont créées dans les dix dernières années.
Il s'agit donc d'un secteur en pleine croissance, à propos duquel, compte tenu des difficultés - M. le ministre l'a rappelé et cela avait été déjà la préoccupation de ses prédécesseurs - on risque de voir une certaine opacité, s'installer, d'où la nécessité d'assainir la profession.
Sachez encore que le transport routier achemine 1 400 millions de tonnes de marchandises contre 125 milliards de tonnes pour le transport ferroviaire et 27 millions de tonnes par le réseau fluvial.
L'environnement législatif, vous en avez parlé, monsieur le ministre, et il me paraît inutile de revenir sur les différents textes qui sont en préparation à l'échelon européen ou sur ceux qui ont été élaborés dans un passé tout récent. Je formulerai simplement une observation d'ordre général.
Nous avons affaire à un véritable empilage de textes. (M. le ministre fait un signe d'approbation.) D'ailleurs, certains d'entre eux se contredisent, ce qui les rend totalement inapplicables. On constate, en outre, une opacité de ces textes et une inadaptation de certaines dispositions.
En toile de fond, se profile une évolution du secteur du transport routier du fait de l'ouverture de nos frontières au 1er juillet 1998. Cela fait partie de ce que l'on a appelé le « troisième paquet ».
En tant que rapporteur pour avis du budget annexe de l'aviation civile, j'ai d'ailleurs eu l'honneur, au mois de décembre dernier, de rappeler que les transports aériens, eux aussi, sont soumis à cette même règle de la libéralisation.
Par conséquent, à compter du 1er juillet 1998, c'est-à-dire dans quelques mois, les dispositifs de protection qui avaient étés mis en place voleront en éclat.
C'est la raison pour laquelle vous avez rappelé tout à l'heure, à juste titre, monsieur le ministre, qu'un certain nombre de dispositions devaient être prises dès maintenant, afin de pouvoir répondre à la situation législative ou réglementaire qui sera la nôtre à compter de ce 1er juillet 1998.
Les lois se sont succédé ; je n'y reviendrai pas. Toutefois, l'une d'entre elles a plus particulièrement marqué les esprits : il s'agit de la loi d'orientation des transports intérieurs du 30 décembre 1982, la LOTI.
Les dispositions qui ont été mises en place à cette occasion sont aujourd'hui caduques ; je ne reviens pas sur ce phénomène. Je voudrais plutôt insister sur les trois ou quatre derniers textes parus depuis 1992 : la loi du 31 décembre 1992, qui régit la sous-traitance et le prix minimum ; la loi du 1er février 1995, qui rend obligatoire la « lettre de voiture » à bord des véhicules - document de suivi dont on parlera beaucoup lors de la discussion des articles - et la rémunération du « temps de service » en dehors du temps de conduite ; le décret du 5 juin 1992, qui a transposé les dispositions de la directive européenne du 9 novembre 1987, et le décret du 3 juillet 1992, qui a défini les conditions d'accès à la profession. Je parle de tous ces textes simplement parce qu'ils illustrent bien que toute loi inapplicable est inutile.
Evitons les gaspillages de temps et d'efforts en nous dotant aujourd'hui d'un texte qui soit applicable par tous et qui apporte une solution aux différentes difficultés qui ont été exposées.
M. Lucien Lanier, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Très bien !
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. Merci, mon cher collègue !
Je citerai enfin le décret du 6 novembre 1997, qui a renforcé les conditions de capacités professionnelles et financière pour l'accès à la profession de transporteur.
Je mets cette dernière disposition à part, car elle est à l'origine de la réflexion qui est menée, et c'est l'une des dispositions, parmi les plus importantes, sur lesquelles il conviendra de revenir.
Selon les professionnels que j'ai auditionnés, tous ces textes sont, dans une large mesure, inappliqués - par 60 % à 90 % de la profession, selon certains - à voire inapplicables. C'est énorme ! Alors, évitons, de grâce, d'aboutir à un texte qui aurait le même défaut.
Ma dernière observation porte sur l'aspect géostratégique de notre pays et du transport routier.
D'un point de vue géographique, force est de constater que la France est au centre de l'Europe de l'Ouest. Pour aller du nord vers le sud, vers le sud-ouest ou vers le sud-est, lorsque l'on vient de Grande-Bretagne ou des pays nordiques, on est le plus souvent amené à traverser notre pays.
La loi française doit donc s'appliquer non seulement à nos concitoyens et aux transporteurs de notre pays, mais aussi aux transporteurs étrangers. Pour y parvenir, monsieur le ministre - des observations ont déjà été faites en ce sens et je suis persuadé que mes collègues reviendront sur ce point à l'occasion soit de la discussion générale, soit de la discussion des articles - il est nécessaire de traiter ce sujet à l'échelle européenne.
M. Jacques de Menou. Bravo !
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. Cette observation vaudra également pour d'autres aspects.
Une note que l'on m'a fait parvenir tout à l'heure précise que le Conseil européen a fixé des règles communes aux quinze pays membres concernant le temps minimal de conduite, le temps minimal de repos et les modalités de contrôle de la vitesse. C'est un début d'harmonisation. Mais, encore faut-il que les contrôleurs des transports terrestres - j'y reviendrai dans un instant, parce qu'ils sont directement concernés par cette observation - aient la possibilité d'intervenir. Appliquer une décision est une chose ; contrôler l'application d'une décision en est une autre !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. C'est une question de nombre !
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. Il s'agit, vous avez raison, d'un problème de nombre. Vous avez décidé de créer vingt-trois postes. C'est bien, mais j'ai presque envie de dire, peut mieux faire, parce que cela reste insuffisant.
Je sais bien qu'il y a le problème du financement. Toutefois, monsieur le ministre, l'augmentation des contrôles devrait majorer le produit des amendes de police. Je ne veux pas dire qu'on va alimenter la caisse de cette façon. Ce serait tout de même un peu excessif.
Outre le nombre, il y a d'abord et avant tout un problème de champ de compétences qui est crucial. J'y reviendrai dans un instant, mais j'attire d'ores et déjà votre attention sur un point tout à fait particulier : il faut doter ces contrôleurs, quels qu'ils soient, qu'ils aient ou non un uniforme, de compétences élargies qui sont indispensables pour être efficaces.
Une autre considération vient immédiatement à l'esprit du fait de l'« européanisation » des échanges : c'est la législation sociale battue en brèche, à moins, bien évidemment, que des dispositions sociales harmonieuses ne soient retenues au niveau européen. Je reviendrai sur ce point dans ma conclusion. Mais, pour faire un pronostic - pardonnez cette comparaison avec le domaine médical due à ma profession - encore faut-il être sûr que le traitement sera non seulement bon, mais également mis en oeuvre.
Voilà donc ce que l'on pouvait dire sur la situation du transport économique.
J'en viens maintenant aux causes et au traitement.
Les causes, vous les avez rappelées. Je n'y reviendrai que brièvement, car je partage totalement vos observations, qui sont marquées au coin du bon sens et qui n'ont échappé à personne.
La difficulté majeure réside dans la complexité de la chaîne du transport : interviennent expéditeurs, chargeurs, commissionnaires, transporteurs, sous-traitants et, enfin, clients !
Cette difficulté est encore accrue si l'on prend en compte la sécurité des usagers de la route, certaines pratiques pouvant en effet les mettre en danger, et, bien évidemment, la sécurité des chauffeurs routiers eux-mêmes, problème que j'ai toujours à l'esprit, même si je n'ai pas, d'emblée, cité les chauffeurs routiers, qui sont pourtant aux premières loges, si je puis dire, et qui subissent en premier les risques.
Nous devons tenir compte de la complexité de la chaîne des transports et des impératifs de sécurité que la société impose.
Quatre thèmes que nous retrouvons dans les amendements que j'aurai l'honneur de vous présenter ont très souvent, et même presque toujours, fait l'objet d'un consensus de la part non seulement des professionnels qui ont été auditionnés par la commission des affaires économiques et du Plan, mais aussi des commissaires eux-mêmes.
Premièrement, la solution passe d'abord par une meilleure sélection dans l'accès à la profession. Tous les intervenants l'ont souligné, et cela est incontournable. De l'avis général, le décret du 6 novembre 1997 va d'ailleurs dans le bon sens.
Une meilleure sélection dans l'accès à la profession, cela signifie à la fois une certaine honorabilité, des capacités professionnelles, une capacité financière ; on comprendra pourquoi lorsque l'on parlera de la sous-traitance en cascade et de certains comportements si je puis dire « esclavagistes ». Il convient donc de moraliser l'accès à la profession sous cet aspect.
Le deuxième thème concerne la reprise par ce projet de loi des dispositions du projet de loi présenté antérieurement.
Il s'agit d'abord de la formation professionnelle des chauffeurs routiers. Nous souffrons, en France, d'un déficit de formation par rapport à ce qui existe dans d'autres pays. Je ne prendrai que l'exemple des Pays-Bas, où les chauffeurs routiers sont obligatoirement bilingues et disposent d'un certain nombre de formations initiales qui les rendent compétitifs sur le marché. Cela représente, certes, un certain nombre d'efforts financiers, mais, in fine , cela se retrouve dans la qualité du service et de la prestation. Il nous faut nous aligner sur ce qui nous tire vers le haut et non sur ce qui nous tirerait vers le bas.
Il s'agit encore de la création d'une sanction d'immobilisation administrative du véhicule. Que n'a-t-on entendu sur ce sujet ! La disposition que vous avez proposée, qui a été modifiée par l'Assemblée nationale et que nous améliorerons encore par les amendements que je vous présenterai, va également dans le bon sens.
Il s'agit enfin du renforcement des pouvoirs des contrôleurs des transports terrestres. Je me réserve cette question pour ma conclusion.
Le troisième thème porte sur l'harmonisation du droit des transports routiers avec le droit européen par la substitution au régime actuel d'autorisation préalable de deux licences : une licence communautaire pour les véhicules de plus de six tonnes, une licence intérieure pour les véhicules de 3,5 tonnes à 6 tonnes. C'est la proposition que vous aviez faite.
L'Assemblée nationale a bien travaillé. Je ne suis pas comme M. Mazeaud, qui a dit que le Sénat n'était là que pour corriger les virgules. Je ne dirai pas : « Une fois n'est pas coutume. » Elle a apporté au texte deux innovations essentielles.
La première, vous l'avez dit tout à l'heure, c'est la généralisation de la licence intérieure pour tous les véhicules de transport public de marchandises, même ceux de moins de 3,5 tonnes, pourvu qu'ils aient quatre roues. Il conviendra, sur ce point, de prévoir un régime adapté, notamment au regard des règles des capacités professionnelles et financière. Je vous proposerai un amendement à ce sujet.
La seconde innovation est la création de deux cas nouveaux d'immobilisation immédiate du véhicule et de son chargement : d'abord l'absence du document de suivi dûment signé à bord du véhicule ; ensuite, la mise en danger d'autrui créée par le véhicule au sens de l'article 223-1 du code pénal. La plupart de ces dispositions constituent une avancée.
Nous vous proposerons un dispositif un peu différent, notamment à propos du fait générateur. Nous sommes partis de la préoccupation de l'usager de la route. Or, manifestement, l'absence d'un document de bord n'est pas, en elle-même, une mise en danger de l'usager de la route. En revanche, l'infraction au code de la route en est une.
Mais, compte tenu de notre volonté de transparence, nous vous proposerons certaines modalités sur l'association de ces deux éléments, qui sera le fait générateur. Nous reviendrons sur la mise en danger de l'usager de la route, voire sur la suspicion qui pèserait sur d'autres intervenants.
Enfin, quatrième et dernier thème consensuel : la transposition de cet ensemble au niveau européen. Tout le monde en a parlé et je l'évoquerai dans ma conclusion sous forme de pronostic.
Ce projet de loi, dont les dispositions vont toutes dans le bons sens, ne sera un succès que s'il s'accompagne d'une volonté politique forte de mette en oeuvre les dispositions qu'il contient. C'est la volonté du Sénat, et je n'ose pas imaginer que ce pourrait ne pas être celle du Gouvernement. Mais une chose est de l'affirmer, une autre chose est de le faire.
Une loi n'est efficace que si elle est applicable à tous et que si l'on peut en surveiller l'application. Je reviens donc, comme je l'avais annoncé, sur les contrôleurs des transports terrestres.
J'ai hésité quelque temps à proposer à la commission et au Sénat d'introduire des dispositions élargissant le champ de compétences de ces contrôleurs. Monsieur le ministre, comme vous avez confirmé qu'une table ronde aurait lieu sur le transport routier, je souhaite qu'à cette occasion soit abordé ce problème spécifique afin que ces contrôleurs deviennent réellement efficaces.
Je ne vais pas citer d'exemple, mais vous savez très bien ce qu'il en est lorsqu'un transporteur étranger qui se rend de Bruxelles à Brest est en infraction : les contrôleurs des transports terrestres ne peuvent pas pénétrer dans la cabine. Il faut que le chauffeur leur donne lui-même le document de bord.
Le document étant vierge, il est aisé pour le chauffeur de le remplir et d'affirmer qu'il est respecteux de la réglementation française.
Il est donc nécessaire de pouvoir intervenir. Mais les contrôleurs n'ont pas la compétence pour le faire, pour des raisons que je n'évoquerai pas ici, mais qui sont d'ordre technique et, parfois aussi, il faut le dire, qui relèvent de la défense corporatiste de certains secteurs d'activité liés au contrôle.
Abandonnons cette réflexion verticale par corps de métier, par corps d'intervenant, pour une réflexion transversale qui permette de globaliser l'ensemble du problème, sachant que sa finalité est, bien évidemment, la recherche permanente et pertinente de l'efficacité.
Je souhaite que cet enjeu figure à l'ordre du jour de cette future table ronde. Il vise non seulement la sécurité, mais aussi la lutte contre le dumping, puisque la loi doit être applicable à tous.
Le dumping économique, dont vous avez parlé, est évident. Le dumping social l'est tout autant. Il existe une autre forme de dumping beaucoup plus insidieuse, mais que l'on rencontre de plus en plus fréquemment, le dumping écologique, environnemental.
Il faut faire respecter un certain nombre de normes anti-pollution destinées à éviter de nuire à l'environnement. J'ai eu l'honneur de présenter à Bucarest, voilà quelques mois, des propositions relatives au management environnemental des entreprises et aux éco-audits en espérant que les pays qui ont une économie de transition - les pays d'Europe centrale et orientale, mais aussi les pays périphériques de la Méditerranée - en viendront à une normalisation de type européen ; je pense, notamment, aux normes ISO 9 000 et ISO 14 000, la norme ISO 14 000 correspondant à la volonté de tendre non pas vers la perfection - elle n'est pas de ce monde - mais vers une amélioration de la situation. Il faudrait donc que ces propositions soient prises en compte à l'échelon européen. Nous ne pouvons pas nous permettre de laisser se dégrader le transport routier comme s'est dégradé, voilà déjà, malheureusement, quelques années, le transport maritime.
Pour ma part, j'ai eu l'honneur d'être rapporteur pour avis du budget des ports maritimes, mais également de rapporter un certain nombre de dispositions concernant la sécurité maritime. J'ai siégé par deux fois à l'Organisation maritime internationale à Londres, où j'ai formulé des propositions en ce sens.
Il faut tout faire pour que le transport routier ne connaisse pas la dérive qu'a subie le transport maritime. Je ne parlerai pas des pavillons bis , ni de ces commandants de bord qui demandent leur qualification au Philippines en joignant un chèque dans l'enveloppe, ce qui leur permet de recevoir, par retour du courrier, leur certificat de commandant. C'est ce qui fait que des équipages complets ne parlant pas la même langue, ne connaissant rien en matière de sécurité viennent dériver sur nos côtes et nous inondent soit de pesticides, soit de détonateurs, soit de matières dangereuses qui mettent à mal l'économie de nos pays. Je ne parle même pas de ces bateaux de la honte où les équipages ne sont pas payés. Tout cela est parfaitement inadmissible.
Je crains que si nous ne prenons pas en compte cette dimension du problème, le transport routier ne soit entraîné dans une dérive très rapide. Il est très facile de s'installer quelque part en dehors de l'Union européenne - je ne citerai pas de pays - et d'avoir une flotte de camions résidant dans l'Union, moyennant quoi on peut réaliser des bénéfices, casser le marché, affronter de plein fouet des entreprises qui sont saines et compétitives et, ce faisant, détruire un secteur entier d'activité. Je vous ai rappelé les chiffres, les tonnages et les enjeux financiers et humains que cela concerne.
Monsieur le ministre, ce danger est très important. Il faut toujours tirer les choses vers le haut, ce qui n'est pas facile : il est beaucoup plus facile de les ramener vers le bas. Il y va de notre avenir, de celui des transporteurs routiers et de tout ce secteur d'activité. Je suis persuadé que nous sommes tous conscients de cette difficulté.
La multimodalité est un sujet bien connu, ce n'est pas la panacée, mais elle s'applique parfaitement au long cours.
L'optimisation des moyens de transports doit être notre objectif et notre préoccupation permanente. Cette optimisation doit passer non pas par des actions coercitives mais par des actions positives. Il est urgent de traiter cette question, et d'abord parce que l'assainissement de la profession et des pratiques de transport routier peut permettre des rééquilibrages entre les transports ferroviaire, aérien et fluvial, l'assainissement de la profession diminuant la pression exercée par un certain nombre d'intervenants peu respectueux des dispositions législatives qui ont été évoquées tout à l'heure.
Il faut promouvoir le tranport multimodal aux grandes portes d'entrée de notre pays, telles que les ports, les aéroports, ce qu'on appelle les ports « en sec », et les grandes plates-formes frontalières. Je crois - c'est même une litote car j'en suis persuadé - qu'en la matière le Gouvernement a un rôle à jouer et qu'il doit montrer l'exemple.
Il doit prendre des dispositions dans ce secteur du multimodal en aidant les collectivités candidates à s'organiser, à s'équiper, pour faire disparaître les obstacles, même si les financements ne sont pas à la hauteur des enjeux.
Prenons l'exemple de la plate-forme de Cherbourg, dans la Manche, exemple pris totalement au hasard. (Sourires.) Il suffirait que le réseau ferroviaire soit légèrement modifié pour que l'on dispose d'une plate-forme multimodale compétitive et non encombrée.
Cette multimodalité doit être prise en compte. Elle le sera grâce à ce que j'appelle de mes voeux l'organisation des états généraux du transport qui traiteront du transport en général, dans ses aspects divers et variés : multimodalité, complémentarité des différents modes de transport, harmonisation des conditions sociales, règles de sécurité, évolution du fret aérien ou du trafic maritime. Il faut savoir que 20 % du trafic mondial maritime traverse la Manche et la mer du Nord et, par conséquent, passe devant chez nous. C'est énorme !
Il est nécessaire de prendre en compte les contraintes qui pèsent sur les différents secteurs. Vous en êtes parfaitement conscient, monsieur le ministre ; j'ai eu l'occasion de vous en parler à propos du fret aérien.
Il y a une ardente nécessité à organiser ces états généraux tant du point de vue franco-français, parce qu'ils doivent déboucher sur une réflexion qui nous soit propre, que sur le plan européen, de manière que l'harmonisation nécessaire puisse être sinon imposée du moins fortement suggérée à nos partenaires.
Permettez-moi d'insister aussi sur l'ardente obligation de réfléchir à un mode durable de transport. Le mode durable, le transport durable, le développement durable : cette « durabilité » est un peu la tarte à la crème, tout le monde en parle, mais je ne suis pas sûr qu'on sache la définir. Si j'osais tenter une définition, je dirais qu'elle résulte de la conjugaison de trois obligations : une obligation d'ordre économique, une obligation d'ordre sociopolitique et une obligation d'ordre environnemental. Si vous prenez un triangle dont chaque côté représente une de ces obligations, le jour où ce triangle devient équilatéral c'est que l'objectif de développement durable est atteint.
Ce n'est pas parce qu'on va construire des autoroutes que le problème du transport sera réglé. Je ne suis pas sûr que, considéré sous l'angle de la société, la multiplication des autoroutes soit une bonne chose. Je ne sais pas, je me pose la question, mais en tout cas la notion de « durabilité » doit être absolument présente à votre esprit, au nôtre et à l'esprit de tous ceux qui ont à connaître du secteur.
Monsieur le ministre, j'en ai terminé. Je vous prie d'excuser la longueur de mon exposé, mais la passion l'a emporté sur la raison.
Pour conclure, je dirai que la loi, pas plus que l'intérêt général, ne peut être une simple addition d'intérêts particuliers. En démocratie, la loi est l'écriture nécessaire des codes et des règles de vie de notre société. Elle se doit de mettre en place des garde-fous : elle doit prévoir la sanction à tout manquement à ces codes. Mais notre monde est loin d'être figé, il est en évolution permanente, et cette évolution doit aussi être prise en compte.
La loi doit favoriser les évolutions sans figer le secteur, sans détruire les espaces de respiration nécessaires, liés à la nature de chaque activité.
La commission des affaires économiques et du Plan a tenté d'affirmer une fois de plus qu'il est toujours préférable de privilégier le contrat plutôt que la contrainte, d'encourager la vertu plutôt que de pénaliser le vice. J'espère, monsieur le ministre, qu'aujourd'hui et demain vous tiendrez compte de la volonté exprimée par le Sénat. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur les travées du RDSE et sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Lucien Lanier, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission des lois a procédé à l'examen pour avis du projet de loi tendant à améliorer les conditions d'exercice de la profession de transporteur routier.
Cet avis ne saurait, bien entendu, donner lieu à une appréciation de l'opportunité des dispositions prévues par le texte qui vous est soumis. Cette appréciation relève, en effet, de la compétence de la commission des affaires économiques et du Plan, dont le rapporteur, notre excellent collègue Jean-François Le Grand, vient, avec talent et clarté, de nous exposer le fond du sujet.
La commission des lois s'est donc limitée à une analyse strictement juridique du projet, s'attachant à vérifier si telle ou telle disposition ne contrariait pas certains principes fondamentaux du droit pénal, qu'il s'agisse de la nécessité et de la proportionnalité des peines, ou du non-cumul des sanctions, ou encore du principe de la responsabilité pénale pour son propre fait.
Le projet de loi qui nous est soumis contient en effet certaines dispositions qui relèvent du droit pénal, et notre devoir est bien de veiller au respect des principes fondamentaux applicables en la matière.
Il n'est donc pas de notre propos de reprendre l'ensemble des dispositions du projet de loi qui viennent de nous être parfaitement exposées et qui se regroupent en trois catégories, à savoir : les dispositions non pénales, qui sont de la compétence de la commission saisie au fond, les dispositions pénales qui ne paraissent pas soulever de difficultés juridiques et, enfin, les dispositions pénales qui semblent devoir être mises en concordance avec certains principes fondamentaux du droit.
C'est sur ce troisième aspect que la commission des lois proposera trois amendements.
Le premier concerne l'article 3 ter du projet de loi, inséré, je le rappelle, par l'Assemblée nationale contre l'avis du Gouvernement, et dont l'objet est de prévoir l'immobilisation d'un véhicule en cas d'absence à son bord de tout ou partie du document déjà exigé par la loi retraçant l'exécution des prestations prévues aux contrats de transport routier, à savoir essentiellement les date et heure d'arrivée du véhicule ou de l'ensemble routier.
La modification proposée par l'article 3 ter consiste à prévoir que l'absence de ce document « dûment rempli et signé » par les commettants constitue une infraction au code de la route entraînant l'immobilisation du véhicule telle que l'a définie l'article L. 25 dudit code.
Ainsi conçu, cet article 3 ter aggrave, en l'absence d'une seule signature sur le document, la sanction d'immobilisation du véhicule et alourdit la gamme des sanctions déjà large retenue par la loi ou le règlement.
La commission des lois a considéré que cet article semblait contraire au principe de l'individualisation des peines dans la mesure où la sanction deviendrait automatique sans qu'il soit tenu compte des circonstances. L'expression « entraînant l'immobilisation » confère à l'évidence l'automaticité alors que l'article L. 25 du code de la route énumère les cas, combien plus importants, qui « peuvent entraîner l'immobilisation ».
En outre, cet article 3 ter semble contraire au principe de proportionnalité des peines. L'immobilisation du véhicule est une sanction grave, très grave même - elle peut être mortelle pour une petite entreprise - pour une infraction mineure, puisque le seul oubli d'une seule signature entraînerait son application.
Rappelons que les dix-huit cas d'infraction prévus par l'article R. 278 du code de la route qui entraînent l'immobilisation du véhicule sont bien plus graves : il s'agit notamment de l'ivresse du conducteur, de l'absence du permis de conduire, de la manipulation du limitateur de vitesse ou encore de l'utilisation d'un véhicule dont l'état crée « un danger important pour les autres usagers ».
Enfin, cet article 3 ter semble contraire au principe de la nécessité des peines puisque l'absence de document de bord est déjà passible d'une amende de 5 000 francs, en application de l'article 2 du décret du 25 mai 1963.
Telles sont les raisons pour lesquelles il a paru nécessaire à la commission des lois de proposer la suppression de cet article 3 ter.
Un deuxième amendement est également déposé à l'article 3 quinquies inséré, comme le précédent, par l'Assemblée nationale malgré l'avis du Gouvernement.
Cet article prévoit l'immobilisation immédiate du véhicule en cas de violation d'une obligation de prudence ou de sécurité mettant en danger la vie ou l'intégrité physique d'autrui au sens de l'article 223-1 du code pénal, l'immobilisation se prolongeant « jusqu'à ce que tous les éléments de nature à établir les responsabilités de l'infraction puissent être recueillis ».
La commission des lois constate que l'article 3 quinquies présente des difficultés au regard de trois principes fondamentaux du droit pénal.
D'abord, il est, lui aussi, contraire au principe de l'individualisation des peines puisqu'il rend la sanction automatique.
Ensuite, il paraît également contraire au principe de la nécessité des peines puisque l'article R. 278 du code de la route énumère déjà dix-huit cas rendant possible les immobilisations du véhicule et que ceux-ci paraissent couvrir les manquements graves à la prudence tels que l'ivresse, l'absence de permis de conduire, la violation des règles relatives au transport des matières dangereuses, le mauvais état du véhicule. Ces dix-huit cas sont bien plus précis que le renvoi général aux obligations de prudence, du reste, le pouvoir réglementaire peut parfaitement apporter les compléments qui se révèleraient éventuellement nécessaires.
Pourquoi alourdir la loi de dispositions qui relèvent manifestement du règlement ? Je ne rappellerai jamais assez que la loi doit être courte, claire, précise et facilement applicable. Qu'on laisse donc au règlement le soin d'envisager les détails de son application ! La loi n'est pas faite pour contenir le règlement !
Enfin, l'article 3 quinquies paraît méconnaître le principe de la responsabilité pénale pour son propre fait.
Si la sanction devient automatique, l'immobilisation, peine grave, je le rappelle, pourrait être prononcée alors même que l'entreprise, en l'occurrence le propriétaire du véhicule, n'aurait rien à se reprocher : par exemple, en cas d'ivresse du conducteur. Or l'immobilisation touche directement le propriétaire. Il y aurait donc violation du principe selon lequel, en matière pénale, nul n'est responsable que de son propre fait.
Telles sont les raisons pour lesquelles la commission des lois propose la suppression de l'article 3 quinquies.
Un troisième amendement est en outre proposé à l'article 3 sexies, qui concerne l'obstacle à l'immobilisation du véhicule et le refus d'obtempérer.
Il s'agit là, sans doute, de sanctionner un acte particulièrement répréhensible de la part du professionnel de la route, et la commission des lois comprend parfaitement le souci ainsi manifesté. Elle constate toutefois un défaut de parallélisme entre la définition de l'infraction elle-même, qui vise le conducteur du véhicule, et la définition proposée pour la circonstance aggravante, qui concerne aussi bien le conducteur que le propriétaire du véhicule. Or, dans la mesure où ce dernier, sauf complicité, ne peut être l'auteur de l'infraction, il paraît juridiquement inexact de prévoir qu'il peut commettre la circonstance aggravante.
Il y a là une incohérence et, pour l'éviter, la commission des lois propose de supprimer la référence au propriétaire dans la définition de la circonstance aggravante.
En conclusion, sous réserve des observations qui précèdent et de l'adoption de ses amendements, la commission des lois émet un avis favorable sur le présent projet de loi. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Ostermann.
M. Joseph Ostermann. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le grave problème posé par la profession de transporteur routier dépasse manifestement les clivages politiques. Le texte que nous examinons aujourd'hui en est la preuve puisqu'il reprend, pour une large part, les dispositions du projet de loi relatif à l'enseignement, la formation et la sécurité dans les transports déposé au mois de mars dernier par Bernard Pons et Anne-Marie Idrac.
Ce texte ainsi que les mesures d'ordre réglementaire prises récemment constituent des avancées non négligeables, auxquelles on ne peut qu'adhérer.
Il en est ainsi, tout d'abord, des dispositions visant à restreindre les conditions d'accès à la profession.
Concernant la capacité financière, le décret du 6 novembre dernier, qui a repris les recommandations du rapport Dobias, va évidemment dans le bon sens. En attendant l'entrée en vigueur de ce décret en 1999, une des caractéristiques du secteur des transports de marchandises demeure : il est possible d'y créer une entreprise avec très peu de capital. La loi économique fondamentale selon laquelle, pour créer une entreprise, il faut risquer des capitaux et donc réfléchir à la viabilité du projet n'est que très peu respectée.
Pour ce qui est de la formation professionnelle, les dispositions de l'article 1er constituent certainement un progrès en mettant l'ensemble des professionnels sur un pied d'égalité.
Toutefois, monsieur le ministre, permettez-moi, à ce sujet, de me faire le porte-parole de certaines catégories de transporteurs en compte propre qui ne sont pas soumis à la convention collective ou qui ne relèvent pas d'une convention collective de branche et qui sont exonérés de l'obligation de formation, notamment au titre de l'article 4 du règlement européen. Il en est ainsi, par exemple, des collecteurs de lait.
Le projet adopté par l'Assemblée nationale ne semble pas envisager un tel cas. C'est pourquoi, monsieur le ministre, nous souhaiterions une clarification du dispositif, ainsi qu'un engagement de votre part dans la perspective de la prochaine renégociation de ces dispositions communautaires. Dans votre propos d'introduction, vous y avez fait allusion.
Le second domaine dans lequel votre projet de loi tend à réaliser des avancées concerne le régime des sanctions.
La création d'une sanction d'immobilisation immédiate du véhicule constituera un moyen supplémentaire mis à la disposition de l'appareil répressif, même si cette mesure nouvelle paraît très difficile à appliquer.
Il est très important que cette sanction, si elle est maintenue, soit appliquée avec discernement. C'est la condition du maintien de l'article en cause.
Il convient, par exemple, d'adopter la plus grande fermeté à l'égard des transports de matières dangereuses. Un comportement laxiste dans ce domaine pourrait constituer une menace pour l'environnement ainsi que, en cas d'incident, un risque inutile pour les sapeurs-pompiers et les autres intervenants.
En revanche, une immobilisation trop hâtive pourrait se révéler extrêmement pénalisante pour le transport de denrées périssables ou encore pour les transporteurs appelés à respecter des délais impératifs, notamment en vue d'alimenter des chaînes de montage.
Il convient donc de bien distinguer le simple incident de la fraude volontaire, ce que certains de nos voisins européens font mieux que nous.
Enfin, la mesure proposée par la commission visant au paiement direct du transporteur routier par le donneur d'ordre initial ne peut qu'être salutaire pour lutter contre le mal endémique que constitue la sous-traitance « en cascade », comme le souligne notre collègue Jean-François Le Grand dans son excellent rapport.
La surcapacité dont souffre la profession, source de sous-tarification, conduit à une sous-traitance d'exploitation et non à une véritable sous-traitance de compétence, de savoir-faire et de spécialisation, la finalité étant souvent, compte tenu des prix pratiqués, de faire porter sur d'autres l'obligation de transgresser les normes.
Il convient toutefois, à mon sens, d'engager une réflexion approfondie sur les conséquences fâcheuses qu'une telle mesure risque d'avoir pour la profession de commissionnaire-organisateur de transport et, plus généralement, sur les relations contractuelles dans la chaîne logistique.
Malgré le caractère positif de ces dispositions, il est permis de douter qu'un texte ne comportant que sept articles puisse régler l'ensemble des difficultés dont souffre la profession.
Ainsi, le problème n'est sans doute pas tant d'introduire une réglementation supplémentaire que de faire appliquer les règles existantes, règles qui sont constamment bafouées.
Par exemple, selon le rapport Doguet, qui date de 1990, 40 % des semi-remorques dépassent le poids maximal autorisé sur autoroutes.
Selon une étude du Comité national routier réalisée en 1992, certaines entreprises parviennent à afficher un prix inférieur de 30 % à la tarification routière de référence, prix qu'elles ne peuvent pratiquer sans transgresser le code de la route et la législation sociale.
Pour assainir la profession, il convient donc de faire en sorte que la législation en vigueur soit appliquée, ce qui n'est pas le cas actuellement. En effet, malgré les récentes créations de postes, le nombre de contrôleurs est bien trop faible par rapport aux besoins. Par conséquent, un grand nombre d'entreprises, notamment les plus petites, échappent à tout contrôle.
Vérifier et contrôler, oui, mais avec le souci d'aider et de comprendre plutôt qu'avec la volonté de sanctionner de manière quasi aveugle. Ne soyons pas plus sévères à l'égard des entreprises françaises qu'à l'égard des entreprises étrangères dont les véhicules circulent sur notre territoire.
En outre, la plupart des entreprises qui fraudent sont connues ; elles devraient donc faire l'objet d'un contrôle ciblé.
En matière de législation sociale, qui constitue le premier domaine de fraude - insuffisance de repos journalier, dépassement des durées de conduite journalières -, plutôt que de réglementer sans cesse, l'Etat devrait accompagner le processus contractuel d'assainissement que la profession mène elle-même en son sein.
Si l'article 6 bis va dans le bon sens en permettant l'identification des véhicules arrivant à proximité de l'aire de chargement ou de déchargement, il faut veiller à ne pas mettre en place un système compliqué, impossible à appliquer et extrêmement contraignant.
Enfin, il convient de regretter le caractère tardif de ce projet de loi, dont les effets n'auront pas le temps de se faire sentir avant l'entrée en vigueur de la libéralisation du cabotage, en juillet prochain. Toute entreprise européenne pourra ainsi exercer son activité librement sur notre territoire sans titre de transport.
Je m'associe d'ailleurs pleinement aux fermes propos qu'a tenus M. le rapporteur au sujet de la réglementation européenne.
Je vous invite, monsieur le ministre, à engager les négociations avec nos partenaires en vue d'une harmonisation des conditions sociales et des conditions de concurrence au sein de l'Union européenne. L'harmonisation est particulièrement nécessaire en matière de retraite, d'horaire, de salaires et de véhicules, la France étant toujours à l'avant-garde dans ces domaines.
Ces disparités sont particulièrement inquiétantes pour les entreprises de mon département, le Bas-Rhin, et des autres départements frontaliers, qui craignent l'arrivée sur le marché de transporteurs des autres pays, crainte largement justifiée en matière de dépassement des durées de conduite et de repos journalier.
Alors qu'en France le chef d'entreprise assume seul la responsabilité d'un dépassement d'horaire, en Allemagne, celle-ci est partagée entre le chauffeur et le chef d'entreprise, les dépassements n'étant pas toujours imposés par l'entreprise.
L'harmonisation européenne est également nécessaire en matière de normes dimensionnelles, car la France risque aussi d'être pénalisée à cet égard. Ainsi, les remorques immatriculées aux Pays-Bas sont carrossées à 16,50 mètres, contre 15,40 mètres pour les françaises, ce qui leur permet de charger trois palettes de plus. De même, les bus allemands peuvent circuler avec une longueur de 14 mètres, contre 12 mètres pour les bus français, ce qui leur permet de transporter de quinze à vingt personnes de plus dans des véhicules carrossés à deux étages, comme cela est autorisé en Allemagne.
Les distorsions de concurrence entre les deux rives du Rhin sont donc flagrantes et pèsent fortement sur la compétitivité de nos entreprises par rapport à celles des pays voisins et des autres pays susceptibles d'intégrer prochainement l'Union européenne.
Je souhaiterais enfin attirer votre attention sur le fait que les trente-cinq heures appliquées de façon contraignante et exclusivement en France à la profession du transport routier sonneront le glas pour de nombreuses entreprises dont les dirigeants, accablés par les charges diverses et la suréglementation, sont déjà fortement démobilisés et ne pourront plus lutter à armes égales.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Les trente-cinq heures, on en est loin dans les transports routiers !
M. Joseph Ostermann. Dépôts de bilan, arrêts d'exploitation et délocalisations vont encore gonfler les chiffres alarmants des demandeurs d'emploi. L'Etat-providence sera-t-il capable de faire face, une fois de plus, à ce manque total de réalisme ?
Pourriez-vous nous exposer vos objectifs ainsi que la position que vous allez défendre à l'égard de nos partenaires européens ?
Dans cette perspective, un rapport sur les principales distorsions au sein de la Communauté pourrait vous être adressé, si vous le souhaitez.
Monsieur le ministre, en dépit des zones d'ombre que je viens d'évoquer et sous réserve des réponses que vous voudrez bien apporter à nos interrogations, mes collègues du groupe du RPR et moi-même voterons votre projet de loi, qui va dans le sens de la politique engagée par le précédent gouvernement. (Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Descours.
M. Charles Descours. Mon intervention, monsieur le ministre, portera sur une modification de la LOTI, mais elle concernera un autre article que ceux qui sont visés par le projet de loi.
Pour ce qui est du projet de loi en tant que tel, mon groupe et moi-même, comme vient de l'annoncer mon collègue Joseph Ostermann, serons solidaires des conclusions de nos deux excellents rapporteurs, tout en sachant que bien d'autres problèmes se posent dans le transport routier, notamment en ce qui concerne le carburant et le transfert sur le rail. Mais ces sujets donneront lieu à d'autres débats et à d'autres textes.
Je centrerai mon propos sur le transport de voyageurs et, plus particulièrement, sur les difficultés rencontrées par les autorités organisatrices de transport.
En effet, depuis l'arrêt du Conseil d'Etat du 15 avril 1996 rendu à propos d'un contrat relatif à la collecte et au transport d'ordures ménagères, une grande insécurité juridique pèse sur les autorités organisatrices : celles-ci ne savent pas avec certitude sur quels textes s'appuyer, loi Sapin ou code des marchés publics, pour leurs contrats conclus avec des tiers lorsqu'il s'agit d'exploiter le service public de transport.
Avant que cet arrêt n'ait été rendu, les autorités organisatrices de transport appliquaient systématiquement la procédure issue de la loi du 29 janvier 1993, dite « loi Sapin », indépendamment du mode de rémunération de l'entreprise et donc quel que soit l'aléa financier supporté par l'entreprise.
Les modifications de la loi Sapin intervenues en 1994 et en 1995 - introduction de seuils en dessous desquels une procédure simplifiée peut être mise en oeuvre - concernaient explicitement les transports publics et plus particulièrement les transports scolaires. Je rappelle les débats parlementaires de l'époque. Le législateur considérait donc que les transports publics étaient clairement dans le champ de la loi Sapin et que l'introduction de seuils permettait d'appliquer cette législation, y compris aux petits contrats.
Or, l'arrêt Préfet des Bouches-du-Rhône, apparemment contre l'avis du législateur, avance le seul critère financier pour discriminer les contrats relevant de la délégation de service public de ceux qui relèvent du marché public. En effet, sont des marchés publics, selon cet arrêt, je cite, « les contrats dans lesquels la rémunération du cocontractant de l'administration n'est pas substantiellement assurée par les résultats d'exploitation ». Que signifie le mot « substantiellement » ? Cela représente-t-il 20 %, 50 % ou 80 % ?
Or, la jurisprudence du Conseil d'Etat en matière de délégation de service public fait habituellement référence à un faisceau de critères parmi lesquels figure, certes, le critère financier, mais non exclusivement d'autres critères, à savoir une activité de service public susceptible de faire l'objet d'une délégation, une délégation comportant un véritable transfert de gestion, un délégataire réputé agir pour le compte du délégant et une entreprise en contact direct avec l'usager.
En l'occurrence, les différents critères n'étaient pas remplis. Voilà pourquoi cet arrêt ne définit pas à lui seul la délégation du service public.
D'ailleurs, dans un avis en date du 7 octobre 1986, le Conseil d'Etat précisait le champ d'application de la gestion déléguée, précision reprise par une circulaire du 7 août 1987 : « le contrat nommé ou innommé par lequel un entrepreneur est chargé de l'exécution même du service public n'est pas un marché et, par suite, n'est pas soumis au code des marchés publics ».
A contrario, le projet de la loi relatif au code des marchés publics, déposé sous la législature précédente et non discuté, précisait que le code des marchés publics s'appliquerait aux contrats par lesquels les personnes de droit public se procurent des fournitures, des prestations de service et réalisent des travaux.
La nature même du contrat par lequel une autorité organisatrice confie l'exploitation du service public de transport, que ce soit un réseau urbain, un réseau départemental ou les services mis en place à titre principal pour les scolaires, à une entreprise qui sera directement en relation avec l'usager - prise et dépose à des points d'arrêt - et percevra pour son propre compte ou celui de la collectivité des titres de transport auprès desdits usagers relève, à l'évidence, de la délégation de service public, et donc de la loi Sapin.
Pourquoi faut-il clarifier très rapidement le choix de procédure ? Je signale que je parle pour les élus de toutes tendances, au nom du GART, le groupement des autorités responsables de transport, et des présidents de conseils généraux, quelle que soit leur sensibilité politique. Les fonctionnaires de votre ministère, monsieur le ministre, comme ceux du ministère de l'intérieur et du ministère des finances sont très informés de cette affaire qui s'est produite sous le gouvernement précédent.
Après l'arrêt du Conseil d'Etat, une circulaire du ministère des transports et une réponse de Mme Anne-Marie Idrac, alors secrétaire d'Etat, à une question écrite que j'avais posée reconnaissaient les difficultés d'interprétation introduites par cet arrêt mais préconisaient de continuer à appliquer la loi Sapin en attendant la transposition des directives européennes sur les services, et plus particulièrement de la directive 96/38 concernant les opérateurs de réseaux. Or cette directive doit être transposée d'ici peu. Un projet de décret de transposition est en cours de finalisation. Il a été transmis aujourd'hui au GART pour nous demander notre avis. Je vous remercie de nous l'avoir transmis ; je n'en ai pas encore pris connaissance.
Monsieur le ministre, j'étais intervenu sur ce sujet au cours de la discussion budgétaire. Vous vous étiez engagé à examiner sérieusement le problème qui, aviez-vous ajouté, devra être résolu rapidement.
Aussi, j'attire votre attention sur le fait que ce décret, même lorsqu'il sera paru, ne sera pas applicable immédiatement et qu'il ne pourra pas résoudre les problèmes de qualification juridique des contrats.
Des positions prises tant au niveau national par la commission centrale des marchés et la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, qu'au niveau local par les représentants de cette dernière, il ressort clairement la volonté de ne retenir que le critère financier pour déterminer le choix de procédure. Cette position a déjà été exprimée localement lors de la procédure lancée par des autorités organisatrices, notamment par la ville de La Rochelle qui a dû changer le statut juridique de son entreprise de transport afin de ne pas passer sous les fourches Caudines de la DGCCRF. Des informations recueillies auprès de Bercy, il apparaît qu'une circulaire devrait préciser, sitôt le décret de transposition signé, que le critère financier est essentiel pour déterminer la procédure.
Pour les autorités organisatrices de transport, c'est-à-dire les cent soixante-dix agglomérations, départements ou régions organisatrices de transport du GART, pour l'association des présidents de conseils généraux, qui sont autorité organisatrice de transport dans leur département, notamment pour les transports scolaires, il est indispensable de contrecarrer ce mouvement visant à réduire le champ d'application de la délégation de service public, et ce pour plusieurs raisons.
Les collectivités locales doivent être fixées au début de 1998 sur la procédure à suivre pour les contrats de transport scolaire qui arrivent à échéance à la rentrée 1998. Compte tenu de la longueur de la procédure, nous devons être fixés en février.
L'expérience montre que l'application du code des marchés publics conduit bien souvent à retenir le moins-disant, alors que tout le monde s'accorde en matière de transport public - c'est vrai pour le transport de voyageurs comme pour le transport de marchandises - sur les dangers du moins-disant en matière tant de respect du droit social et de sécurité que de qualité du service et de sa pérennité. A cet égard, l'application de la loi Sapin semble avoir apporté des résultats probants.
Les modifications fréquentes du service, en particulier à chaque rentrée scolaire, nécessitent des avenants pour lesquels la loi Sapin est mieux adaptée que le code des marchés publics.
L'investissement de l'entreprise dans la gestion du service nécessite une certaine durée du contrat, de l'ordre d'au moins cinq ans. Le principe d'adaptation du service public est parfaitement pris en compte par la délégation de service public, qui autorise de manière plus libérale, tout en respectant la transparence prévue par la loi Sapin, la prise en compte de nouveaux besoins, et ce contrairement à la conception classique des marchés publics.
Par ailleurs, un contrat passé selon la procédure des marchés publics mais dont l'objet serait différent de celui d'un marché public poserait à l'évidence des problèmes juridiques, notamment en cas d'accident et de recours de tiers à l'encontre de l'exploitant ou de l'autorité organisatrice.
Enfin, une entreprise évincée lors de cette procédure relevant du code des marchés publics, qui peut déposer un recours et le gagner, a toutes les chances de devenir titulaire du contrat, et ce quelle que soit sa capacité à exploiter le réseau.
C'est pourquoi, monsieur le ministre, au nom de ces élus, toutes tendances confondues, issus pour la plupart de la province puisque la LOTI ne s'applique pas en Ile-de-France - c'est la raison pour laquelle je suis un peu inquiet de constater que le ministre des finances et le ministre des transports sont des élus d'Ile-de-France -...
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Avec mon accent...
M. Charles Descours. C'est pourquoi, disais-je, au nom de tous les élus de province, toutes tendances confondues, qui s'occupent de transport, je vous assure que l'insécurité juridique dans laquelle nous sommes est grave. Compte tenu de l'arrêt du Conseil d'Etat, tout tribunal administratif ou toute chambre régionale des comptes pourra nous épingler.
Sur ce point, la transposition par décret qui est imminente et surtout la circulaire de Bercy qui pourraient lui succéder nécessiteront - je le dis très sincèrement mais vous le savez - un arbitrage du Premier ministre. Tous les élus qui s'occupent de transport vous seront reconnaissants de votre intervention, monsieur le ministre. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Lefebvre.
M. Pierre Lefebvre. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, n'est-il pas paradoxal qu'un secteur économique en plein essor comme celui du transport routier soit dans un tel état de crise ? N'est-il pas aberrant, alors que la branche des transports routiers connaît un tel développement, de voir les chauffeurs routiers travailler dans des conditions aussi indignes pour notre pays ?
C'est bien la preuve, selon nous, que lorsqu'une économie, si performante soit-elle, est soumise aux objectifs de rentabilité financière maximale et immédiate, elle se nourrit de l'exploitation des hommes et génère le sous-développement et la précarité.
En effet, qui profite de la croissance des transports routiers de marchandises ? Certainement pas les routiers, qui travaillent entre 200 heures et 250 heures par mois pour un salaire à peine plus élevé que le SMIC, et ce au risque de leur vie. Serait-ce les patrons du transport routier ? A coup sûr ! Et encore faut-il distinguer, d'une part, les petites et moyennes entreprises et les artisans, qui subissent les conditions du marché, et, d'autre part, les grands transporteurs, qui régissent la profession et refusent le progrès social dans ce secteur, ainsi que les chargeurs et les principaux clients, notamment les groupes de la grande distribution dont l'opulence financière et boursière n'est plus à démontrer, qui soumettent les transporteurs au régime des flux tendus.
Ce paradoxe apparent n'est en vérité que le résultat du fonctionnement même du capitalisme par lequel la richesse accumulée profite au grand patronat au détriment de ceux qui la créent.
D'aucuns prétendent que les conflits des routiers qui ont eu lieu ces dernières années s'expliqueraient essentiellement par l'absence de dialogue entre les partenaires sociaux. Mais peut-il exister une quelconque culture de la négociation quand il y a un tel degré de subordination et d'exploitation dans cette profession ? A cet égard, on a reproché à M. le ministre des transports sa position durant le dernier conflit - cela vient d'être rappelé par M. le rapporteur - en particulier sa visite nocturne, voire matinale, d'un barrage au Mans.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Très matinale !
Mme Hélène Luc. C'était bien, pourtant !
M. Pierre Lefebvre. Que la droite s'offusque lorsqu'un gouvernement de gauche apporte son soutien aux victimes du système économique ne me surprend pas. Mais, au fond, messieurs de la droite, que vaut-il mieux : une partialité affichée en faveur des exploités ou une partialité peut-être plus discrète mais bien réelle en faveur des exploiteurs ?
Au nom du libéralisme et de son pendant, la déréglementation tous azimuts, l'Etat a déserté ce secteur parmi tant d'autres pour laisser place à une véritable jungle économique. Le droit du travail, la réglementation du transport et le code de la route sont souvent sacrifiés sur l'autel du dumping économique et social.
C'est pourquoi il est, selon nous, primordial de ne pas dissocier la question de l'assainissement de la profession des transporteurs routiers de celle de la régulation du trafic routier en général. Il est inacceptable qu'un accident de la route soit provoqué par un conducteur de poids lourd n'ayant pas eu son quota de repos journalier pour satisfaire aux exigences des donneurs d'ordre. Un routier mieux payé, plus reposé présente logiquement moins de risque pour lui-même et pour tous les usagers de la route.
Notre souci - je sais que vous le partagez, monsieur le ministre - est que le conducteur routier, première victime de cette déréglementation, ne soit plus le coupable désigné de l'insécurité sur les routes de France.
M. Fernand Tardy. Très bien !
M. Pierre Lefebvre. La colère des routiers est donc doublement compréhensible. D'une part, elle a sa source dans leur refus d'être les instruments flexibles d'intérêts économiques et financiers à court terme. D'autre part, elle a sa source dans le fait d'être directement exposés, jusque dans leur chair, aux conséquences de la concurrence sauvage incontrôlée. L'appel à la réglementation dans ce secteur, lancé par les grévistes avec le soutien de l'opinion publique, y compris par une certaine catégorie des patrons, tranche avec le discours libéral des dernières années. Il ne s'agit pas pour autant de revenir à une gestion administrative semblable à celle qui prévalait avant 1986 ; il s'agit d'aller vers une régulation démocratique et équilibrée.
Le groupe communiste républicain et citoyen se félicite du fait que ce projet de loi, tel qu'il a été amendé par l'Assemblée nationale, crée de nouveaux cas d'immobilisation immédiate de véhicule. Ce type de mesure a la vertu d'être dissuasif, de responsabiliser les chargeurs et concerne tout camion, français ou non, qui traverse notre territoire.
A cet égard, le rapport pour avis présenté au nom de la commission des lois par notre collègue Lucien Lanier, qui préconise de supprimer purement et simplement ce type de mesures, me laisse perplexe. Comment se fait-il que la droite, pourtant si soucieuse de la fonction répressive de l'Etat, se montre ici plus laxiste et juge disproportionnée la sanction d'immobilisation immédiate ?
Le discours de la droite pourrait se résumer à ceci : « La sécurité est la première des libertés... après la liberté économique ! » ; « L'intérêt général, après les intérêts patronaux ! »
Un autre argument avancé en faveur de l'immobilisation immédiate était de pallier les lacunes des commissions de sanctions administratives, dont on a remarqué le peu d'efficacité et le manque d'assiduité en leur sein. C'est pourtant, à notre avis, un outil essentiel à l'autorégulation de la profession.
L'amendement déposé par le groupe communiste républicain et citoyen vise à fixer une périodicité aux réunions de ces commissions. L'objectif est de crédibiliser et ainsi de pérenniser une telle structure. Renforcer les contrôles et les sanctions et s'en donner les moyens matériels, humains et juridiques répondent aux exigences de la profession elle-même.
Ce projet de loi ainsi que l'ensemble des mesures qui l'accompagnent ne peuvent que contribuer à remettre de l'ordre dans une profession très hétérogène. Ainsi, nous souhaitons que la question épineuse de l'identification du véhicule à proximité du lieu de chargement ou de déchargement soit résolu le plus rapidement possible. Une telle incertitude ne peut qu'inciter des donneurs d'ordre peu scrupuleux à profiter plus encore de l'élasticité du temps de travail des conducteurs.
Le mérite de votre dispositif, monsieur le ministre, est de saisir le problème des transports routiers dans sa globalité. Cela dit, le retard pris par ce secteur en matière de législation sociale est tel qu'il ne peut, à lui seul, suffire à le combler. C'est pourquoi il nous semble que l'Etat doit réinvestir ce secteur au côté des partenaires sociaux pour réorienter la politique des transports dans ce pays en faveur du progrès social, de l'emploi et d'un aménagement équilibré du territoire.
L'avenir du transport routier est plein de promesses, mais il est aussi chargé d'inquiétudes profondes.
La libéralisation du cabotage prévue pour le 1er juillet 1998 nous préoccupe tout particulièrement. Il est évident que le dumping social et économique qui existe déjà se trouvera décuplé dans le cadre d'un marché européen totalement ouvert. Quelles garanties avons-nous que les digues que nous construisons aujourd'hui ne seront pas, demain, englouties par une vague libérale dévastatrice ?
Plutôt que de colmater les brèches en attendant cette échéance, comme l'a fait le gouvernement précédent, vous avez, quant à vous, monsieur le ministre, multiplié les démarches auprès de vos collègues pour tenter d'harmoniser par le haut la réglementation sociale dans le transport routier. Le mémorandum que vous avez adressé au conseil des ministres des transports des différents Etats membres est à notre sens offensif et anticipateur. En effet, vous avez raison de dire que l'harmonisation doit précéder la libéralisation. Toute réglementation postérieure à cette échéance ne pourrait se faire qu' a minima et serait préjudiciable à la cohérence de notre propre législation. Le développement des échanges de marchandises entre la France et l'Union européenne depuis quelques années est une chance pour l'économie de nos régions ; encore faut-il qu'il ne se traduise pas par une exacerbation de la concurrence entre routiers européens.
En outre, il est à craindre que la libéralisation n'accentue encore la tendance actuelle du transport français à faire assurer l'essentiel du trafic par la route au détriment de techniques moins utilisées, telles que les voies navigables ou le chemin de fer. Les gouvernements successifs ont eu trop tendance à considérer ces différents modes de transport comme exclusifs et interchangeables. L'idée selon laquelle la croissance de l'un ne peut se faire qu'aux dépens d'un autre est une idée fausse. Il est au contraire de l'intérêt même des transporteurs routiers de voir émerger d'autres options.
Si la route demeure le principal moyen de transport, c'est parce qu'elle présente effectivement des avantages que les autres modes de transport n'ont pas. L'Etat, conformément aux orientations préconisées par la Commission de Bruxelles, a jusqu'ici cautionné un tel état de fait. C'est donc à lui qu'il revient, dans le cadre communautaire si besoin est, de favoriser l'exploitation du rail, des canaux et la complémentarité entre ces différents modes de transport.
Les entreprises de transport doivent désormais intégrer dans leur gestion les variables sociales et environnementales et non plus les seuls critères financiers. La loi du marché ne peut que conduire à terme à une situation de quasi-monopole de la route, parallèlement à une atomisation anarchique du secteur routier que le système de contrôles et de sanctions ne pourra seul contenir.
Cette profession a trop longtemps été mise à l'écart du progrès social ; aussi veillerons-nous à la bonne mise en oeuvre des dispositions annoncées qui vont dans ce sens.
Monsieur le ministre, nous pouvons vous assurer que votre projet de loi aura notre soutien, sous réserve, bien évidemment, qu'il ne soit pas dénaturé par la droite. Mais cela, nous le verrons lors de la discussion des articles. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Bellanger.
M. Jacques Bellanger. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, par un décret du 6 mai 1988, pris en application de l'ordonnance du 15 décembre 1986, le gouvernement de M. Jacques Chirac mettait un terme à la tarification routière obligatoire. La mode était déjà à la déréglementation.
Le résultat ne s'est pas fait attendre : les prix ont baissé de 25 à 30 % en dix ans dans un marché pourtant en pleine expansion. Mais dans quelles conditions !
Huit mille sept cents sociétés nouvelles sont apparues ou, plutôt, se sont succédé, puisque leur taux de survie après cinq ans est inférieur à 50 %. Voilà un record qui n'a rien d'étonnant puisque les marges sont souvent inférieures à 2 %. Dès lors, la course au prix de revient met en cause la sécurité sur nos routes et plonge toute une partie de la profession, que ce soit les salariés ou les petits patrons, qui, dans bien des cas, partagent la même misère, dans un état que certains auraient appelé, hier encore, un sous-prolétariat.
En face d'eux se trouvent des donneurs d'ordre, très divers dans leur statut et leur comportement, mais dont on sait très bien que certains tirent beaucoup plus de profits de leur position d'intermédiaire que de l'exercice du métier de transporteur routier. La sous-traitance a progressé, en dix ans, de 40 % et les dividendes distribués dans les grands groupes, rapportés aux fonds propres, ont doublé depuis 1985.
Dans le même temps, l'appareil de l'Etat, lui aussi paupérisé, n'a pu faire face à la montée en activité du secteur. Non seulement les contrôles sont insuffisants, mais ils sont mal organisés et régis par des textes souvent inapplicables et parfois obsolètes, ainsi que l'a indiqué M. le rapporteur. Les tribunaux, comme à l'habitude, sont débordés. Les amendes sont peu dissuasives : en moyenne vingt francs par an et par véhicule !
Les résultats sont connus : une profession auparavant citée en exemple et aujourd'hui désignée comme l'un des principaux responsables de l'insécurité routière ; un secteur économique dont la majorité des entreprises n'est pas viable ; un groupe social contraint à transgresser la loi pour survivre ; enfin, des désordres sociaux inévitables, mais avec des conséquences économiques importantes dans un système de production souvent tributaire du système de flux tendu.
Cet exemple nous montre bien les conséquences du choix libéral dans l'économie. Si le marché doit exister - nous le croyons - il doit en permanence être corrigé, régulé par l'Etat au profit de l'intérêt commun.
Depuis la déréglementation de 1987, le transport routier n'a pas réussi à substituer à la réglementation administrative ancienne un nouveau mode de régulation.
Trois grèves dures - en 1992, en 1996 et en 1997 - ont secoué la profession et l'économie du pays. Les mesures acceptées pour mettre fin aux conflits en 1992 et en 1996 n'ont pas été appliquées. Les décrets de 1992 et de 1993, ramenant la durée de conduite hebdomadaire à quarante-huit heures sur douze semaines, sont des voeux pieux. Les engagements de 1996, tels le versement d'une prime de 3 000 francs et le dispositif de fin de carrière, n'ont été appliqués que par une minorité d'entreprises.
Le conflit de 1997 n'a pu se régler rapidement que par une intervention dès sont commencement du gouvernement Jospin, et le Président de la République a d'ailleurs salué cette diligence. Dès le 10 novembre, vous annonciez, monsieur le ministre, une série de douze mesures.
Six sont d'ores et déjà réalisées : le durcissement des conditions d'accès à la profession - c'est le décret du 6 novembre 1997 - le renforcement des effectifs de contrôle dans la loi de finances de 1998 - vous venez de nous informer de son importance, monsieur le ministre - un abattement de 800 francs par mois pour les poids lourds de plus de 16 tonnes - cette mesure figure dans la loi de finances rectificatives de 1997 - et le dépôt d'un mémorandum pour une harmonisation européenne des règles sociales dans les transports routiers. A cet égard, monsieur le ministre, quel calendrier pensez-vous possible pour l'avenir ? Quelles autres mesures sont-elles envisageables pour une meilleure régulation à l'échelon européen ? En particulier, ne pourrait-on pas rendre obligatoire un document comparable à celui qui a été défini en France par la loi du 1er février 1995, document qui mentionnerait les dates et heures d'arrivée aux lieux de chargement et de déchargement, ainsi que les dates et heures de départ ? Il y aurait ainsi une harmonisation européenne, que vous avez raison de souhaiter, monsieur le rapporteur. J'ai cru comprendre en écoutant votre intervention, monsieur le ministre, que vous annonciez cette concertation pour le premier trimestre de cette année.

