M. le président. Par amendement n° 126 rectifié bis, Mme Beaudeau, M. Lefebvre et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 11 ter, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 278 bis du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« 7° Accessoires de sécurité routière (casques de moto, sièges pour enfants...).
« II. - Les pertes de recettes sont compensées par une majoration à due concurrence des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Lefebvre.
M. Pierre Lefebvre. Le 7 avril 1998, en première lecture, le Sénat a adopté à l'unanimité le projet de loi portant diverses dispositions relatives à la sécurité routière, qui s'inscrivait dans une politique globale de réduction sur cinq ans du nombre des tués sur la route.
Notre groupe avait alors proposé de ramener le taux de TVA sur les accessoires de sécurité, en particulier sur les casques de moto et les fauteuils d'enfants, de 20,6 % à 5,5 %.
Le Gouvernement, par la voix de Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement, avait indiqué que les moyens de lutte contre la violence routière étaient divers, tant le problème est complexe et multiple.
La mesure que nous proposons est préventive et permettrait des résultats immédiats.
De nombreux jeunes motards sont tués parce qu'ils sont mal équipés : soit ils ne portent pas de casque, jugé trop coûteux au regard du budget disponible, soit ils s'équipent d'accessoires de mauvaise qualité pour être en conformité avec la réglementation.
De même, la réduction du coût des sièges pour enfants serait une mesure bienvenue pour les familles nombreuses.
En baissant le taux de TVA sur ces accessoires, nous faciliterions l'accès des conducteurs, notamment des plus démunis d'entre eux, au droit à la sécurité.
Ainsi, notre amendement pourrait contribuer à réduire de moitié le chiffre de 8 000 tués chaque année, objectif que nous nous sommes unanimement fixé.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur. Monsieur le président, il est apparu à la commission des finances que le défaut de port de casque n'était pas toujours liée à une question de prix.
M. Hilaire Flandre. C'est évident !
M. Alain Lambert, rapporteur. Si la proposition faite par nos collègues est pleine de bonnes intentions, il est à craindre que le champ de la mesure proposée ne soit trop vague. L'expression « accessoires de sécurité routière » peut en effet viser aussi bien les dispositifs de freinage ABS, les airbags (Protestations sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen) que les rambardes de sécurité le long des routes. En tout état de cause, la proposition ainsi formulée, dont l'objectif n'est pas critiquable,...
M. Emmanuel Hamel. Il est même louable !
M. Alain Lambert, rapporteur. ... n'est sans doute pas réalisable. La commission des finances émet donc un avis défavorable sur l'amendement n° 126 rectifié bis.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. M. Lefebvre a eu raison d'insister sur la volonté du Gouvernement, soutenu par l'ensemble des parlementaires, d'améliorer la sécurité routière et de réduire le nombre d'accidents de la route.
Le projet de loi proposé par mon collègue M. Jean-Claude Gayssot, qui a été adopté à l'unanimité, va tout à fait dans la bonne direction.
Cela dit, la proposition formulée par M. Lefebvre est sous-tendue par la volonté, bien compréhensible, de renforcer la sécurité routière en abaissant le prix des accessoires en ce domaine.
Néanmoins, comme l'a souligné M. le rapporteur - pour une fois, je suis d'accord avec lui ! - ces accessoires recouvrent un champ relativement vaste et imprécis qu'il serait assez difficile de délimiter.
En dépit de l'honnêteté de vos intentions, monsieur Lefebvre, je me vois donc contraint de vous demander de bien vouloir retirer l'amendement n° 126 rectifié bis.
M. le président. Monsieur Lefebvre, l'amendement n° 126 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Pierre Lefebvre. Nous avions rectifié à deux reprises notre amendement en vue de viser précisément les casques de moto et les sièges d'enfant. Néanmoins, répondant à votre invitation, monsieur le secrétaire d'Etat, nous acceptons de retirer cet amendement, qui visait à montrer la voie dans laquelle il nous faut aller.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. C'était un amendement d'appel.
M. le président. L'amendement n° 126 rectifié bis est retiré.
Par amendement n° 136, M. Ostermann et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent d'insérer, après l'article 11 ter, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après le a quinquies de l'article 279 du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« a sexies) Les prestations de restauration.
