Séance du 4 décembre 1998






1. Transports terrestres
2. Routes
3. Sécurité routière

M. le président. Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant les transports terrestres, les routes et la sécurité routière.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation, pour les transports terrestres. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les crédits des transports terrestres augmentent de 0,6 % en 1999, atteignant 45,2 milliards de francs.
En réalité, il faut ajouter à ces crédits 2,5 milliards de francs en provenance des comptes spéciaux du Trésor et la dotation en capital de 13 milliards de francs accordée à Réseau ferré de France, RFF.
Au total, l'effort de l'Etat en faveur des transports terrestres s'élève donc à 60,7 milliards de francs pour 1999, soit une hausse de 5,8 %. Cette hausse s'explique avant tout par l'augmentation nécessaire de la dotation en capital à RFF.
Je regrette toutefois que l'essentiel de cet effort soit absorbé par l'apurement des investissements passés, par les retraites et préretraites et par les coûts de fonctionnement, au détriment de la modernisation des réseaux de transport dont la France a besoin.
Je me félicite du succès de la réforme de la SNCF, qui a été engagée par le précédent gouvernement et poursuivie par le nouveau.
En effet, son désendettement et la clarification de ses relations avec les autorités publiques ont permis à la SNCF de se mobiliser efficacement sur la reconquête de sa clientèle. Ainsi l'image de la SNCF s'améliore, le trafic voyageurs se redresse et le transport ferroviaire a regagné des parts de marché au détriment de la route.
Les premiers résultats de l'expérience de régionalisation des services régionaux de voyageurs, engagée le 1er janvier 1997, sont prometteurs, puisque le trafic régional a davantage progressé dans les six régions expérimentatrices que dans les autres. Ce succès doit d'ailleurs beaucoup aux efforts des régions pour moderniser l'offre de transport. Il est la preuve que la décentralisation permet une meilleure adéquation entre les dépenses publiques et les besoins de nos concitoyens.
Au total, les pertes courantes de la SNCF ont chuté de 16,2 milliards de francs en 1996 à 0,8 milliard en 1997, cette amélioration allant au-delà des seuls effets mécaniques de la réforme sur les comptes de la SNCF.
Le redressement de la SNCF est toutefois fragile et inachevé.
La progression du trafic repose pour une large part sur la reprise économique engagée au début de 1997.
Le fret connaît aujourd'hui une crise de croissance avec l'apparition de points d'engorgement du réseau et la pénurie de conducteurs. Cela s'est traduit par une dégradation de la qualité du service, dégradation qui a été amplifiée par des arrêts de travail récurrents.
La commission d'enquête du Sénat sur les infrastructures de transport avait d'ailleurs montré que le développement du transport ferroviaire de marchandises passe par des investissements adaptés et par l'adoption de conditions d'exploitation plus favorables au fret, en particulier par l'abandon de la priorité systématique accordée aux trains de voyageurs.
Par ailleurs, la rentabilité des filiales hors télécommunications se redresse, mais demeure très faible.
De même, les perspectives de profit de la filiale Télécom Développement sont aléatoires. Il est d'ailleurs paradoxal de voir la SNCF refuser le développement de la concurrence entre opérateurs sur le réseau ferré français, mais accepter le développement d'un réseau téléphonique concurrent de celui de France Télécom.
Enfin, l'amélioration des comptes de la SNCF s'explique aussi par la faiblesse des péages versés à RFF.
La dégradation du climat social à la SNCF est donc très inquiétante.
Il appartient aux cheminots de poursuivre leurs efforts de maîtrise de leurs coûts et de reconquête de leur clientèle, en ligne avec l'effort consenti par la nation pour les transports ferroviaires, qui atteint le montant record de 66 milliards de francs, soit près de 3 000 francs par foyer.
Les difficultés du système ferroviaire ont par ailleurs été reportées sur Réseau ferré de France.
Le montant des péages a été fixé à un niveau très faible : en 1998, RFF percevra en effet 6,2 milliards de francs de la SNCF tout lui reversant 16,6 milliards de francs au titre de la gestion et de l'entretien du réseau. Au total, la propriété du réseau ferré coûtera donc, en 1998, plus de 10 milliards de francs à RFF en plus des charges de la dette liée aux infrastructures.
Cela se traduit par une perte très importante pour RFF : 14,1 milliards de francs pour 1977 ; 14,5 milliards de francs prévus pour 1998, ce qui réduit les capacités d'autofinancement de RFF et ralentit la modernisation du réseau existant.
Le bas niveau du montant des péages revient de plus à subventionner artificiellement le transit ferroviaire sur un réseau français déjà saturé, au profit des concurrents étrangers de la SNCF.
Je me félicite donc de ce qu'une hausse des péages ait été annoncée, même si elle provient pour partie d'un artifice comptable entre RFF et la SNCF. Elle devra se poursuivre pour rapprocher progressivement les péages du coût d'usage réel des infrastructures.
J'en viens à mes observations sur les transports en commun d'Ile-de-France.
La contribution de l'Etat à l'équilibre financier de la RATP augmente de 2,8 %, alors même que le versement transport des entreprises est particulièrement dynamique, que le trafic se redresse et que les voyageurs eux-mêmes paient de plus en plus cher.
Ce paradoxe s'explique pour partie par l'augmentation de l'offre et par le coût de l'insécurité pour la RATP. La multiplication depuis un an des actes violents contre les conducteurs a notamment conduit la RATP à accélérer la création de 1 000 emplois-jeunes. A coût égal, cela n'est pas la meilleure réponse à la déliquescence de la sécurité dans certains quartiers. L'Etat doit prendre ses responsabilités, en particulier en sanctionnant vraiment les auteurs de ces violences.