Les deux dernières mesures déjà réalisées sont le projet de loi tendant à améliorer les conditions d'exercice de la profession de transporteur routier, que nous examinons aujourd'hui, et l'extension du protocole salarial du 7 novembre à toutes les entreprises de transport, que vous avez décidée par arrêté.
Six autres mesures doivent intervenir rapidement : la mise en place d'une table ronde transporteurs-chargeurs que notre débat a reportée. Mais vous avez dit qu'elle se tiendrait le 13 février prochain ; la création d'un observatoire des conditions économiques et sociales ; une hausse de 4 % de la taxe parafiscale sur les cartes grises affectée à la formation ; la prolongation du dispositif de réduction des charges sur les bas salaires pour les entreprises qui respectent le contrat de progrès ; l'extension au transport de zone courte des dispositions du contrat de progrès applicable à la longue distance pour le décompte du temps de travail. Sur ce dernier point, monsieur le ministre, où en sont les négociations ? Ces dispositions s'appliqueront-elles à la petite messagerie qui, aujourd'hui, se développe un peu dans l'anarchie et parfois sous couvert de franchise ?
Enfin, la dernière mesure est l'extension du congé de fin d'activité aux conducteurs de transport interurbain de voyageurs.
Le projet de loi que vous nous présentez aujourd'hui reprend largement les dispositions du projet élaboré par Mme Idrac et par M. Pons en mars 1997, mais qui n'a jamais pu être discuté par le Parlement. Vous les avez, monsieur le ministre, messieurs les rapporteurs, largement exposées, et mon collègue M. Fatous y reviendra tout à l'heure.
Je souhaite simplement insister sur deux points.
S'agissant de l'immobilisation du véhicule, toutes les parties sont, me semble-t-il, unanimes pour considérer que cette sanction est l'une des seules qui puisssent dissuader les donneurs d'ordre d'exiger des conditions de transport abusives.
L'Assemblée nationale avait proposé une rédaction qui n'avait pas reçu l'accord du Gouvernement. La commission des affaires économiques et du Plan propose un amendement et vous-même, monsieur le ministre, en avez déposé un autre. Cette rédaction appelle trois questions.
Tout d'abord, nous comprenons parfaitement que les différents aspects de ce texte soient solidaires les uns des autres. Mais infliger une amende de 25 000 francs à un conducteur, qui peut être un salarié, pour un dépassement de la vitesse autorisée à la suite d'une pression de son employeur - pression qui n'est pas toujours prouvable - ne peut que conduire à s'interroger. Bien sûr, c'est une arme pour le salarié, mais pourra-t-il l'utiliser ?
Ensuite, rendre le conducteur responsable d'un dépassement de la durée et des conditions légales de conduite lorsqu'il est salarié me paraît une nouveauté en matière de droit social et, là aussi, je m'interroge. Je sais que la seconde partie du texte vise la responsabilité de l'employeur et que celle-ci est encore plus durement sanctionnée, y compris par une peine de prison ; je sais aussi que les juges pourront apprécier les conditions de l'infraction. Il n'empêche que je m'interroge toujours !
Enfin, la pièce qui va servir de référence pour la responsabilité du donneur d'ordre est le document de suivi. Ce sera le moyen de contrôler si la réglementation en matière de droit du travail et de sécurité routière est respectée. Cependant, même s'il est encadré par la loi, ce n'est qu'un document contractuel. Je m'interroge encore : ne serait-ce pas plus simple d'en faire un document administratif ?
Par ailleurs, la commission des affaires économiques et du Plan propose un article additionnel à la loi relative à la sous-traitance dans le domaine du transport routier de marchandises. Il s'agit d'instituer le paiement direct du sous-traitant par le donneur d'ordre. J'approuve totalement l'esprit de ce texte, qui tend à moraliser la profession d'intermédiaire. Je m'interroge beaucoup, cependant, sur sa mise en oeuvre effective : pour avoir longtemps travaillé dans le secteur privé, je crains que les échappatoires ne soient extrêmement nombreuses.
Vous aurez compris, monsieur le ministre, que le groupe socialiste du Sénat approuve sans détour l'action du Gouvernement. Nous voterons donc le texte qui nous est proposé, sauf si notre assemblée décidait de le dénaturer. Mais pourquoi le ferait-elle s'agissant d'un texte issu du gouvernement d'Alain Juppé ? Après avoir entendu M. le rapporteur, j'éprouve d'ailleurs plutôt un certain optimisme.
Trois mois après la fin du conflit de 1997, le Gouvernement a donc tenu plus de la moitié de ses engagements : le fait est assez inhabituel pour être souligné. Nous ne sommes pourtant pas à l'abri de nouveaux conflits dans les mois à venir. En effet, l'atomisation de cette profession, les intérêts contradictoires qui la divisent, la situation économique et sociale de beaucoup de ses salariés et de ses travailleurs indépendants, la concurrence européenne à venir, tout dans ce secteur en fait un terrain particulièrement sensible - y compris à la démagogie politique - et nous voyons tous qui pourrait en tirer profit.
Notre vigilance doit donc être constante : les engagements doivent être tenus et le secteur restructuré. Le temps et la manière de le faire compteront sans doute beaucoup. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Fatous.
M. Léon Fatous. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous ne pouvons que nous féliciter d'avoir, enfin, un large débat - après celui qu'ont connu nos collègues de l'Assemblée nationale - sur l'avenir de la profession de transporteur routier.
En effet, les conflits et les grèves ont montré à quel point le secteur du transport routier connaissait une crise interne sans précédent. Il fallait absolument qu'un recadrage soit effectué, d'autant que 1998 se marquera, dans ce secteur, par un grand changement au sein de l'Union européenne avec ses nouvelles donnes, notamment la libéralisation du cabotage le 1er juillet 1998.
Plusieurs objectifs s'imposent à nous.
Il s'agit, tout d'abord, d'améliorer les conditions de travail des conducteurs routiers par un plus grand respect du code du travail et de la sécurité routière, avec une rémunération reflétant davantage l'effort et le temps de travail réel.
Il s'agit, ensuite, d'harmoniser la législation de la profession de transporteur routier, tant dans le renforcement des conditions d'accès à la profession que dans ses règles de fonctionnement et ses rapports internes.
Il s'agit, enfin, de permettre à nos entreprises de satisfaire aux conditions de l'Union européenne pour leur garantir des chances identiques à celles de nos voisins.
Ce sont là des objectifs capitaux, mais ils ne doivent pas nous faire perdre de vue que ce projet de loi n'est qu'un élément d'une politique globale des transports. En effet, il nous faudra prochainement, dans le cadre des discussions sur l'aménagement du territoire, réfléchir à la manière de rééquilibrer les parts respectives du rail et de la route.
Cette réflexion est quasi nécessaire pour notre territoire qui, malgré le recentrage de l'Europe vers l'Est, restera l'épine dorsale des flux Nord-Sud. Mais nous aurons l'occasion d'en rediscuter.
Améliorer le sort des conducteurs routiers, n'est-ce pas là notre objectif principal ? N'est-ce pas là, encore, le motif des malaises et des conflits successifs que nous avons connus ?
Nous savons tous que la loi qui sera adoptée concernera directement les 220 000 chauffeurs. Ce sont eux qui, volontairement ou involontairement, sont au coeur du dispositif. Ce sont eux, en tout cas, que nous souhaitons protéger et responsabiliser. En effet, les chauffeurs sont ceux qui se retrouvent au centre des enjeux d'entreprise et qui font les frais du dumping et de la concurrence acharnée à laquelle se livrent certains.
Aussi, même si certaines dispositions du projet de loi peuvent paraître assez contraignantes parce qu'elles imposeront un changement de comportement et une attention plus particulière vis-à-vis des règles élémentaires de sécurité, il n'en reste pas moins vrai que ce sont les chauffeurs qui bénéficieront des améliorations apportées.
Une formation obligatoire leur permettra de maintenir et de renforcer leurs connaissances, mais ausi d'être sensibilisés encore et toujours au respect du code de la route, des règles de sécurité et des règles d'hygiène.
L'harmonisation de la législation de la profession de transporteur routier, non seulement par l'obtention obligatoire de la licence européenne pour les véhicules de plus de 6 tonnes, mais aussi - et c'est là une avancée considérable - par l'obtention d'une licence intérieure pour un tonnage inférieur, y compris pour ceux de moins de 3,5 tonnes - à condition, bien sûr, qu'il y ait deux essieux - était une demande forte de l'ensemble des responsables, car, aujourd'hui, chacun peut s'improviser transporteur avec de simples camionnettes, sans pour autant devoir se soumettre aux règles régissant la profession.
L'harmonisation passe encore par des rapports entre donneurs d'ordre et transporteurs plus clairs, et surtout respectueux du droit.
Les prix abusivement bas imposés par les chargeurs, les délais anormalement courts exigés pour permettre la politique des flux tendus entraînent les entreprises de transport vers le bas. Dès lors - et puisque, chacun le sait, c'est toujours vers les salariés que l'on se retourne - les chauffeurs routiers sont obligés de « jouer à l'élastique » pour respecter les engagements. Or cela constitue un risque pour leur vie et la vie d'autrui !
Le projet de loi vise responsabiliser l'ensemble de la chaîne par des mesures particulièrement sévères.
L'immobilisation du véhicule et de son chargement sera très dissuasive ; grâce au document de suivi, il sera possible d'établir la responsabilité entre donneur d'ordre et entreprise de transport. Cette lourde sanction aura pour conséquence - nous l'espérons tous - d'assainir les relations commerciales de cette branche et d'éviter que des petites entreprises, que des chauffeurs artisans à qui l'on a fait miroiter les bienfaits de la création d'entreprise, ne soient obligés de bafouer la législation pour pouvoir survivre.
Bien entendu, ce projet de loi ne réglera pas le problème du temps d'attente entre chargement et déchargement, mais je pense, monsieur le ministre, que, lors de votre rencontre avec les chargeurs, cette question sera soulevée.
Voilà autant de points positifs qui amélioreront les conditions de vie des chauffeurs routiers, et il faut s'en féliciter d'autant plus fortement que le renforcement des contrôles, le respect de la législation - notamment en termes de repos quotidien - et le respect du code de la route auront des conséquences largement bénéfiques sur la sécurité routière.
Ainsi, monsieur le ministre, je suggère de prendre exemple sur nos voisins européens en créant à chaque péage important des aires de contrôle équipées. Par ailleurs, la structuration intelligente d'un secteur d'activité en pleine croissance ne peut qu'être positive pour son économie et son développement.
Ce projet de loi est un bon projet, car il marque de façon significative de grandes avancées fondées sur la responsabilité de chacun, sans enfeindre les libertés commerciales. Même si, demain, il faudra aller encore plus loin, ce projet constitue une étape vers le progrès souhaité par tous.
Ainsi que l'a dit mon collègue M. Bellanger, le groupe socialiste votera ce texte, à condition, bien entendu, qu'il ne soit pas dénaturé par les amendements qui seront adoptés par le Sénat. (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. J'informe le Sénat que la commission des affaires économiques et du Plan m'a fait connaître qu'elle a d'ores et déjà procédé à la désignation des candidats qu'elle présentera si le Gouvernement demande la réunion d'une commission mixte paritaire en vue de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi actuellement en cours d'examen.
Ces candidatures ont été affichées pour permettre le respect du délai réglementaire.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures trente, est reprise à vingt et une heures trente-cinq, sous la présidence de M. Jean Delaneau.)