« II. - Les pertes de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus à l'article 403 du code général des impôts. »
La parole est à M. Ostermann.
M. Joseph Ostermann. Monsieur le président, si vous me le permettez, je présenterai en même temps l'amendement n° 137.
M. le président. J'appelle donc également en discussion l'amendement n° 137, présenté par M. Ostermann et les membres du groupe du Rassemblement pour la République, et tendant, après l'article 11 ter, à insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article 281 nonies du code général des impôts, il est inséré un article 281 decies ainsi rédigé :
« Art. 281 decies. - La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux de 14 % en ce qui concerne les ventes à emporter ou à consommer sur place et les livraisons à domicile dans le secteur de la restauration. »
« II. - En conséquence, après le d du 2° de l'article 278 bis du code général des impôts, il est inséré un e ainsi rédigé :
« e) Les ventes à emporter et les livraisons à domicile dans le secteur de la restauration. »
« III. - Les pertes de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus à l'article 403 du code général des impôts. »
Veuillez poursuivre, monsieur Ostermann.
M. Joseph Ostermann. Le secteur de la restauration en France est soumis à deux taux de TVA différents : l'un à 5,5 % pour la vente à emporter et la livraison de repas à domicile, l'autre à 20,6 % pour la restauration à consommer sur place. Nous savons, par ailleurs, que certains établissements de restauration rapide sont assujettis à la TVA de 5,5 %.
Cette situation engendre de graves inégalités au sein de la profession et entraîne de sensibles distorsions de concurrence. En outre, le taux de 20,6 % met en difficulté un certain nombre de restaurants de taille moyenne ou très petite, qui se voient trop lourdement taxés et ne peuvent assurer ainsi la rentabilité de leurs équipements.
Enfin, la coexistence de ces deux taux provoque parfois, au sein d'une même entreprise, des difficultés de comptabilité très difficilement gérables.
C'est pourquoi, mes chers collègues, j'ai l'honneur de vous présenter deux amendements.
L'amendement n° 136 vise à assujettir le secteur de la restauration dit « traditionnel » au même taux de TVA que le secteur de la vente à emporter, soit 5,5 %.
Une telle mesure serait de nature à développer et à soutenir le potentiel touristique de notre pays et ne pourrait qu'être favorable à la création d'emplois dans un secteur où la modernisation des établissements et les charges salariales constituent l'essentiel des dépenses.
L'amendement n° 137 tend à harmoniser les taux de TVA en instituant, pour l'ensemble de la profession, un taux à 14 %, et ce afin de répondre aux préoccupations de nos entreprises de restauration sans peser de façon excessive sur nos finances publiques.
L'adoption de l'une ou l'autre de ces deux propositions ne serait, en outre, pas en contradiction, bien au contraire, avec la politique communautaire d'harmonisation de la TVA.
En effet, sauf erreur de ma part, le 12 novembre 1997, la Commission européenne a transmis un document final au Conseil tendant à offrir aux Etats membres la possibilité d'appliquer un taux de TVA réduit sur les services à forte intensité de main-d'oeuvre, à titre expérimental et sur base optionnelle.
Ces services devront, en outre, être fournis directement au consommateur final et être à prédominance locale.
Enfin, ces services devront être ceux pour lesquels le lien entre la réduction des prix, d'une part, et l'augmentation de la demande et de l'emploi, d'autre part, est le plus fort.
Cette expérimentation pourrait ainsi être mise en oeuvre à bon escient dans le secteur de la restauration.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 136 ?
M. Alain Lambert, rapporteur. Monsieur le président, nous sommes là dans une problématique que nous commençons à bien connaître, car nous l'avons souvent évoquée au sein de la Haute Assemblée.
Les considérations d'ordre communautaire - et je sais qu'elles peuvent agacer - ainsi que les considérations budgétaires qui s'opposent à l'application du taux réduit de TVA à l'ensemble des prestations de restauration sont et demeurent ce qu'elles sont. Néanmoins, une solution pourrait peut-être se dessiner, monsieur le secrétaire d'Etat, avec la proposition de la Commission européenne d'autoriser, à titre expérimental, une extension du taux réduit de TVA dans certains secteurs à forte intensité en emplois.
