AMÉLIORATION DE LA SANTÉ PUBLIQUE
À MAYOTTE

Adoption d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 195, 1997-1998), adopté par l'Assemblée nationale, portant ratification et modification de l'ordonnance n° 96-1122 du 20 décembre 1996 relative à l'amélioration de la santé publique à Mayotte. [Rapport n° 293 (1997-1998).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, l'ordonnance que je vous propose de ratifier a un objet essentiel : l'amélioration de la santé publique à Mayotte.
Elle permet de clarifier les compétences entre l'Etat et la collectivité territoriale en ce domaine.
Désormais, l'Etat prend sous sa responsabilité le système hospitalier de l'île, permettant ainsi à la collectivité de recentrer plus efficacement ses interventions sur les structures de soins de proximité chargées des actions de prévention, d'éducation sanitaire, de lutte antivectorielle et surtout de protection maternelle et infantile, ainsi que de planification familiale.
L'acte fondamental de cette ordonnance consiste à donner à l'hôpital le statut d'un établissement public de santé de droit commun, régi par la loi hospitalière de 1991, modifiée par l'ordonnance de 1996.
La conséquence majeure du statut juridique de l'établissement public de santé porte sur ses modalités et ses règles de financement, qui ont été considérablement modifiées.
L'ordonnance a prévu un double mécanisme de financement, reposant à la fois sur le droit commun et sur des dispositions spécifiques.
Il s'agit, tout d'abord, d'un financement de droit commun. En effet, la dotation globale de fonctionnement des hôpitaux s'appliquera à Mayotte comme ailleurs. Celle-ci sera dorénavant attribuée dans le cadre de l'objectif national de dépense d'assurance maladie de la loi de financement de la sécurité sociale. Ce financement à la charge de l'assurance maladie représente environ 70 % des dépenses hospitalières.
L'Etat et la collectivité interviendront à parité à hauteur de 12,5 millions de francs par an. Cette dérogation est rendue nécessaire par la situation toute particulière de l'immigration à Mayotte. Elle permet de ne pas alourdir inconsidérément la charge de la collectivité territoriale.
Je tiens à souligner l'importance de ce mode de financement de l'hôpital, pour l'amélioration de la couverture sanitaire de l'île.
Il s'agit là d'une avancée considérable par rapport à la situation antérieure. En effet, l'hôpital ne disposait pas de statut juridique et son mode de financement résultait d'une convention passée entre l'Etat et la collectivité : l'Etat accordait un fonds de concours de 40 millions de francs pour l'ensemble du dispositif sanitaire de l'île. Sur ce fonds de concours, 25 millions de francs étaient affectés à l'hôpital, tandis que la collectivité apportait sa contribution à hauteur de 25 millions de francs.
Ce financement limitait toute évolution de l'activité de l'hôpital alors que les besoins sanitaires de l'île sont considérables.
L'évolution du budget de l'hôpital depuis 1995 confirme cette amélioration, puisque la mise en oeuvre de la réforme s'est traduite par un doublement du budget de l'établissement, celui-ci passant de 50 millions de francs à 102,6 millions de francs en 1998.
En contrepartie du financement par l'assurance maladie du budget de l'hôpital, l'ordonnance a créé, au titre II, chapitre Ier, section II, un régime d'assurance maladie-maternité spécifique à Mayotte.
Le régime de protection sociale spécifique à Mayotte, hérité de l'ancien territoire d'outre-mer des Comores, se compose d'un régime vieillesse-accident du travail et d'un régime de prestations familiales, mais il ne comporte pas de régime d'assurance maladie. En conséquence, la médecine est gratuite pour les habitants.
Dans ces conditions, l'ordonnance a prévu tout d'abord le principe de l'affiliation de droit de l'ensemble des personnes résidant à Mayotte à la caisse de prévoyance sociale pour la couverture des frais hospitaliers.
En contrepartie, l'ordonnance a créé une contribution sociale d'assurance maladie à laquelle seront assujettis l'ensemble des résidents. Cette contribution sera assise sur l'ensemble des revenus. Son taux est fixé à 2 % par l'ordonnance. Elle prend effet à compter du 1er janvier 1998.
