Séance du 27 novembre 1998







Par amendement n° II-48, M. César, au nom de la commission des affaires économiques, propose de réduire ces crédits de 300 000 000 francs.
En conséquence, de porter le montant des mesures nouvelles à moins 2 961 518 390 francs.
La parole est à M. Flandre.
M. Hilaire Flandre, au nom de la commission des affaires économiques et du Plan. Le projet de loi de finances pour 1999 prévoit le financement des contrats territoriaux d'exploitation que devrait mettre en place le projet de loi d'orientation agricole. Ces contrats seraient destinés à orienter l'intervention économique et, par là même, à transformer profondément l'entreprise agricole.
La commission des affaires économiques et du Plan est contrainte de vous proposer un amendement de suppression d'une ligne budgétaire qui, sciemment, mélange tout.
La commission est bien entendu favorable à l'installation des jeunes agriculteurs, au fonds de gestion de l'espace rural ou encore à l'intervention des offices agricoles, mais elle estime que, dans ces domaines, les crédits sont insuffisants.
En revanche, elle ne peut accepter que, par amalgame, des crédits soient affectés sur le CTE alors que celui-ci n'existe pas encore. C'est faire fi de la représentation nationale que de proposer de redéployer 300 millions de francs, dès aujourd'hui, plusieurs mois avant l'adoption définitive de la loi d'orientation et avant même que le Sénat ait eu l'occasion de l'examiner.
Comprenez bien qu'il ne s'agit en aucune façon de prendre position sur le dispositif qui sera présenté dans le projet de loi d'orientation agricole dans les jours à venir ; il s'agit de prendre le temps d'examiner le contrat territorial d'exploitation et d'en évaluer la portée avant de se prononcer sur les moyens que le Gouvernement souhaite y consacrer.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Joël Bourdin, rapporteur spécial. Je dirai à notre collègue, m'exprimant au nom de la commission des finances, qu'il ne faut pas tenter le diable !
M. Hilaire Flandre, au nom de la commission des affaires économiques et du Plan. Qui appelez-vous le diable ?
M. Joël Bourdin, rapporteur spécial. Moi !
Ayant le souci de réduire les déficits, j'aurais tendance à dire qu'il s'agit d'un bon amendement !
Cela étant, pour ma part, je m'en remets à la haute compétence, en matière d'expertise, de la commission des affaires économiques et je recommande donc la sagesse.
M. René-Pierre Signé. C'est un combat d'arrière-garde !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Je souscris aux propos du rapporteur spécial : il ne faut pas tenter le diable ! Mais, en l'occurrence, il s'agirait de supprimer 300 millions de francs !
Je ne comprends pas très bien la logique de certains sénateurs qui, dans leurs interventions, considérant que les crédits dévolus au ministère de l'agriculture et de la pêche n'étaient pas suffisants, veulent maintenant les réduire de 300 millions de francs pour les rendre encore plus insuffisants ! Il ne faut évidement pas tenter le diable !
Le Gouvernement, pour sa part, souhaite que ces 300 millions de francs soient maintenus dans le projet de budget pour le financement des CTE, auxquels nous croyons, et leur mise en oeuvre au dernier trimestre de 1999.
Je demande donc le rejet de cet amendement.
M. René-Pierre Signé. Bien sûr !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-48.
M. Jean-Marc Pastor. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Pastor.
M. Jean-Marc Pastor. Depuis maintenant plus d'un an et demi, le ministre de l'agriculture et la profession, plus particulièrement sur l'initiative du CNJA, ont travaillé ensemble et sont parvenus à un accord sur les grandes orientations de la future loi d'orientation agricole.
Or les contrats territoriaux d'exploitation sont le coeur même de ce projet de loi, qui vient d'être adopté à l'Assemblée nationale. Des amendements déposés par les députés ont failli dénaturer le texte et ont irrité les jeunes agriculteurs au point que certaines permanences ont été fermées.
Aujourd'hui, vous nous présentez un amendement destiné à réduire les crédits du projet de budget pour l'agriculture du montant qui était prévu pour les CTE, et cela alors que quatre-vingts départements ont d'ores et déjà demandé à participer à cette expérimentation. L'adoption de cet amendement risque de retarder d'une année le lancement de l'expérimentation.
Pour ma part, je regrette que, subrepticement, le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, M. César, ait jugé bon de faire examiner cet amendement en commission comme s'il s'agissait d'un simple correctif budgétaire.
En fait, les CTE constituent l'axe majeur de votre budget, monsieur le ministre, et sont particulièrement attendus par les jeunes agriculteurs.