PRÉSIDENCE DE M. JEAN DELANEAU
vice-président

M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, tendant à améliorer les conditions d'exercice de la profession de transporteur routier.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Cabanel.
M. Guy Cabanel. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les crises à répétition qui ont secoué le transport routier depuis plusieurs années et plus récemment encore la grève des chauffeurs-routiers en novembre dernier ont exprimé le malaise profond de toute une profession. C'est dire combien ce secteur mérite aujourd'hui une attention réelle et nécessite une adaptation.
Trois éléments sont à l'origine de ce malaise : la surcapacité et la fluidité de l'offre face à une demande de plus en plus exigeante et concentrée ainsi que les perspectives européennes de cette année.
Contrairement aux Pays-Bas et, dans une moindre mesure, à l'Allemagne et à la Grande-Bretagne, le transport routier en France relève du domaine réservé des petites sociétés.
Avec une augmentation de 10 000 transporteurs au cours des dix dernières années, la profession compte en France quelque 38 000 entreprises dont un peu plus de 85 % ont moins de neuf salariés.
L'un des plus grands groupes de transport routier est constitué par l'ensemble des filiales de la SNCF rassemblées au sein de GEODIS. Ce fait, peu connu du grand public, conduit à s'interroger sur la concurrence à laquelle se livre la société nationale de transport ferroviaire vis-à-vis des acteurs privés du secteur routier comme d'elle-même.
M. Charles Descours. Bonne question !
M. Guy Cabanel. Je pose clairement la question ici : la SNCF ne devrait-elle pas se recentrer sur ses missions essentielles ?
Ainsi, à côté de quelques grands groupes, une multitude d'entreprises individuelles se disputent une demande aujourd'hui d'autant plus concentrée que la place de la grande distribution au sein des chargeurs y est importante.
Eléments aggravants, la pression croissante des donneurs d'ordre, liée à l'économie de flux tendus et le recours massif aux intermédiaires et à la sous-traitance ont exigé des transporteurs des prix de plus en plus serrés et des délais de plus en plus courts. Certaines petites entreprises ont des prix qui couvrent à peine leurs charges.
Selon une étude du Conseil national des transports, les coûts du transport - salaires et carburants - ont augmenté de près de 3 % l'an dernier alors que les prix ont baissé de 1,6 %, entraînant ainsi une dégradation des marges des entreprises.
Ces caractéristiques de la demande et de l'offre ont favorisé une concurrence difficile mais également le développement de pratiques regrettables de dumping économique et social au sein de la profession depuis les années quatre-vingt.
Ce climat détérioré a affecté gravement l'exercice du métier, au détriment de la sécurité sur les routes et des conditions de vie des salariés du secteur.
Pouvait-on continuer à tolérer un système où le non-respect des règles sociales et de sécurité devenait un gage de la compétitivité de certaines entreprises ? Certes non, et je me réjouis du projet de loi que vous nous présentez aujourd'hui, monsieur le ministre.
Je me dois aussi de rendre hommage à vos prédécesseurs qui ne sont pas restés inactifs. La profession a connu, ces trois dernières années, des tentatives d'avancées sociales et esquissé des orientations positives : notion de temps de service, réduction du temps de conduite, retraites anticipées, généralisation de l'interdiction de circuler le dimanche. Un projet de loi contenant notamment des dispositions relatives à l'enseignement, à la formation et à la sécurité dans les transports avait été présenté en mars 1997.
Toutefois, la modernisation sociale engagée place le transport routier français dans une position singulière en Europe, certains de nos partenaires étant loin d'avoir atteint un tel niveau. Cette exception française, dont nous devons sûrement nous féliciter, est aussi à l'origine du malaise de la profession.
Le dernier conflit a montré combien la position géographique de la France, au centre de l'Europe de l'Ouest, soumet notre pays et nos transporteurs à une très forte pression de la part de nos partenaires européens, et ce à plusieurs titres.
Elle tient d'abord au fait que le commerce des pays comme le Portugal et l'Espagne est obligé de transiter par la France pour atteindre le reste de l'Europe ou inversement. Dès lors, quand un conflit social éclate, nous sommes montrés du doigt par nos partenaires et accusés de prendre en otage l'Europe. La Commission européenne réclame la création de couloirs de circulation et les pays ayant subi des pertes d'exploitation exigent des dédommagements.
Il est plutôt paradoxal, voire inacceptable, même si nous sommes conscients de nos responsabilités vis-à-vis du reste de l'Europe, de se voir traités de mauvais élève alors que nous sommes les seuls à engager des avancées sociales importantes, sans parler de l'application de la règle de réciprocité lorsque des conflits se déclarent ailleurs...
Le climat s'est également alourdi à l'annonce de la libéralisation totale du cabotage qui deviendra effective au 1er juillet 1998. Ce n'est pas un hasard si le dernier conflit est intervenu à la veille de l'ouverture des frontières ; sans doute faut-il voir là un signe de la grande anxiété des transporteurs français face à cette perspective.
A cette date du 1er juillet 1998, toute entreprise européenne pourra opérer librement sur notre territoire et la concurrence devrait jouer pleinement.
Dans un climat concurrentiel intérieur déjà dégradé et face à des disparités importantes entre la France et les autres Etats membres dans les conditions d'exercice de la profession, l'anxiété des transporteurs routiers est légitime.
Retraites, horaires et salaires sont autant d'éléments pour lesquels on constate de véritables variations d'un pays à l'autre. Si l'on en croit nos entrepreneurs, leurs coûts de revient sont parfois supérieurs de 30 % à ceux des entreprises du même secteur dans d'autres pays d'Europe.
Dans ce contexte, notre exception française, et plus encore après l'adoption de ce projet de loi, risque fort de peser lourdement sur leur compétitivité et sur l'emploi.
Une question vient à l'esprit : comment maîtriser les effets de distorsion de cette libéralisation et s'assurer concrètement du respect de la réglementation sociale française par les transporteurs européens exerçant leur activité chez nous ?
Enfin, du fait de sa situation centrale, de l'accroissement des échanges européens et de la demande de fret, la France aura à supporter des flux de transit de plus en plus importants.
Déjà, près de 80 % du transport de marchandises en France passent par la route, le reste se partageant entre le rail et, accessoirement, la voie navigable et le transport aérien.
Cette préférence pour la route n'est pas récente. Elle a été favorisée par la souplesse de ce mode de transport par rapport au fer ainsi que, notamment, par la limitation de la taxe sur le gazole.
Le développement continu et excessif du trafic routier n'est pas sans prix ! Il crée des problèmes d'encombrement, de congestion, de pollution et de sécurité auxquels il faut bien aujourd'hui apporter une réponse adaptée.
Si la France veut légitimement tirer bénéfice de ces nouveaux flux, elle doit aussi limiter leurs conséquences, lourdes pour les coûts publics sociaux, environnementaux et d'équipement.
Toutes ces difficultés montrent avec acuité combien le transport routier est au carrefour de toutes les opportunités et de toutes les menaces. Il est urgent d'accompagner son évolution pour saisir les premières et éloigner les secondes.
A l'évidence, une amélioration des conditions d'exercice de la profession de transporteur routier était devenue indispensable. Il eut été souhaitable de discuter plus tôt d'un tel projet de loi afin d'anticiper un conflit que certains disaient prévisible. Mais est-ce toujours possible d'anticiper un conflit ?
Reprenant plusieurs éléments du texte élaboré sous le précédent gouvernement, votre projet de loi, monsieur le ministre, contient aussi des propositions nouvelles, reflétant ainsi le consensus qui s'est dégagé avec l'ensemble des partenaires de la profession au terme de ce conflit, et cela doit être mis à votre actif.
L'extension de la formation professionnelle obligatoire à l'ensemble des conducteurs routiers, la création d'une sanction administrative d'immobilisation du véhicule, que je retiens malgré les réserves émises par la commission des affaires économiques et du Plan, et le renforcement des pouvoirs des contrôleurs me paraissent de nature à assainir les conditions d'exercice du métier, à accroître la sécurité et à favoriser une bonne insertion professionnelle.
Permettez-moi néanmoins d'émettre un certain nombre de réserves, d'abord sur le caractère réellement dissuasif de ces mesures, que nous allons votées, compte tenu de la faiblesse des effectifs actuels de contrôleurs des transports terrestres. Je sais que vous avez annoncé des créations de postes, mais seront-elles à la hauteur des besoins ?
Ensuite, une autre réserve tient à l'insuffisance de la réflexion et à l'absence de propositions concrètes visant à renforcer la transparence dans les opérations commerciales liées au transport de marchandises. C'est pourtant dans les relations entre les différents professionnels intervenants que se trouve l'origine du malaise et des pratiques dénoncées.
La commission des affaires économiques avait tenté de pallier les effets néfastes de la sous-traitance en chaîne par un amendement proposant le paiement direct du transporteur par le donneur d'ordre initial. Cette volonté était louable, mais il est vrai qu'elle posait le problème des commissionnaires-organisateurs de transport et de la liberté contractuelle, et cette mesure est difficile à retenir.
Enfin, si l'on doit se féliciter de l'issue positive apportée à plusieurs années de conflit par la conclusion d'un accord de branche et par ce projet de loi, il n'en demeure pas moins que ces éléments ne constituent qu'un des volets d'une politique du transport routier en France. Ces textes ne sauraient apaiser toutes les inquiétudes suscitées par l'échéance européenne, ni régler les problèmes évoqués tout à l'heure de l'asphyxie des routes et des coûts qu'elle génère.
J'avais anticipé ce débat, monsieur le ministre, en vous interrogeant récemment, lors d'une séance de questions au Gouvernement, sur votre vision des transports à l'aube du xxie siècle.
J'avais insisté notamment sur le développement du transport combiné en France et la nécessité d'une action forte sur la scène européenne portant à la fois sur l'harmonisation des conditions sociales du transport routier et l'adoption d'un accord avec nos partenaires pour l'organisation sur le territoire français d'un ferroutage à grande distance.
Parce qu'il allie les atouts de chaque mode de transport - souplesse de la route et fiabilité du fer ou de la voie d'eau - le transport combiné constitue une alternative crédible à la situation présente. Il permettrait à notre pays de tirer bénéfice des flux de transit à venir, tout en limitant les inconvénients pour la collectivité de la congestion des routes, de l'insécurité routière et de la pollution.
La question de rendre obligatoire en France l'usage de la voie ferrée, à l'instar des propositions de l'Autriche et de la Suisse pour les franchissements alpins, n'est pas à exclure à terme pour les transits de marchandises à longue distance. Naturellement, cela exige une négociation européenne.
La tâche sera sans doute difficile tant notre pays a pris du retard, notamment dans l'adaptation du matériel roulant, l'équipement des terminaux et la réalisation des plates-formes multimodales. La SNCF n'a pas privilégié cette voie dans le passé, et les investissements à prévoir ne permettent pas encore de la rendre compétitive par rapport à la route.
Monsieur le ministre, vos propos du 16 décembre 1997 m'ont rassuré sur un certain nombre de points. Je me réjouis de constater que le ministère des transports poursuit la réflexion entamée depuis plusieurs années en faveur du transport combiné. Mais le vrai rendez-vous est européen et c'est avec nos partenaires que vous devrez faire preuve de la plus grande énergie.
Lors du dernier conseil européen des ministres des transports qui s'est tenu au mois de décembre, vous avez présenté, au nom du gouvernement français, un mémorandum pour une harmonisation sociale européenne. Je souhaite vivement que d'autres pays vous suivent dans cette voie car, à défaut de s'inspirer du modèle français pour établir une référence communautaire, ce sera sans nul doute le début d'un long déclin pour nos entreprises et pour l'emploi dans ce secteur.
S'il me semble utile de concrétiser aujourd'hui, par le vote du projet de loi, une avancée significative pour le transport routier, soyez néanmoins convaincu, monsieur le ministre, que je reste très attentif à la persuasion dont vous ferez preuve dans la démarche européenne. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, sur les travées de l'Union centriste, du RPR, et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, notre transport routier souffre aujourd'hui d'une image négative auprès de nos concitoyens. Conditions de travail hors normes, pratique de la négociation quelque peu conflictuelle, succession de rendez-vous manqués, de promesses oubliées et d'espoirs déçus sont autant d'éléments qui contribuent à dégrader l'image d'un secteur qui tente avec peine de relever les défis de l'ouverture des marchés.
Notre objectif est donc de contribuer à la modernisation de ce secteur.
Le récent conflit qui a paralysé une partie du pays a révélé une fois de plus le décalage entre les conditions de travail et la rémunération des routiers.
Depuis vingt ans, les choses ont peu changé sur le plan social. Sur le plan économique, en revanche, les bouleversements ont été nombreux.
Si les gains de productivité ont été importants surtout depuis dix ans, la croissance anormale du nombre des entreprises n'est liée qu'à une croissance extrêmement soutenue du trafic et à une réforme des conditions de vérification de la capacité des candidats transporteurs favorisant l'essor de la sous-traitance.
Le transport routier n'a jamais été aussi concentré et des activités considérées autrefois comme le privilège de petites entreprises locales sont aujourd'hui le fait de grandes entreprises cotées en bourse.
L'organisation du service de transport résulte de l'exploitation des ressources, c'est-à-dire des véhicules et des conducteurs qu'il convient d'utiliser au mieux dans l'espace et dans le temps. Cette remarque suffit à comprendre pourquoi les conditions sociales sont déterminantes dans la concurrence que se livrent les routiers depuis quelques années.
Sans des lois et des règlements scrupuleusement respectés, une compétition sauvage s'instaure, tirant tout le monde vers le bas.
C'est donc une norme sociale dégradée qui structure toute l'organisation des transports aujourd'hui. Salariés comme artisans s'alignent alors sur le seul règlement social européen existant, c'est-à-dire sur les limites portées aux temps de conduite et de repos et, aujourd'hui, 50 % des grands routiers de notre pays travaillent plus de soixante heures par semaine.
Depuis une vingtaine d'années, de nombreux textes, pour la plupart réglementaires, ont tenté de protéger les transporteurs et de policer le marché en luttant contre des prix anormalement bas et une sous-traitance pernicieuse. Inutiles, souvent inapplicables, ces textes n'ont pas été appliqués pour la simple raison qu'ils étaient, pour l'essentiel, inadaptés aux besoins.
Je crois que le précédent gouvernement avait adopté un projet de loi relatif à l'enseignement, à la formation et à la sécurité dans les transports. Le texte que vous nous soumettez aujourd'hui, monsieur le ministre, reprend l'essentiel des dispositions de celui qui, pour cause de dissolution, n'a pu être examiné par le Parlement. Je citerai, par exemple, les mesures relatives à la formation professionnelle, à la création d'une sanction d'immobilisation administrative du véhicule et du renforcement des pouvoirs des contrôleurs des transports terrestres.
En fait, votre texte contribue à la mise en oeuvre des orientations définies depuis près de trois ans dans les contrats de progrès. Si vous l'aviez déposé plus tôt - c'était possible, puisqu'il était déjà rédigé - peut-être aurions-nous fait l'économie d'un conflit qui a mis en danger une fois de plus un grand nombre de petites entreprises dans notre pays. (Protestations sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen).
M. Charles Descours. Eh oui !
M. Pierre Hérisson. Les dispositions du projet de loi qui nous est soumis vont incontestablement dans le sens d'une nécessaire reprise en main du secteur par les pouvoirs publics.
Pour autant, la libéralisation du marché européen vous conduira, monsieur le ministre, à prolonger vos efforts sur le plan communautaire pour rendre viable la difficile modernisation du transport routier. En effet, cette libéralisation se traduira par une concurrence totale sur les marchés intérieurs des Quinze, qui mettra ainsi en exergue les disparités sociales existant dans l'Union européenne.
Le 1er juillet 1998, toute entreprise européenne pourra librement exercer en France sans titre de transport. A cette date, ou bien la France réussira à imposer à ses partenaires son modèle social comme référence communautaire, ou bien l'Europe continuera à s'affranchir des contraintes imposées aux routiers français, et nos entreprises disparaîtront.
Le mémorandum pour une harmonisation européenne des règles sociales dans les transports routiers qui a été déposé par la France avance trois propositions essentielles : une réglementation du temps d'activité pour les conducteurs, l'institution d'une obligation de formation professionnelle et une harmonisation des contrôles et des sanctions. Reste à savoir si nos partenaires adhéreront à ces propositions !
Pour en revenir à votre projet de loi, monsieur le ministre, plusieurs dispositions paraissent positives. Ainsi, l'extension aux artisans et aux transporteurs qui travaillent pour leur propre compte de la formation obligatoire recueille une large approbation. La création d'une sanction administrative d'immobilisation du véhicule postérieure au constat d'une infraction ainsi que l'extension aux transporteurs de la possibilité de retenir la marchandise d'un chargeur qui n'a pas payé un transport antérieur sont autant de mesures qui vont dans le sens d'un assainissement de la profession.
Cependant, plusieurs dispositions introduites par l'Assemblée nationale sont de nature à créer des distorsions de concurrence dans la compétition européenne. Je ne citerai que l'identification au moment du chargement et du déchargement et l'utilisation des documents commerciaux à des fins pénales.
Nos rapporteurs ont proposé certains aménagements auxquels je souscris. J'ai par ailleurs moi-même déposé des amendements allant dans le sens d'un assouplissement des procédures, ce qui est la seule manière de les rendre réellement applicables sur le terrain.
Vous l'aurez compris, monsieur le ministre, votre texte reçoit notre approbation, parce qu'il s'inscrit dans une démarche nécessaire et très éloignée des conflits idéologiques qui nous séparent.
Après avoir salué le travail remarquable de nos excellents collègues MM. Jean-François Le Grand et Lucien Lanier ainsi que de tous ceux qui ont oeuvré à amender le texte, mes collègues du groupe de l'Union centriste et moi-même voterons ce projet de loi, sous réserve, monsieur le ministre, que les amendements qui sont proposés soient, pour l'essentiel, acceptés.
Nous resterons très attentifs aux prochains rendez-vous entre chargeurs et transporteurs ainsi qu'aux négociations entre les Quinze car, je le répète, la pacification du secteur ne pourra se faire qu'à l'échelon communautaire. Monsieur le ministre, vous serez jugé sur votre capacité à faire prévaloir, dans cette négociation, les aspects positifs du modèle français. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et Indépendants et du RPR.)
M. le président. La parole est à M. Emin.
M. Jean-Paul Emin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voici donc conviés une fois de plus à débattre du transport routier de marchandises. C'est la troisième fois en cinq ans que cela se produit ! Du point de vue de l'efficacité législative, cet état de fait n'est-il pas une leçon d'humilité pour le Parlement ?
Le rapporteur de la commission des affaires économiques et du Plan, dont je salue le travail, a relevé que le projet qui nous est soumis reprend « nombre de dispositions » du projet Pons-Idrac du printemps 1997.
Je ne me livrerai cependant pas tout à fait au même commentaire que lui. Si les ministres des transports passent, les services restent, et ils ont tôt fait de ressortir de leurs tiroirs les fonds de projets antérieurs lorsqu'on leur demande des idées pour faire face à un mécontentement sectoriel.
Voici donc un nouveau projet de loi destiné à améliorer la situation du transport routier.
Le rapport de la commission des affaires économiques rappelle de manière synthétique et complète la problématique du transport routier. Quelques points me paraissent essentiels pour l'analyser au regard de la grève du mois d'octobre 1997, qui faisait suite à la grande grève des mois de juin et de juillet 1992 et à celle de l'automne 1996.
Le problème n'est pas nouveau et le Sénat, comme sa commission compétente, a adopté, me semble-t-il, une position bien claire dès 1992, lors de la discussion de la loi n° 92-1445 du 31 décembre 1992 relative à la sous-traitance dans le domaine du transport routier de marchandises, que j'ai eu l'honneur de rapporter, puis lors de l'examen des lois sur les clauses abusives, dont M. Jean-Jacques Robert était rapporteur en 1995 et sur les transports, en 1996.
Cette position peut se résumer en trois points dont le premier pourrait s'énoncer ainsi : pas d'acharnement législatif. En clair, mieux vaut adapter la LOTI que de voter des lois « rustines » au coup par coup.
Deuxième position de principe : respectons la liberté du commerce et de l'industrie, et gardons-nous de faire de l'économie suradministrée.
Enfin, analysons clairement les causes des difficultés du transport routier avant de faire du « mécano législatif ».
De ce point de vue, essayons d'examiner les difficultés du secteur.
En premier lieu - tous mes collègues l'ont dit - il y a trop d'entreprises, surtout de micro-entreprises par rapport à la demande du transport de fret. Les chiffres de l'exposé général du rapport sont à cet égard éloquents.
Il y a trop d'entreprises parce que la politique d'ensemble en matière économique a favorisé leur éclosion et, de ce point de vue, les responsabilités sont anciennes et partagées.
Pour maintenir le développement de la construction automobile - notamment le développement des constructeurs français de camions - pour soutenir le trafic routier, pour donner des débouchés aux raffineurs et aux vendeurs de carburants nationaux, on a misé sur le transport de marchandises par la route.
Tel n'est pas le cas chez nos amis allemands, suisses belges, néerlandais, ni a fortiori autrichiens. Certes, on ne peut pas parler de « tout routier », mais on a quand même été loin dans cette direction !
Je pense, à titre d'exemple, aux rabais peut-être excessifs qui ont été consentis par les constructeurs sur les ventes de camion à des créateurs d'entreprises de transport. C'est une réalité.
En deuxième lieu, les entreprises du secteur, nous l'avons tous souligné, sont atomisées et leur personnel, peu nombreux, est très faiblement syndiqué : 17 % de la profession seraient, au total, syndiqués. Cela explique la difficulté du dialogue social, notamment lorsque l'émotionnel l'emporte. Or cette profession, nous le savons, peut conduire à la paralysie du pays jusqu'à un point très grave. Il y a là de quoi méditer.
En troisième lieu, la réalité et l'ouverture européennes restent méconnues d'une trop grande part de la profession qui, au lieu de s'organiser, cherche parfois à élever autour d'elle des remparts de papier.
Le projet de loi répond-il à ces difficultés ? La sous-traitance abusive a-t-elle quelque chance de régresser ? Nous restons sceptiques quant aux réponses qui peuvent être apportées à ces questions.
Aucune réflexion d'ensemble n'est annoncée sur d'éventuelles variations modales pour réduire la part du transport routier dans le transport de marchandises.
Aucune tentative vraiment significative n'a été menée, si ce n'est la négociation, menée avec talent sous l'égide de Mme Anne-Marie Idrac, d'un contrat de progrès, voilà deux ans. Il faut relancer le dialogue au sein de la profession. Il faut aider à la restructuration de cette dernière autour des organisations représentatives, y compris les coordinations, qui tendent à devenir permanentes.
Nous sommes à quelques jours du débat sur la réduction de la durée légale du travail hebdomadaire à trente-cinq heures. Nous sommes, pour notre part, convaincus que ce texte n'encouragera pas la création d'emplois et qu'il alourdira les charges des petites entreprises. Le secteur des transports connaîtra de ce fait des difficultés accrues, que nous ne pouvons que déplorer.
Les membres du groupe des Républicains et Indépendants suivront la position de nos commissions sur ce texte, en souhaitant qu'à l'avenir nous légiférions moins sous la poussée des événements. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, j'aurai l'occasion, lors de la discussion des articles, de répondre plus précisément aux questions que vous m'avez posées. Auparavant, je souhaite toutefois vous formuler quelques observations.
Je veux tout d'abord souligner le sens des responsabilités des orateurs qui sont intervenus en ce qui concerne tant l'analyse des causes du malaise dans le transport routier que notre volonté d'avancer.
Même si sont apparues des différences d'appréciation sur tel ou tel aspect, ce qui est tout à fait légitime, je n'ai pas noté de divergence sur la nécessité d'une évolution positive, nécessité à laquelle sont confrontées non seulement la profession - je pense à la fois aux salariés et aux entreprises - mais aussi l'économie du pays.
Je l'ai dit dans mon intervention générale, nous nous heurtons à un paradoxe. Des mesures ont été prises par nos prédécesseurs - il ne s'agit pas de dire que rien n'a été fait ces dernières années - mais elles ont été insuffisantes au regard tant du progrès social que de l'assainissement de la profession.
Je l'affirme d'autant plus librement que je l'ai entendu dire sur le terrain par des responsables d'entreprises au cours de mes entretiens avec les organisations représentant les transporteurs.
Plusieurs d'entre vous l'ont noté, un décalage est donc apparu par rapport à l'évolution économique de la société, alors qu'il s'agit d'un secteur qui a beaucoup de potentialités de développement.
Il ne faut pas que ce décalage soit vécu comme un handicap. Loin de laisser les choses aller, il nous faut au contraire - beaucoup d'entre vous l'ont dit aussi - réfléchir à la façon de développer ce secteur sans vouloir administrer la profession. Il s'agit de voir comment nous pouvons travailler à une meilleure complémentarité en recherchant de nouveaux équilibres entre le rail, la route et la voie fluviale. En un mot, il nous faut réfléchir à l'intermodalité, avec le souci de respecter les dimensions sociale, économique et écologique, ce fameux « triangle équilatéral » que vous avez évoqué, monsieur le rapporteur, image que j'approuve pleinement.
J'aurai l'occasion de revenir sur les propositions que vous m'avez faites, que ce soit l'idée de M. Le Grand de réunir ce qu'il a appelé des états généraux à l'échelle nationale et à l'échelle européenne, ou encore celle de M. Lefebvre sur la nécessité de réunir plus régulièrement et plus souvent les commissions des sanctions administratives.
Ce texte s'inscrit plus généralement dans une démarche engagée avant le conflit et qui se poursuit. A ce propos, permettez-moi de répondre à ceux qui m'ont reproché de ne pas avoir agi plus tôt que le Gouvernement n'est aux affaires que depuis sept mois ! Il s'agit d'un dossier qui, dès le départ - et là vous avez raison - était considéré comme un dossier important, brûlant même, si je puis dire, compte tenu des problèmes qui se posaient et dont nous étions conscients.
Je pensais que nous aurions pu résoudre ces problèmes par la seule discussion. Mais vous connaissez la suite. Nous avons néanmoins pris la situation à bras-le-corps, et le Gouvernement s'efforce d'avancer dans la bonne direction.
M. Bellanger m'a demandé comment les choses allaient ensuite se passer au niveau européen. Sachez, monsieur le sénateur, que nos actions doivent être totalement articulées avec ce qui se passe au niveau communautaire. Nous devons avancer de conserve, si vous me permettez cette expression. C'est d'autant plus indispensable que les efforts entrepris en France pour assainir la profession sont voulus, je le répète, à la fois par les professionnels et les organisations syndicales représentatives des salariés. Ces efforts sont indispensables pour aider à un développement plus durable, plus solide, dans le respect des intérêts des uns et des autres. Tous ces efforts doivent aussi s'inscrire dans une démarche européenne.
On me rappelle les échéances européennes en matière de transport routier, en particulier celle du 1er juillet 1998 ; il est vrai qu'elles suscitent interrogation et même inquiétude, mais, vous en conviendrez, je n'ai pas participé à la définition de telles échéances.
J'ai pris mes fonctions peu avant le conseil européen des ministres des transports de la mi-juin 1997 et j'ai tout de suite posé la question de l'harmonisation à l'échelle de l'Europe.
Je ne vous dirai pas que mon intervention a suscité des applaudissements ! J'ai été plus applaudi quand j'ai confirmé que je ne m'opposais pas au maintien de l'heure d'été et de l'heure d'hiver. Mais je n'ai pas lâché sur la question de l'harmonisation européenne de la réglementation des transports routiers ! Je me suis battu avec le Gouvernement sur cette question et j'ai finalement réussi à faire admettre la nécessité d'un mémorandum pour discuter avec nos partenaires.
Lors de la réunion du conseil européen des ministres des transports de décembre dernier, j'ai constaté que le fait d'aborder le sujet constituait déjà un événement en soi et que plusieurs pays soutenaient explicitement la position française. Croyez bien que je ne dis pas cela pour en tirer la moindre gloriole. Toutes ces questions demandent, au contraire, beaucoup d'humilité, ne serait-ce que par rapport au conflit et à la façon dont il s'est déroulé. Rien n'est jamais définitivement réglé.
Toutefois, lors du conseil européen des ministres des transports, il ne s'est pas trouvé un seul ministre, sur les quinze que compte la Communauté européenne, pour critiquer la position du Gouvernement français durant le conflit du mois de novembre.
Si je n'étais pas modeste, j'ajouterais que non seulement notre attitude n'a pas été critiquée, mais que nous avons été félicités pour avoir su, dans cette situation complexe, créer les conditions d'un dialogue social et d'une issue positive.
Il m'a été reproché d'avoir fait preuve de partialité en me rendant sur un barrage routier. Mais je n'ai pas agi dans cet esprit ! Mon souci a été de faire progresser la négociation. Car, bien sûr, je suis favorable au progrès social ! Personne ici ne peut en douter. C'est d'ailleurs le choix que le Gouvernement a fait eu égard aux contraintes actuelles. Je puis vous assurer que, dès le début du conflit, et même déjà avant, mon souci a été d'instaurer un dialogue avec l'ensemble des partenaires sociaux, qu'il s'agisse des représentants de la profession dans leur diversité ou des organisations syndicales. Je suis allé sur le terrain, à leur congrès ; j'ai parlé et j'ai surtout écouté. Je le répète, ma démarche n'a pas été empreinte de partialité.
Lorsque je me suis rendu sur le barrage, quelle a été ma détermination ? Le ministre des transports n'a pas agi et réfléchi seul dans son coin, en fonction de ses racines, de sa personnalité... Ces choix ont été opérés en liaison étroite avec le Premier ministre. J'ai pensé qu'il fallait aller sur le terrain et écouter tous ces gens qui posaient de vrais problèmes.
Monsieur Le Grand, vous avez cité plusieurs dates, de 1934 à 1949. Je ne reviendrai pas sur le détail. En revanche, vous en avez oublié une : l'année 1936. C'est d'autant plus dommage qu'il s'est passé beaucoup de choses cette année-là ! Vous voyez ce que je veux dire, monsieur Descours ?
M. Charles Descours. Oui, bien sûr !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Des avancées sociales, notamment, ont eu lieu. Déjà, à ce moment-là, de par les choix qui ont été faits, la profession du transport a été, en quelque sorte, mise en marge du code du travail. Quand on cherche à expliquer la complexité de la situation et les différences qui existent, il faut bien intégrer ce moment de l'histoire, et vous avez d'ailleurs bien fait de revenir aux sources.
Bref, il ne s'agissait donc pas de partialité de ma part. Dans mon esprit, il s'agissait au contraire - en accord, je le répète, avec M. le Premier ministre - d'instaurer un climat de confiance et de favoriser le dialogue avec les organisations professionnelles et syndicales et selon les règles du jeu propre à une société développée. C'était d'autant plus important que l'absence de confiance et le non-respect des engagements pris posent des problèmes majeurs !
Le quatrième ou le cinquième jour du conflit, je suis allé sur le terrain pour dire aux représentants des organisations syndicales et professionnelles que des progrès avaient été faits, mais que des problèmes demeuraient posés à la société et qu'il fallait conclure. Cette démarche a permis de lever les principales difficultés et, de fait, ce conflit a duré moins longtemps que le précédent.
En conclusion, je tiens à dire combien j'ai apprécié la réflexion qui a été menée. Nous allons maintenant examiner les amendements et nous verrons ce qu'il est possible de faire pour améliorer encore le texte issu des travaux de l'Assemblée nationale. En tout cas, je suis sensible au souci d'aller de l'avant que vous avez manifesté les uns et les autres ; c'est en effet nécessaire.
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.