Par ce double dispositif, l'ordonnance met fin au principe général de la gratuité totale des soins dans la mesure où les Mahorais contribuent au financement de l'hôpital, mais elle organise en contrepartie l'accès de tous aux soins hospitaliers par l'affiliation de droit à la caisse de prévoyance sociale.
Cette partie de l'ordonnance pose pour l'avenir les bases d'un régime d'assurance maladie, lequel, je le rappelle, n'existait pas jusqu'à maintenant.
Le troisième volet de l'ordonnance consiste en une réforme des statuts de la caisse de prévoyance sociale. Son statut antérieur est trop ambigu pour lui permettre de remplir les nouvelles missions qui lui sont assignées dans l'ordonnance.
Outre l'affiliation des personnes, la caisse de prévoyance sociale est destinée, en effet, à recevoir deux types de financement : d'une part, la dotation globale de fonctionnement de l'hôpital en provenance des régimes métropolitains par l'intermédiaire, provisoirement, de la caisse générale de sécurité sociale de la Réunion, qui jouera le rôle de la caisse pivot jusqu'en 1998, et, d'autre part, le produit de la contribution sociale d'assurance maladie nouvellement créée.
Une fois que la caisse de prévoyance sociale aura atteint son régime de croisière, elle pourra devnir caisse pivot.
Dans ces conditions, le Gouvernement a jugé nécessaire de donner à la caisse de prévoyance sociale le statut équivalent d'une caisse générale de sécurité sociale d'un département d'outre-mer, gérant l'ensemble des risques et des assurés. A ce titre, elle sera soumise au contrôle de l'Etat et de la Cour des comptes.
Le projet de loi de ratification précise, en outre, les procédures du contentieux général et technique de la caisse de prévoyance sociale.
Cette réforme conduira à améliorer de façon sensible la condition sanitaire de la collectivité de Mayotte. Elle représente une avancée certaine pour les habitants de Mayotte, qui ont droit, comme tout citoyen appartenant au territoire de la République, à bénéficier des mêmes conditions de traitement. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi soumis à notre examen, adopté par l'Assemblée nationale le 18 décembre 1997, a pour objet de demander au Parlement la ratification de l'ordonnance n° 96-1122 du 20 décembre 1996 relative à l'amélioration de la santé publique à Mayotte. Il vise, en outre, à apporter des précisions nécessaires à certains articles de l'ordonnance et des modifications permettant de rectifier des erreurs matérielles.
Cette ordonnance, publiée au Journal officiel du 22 décembre 1996, a été prise sur le fondement de la loi d'habilitation du 11 décembre 1996, qui autorisait le Gouvernement à légiférer par ordonnance avant le 31 janvier 1997 pour étendre et adapter à la collectivité territoriale de Mayotte les dispositions du code de la santé publique sur les établissements de santé, en donnant à l'hôpital de Mayotte un statut proche du droit commun, et pour réformer l'actuelle caisse de prévoyance sociale afin d'instituer un régime d'assurance maladie et une contribution sociale.
Elle prévoyait, en outre, que le projet de loi de ratification de l'ordonnance, accompagné de l'avis du conseil général de Mayotte, serait déposé devant le Parlement au plus tard le 15 mars 1997.
Ce projet de loi de ratification a effectivement été déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale le 5 mars 1997, mais il est devenu caduc en raison de la dissolution de l'Assemblée nationale, intervenue le 21 avril 1997.
Le nouveau gouvernement a donc été contraint de déposer sur le bureau de l'Assemblée nationale, le 23 juillet 1997, un nouveau projet de loi, identique au précédent, qui constitue le texte qui nous est aujourd'hui soumis.
S'agissant de Mayotte, le recours aux ordonnances est une pratique courante depuis que le statut particulier de la collectivité territoriale a été défini par la loi du 24 décembre 1976 relative à l'organisation de Mayotte.
L'article 10 de ladite loi prévoit que les lois nouvelles ne sont applicables à Mayotte que sur mention expresse, et l'article 7 autorise le Gouvernement à prendre par ordonnance, avant le 1er juillet 1979, toutes mesures tendant à étendre et à adapter les textes intervenus dans le domaine législatif et qui n'étaient pas applicables à Mayotte.
Cette habilitation générale a été réitérée par la loi du 22 décembre 1979, puis par celle du 23 décembre 1989. Cette dernière précisait d'ailleurs que le Gouvernement était autorisé à légiférer par ordonnance dans le domaine de la santé publique, de la protection sociale et du droit du travail.
