Séance du 4 décembre 1998







M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons l'examen des dispositions du projet de loi concernant les transports terrestres, les routes et la sécurité routière.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je ne détaillerai pas l'ensemble des budgets des transports terrestres, des routes et de la sécurité routière. Vos rapporteurs l'ont fait en y mettant toute leur conviction et leur talent ; je les en remercie. Je vais m'efforcer de répondre de la manière la plus exhaustive possible aux questions qui m'ont été posées.
Beaucoup de points de vue ont été exprimés ; ils étaient parfois contradictoires. Mais n'est-ce pas là la richesse du débat ? Vos réflexions et vos propositions témoignent en tout cas de l'intérêt que vous portez aux questions de transport et de déplacement.
Le projet de budget pour 1999 traduit les priorités qui ont été affirmées par le Gouvernement au cours des mois écoulés, dans la continuité des inflexions qui avaient déjà été apportées avec le budget de 1998.
Il donne un sens et un contenu à l'intermodalité, aux décisions en faveur du transport ferroviaire et des transports collectifs.
Cette continuité dans les priorités du Gouvernement se traduit nécessairement dans les arbitrages. A la différence de certains, je n'ai pas fait et ne ferai pas d'effets d'annonce. Il y a des secteurs prioritaires dont les crédits augmentent et il y en a d'autres qui subissent, c'est vrai, certaines réductions, l'équipement bénéficiant d'une enveloppe quasi constante, comme je l'ai fait remarquer tout à l'heure.
L'importance de l'investissement pour ce ministère me conduit à évoquer dès maintenant un sujet qui, comme l'ont rappelé MM. Gérard Miquel et François Gerbaud, peut susciter certaines interrogations. Il s'agit de la place des comptes d'affectation spéciale qui complètent les ressources budgétaires proprement dites par des ressources affectées.
Le Fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables, le FITTVN, et le Fonds pour l'aménagement de la région d'Ile-de-France, le FARIF, représentent pour l'Etat près de 5,5 milliards de francs de crédits d'investissement.
Cette année encore, comme l'année dernière, m'a été adressé, notamment par MM. les rapporteurs, le reproche de la « débudgétisation », et je ne veux pas le balayer d'un revers de la main. Il est vrai que les comptes d'affectation spéciale permettent de compenser une certaine perte de substance budgétaire. Mais il est non moins vrai que, si ces comptes n'avaient pas été créés et développés au cours des années quatre-vingt-dix, les dépenses en capital du ministère de l'équipement, des transports et du logement se seraient effondrées.
Ainsi, dans le domaine des transports, les dépenses en capital financées sur le budget général réprésentaient 7,2 milliards de francs de crédits de paiement en 1988. Or c'est exactement la même somme qui est prévue pour 1999. Si l'on tient compte de l'effet de l'inflation, même si celle-ci s'est beaucoup réduite en douze ans, c'est bien d'une diminution sévère en francs constants qu'il s'agit. La part des dépenses en capital dans le total du budget est ainsi passée de 6,6 % en 1988 à 5 % en 1999.
En revanche, si l'on prend en compte l'apport des comptes d'affectation spéciale - un peu plus de 4,6 milliards de francs actuellement sur les seules dépenses de transport - l'évolution redevient favorable et la part des dépenses en capital passe alors à 8,4 % en 1999.
On perçoit ainsi tout l'intérêt qu'il faut porter à ces ressources affectées, qui préservent notre capacité d'intervention.
Et il ne s'agit pas d'une astuce, car les comptes d'affectation spéciale font partie intégrante du budget de l'Etat. Le Conseil constitutionnel a eu, à plusieurs reprises, l'occasion de le rappeler.
J'ajoute qu'il s'agit d'un outil budgétaire qui peut aider à atteindre l'objectif de l'intermodalité, auquel beaucoup d'entre vous sont attachés. Il permet de régler le « curseur » plus facilement qu'en conférence budgétaire, pour donner, par exemple, la priorité au transport ferroviaire et au transport combiné.
Ainsi, sur un volume d'un peu plus de 3,9 milliards de francs en 1999, la part du secteur ferroviaire dans le total du FITTVN, soit 1 890 millions de francs, passera de 42 % en 1998 à plus de 48 % en 1999.
Enfin, le comité de gestion du FITTVN, dont M. Marini, rapporteur général, et M. François-Poncet, président de la commission des affaires économiques, sont d'ailleurs membres, permet aux parlementaires d'être associés aux principales orientations.
Je vous rappelle, monsieur Gerbaud, que, le compte d'affectation spéciale faisant partie du budget de l'Etat, son contrôle est normalement assuré dans ce cadre.
Je rappelle aussi que, suivant le souhait du Sénat, j'ai personnellement demandé que le comité de gestion se réunisse plus fréquemment et devienne un lieu de plus grande concertation.
Monsieur Miquel, vous craignez que la taxe d'aménagement du territoire, de quatre centimes par kilomètre, qu'on appelle aussi la « taxe Pasqua », perçue sur les péages autoroutiers au profit du FITTVN, n'ait des effets négatifs sur l'usage des autoroutes et donc sur la sécurité routière dans la mesure où, comme vous l'avez rappelé, la sécurité est en général mieux garantie sur les autoroutes que sur les autres routes.
Je peux vous rassurer : l'instauration, puis le doublement de la taxe Pasqua se sont certes traduits par des hausses des péages, mais celles-ci ont été étalées sur quatre ans. Cela ne me semble donc pas de nature à dissuader les usagers d'emprunter l'autoroute.