Comme le soulignait mon homologue socialiste de l'Assemblée nationale, ce paradoxe trouve aussi son origine dans le laxisme budgétaire de la RATP, en particulier la dérive de la masse salariale et des coûts de fonctionnement. Cette dérive ne profite pas aux voyageurs ; en moyenne, au cours des trois dernières années, un escalier mécanique sur sept était ainsi hors service dans le métro.
Dans un rapport récent, la Cour des comptes a d'ailleurs relevé l'insuffisance du contrôle de gestion et de nombreux dysfonctionnements en matière de passation de marchés à la RATP. Cela se traduirait notamment par des ententes sur les marchés de nettoyage, alors même que la propreté des véhicules et des stations participe au sentiment de sécurité des voyageurs et incite ceux-ci à respecter le transport.
Ce paradoxe résulte enfin d'une mauvaise allocation des investissements d'infrastructure en Ile-de-France : EOLE et METEOR auront ainsi mobilisé durant huit ans les deux tiers des capacités d'investissement disponibles, alors que ces projets sont largement redondants et ne répondent pas aux besoins prioritaires des Franciliens qui sont de se déplacer de banlieue à banlieue.
La nouvelle ligne de métro METEOR est certes une belle vitrine technologique, mais chaque voyage y coûte aujourd'hui plus de vingt francs à la collectivité, soit plus de trois francs par kilomètre parcouru et par voyageur.
Cette mauvaise allocation des ressources vient d'une double déresponsabilisation : c'est l'Etat qui décide des investissements alors que la région d'Ile-de-France les finance, d'une part, et les pertes des opérateurs sont systématiquement compensées par la collectivité, d'autre part.
Au total, la clarification des responsabilités et des relations financières entre l'Etat, la RATP et les collectivités locales franciliennes apparaît être une priorité. Cette clarification passe par l'ouverture du Syndicat des transports parisiens à la région, et - pourquoi pas ? - aux usagers.
J'évoquerai maintenant brièvement les dotations aux transports collectifs de province et aux voies navigables.
Les subventions d'investissement aux transports collectifs de province connaissent une forte augmentation, les crédits s'élevant à 720 millions de francs en autorisations de programme.
L'impact favorable de cette dotation sera toutefois partiellement neutralisé par le relèvement de la taxe intérieure sur les produits pétroliers, en l'occurrence sur le gazole. Pour que ce relèvement ne soit pas contre-productif en termes de lutte contre la pollution - car il risque de freiner la modernisation et l'extension des transports en commun - il serait souhaitable d'en compenser le coût pour les opérateurs de transport, par exemple en instituant des aides à l'équipement en bus propres.
Par ailleurs, l'action opiniâtre des élus membres du comité de gestion du Fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables (le FITTVN) a permis d'augmenter la dotation destinée aux voies fluviales pour 1999. Toutefois, avec 450 millions de francs, cette dotation reste très inférieure au produit attendu de la taxe sur les ouvrages hydroélectriques concédés et, surtout, inférieure aux besoins de réhabilitation du réseau existant tels qu'ils ressortent des conclusions de la commission d'enquête du Sénat.
En matière de grands projets, la priorité est désormais clairement donnée au projet Seine-Nord. Ce projet présente une pertinence économique incontestable : il relie, sur une distance relativement brève, deux zones très denses en population et en activités. Il importe donc, monsieur le ministre, que vous en adoptiez le tracé au plus tôt, afin de ne pas retarder les travaux.
La commission des finances a adopté un amendement tendant à réduire les crédits du titre IV de 566 millions de francs, soit une réduction forfaitaire de 1 %, outre le gel de la subvention d'équilibre à la RATP à son niveau de 1998.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Pour permettre de mieux augmenter les crédits d'investissement !
M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial. Cet amendement a pour but non pas de pénaliser les entreprises de transport, mais d'inciter la RATP à une meilleure maîtrise de ses coûts, et surtout de rappeler au Gouvernement qu'il faut réduire les dépenses de fonctionnement et d'intervention au profit des dépenses d'investissement les plus utiles.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Très bien !
M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial. Comme l'an passé, j'accompagne cet amendement d'une suggestion : que le Gouvernement adopte un programme de privatisations plus ambitieux, qui fournirait à RFF les 15 milliards de francs dont il a besoin pour investir et qui permettrait d'accorder à la SNCF et à la RATP des dotations en capital pour renforcer leur structure financière.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Très bien !
M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial. Je constate d'ailleurs, monsieur le ministre, que vous nous avez déjà suivi sur cette logique, en augmentant les dotations en capital à RFF grâce à la privatisation de France Télécom. (Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants.)
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Voilà : vos propositions sont suivies d'effets !
M. Joseph Ostermann. Continuez !
M. le président. La parole est à M. Berchet, rapporteur pour avis.
M. Georges Berchet, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan, pour les transports terrestres. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de budget pour 1999 a été très bien analysé par notre collègue Auguste Cazalet et, afin de respecter le temps de parole qui m'est accordé, je cantonnerai mon propos aux conséquences financières des choix opérés et à quelques suggestions en relation directe avec les problèmes d'actualité.
En ce qui concerne la SNCF, le trafic voyageurs évolue favorablement - vous trouverez tous les éléments dans le rapport écrit - de même que le trafic fret ; il faut s'en féliciter.
En ce qui concerne le réseau à grande vitesse, il est prévu de mettre en service le TGV Méditerranée en l'an 2001.
Le TGV Est européen est à l'étude. Le gain de temps entre Paris et Strasbourg sera de l'ordre de une heure vingt-cinq, mais il faut rechercher un complément de financement de 10 %.