L'ordonnance du 20 décembre 1996 et ce projet de loi de ratification s'inscrivent donc dans le cadre d'une pratique régulière qui permet aux compétences respectives de l'Etat et de la collectivité territoriale de Mayotte d'évoluer avec souplesse dans le sens d'un alignement progressif sur le droit commun départemental.
Malgré son aspect quelque peu technique, l'ordonnance qu'il vous est aujourd'hui demandé de ratifier constitue un progrès considérable pour les habitants de Mayotte.
J'évoquerai tout d'abord le contenu de l'ordonnance, avant d'examiner le projet de loi de ratification tel qu'il a été adopté par l'Assemblée nationale.
L'ordonnance du 20 décembre 1996 vise à améliorer le système sanitaire de Mayotte et la santé de sa population.
Mayotte présente des caractéristiques démographiques et sociales tout à fait particulières, qu'il convient de rappeler très brièvement.
L'île, qui compte environ 120 000 habitants, connaît une progression démographique très élevée, avec un taux d'accroissement de 5,9 % par an. Le taux de natalité est de 42,9 , contre 12,5 en métropole, et plus de la moitié de la population a moins de vingt ans. Le taux de chômage est de 50 %, tandis que 5 000 familles vivraient en dessous du seuil de pauvreté. En outre, il y aurait plus de 20 000 étrangers en situation irrégulière, venus pour l'essentiel des Comores.
Malgré une amélioration sensible au cours des dernières années, la situation sanitaire de Mayotte reste aujourd'hui extrêmement préoccupante.
Le taux de mortalité infantile a fortement chuté entre 1978 et 1994, de 82 à 21 , mais reste encore trois fois supérieur au taux enregistré en métropole. D'inquiétants problèmes de malnutrition persistent, notamment chez les enfants, tandis que sévissent de graves pathologies : paludisme, lèpre, tuberculose.
Pour faire face à cette situation, il n'existe à Mayotte qu'un hôpital, implanté sur deux sites et représentant au total 130 lits, ainsi que 17 dispensaires correspondant à 57 lits. Avant l'ordonnance, le personnel était composé en grande partie de médecins volontaires de l'aide technique et d'un nombre important d'infirmières et d'aides soignantes, qui ne disposaient pas du niveau de formation exigé en métropole.
Par ailleurs, la collectivité territoriale n'a plus les moyens de financer seule ce système de santé, pourtant modeste.
Conformément aux recommandations du rapport établi en mai 1995 par M. Contis, inspecteur général des affaires sociales, l'ordonnance a donc pour objet d'améliorer la situation sanitaire de Mayotte en réformant l'hôpital et la caisse de prévoyance sociale de Mayotte.
L'ordonnance du 20 décembre 1996 érige l'hôpital de Mayotte en établissement public de santé territorial et modifie en conséquence le statut de son personnel.
Le titre Ier de l'ordonnance étend et adapte le titre Ier du livre VII du code de la santé publique à la collectivité territoriale de Mayotte. Il transforme l'hôpital actuel en un établissement public de santé, relevant de la compétence de l'Etat.
Sur le fondement des articles 10 et 29 de l'ordonnance, le représentant du Gouvernement a donc pris un arrêté en date du 8 mars 1997 érigeant l'hôpital de Mayotte, qui n'était jusqu'alors qu'un service non personnalisé de la collectivité territoriale, en établissement public de santé territorial.
En conséquence, les dispositions du titre Ier du libre VII du code de la santé publique, relatif aux établissements de santé et modifié par l'ordonnance du 24 avril 1996 portant réforme de l'hospitalisation publique et privée, lui sont applicables sous réserve de mesures d'adaptation rendues nécessaires par le caractère particulier de la collectivité territoriale de Mayotte.
Le statut du personnel est défini par l'ordonnance qui reprend le statut général des fonctionnaires en l'aménageant pour favoriser l'accueil de personnels médicaux et non médicaux de métropole ou des départements d'outre-mer et pour maintenir le statut et l'emploi des personnels non médicaux de la collectivité territoriale.
L'ordonnance comporte, en outre, un second volet permettant d'assurer le financement du nouvel établissement public de santé territorial.