Peut-être le Gouvernement pourrait-il juger opportun de saisir la Commission d'une demande en faveur de la restauration ? C'est une question que la commission des finances m'a autorisé à poser, et elle m'a prié de recommander au Sénat de s'en remettre à l'avis du Gouvernement sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. M. Ostermann a posé avec talent une question bien connue, concernant la distinction qu'il y a lieu d'opérer entre les deux activités que sont, d'une part, la vente de produits alimentaire, élaborés à emporter, assimilée à une activité de commerce alimentaire, et, d'autre part, la restauration, qui est fondamentalement la vente sur place d'un service de restauration qui, évidemment, dans les restaurants convenables, s'accompagne également de produits alimentaires. (Sourires.)
C'est sans doute ce qui explique que la Commission de Bruxelles, que n'aime pas beaucoup M. Hamel...
M. Emmanuel Hamel. Ah ! que non !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. ... ait opéré un partage très clair entre les activités de service, qui sont au taux normal, et les activités de vente de produits alimentaires à emporter, qui sont au taux réduit.
M. Hilaire Flandre. Et quand vous mangez chez McDonald's ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Si vous consommez sur place dans certains établissements qui font aussi de la vente à emporter, indépendamment de la question du contrôle, que vous avez raison de poser, la consommation sur place doit être taxée à 20,6 %, il n'y a aucune ambiguïté dans le droit applicable en la matière. Au demeurant, certains de ces magasins, que vous semblez fréquenter comme moi (Sourires),...
M. Hilaire Flandre. Dieu m'en préserve !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. ... affichent deux listes de prix, selon que leurs produits sont à consommer sur place ou à emporter. (Murmures dubitatifs sur plusieurs travées.)
La proposition que vous faites, monsieur Ostermann, avec votre amendement n° 136, n'est donc absolument pas compatible avec les règles communautaires en vigueur.
M. le rapporteur m'interroge sur l'intention - qui ne fait pas encore l'objet d'une directive - qu'aurait la Commission de faire passer au taux réduit, à titre expérimental, certaines activités de main-d'oeuvre.
Nous avons interrogé la Commission à plusieurs reprises à cet égard. Elle nous a répondu que la restauration n'entrait pas dans le champ des activités de service sur lesquelles elle tenterait des expérimentations.
M. Emmanuel Hamel. Une fois de plus, la Commission se trompe !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. C'est pourquoi, en vous priant de m'excuser d'avoir été un peu long dans ma réponse, monsieur Ostermann, et compte tenu du coût de la mesure que vous proposez - même s'il est plus modeste que les 40 milliards de francs que nous proposait M. Loridant tout à l'heure, il est quand même de 21 milliards de francs ! - le Gouvernement ne peut que conclure à l'impossibilité d'accepter votre proposition.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 136.
M. Daniel Hoeffel. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Hoeffel.
M. Daniel Hoeffel. Notre collègue M. Ostermann a mis l'accent sur un problème qui existe réellement. Il est souhaitable, que cet amendement soit adopté ou non, que le Gouvernement puisse engager et intensifier une action visant à réduire ou à supprimer cette double et difficilement admissible inégalité : inégalité, d'abord, au sein d'une même profession, où des entreprises qui se livrent sensiblement à la même activité se trouvent frappées de taux d'imposition différents - ce qui, évidemment, ne joue pas en faveur d'une concurrence loyale - mais inégalité aussi au sein d'une même entreprise, où l'on peut souvent trouver deux taux d'imposition différents, ce qui est une source de complication comptable.
Cet après-midi, tout au long du débat, il a souvent été question de la nécessité de simplifier la vie des entreprises sur le plan administratif et comptable. Puisse donc cette double inégalité, très frappante et très choquante, être de nature, monsieur le secrétaire d'Etat, à vous faire engager des démarches au niveau adéquat pour répondre à l'argumentation présentée par l'amendement de M. Ostermann !
M. François Lesein. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lesein.
M. François Lesein. Pour rester dans ce même registre de la simplification, je ne sais pas combien de régimes de TVA nous avons, car nous allons de surprise en surprise en la matière !