A cet égard, signalons que les lots de travaux de génie civil - de 50 kilomètres chacun - ont été mis en concurrence par RFF et que la SNCF est candidate au même titre que les autres sociétés.
En ce qui concerne le TGV Rhin-Rhône, la concertation a eu lieu. L'Union européenne pourrait apporter un financement de l'ordre de 50 % pour les études.
Pour le TGV Sud européen entre la France et l'Espagne, la fin des travaux est prévue entre 2004 et 2006.
Par ailleurs, la situation financière de la SNCF s'améliore très nettement puisque, pour 1998, le compte prévisionnel fait apparaître un déficit de 528 millions de francs, alors que le déficit était de près de 1 milliard de francs en 1997. Il s'agit donc d'un excellent résultat.
L'effort commercial de la SNCF est certain ; il faut le souligner et l'encourager, mais il est encore à améliorer face à la concurrence européenne qui approche.
Il ne s'agit plus seulement de respecter à la minute ou à la seconde les horaires comme au Japon, mais bien de faire naître une culture d'entreprise, une vocation commerciale, voire un acharnement thérapeutique pour une survie dans l'Europe ferroviaire.
L'endettement n'est plus que de 45 milliards de francs au 31 décembre 1997.
J'en viens à Réseau ferré de France, dont l'exercice 1997 s'est soldé par une perte de 14 milliards de francs.
D'ici à 2001, RFF compte exiger 9 milliards de la SNCF, ce qui ne couvrira qu'une partie des 16 milliards de francs de dépenses d'entretien.
Les premières dotations en capital accordées par l'Etat à RFF ont été de 8 milliards de francs en 1997 et de 10 milliards de francs en 1998. Pour 1999, la dotation prévue est de 13 milliards de francs.
Il nous est très souvent demandé pourquoi RFF ne commercialise pas plus rapidement les actifs déclassés équivalant en grande partie à la dette de la SNCF transférée ? On a en effet souvent reproché à la SNCF de ne pas vendre rapidement tout ce qui ne servait à rien et maintenant RFF semble faire de même. Pourtant, ne serait-ce pas une bonne solution pour éviter d'augmenter la contribution et le péage de la SNCF ?
La Commission européenne a souhaité la libéralisation du transport par rail - nous avons pu mesurer ces jours-ci l'inquiétude des cheminots européens - et la réglementation des transports routiers.
La commission souhaite également une transparence financière des différentes activités, notamment la séparation des comptes et des bilans, mais aussi la séparation des infrastructures et du service des transports. Avec RFF, la France a donc anticipé sur les directives de la Commission.
Lundi 30 novembre a eu lieu une réunion des ministres des transports européens. Pourriez-vous, monsieur le ministre, nous donner des indications quant aux orientations qui y furent adoptées, en nous précisant notamment comment sera déterminée la minorité de blocage.
J'ai essayé de comprendre, sans résultat : cette minorité de blocage est-elle pondérée par l'importance relative des populations des pays concernés ? Sinon quels autres critères seront mis en oeuvre ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Les voix sont fonction de l'importance de chaque pays.
M. Georges Berchet, rapporteur pour avis. Ah bon ! En fonction de l'importance des pays, et non des réseaux ?

Monsieur le ministre, des tiraillements ont été signalés dans les relations entre la SNCF, entreprise publique nationale, et RFF, établissement public. Il s'agit d'un attelage de responsables ferroviaires aux intérêts pas toujours convergents, je dirais même qu'ils sont plutôt divergents : l'un élabore à juste titre une politique commerciale, surveille la bonne desserte de la France, tandis que l'autre, responsable des infrastructures, est préoccupé par le remboursement de sa dette et l'équilibre de son compte d'exploitation.
Monsieur le ministre, vous avez toujours été soucieux de l'unicité des transports ferroviaires. Ne conviendrait-il pas de chapeauter SNCF et RFF par une instance qui pourrait prendre la forme d'un directoire par exemple, mais qui serait guidée uniquement par l'intérêt général ? Ne nous répondez pas qu'il existe un observatoire du ferroviaire ; cet observatoire est en place certes, mais il ne peut observer que ce qui se passe et non ce qui va se passer.
Ne conviendrait-il pas également de conduire une réflexion, une étude prospective sur la prochaine création d'un réseau européen ?
Sur le plan strictement financier, il est regrettable que les dotations de l'Etat soient totalement absorbées par l'apurement des dettes dues aux investissements passés réalisés sans le concours de l'Etat, puisque l'Etat n'a jamais versé un centime à la SNCF.
Il en résulte l'abandon des investissements de modernisation des réseaux, modernisation qui est nécessaire. Il en va ainsi de l'électrification attendue et indispensable de la ligne Paris-Bâle, ligne internationale qui assure la desserte de la Champagne méridionale.
L'électrification de cette ligne, suggérée par la réunion du CIAT du 20 septembre 1994 et la charte du Bassin parisien incluant Troyes est une bonne chose, mais, au-delà, que se passera-t-il ?
Va-t-on faire circuler des diesels sous une ligne électrifiée ? Sinon, que se passera-t-il pour la rupture de charge à Troyes ?
Monsieur le ministre, les Hauts-Marnais, que je représente ici, souhaitent être écoutés et entendus afin que la France profonde, en lutte contre la désertification, soit mieux irriguée et bénéficie d'un accès direct au réseau national et international des TGV. L'implantation d'entreprises et la création d'emplois en dépendent directement.
Il conviendrait également, monsieur le ministre, d'arrêter la diminution des effectifs du centre ferroviaire de Chalindrey en lui confiant notamment, comme cela est techniquement possible, l'entretien des rames TER. Cette cité cheminote, que vous connaissez bien, a déposé un projet de réalisation d'une plate-forme multimodale dont le lieu d'implantation est stratégique, puisque situé à l'intersection des axes ferroviaires Paris-Bâle et Toul-Dijon, et dont l'objectif est précisément la réduction du trafic routier.