L'ordonnance du 20 décembre 1996 réforme en effet le statut de la caisse de prévoyance sociale de Mayotte et institue une contribution sociale.
Héritée de la législation de sécurité sociale applicable avant 1976, la caisse de prévoyance sociale était, avant l'ordonnance, un établissement public local géré par le représentant du Gouvernement. La caisse assurait le versement de certaines prestations familiales, notamment les allocations familiales, des rentes d'accidents du travail et des avantages vieillesse. Il n'existait pas de régime d'assurance maladie, comme vous l'avez dit, monsieur le ministre, la collectivité territoriale garantissant la gratuité des soins à l'ensemble des personnes résidant à Mayotte.
L'ordonnance réforme le statut de la caisse de prévoyance sociale et rapproche celui-ci du droit applicable en métropole. La caisse est dissoute à compter du 1er janvier 1997 et est remplacée par un organisme de droit privé doté de la personnalité morale et de l'autonomie financière, qui prend le nom de caisse de prévoyance sociale de Mayotte.
Cette caisse se voit dotée de règles de fonctionnement identiques à celles d'une caisse primaire de sécurité sociale de métropole, fixées en référence au code de la sécurité sociale, sous réserve d'adaptations de portée minime.
La nouvelle caisse prend en charge la gestion des risques traditionnellement couverts par l'ancienne caisse et assure de surcroît la gestion du nouveau régime d'assurance maladie-maternité institué par l'article 19 de l'ordonnance. Toute personne majeure résidant régulièrement à Mayotte y est affiliée, y compris les fonctionnaires de l'Etat en poste à Mayotte. Les soins restent totalement gratuits, sans forfait hospitalier ni ticket modérateur.
En contrepartie, l'ordonnance institue une contribution sociale assise sur tous les revenus d'activité et de remplacement ainsi que sur les revenus du patrimoine. Le taux de cette contribution, prélevée à partir du 1er janvier 1998, est fixé à 2 %. Son rendement attendu est compris entre 20 millions et 30 millions de francs.
L'établissement public de santé territorial est désormais financé par une dotation globale constituée par le produit de la nouvelle contribution sociale et par un versement des régimes métropolitains d'assurance maladie.
Un financement spécifique à la charge de l'Etat et de la collectivité territoriale est prévu pour les soins des personnes non affiliées à la caisse de prévoyance sociale et démunies de ressources ; pour l'essentiel, il s'agit d'étrangers en situation irrégulière venus de l'île voisine d'Anjouan.
L'ordonnance se traduit, au total, par un effort financier considérable en faveur de Mayotte, un effort essentiellement à la charge - il faut le reconnaître - des régimes d'assurance maladie de métropole.
Le travail accompli par l'Assemblée nationale sur le projet de loi de ratification est important. Il souffre cependant du choix discutable de la création d'un titre spécifique consacré à Mayotte dans le code de la santé publique.
En accord avec le Gouvernement, l'Assemblée nationale a apporté au texte de l'ordonnance un certain nombre de modifications et de précisions utiles et pertinentes qu'il convient de rappeler brièvement.
Elle a introduit un article 1er quater imposant au Gouvernement de prendre avant le 31 décembre 1998 les mesures réglementaires d'application du titre Ier bis du livre VII du code de la santé publique, créé par l'article 1er ter de la loi.
On ne peut que se féliciter de l'introduction de cette précision dans la loi. Il est en effet primordial que les décrets d'application de l'ordonnance soient publiés dans les meilleures délais.
L'Assemblée nationale a, en outre, institué un système de ticket modérateur pour les consultations à l'hôpital de médecins libéraux et prévu que la contribution de l'Etat et de la collectivité territoriale de Mayotte aux dépenses de fonctionnement de l'établissement public de santé territorial, au titre des frais d'hospitalisation et de consultations externes des personnes non affiliées au régime d'assurance maladie de Mayotte, serait arrêtée pour chaque collectivité à 12,5 millions de francs en 1998 et 1999.
L'Assemblée nationale a également prévu que le Gouvernement transmettrait au Parlement avant le 30 septembre 1999 un rapport présentant les données de la situation sanitaire et sociale à Mayotte et rendant compte de la mise en oeuvre des dispositions relatives à la sécurité sociale et à la santé publique qui lui sont applicables.
