M. le président. La parole est à M. Courteau, auteur de la question n° 204, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.
M. Roland Courteau. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, s'agissant de la réforme de l'organisation commune du marché vitivinicole, il semblerait que l'Union européenne ait compris à temps l'erreur gravissime qu'elle avait failli commettre, en 1994, en faisant de la destruction du potentiel de production l'essentiel de l'architecture de son projet de réforme.
Nous avions donc eu raison lorsque, ici même, à cette époque, nous avions relevé que les folles et dévastatrices propositions de la Commission reposaient sur une très mauvaise analyse de la situation.
Trois ou quatre ans plus tard, la Commission de Bruxelles, mieux éclairée peut-être par le Gouvernement, la profession ou les élus, paraît avoir totalement changé de cap - et c'est tant mieux !
Que souhaitent donc les viticulteurs ? Ils attendent essentiellement que le Gouvernement imprime sa marque dans les discussions communautaires sur plusieurs points, et, d'abord, qu'il affirme la nécessité première de préserver le potentiel de production et d'accélérer la rénovation du vignoble. Ils espèrent voir se concrétiser, enfin, cette volonté de mieux affronter, avec les moyens conséquents, la concurrence mondiale par une politique véritablement promotionnelle. Ils considèrent comme une marque de confiance en l'avenir le fait que la Communauté puisse leur donner les moyens de poursuivre leurs efforts d'investissement tant dans les vignobles que dans les entreprises.
En effet, l'ouverture du marché mondial, l'augmentation des échanges, et donc des compétitions, imposent que la France se modernise et accroisse ses débouchés.
Alors, qu'en sera-t-il, monsieur le ministre, de la restauration du budget viticole européen ? Ira-t-on vers la recherche d'une solution permettant d'encourager le transfert des vignes de viticulteurs âgés vers de jeunes producteurs ? Tiendra-t-on compte de cette autre priorité qu'est l'installation des jeunes par l'octroi de contingents plus substantiels de plantations nouvelles ? Cette demande est également formulée par les producteurs, qui souhaitent accroître leurs débouchés.
Quelle sera la réponse apportée à la question des plantations anticipées par rapport à l'arrachage et qu'en sera-t-il de la refonte des mesures de gestion du marché, sans oublier, le problème est vaste, l'alimentation du marché des brandys ou des alcools de bouche ?
Se pose également la question de l'enrichissement ou de la nécessaire harmonisation des réglementations nationales en matière de publicité sur les boissons alcooliques.
Sachez également, monsieur le ministre, que la confédération nationale des producteurs à appellations d'origine insiste notamment sur la reconnaissance des syndicats professionnels de producteurs et attend que l'Union européenne se dote des moyens d'assurer la protection de la propriété intellectuelle des appellations tant en Europe que dans les pays tiers.
Monsieur le ministre, vous le savez bien, les viticulteurs sont prêts à faire face à leurs responsabilités - ils l'ont démontré par le passé - en matière de qualité et de gestion de l'espace. Cela signifie donc que les moyens communautaires consacrés à la viticulture devront être conformes à la place de la viticulture dans l'économie européenne et à son rôle essentiel en matière d'occupation de l'espace et d'aménagement du territoire.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Louis Le Pensec, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur le sénateur, vous avez rappelé, à juste titre, en quoi les conditions dans lesquelles se prépare aujourd'hui la réforme de l'organisation commune du marché vitivinicole sont effectivement différentes de celles qui avaient présidé à l'élaboration du précédent projet. En effet, la situation économique du secteur se caractérise depuis peu par un relatif équilibre du marché du vin, tant au plan national qu'au plan communautaire.
Ce nouveau contexte, qu'on peut espérer durable, au-delà des aléas climatiques sur les récoltes, nécessite de rectifier plusieurs dispositions de l'actuelle organisation commune du marché, conçues à un moment où le potentiel viticole communautaire était structurellement excédentaire.
C'est en ce sens que j'ai présenté aux représentants de la filière viticole des propositions de réforme et que je les ai ensuite transmises, sous la forme d'un mémorandum, à la Commission européenne et aux Etats membres de l'Union.