En ce qui concerne la RATP, il convient de signaler l'évolution positive du trafic.
Pour la première fois depuis 1992, le trafic brut annuel du métro, du RER et des autobus est en hausse.
L'ensemble des produits et charges du budget de la Régie pour l'exercice 1998 est en hausse de 1,2 %.
La liste et les caractéristiques des prolongements des lignes de la RATP, en voie d'achèvement ou retenus au plan prévisionnel d'engagement, figurent dans le rapport écrit.
En conclusion, j'aborderai trois points particuliers.
Le premier est un sujet de satisfaction : il s'agit du plan pluriannuel de résorption des passages à niveau.
Monsieur le ministre, vous avez entendu l'appel lancé l'année dernière par le Sénat, notamment par la commission des affaires économiques. Une dotation de 50 millions de francs au chapitre 03 du FITTVN dans le cadre de ce plan pluriannuel de résorption des passages à niveau est ainsi prévu. Chacun s'en félicite, mais M. Gallois avait dit que la résorption complète devrait coûter 2 milliards de francs : on est loin de compte !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Deux cent milliards de francs !
M. Georges Berchet, rapporteur pour avis. C'est encore mieux !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Il y a 17 000 passages à niveau !
M. Georges Berchet, rapporteur pour avis. Eh bien, faites un effort et surtout ne faites pas payer les communes !
Deuxième point : la régionalisation des services régionaux de voyageurs.
A ce propos, je ne partage pas du tout l'avis de mon prédécesseur.
L'expérimentation de la régionalisation de services régionaux de voyageurs engagée dans six régions volontaires mais hautement favorisée - Alsace, Centre, Nord - Pas-de-Calais, Pays de la Loire, Provence - Alpes-Côte-d'Azur, Rhône-Alpes - à compter du 1er janvier 1997, s'est poursuivie en 1998.
Une dotation correspondant à la quote-part du déficit d'exploitation des services régionaux de voyageurs dans les six régions expérimentales a été versé directement à ces dernières à partir du 1er janvier 1997.
Cette contribution s'élèvera en 1999 à 2,8 milliards de francs.
Ainsi que l'avait souligné l'année dernière notre collègue Jean-Pierre Raffarin, il convient d'attendre, avant l'extension du transfert de compétence, que soient garantis l'ajustement annuel et la pérennisation de la contribution de l'Etat pour émettre un jugement définitif sur l'expérience.
Avant de tirer des conclusions, il conviendrait de moduler les résultats des zones expérimentales en fonction de la densité de leur population et de la répartition géographique des agglomérations desservies. Ce qui est possible à Lille ne l'est pas dans le centre de la France ou ailleurs, même en Champagne du sud. En tout cas, il ne devrait pas y avoir augmentation de charges pour les régions.
Troisième point : la sûreté des personnes, problème prioritaire.
Permettez-moi de dire quelques mots sur les dispositifs de police mis en place.
A la SNCF, deux services compétents sont présents sur les lignes : une brigade spécialisée de police et un service de surveillance.
A la RATP, il faut noter l'existence du groupement de protection et de sécurité de réseaux.
La préfecture de police met deux services spécialisés sur le réseau ferroviaire.
Depuis octobre dernier, deux autres compagnies affectées à la sécurité du métro ont été mises en place par le ministère de l'intérieur.
Le réseau de la région d'Ile-de-France bénéficie d'une présence renforcée des services de police dans les rames et aux abords des gares.
Relevons enfin l'extension de la radiolocalisation du parc d'autobus. La totalité du parc, soit 4 000 véhicules, devrait être pourvue d'équipements de ce type, contre 170 véhicules actuellement, d'ici à la fin de l'an 2000.
Des auditions de policiers et de gendarmes que nous avons effectuées, il apparaît hautement souhaitable qu'une meilleure coordination soit établie entre les services « protégés » et les services de police afin d'assurer une bonne compatibilité des équipements techniques.
De ces entretiens il est possible de tirer plusieurs enseignements.
La sûreté des personnes dans les gares et dans les trains est un problème de sécurité publique. Pourquoi les entreprises de transport, qui y sont confrontées au même titre que d'autres lieux ouverts au public, tels que la voie publique ou les grandes surfaces, devraient-elles payer ?
A la SNCF, comme à la RATP, plusieurs corps de police sont chargés de la sécurité.
Cette « cohabitation » n'est pas sans susciter, selon nos informations, quelques difficultés. Il semble indispensable, en conséquence, de clarifier les missions et les prérogatives des uns et des autres.
Au-delà de la progression nécessaire des effectifs en charge de la sécurité dans les transports collectifs, il est apparu que le découpage des territoires de compétence n'était plus adapté à la situation. Par exemple, la brigade de police qui opère à la RATP dépend de la préfecture de police de Paris et n'intervient plus hors des limites du ressort de cette préfecture.
Pourquoi donc ne pas créer des zones de sécurité intérieure des transports, qui, au même titre que les zones de défense, assureraient une meilleure synergie - dans la région d'Ile-de-France, notamment - de tous les moyens humains mis au service de la sûreté des personnes dans les transports en commun, et cela sans limite territoriale de compétence ?
La commission des affaires économiques et du Plan s'en remet à la sagesse du Sénat sur les crédits des transports terrestres dans le projet de loi de finances pour 1999. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Miquel, rapporteur spécial.