Article 1er



M. le président.
« Art. 1er. - L'article 1er de l'ordonnance n° 58-1310 du 23 décembre 1958 concernant les conditions du travail dans les transports routiers publics et privés en vue d'assurer la sécurité de la circulation routière est ainsi modifié :
« 1° Après le quatrième alinéa, il est inséré deux alinéas ainsi rédigés :
« 4° A la formation professionnelle initiale et continue des conducteurs ; cette formation doit permettre aux conducteurs de maîtriser les règles de sécurité routière et de sécurité à l'arrêt, ainsi que les réglementations relatives à la durée du travail et aux temps de conduite et de repos.
« S'agissant de la sécurité à l'arrêt, il est tenu compte des différents métiers et des conditions particulières d'exercice de l'activité dans chaque secteur. » ;
« 2° L'avant-dernier alinéa est ainsi rédigé :
« Ces obligations sont définies par décret en Conseil d'Etat. Toutefois, les obligations mentionnées au 4° peuvent faire l'objet, en ce qui concerne les salariés, d'accords collectifs de branche dans un délai d'un an à compter de la publication de la loi n° du tendant à améliorer les conditions d'exercice de la profession de transporteur routier. A défaut d'accord étendu, un décret en Conseil d'Etat y supplée. »
Par amendement n° 16, M. Hérisson propose de compléter le texte présenté par le 1° de cet article pour le 4° à insérer dans l'article 1er de l'ordonnance n° 58-1310 du 23 décembre 1958 par un alinéa ainsi rédigé :
« Ces actions de formation relèvent des types d'actions définis à l'article L. 900-2 du code du travail. »
La parole est à M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson. Le projet de loi étend à tous les conducteurs quels que soient leur statut et leur secteur d'activité les formations destinées aux conducteurs routiers et devant permettre aux intéressés de maintenir ou de parfaire leur qualification professionnelle.
Il convient de rappeler que ces formations sont attachées non pas à l'entreprise mais directement aux intéressés.
Ces actions répondent en conséquence à la typologie des actions de formation professionnelle définies à l'article L. 900-2 du code du travail, sous réserve qu'elles soient dispensées dans le cadre d'un véritable stage.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. Il s'agit d'une question qui est plutôt de nature réglementaire, mais la commission a pensé qu'il était satisfaisant de faire en sorte que la formation soit prise en charge à partir des taxes qui sont prélevées à cet effet.
C'est la raison pour laquelle elle a émis un avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Les obligations de formation professionnelle initiale et continue sont prévues par décret en Conseil d'Etat. Par conséquent, la référence au droit du travail envisagée dans l'amendement n'est pas obligatoire. Toutefois, compte tenu de l'intention qui a présidé au dépôt de cet amendement, le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 16.
M. Jacques Bellanger. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Bellanger.
M. Jacques Bellanger. Nous sommes un peu perplexes devant cet amendement, que nous ne comprenons pas très bien. Nous voterons contre parce que nous nous demandons s'il ne s'agit pas de faire échapper les entreprises à leurs obligations en matière de formation professionnelle.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 16, accepté par la commission et pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er, ainsi amendé.

(L'article 1er est adopté.)

Article additionnel après l'article 1er



M. le président.
Par amendement n° 15, M. Descours propose d'insérer, après l'article 1er, un article additionnel ainsi rédigé :
« A la fin de la première phrase du paragraphe II de l'article 7 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs, les mots : "une convention à durée déterminée avec l'autorité compétente" sont remplacés par les mots : "une convention de délégation de service public au sens de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques". »
La parole est à M. Descours.
M. Charles Descours. Cet amendement est la traduction de ce que j'ai dit dans la discussion générale. Je m'exprime, je le répète, au nom de tous les élus qui, dans les départements ou dans les agglomérations, et quelle que soit leur sensibilité, s'occupent de transports.
La rédaction actuelle du paragraphe II de l'article 7 de la LOTI entraîne des difficultés d'interprétation. En effet, la loi prévoit que l'autorité organisatrice de transport public compétente peut confier à une entreprise l'exécution du service en passant avec elle « une convention à durée déterminée qui fixe la consistance générale et les conditions de fonctionnement et de financement du service... et définit les actions à entreprendre par l'une et par l'autre parties afin de favoriser l'exercice effectif du droit au transport et de promouvoir le transport public de personnes », sans préciser le mode de passation de cette convention.
Depuis l'arrêt du Conseil d'Etat du 15 avril 1996 - c'est-à-dire depuis bientôt deux ans - relatif à un contrat concernant la collecte et le transport d'ordures ménagères, une grande insécurité pèse sur les autorités organisatrices puisqu'elles ne savent plus avec certitude quelle procédure engager : doivent-elles se référer à la « loi Sapin » ou au code des marchés publics ? Je vous invite, mes chers collègues, si vous ne vous occupez pas de ces questions dans vos départements, à interroger les élus et les services compétents.
En effet, avant la prise de cet arrêt qui, rappelons-le, ne concerne pas le transport de voyageurs, les autorités organisatrices de transport public appliquaient systématiquement la procédure issue de la loi du 29 janvier 1993, dite « loi Sapin », et cela indépendamment du mode de rémunération de l'entreprise et, par conséquent, quel que soit l'aléa financier supporté par l'entreprise. Les modifications de la « loi Sapin » intervenues en 1994 et en 1995 concernaient explicitement les transports publics, et plus particulièrement les transports scolaires. Le législateur considérait donc que les transports publics entraient clairement dans le champ de la « loi Sapin » et que l'introduction de seuils permettait de l'appliquer sans difficulté, y compris aux petits contrats.
En outre, l'application du code des marchés publics à des contrats de transport public priverait les collectivités locales d'une indispensable souplesse d'adaptation de leurs contrats aux besoins du service public.
Si j'ai tenu à proposer l'insertion d'un article additionnel dans le projet de loi, c'est que, depuis cet arrêt du Conseil d'Etat, j'ai consulté le ministère des transports, la direction générale des collectivités locales, la DGCL, la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, sous les gouvernements successifs ; tous m'ont dit, y compris le directeur de la DGCL de l'époque, qui vient d'être nommé préfet et qui connaît très bien le sujet, que l'on allait aboutir à un texte dans les prochains mois, et qui respecterait les normes édictées par la directive européenne. Or, aujourd'hui, nous n'avons pas abouti et, je le répète, les élus sont dans une insécurité juridique inadmissible. C'est le législateur qui vote la loi, que le Conseil d'Etat doit se contenter d'interpréter.
Dans cette affaire, le législateur avait bien manifesté une volonté, mais l'interprétation du Conseil d'Etat a été restrictive. Le législateur doit donc insérer, dans l'article 7 de la LOTI, la précision qui figure dans mon amendement, car actuellement nous sommes dans un tel flou juridique que n'importe quel élu français de n'importe quelle ville française, de n'importe quel département français peut être « épinglé » par son tribunal administratif ou par sa chambre régionale des comptes !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. La commission a eu les plus grandes difficultés à formuler un avis. Sur le fond, en effet, chacun souscrivait à l'objet de l'amendement exposé par notre éminent collègue M. Charles Descours. Il est vrai qu'il y a lieu de clarifier la situation.
Cependant, la commission s'est interrogée sur l'opportunité qu'il y avait de traiter par la loi un problème d'interprétation de jurisprudence.
Au demeurant, les collectivités ont besoin de savoir si elles peuvent continuer d'appliquer la loi Sapin pour la conclusion de leurs contrats avec les entreprises de transport public.
La commission a donc émis un avis favorable sur cet amendement.
J'aimerais que le Sénat soit éclairé par l'avis que va donner le Gouvernement sur le sujet, sachant que, d'une certaine façon la mesure proposée s'apparente à un cavalier, même si, sur le fond, nous sommes d'accord.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. J'ai bien entendu, monsieur Descours, que vous êtes très attaché à cette question.
M. Charles Descours. Pas personnellement, monsieur le ministre, je suis un porte-parole.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Certes, vous soulevez un vrai problème qui préoccupe de nombreux élus.
Votre amendement porte sur la qualification des contrats de transport passés entre une autorité organisatrice de transport et un opérateur de transport routier de voyageurs. De ce fait, même si je partage totalement votre souci, je considère que cet amendement est hors du champ du projet de loi. En effet, les conventions concernées relèvent de différentes réglementations et, pour une part, des directives européennes. Par conséquent, le Gouvernement ne peut être que défavorable à cet amendement.
Toutefois, nous nous sommes attachés à recevoir les représentants des organisations concernées afin de mener une concertation approfondie sur ce sujet délicat et difficile. Nous sentons bien que nous sommes dans une période de transition.
Mon cabinet a reçu, la semaine dernière encore, les représentants de l'assemblée permanente des présidents de conseils généraux, l'APCG, et du groupement des autorités responsables de transport, le GART, pour une concertation sur le contenu d'une circulaire qui est en préparation. Autrement dit, nous allons ensemble, avec les principaux intéressés, travailler sur cette circulaire. Quant au décret de transposition de la directive, il va être publié incessamment.
J'estime que la concertation qui est en cours doit être menée à son terme. Elle contribuera à éclairer le débat, même si j'ai conscience - je ne vous le cache pas, mesdames, messieurs les sénateurs - qu'à terme il nous faudra - tel est en tout cas mon sentiment - modifier la loi.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 15.
M. Pierre Lefebvre. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Lefebvre.
M. Pierre Lefebvre. Nous partageons tout à fait l'opinion de notre collègue Charles Descours et nous comprenons bien le souci qui l'anime. Mais, comme l'a rappelé M. le rapporteur, il ne nous semble pas que ce soit à l'occasion de la discussion de ce texte que la décision doive intervenir. Par ailleurs, M. le ministre nous a demandé de laisser la concertation s'achever avant de modifier la loi.
Dans ces conditions, si M. Descours maintient son amendement, nous ne le voterons pas.
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. Compte tenu de l'engagement pris par le Gouvernement de mener à son terme la concertation, et ce dans des délais relativement courts, pour clarifier la situation, tout le monde en en reconnaissant la nécessité, je suggère à M. Descours, plus en mon nom personnel qu'en celui de la commission, dans le souci de respecter la loi et pour éviter l'introduction d'un cavalier, de retirer son amendement. Voilà qui simplifierait beaucoup le débat.
M. le président. L'amendement est-il maintenu, monsieur Descours ? M. Charles Descours. Le problème du cavalier ne m'avait pas échappé mais, dans la mesure où à l'article 2 du projet de loi on modifie l'article 36 de la LOTI, je ne vois pas pourquoi on parlerait de cavalier lorsque je modifie l'article 7 de cette même LOTI.
Je sais bien que la LOTI est une bible pour nous tous, surtout pour vous, monsieur le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. La loi est la loi pour tout le monde !
M. Charles Descours. La preuve en est que personne n'a jamais modifié la LOTI depuis 1982.
Sur le fond, je crois que le M. le ministre l'a bien compris, comme ses prédecesseurs, ses services et ceux du ministère de l'intérieur, ce qui nous oppose c'est que nous ne voulons pas que, dans la circulaire et dans le décret, il soit fait référence aux seuls critères financiers. Dans la loi Sapin, sont visés la qualité du service, le respect du droit social, et pas seulement le prix, qui conduit à accepter la prestation minimum.
En matière de transport public, notamment de transport des élèves - tous ceux qui sont membres d'un conseil général savent combien les parents d'élèves sont attentifs à la qualité des cars - il faut que nous puissions choisir non pas le transporteur qui demande la somme la moins élevée mais celui qui met à notre disposition des cars convenables, conduits par de bons chauffeurs, etc. Or, s'il est fait seulement référence au code des marchés publics, nous ne le pourrons pas.
Je sais que la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes est extrêmement pointilleuse sur ce point, et c'est pourquoi je veux introduire cette disposition dans la loi.
Je peux d'ores et déjà annoncer qu'une discussion entre les services va avoir lieu et qu'elle sera terrible. Une expérience de quinze années au Parlement me permet d'affirmer qu'une discussion entre services peut être beaucoup plus compliquée qu'une discussion entre politiques !
Je vais retirer mon amendement, monsieur le ministre, puisque vous-même me le demandez, de même que M. le rapporteur, mais j'ai été content de vous entendre dire qu'il faudrait bien finalement modifier la loi. J'ai déposé cet amendement parce que je souhaitais accélérer un peu le processus mais, sachant que nous serons amenés à débattre à nouveau de cette question, je le retire.
M. le président. L'amendement n° 15 est retiré.

Article 2



M. le président.
« Art. 2. - L'article 36 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs est ainsi rédigé :
« Art. 36 . - Sur le territoire national, les activités de transport routier public de marchandises et de location de véhicules industriels avec conducteur destinés au transport de marchandises s'effectuent sous le couvert d'une licence de transport intérieur ou d'une licence communautaire.
« La licence communautaire est délivrée dans les conditions prévues par le règlement (CEE) n° 881/92 du Conseil, du 26 mars 1992.
« La licence de transport intérieur est délivrée aux entreprises inscrites au registre mentionné à l'article 8 de la présente loi et qui n'ont pas l'obligation de détenir une licence communautaire. Cette licence est exigée de toute entreprise de transport routier public de marchandises et de location de véhicules industriels avec conducteur disposant d'un ou plusieurs véhicules automobiles d'au moins deux essieux. Elle est établie au nom de l'entreprise et incessible. L'entreprise reçoit des copies certifiées conformes de sa licence de transport intérieur en nombre égal à celui des véhicules qu'elle détient.
« Un décret en Conseil d'Etat, pris après avis du Conseil national des transports, fixe, en tant que de besoin, les modalités d'application du présent article. »
Sur cet article, je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 17 est présenté par M. Hérisson.
L'amendement n° 28 est déposé par M. Raffarin et les membres du groupe des Républicains et Indépendants.
Tous deux tendent à supprimer la deuxième phrase de l'avant-dernier alinéa du texte proposé par l'article 2 pour l'article 36 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs.
Par amendement n° 1, M. Le Grand, au nom de la commission des affaires économiques, propose, dans la deuxième phrase du troisième alinéa du texte présenté par l'article 2 pour l'article 36 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieures, après les mots : « entreprise de transport routier public de marchandises », de remplacer le mot : « et » par le mot : « ou ».
Par amendement n° 25, M. Lefebvre et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, après les mots : « location de véhicules industriels », de rédiger comme suit la fin de la deuxième phrase du troisième alinéa du texte présenté par l'article 2 pour l'article 36 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs : « ... avec conducteurs disposant d'un ou plusieurs véhicules automobiles excédant 500 kilos de charge utile ou trois mètres cubes de volume utile ».
La parole est à M. Hérisson, pour présenter l'amendement n° 17.
M. Pierre Hérisson. L'extension aux entreprises utilisant des véhicules d'un poids total en charge inférieur ou égal à 3,5 tonnes de l'obligation d'une licence de transport intérieur est une mesure dont l'application et le contrôle apparaissent très difficiles à mettre en oeuvre. Les effets concrets d'une telle mesure seront vraisemblablement très faibles. En revanche, elle entraînera une charge nouvelle importante pour les administrations et les entreprises concernées.
Monsieur le ministre, il s'agit avant tout pour moi d'attirer votre attention sur le fait que beaucoup des entreprises qui utilisent ce type de véhicules sont de petites entreprises.
Peut-on traiter avec les mêmes lois et règlements la multinationale et la petite entreprise artisanale ? Peut-être conviendrait-il d'appliquer aux petites entreprises un dispositif spécifique, qui leur soit adapté.
Au demeurant, les véhicules de 3,5 tonnes de poids total en charge sont davantage assimilables à des véhicules légers qu'aux poids lourds qui sont utilisés dans le transport routier.
M. le président. La parole est à M. Emin, pour défendre l'amendement n° 28.
M. Jean-Paul Emin. Je fais miens les arguments qui viennent d'être développés par M. Hérisson.
Je veux simplement préciser qu'on estime à 50 000 le nombre des véhicules concernés.
J'ajoute qu'il s'agit d'une activité que, dans bien des cas, nous cherchons à développer en milieu rural, afin d'y favoriser le développement d'activités nouvelles. Je crois qu'il faut laisser à ces entreprises le temps de prendre véritablement leur place dans la logistique de l'économie locale, avant de définir les mesures à leur appliquer en termes de contrôle administratif et de sécurité. Pour le moment, laissons-les vivre !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 1.
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. Cet amendement vise à apporter une précision.
En évoquant « toute entreprise de transport routier public de marchandises et de location de véhicules industriels avec conducteur », la rédaction actuelle pourrait laisser entendre qu'il faut être à la fois transporteur routier et loueur de véhicules industriels pour entrer dans le champ d'application de la loi. La commission étant persuadée que telle n'était pas l'intention des rédacteurs du texte, elle propose de remplacer le mot : « et » par le mot : « ou ».
M. le président. La parole est à M. Fischer, pour présenter l'amendement n° 25.
M. Guy Fischer. Nous ne sommes pas opposés à ce que la détention d'une licence de transport intérieur soit exigée de toute entreprise possédant des véhicules de moins de 3,5 tonnes.
Une telle mesure ne peut que contribuer à assainir les conditions de concurrence entre les transporteurs. Compte tenu des conditions d'honorabilité professionnelle, de capacités financière et professionnelle demandées, on place ainsi les entreprises sur un pied d'égalité.
Cependant, l'alinéa que nous proposons d'amender concerne également des activités totalement étrangères aux métiers du transport, telles que la course urbaine.
Il semble nécessaire de distinguer ces deux types d'activité et de préserver des métiers qui constituent des gisements d'emplois. Or de telles contraintes risqueraient d'avoir des répercussions sur des emplois déjà précarisés et sous-qualifiés.
Le seuil de 500 kilogrammes de charge utile ou de 3 mètres cubes de volume utile que nous proposons n'est pas à prendre ou à laisser : nous sommes ouverts à la discussion sur ce point, à condition que la licence reste exigible de toute entreprise de transport routier public de marchandises proprement dit.
Assainir l'exercice de la profession de transporteur routier, cela consiste, dans le même temps, à en délimiter le mieux possible les contours. Tel est le sens de cet amendement n° 25.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements identiques n°s 17 et 28 ainsi que sur l'amendement n° 25 ?
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. Je vais demander aux auteurs de ces trois amendements de bien vouloir les retirer au bénéfice de l'amendement n° 2 rectifié, que je vais être amené à défendre dans quelques instants.
Je l'ai dit dans mon propos introductif, ce texte a notamment le mérite d'anticiper sur des directives européennes. Or la première des modifications concernera la licence intérieure pour les véhicules de moins de 6 tonnes. En outre, il est permis de penser qu'une autre modification interviendra très vite, qui portera sur les véhicules de transport de marchandises de moins de 3,5 tonnes.
Il est souhaitable que, dès aujourd'hui, la loi s'adapte à la future directive européenne.
Par ailleurs, il n'a pas paru dépouvu d'intérêt que des règles minimales s'appliquent à l'ensemble des messageries et à l'ensemble des transporteurs.
Nous voyons aujourd'hui se développer un certain nombre de pratiques qui sont à la limite de la régularité : des véhicules de moins de 3,5 tonnes peuvent être surchargés, voire allongés. Aussi est-il souhaitable qu'un minimum de normes et de règles s'applique à l'ensemble des messageries.
Il est vrai que nous avons affaire à un secteur d'activité très important puisqu'il occupe près de 20 000 personnes. Mais il ne s'agit pas de lui imposer de lourdes contraintes. Il s'agit simplement de prévoir un minimum de réglementation en exigeant la licence de l'ensemble de ces transporteurs.
Enfin, les caractéristiques quelque peu particulières de ces transports n'ont pas échappé à la commission. C'est pourquoi l'amendement n° 2 rectifié, que j'aurai l'honneur de présenter tout à l'heure, prévoit qu'un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application de l'article 36 de la loi du 30 décembre 1982 en tenant compte notamment des spécificités de chaque type de transport.
Pour toutes ces raisons, la commission est défavorable aux amendements n°s 17, 28 et 25.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 17 et 28, ainsi que sur les amendements n°s 1 et 25 ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Comme la commission, le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements identiques n°s 17 et 28 et sur l'amendement n° 25.
En revanche, il émet un avis favorable sur l'amendement n° 1.
M. le président. Monsieur Hérisson, l'amendement n° 17 est-il maintenu ?
M. Pierre Hérisson. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 17 est retiré.
Monsieur Emin, l'amendement n° 28 est-il maintenu ?
M. Jean-Paul Emin. Je le retire également, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 28 est retiré.
Monsieur Lefebvre, l'amendement n° 25 est-il maintenu ?
M. Pierre Lefebvre. Dans les circonstances présentes, monsieur le président, j'aurais mauvaise grâce à le maintenir ! (Sourires.)
M. le président. L'amendement n° 25 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 2 rectifié, M. Le Grand, au nom de la commission des affaires économiques, propose de rédiger comme suit le dernier alinéa du texte présenté par cet article pour l'article 36 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs :
« Un décret en Conseil d'Etat, pris après avis du Conseil national des transports, fixe les modalités d'application du présent article en tenant compte notamment des spécificités de chaque type de transport. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. J'ai, en fait, déjà présenté cet amendement, qui me paraît susceptible de donner satisfaction aux auteurs des amendements qui viennent d'être retirés, étant entendu que leurs observations ne manquaient pas de pertinence.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Un décret en Conseil d'Etat étant effectivement nécessaire, le Gouvernement est favorable à l'amendement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 2 rectifié.
M. Jacques Bellanger. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Bellanger.
M. Jacques Bellanger. Je pense qu'il s'agit là d'un domaine très sensible qui mérite qu'on s'y attarde quelque peu.
Cette activité de petite messagerie, de transport de petits colis, est en pleine expansion, et elle va encore connaître, dans les années à venir, une croissance extraordinaire. Il est évident, par exemple, que le développement des ventes par correspondance via Internet va se traduire par un essor des expéditions de petits colis.
Or, à l'heure actuelle, on constate qu'une anarchie totale règne dans cette profession. On peut d'ailleurs comprendre que les multiples petites entreprises qui se créent trouvent des défenseurs parce que ces créations sont souvent le fait de personnes sans emploi qui espèrent trouver ainsi une issue à leur situation.
Mais il faut savoir que ceux que, dans le langage de la profession, on appelle les « louageurs » sont profondément exploités. Dans ce domaine, le recours à la sous-traitance est systématique. Selon un article paru dans l'Officiel des transporteurs, l'administration considère qu'il s'agit de travail illicite par dissimulation de salariés. Des procès sont d'ailleurs en cours.
Je voulais m'opposer à certains amendements mais ceux-ci ont été retirés. Notre rapporteur, dans sa sagesse sénatoriale, nous propose une sorte de compromis. Je ne peux pas dire qu'il me satisfait entièrement, mais il a au moins le mérite d'être acceptable. Nous nous y rallions donc.
Je tenais cependant à attirer l'attention sur ce point car, si nous ne faisons rien, nous allons au-devant de très graves problèmes dans les années à venir.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 2 rectifié, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 2, ainsi modifié.