Il apparaît que l'Assemblée nationale a accompli, en collaboration étroite avec les services des administrations concernées, un travail de vérification et d'harmonisation très complet qui n'amène de la part de notre commission aucune objection sur le fond. Bien au contraire, monsieur le ministre, nous avons pu apprécier la collaboration avec vos services, qui ont été d'une extrême courtoisie et d'une remarquable efficacité et qui ont également fait preuve d'une grande compréhension pour cette collectivité.
Le choix d'une codification des dispositions relatives à Mayotte paraît, en revanche, assez discutable.
Par l'article 1er ter , l'Assemblée nationale a créé, au sein du livre VII du code de la santé publique, un titre Ier bis relatif à Mayotte et contenant l'ensemble des dispositions de ce code rendues applicables à Mayotte par l'ordonnnance.
Le texte de l'ordonnance reposait initialement sur des renvois au titre Ier du livre VII du code de la santé publique assortis d'adaptations rendues nécessaires par la situation particulière de Mayotte.
L'Assemblée nationale a donc procédé à une véritable réécriture in extenso du droit applicable à Mayotte dans le code de la santé publique.
La création dans le code de la santé publique d'un titre spécifique relatif à l'établissement public de santé territorial de Mayotte peut naturellement apparaître comme un progrès dans la voie de la clarification et de la lisibilité.
Toutefois, votre rapporteur se demande s'il ne s'agit pas là d'une « fausse bonne idée ». Si le droit relatif à Mayotte sera incontestablement plus lisible après codification, le code de la santé publique perdra certainement, quant à lui, en lisibilité : un titre particulièrement volumineux - il comporte près de soixante articles - sera en effet intégré dans le livre VII entre le titre Ier - Etablissements de santé - et le titre II - Thermo-climatisme.
Or ce titre Ier bis nouveau n'est pas fondamentalement différent du titre Ier qui le précède. A l'exception de quelques modifications découlant des caractéristiques propres à Mayotte, les différences entre les deux titres présentent un caractère essentiellement formel. Par bien des aspects, le titre Ier bis apparaît extrêmement redondant par rapport au titre Ier.
Le choix effectué par l'Assemblée nationale ne permet plus de distinguer les dispositions de droit commun des dispositions réellement spécifiques à Mayotte.
En réalité, le choix d'une codification pour les dispositions relatives à Mayotte soulève un problème de principe ; il accrédite l'idée d'un droit autonome propre à Mayotte, qui serait fondamentalement distinct du droit commun métropolitain.
Or, l'objectif que cherche à atteindre l'ordonnance consiste précisément à rapprocher progressivement le droit applicable à Mayotte du droit en vigueur dans les départements de métropole. Il ne semble guère que la création d'un titre spécifique propre à Mayotte soit le signe le plus évident d'une évolution vers le droit commun, c'est-à-dire vers la départementalisation.
Le précédent ainsi créé à l'occasion de l'ordonnance relative à Mayotte permettrait de justifier par la suite la création dans le code de la santé publique de titres spécifiques à d'autres collectivités territoriales d'outre-mer à statut particulier. Le risque serait alors grand de voir ce code grossir démesurément, ce qui rendrait son utilisation particulièrement malaisée.
Malgré ces réserves, la commission considère qu'il ne s'agit pas là d'un motif suffisant pour s'opposer à l'adoption définitive de ce texte. Elle estime en effet qu'eu égard à l'importance de ce texte pour Mayotte, les considérations de fond doivent l'emporter sur des considérations de forme.
Ce texte est attendu avec une certaine impatience dans l'île. La ratification de l'ordonnance du 20 décembre 1996 a déjà pris un certain retard, qu'il convient de ne pas accroître sous peine de créer une situation juridique inconfortable pour l'ensemble des administrations et des personnes concernées.
Enfin, le titre Ier bis introduit par l'Assemblée nationale dans le code de la santé publique n'aura vraisemblablement qu'une durée de vie limitée, dans la mesure où ce code est en voie d'être complètement refondu.
Ce projet de loi de ratification de l'ordonnance du 20 décembre 1996 est un texte essentiel pour Mayotte, terre à laquelle mon département est particulièrement attaché, et ce de très longue date. C'est la raison pour laquelle si ce texte permet d'améliorer de manière significative l'état sanitaire de nos compatriotes mahorais, nous en serons très heureux.