M. Gérard Miquel, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation, pour les routes et la sécurité routière. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en additionnant les crédits figurant au budget des routes, les dotations provenant des comptes spéciaux du Trésor, les fonds de concours des collectivités locales et les efforts d'investissement et d'entretien des sociétés concessionnaires d'autoroutes, on constate que l'ensemble consolidé des moyens d'engagement consacrés au réseau routier national diminue de 7 % en 1999, s'établissant à 33,4 milliards de francs.
Les moyens d'engagement pour la construction du réseau routier national sont ainsi en forte baisse : les crédits budgétaires diminuent de 10,5 % et les crédits en provenance des comptes spéciaux du Trésor, de 9 %, ce qui s'explique en partie par l'achèvement des autoroutes A 75 et A 20.
En dépit du prolongement d'un an des contrats de plan Etat-région 1994-1998, le taux d'exécution moyen des volets routiers de ces contrats de plan n'atteindrait ainsi que 81,5 % au terme du XIe plan, c'est-à-dire à la fin de 1999.
Il s'agit là d'un constat préoccupant au regard de la crédibilité des engagements de l'Etat, au moment où s'ouvrent les négociations relatives aux prochains contrats de plan. Sans doute faudra-t-il désormais revenir à une programmation plus réaliste.
En revanche, les crédits d'entretien du réseau routier national sont en progression pour le quatrième exercice consécutif. Ces crédits retrouvent enfin le niveau atteint en 1990. Cela témoigne du rééquilibrage hautement souhaitable entre le développement et l'entretien du réseau.
En particulier, les actions de réhabilitation et de renforcement des chaussées et des ouvrages d'art progressent de 18 %, s'établissant à 715 millions de francs, dont 83 millions de francs en provenance du FITTVN et, pour la première fois, 70 millions de francs en provenance du FARIF.
La croissance de ces crédits est excellente, car elle est le gage d'une sécurité routière accrue et d'économies ultérieures. L'entretien préventif est en effet moins onéreux que l'entretien curatif.
Il convient toutefois de s'interroger sur cette débudgétisation : est-il dans la vocation du FITTVN et du FARIF, qui sont des fonds d'aménagement du territoire, de financer des dépenses d'entretien routier ? Cette question mériterait de faire l'objet d'un vrai débat, plutôt que d'être tranchée au détour de l'inscription des crédits budgétaires.
S'agissant maintenant du réseau autoroutier concédé, les investissements des sociétés concessionnaires d'autoroutes devraient ralentir en 1999, en raison d'une pause dans le lancement de nouveaux projets. Plusieurs liaisons inscrites au schéma routier directeur national de 1992 sont ainsi remises en cause.
L'objectif d'une réalisation en dix ans à partir de 1994 du schéma directeur routier national de 1992 n'a toutefois pas été explicitement abandonné. La révision de ce schéma directeur et l'inscription de nouveaux projets sont désormais subordonnées à la modification de la loi d'orientation de 1995, à laquelle travaille le ministère de l'environnement et de l'aménagement du territoire.
Dans le cadre de la révision de cette loi, le Gouvernement a annoncé son souhait de modifier l'approche des schémas de planification. Ces schémas prendraient désormais la forme de schémas de services, qui ne comporteraient une carte des projets d'infrastructures qu'au dernier stade de la procédure.
Il est nécessaire que cette planification soit opérée au plus tôt et comporte des échéanciers hiérarchisés, afin que les collectivités locales bénéficient de perspectives claires, notamment pour la négociation des contrats de plan.
Il est également hautement souhaitable que le Parlement soit désormais étroitement associé à la définition et à la révision périodique des schémas directeurs. Le développement d'une concertation étroite avec les élus, en amont des projets, est en effet la condition d'une meilleure maîtrise des procédures, donc des coûts de construction.
Il me semble par ailleurs indispensable d'achever la grande majorité des liaisons autoroutières entreprises. Il s'agit là d'une exigence de cohérence, car on ne saurait, par exemple, monsieur le président de la commission des finances, couper l'axe Calais-Bayonne entre Rouen et Alençon. (Sourires.)
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Très bien, monsieur le rapporteur spécial ! (Nouveaux sourires.)
M. Guy Fischer. Comme par hasard ! (Nouveaux sourires.)
M. Gérard Miquel, rapporteur spécial. Il s'agit également d'un impératif en termes de développement des territoires. Il s'agit enfin d'une nécessité pour la sécurité routière : l'autoroute est quatre fois plus sûre que la route.
Dès lors, il est nécessaire d'assainir le financement du système autoroutier : d'abord, en établissant le principe de l'autoroute à péage, gage d'équité entre usagers et d'un meilleur entretien du réseau ; ensuite, en adaptant les modalités et la durée des financements à la durée de vie des infrastructures.
Par exemple, comme les péages évoluent désormais au rythme de l'inflation, il serait sans doute opportun que les sociétés d'autoroutes se financent pour partie grâce à des obligations indexées sur l'inflation, comme elles en ont désormais la possibilité.
Enfin, il est indispensable de réduire les prélèvements sur les sociétés d'autoroutes qui n'ont pas de lien avec l'exploitation. Des prélèvements aveugles, comme la taxe d'aménagement du territoire versée au FITTVN, n'ont que des effets pervers : d'un côté, l'augmentation de ces prélèvements fragilise les sociétés concessionnaires et réduit leurs investissements ; de l'autre, les compensations qui sont accordées aux sociétés d'autoroutes sous la forme de hausses des péages entraînent un report de trafic vers le réseau non concédé.
Il en résulte, au total, une augmentation de la circulation sur le réseau non concédé - notamment pour les poids lourds - donc une hausse des dépenses d'entretien, que l'Etat n'est pas en mesure de financer. Ce détournement de trafic est en outre préjudiciable à la sécurité routière, au détriment des automobilistes les plus pauvres.