(L'article 2 est adopté.)

Article additionnel après l'article 2



M. le président.
Par amendement n° 23, MM. Fatous, Bellanger et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 2, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le premier alinéa du I de l'article 8 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs est ainsi rédigé :
« A compter du 1er janvier 2000, l'exercice des professions de transporteur public de marchandises, de loueur de véhicules industriels destinés au transport et d'auxiliaire de transport, au moyen de véhicules automobiles d'au moins deux essieux, est subordonné, selon des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat, à des conditions d'honorabilité professionnelle et de capacité financière, en tenant compte des spécificités de chaque type de transport. »
La parole est à M. Fatous.
M. Léon Fatous. Cet amendement a pour objet de rendre obligatoire - et non pas seulement facultatif, comme le prévoit la loi actuellement - le principe selon lequel l'exercice des professions visées doit obéir à des conditions d'honorabilité professionnelle et de capacité financière.
Par ailleurs, il tire les conséquences de l'article 2 du projet de loi tel qu'il a été modifié par l'Assemblée nationale, qui a étendu l'obligation de détenir une licence de transport aux véhicules d'au moins deux essieux - et pas simplement aux véhicules de plus de 3,5 tonnes - en prévoyant que les conditions d'honorabilité et de capacité financière pour l'heure requises pour les véhicules de plus de 3,5 tonnes devront être aussi satisfaites par les transporteurs exploitant des véhicules d'au moins deux essieux. Il est précisé que ces conditions seront déterminées en tenant compte des spécificités des différents types de transport et qu'elles ne seront applicables qu'à compter du 1er janvier 2000, afin de permettre aux professionnels de s'adapter.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. Le Sénat ayant adopté l'amendement n° 2 rectifié, cet amendement n° 23 n'a plus d'objet. Aussi, je demande à ses auteurs de bien vouloir le retirer, sinon j'émettrai un avis défavorable.
Cela étant dit, je voudrais apporter une précision. Monsieur Bellanger, vous avez parfaitement raison. Cependant, l'amendement n° 2 rectifié - je ne reviens pas sur la discussion car elle a eu lieu - répond pleinement à votre requête, car l'interrogation qui était la vôtre a été aussi celle de la commission. En effet, si nous avons proposé l'amendement n° 2 rectifié, c'est parce que nous partageons les mêmes préoccupations.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je demande à mon tour aux auteurs de cet amendement de bien vouloir le retirer, sinon j'émettrai, moi aussi, un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Fatous, l'amendement n° 23 est-il maintenu ?
M. Léon Fatous. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 23 est retiré.

Article 3



M. le président.
« Art. 3. - L'article 37 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 précitée est ainsi rédigé :
« Art. 37 . - I. - Les autorisations et les copies conformes de la licence de transport intérieur ou de la licence communautaire prévues aux chapitres III et IV du titre II de la présente loi pourront faire l'objet d'un retrait, à titre temporaire ou définitif, en cas d'infraction aux dispositions relatives aux transports, aux conditions de travail et à la sécurité constituant au moins une contravention de la cinquième classe ou d'infractions répétées constituant au moins des contraventions de la troisième classe.
« II. - Saisie d'un procès-verbal constatant une infraction de nature délictuelle aux dispositions relatives aux transports, aux conditions de travail et à la sécurité, commise après au moins une première infraction de même nature, l'autorité administrative peut, indépendamment des sanctions pénales, prononcer l'immobilisation d'un ou plusieurs véhicules ou ensembles routiers à la disposition d'une entreprise de transport routier pour une durée de trois mois au plus, aux frais et risques de celle-ci.
« L'immobilisation est exécutée sous le contrôle de l'autorité administrative, dans le lieu de garage habituel ou, à défaut, dans un lieu désigné par le préfet. Une publication dans les locaux de l'entreprise sanctionnée et par voie de presse de la sanction administrative prévue au présent article est effectuée. Un décret en Conseil d'Etat en précise les modalités.
« III. - Un décret en Conseil d'Etat pris après avis du Conseil national des transports détermine les modalités d'application du présent article et fixe notamment la liste des infractions mentionnées au II. »
Par amendement n° 3, M. Le Grand, au nom de la commission des affaires économiques, propose, dans la première phrase du second alinéa du II du texte présenté par cet article pour l'article 37 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs, de supprimer les mots : « , dans le lieu de garage habituel ou, à défaut ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. Il s'agit de faciliter la mise en oeuvre des dispositions qui sont prévues à l'article 3. Puisqu'une nouvelle sanction administrative est mise à la disposition du préfet de région après avis de la commission des sanctions, à savoir l'immobilisation administrative du véhicule, il faut laisser audit préfet toute latitude pour décider du lieu d'immobilisation du véhicule.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Favorable.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 3.
M. Pierre Lefebvre. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lefebvre.
M. Pierre Lefebvre. Nous comprenons bien le sens de cet amendement. L'intention est tout à fait bonne, mais nous considérons, pour notre part, que la disposition proposée risquerait de compliquer l'application de la procédure, en particulier s'il n'existe pas, comme c'est d'ailleurs souvent le cas, de parc de fourrière à proximité. Mais puisque le Gouvernement accepte cet amendement nous ne serons pas plus royalistes que le roi. (Sourires.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 3, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 4, M. Le Grand, au nom de la commission des affaires économiques, propose de supprimer la dernière phrase du second alinéa du II du texte présenté par l'article 3 pour l'article 37 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination avec l'amendement n° 5, que je souhaiterais donc présenter en même temps, monsieur le président.
M. le président. J'appelle en discussion l'amendement n° 5, présenté par M. Le Grand, au nom de la commission des affaires économiques, et tendant à rédiger comme suit le III du texte proposé par l'article 3 pour l'article 37 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs :
« III. - Un décret en Conseil d'Etat pris après avis du Conseil national des transports détermine les modalités d'application du présent article, notamment celles concernant la publication de la sanction administrative, et fixe la liste des infractions mentionnées au II. »
Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur.
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. Si j'ai tenu à présenter ensemble ces deux amendements, c'est parce que, dans l'article 3, il est prévu par deux fois qu'un décret en Conseil d'Etat détermine ou précise les modalités d'application du présent article. La mention de ce décret doit donc être mise en facteur commun. C'est la raison pour laquelle nous supprimons la phrase au II pour la rétablir au III, mais dans une formulation plus explicite.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 4 et 5 ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 4, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 5, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 3, modifié.

(L'article 3 est adopté.)

Article 3 bis



M. le président.
« Art. 3 bis . - Le début de l'avant-dernier alinéa de l'article 17 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 précitée est ainsi rédigé :
« Les sanctions, notamment les mesures de radiation, de retrait et d'immobilisation prévues par... (Le reste sans changement.) »
Par amendement n° 26, M. Lefebvre et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent :
A. - De compléter in fine cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - L'avant-dernier alinéa de l'article 17 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 précitée est complété par une phrase ainsi rédigée : "La périodicité de ses réunions est d'au moins une fois par trimestre". »
B. - En conséquence, de faire précéder le début de cet article de la mention : « I ».
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Sans vouloir remettre en cause le principe de la sanction d'immobilisation immédiate de véhicules, bien au contraire, il semble nécessaire, parallèlement, de renforcer les sanctions administratives postérieures à l'infraction.
Il n'est plus acceptable, en effet, que le solde entre l'avantage retiré d'une infraction et le coût que représente la sanction de ladite infraction soit positif pour le transporteur.
Il n'est pas normal que l'entreprise qui respecte les règles juridiques soit, par là même, pénalisée économiquement.
Tout le monde s'accorde pour reconnaître le peu de satisfaction que procure le fonctionnement actuel des commissions de sanctions administratives, les CAS. Or, plus le délai entre l'infraction et sa sanction éventuelle est long, moins celle-ci est dissuasive. Dès lors, la sanction administrative devient un risque financier minime, au lieu d'être pénalisante.
En réduisant les délais de réunion de ces commissions à une fois par trimestre au minimum, au lieu d'une ou deux fois par an à l'heure actuelle, nous escomptons en améliorer le fonctionnement et ainsi en renforcer le crédit auprès des professionnels.
La sanction immédiate d'immobilisation ne doit pas être là pour pallier les insuffisances de la CSA, mais les deux types de sanctions - immédiate ou différée - doivent faire partie d'un arsenal équilibré, afin que soit respectée la réglementation des transports, du travail et de sécurité routière.
Par ailleurs - et je m'adresse à vous, monsieur le ministre - il est nécessaire de garantir le caractère tripartite et contradictoire de ces commissions.
J'ajouterai, enfin, que le groupe communiste républicain et citoyen, en redonnant crédit à cette structure, offre les moyens à la profession du transport routier de s'autoréguler.
Aussi, mes chers collègues, je vous demande d'adopter cet amendement, qui répond aux attentes de toute la profession. Notre rôle de législateur n'est-il pas de faire en sorte que les lois de la République soient réellement appliquées et respectées ?
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. La commission considère qu'une amélioration de la périodicité permettrait effectivement une accélération des procédures. Elle émet donc un avis favorable sur cet amendement, sous réserve bien évidemment - mais c'est une observation de bon sens - que des sujets soient à inscrire à l'ordre du jour. Dans le cas contraire, les préfets, je l'imagine, auront toute latitude pour ne pas réunir la commission. Monsieur le ministre, je me tourne vers vous : le bon sens ne doit pas être loin de chez nous. (Sourires.)
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Le Gouvernement est favorable au bon sens.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 26, accepté par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 3 bis, ainsi modifié.

(L'article 3 bis est adopté.)

Article 3 ter



M. le président.
« Art. 3 ter . - La dernière phrase du premier alinéa de l'article 26 de la loi n° 95-96 du 1er février 1995 concernant les clauses abusives et la présentation des contrats et régissant diverses activités d'ordre économique et commercial est remplacée par deux phrases ainsi rédigées :
« Ce document, qui est conservé dans le véhicule, mentionne les dates et heures d'arrivée et de départ du véhicule ou de l'ensemble routier, tant au lieu de chargement qu'au lieu de déchargement, l'heure d'arrivée au lieu de déchargement demandée par le remettant ou son représentant, ainsi que les prestations annexes, prévues ou accomplies, effectuées par son équipage. L'absence de ce document, à bord du véhicule, dûment rempli et signé par les personnes visées au troisième alinéa du présent article, constitue une infraction aux dispositions du code de la route entraînant l'immobilisation du véhicule ou de l'ensemble routier prévu à l'article L. 25 dudit code. »
Sur cet article, je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 12, M. Lanier, au nom de la commission des lois, propose de supprimer cet article.
Par amendement n° 29, le Gouvernement propose de rédiger ainsi cet article :
« I. - La dernière phrase du premier alinéa de l'article 26 de la loi n° 95-96 du 1er février 1995 concernant les clauses abusives et la présentation des contrats et régissant diverses activités d'ordre économique et commercial est ainsi rédigée :
« Ce document, dûment signé par le remettant, qui est conservé dans le véhicule, mentionne les dates et heures d'arrivée et de départ du véhicule ou de l'ensemble routier, tant au lieu du chargement qu'au lieu du déchargement, l'heure d'arrivée au lieu de déchargement demandé par le remettant ou son représentant, ainsi que les prestations annexes, prévues ou accomplies, effectuées par son équipage. »
« II. - Dans le premier alinéa de l'article L. 25 du code de la route, après les mots : "règlements de police", sont insérés les mots : "à la réglementation des transports routiers de marchandises ou de voyageurs". »
Par amendement n° 6 rectifié bis, M. Le Grand, au nom de la commission des affaires économiques, propose de remplacer la seconde phrase du texte présenté par l'article 3 ter pour remplacer la dernière phrase du premier alinéa de l'article 26 de la loi n° 95-96 du 1er février 1995 concernant les clauses abusives et la présentation des contrats et régissant diverses activités d'ordre économique et commercial par les dispositions suivantes :
« L'absence de ce document à bord du véhicule, dûment rempli et signé par les personnes visées au troisième alinéa du présent article, entraîne l'immobilisation immédiate du véhicule, ou de l'ensemble routier, prévue à l'article L. 25 dudit code dans l'un des cas suivants :
« - dépassement de plus de 20 km/h de la vitesse maximale autorisée sur les voies ouvertes à la circulation publique ou la vitesse maximale autorisée par construction pour son véhicule ;
« - dépassement de plus de 20 % de la durée maximale de conduite journalière ;
« - réduction à moins de 6 heures de la durée de repos journalier. »
La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° 12.
M. Lucien Lanier, rapporteur pour avis. Je me suis déjà exprimé très largement sur ce point au cours de la discussion générale.
En l'occurrence, la commission des lois se place d'un point de vue purement juridique. A cet égard, le premier défaut de l'article 3 ter, c'est l'automaticité de la peine sans tenir compte des circonstances. En effet, l'expression : « entraînant l'immobilisation du véhicule » paraît beaucoup plus contraignante que celle qui est prévue dans l'article L. 25 du code de la route dont les termes sont plus nuancés : « peuvent entraîner l'immobilisation ». Ce défaut de l'article 3 ter pourrait être levé s'il comportait l'expression « peuvent entraîner ». En revanche, je considère l'automaticité comme étant très dangereuse.
Par ailleurs, je considère que l'immobilisation d'un véhicule - je me réfère aux petites entreprises qui n'ont quelquefois qu'un seul véhicule - est une sanction très grave.
Il faut être logique. Ou bien l'on cherche à tuer les petites entreprises au profit des grandes, au motif qu'elles seraient trop nombreuses, mais alors il faut le dire clairement et prévoir une loi qui le précise. Mais qu'il n'y ait aucune hypocrisie ! Je ne fais aucun procès d'intention ; je voudrais simplement qu'il n'y ait pas d'hypocrisie dans cette affaire.
Les petites entreprises - je me place du point de vue social - seront particulièrement visées par cette sanction qui est grave. N'oublions pas qu'il peut manquer simplement une signature sur le document de suivi. Or la sanction tombe comme un marteau-pilon s'agissant d'une infraction qui est tout de même beaucoup moins grave que celles qui sont actuellement prévues par le code de la route, notamment la conduite en état d'ivresse ou la manipulation du limitateur de vitesse.
Par ailleurs, si nous nous référons à l'article 2 du décret du 25 mai 1963, on peut s'interroger sur l'utilité de l'article 3 ter puisqu'une peine existe déjà. En effet, il est prévu que l'absence de documents de bord est passible d'une forte amende.
Les raisons que j'invoque sont non seulement juridiques mais également sociales, et je ne sors pas du rôle de la commission des lois en la circonstance. Ceux qui seront les plus punis seront les plus faibles, ceux pour lesquels l'immobilisation d'un véhicule peut entraîner des conséquences très graves, voire mortelles pour leur entreprise.
La commission des lois a beaucoup réfléchi sur cette question. La peine lui paraît disproportionnée à l'infraction. C'est la raison pour laquelle elle propose la suppression de l'article 3 ter.
J'ajoute que l'on pourrait faire confiance à ceux qui ont en charge la réglementation et ne pas alourdir la loi. En effet, on peut très bien, dans le code de la route, par la voie réglementaire, revoir la sanction d'immobilisation, en complétant l'article R. 278.
M. le président. La parole est à M. le ministre, pour présenter l'amendement n° 29.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Après le vote du projet de loi au Palais-Bourbon, je m'étais engagé à réunir un groupe de travail avec les parlementaires afin d'examiner les amendements issus de l'Assemblée nationale. De cette concertation résultent les amendements n°s 29 relatif à l'article 3 ter et 30 concernant l'article 3 quinquies.
Le présent amendement a essentiellement pour objet de préciser le contenu du document qui doit être conservé dans le véhicule.
S'agissant du deuxième alinéa, il était utile de préciser que les infractions prévues à l'article L. 25 du code de la route concernent bien également la réglementation des transports routiers.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 6 rectifié bis et pour donner l'avis de la commission sur les amendements n°s 12 et 29.
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. La présentation de l'amendement n° 6 rectifié bis équivaut à un avis sur les amendements n°s 12 et 29.
En l'occurrence, il s'agit de l'immobilisation immédiate des véhicules en cas d'absence à bord du document de suivi. C'est un sujet grave et lourd de conséquences.
L'Assemblée nationale avait retenu le seul fait de l'absence du document de suivi comme devant justifier une immobilisation du véhicule.
Je partage l'avis exprimé par la commission des lois sur ce sujet : la peine est excessive par rapport à l'absence de document de suivi. Je l'ai d'ailleurs dit dans la discussion générale et c'est pourquoi je n'y reviens pas longuement. Ce n'est pas parce qu'il manque un document à bord d'un camion que la sécurité des usagers de la route est concernée.
En revanche, on a dit également, et je l'ai moi-même indiqué dans mon propos liminaire, qu'il y avait une ardente nécessité d'organiser la transparence dans le milieu professionnel des transporteurs routiers. C'est la raison pour laquelle la commission des affaires économiques a considéré qu'il était nécessaire d'associer un peu plus étroitement, dans les faits générateurs, le chargeur. En effet, il peut exister, ici ou là, des comportements de chargeurs qui conduisent le transporteur à des attitudes non respectueuses du code de la route.
C'est pourquoi l'amendement n° 6 rectifié bis satisfait à la fois la réflexion tout à fait pertinente de la commission des lois, rejoint la préoccupation de l'Assemblée nationale, qui voulait introduire une nouvelle disposition, et permet de ne pas avoir de disproportion entre le fait générateur en question et la peine. Aussi avons-nous retenu une double obligation : une absence de document de suivi et une infraction.
L'infraction serait constituée dans l'un des cas suivants : le dépassement de plus de 20 kilomètres heure de la vitesse maximale autorisée sur les voies ouvertes à la circulation publique ou la vitesse maximale autorisée par construction pour son véhicule, qui est déjà un premier élément de faute ; le dépassement de plus de 20 % de la durée maximale de conduite journalière, qui peut être un fait générateur lourd mettant gravement en cause la sécurité des usagers de la route ; enfin - c'est une conséquence de la deuxième infraction - la réduction à moins de six heures de la durée de repos journalier.
Il faudrait donc que l'une de ces trois infractions soit associée à l'absence de document de suivi pour qu'il y ait immobilisation du véhicule.
Cet amendement n° 6 rectifié bis vise à prolonger la préoccupation qui a été exprimée par les uns et les autres et qui est partagée - je tiens à le souligner - par l'ensemble des professionnels du transport routier. Il répond à leur attente et à leurs besoins.
Mais on comprend qu'il ne faille pas aller trop loin sous peine de créer, comme M. le rapporteur pour avis l'a dit tout à l'heure, une disproportion excessive et exagérée entre la pénalité et la faute.
La commission émet donc un avis défavorable sur les amendements n°s 12 et 29.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 12 et 6 rectifié bis ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'amendement de suppression n° 12. En effet, le texte adopté par l'Assemblée nationale méritait d'être revu, et le Gouvernement a déposé un amendement n° 29 visant à en proposer une rédaction entièrement nouvelle.
L'amendement n° 6 rectifié bis est intéressant : s'il ressemble beaucoup à une partie de l'amendement n° 30 déposé par le Gouvernement à l'article 3 quinquies, il est cependant moins complet, car il ne permet pas d'aller jusqu'à la poursuite du donneur d'ordre.
Vous comprendrez donc que je ne puisse être d'accord avec ce texte et que j'émette un avis défavorable.
M. Lucien Lanier, rapporteur pour avis. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Lucien Lanier, rapporteur pour avis. Je remercie M. le rapporteur des explications qu'il nous a données et par lesquelles il reconnaît, en définitive, le bien-fondé des observations de la commission des lois. Il le reconnaît d'ailleurs tellement que son amendement n° 6 rectifié bis vise, en quelque sorte, à adoucir la précédente version de son texte, qui assortissait d'une peine grave une faute relativement mineure.
L'amendement n° 6 rectifié bis tend à ajouter à l'absence du document de suivi une infraction - importante, il faut le reconnaître - pour autoriser la sanction, à savoir l'immobilisation du véhicule.
M. le rapporteur, en qui j'ai toute confiance, nous indique que les professionnels, après avoir été consultés, se sont montrés favorables dans leur ensemble à cette disposition. C'est la raison pour laquelle la commission des lois, à laquelle j'ai exposé l'amendement de M. le rapporteur, a estimé que, dans sa sagesse, le Sénat retiendrait sur ce point la solution la plus satisfaisante.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 12.
M. Pierre Lefebvre. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Lefebvre.
M. Pierre Lefebvre. Malgré l'argumentaire juridique développé par M. le rapporteur pour avis, il nous paraît évident que cet amendement est idéologique et politique : c'est parce que la sanction d'immobilisation immédiate du véhicule concerne non plus seulement le conducteur, mais aussi l'ensemble des donneurs d'ordre - les patrons - qu'elle vous indispose, monsieur Lanier !
M. le président. Monsieur Lefebvre, je vous rappelle que M. Lanier s'exprime au nom de la commission des lois.
M. Pierre Lefebvre. La commission des affaires économiques et du Plan avait envisagé, dans un premier temps, d'adopter le projet de loi en l'état, sans même l'amender. Or, la commission des lois entend en supprimer des dispositions essentielles, en particulier lorsqu'il s'agit des deux cas évoqués d'immobilisation immédiate du véhicule.
La déclaration que vient de faire M. Lanier m'interdit de penser que, depuis quelques jours, le lobby des gros transporteurs routiers et des chargeurs n'a pas porté ses fruits au sein de la commission des lois. (M. le rapporteur pour avis lève les bras au ciel.) Comme je l'ai dit lors de la discussion générale, il semble bien que, en la matière, vous ayez retenu l'intérêt du patronat plutôt que l'intérêt général.
Par conséquent, nous nous prononcerons fermement contre l'amendement n° 12.
M. le président. Monsieur Lefebvre, il n'est pas dans la tradition du Sénat que l'une de ses commissions se laisse influencer par un lobby. Je rappelle que, tout mandat impératif étant nul, aucun de nos collègues ne serait sensible à ce genre de pression.
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. Très bien !
M. Lucien Lanier, rapporteur pour avis. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Lucien Lanier, rapporteur pour avis. Je suis convaincu que les propos de M. Lefebvre ont dépassé sa pensée. Sans doute s'agit-il d'une erreur de jeunesse de sa part ?
Monsieur Lefebvre, je n'admets pas que vous disiez - je vous demande de retirer cette affirmation tant de votre pensée que de vos propos - que la commission des lois a été influencée par qui que ce soit, ne serait-ce que parce qu'elle n'avait aucunement vocation à se prononcer sur le fond et qu'elle n'a donc pas eu à auditionner les transporteurs, cette tâche étant confiée à la commission des affaires économiques. Elle a auditionné les services du Gouvernement, qui étaient favorables à sa position. C'est vous dire... Le problème est donc très clair. Je n'admets donc pas que vous puissiez mettre en cause l'une des commissions du Sénat en pensant qu'elle peut être assujettie à un lobby quelconque. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
L'incident est clos. Mais je tenais à le relever et à vous conseiller, monsieur Lefebvre, de ne pas persister à l'avenir dans cette voie-là.
Je dois dire que l'idéologie dont vous avez également accusé la commission des lois n'est que le simple constat et la défense de ce qui s'appelle la loi et la Constitution. Il y a des principes fondamentaux sur lesquels est fondé le droit français : c'est notre devoir de les défendre ; il s'agit non pas d'idéologie, mais de réalité.
Telles sont les raisons pour lesquelles la commission des lois s'est prononcée en ce sens. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. Monsieur le président, je tiens à affirmer ma totale solidarité avec les propos tenus par M. le rapporteur pour avis.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 12, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 29, repoussé par la commission.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 6 rectifié bis , repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 3 ter , ainsi modifié.

(L'article 3 ter est adopté.)