La proposition française visant à amender certaines dispositions de l'OCM repose sur trois priorités : maintenir et rénover le potentiel viticole de l'Union, améliorer la qualité des vins et la compétitivité des exploitations et promouvoir l'organisation économique des filières.
Dans ces conditions, l'OCM doit comporter un volet structurel articulé autour de la reprise d'un soutien communautaire à la restructuration du vignoble et d'un assouplissement du dispositif relatif aux arrachages et aux plantations de vignes.
La France souhaite par ailleurs simplifier les mesures de gestion du marché, afin de tenir compte de la diversité des situations dans les différentes régions viticoles, et de les appuyer sur une refonte de la distillation volontaire ; celle-ci doit être plus incitative en début de campagne.
C'est dans ce cadre qu'il devra être explicitement tenu compte de la nécessité d'assurer l'approvisionnement des débouchés non viticoles du secteur, notamment celui de l'alcool de bouche auquel vous avez fait référence, monsieur le sénateur.
La proposition française met l'accent sur l'urgence de mettre en place, dans un contexte où la concurrence des pays tiers est de plus en plus vive et la demande des consommateurs de plus en plus exigeante, des aides à la modernisation des entreprises vitivinicoles et un soutien du Fonds européen d'orientation et de garantie agricole, le FEOGA, aux programmes de promotion.
Enfin, dans l'attente des conclusions de la négociation qui doit s'ouvrir prochainement, le Gouvernement français mettra tout en oeuvre pour que des mesures concervatoires soient décidées dans le cadre du paquet-prix 1998-1999 dont vous savez qu'il arrive en négociation dans les tout prochains mois. La discussion est déjà ouverte. Nous serons particulièrement vigilants s'agissant de tout ce qui concerne les plantations nouvelles.
Je crois avoir fait écho à la majeure partie des thèmes sous-tendus par votre question, qui était vaste.
Sachez que, comme je l'ai dit aux professionnels, nous assurerons un suivi particulièrement attentif de ce dossier lors de ces négociations de réforme de l'organisation commune des marchés.
M. Roland Courteau. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Courteau.
M. Roland Courteau. Je vous remercie, monsieur le ministre, de toutes ces précisions et, surtout, d'avoir affirmé votre volonté sans faille de soutenir notre viticulture.
Il est vrai que la réforme de l'organisation commune du marché du vin devrait constituer un point d'appui très fort dans le cadre des négociations de l'organisation mondiale du commerce.
Il appartiendra à l'Europe de relever des défis qui seront décisifs pour l'avenir de sa viticulture et, donc, pour l'avenir de notre viticulture méridionale.
Comment l'Europe, qui représente 80 % des échanges mondiaux et 50 % de la production, pourrait-elle ne pas être intransigeante ?
La fermeté s'impose car l'Europe, qui a su construire à travers son histoire des règles de production qualitative et des règles oenologiques, doit aujourd'hui faire face à de nouveaux pays producteurs sans état d'âme en ce qui concerne le respect de ces règles. Leurs préoccupations mercantiles l'emportent sur d'autres considérations et c'est la définition même du vin qui risque de céder la place à des produits de type industriel.
De ces deux conceptions, laquelle l'emportera, monsieur le ministre ? L'avenir de la viticulture européenne dépendra de cette partie de bras de fer au sein de l'OMC.
Comme le disait justement le président des vignerons-coopérateurs audois, notre viticulture ne doit en aucun cas céder la place à cette économie venue d'ailleurs et, pour cela, l'Europe devra être plus forte encore dans les négociations au sein de l'OMC.
M. Louis Le Pensec, ministre de l'agriculture et de la pêche. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Louis Le Pensec, ministre de l'agriculture et de la pêche. Je voudrais faire écho à cette dernière remarque. Il est bien évident que nous ne nous engageons dans les négociations de l'organisation commune des marchés qu'en prenant en compte les échéances décisives, même pour la viticulture, de l'OMC.
M. Roland Courteau. Je vous remercie, monsieur le ministre.

AGRÉMENT SANITAIRE DES ÉTABLISSEMENTS
DE PRODUCTION FERMIÈRE DE MOYENNE MONTAGNE