Je vais maintenant vous présenter mes observations sur la sécurité routière.
En matière de sécurité routière, les résultats de l'année 1997 ont été décevants : 7 989 tués - soit une baisse de 1,1 % seulement - dont 2 061 jeunes de quinze à vingt-quatre ans.
Les résultats des huit premiers mois de 1998 sont très inquiétants puisque le nombre de tués a augmenté de près de 6 % par rapport à la même période de l'an passé.
Cette dégradation s'explique pour partie par la croissance du trafic résultant de la reprise économique. Mais la vitesse moyenne se maintient à un niveau excessif et elle ne diminue plus depuis plusieurs années : si le nombre d'accidents décroît légèrement, leur gravité a donc tendance à augmenter. L'inertie du comportement des conducteurs neutralise ainsi les efforts qui sont accomplis pour améliorer la sécurité des véhicules et des infrastructures.
Cette inertie traduit malheureusement l'échec des politiques faisant appel à la responsabilité des conducteurs. On ne peut que conclure à la nécessité de revenir à des politiques plus sommaires, mais plus efficaces, fondées aussi sur la contrainte et la répression.
Ces évolutions récentes augurent mal la réalisation de l'objectif ambitieux que le Gouvernement s'est assigné en novembre 1997 : diviser par deux le nombre de tués en cinq ans.
Je regrette, à cet égard, le freinage des projets autoroutiers, ainsi que le délai entre l'annonce des mesures nouvelles, d'une part, et leur traduction budgétaire, législative et réglementaire, d'autre part. Ce décalage brouille la communication de la sécurité routière en donnant aux conducteurs un sentiment temporaire d'impunité. Il réduit la légitimité des nouvelles mesures : « Si c'était efficace, on l'aurait fait plus tôt », pense-t-on. Enfin, il ne peut que démobiliser les agents de l'Etat qui seront chargés de leur mise en oeuvre.
J'en viens maintenant au budget de la sécurité routière.
Les crédits de la sécurité routière augmentent de 4 % en moyens de paiement dans le projet de loi de finances pour 1999. Il convient cependant d'ajouter à ces crédits les dotations aux aménagements locaux de sécurité, qui visent à traiter les zones où les accidents sont particulièrement fréquents et qui relèvent du budget des routes. Ces crédits s'élèvent à 187 millions de francs pour 1999, en augmentation de 1,7 %.
Ces crédits ne retracent toutefois qu'une faible part des efforts de la nation en faveur de la sécurité routière, qui reposent également sur l'implication et les moyens des collectivités locales, de l'éducation nationale, de la gendarmerie, de la police, de la justice, des associations, des sociétés d'autoroutes, etc.
Par exemple, le renforcement des contrôles et des sanctions n'est pleinement efficace que s'il porte effectivement sur les conduites et les tronçons les plus dangereux, ce qui suppose une mobilisation spécifique et des moyens appropriés pour les forces de l'ordre, notamment des radars embarqués.
Il serait donc souhaitable que le Parlement dispose d'une présentation synthétique de l'ensemble des moyens humains et financiers affectés par l'Etat à la prévention et à la sécurité routières.
Le budget de la sécurité routière pour 1999 marque, par ailleurs, une inflexion des priorités en faveur des initiatives locales, des actions en milieu scolaire et de la communication nationale. La délégation interministérielle à la sécurité routière devrait ainsi retrouver son rythme traditionnel de trois campagnes nationales de communication par an, alors que la contraction des crédits avait réduit ce nombre à deux en 1997 et en 1998.
Je me félicite tout particulièrement du développement des actions de sensibilisation des jeunes au code de la route. En effet, ces actions concourent à l'acquisition de comportements civiques et au respect concret de la loi.
Je déplore toutefois l'extrême modestie des crédits destinés à l'évaluation des politiques de sécurité routière, au regard du coût de ces politiques comme de celui des accidents de la route pour la collectivité, que l'on peut estimer à 118 milliards de francs en 1997.
L'évaluation des mesures législatives ou réglementaires en matière de sécurité routière est en effet une condition de leur légitimité et, par là même, de leur efficacité.
En particulier, il ne serait pas rationnel de contraindre les conducteurs à des obligations ou à des dépenses supplémentaires, comme des rendez-vous périodiques de formation continue, sans avoir au préalable réalisé des expérimentations et des évaluations de nature à en prouver l'efficacité.
A tout le moins, je souhaiterais donc à titre personnel que la mise en oeuvre du projet de loi sur la sécurité routière s'accompagne d'une hausse des crédits de communication et d'évaluation de la sécurité routière.
En conclusion, je vous indique, mes chers collègues, que la commission des finances vous propose d'adopter les crédits des routes et de la sécurité routière. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. François Gerbaud, rapporteur pour avis.
M. François Gerbaud, en remplacement de M. Georges Gruillot, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan, pour les routes et les voies navigables. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'année dernière, lors de l'examen des crédits des routes et voies navigables, notre collègue M. Gruillot - que je remplace ici - relevait que le contexte se caractérisait par « de graves incertitudes tant dans le domaine routier que dans le domaine fluvial ». Il ajoutait : « L'avenir du programme de construction d'autoroutes mis en place en 1992 dans le cadre d'un schéma directeur, et accéléré en 1994, reste, à tout le moins, incertain. »
Quelques semaines plus tard, le Sénat décidait de créer une commission d'enquête sur les grandes infrastructures ; j'en rappellerai tout à l'heure les conclusions.
Les crédits budgétaires alloués aux routes, en dépenses ordinaires et crédits de paiement, enregistraient en 1998 une quasi-stabilisation en francs courants, tandis que les crédits inscrits au chapitre routier du fonds d'investissement des transports terrestres et voies navigables, le FITTVN, progressaient de 14,1 % par rapport à l'année précédente.