Article 3 quater



M. le président.
« Art. 3 quater . - I. - L'article 95 du code de commerce est ainsi rédigé :
« Art. 95 . - Le commissionnaire a privilège sur la valeur des marchandises faisant l'objet de son obligation et sur les documents qui s'y rapportent pour toutes ses créances de commission sur son commettant, même nées à l'occasion d'opérations antérieures.
« Dans la créance privilégiée du commissionnaire sont compris, avec le principal, les intérêts, commissions et frais accessoires. »
« II. - Après l'article 108 du code de commerce, il est inséré un article 108-1 ainsi rédigé :
« Art. 108-1 . - Le voiturier a privilège sur la valeur des marchandises faisant l'objet de son obligation et sur les documents qui s'y rapportent pour toute créance de transport sur son donneur d'ordre, même née à l'occasion d'opérations antérieures.
« Les créances de transport couvertes par le privilège sont les prix de transport proprement dits, les compléments de rémunération dus au titre de prestations annexes et d'immobilisation du véhicule au chargement ou au déchargement, les frais engagés dans l'intérêt de la marchandise, les débours de douane (droits, taxes, frais et amendes) liés à une opération de transport et les intérêts. »
« III. - Le 6° de l'article 2102 du code civil est abrogé. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 7 rectifié, M. Le Grand, au nom de la commission des affaires économiques, propose de rédiger comme suit le premier alinéa du texte présenté par le II de cet article pour l'article 108-1 du code du commerce :
« Art. 108-1 . - Le voiturier a privilège sur la valeur des marchandises faisant l'objet de son obligation et sur les documents qui s'y rapportent pour toutes créances de transport, même nées à l'occasion d'opérations antérieures, dont son donneur d'ordres, l'expéditeur ou le destinataire restent débiteurs envers lui. »
Par amendement n° 18, M. Hérisson propose de compléter, in fine, le premier alinéa du texte présenté par le II de l'article 3 quater pour l'article 108-1 du code du commerce par les mots : « dans la mesure où le propriétaire des marchandises sur lesquelles s'exerce le privilège est impliqué dans lesdites opérations ».
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 7 rectifié.
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. L'amendement vise à préciser le contenu de l'article en rappelant que le donneur d'ordre peut être soit l'expéditeur, soit le destinataire. Cette rédaction nous a paru plus conforme à la réalité.
M. le président. La parole est à M. Hérisson, pour présenter l'amendement n° 18.
M. Pierre Hérisson. L'extension du privilège du voiturier sur la marchandise en sa possession est une évolution normale. Elle ne doit toutefois pas conduire à des aberrations, en particulier à ce que la marchandise sur laquelle s'exerce le privilège soit la propriété d'un tiers n'ayant aucun rapport avec la créance ni avec l'obligation en cause.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 18 ?
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. Un très long débat est intervenu en commission des affaires économiques sur ce problème de fond.
La commission a pensé dans un premier temps que le chargeur reste propriétaire jusqu'à ce que la marchandise arrive chez le destinataire, ce qui semble le cas le plus facile à apprécier.
En revanche, la difficulté survient lorsqu'il s'agit, dans un même véhicule, de marchandises différentes venant de clients ou de donneurs d'ordre différents. Il reste alors à savoir à quelle partie du chargement ou de quelle manière va s'appliquer l'exercice du privilège.
C'est la raison pour laquelle la commission souhaite recueillir l'avis du Gouvernement avant de se prononcer.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 7 rectifié et 18 ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Le texte initial avait pour objet d'aligner le privilège du voiturier sur celui dont dispose le commissionnaire. L'adoption de l'amendement n° 7 rectifié aurait pour effet de créer une distorsion entre les deux catégories de professionnels, cette fois en sens inverse. Cela ne me semble pas opportun, et le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ce texte.
Je tiendrai le même raisonnement en ce qui concerne l'amendement n° 18. L'objectif du Gouvernement est d'aligner la situation des transporteurs routiers sur celle des commissionnaires ; or, l'amendement tend à restreindre la portée de la protection que l'on veut leur accorder. Le Gouvernement y est donc également défavorable.
M. le président. Monsieur Hérisson, avant de mettre aux voix l'amendement n° 7 rectifié, j'attire votre attention sur le fait que, si cet amendement est adopté, le vôtre deviendra sans objet...
M. Pierre Hérisson. En effet, monsieur le président ! En conséquence, je transforme mon amendement n° 18 en sous-amendement à l'amendement n° 7 rectifié.
M. le président. Je suis donc saisi d'un sous-amendement n° 18 rectifié, présenté par M. Hérisson et tendant à compléter le texte proposé par l'amendement n° 7 rectifié pour le premier alinéa du texte proposé par le II de l'article 3 quater pour l'article 108-1 du code de commerce par les mots : « dans la mesure où le propriétaire des marchandises sur lesquelles s'exerce le privilège est impliqué dans lesdites opérations. »
Quel est l'avis de la commission sur ce sous-amendement ?
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 18 rectifié, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, l'amendement n° 7 rectifié, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 3 quater, ainsi modifié.

(L'article 3 quater est adopté.)

Article 3 quinquies



M. le président.
« Art. 3 quinquies . - La violation d'une obligation de prudence ou de sécurité, au sens de l'article 223-1 du code pénal, matérialisée par une infraction aux réglementations des transports, du travail et de la sécurité routière commise à l'aide d'un véhicule de transport routier entraîne l'immobilisation et le retrait de la circulation dudit véhicule, qu'il soit en charge ou à vide, jusqu'à ce que tous les éléments de nature à établir les responsabilités de l'infraction puissent être recueillis.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions dans lesquelles a lieu l'immobilisation, notamment concernant la sauvegarde du chargement et l'imputation des frais de gardiennage-stockage liés à l'immobilisation. »
Sur cet article, je suis saisi de cinq amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 13 est présenté par M. Lanier, au nom de la commission des lois.
L'amendement n° 21 est déposé par M. Hérisson.
Tous deux tendent à supprimer cet article.
Par amendement n° 30 rectifié, le Gouvernement propose de rédiger ainsi l'article 3 quinquies :
« I. - Après l'article L. 9-1 du code de la route, sont insérés deux articles ainsi rédigés :
« Art. L. 9-2. - Est puni de 25 000 F d'amende le fait, par le conducteur d'un véhicule de transport routier de marchandises ou de voyageurs :
« 1° Soit de dépasser de plus de 20 km/h la vitesse maximale autorisée sur les voies ouvertes à la circulation publique ou la vitesse maximale autorisée par construction pour son véhicule ;
« 2° Soit de dépasser de plus de 20 % la durée maximale de conduite journalière ;
« 3° Soit de réduire à moins de six heures la durée de repos journalier.
« Est puni de six mois d'emprisonnement et 50 000 F d'amende le fait de donner au conducteur d'un véhicule de transport routier de marchandises ou de voyageurs, directement ou indirectement, des instructions que ce dernier ne peut exécuter qu'en commettant les faits prévus au 1°, 2° ou 3° du présent article. Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues par l'article 121-2 du code pénal, des infractions prévues par le présent alinéa. La peine encourue par les personnes morales est l'amende, selon les modalités prévues par l'article 131-39 du code pénal.
« Sans préjudice des dispositions des articles L. 25 et L. 26 en cas d'infraction aux dispositions du présent article, le véhicule et son chargement doivent obligatoirement faire l'objet d'une décision d'immobilisation immédiate lorsqu'il n'est pas satisfait à l'obligation relative à la présence à bord du document prévu par l'article 26 de la loi n° 95-96 du 1er février 1995 concernant les clauses abusives et la présentation des contrats et régissant diverses activités d'ordre économique et commercial ou, pour les transports qui ne sont pas soumis aux dispositions de cet article, de la lettre de voiture prévue par la convention de Genève du 19 mars 1956 relative aux transports internationaux de marchandises par route exécutés à l'aide de contrat CMR. Cette immobilisation est maintenue tant qu'il n'est pas satisfait à cette obligation.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions dans lesquelles a lieu l'immobilisation du véhicule et de son chargement.
« Art. L. 9-3. - En cas de commission d'un délit ou d'une contravention concernant les conditions de travail dans les transports routiers, constatée sur le territoire national, le dépassement des temps de conduite et la réduction des temps de repos sont calculés, pour la période de temps considérée, en incluant les périodes de temps de conduite et de repos effectuées à l'étranger. »
« II. - a) Dans le deuxième alinéa (a) de l'article L. 11-1 du code de la route, après la référence : "L. 9", est insérée la référence : "L. 9-2 1°".
« b) Dans le deuxième alinéa de l'article L. 11-2 du code de la route, après les mots : "Pour les contraventions", sont insérés les mots : "ou le délit prévu par l'article L. 9-2 1°".
« c) Dans le deuxième alinéa (1°) de l'article L.14 du code de la route, après la référence : "L. 9", est insérée la référence : "L. 9-2". »
Par amendement n° 8, M. Le Grand, au nom de la commission des affaires économiques, propose, à la fin du premier alinéa de l'article 3 quinquies , de supprimer les mots : « , jusqu'à ce que tous les éléments de nature à établir les responsabilités de l'infraction puissent être recueillis ».
Par amendement n° 9, M. Le Grand, au nom de la commission des affaires économiques, propose de rédiger comme suit le second alinéa de l'article 3 quinquies :
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les règles relatives à la durée de l'immobilisation ainsi que les conditions dans lesquelles sont assurées la sauvegarde du chargement ainsi que l'imputation des frais de gardiennage-stockage. »
La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° 13.
M. Lucien Lanier, rapporteur pour avis. Je me suis largement expliqué tout à l'heure sur cet article, en insistant notamment sur le fait que l'article R. 278 du code de la route énumère déjà dix-huit cas graves - la conduite en état d'ivresse, par exemple - de manquement à la prudence qui peuvent tous être sanctionnés par une immobilisation du véhicule. Ces dix-huit cas, je tiens à le dire, sont bien plus précis que le renvoi général aux obligations de prudence !
Le pouvoir réglementaire peut compléter cette liste si cela lui semble nécessaire ! Pourquoi alourdir constamment la loi par ce qui peut être traité par le règlement ? La loi doit être dégagée de tous les détails qui l'encombrent et qui, finalement, aboutissent à la situation que vous dénonciez vous-même, monsieur le rapporteur, dans votre propos liminaire : l'alourdissement et la sédimentation des textes est telle que ceux-ci finissent par se contredire les uns les autres.
C'est la raison pour laquelle cet article 3 quinquies ne me paraît pas nécessaire, d'autant qu'il méconnaît le principe de la responsabilité pénale pour son propre fait. Ce point est important car, si la sanction devient automatique, l'immobilisation, peine grave, pourrait être prononcée alors même que le propriétaire du véhicule n'aurait rien à se reprocher, notamment en cas d'ivresse du conducteur.
M. le président. La parole est à M. Hérisson, pour défendre l'amendement n° 21.
M. Pierre Hérisson. Seul le juge pénal a le pouvoir d'apprécier si les faits constatés par un officier de police judiciaire constituent un délit en violation d'une obligation de prudence ou de sécurité au sens de l'article 223-1 du code pénal.
L'article 3 quinquies dessaisissant le juge pénal de son pouvoir souverain d'appréciation, nous en demandons la suppression.
M. le président. La parole est à M. le ministre, pour défendre l'amendement n° 30 rectifié.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Lors du débat à l'Assemblée nationale, les députés ont proposé des sanctions nouvelles tendant à l'immobilisation des véhicules selon des modalités qui sont apparues fragiles au Gouvernement. C'est la raison pour laquelle, à la demande des parlementaires, un groupe de travail a été mis en place pour revoir ce dispositif.
Les objectifs visés par les parlementaires étaient, d'une part, la mise en place d'une immobilisation immédiate supplémentaire et, d'autre part, la possibilité de poursuivre le donneur d'ordre quand celui-ci se révélait responsable des infractions commises par le conducteur.
Le groupe de travail a réfléchi à une solution permettant d'atteindre ces objectifs, et c'est cette solution qui est proposée dans le présent amendement.
Les dépassements de vitesse et de temps de conduite ainsi que le non-respect des temps de repos sont plus sévèrement réprimés. En outre, une possibilité d'immobilisation immédiate est prévue lorsque l'un de ces délits est commis et qu'il est assorti du défaut de documents de transport. Par ailleurs, une sanction plus lourde est prévue pour le donneur d'ordre. Enfin, la responsabilité pénale de la personne morale peut être engagée.
Bien sûr, je précise que l'objectif de ce texte - je réponds là aux remarques qui ont été faites tout à l'heure au cours de la discussion générale - est non pas de sanctionner le conducteur en dehors des cas normalement prévus par les codes en vigueur, mais de remonter au donneur d'ordre.
S'agissant des nouveaux délits commis par le conducteur et pouvant être sanctionnés, les peines sont des peines maximales. Le juge appréciera en fonction des circonstances et des responsabilités en cause. On a parfois évoqué le montant de 25 000 francs, mais c'est la règle en matière de délits !
Cet amendement constitue un premier élément de réponse au problème soulevé par les députés à l'Assemblée nationale. Il appartient maintenant au Sénat de se prononcer sur un dispositif nécessairement complexe, j'en ai conscience, mais qui a pour objet de mieux responsabiliser l'ensemble des intervenants dans le domaine du transport routier.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter les amendements n°s 8 et 9.
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. Je retire ces amendements, monsieur le président, dans la mesure où la commission est favorable aux amendements identiques n°s 13 et 21, qui tendent à supprimer l'article.
M. le président. Les amendements n°s 8 et 9 sont retirés.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 13 et 21 ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je suis favorable aux amendements identiques n°s 13 et 21 tendant à supprimer l'article 3 quinquies.
M. le président. Permettez-moi, monsieur le ministre, d'attirer votre attention sur le fait que, si ces amendements sont adoptés, l'amendement n° 30 rectifié n'aura plus d'objet !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je le sais, monsieur le président, mais je propose un texte alternatif !
M. le président. Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s 13 et 21.
M. Pierre Lefebvre. Je demande la parole contre ces amendements.
M. le président. La parole est à M. Lefebvre.
M. Pierre Lefebvre. Le groupe communiste républicain et citoyen est contre ces amendements, pour les mêmes raisons que tout à l'heure. Pour ne pas fâcher M. le rapporteur pour avis, je ne répéterai pas, qu'il veuille bien m'en excuser, l'argumentation développée précédemment, même si je la garde à l'esprit.
S'agissant de l'amendement n° 30 rectifié, monsieur le ministre, l'amende de 25 000 francs requise à l'encontre du conducteur d'un véhicule de transport nous paraît lourde, voire excessive, parce qu'il peut s'agir d'un salarié. Nous avons donc une certaine réticence et nous nous interrogeons beaucoup à propos d'une amende d'un tel niveau.
M. Jacques Bellanger. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Bellanger.
M. Jacques Bellanger. Pour ma part, je ne suivrai pas M. le rapporteur pour avis et je comprends mal que la commission des affaires économiques se rallie à des amendements de suppression de l'article alors qu'elle a elle-même déposé des amendements sur ledit article. Mais il s'agit sans doute de la joute parlementaire !
Cela étant, si nous voulons empêcher un certain nombre d'abus, ce n'est pas vers le salarié qu'il faut se tourner ! Quand celui-ci commet des infractions, c'est souvent parce qu'il y a eu pression de la part de son employeur. Quant au transporteur indépendant, il n'a pas le choix : ou il perd son client, ou il commet des infractions.
Face à cela, l'immobilisation immédiate du véhicule me paraît être la seule sanction capable d'atteindre le donneur d'ordre. Si les délais impartis sont trop courts, c'est que nous sommes dans une politique de flux tendus, et la seule vraie sanction est l'immobilisation du véhicule, qui ne vise pas le transporteur mais le donneur d'ordre qui conduit le transporteur à transgresser la loi.
M. le rapporteur pour avis a fourni un certain nombre d'arguments juridiques, mais je crois qu'il est plus important de réorganiser la profession et d'assurer la sécurité routière.
Je constate que nous ne jouons pas dans la même cour, puisque les amendements n°s 13 et 21 suppriment le dispositif proposé. Cela n'est pas acceptable. Nous nous prononcerons donc contre.
J'attire votre attention, mes chers collègues : tout ce que nous allons voter, si nous ne mettons pas en cause le donneur d'ordre, se résumera à des voeux pieux et, dans un an ou deux, il y aura de nouvelles manifestations sur les routes et des grèves qui toucheront l'économie de nos entreprises.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. J'entends bien les observations que vous avez formulées, mesdames, messieurs les sénateurs, et vos craintes face à la mise en oeuvre d'un dispositif qui pourrait pénaliser lourdement les salariés conducteurs routiers. Bien entendu, telle n'est l'intention ni du Gouvernement ni des parlementaires.
Dans ces conditions, étant donné les difficultés que nous rencontrons ce soir, je préfère retirer l'amendement n° 30 rectifié pour que la réflexion puisse se poursuivre au cours de la navette.
M. le président. L'amendement n° 30 rectifié est retiré.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 13 et 21, acceptés par la commission et par le Gouvernement.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l'article 3 quinquies est supprimé.

Article 3 sexies



M. le président.
« Art. 3 sexies. - L'article L. 4 du code de la route est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour le conducteur ou le propriétaire de véhicules de transport de marchandises ou de transport de personnes qui aura contrevenu aux obligations visées au premier alinéa du présent article, la sanction est portée à un an d'emprisonnement et à 100 000 F d'amende ou l'une de ces deux peines seulement. »
Par amendement n° 14, M. Lanier, au nom de la commission des lois, propose, dans le texte présenté par cet article pour le dernier alinéa de l'article L. 4 du code de la route, de supprimer les mots : « ou le propriétaire ».
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Lucien Lanier, rapporteur pour avis. Il s'agit simplement d'harmoniser la rédaction qui est présentée par le projet de loi pour une circonstance aggravante avec la rédaction retenue pour définir l'infraction principale.
Le propriétaire du véhicule n'étant pas visé pour l'infraction, il ne doit pas l'être pour les circonstances aggravantes. La commission des lois ne pouvait pas ne pas relever cette contradiction.
A cet argument juridique s'ajoute un argument de pure logique puisque l'article 3 sexies est relatif au refus d'obtempérer qui, par hypothèse, est commis par le conducteur.
En conséquence, la commission des lois propose de supprimer le mot « propriétaire ».
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. La commission, éclairée par la logique juridique de la commission des lois, est favorable à l'amendement n° 14.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 14, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 3 sexies, ainsi modifié.

(L'article 3 sexies est adopté.)

Articles 4 et 5



M. le président.
« Art. 4. - A l'article 46 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 précitée, les mots : ", du chapitre IV du titre 1er" sont supprimés. » - (Adopté.)
« Art. 5. - I. - Au c du I de l'article 25 de la loi de finances pour l'exercice 1952 (n° 52-401 du 14 avril 1952), les mots : "contrôleurs des transports routiers" sont remplacés par les mots : "contrôleurs des transports terrestres". »
« II. - Le I de l'article 25 de la loi de finances pour l'exercice 1952 précitée est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les contrôleurs des transports terrestres peuvent également constater les infractions de faux et d'usage de faux prévues par le code pénal portant sur des titres administratifs de transport. »
« III. - Le II de l'article 25 de la loi de finances pour l'exercice 1952 précitée est ainsi modifié :
« 1° Le a du premier alinéa est ainsi rédigé :
« a) Le fait d'exercer une activité de transporteur public de voyageurs, de transporteur public routier de marchandises, de loueur de véhicules industriels avec conducteur ou de commissionnaire de transport, alors que l'entreprise n'y a pas été autorisée en application, selon le cas, du I de l'article 7 ou du I de l'article 8 et du premier alinéa de l'article 36 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs, du règlement (CEE) n° 881/92 du Conseil, du 26 mars 1992, d'un accord bilatéral conclu avec un Etat tiers ou, à défaut d'un tel accord, d'une décision expresse de l'autorité administrative ; ».
« 2° Après le d, il est inséré un e ainsi rédigé :
« e) Le fait de mettre en circulation un véhicule pendant la période d'immobilisation administrative en méconnaissance des dispositions du II de l'article 37 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 précitée. Le tribunal peut, en outre, prononcer les peines complémentaires suivantes ;
« 1° L'immobilisation pendant une durée d'un an au plus du véhicule objet de l'infraction ou d'un véhicule d'un poids maximum autorisé équivalent ;
« 2° et 3°. - Supprimés ;
« 4° L'affichage ou la diffusion de la décision dans les conditions prévues par l'article 131-35 du code pénal. » - (Adopté.)

Articles additionnels après l'article 5



M. le président.
Je suis maintenant saisi de plusieurs amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 22 rectifié, M. Hérisson propose d'insérer, après l'article 5, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 1er de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions de la présente loi sont applicables aux opérations de transport, le donneur d'ordre initial étant assimilé au maître d'ouvrage, et le cocontractant du transporteur sous-traitant qui exécute les opérations de transport étant assimilé à l'entrepreneur principal. »
Par amendement n° 19 rectifié, M. Hérisson propose d'insérer, après l'article 5, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 34 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le loueur de véhicules industriels avec conducteur a une action directe en paiement de ses prestations à l'encontre de l'expéditeur et du destinataire, lesquels sont garants du paiement du prix de la location dû par le transporteur auquel ils ont confié l'acheminement de leurs marchandises. Toute clause contraire est réputée non écrite. »
Par amendement n° 20 rectifié, M. Hérisson propose d'insérer, après l'article 5, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 101 du code de commerce est ainsi rédigé :
« Art. 101. - La lettre de voiture forme un contrat entre l'expéditeur, le voiturier et le destinataire ou entre l'expéditeur, le destinataire, le commissionnaire et le voiturier. Le voiturier a ainsi une action directe en paiement de ses prestations à l'encontre de l'expéditeur et du destinataire, lesquels sont garants du paiement du prix du transport. Toute clause contraire est réputée non écrite. »
Par amendement n° 24, MM. Fatous, Bellanger et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 5, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 1er de la loi n° 92-1445 du 31 décembre 1992 relative aux relations de sous-traitance dans le domaine du transport routier de marchandises est complété in fine par un alinéa ainsi rédigé :
« - Les contrats de franchise passés entre un franchiseur et un transporteur routier ou un loueur de véhicules industriels franchisé. »
Par amendement n° 10, M. Le Grand, au nom de la commission des affaires économiques, propose d'insérer, après l'article 5, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article 1er de la loi n° 92-1445 du 31 décembre 1992 relative aux relations de sous-traitance dans le domaine du transport routier de marchandises, il est inséré un article 1er bis ainsi rédigé :
« Art. 1er bis. - La rémunération des opérations visées à l'article 1er est directement versée par le donneur d'ordre initial au transporteur routier de marchandises ou au loueur de véhicules industriels qui exécutent lesdites opérations. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 31, présenté par le Gouvernement et tendant à compléter le texte proposé par l'amendement n° 10 pour insérer un article 1er bis dans la loi n° 92-1445 du 31 décembre 1992 par deux alinéas ainsi rédigés :
« L'acceptation du ou des sous-traitants, l'agrément des conditions de paiement et, s'il y a lieu, le recours par le sous-traitant à l'action directe s'effectuent dans les conditions prévues par la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance.
« Cette loi est rendue applicable aux contrats de transport routier de marchandises, le donneur d'ordre initial étant assimilé au maître d'ouvrage et le cocontractant du transporteur sous-traitant qui exécute les opérations de transport étant assimilé à l'entrepreneur principal. »
Par amendement n° 27, M. Lefebvre et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 5, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article 1er de la loi n° 92-1445 du 31 décembre 1992 relative aux relations de sous-traitance dans le domaine du transport routier de marchandises, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. ... - La rémunération des opérations visées à l'article premier est directement versée par le donneur d'ordre initial au transporteur routier public de marchandises ou au loueur de véhicules industriels qui exécutent lesdites opérations. »
La parole est à M. Hérisson pour présenter les amendements n°s 22 rectifié, 19 rectifié et 20 rectifié.
M. Pierre Hérisson. L'amendement n° 22 rectifié vise à appliquer la loi sur la sous-traitance au transport routier.
L'amendement n° 19 rectifié concerne le contrat de location de véhicules industriels avec conducteur qui s'est développé au cours de ces décennies. Il convient de l'inclure dans les dispositions régissant les contrats de transport tels qu'ils figurent dans le code de commerce. En cela, ces nouvelles dispositions consolident la jurisprudence.
J'en arrive enfin à l'amendement n° 20 rectifié. Le destinataire figure de plus en plus dans les contrats types et, par conséquent, s'inscrit de fait comme partie au contrat. Par cet ajout que nous proposons à l'article 101 du code de commerce, le destinataire devient garant au même titre que les autres parties au contrat du paiement du prix du transport.
M. le président. La parole est à M. Bellanger, pour défendre l'amendement n° 24.
M. Jacques Bellanger. Nous retrouvons le cas que je vous signalais tout à l'heure. Il s'agit essentiellement de très petites entreprises mais, là, il n'y a plus de salarié et c'est la loi Madelin sur l'entreprise unipersonnelle qui s'applique.
Des sociétés importantes utilisent aujourd'hui le système de la franchise. J'ai ici un contrat type sous les yeux. Il s'agit d'une entreprise qui organise, dans un secteur géographique donné, des distributions de colis. Pour cela, elle fait appel à des entreprises unipersonnelles dont elle organise le travail. Ce contrat contient la disposition suivante : « L'affectation à chacune des tournées ci-dessus d'un exploitant ayant le statut de franchisé du réseau... et constitué en entreprise commerciale sous forme individuelle ou en société n'ayant ni la qualité de sous-traitant, ni a fortiori celle de salarié... »
Il s'agit là d'un véritable détournement de la loi : une personne physique franchisée fait du transport routier.
L'extension du champ d'application de la loi relative à la sous-traitance aux franchisés est donc nécessaire, sinon, là aussi, nous viderions le texte de sa substance étant donné le fort développement que connaît ce type d'activité.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 10.
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. Je retire l'amendement n° 10. J'y reviendrai tout à l'heure lorsque je donnerai l'avis de la commission sur les amendements présentés.
M. le président. L'amendement n° 10 est retiré.
En conséquence, le sous-amendement n° 31 n'a plus d'objet.
La parole est à M. Lefebvre, pour défendre l'amendement n° 27. M. Pierre Lefebvre. Nous aurions souhaité que la commission maintienne son amendement n° 10, car le nôtre a le même objet.
Notre souci est de clarifier les relations entre les différents opérateurs : souvent la confusion est grande entre eux.
En outre, le non-respect des règles du transport, du travail ou du code de la route est un fait avéré.
La sous-traitance, pour nous, n'est pas en elle-même quelque chose de néfaste. Mais encore faut-il qu'elle soit transparente s'agissant de ses liens avec les donneurs d'ordre.
Aussi, notre amendement vise-t-il à homogénéiser l'ensemble de la filière depuis le transporteur jusqu'au client, en passant par les intermédiaires.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 22 rectifié, 19 rectifié, 20 rectifié, 24 et 27 ?
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. Il s'agit de répondre au souhait exprimé par tous les orateurs d'instaurer la plus grande transparence possible en matière de transactions de manière à éviter la multiplication de ce que l'on appelle les sous-traitances en cascade. Ces dernières aboutissent en effet à des situations qui ne sont pas confortables sur le plan économique et qui sont par ailleurs susceptibles de provoquer certains troubles.
Pour répondre à ce souhait, et pour éviter le recours à la sous-traitance en cascade, la commission avait envisagé de proposer un certain nombre de dispositions, notamment le paiement direct par le donneur d'ordre au transporteur réel et celles qii étaient prévues dans l'amendement n° 10 que j'ai retiré.
Pourquoi ai-je retiré cet amendement ? Simplement parce que, quand on peut faire simple, il vaut mieux éviter de faire compliqué.
M. Hérisson a fort opportunément déposé des amendements qu'il a rectifiés pour aboutir, notamment, à l'amendement n° 22 rectifié qui n'est ni plus ni moins que l'application de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance et applicable aux transports routiers.
Ainsi, on transpose les dispositions d'un code en vigueur en les rendant applicables aux transports. Le texte en question est suffisamment transparent ; il est inutile d'en rajouter.
C'est la raison pour laquelle la commission a retiré son amendement n° 10 et émet un avis très favorable sur l'amendement n° 22 rectifié.
S'agissant des amendements n°s 19 rectifié et 20 rectifié, M. Hérisson, dans le droit-fil de sa logique et de sa pensée pertinente propose de modifier également la loi de 1982, la LOTI, et le code de commerce dans son article 101. Mais puisque l'amendement n° 22 rectifié reprend les dispositions du code de commerce, il paraît superfétatoire à la commission de maintenir les amendements n°s 19 rectifié et 20 rectifié. Je suggère donc à M. Hérisson de les retirer dans la mesure où mes arguments lui donnent satisfaction.
Je réserverai un peu le même sort à l'amendement n° 24, qui concerne les contrats de franchise passés entre un franchiseur et un transporteur routier. En fait, comment appréhender s'il s'agit d'un contrat de sous-traitance ou tout simplement d'un contrat salarial ? S'il y a litige, c'est au juge de se prononcer et de déterminer s'il y a effectivement ou contrat de sous-traitance ou contrat de type salarial. C'est la raison pour laquelle la commission émet un avis plutôt défavorable sur l'amendement n° 24.
Enfin, je suggère à l'auteur de l'amendement n° 27 de le retirer, puisqu'il est satisfait sur le fond.
M. le président. Monsieur Hérisson, les amendements n°s 19 rectifié et 20 rectifié sont-ils maintenus ?
M. Pierre Hérisson. Je les retire.
M. le président. Les amendements n°s 19 rectifié et 20 rectifié sont retirés.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 22 rectifié, 24 et 27 ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je me rallie à la position exprimée par M. le rapporteur sur tous ces amendements ; le Gouvernement accepte en particulier l'amendement n° 22 rectifié.
M. le président. Monsieur Lefebvre, l'amendement n° 27 est-il maintenu ?
M. Pierre Lefebvre. Au bénéfice des explications de M. le rapporteur, nous retirons notre amendement pour nous rallier à l'amendement n° 22 rectifié.
M. le président. L'amendement n° 27 est retiré.
Monsieur Bellanger, maintenez-vous l'amendement n° 24 ?
M. Jacques Bellanger. Je le maintiens, monsieur le président. Je ne suis pas un grand spécialiste du droit commercial, mais je pense que le contrat qui lie le franchisé au fournisseur, puisque ce dernier n'est qu'un mandant, n'est pas couvert par le dispositif de l'amendement n° 22 rectifié si le nôtre n'est pas adopté. C'est en tout cas mon avis !
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. Que je ne partage pas ! (Sourires.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 22 rectifié, accepté par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 5.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 24, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 6



M. le président.
« Art. 6. - Le chapitre Ier du titre VI de la loi n° 95-96 du 1er février 1995 précitée est complété par un article 23-2 ainsi rédigé :
« Art. 23-2 . - Lors des contrôles qu'ils font en entreprise, les contrôleurs des transports terrestres sont habilités à se faire communiquer tout document leur permettant de constater les prix pratiqués, ainsi que le volume de l'activité traitée ou sous-traitée. Les dispositions des quatrième et cinquième alinéas de l'article 4 de la loi n° 92-1445 du 31 décembre 1992 relative aux relations de sous- traitance dans le domaine du transport routier de marchandises sont applicables à ces contrôles. » - ( Adopté. )

Article 6 bis



M. le président.
« Art. 6 bis. - Dans le cadre d'une concertation entre les différents opérateurs du transport routier de marchandises, devra avant la fin de l'année 1998 être trouvé un système fiable d'identification des véhicules arrivant à proximité de l'aire de chargement ou de déchargement et des entreprises expéditrices et destinataires. L'identification du véhicule doit constituer alors le point de départ à partir duquel court le délai de chargement ou de déchargement. A défaut d'accord au 31 décembre 1998, un décret disposera dans ce domaine. »
Par amendement n° 11, M. Le Grand, au nom de la commission des affaires économiques, propose de rédiger comme suit cet article :
« Pour la prise en compte des durées pendant lesquelles le véhicule et son équipage sont à disposition en vue du chargement et du déchargement conformément au troisième alinéa de l'article 24 de la loi n° 95-96 du 1er février 1995 concernant les clauses abusives et la présentation des contrats et régissant diverses activités d'ordre économique et commercial, l'identification du véhicule constitue le point de départ à partir duquel court le délai de chargement et de déchargement.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. Cet amendement rédactionnel nous permet de clarifier un certain nombre de préoccupations qui ont été judicieusement exprimées par l'Assemblée nationale mais relativement mal traduites sur le papier, puisque cet article 6 bis renvoie à des concertations qui doivent avoir lieu à une certaine date, faute de quoi il y aurait lieu de prendre un décret. Ce n'est pas très convenable en droit et c'est la raison pour laquelle nous vous avons proposé une nouvelle rédaction, qui ne retire rien ni de l'intention ni du fond, mais qui, en revanche, améliore sensiblement l'écriture juridique du texte.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je partage l'avis de M. le rapporteur : si les motivations de l'amendement proposé à l'Assemblée nationale sont tout à fait louables, le texte ne semble effectivement pas très normatif. Je ne suis cependant pas certain - pardonnez-moi, monsieur le rapporteur - que votre texte le soit davantage et qu'il soit réellement opératoire.
De toute façon, les modalités pratiques de mise en oeuvre devront être abordées lors de la table ronde avec les chargeurs, et je m'en remets à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 11.
M. Pierre Lefebvre. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lefebvre.
M. Pierre Lefebvre. Nous considérons que cet amendement améliore la rédaction de l'article 6 bis sur un point, mais qu'il omet la notion de concertation entre les différents opérateurs du transport de marchandises.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ? ...
Je mets aux voix l'amendement n° 11, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. Jacques Bellanger. Le groupe socialiste s'abstient.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'article 6 bis est ainsi rédigé.