Permettez-moi de vous rappeler, monsieur le secrétaire d'Etat - mais personne ne l'ignore - que la Coupe du monde de football se déroulera prochainement en France. Nous espérons tous que cette fête du sport sera une réussite ! Or, mes chers collègues, vous avez tous reçu comme moi ce document (L'orateur brandit une affichette) laissant entendre que McDonald's serait le restaurateur officiel de la Coupe du monde en France !
Certes, si McDonald's ne paie que 5,5 % de TVA, c'est qu'on est censé y manger debout... sans doute parce que cela facilite la digestion. (Sourires.) Quoi qu'il en soit, monsieur le secrétaire d'Etat, je voudrais une réponse : pensez-vous que McDonald's puisse valablement représenter la restauration française lors d'une fête mondiale en France ? Je crois personnellement que non.
Par conséquent, je voterai l'amendement qui nous est présenté, et je regrette que, lors de la discussion de l'amendement n° 126 rectifié bis , ses auteurs n'aient pas insisté, car je l'aurais voté également.
M. Bernard Joly. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Joly.
M. Bernard Joly. Comme mon ami M. Lesein, je m'étonne du patronage de la Coupe du monde de football par McDonald's.
Quant à l'amendement que nous examinons en cet instant, je l'ai déjà présenté, mais il a été rejeté. Si nous voulions couler la petite hôtellerie en France, je crois que nous ne nous y prendrions pas autrement !
M. Emmanuel Hamel. Hélas !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Une question précise m'a été posée.
Pour ma part, je ne citerai pas de nom propre, car je ne tiens pas à faire de la publicité à telle ou telle entreprise. Je souhaite en tout cas, comme vous, monsieur Lesein, comme vous, monsieur Joly - et, je le pense, comme tous les sénateurs présents ici ce soir - que la Coupe du monde de football soit un grand succès.
Sachez néanmoins qu'il y a un partage des tâches entre la sphère privée et la sphère publique. L'Etat a largement participé à la construction du Stade de France et à la modernisation des autres stades. Il se charge aussi de la sécurité, et c'est une tâche très importante. Le reste - y compris la question que vous avez soulevée - relève de l'initiative privée, puisque nous sommes dans un système d'économie mixte.
Soyez sûrs que le choix des « partenaires officiels » ne résulte pas seulement, ni même principalement, des taux de TVA applicables : les entreprises qui sponsorisent la Coupe du monde de football paient en espèces sonnantes et trébuchantes !
M. François Lesein. Oui, mais une différence de TVA de 15,5 % facilite les choses !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. En ce qui concerne l'entreprise que vous citez, lorsqu'il y a consommation sur place, le taux de TVA est de 20,6 %. Lorsqu'il s'agit de produits à emporter - et les papiers gras que nous pouvons tous voir ici ou là le montrent bien - c'est le taux de 5,5 % qui s'applique. Je tenais à vous apporter cette précision !
L'Etat n'est en tout cas évidemment pour rien dans le choix de cette entreprise, ni dans celui des autres entreprises qui patronnent cette grande manifestation, qui sera un grand succès.
M. le président. Monsieur Ostermann, êtes-vous sensible à l'argumentation de M. le secrétaire d'Etat ?
M. Joseph Ostermann. Compte tenu des explications qui nous ont été données par M. le secrétaire d'Etat et par M. le rapporteur, et après le débat qui vient d'avoir lieu, je ne peux que retirer mes amendements.
Je souhaiterais cependant, monsieur le secrétaire d'Etat, que ce problème soit évoqué, parce que nous ne pouvons pas sans arrêt affirmer que les directives européennes sont contraires à telle ou telle avancée dans tel ou tel domaine - encore que nous aurons l'occasion, lors de l'examen d'un autre amendement, de nous rendre compte que certains pays voisins ne sont pas toujours aussi prompts que nous à respecter les directives européennes - sans agir de notre côté.
Cela étant, je retire mes amendements.
M. le président. Les amendements n°s 136 et 137 sont retirés.

TITRE II


DISPOSITIONS RELATIVES À L'ADAPTATION DE LA LÉGISLATION FRANÇAISE ET À LA MODERNISATION DES ACTIVITÉS FINANCIÈRES EN VUE DE LA TROISIÈME PHASE DE L'UNION ÉCONOMIQUE ET MONÉTAIRE

Section 1

Dispositions comptables

Article 12