Il en sera tout autrement en 1999.
Si la sécurité routière est relativement épargnée - cela vient d'être dit - les crédits des routes apparaissent comme largement « sacrifiés » dans le projet de loi de finances pour 1999. La dotation globale dévolue aux routes baissera de près de 5 %.
Les dépenses en capital enregistrent une diminution globale de 6,33 %. Les investissements exécutés par l'Etat passent de 4,23 milliards à 3,76 milliards de francs, soit une baisse de 11,1 %. Les investissements sur la voirie nationale baissent de près de 13 %.
Les crédits dévolus aux routes dans le FITTVN enregistrent une baisse encore supérieure puisqu'elle est de 13,3 %.
Comme paraît éloignée l'année 1993, où le gouvernement d'alors avait souhaité, en dix ans, faire de notre réseau autoroutier le plus important d'Europe par sa longueur !
Certes, devant la commission des affaires économiques, M. le ministre de l'équipement, des transport et du logement a souligné, pour le déplorer, que les contrats de plan routiers Etat-région ne pourraient être exécutés qu'à hauteur de 82 % en moyenne. Il a insisté, il est vrai, sur le fait que l'ensemble des besoins « était loin d'être satisfait dans le domaine routier ».
Il demeure que ces choix de politique budgétaire traduisent le « passage à l'acte » d'une politique dont le Gouvernement, dans son ensemble, n'avait nullement caché les intentions lors de son installation.
Les crédits des routes demandés pour 1999 s'élèvent, en dépenses ordinaires et en crédits de paiement, à 7,010 milliards de francs contre 7,366 milliards de francs dans le budget voté de 1998, soit une baisse de 4,83 %.
Les crédits consacrés à la sécurité routière atteignent, quant à eux, 455 millions de francs pour 1999, soit une augmentation de 4,1 % par rapport à 1997.
Les crédits consacrés aux voies fluviales sont les suivants : 1,6 million de francs sont consacrés aux personnels d'entretien des voies navigables et ports fluviaux, soit un montant inchangé par rapport à 1998 ; 20 millions de francs d'interventions sont affectés à la batellerie, montant, lui aussi, inchangé par rapport à l'année dernière.
La modestie de ces crédits s'explique par l'existence de l'établissement public Voies navigables de France qui bénéficie de ressources propres, soit 593 millions de francs en 1999.
J'évoquerai maintenant le Fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables, le FITTVN, en commençant par le réseau routier.
Les investissements sur le réseau routier national bénéficieraient, en 1999, de 1,590 milliard de francs, soit 48 % des ressources du FITTVN. Ces investissements seraient en réduction de 245 millions de francs par rapport à 1998, soit une baisse de 13,3 %.
Les investissements sur le réseau des voies navigables, quant à eux, devraient bénéficier de 450 millions de francs en 1998 et progresseront donc de 20 millions de francs, soit une hausse de 4,6 %, par rapport à l'exercice précédent. Ils représentent ainsi près de 12 % des emplois du fonds.
Votre rapporteur pour avis ne peut qu'exprimer à nouveau le souhait que le comité de gestion du FITTVN, au sein duquel siègent des membres du Sénat et de l'Assemblée nationale, puisse exercer un véritable pouvoir de contrôle en matière de programmation des dépenses.
Il rappelle que telle était bien l'intention du législateur au moment de la création de ce fonds. Il souligne, enfin, que le FITTVN, toujours dans l'esprit du législateur, avait vocation à être un outil essentiel dans la politique d'aménagement du territoire et surtout pas un « substitut » aux insuffisances budgétaires.
J'en viens maintenant au schéma directeur.
Sur les 9 535 kilomètres d'autoroutes concédées, inscrites au schéma directeur, les sections en service au 31 décembre 1997 représentaient 74,3 % du total prévu et les portions en travaux 11 % du total. Il reste donc à construire 14,7 %.
Au 31 décembre 1997, le schéma des LACRA, les liaisons assurant la continuité du réseau autoroutier à 2 fois 2 voies, n'est réalisé qu'à hauteur de 30,2 %.
Le schéma des grandes liaisons d'aménagement du territoire est, quant à lui, réalisé à hauteur de 27,8 %.
Le volet routier des contrats Etat-région du XIe Plan s'élève à 65,8 milliards de francs, la part de l'Etat s'élevant à 27,4 milliards de francs.
Ces montants comprennent les programmes d'accélération qui concernent, notamment, l'aménagement des trois grands axes interrégionaux que sont la rocade des Estuaires, autoroute gratuite entre Caen, Rennes et Nantes, la route centre Europe Atlantique, entre Mâcon et Chalon, à l'Est, et La Rochelle, à l'Ouest, via Montluçon, Limoges et Angoulême et, enfin, la RN 88 entre Toulouse et Lyon.
L'aménagement de ces axes représente un enjeu capital pour le désenclavement des régions traversées et pour un développement souhaité équilibré du territoire.
Le comité des investissements à caractère économique et social du 30 juin 1998 a arrêté le montant estimé des dépenses d'investissement des sociétés d'économie mixte concessionnaires d'autoroute, en 1999, à 13,350 milliards de francs.
Au 1er février 1998, l'augmentation moyenne des tarifs de péage pour l'ensemble des sociétés d'autoroute a été d'environ 2,3 % pour les véhicules légers et de 3,3 % pour les poids lourds. La hausse moyenne des péages, véhicules légers et poids lourds confondus, est donc de l'ordre de 2,6 %.
Je dirai quelques mots maintenant sur le transport routier.