(L'article 6 bis est adopté.)

Article 7



M. le président.
« Art. 7. - Le Gouvernement présentera au Parlement, avant le 31 décembre 1998, un bilan de l'application et de l'efficacité de l'ensemble des dispositions concernant les conditions d'exercice de la profession de transporteur routier ainsi que du dispositif de contrôle. » - ( Adopté. )

Vote sur l'ensemble



M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Bellanger pour explication de vote.
M. Jacques Bellanger. Incontestablement, le texte qui nous a été transmis par l'Assemblée nationale a été sensiblement modifié par le Sénat.
J'ai dit tout à l'heure quelle importance nous attachions à l'immobilisation des véhicules. Etant donné que ce dispositif n'est plus prévu, deux attitudes sont possibles et nous hésitons.
Soit nous votons pour ce projet de loi, en espérant que la commission mixte paritaire modifiera un certain nombre de points, soit nous marquons tout de même notre mécontentement, non pas envers le Gouvernement, qui n'est pas pour rien dans cette affaire puisqu'il avait d'autres propositions, mais envers les orientations de notre assemblée et nous prenons date en nous abstenant.
Je ne sais pas ce qu'il va advenir de ce texte en commission mixte paritaire ; je ne sais même pas si celle-ci pourra aboutir et si le débat ne sera pas tranché définitivement par l'Assemblée nationale ; c'est, à mon avis, ce qui risque de se passer.
Pour ma part, je veux prendre date. Si jamais ce texte était adopté en l'état, comme je vous l'ai dit tout à l'heure, de nouveaux conflits éclateraient, car rien ne serait résolu sur le fond.
Et je ne voudrais dès lors pas entendre dire par une partie des membres des assemblées que l'économie nationale serait en danger. La raison de ce désordre serait en effet que le Sénat aurait refusé un certain nombre de mesures peut-être pas faciles à soutenir, peut-être pas toujours populaires, mais indispensables.
Le groupe socialiste va donc s'abstenir pour bien affirmer que ce texte, s'il était adopté en l'état, créérait de nouveaux conflits. Après tout, que les deux chambres du Parlement prennent leurs responsabilités !
M. le président. La parole est à M. Bizet.
M. Jean Bizet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi que nous avons examiné aujourd'hui s'inspire très largement du dispositif relatif à l'enseignement, à la formation et à la sécurité dans les transports, présenté par Bernard Pons le 11 mars 1997.
Il reprend, en effet, nombre des propositions du projet de loi initial, notamment celles qui concernaient l'obligation de formation professionnelle des conducteurs, la création d'une sanction d'immobilisation administrative du véhicule ou encore le renforcement des pouvoirs des contrôleurs des transports terrestres.
Toutes ces dispositions, qui tendent assurément à mieux réguler l'exercice de la profession, dépassent ainsi les clivages politiques. C'est la raison pour laquelle le groupe du Rassemblement pour la République votera ce texte.
Cependant, permettez-moi, monsieur le ministre, d'exprimer deux réserves.
La première a trait à la forme. Alors que le conflit du mois de novembre dernier avait été annoncé depuis le mois de septembre 1997, je ne comprends pas très bien, à part peut-être pour des raisons de pure stratégie politique, pourquoi le Gouvernement a attendu autant de temps pour présenter ce texte devant le Parlement. (M. le ministre proteste.)
Ma seconde réserve a trait au fond, comme l'ont souligné nos rapporteurs, Jean-François Le Grand et Lucien Lanier, auxquels je tiens à rendre hommage pour la qualité de leurs travaux effectués au nom respectivement de la commission des affaires économiques et du Plan et de la commission des lois, le transport routier est un domaine particulièrement sensible qui nécessite une action publique forte.
Cette action publique doit impérativement s'attaquer au problème de fond de ce secteur qui est - j'ose le dire - le problème de l'inadéquation entre l'offre et la demande. La régulation économique de l'offre est par conséquent la voie nécessaire à explorer pour rétablir la rentabilité du transport routier, toute fixation antérieure des tarifs ou toute tentative de répartition autoritaire du trafic étant assurément vouées à l'échec.
Ainsi, un relèvement de la capacité financière au plan national et une harmonisation vers le haut au plan européen sont deux mesures impératives face à la libéralisation du transport routier au sein de l'Union européenne.
Ce projet de loi est nécessaire à court terme, mais il doit être rapidement complété par de telles propositions pour assurer à long terme l'avenir de ce secteur.
La procédure d'urgence demandée pour ce texte par le Gouvernement n'aura pas permis d'aborder le véritable enjeu de ce secteur, notre groupe le regrette fortement.
M. le président. La parole est à M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, au moment où nous allons adopter ce projet de loi, je voudrais rappeler que nous avons pour objectif d'accompagner et de faciliter la modernisation de cette activité économique qui, en termes d'investissements et d'emplois, joue un rôle considérable dans notre pays.
Je voudrais vous remercier, monsieur le ministre, d'avoir accepté les amendements qui ont été proposés, ce qui permet une lecture plus précise d'un certain nombre d'articles du projet de loi, et j'indique d'ores et déjà que le groupe de l'Union centriste votera le texte tel qu'il a été amendé ce soir.
M. le président. La parole est à M. Lefebvre.
M. Pierre Lefebvre. Nous aussi, nous sommes très indécis sur la décision finale à prendre.
Nous pensons que ce texte a d'abord le mérite d'exister, qu'il est nécessaire, qu'il représente un certain nombre d'avancées que nous jugeons positives pour la branche du transport routier tout entière. Nous mettons ces acquis au compte de la profession, en particulier des salariés, mais aussi de M. le ministre.
Mais nous regrettons beaucoup qu'un certain nombre de dispositions que nous jugions intéressantes n'aient pas été retenues, ou même qu'elles aient été supprimées. A mon sens, cela n'a cependant pas dénaturé l'esprit du projet de loi qui nous était soumis.
Après avoir entendu M. le ministre, nous mettons beaucoup d'espoir dans la concertation qui va se poursuivre. Les différentes composantes de la profession pourront se prononcer, voire améliorer le texte que nous aurons élaboré.
Nous plaçons également des espoirs dans la sagesse de la commission mixte paritaire qui va se réunir et qui pourra apporter quelques rectifications.
Compte tenu de toutes ces considérations et parce que nous ne sommes pas des partisans du tout ou rien, nous voterons ce texte même si, je le répète, nous éprouvons des regrets.
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. En cette fin de discussion, je ne reviendrai pas sur l'essentiel, qui a été dit soit au cours de la discussion générale, soit à l'occasion de la discussion des articles. Je me bornerai à dire, après avoir rencontré l'ensemble des professionnels du transport routier, que j'ai la conviction que le texte que nous venons d'améliorer et que nous allons probablement adopter ne peut que répondre complètement à leurs aspirations.
Je m'étonne quelque peu du pessimisme de M. Bellanger, de même que des incertitudes et des précautions oratoires prises par notre collègue, M. Lefebvre, car, sur le fond, très sincèrement - il ne s'agit pas là d'une formule de style - je crois que nous avons répondu à une attente avec sagesse.
Chaque fois que possible - c'est l'exhortation que j'adressais en fin d'après-midi du haut de la tribune - nous avons privilégié le contrat à la contrainte. Il est en effet préférable d'encourager la vertu, même si, par ailleurs, il faut savoir sanctionner le vice. Selon moi, la première méthode est meilleure que la seconde. Faire de la sanction pour la sanction sans encourager de meilleurs comportements serait par trop réducteur et ne correspondrait pas à l'éthique du Sénat.
En cette fin de discussion, je tiens à remercier chaleureusement la majorité sénatoriale, mais aussi l'ensemble du Sénat, car, à l'exception de quelques observations prudentes, je constate qu'il y a consensus.
Le Sénat, une fois de plus, s'honore en travaillant de cette manière, en contribuant à résoudre un certain nombre de difficultés particulières à un secteur économique important.
J'associe à ces remerciements nos collaborateurs de la commission des affaires économiques et du Plan et de la commission des lois, qui ont largement contribué sinon à atteindre la perfection, qui n'est pas de ce monde, du moins à améliorer très sensiblement les propositions que nous avions faites.
Je remercie in fine tous les responsables des transports routiers, quelles que soient leurs fonctions et la nature de leur engagement, qui se sont montrés extrêmement responsables et qui ont très fortement contribué à ce que nous comprenions mieux leurs difficultés. J'ose espérer que le Sénat aura été à la hauteur. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je voudrais vous remercier, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, du travail qui a été accompli. Je l'ai dit tout à l'heure, la discussion de ce soir nous aura permis véritablement de progresser dans la solution des problèmes qui se posent sérieusement dans cette profession.
Toutefois, je ne peux pas laisser passer un argument qui a été avancé à plusieurs reprises au cours de la soirée.
J'ai utilisé le terme de modestie par rapport à l'action du Gouvernement et à la mienne pour trouver des solutions. Ayant utilisé ce terme, vous comprendrez qu'il me soit difficile d'entendre dire que le Gouvernement serait responsable, en quelque sorte, du conflit qui aurait été annoncé depuis septembre.
D'aucuns ayant la polémique facile vous répondraient qu'il était en fait annoncé depuis que les engagements pris sous le Gouvernement précédent n'ont pas été respectés. Or, l'une des raisons des difficultés que rencontre cette profession, y compris dans les rapports entre salariés et employeurs, est souvent l'absence de confiance, qui tend à être une caractéristique de cette profession. A cet égard, il est nécessaire de faire bouger les choses.
Comme je n'ai pas l'esprit polémique, je n'insiste pas.
Ce projet de loi réglera-t-il tous les problèmes ? Sûrement pas ! D'ailleurs, M. Bellanger l'a dit en parlant au nom de son groupe. C'est d'ailleurs pourquoi, à côté de ce projet de loi examiné au Parlement, en urgence, douze autres dispositions sont en chantier.
Je puis vous assurer que je n'aurai de cesse que les propositions qui ont été faites devant le pays, devant les salariés, devant les professionnels routiers entrent dans les faits. Il y aura des batailles serrées comme pour l'harmonisation européenne. Il ne sera pas aussi simple que cela d'obtenir une harmonisation sociale par le haut, laquelle serait indispensable pour lutter contre le dumping social et économique. Toutefois, nous constatons d'ores et déjà des premiers éléments d'avancée, et nous n'aurons de cesse, je le répète, de mener cette action.
Par conséquent, des décisions sont prises ; d'autres le seront ultérieurement. Je souhaite que s'instaure un esprit toujours empreint de dialogue avec l'ensemble des parties intéressées, y compris les chargeurs.
Non, cette loi ne réglera pas tous les problèmes, mais elle peut contribuer à cette démarche d'assainissement de la profession, à cette démarche qui vise à la fois à renforcer la formation, la qualification, le contrôle et, malheureusement, quand c'est nécessaire, la sanction, mais avec comme objectif central de développer l'activité de ce secteur, de favoriser l'emploi et le progrès social et d'assurer la sécurité sur les routes.
Je souhaite que cette loi soit enrichie au cours de la commission mixte paritaire ou au cours d'une lecture ultérieure.
Quoi qu'il en soit, je vous remercie de tout le travail qui a été accompli ce soir au Sénat. (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
M. Léon Fatous. Le groupe socialiste s'abstient.

(Le projet de loi est adopté.)

10

NOMINATION DE MEMBRES
D'UNE COMMISSION MIXTE PARITAIRE

M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de constitution d'une commission mixte paritaire sur le texte que nous venons d'adopter.
Il va être procédé immédiatement à la nomination de sept membres titulaires et de sept membres suppléants de cette commission mixte paritaire.
La liste des candidats établie par la commission des affaires économiques et du Plan a été affichée conformément à l'article 12 du règlement.
Je n'ai reçu aucune opposition.
En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire :
Titulaires : MM. Jean Huchon, Jean-François Le Grand, Lucien Lanier, Mme Anne Heinis, MM. Bernard Joly, Léon Fatous et Pierre Lefebvre.
Suppléants : MM. Jean Bizet, Dominique Braye, Marcel-Pierre Cleach, Fernand Demilly, Aubert Garcia, Pierre Hérisson et Louis Minetti.

11

COMMUNICATION DE L'ADOPTION DÉFINITIVE
DE PROPOSITIONS D'ACTE COMMUNAUTAIRE

M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre une communication, en date du 15 janvier 1998, l'informant :
- de l'adoption définitive, le 18 décembre 1997, des propositions d'acte communautaire suivantes :
N° E 833. - Avant-projet de budget général des Communautés européennes pour l'exercice 1998. Aperçu général (SEC [97] 600).
N° E 844. - Avant-projet de budget général des Communautés européennes pour l'exercice 1998 - volume 5, section IV, Cour de justice - volume 6, section V, Cour des comptes (COM [97] 180).
N° E 848. - Avant-projet de budget général des Communautés européennes pour l'exercice 1998 - section III, commission, document de travail (analyse détaillée par ligne budgétaire), crédits opérationnels, partie B, sous-section B 1, fonds européen d'orientation et de garantie agricole, section garantie.
N° E 851. - Avant-projet de budget général des Communautés européennes pour l'exercice 1998 - section III, commission, document de travail (analyse détaillée par ligne budgétaire), partie A - crédits de fonctionnement.
N° E 856. - Avant-projet de budget général des Communautés européennes pour l'exercice 1998 - section III, commission, document de travail (analyse détaillée par ligne budgétaire), crédits opérationnels, partie B - sous-section B 6 - recherche et développement technologique.
N° E 857. - Avant-projet de budget général des Communautés européennes pour l'exercice 1998 - section III, commission, document de travail (analyse détaillée par ligne budgétaire), état général des recettes.
N° E 858. - Avant-projet de budget général des Communautés européennes pour l'exercice 1998 - section III, commission, document de travail (analyse détaillée par ligne budgétaire), crédits opérationnels, partie B - sous-section B 8 - politique étrangère et de sécurité commune (PESC).
N° E 859. - Avant-projet de budget général des Communautés européennes pour l'exercice 1998 - section III, commission, document de travail (analyse détaillée par ligne budgétaire), crédits opérationnels, partie B - sous-section B 0 - garanties, réserves et compensations.
N° E 860. - Avant-projet de budget général des Communautés européennes pour l'exercice 1998 - section III, commission, document de travail (analyse détaillée par ligne budgétaire), crédits opérationnels, partie B - sous-section B 2 - actions structurelles, dépenses structurelles et de cohésion, mécanisme financier, autres actions agricoles et régionales, transports et pêche.
N° E 861. - Avant-projet de budget général des Communautés européennes pour l'exercice 1998 - section III, commission, document de travail (analyse détaillée par ligne budgétaire), crédits opérationnels, partie B - sous-section B 5 - protection des consommateurs, marché intérieur, industrie et réseaux transeuropéens.
N° E 862. - Avant-projet de budget général des Communautés européennes pour l'exercice 1998 - section III, commission, document de travail (analyse détaillée par ligne budgétaire), crédits opérationnels, partie B - sous-section B 4 - énergie, contrôle de sécurité nucléaire d'Euratom et environnement.
N° E 863. - Avant-projet de budget général des Communautés européennes pour l'exercice 1998 - section III, commission, document de travail (analyse détaillée par ligne budgétaire), crédits opérationnels, partie B - sous-section B 3 - formation, jeunesse, culture, audiovisuel, information, dimension sociale et emploi.
N° E 864. - Avant-projet de budget général des Communautés européennes pour l'exercice 1998 - section III, commission, document de travail (analyse détaillée par ligne budgétaire), crédits opérationnels, partie B - sous-section B 7 - actions extérieures.
N° E 873. - Avant-projet de budget général des Communautés européennes pour l'exercice 1998 - volume 1, état général des recettes et financement du budget général (COM [97] 280).
N° E 874. - Avant-projet de budget général des Communautés européennes pour l'exercice 1998 - volume 4, section III commission, partie A (crédits de fonctionnement) et partie B (crédits opérationnels) (COM [97] 280).
N° E 878. - Avant-projet de budget général des Communautés européennes pour l'exercice 1998 - volume 0, introduction générale (COM [97] 280).
N° E 890. - Avant-projet de budget général des Communautés européennes pour l'exercice 1998 - volume 7, section VI, comité économique et social et comité des régions (COM [97] 280).
N° E 919. - Avant-projet de budget général des Communautés européennes pour l'exercice 1998 - volume 2, section I, Parlement (COM [97] 280 FR).
N° E 961. - Lettre rectificative n° 1 à l'avant-projet de budget pour 1998, section III, commission (SEC [97] 1964 final) ;
- et de l'adoption définitive, le 9 janvier 1998, de la proposition d'acte communautaire E 984 : Proposition de règlement CE du Conseil relatif à certaines modalités d'application de coopération entre la Communauté européenne et l'ancienne République yougoslave de Macédoine.

12

DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE LOI

M. le président. J'ai reçu de Mme Gisèle Printz et de M. Roger Hesling, une proposition de loi tendant à actualiser le régime juridique des associations constituées selon le code civil local des départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin.
La proposition de loi sera imprimée sous le numéro 223, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

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DÉPÔT DE PROPOSITIONS
D'ACTE COMMUNAUTAIRE

M. le président. J'ai reçu de M. Premier ministre la proposition d'acte communautaire suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l'accès à l'activité des établissements de crédits et son exercice.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E-997 et distribuée.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- proposition de directive du Conseil concernant la commercialisation des matériels de multiplication des plantes ornementales.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E-998 et distribuée.

14

DÉPÔT D'UN RAPPORT

M. le président. J'ai reçu de M. Paul Masson un rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à l'entrée et au séjour des étrangers en France et au droit d'asile (n° 188, 1997-1998).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 224 et distribué.

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ORDRE DU JOUR

M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mercredi 21 janvier 1998, à quinze heures.
Discussion du projet de loi (n° 188, 1997-1998), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à l'entrée et au séjour des étrangers en France et au droit d'asile.
Rapport (n° 224, 1997-1998) de M. Paul Masson, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Avis (n° 221, 1997-1998) de M. Alain Vasselle, fait au nom de la commission des affaires sociales.
Aucune inscription de parole dans la discussion générale n'est plus recevable.
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 26 janvier 1998, à dix-sept heures.

Délais limites pour les inscriptions de parole
et pour le dépôt des amendements

Proposition de loi, adoptée avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, relative au fonctionnement des conseils régionaux (n° 207, 1997-1998).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 21 janvier 1998, à dix-sept heures.
Débat consécutif à la déclaration du Gouvernement sur la réforme de la justice.
Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : mercredi 21 janvier 1998, à dix-sept heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.

(La séance est levée le mercredi 21 janvier 1998, à zéro heure cinq.)

Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON





ORDRE DU JOUR
DES PROCHAINES SÉANCES DU SÉNAT
établi par le Sénat dans sa séance du mardi 20 janvier 1998
à la suite des conclusions de la conférence des présidents

Mercredi 21 janvier 1998, à quinze heures :

Ordre du jour prioritaire

Projet de loi, adopté avec modifications par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à l'entrée et au séjour des étrangers en France et au droit d'asile (n° 188, 1997-1998).
(La conférence des présidents a fixé à cinq heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ; l'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort auquel il a été procédé au début de la session et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant dix-sept heures, le mardi 20 janvier 1998.)
Jeudi 22 janvier 1998 :

Ordre du jour prioritaire

A neuf heures trente :
1° Deuxième lecture de la proposition de loi, adoptée avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, relative au fonctionnement des conseils régionaux (n° 204, 1997-1998).
(La conférence des présidents a fixé au mercredi 21 janvier 1998, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à cette proposition de loi.)
2° Suite du projet de loi, adopté avec modifications par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à l'entrée et au séjour des étrangers en France et au droit d'asile (n° 188, 1997-1998).
A quinze heures et, éventuellement, le soir :
3° Eventuellement, suite de l'ordre du jour du matin.
4° Déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, sur la réforme de la justice.
(La conférence des présidents a fixé :
- à dix minutes le temps réservé au président de la commission des lois ;

- à quatre heures la durée globale du temps dont disposeront, dans le débat, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort auquel il a été procédé au début de la session et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant dix-sept heures, le mercredi 21 janvier 1998.)
Mardi 27 janvier 1998, à seize heures :

Ordre du jour prioritaire

Suite du projet de loi relatif à l'entrée et au séjour des étrangers en France et au droit d'asile (urgence déclarée) (n° 188, 1997-1998).
(La conférence des présidents a fixé au lundi 26 janvier 1998, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi.)
Mercredi 28 janvier 1998, à quinze heures :

Ordre du jour prioritaire

Suite du projet de loi relatif à l'entrée et au séjour des étrangers en France et au droit d'asile (urgence déclarée) (n° 188, 1997-1998).
Jeudi 29 janvier 1998 :
A neuf heures trente :

Ordre du jour prioritaire

1° Conclusions de la commission mixte paritaire ou nouvelle lecture du projet de loi tendant à améliorer les conditions d'exercice de la profession de transporteur routier.
2° Suite du projet de loi relatif à l'entrée et au séjour des étrangers en France et au droit d'asile (urgence déclarée) (n° 188, 1997-1998).
A quinze heures :
3° Questions d'actualité au Gouvernement.
(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance, avant onze heures.)

Ordre du jour prioritaire

4° Suite du projet de loi relatif à l'entrée et au séjour des étrangers en France et au droit d'asile (urgence déclarée) (n° 188, 1997-1998).
Mardi 3 février 1998 :
A neuf heures trente :
1° Quinze questions orales sans débat (l'ordre d'appel des questions sera fixé ultérieurement) :
- n° 11 de M. Daniel Hoeffel à M. le ministre de l'intérieur (Conditions d'exercice de la profession de taxi) ;

- n° 21 de M. Jean-Paul Delevoye à Mme la ministre de la culture et de la communication (Financement de l'archéologie préventive) ;

- n° 63 de M. Jean Bizet à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche (Développement des cultures de protéines végétales) ;

- n° 101 de M. Gérard Roujas à M. le ministre de la défense (Avenir du centre de recherche aéronautique du Fauga-Mauzac) ;

- n° 113 de M. François Lesein transmise à M. le secrétaire d'Etat au budget (Taux de TVA applicable au gaz, à l'électricité et au fioul domestique) ;

- n° 129 de Mme Nicole Borvo à M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie (Désamiantage de Jussieu) ;

- n° 145 de M. Georges Mouly à M. le secrétaire d'Etat au logement (Difficultés des associations de restauration immobilière) ;

- n° 146 de M. Charles Descours à Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité (Développement des professions liées à l'aide aux personnes âgées) ;

- n° 148 de M. Rémi Herment à M. le ministre de l'intérieur (Organisation des scrutins professionnels) ;

- n° 153 de M. Léon Fatous à M. le secrétaire d'Etat au logement (Garantie communale accordée aux organismes HLM) ;

- n° 154 de M. Roland Courteau à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche (Classement de communes de l'Aude en zone de montagne) ;

- n° 155 de Mme Anne Heinis à M. le ministre des affaires étrangères (Problèmes de la pêche aux abords des îles Anglo-Normandes et du Cotentin) ;

- n° 156 de M. Bernard Plasait à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement (Statut des commissionnaires de transport) ;

- n° 158 de M. Jean-Jacques Robert à M. le ministre de la défense (Redéploiement de certaines forces de gendarmerie en Essonne) ;

- n° 162 de M. Jacques Valade à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement (Création et réalisation du chantier du terminal de transport combiné de Bordeaux-Hourcade).

A seize heures :

Ordre du jour prioritaire

2° Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, tendant à ouvrir le droit à une allocation spécifique aux chômeurs âgés de moins de soixante ans ayant quarante annuités de cotisations d'assurance vieillesse (n° 220, 1997-1998).
(La conférence des présidents a fixé au lundi 2 février 1998, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à cette proposition de loi.)
Mercredi 4 février 1998 :

Ordre du jour prioritaire

A quinze heures :
1° Sous réserve de sa transmission, proposition de loi portant diverses mesures urgentes relatives à la sécurité et à la promotion d'activités sportives (urgence déclarée) (AN, n° 599).
(La conférence des présidents a fixé au mardi 3 février 1998, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à cette proposition de loi.)
2° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification de l'accord portant modification de la quatrième convention entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et le groupe des Etats d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique, d'autre part (dite convention ACP-CE de Lomé) (n° 199, 1997-1998).
3° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification du protocole à la quatrième convention entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et le groupe des Etats d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique, d'autre part (dite convention ACP-CE de Lomé), à la suite de l'adhésion de la République d'Autriche, de la République de Finlande et du Royaume de Suède à l'Union européenne (n° 198, 1997-1998).
4° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification de l'accord interne entre les représentants des gouvernements des Etats membres, réunis au sein du Conseil relatif au financement et à la gestion des aides de la Communauté dans le cadre du second protocole financier de la quatrième convention ACP-CE (n° 197, 1997-1998).
(La conférence des présidents a décidé qu'il sera procédé à une discussion générale commune de ces trois projets de loi, n°s 199, 198 et 197.)
5° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification d'un traité d'entente, d'amitié et de coopération entre la République française et la République d'Albanie (n° 202, 1996-1997).
6° Projet de loi autorisant l'approbation de l'avenant à la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Canada tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune, signée le 2 mai 1975 et modifiée par l'avenant du 16 janvier 1987 (n° 172, 1996-1997).
7° Projet de loi autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Mongolie en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune (ensemble un protocole) (n° 396, 1996-1997).
Jeudi 5 février 1998 :

Ordre du jour prioritaire

A neuf heures trente :
1° Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, relative à la responsabilité du fait des produits défectueux (n° 260, 1996-1997).
(La conférence des présidents a fixé au mercredi 4 février 1998, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à cette proposition de loi.)
A quinze heures :
2° Suite éventuelle de l'ordre du jour du matin.
3° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant habilitation du Gouvernement à prendre, par ordonnances, les mesures législatives nécessaires à l'actualisation et à l'adaptation du droit applicable outre-mer (n° 196, 1997-1998).
(La conférence des présidents a fixé à l'ouverture de la discussion générale le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi.)
Mardi 10 février 1998 :

Ordre du jour établi en application de l'article 48,
troisième alinéa, de la Constitution

A neuf heures trente et à seize heures :
1° Conclusions de la commission des lois (n° 314, 1996-1997) sur la proposition de loi de M. Serge Vinçon et de plusieurs de ses collègues tendant à autoriser les élus des communes comptant 3 500 habitants au plus à conclure avec leur collectivité des baux ruraux.
(La conférence des présidents a fixé au lundi 9 février 1998, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte.)
2° Conclusions de la commission des lois (n° 20, 1997-1998) sur :
- la proposition de loi de M. Nicolas About tendant à modifier les dispositions du code civil relatives à la prestation compensatoire en cas de divorce (n° 151, 1996-1997) ;

- la proposition de loi de M. Robert Pagès et plusieurs de ses collègues relative à l'attribution de la prestation compensatoire en cas de divorce (n° 400, 1996-1997).

(La conférence des présidents a fixé au lundi 9 février 1998, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte.)
3° Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, permettant aux organismes d'habitations à loyer modéré d'intervenir sur le parc locatif privé en prenant à bail les logements vacants pour les donner en sous-location (n° 185, 1997-1998).
Mercredi 11 février 1998 :

Ordre du jour prioritaire

A neuf heures trente et à quinze heures :
Projet de loi relatif à l'application de la convention du 13 janvier 1993 sur l'interdiction de la mise au point, de la fabrication, du stockage et de l'emploi des armes chimiques et sur leur destruction (n° 291, 1996-1997).
(La conférence des présidents a fixé au mardi 10 février 1998, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi.)
Jeudi 12 février 1998 :
A dix heures :

Ordre du jour prioritaire

1° Deuxième lecture de la proposition de loi, modifiée par l'Assemblée nationale, relative au renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité sanitaire des produits destinés à l'homme (n° 222, 1997-1998).
(La conférence des présidents a fixé au mercredi 11 février 1998, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à cette proposition de loi.)
A quinze heures :
2° Questions d'actualité au Gouvernement.
(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant onze heures.)

Ordre du jour prioritaire

3° Suite de l'ordre du jour du matin.