Sur un choix majeur, il convient d'agir dans la transparence ; il faut donc que sénateurs et groupes politiques s'expriment clairement et que l'on sache qui souhaite aller de l'avant pour notre agriculture et qui profite de cette discussion budgétaire pour faire de la politique par le petit bout de la lorgnette et aller à l'encontre des intérêts des agriculteurs !
Le monde agricole devant connaître la position de chacun, nous vous demandons un scrutin public sur cet amendement.
Mme Hélène Luc. Très bien ! M. Gérard Cornu. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Cornu.
M. Gérard Cornu. Monsieur le ministre, les explications que vous venez de nous donner ne sont pas convaincantes.
Pour quelle raison demandons-nous la réduction des crédits de 300 millions de francs ? C'est tout simplement parce que le Sénat n'a pas encore examiné le projet de loi d'orientation agricole. De plus, si j'ai bien compris, les CTE ne seront finalement opérationnels qu'au dernier trimestre de l'année 1999.
Monsieur le ministre, vous venez aussi de nous expliquer qu'il s'agit d'un redéploiement des crédits provenant en partie du Fonds de gestion de l'espace rural. Lorsque vous étiez député à l'Assemblée nationale, vous avez défendu ce fonds en demandant le maintien des crédits qui lui y étaient consacrés, comme moi. Mais ces crédits, une fois affectés aux CTE, le seront de façon individuelle. Or, vous savez pertinemment que le fonds de gestion de l'espace rural ne sert pas uniquement pour des actions individuelles.
Des espaces sensibles sont déjà complètement désertés par les agriculteurs, faute de vocation économique. Il arrive donc que les collectivités locales soient obligées de poursuivre le mouvement, précisément pour défendre ces espaces sensibles. C'est donc une erreur d'intégrer des crédits du fonds de gestion de l'espace rural, comme vous l'avez dit, pour des actions individuelles dans le cadre des CTE. C'est aller à l'encontre de la défense du monde rural et de la gestion des espaces sensibles !
M. Bernard Piras. Alors, retirez l'amendement !
M. René-Pierre Signé. C'est un combat d'arrière-garde !
M. Albert Vecten. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Vecten.
M. Albert Vecten. Je ne comprends pas cet amendement de réduction des crédits de 300 millions de francs destinés aux CTE.
Si, par malheur, la disposition du projet de loi d'orientation agricole relative aux CTE, n'est pas adoptée, les crédits consacrés à ces derniers ne seront pas utilisés, mais ils resteront, c'est tout !
Aujourd'hui, alors que 80 départements sont d'accord pour une telle expérimentation, comment allons-nous faire comprendre aux agriculteurs que nous réduisons les crédits du montant consacré au fonctionnement de ces CTE ?
Je suis président de conseil général. Lorsque des crédits ne sont pas utilisés, on les garde !
Pour une fois que le Gouvernement prend les devants, on refuserait ? Je ne comprends pas et je voterai donc contre cet amendement.
Mme Hélène Luc. C'est logique. Au moins du bon sens !
M. René-Pierre Signé. Très bien !
M. le président. Monsieur Flandre, maintenez-vous l'amendement.
M. Hilaire Flandre, au nom de la commission des affaires économiques et du Plan. Madame Luc, ne vous réjouissez pas trop vite. Quand vous aurez bien compris le fond du problème...
Ces crédits d'un montant de 300 millions de francs sont bien soustraits du fonds de gestion de l'espace rural, des opérations groupées d'aménagement foncier, du fonds pour l'installation en agriculture et d'une partie des financements des offices !
Cela veut dire que Gouvernement prend les devants, monsieur Vecten, je veux bien l'admettre.
M. Jean-Louis Carrère. Et vous enlevez encore plus de crédits !
M. René-Pierre Signé. Vous n'êtes pas convaincu !
M. le président. Laissez M. Flandre s'exprimer !
M. Hilaire Flandre, au nom de la commission des affaires économiques et du Plan. En fait, le Gouvernement prend les devants pour supprimer des crédits consacrés à un dispositif qui fonctionne et les affecter à un dispositif qui n'existe pas encore ! Il convenait d'alerter la Haute Assemblée et le ministre sur un tel phénomène.
Toutefois, compte tenu des réactions que cet amendement suscite des explications que M. le ministre a bien voulu nous fournir, et bien que nous n'ayons pas été convaincus, nous retirons cet amendement. (Exclamations sur les travées socialistes.)
M. René-Pierre Signé. Voilà la sagesse !
M. Jean-Paul Emorine. Mais applaudissez donc !
M. le président. L'amendement n° II-48 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits figurant au titre IV.

(Ces crédits sont adoptés.)
Mme Hélène Luc. La sagesse arrive !
M. Hilaire Flandre. Rassurez-vous, madame, elle est là depuis longtemps !

ÉTAT C

M. le président. « Titre V. - Autorisations de programme : 86 900 000 francs » ;