La situation économique des entreprises du secteur « transport routier de marchandises » s'est améliorée en 1997, avec une hausse du chiffre d'affaires de 4,5 % s'expliquant par l'augmentation des volumes de frêt transporté, accompagnée par un léger relèvement des prix à hauteur de 0,5 %. Le transport routier de marchandises devrait bénéficier de la bonne conjoncture économique de l'année 1998.
J'aborde maintenant la question de la sécurité routière.
Le bilan de l'année 1997 s'établit à 125 202 accidents corporels, à 7 989 tués, à 35 716 blessés graves et à 133 862 blessés légers.
Comme l'année passée, le comportement des conducteurs en matière de respect des vitesses demeure préoccupant, les vitesses pratiquées atteignant toujours un niveau très élevé. Les statistiques permettent de tirer un certain nombre de conclusions.
En premier lieu, l'amélioration de la qualité du réseau permet une diminution du nombre d'accidents, mais elle peut aussi entraîner une augmentation des vitesses pratiquées et donc de la gravité des accidents.
En deuxième lieu, l'augmentation du volume de circulation a une incidence sur la sécurité routière, mais elle diffère selon les réseaux, puisque les autoroutes restent quatre fois plus sûres que les routes.
En troisième lieu, les vitesses, qui sont élévées, demeurent globalement à peu près stables d'une année sur l'autre.
Le facteur « entretien et exploitation de l'infrastructure » intervient dans 24 % des accidents, et cela répond aux propos de M. le ministre relatifs à l'équipement.
J'en viens maintenant aux voies navigables.
Sur l'ensemble de l'exercice 1997, le transport fluvial de marchandises, avec 49,5 millions de tonnes contre 50,7 millions de tonnes en 1996, soit une baisse de 2,4 %, a enregistré une diminution de son activité, en raison des mauvaises conditions climatiques du début de l'année.
On relève un constraste entre la croissance du trafic rhénan-mosellan et la baisse du trafic sur les autres axes.
S'agissant des moyens en personnel, Voies navigables de France dispose de 5 500 agents de l'Etat, répartis dans dix-sept entités régionales ou locales constituées par des services spécialisés de navigation, des services maritimes et de navigation et certaines directions départementales de l'équipement mises à disposition de l'établissement public depuis sa création.
L'activité de Voies navigables de France comporte deux branches. La première assure la gestion du transport par voies navigables, héritée de l'Office national de la navigation ; la seconde, qui est nouvelle, assure l'exploitation, l'entretien et le développement des 6 800 kilomètres du réseau des voies navigables de l'Etat.
Pour 1998, le programme d'investissement devrait connaître une forte augmentation en raison de la hausse de la subvention du FITTVN. Ainsi, environ 629 millions de francs seront principalement affectés à hauteur de 130 millions de francs à la poursuite du développement du réseau et à hauteur de 420 millions de francs à la restauration des canaux et rivières confiés à Voies navigables de France.
Après la décision d'abandonner le projet de liaison fluvial à grand gabarit Rhin-Rhône, deux grands projets subsistent : la liaison Seine-Nord et la liaison Seine-Est.
S'agissant de la liaison Seine-Nord, sur la base des études préliminaires de tracé, une concertation sur le choix d'un fuseau de tracé s'est conclue par un rapport de synthèse remis au mois de juin 1998 au ministre des transports. Ces différentes études sont financées sur les crédits du FITTVN.
S'agissant de la liaison Seine-Est, Voies navigables de France conduit les études de cadrage dont les volets économiques et technico-environnementaux permettront d'éclairer la décision gouvernementale sur l'opportunité du projet. L'achèvement des études est prévu dans les semaines qui viennent. Ces études sont également financées sur les crédits du FITTVN.
En conclusion, je ne pense pas inutile de rappeler quelles furent les quatre principales propositions de la commission d'enquête du Sénat sur les infrastructures terrestres dans le domaine routier.
Premièrement, il conviendrait d'instaurer une véritable procédure de programmation autoroutière, décidée et revue tous les cinq ans par le Parlement, comprenant les trois éléments nécessaires à sa réalisation, à savoir une définition des travaux - construction, réhabilitation - un échéancier des enveloppes d'investissement assorties de modalités de financement.
Deuxièmement, il faudrait définir un concept d'autoroute évolutive à coût réduit, l'autoroute allégée, initialement à deux fois une voie, adapté à une intensité kilométrique inférieure ou égale à 10 000 véhicules par jour.
Troisièmement, il s'agirait de réformer en profondeur le système de financement des autoroutes en établissant le principe de l'autoroute à péage, en transformant les sociétés d'autoroutes en deux véritables entreprises publiques concessionnaires, en adaptant la durée des financements à la durée de vie des infrastructures, en faisant du fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables l'instrument privilégié de l'action de l'Etat sur le réseau non concédé.
Enfin, quatrièmement, il conviendrait d'appliquer les directives européennes comme elles doivent l'être en matière de péage, de TVA et de mise en concurrence régulière des concessions, en défendant toutefois le principe indispensable de la péréquation, au sein du réseau concédé, entre liaisons réalisées et liaisons à construire.
En annonçant, d'une part, que vous négociiez à Bruxelles la possibilité d'allonger la durée des concessions autoroutières et, d'autre part, que le concept d'autoroute évolutive à coût réduit pourrait s'intégrer dans le futur schéma de service, vous avez, monsieur le ministre, fait quelques pas dans notre direction. Nous allons donc faire un petit bout de route avec vous et, même si l'on peut dire, sans mauvais jeu de mots, que le budget des routes est un peu en berne, la commission des affaires économiques et du Plan a décidé de s'en remettre à l'immense sagesse du Sénat. (Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures trente, est reprise à vingt et une heures trente-cinq.)