A N N E X E
Questions orales sans débat inscrites à l'ordre du jour
du mardi 3 février 1998

N° 11. - M. Daniel Hoeffel appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur le décret n° 95-935 du 17 août 1995 portant application de la loi n° 95-66 du 20 janvier 1995 relative à l'accès à l'activité de conducteur et à la profession d'exploitant de taxi qui dispose que le titulaire d'une autorisation de stationnement peut en assurer l'exploitation en consentant la location du taxi à un conducteur de taxi. Il lui demande de bien vouloir lui préciser si ces dispositions permettent à un artisan taxi de louer une autorisation de stationnement en location-gérance, prévue par la loi n° 56-277 du 20 mars 1956 relative à la location-gérance des fonds de commerce et des établissements artisanaux. Cette possibilité est susceptible d'intéresser les titulaires d'une autorisation de stationnement ne disposant pas de l'ancienneté nécessaire pour présenter, à titre onéreux, un successeur à l'administration et qui soit souhaitent prendre leur retraite, soit ont été déclarés inaptes à l'exercice de la profession de taxi pour raisons médicales.
N° 21. - M. Jean-Paul Delevoye appelle l'attention de Mme le ministre de la culture et de la communication sur la question du financement de l'archéologie préventive, destinée à sauver le patrimoine archéologique découvert à l'occasion d'opérations de démolition, de construction de biens immobiliers, de réalisation de routes... A l'occasion d'une récente déclaration, elle a annoncé sans ambiguïté une réforme de la législation relative à cette question dans le cadre de la convention européenne de Malte du 1er janvier 1992, ratifiée par la France en 1994. Cela est effectivement nécessaire. Il souhaite en conséquence connaître les principales orientations qui résultent des assises nationales de l'archéologie récemment organisées, ainsi que les principaux choix politiques qu'elle souhaite proposer au Parlement, s'agissant du cadre juridique et financier de l'archéologie préventive.
N° 63. - M. Jean Bizet attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur la dépendance protéique de la France et de l'Europe. Actuellement, la France importe près de 50 % de ses besoins en protéines végétales pour l'alimentation des animaux. En 1990, elle en importait moins de 30 %. Au plan européen, la dépendance protéique est encore plus manifeste puisque les importations de protéines végétales représentent désormais plus de 80 % des besoins. Nos seuls fournisseurs mondiaux de protéines végétales, en particulier le soja, sont les Etats-Unis, le Brésil et l'Argentine. Il ne saurait trop insister sur l'enjeu stratégique et non simplement financier que représentent les protéines végétales, base de l'alimentation des animaux et donc des hommes, et souhaite rappeler certains faits : en 1974, l'embargo des Etats-Unis sur le soja avait mis en évidence les risques d'une telle dépendance. La mobilisation autour d'un plan national de culture des plantes riches en protéines avait permis de faire nettement diminuer la dépendance française. Malheureusement, certaines concessions faites aux Etats-Unis lors des négociations de Blair House ont entraîné une limitation des surfaces d'oléagineux et une baisse des surfaces en pois protéagineux. Tous les efforts entrepris depuis vingt ans ont été réduits à néant puisque la France est de plus en plus dépendante du continent américain pour satisfaire ses besoins. En conséquence, dans la perspective des prochaines négociations mondiales, il est indispensable que la France manifeste, par un amendement dans le cadre de la loi d'orientation agricole, sa volonté de refuser une telle dépendance protéique et de lever les freins actuels à l'accroissement des surfaces cultivées. Il est aussi indispensable que la France puisse rallier ses partenaires européens à cette cause légitime. Conscient du danger, les professionnels de la filière des productions de plantes riches en protéines ont posé les bases d'un nouveau plan protéines. Le Gouvernement apporte-t-il son soutien à ce plan et entend-il l'intégrer en priorité dans sa politique agricole ?
N° 101. - M. Gérard Roujas tient à attirer l'attention de M. le ministre de la défense sur la situation de l'Office national d'études et de recherches aéronautiques, ONERA, et plus particulièrement du centre du Fauga-Mauzac. Depuis plusieurs années, l'ONERA a subi de plein fouet des fortes restrictions budgétaires. Celles-ci ont conduit à la mise en place de plans sociaux dans de nombreux établissements, dont celui de Mauzac. Les décisions des gouvernements précédents ont conduit à une réduction d'activité de 20 % au terme de la loi de programmation militaire. Cette décision aura pour conséquence une réduction des effectifs de l'ordre de 400 personnes. Pourtant, la compétence de l'ONERA et de ses chercheurs est mondialement reconnue. Au moment où les Etats-Unis maintiennent leur effort en matière de recherche aéronautique et dans un contexte de concurrence féroce, un désengagement de l'Etat serait lourd de conséquences pour l'aéronautique française et européenne. Il semble évident que notre pays ne peut pas se passer de telles compétences sans risquer de voir décliner l'un des fleurons de son industrie qu'est l'aéronautique. Concernant le centre du Fauga-Mauzac, il avait été envisagé lors de sa création une décentralisation sur ce site plus importante que celle réalisée à ce jour. Le centre du Fauga-Mauzac possède des atouts considérables de par sa localisation à 30 kilomètres de Toulouse, de par les facilités d'accès (A 64), de par la superficie des terrains disponibles. Il lui demande de bien vouloir lui préciser quelles sont ses intentions en matière de recherche aéronautique et, plus particulièrement, en ce qui concerne le développement du centre ONERA du Fauga-Mauzac.
N° 113. - M. François Lesein appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur les coûts excessifs occasionnés par le taux de TVA à 20,6 % en ce qui concerne la consommation de gaz, d'électricité et de fioul ménager. Sachant qu'un taux dérogatoire de 5,5 % est reconnu pour favoriser la consommation de certains produits de première nécessité, il est étonnant de constater que le gaz, l'électricité et le fioul ménager n'entrent pas dans cette catégorie de produits. On ne saurait envisager un seul instant de pouvoir vivre sans l'un ou l'autre de ces trois éléments indispensables au confort minimum de nos habitations, aussi modestes soient-elles. C'est pourquoi il lui demande s'il ne serait pas plus juste et équitable d'appliquer, pour chacun de nos concitoyens, un taux de TVA de 5,5 % pour toute opération de consommation de gaz, d'électricité et de fioul domestique. (Question transmise à M. le secrétaire d'Etat au budget.)
N° 129. - Mme Nicole Borvo attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie sur les difficultés de la mise en route du plan de désamiantage du campus de Jussieu. Le campus de Jussieu avec ses 200 000 mètres carrés de locaux est l'un des plus grands ensembles amiantés. Le plan de désamiantage et de mise en sécurité du campus signé en décembre 1996 a fait l'objet d'un contrat entre les établissements du campus et l'Etat. Il a fallu de longues années de lutte en faveur de la sécurité et de la santé des nombreux personnels et usagers du campus de Jussieu pour aboutir à cet engagement. Aujourd'hui, il s'agit d'appliquer intégralement le plan de désamiantage et de mettre à disposition de l'établissement public du campus de Jussieu les moyens nécessaires à sa réalisation, ainsi que d'ouvrir des négociations entre tous les partenaires intéressés pour aboutir à une mise en oeuvre concrète du contrat de désamiantage. Pour toutes ces raisons, elle lui demande ce qu'il compte faire afin que les engagements pris par l'Etat soient respectés ?
N° 145. - M. Georges Mouly attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat au logement sur les difficultés que rencontrent les associations de restauration immobilière et protection, amélioration, conservation, transformation de l'habitat existant (PACT-ARIM) en matière de subventions de fonctionnement émanant des organismes collecteurs de « 1 % ». L'arrêté du 14 février 1979 modifié du ministre chargé du logement limite le versement desdites aides aux seuls organismes d'information. Or les PACT-ARIM ne sont pas considérées comme telles, bien que l'information au public fasse partie de leurs activités. Il lui demande donc soit de modifier l'arrêté de 1979 en élargissant à toutes les associations la possibilité d'une participation des comités interprofessionnels du logement (CIL), soit de reconnaître aux PACT-ARIM la qualité d'organismes d'information, de façon à leur permettre de recevoir ces participations dont ils ont bien besoin.
N° 146. - M. Charles Descours attire l'attention de Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité sur le seizième nouveau métier envisagé dans le cadre de la loi n° 97-940 du 16 octobre 1997 relative au développement d'activités pour l'emploi des jeunes, dénommé « accompagnateur de personnes dépendantes ». Sa définition inclut l'activité qui consisterait à « faciliter la réinsertion lors de la sortie de l'hôpital ». Cette définition correspond à l'une des activités de l'ergothérapeute, telles qu'elles sont définies par le décret n° 86-1195 du 21 novembre 1986. Or le code de la santé publique, livre IV, prévoit des sanctions pénales à l'encontre de ceux qui exerceraient l'ergothérapie alors qu'ils ne répondraient pas aux critères définis par la loi n° 95-11 du 4 février 1995. Ce nouveau métier, tel qu'il est prévu, risquerait d'être frappé d'illégalité et pourrait mettre en cause l'embauche des ergothérapeutes spécialement formés pour ce type d'activité. Par conséquent, il lui demande de bien vouloir envisager une solution concrète et réalisable qui consisterait plutôt à donner une véritable formation à ces jeunes sous la tutelle de personnels paramédicaux compétents et dûment formés. Ainsi, de nouveaux emplois seraient effectivement créés, mais en toute légalité et n'allant pas à l'encontre des intérêts de toute une profession. Il souhaiterait connaître ses intentions dans ce domaine.
N° 148. - M. Rémi Herment demande à M. le ministre de l'intérieur que des mesures de rationalisation des votes dits professionnels soient décidées afin de remédier au gaspillage du temps passé par les élus qui doivent assumer lesdites opérations. En effet, il rappelle, par exemple, que, dans le cadre des élections des chambres de commerce et d'industrie, les bureaux de vote, ouverts de 13 heures à 17 heures, dans les chefs-lieux de canton, ont souvent enregistré trois fois plus de votes par correspondance que de votes directs. Il en fut de même, mais dans une amplitude bien plus grande, de 8 heures à 18 heures, pour les élections prud'homales. Il demande qu'une table ronde soit organisée pour que responsabilité et disponibilité ne soient plus confondues.
N° 153. - M. Léon Fatous attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat au logement sur la garantie communale accordée aux organismes d'habitations à loyer modéré (HLM). En effet, une des causes de désertification des campagnes est liée à l'absence de logements sociaux susceptibles de maintenir la population existante ou d'attirer une nouvelle population. Les organismes HLM sont très souvent prêts à construire dans ces secteurs, mais, faute d'obtenir la garantie de la commune, les projets n'aboutissent pas. Aussi il souhaiterait savoir s'il entend prendre des mesures à l'égard des communes qui limitent leurs garanties d'emprunt à 50 %, celles qui refusent catégoriquement l'accueil de familles défavorisées, ou encore celles qui limitent l'accueil aux seuls locataires présents dans la commune.
N° 154. - M. Roland Courteau souhaite attirer l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur le dossier relatif au classement en zone de montagne de vingt communes du département de l'Aude. Il lui indique que l'instruction de ce dossier, commencée en 1993, n'a toujours pas abouti et que les élus des communes et les populations concernées déplorent la lenteur de la procédure. C'est pourquoi il lui demande de bien vouloir lui préciser si les démarches nécessaires ont été faites auprès de la Commission européenne et quel est l'état d'avancement de la procédure de classement de ces communes.
N° 155. - Mme Anne Heinis attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur la situation toujours préoccupante entre les autorités anglo-normandes et les pêcheurs du Cotentin. Depuis le mois de septembre 1997, des réunions techniques et professionnelles sur le thème des relations de voisinage entre pêcheurs jersiais et normands se sont multipliées. Cependant, il semble que la position des autorités françaises ne soit pas suffisamment ferme face aux exigences accrues des autorités britanniques et jersiaises en vue de limiter, de façon drastique, l'accès des pêcheurs français dans la baie de Granville, zone pour laquelle existe un principe de « mer commune ». A l'heure actuelle, le secteur de pêche exclusivement réservé à Jersey est limité à une bande de trois milles autour de l'île anglo-normande. Les autorités britanniques et jersiaises prétendent voir étendue cette limite à partir de deux bancs de rochers découvrants, eux-mêmes situés en limite des trois milles actuels, repoussant d'autant vers le nord la limite exclusive des trois milles. Il faut savoir que les pêcheurs du Cotentin ont été échaudés par l'application systématiquement défavorable de l'accord bilatéral pris en 1992 avec Guernesey, qui a notamment abouti à leur éviction du « haricot » de la Schole. Les poins suivants sont les plus sensibles : 1° dévoiement de la délégation de justice ayant donné lieu à une pétition du comité régional des pêches maritimes auprès du Parlement européen ; 2° notion de reconnaissance des pratiques existantes ; 3° rupture unilatérale du modus vivendi de 1994 ; 4° non-respect de l'article 6 aux termes duquel les pêcheurs sont invités à se rencontrer ; 5° modération dans la mise en oeuvre et dans le règlement des contestations. Elle demande donc au Gouvernement de manifester une volonté politique très ferme, d'appuyer le travail technique effectué par la direction des pêcheurs par une réouverture des négociations avec Guernesey, avant de poursuivre les démarches relatives aux relations de voisinage avec Jersey.
N° 156. - Le décret n° 90-200 du 5 mars 1990 ( JO du 7 mars 1990, p. 2800) réglemente l'exercice de la profession de commissionnaire de transport. Est visé par ce décret « tout commissionnaire établi en France qui, dans les conditions fixées par le code de commerce, organise et fait exécuter, sous sa responsabilité et en son propre nom, un transport de marchandises selon les modes de son choix pour le compte d'un commettant ». Ledit commissionnaire doit être inscrit à un registre des commissionnaires de transport, pour autant qu'il remplisse certaines conditions d'honorabilité et de capacités financière et professionnelle. En outre, si le postulant est un « étranger n'ayant pas la nationalité d'un pays membre de la Communauté économique européenne », l'article 17 du décret pose une condition supplémentaire en exigeant qu'il soit alors « ressortissant d'un pays avec lequel la France a conclu un accord de réciprocité permettant son établissement sur le territoire national et dans les conditions définies par cet accord ». Enfin, le décret a totalement abrogé celui du 30 juin 1961 relatif aux professions auxiliaires de transport (dont les commissionnaires de transport) qui exigeait, sous réserve du traité CEE, que les dirigeants des personnes morales postulantes soient de nationalité française (cf. l'article 6 A du décret de 1961). Le régime juridique aujourd'hui applicable à l'inscription des commissionnaires de transport ne prévoit donc plus aucune condition de nationalité concernant le dirigeant de la société qui souhaite s'inscrire au registre, mais seulement une condition de nationalité liée à la société elle-même prise en tant que personne morale. Dans ces conditions, M. Bernard Plasait attire l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur la pratique de certaines directions régionales de l'équipement (division des infrastructures et des transports) qui subordonnent l'inscription d'une société française au registre des commissionnaires de transport à une triple condition d'honorabilité, de capacités professionnelle et financière - conformément au décret - sous réserve en outre que la personne physique responsable légal de ladite société française remplisse une condition supplémentaire de nationalité, qui n'est pas prévue par le décret. Il convient de préciser que, dans les cas portés à l'attention de M. le ministre, l'inscription demandée est celle d'une société française dont le gérant est ressortissant d'un Etat non communautaire et non lié à la France par un accord de réciprocité, et non pas celle d'une personne physique en vue d'un exercice en son nom propre ou en tant que titulaire de la capacité professionnelle requise pour l'inscription de la société. La société à inscrire étant de droit français, et non pas « un étranger n'ayant pas la nationalité d'un pays membre de la Communauté économique européenne », il est légitime de s'interroger sur la légalité du refus d'inscription au registre des commissionnaires des transport opposé par les directions régionales de l'équipement en cause. En posant une condition de nationalité du dirigeant de société qui n'est pas prévue par la réglementation applicable et qui ne figure d'ailleurs pas non plus dans la circulaire du 27 avril 1990 concernant l'application du décret du 5 mars 1990, les directions régionales de l'équipement ne sont-elles pas en train d'enfreindre la légalité et d'excéder les pouvoirs dont elles disposent ?
N° 158. - M. Jean-Jacques Robert attire l'attention de M. le ministre de la défense sur la situation de deux communes de son département qui sollicitent le concours rapproché des forces de gendarmerie sur leur territoire afin de répondre aux plaintes répétées de leurs habitants dues à l'insécurité journalière croissante. 1° Le conseil municipal de Bondoufle attend depuis mai 1996 l'autorisation de lancer la procédure d'appel d'offres pour la construction d'une gendarmerie, dans le cadre du transfert de la brigade de Ris-Orangis sur Bondoufle. En effet, les 9 500 habitants de cette commune ne peuvent compter sur aucune présence de forces de sécurité. Les deux communes, les services immobiliers de la gendarmerie aussi bien que le préfet ont donné leur accord et reconnaissent la nécessité de cette opération. Bondoufle conserve depuis deux ans les crédits de financement pour cette réalisation. C'est pourquoi il lui demande de bien vouloir l'informer des dispositions qu'il entend prendre afin d'autoriser dans l'urgence le transfert de cette gendarmerie. 2° Le conseil municipal d'Egly renouvelle son souhait de voir renforcer les effectifs de sa brigade de gendarmerie. Depuis 1996, la recrudescence de la délinquance et du vandalisme rend les effectifs actuels largement insuffisants. Les missions de cette unité sont multiples : la présence de voies de circulation importantes et dangereuses ; les contrôles du site sensible du centre d'études nucléaires de Bruyère-le-Châtel ; la présence fort importante des gens du voyage ; les interventions fréquentes au camp militaire de Linas-Montlhéry, qui accueillera bientôt le doublement des effectifs du 121e régiment du train et le transfert de l'état-major de logistique de Metz. S'ajoute à ces besoins celui de répondre à de nouvelles flambées de violence dans ce secteur de son département. Il lui demande de prendre les mesures nécessaires attendues par tous les habitants.
N° 162. - M. Jacques Valade appelle l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur la réalisation du terminal de transport combiné à Bordeaux-Hourcade. Ce site a été retenu au titre des zones d'intérêt européen. Il offre à la façade atlantique un terminal multimodal de quatrième génération constituant une alternative urgente et indispensable à l'augmentation du trafic routier, en particulier de transit entre la péninsule Ibérique et l'Europe du Nord. Ce projet est inscrit au contrat de plan Etat-région Aquitaine 1994-1998 à hauteur de 300 millions de francs et peut bénéficier d'une participation du FEDER au titre de l'objectif 2. La convention de réalisation correspondante a été signée le 11 avril 1997 entre l'Etat, la SNCF et les collectivités locales et territoriales. Après un très modeste début d'exécution, le chantier semble interrompu, le dossier bloqué, alors que les marchés sont prêts à être lancés. L'ensemble des acteurs économiques et politiques de l'Aquitaine s'interroge sur les causes de ce blocage alors que son développement serait cohérent avec les mesures prises et les projets envisagés à propos de la desserte de la gare Saint-Jean de Bordeaux par le nord, le TGV Aquitaine-Sud Atlantique et les aménagements de la gare Saint-Jean elle-même. Il lui demande quelles sont ses intentions à propos de ce dossier, fondamental pour la région Aquitaine.

Organisme extraparlementaire

Lors de sa séance du 20 janvier 1998, le Sénat a désigné MM. Jacques Rocca Serra et Marcel Lesbros pour siéger au sein du conseil supérieur de l'établissement national des invalides de la marine.

Décès d'un sénateur

M. le président du Sénat a le regret de porter à la connaissance de Mmes et MM. les sénateurs qu'il a été avisé du décès de M. Pierre Croze, sénateur représentant les Français établis hors de France, survenu le 19 janvier 1998.

Modification aux listes des membres des groupes
Groupe des Républicains et Indépendants
(41 membres au lieu de 42)

Supprimer le nom de M. Pierre Croze.



Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)


Statut de la zone des cinquante pas géométriques
dans les DOM

157. - 16 janvier 1998. - M. Jean Huchon attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat à l'outre-mer sur le retard pris dans la mise en oeuvre de la loi sur les cinquante pas géométriques. A sa connaissance, aucun décret d'application à ce jour n'est paru. Or de nombreuses familles des départements d'outre-mer, en particulier de la Guadeloupe et de la Martinique, concernées par ce texte, attendent de pouvoir régulariser leur situation, notamment par la validation de leur titre de propriété. Les dispositions de la loi répondent à une situation d'urgence à la fois humaine et économique. Tout retard dans son application met à mal le règlement définitif concernant la question de l'occupation sans titre, mais aussi la question du développement économique, au regard notamment de la concrétisation de projets de rénovation de l'habitat insalubre et de la modernisation de certains quartiers et enfin la question de l'amélioration de la protection du littoral. C'est pour l'ensemble de ces éléments qu'il lui demande de bien vouloir l'informer des dispositions que compte prendre le Gouvernement pour l'application rapide de la loi.

Redéploiement de certaines forces
de gendarmerie en Essonne

158. - 16 janvier 1998. - M. Jean-Jacques Robert attire l'attention de M. le ministre de la défense sur la situation de deux communes de son département qui sollicitent le concours rapproché des forces de gendarmerie sur leur territoire, afin de répondre aux plaintes répétées de leurs habitants dues à l'insécurité journalière croissante. 1° Le conseil municipal de Bondoufle attend depuis mai 1996 l'autorisation de lancer la procédure d'appel d'offres pour la construction d'une gendarmerie, dans le cadre du transfert de la brigade de Ris-Orangis sur Bondoufle. En effet, les 9 500 habitants de cette communes ne peuvent compter sur aucune présence de forces de sécurité. Les deux communes, les services immobiliers de la gendarmerie aussi bien que le préfet ont donné leur accord et reconnaissent la nécessité de cette opération. Bondoufle conserve depuis deux ans les crédits de financement pour cette réalisation. C'est pourquoi il lui demande de bien vouloir l'informer des dispositions qu'il entend prendre afin d'autoriser dans l'urgence le transfert de cette gendarmerie ; 2° Le conseil municipal d'Egly renouvelle son souhait de voir renforcer les effectifs de sa brigade de gendarmerie. Depuis 1996, la recrudescence de la délinquance et du vandalisme rend les effectifs actuels largement insuffisants. Les missions de cette unité sont multiples : la présence de voies de circulation importantes et dangereuses, les contrôles du site sensible du Centre d'études nucléaires de Bruyère-le-Chatel, la présence fort importante des gens du voyage, les interventions fréquentes au camp militaire de Linas-Montlhéry, qui accueillera bientôt le doublement des effectifs du 121e régiment du train et le transfert de l'état-major de logistique de Metz. S'ajoute à ces besoins, celui de répondre à de nouvelles flambées de violence dans ce secteur de son département. Il lui demande de prendre les mesures nécessaires attendues par tous les habitants.

Avenir des cinémas d'art et d'essai

159. - 16 janvier 1998. - Mme Nicole Borvo attire l'attention de Mme le ministre de la culture et de la communication sur le fait que deux cinémas d'art et d'essai parisiens, Entrepôt et Accatone, s'inquiètent de leur avenir à la suite de la diminution des subventions accordées par le Centre national de cinématographie. Accatone, ex-Studio Cujas, créé il y a dix ans par Kazik Hentchel et sérieusement menacé par de nouveaux critères d'attribution d'aides aux salles d'édition qui ont fait chuter sa subvention de 60 % en deux ans. Quant à Entrepôt, créé en 1975 par Frédéric Mitterrand, il annonce la suspension de ses activités d'art et d'essai. Le montant de sa subvention s'élève seulement à 180 000 francs pour 1997, au lieu de 225 000 francs pour 1996. Afin que des cinémas d'art, d'essai et de recherche tels qu'Accatone et Entrepôt puissent vivre et assurer une programmation indépendante, qui donne toutes ses chances à des oeuvres exigeantes, elle lui demande ce qu'il compte faire pour attribuer des moyens suffisants et prendre les mesures nécessaires.

Conditions d'attribution de la carte d'ancien combattant

160. - 19 janvier 1998. - Mme Nicole Borvo attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat aux anciens combattants sur la situation des patriotes transférés en Allemagne raflés par représailles, dont il reste environ 3 000 survivants. Ces derniers réclament l'attribution d'une carte conforme à la réalité de la situation qu'ils ont connue. Le droit à réparation pour ces victimes ne serait que justice. Pour toutes ces raisons, elle lui demande quelles mesures il compte prendre, afin de satisfaire cette demande.

Retraités agricoles

161. - 19 janvier 1998. - M. Bernard Dussaut appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur la situation des retraités agricoles. Lors de la discussion du projet de loi de finances pour 1998 notamment, des dispositions ont été annoncées permettant la revalorisation des plus basses retraites et plus particulièrement celles des conjoints et des aides familiaux. L'effort budgétaires consenti doit, pour être rendu effectif, donner lieu à la publication de décrets d'application. Il lui demande de bien vouloir lui en faire connaître la teneur et les délais de publication. Il souhaiterait par ailleurs vivement que lui soient précisées les mesures qu'il entend prendre pour permettre à tous les retraités agricoles de bénéficier rapidement d'une retraite agricole égale au moins à 75 % du salaire minimum interprofessionnel de croissance.

Création et réalisation du chantier du terminal
de transport combiné de Bordeaux-Hourcade

162. - 20 janvier 1998. - M. Jacques Valade appelle l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur la réalisation du terminal de transport combiné de Bordeaux-Hourcade. Ce site a été retenu au titre des zones d'intérêt européen. Il offre à la façade atlantique un terminal multimodal de quatrième génération constituant une alternative urgente et indispensable à l'augmentation du trafic routier, en particulier de transit entre la péninsule ibérique et l'Europe du Nord. Ce projet est inscrit au contrat de plan Etat-région Aquitaine 1994-1998 à hauteur de 300 millions de francs et peut bénéficier d'une participation du FEDER au titre de l'objectif 2. La convention de réalisation correspondante a été signée le 11 avril 1997 entre l'Etat, la SNCF et les collectivités locales et territoriales. Après un très modeste début d'exécution, le chantier semble interrompu, le dossier bloqué, alors que les marchés sont prêts à être lancés. L'ensemble des acteurs économiques et politiques de l'Aquitaine s'interrogent sur les causes de ce blocage alors que son développement serait cohérent avec les mesures prises et les projets envisagés à propos de la desserte de la gare Saint-Jean de Bordeaux par le Nord, le TGV Aquitaine-Sud Atlantique et les aménagements de la gare Saint-Jean elle-même. Il lui demande quelles sont ses intentions à propos de ce dossier, fondamental pour la région Aquitaine.

Situation de l'Aérospatiale
et production des avions de transports régionaux

163. - 20 janvier 1998. - Mme Maryse Bergé-Lavigne souhaite attirer l'attention de M. le ministre de la défense sur la situation de la société Aérospatiale et en particulier sur l'avenir de la production des avions de transports régionaux. Le 9 novembre dernier, dans une déclaration faite conjointement, les gouvernements allemand, anglais et français ont convenu de la nécessité urgente d'une réorganisation des industries aérospatiale et d'électronique de défense au niveau européen et ont demandé aux industriels concernés de présenter pour le 31 mars un projet et un échéancier en vue de cette réorganisation. Les premières étapes de ce processus devaient comprendre des progrès rapides dans la transformation d'Airbus en société intégrée. Ainsi, le 13 janvier, le président d'Aérospatiale a présenté au comité central d'entreprise plusieurs décisions concernant le groupe et, notamment, la proposition de création d'une société Airbus, de droit français, basée à Toulouse et de quatre filiales, une par pays. Seraient compris dans la filiale française les sites de Nantes, Meaultes, Saint-Nazaire et une partie des établissements de Toulouse. Sur Toulouse, 1 000 à 1 500 salariés pourraient être exclus du nouveau périmètre, ceux notamment dépendants de la production des ATR, les avions de transports régionaux, soit 800 personnes. En effet, la direction de l'entreprise a annoncé la création d'une future société franco-italienne ATR pour le développement, la production et la commercialisation des avions de transports régionaux. Du fait du refus des Allemands, cette entité ne serait pas, dans l'immédiat, incluse dans la future société européenne Airbus. Elle lui demande donc des garanties pour une intégration a posteriori des sociétés et ATR ; d'assurer la pérennité et le développement de la société ATR. L'Etat est l'actionnaire unique de la société Aérospatiale, il est donc légitime que le Gouvernement mais aussi la représentation nationale soient associés à la réflexion sur le devenir de cette industrie phare pour notre pays et créatrice de plusieurs milliers d'emplois. Elle lui demande d'inviter la direction du groupe Aérospatiale à reconsidérer le devenir des avions de transports régionaux et à négocier fermement avec nos partenaires leur intégration dans la future société Airbus.

Problème du logement dans le bassin minier

164. - 20 janvier 1998. - M. Léon Fatous attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat au logement sur le cas spécifique du bassin minier, qui représente près de 450 000 habitants. En 1990, le bassin minier se voyait accorder une dotation de 300 prêts locatifs aidés par an ; il serait nécessaire que ce niveau d'attribution soit reconduit. Par ailleurs, il aimerait connaître son avis sur l'élaboration d'un statut définitif apparenté aux organismes de logements sociaux pour le parc du logement minier, actuellement géré par les Charbonnages de France.

Contrôle sur le recrutement des agents non titulaires
dans la fonction publique territoriale

165. - 20 janvier 1998. - M. Aubert Garcia attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur la brèche de plus en plus profonde ouverte dans le statut de la fonction publique territoriale, par le recours abusif aux non-titulaires, rendu possible en raison de l'inefficacité du contrôle de légalité à endiguer cette tendance. A titre d'exemple, il cite la situation créée par un fonctionnaire territorial du grade d'agent de maîtrise principal, en cessation progressive d'activité qui a démissionné pour être repris le lendemain, sur le même emploi, en qualité de contractuel avec une rémunération de catégorie A, alors que l'emploi libéré était de catégorie C. En laissant perdurer et prospérer de telles pratiques, non seulement le statut s'érode, mais de plus, les lauréats des concours administratifs en attente sur les listes d'aptitudes voient leurs perspectives d'embauche considérablement réduites et finissent sur des listes mouroirs, participant ainsi à la décrédibilisation des concours organisés par les centres de gestion et le Centre national de la fonction publique territoriale et par là même du statut dans son ensemble. Il lui demande de lui faire connaître les dispositions qu'il entend prendre tant au plan du renforcement des moyens dont disposent les préfectures pour assurer un contrôle de légalité homogène sur le territoire, ainsi que l'exigent les principes de la République, qu'au plan législatif, si la loi se révélait impraticable eu égard aux conditions d'administration souhaitable pour les collectivités territoriales.