La commission vous propose donc d'adopter ce projet de loi sans modification. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. Henry.
M. Marcel Henry. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le présent projet de loi a pour objet la ratification de l'ordonnance n° 96-1122 du 20 décembre 1996 relative à l'amélioration de la santé à Mayotte.
En raison de la dernière dissolution de l'Assemblée nationale, cette ratification a été soumise une seconde fois au Parlement en raison de la caducité du projet de loi présenté par le gouvernement précédent. Mais ce retard a été utilement mis à profit, puisque le projet de loi rectifie certaines erreurs matérielles et comporte plusieurs dispositions tendant à compléter cette ordonnance afin de rapprocher sensiblement le dispositif mahorais du droit commun des hôpitaux et des organismes de sécurité sociale.
Je tiens à remercier, à cet égard, les rapporteurs de ce texte, car ils ont tiré les enseignements de ces quelques mois d'application de l'ordonnance en l'adaptant un peu plus encore aux évolutions de la situation économique et sociale de notre collectivité territoriale.
C'est dire que si, en principe, la procédure de l'article 38 de la Constitution est parfois considérée comme une limitation des prérogatives du Parlement, il faut bien reconnaître que ce texte, adopté en première lecture à l'Assemblée nationale, réalise dans un délai appréciable des avancées sensibles dans la qualité des soins à Mayotte.
Je me contenterai donc de formuler quelques observations.
Tout d'abord, je me félicite, avec l'ensemble de la population mahoraise, de la consécration, en sus du droit aux soins et à l'information des malades, de la procédure du contentieux technique de sécurité sociale. En effet, les accidentés du travail et les personnes handicapées en général pourront dorénavant faire évaluer, de manière contradictoire et avec possibilité de recours, leur taux d'invalidité.
Ensuite, les personnels de santé, médicaux comme paramédicaux, se voient ainsi offrir de nouvelles perspectives de carrière basées sur leurs qualifications, leurs compétences professionnelles et autres réussites aux concours de la fonction publique hospitalière. Le risque de disparité de traitement avec les agents affectés dans d'autres services territoriaux se trouve ainsi évacué.
Par ailleurs, l'institution d'une contribution sociale de 2 % assise sur tous les revenus et recouvrée à compter du 1er janvier 1998 pour le financement de notre régime d'assurance maladie-maternité a, certes, soulevé quelques protestations de certains fonctionnaires mutés dans l'île. Mais cette disposition constitue sans aucun doute une opportune mesure de justice sociale, permettant à la fois de mettre fin à la non-contributivité totale des soins et de créer un système de participation financière adapté aux faibles ressources de la grande majorité de la population de l'île.
Enfin, la fixation de la contribution de la collectivité territoriale aux frais d'hospitalisation et de consultations externes des personnes non affiliées au régime d'assurance maladie-maternité de Mayotte à un montant égal à celle de l'Etat pour 1998 et 1999 appelle, me semble-t-il, un réexamen minutieux de cette règle de répartition. En effet, comme la plupart des non-affiliés au régime local de sécurité sociale sont des bénéficiaires du régime national ou des sans domicile fixe, il aurait été logique, et même plus équitable, de mettre à la charge de l'Etat une plus grande part de ces dépenses. Néanmoins, l'évaluation qui sera faite au terme de ces deux années permettra de conforter ou d'infirmer cette analyse.
Sous le bénéfice de ces observations, je demande que ce projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, soit voté sans modification par le Sénat en vue de l'édiction rapide de ses décrets d'application et dans l'intérêt bien compris de la population de Mayotte. (Applaudissements.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.

Article 1er

M. le président. « Art. 1er. _ Est ratifiée, telle que modifiée par les dispositions de la présente loi, l'ordonnance n° 96-1122 du 20 décembre 1996 relative à l'amélioration de la santé publique à Mayotte prise en application de la loi n° 96-1075 du 11 décembre 1996 d'habilitation relative à l'extension et à l'adaptation à la collectivité territoriale de Mayotte des dispositions législatives du titre Ier du livre VII du code de la santé publique, au statut du personnel et au financement de l'établissement public de santé territorial de Mayotte ainsi qu'à la réforme du statut de la caisse de prévoyance sociale. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er.

(L'article 1er est adopté.)

Articles 1er bis à 1er quinquies et 2 à 5