Ce qui les dissuade, c'est plutôt l'existence d'une route bien aménagée ou à deux fois deux voies desservant le même itinéraire et parallèle à l'autoroute.
S'agissant maintenant du FARIF, nous avons eu cette année à résoudre une difficulté particulière du fait du transfert à la région d'Ile-de-France d'une partie des ressources de ce fonds. Ce transfert était programmé, mais il n'en demeure pas moins qu'il entraînait, pour l'Etat, une réduction de ses moyens d'intervention.
Le Gouvernement a donc décidé de proposer de compenser les pertes de recettes pour l'Etat de manière à préserver durablement sa capacité d'intervention. Pour cela, il a été décidé d'accroître de 10 % en 1999 le tarif de la taxe sur les bureaux et d'en étendre l'assiette à certains locaux commerciaux et de stockage.
Il est en effet logique, me semble-t-il, de demander les ressources nouvelles nécessaires aux contribuables franciliens ; cela correspond à une demande qui m'a souvent d'ailleurs été faite en province.
Toutefois, ce n'est pas la seule raison qui m'a incité à faire cette proposition. Il y a aussi le fait que les infrastructures routières et ferroviaires, les transports collectifs qui existent en Ile-de-France constituent indiscutablement des atouts pour différentes activités économiques, y compris le commerce et le stockage, qui sont implantées dans cette région. Dès lors, il est légitime de les solliciter davantage.
Comme vous le savez, ce dispositif a suscité un certain nombre de critiques. Je ne peux donc rester sans réagir, même s'il y a quelque contradiction à vouloir à la fois que l'Etat finance des routes, des transports collectifs et des lignes à grande vitesse et, en même temps, qu'il réduise les moyens qui lui permettent de réaliser ces investissements. Il faut avoir un discours politique cohérent !
De la même façon, je ne peux m'empêcher de relever une certaine contradiction dans la proposition souvent réitérée - en particulier par M. Cazalet - de réduire les dépenses de fonctionnement au profit de l'investissement ; à moins que l'on ne se résigne à laisser se dégrader les infrastructures existantes et la sécurité de leur utilisation, mais je ne pense pas que ce soit votre propos, monsieur le rapporteur spécial. En fait, les investissements suscitent mécaniquement de nouveaux besoins d'entretien et donc une augmentation des dépenses de fonctionnement.
Comme Christian Sautter l'a d'ailleurs précisé à l'Assemblée nationale, nous améliorerons le dispositif du FARIF en nouvelle lecture. Je puis vous dire que nous allégerons la taxation pesant sur les locaux commerciaux et de stockage qui avait été envisagée, tout en confirmant le principe de cette extension d'assiette.
Mesdames, messieurs les sénateurs, le budget des transports terrestres est le plus gros budget. Il retrace en particulier les interventions en faveur des entreprises publiques de transport - SNCF, RFF, Syndicat des transports parisiens - certaines mesures sociales en faveur des transports routiers et les aides aux investissements de transport collectif. Il s'élève, en moyens d'engagement ou de paiement, à plus de 60 milliards de francs.
Vous le savez, je suis très attaché au développement du service public du transport ferroviaire.
Le transport ferroviaire présente de multiples atouts en termes de sécurité et de respect de l'environnement. Je suis convaincu qu'il faut assurer les conditions de son développement et de son renouveau. J'ai cru comprendre que cette conviction était partagée par nombre d'entre vous.
Pour ce qui concerne les infrastructures ferroviaires, le Gouvernement a fixé de nouvelles orientations pour assurer la poursuite maîtrisée du programme de nouvelles lignes à grande vitesse et, en même temps, la modernisation du réseau de lignes classiques, dans une optique d'aménagement du territoire, au travers des contrats de plan, ainsi que plusieurs orateurs l'ont d'ailleurs relevé. Il me paraît, en effet, important d'engager une politique plus ample que celle qui ne consisterait qu'à réaliser des lignes à grande vitesse.
Dans cette perspective, il a été décidé, le 4 février dernier, d'augmenter fortement la participation de l'Etat au financement des infrastructures ferroviaires. C'est ainsi qu'il est prévu de faire passer de 1 635 millions de francs en 1998 à 1 890 millions de francs en 1999 - soit une augmentation de plus de 15 % - les crédits du FITTVN aux investissements en matière de transport ferroviaire et de transports combinés.
Sur cette enveloppe, 400 millions de francs devraient être attribués au réseau classique en 1999, ce qui constitue une étape vers l'objectif de plus de 500 millions de francs annoncés pour le prochain contrat de Plan.
Un des intervenants a souligné que cette somme était peu élevée. Je tiens à lui faire observer qu'elle était de 270 millions de francs lorsque j'ai pris mes fonctions. Elle n'est donc peut-être pas encore suffisamment élevée, mais elle a enregistré un quasi-doublement.
S'agissant du TGV Méditerranée, les travaux seront poursuivis au rythme nécessaire à sa mise en service en 2001 sur Marseille et Nîmes.
MM. Hoeffel et Ostermann m'ont interrogé sur la réalisation du TGV Est européen. Monsieur Hoeffel - permettez-moi d'insister sur ce point - n'oublions jamais de dire « TGV Est européen ». Au départ, vous l'aviez omis. En effet, il faut reconnaître sa véritable dimension européenne à cette ligne de TGV.
Je ne partage pas votre inquiétude, pour ne pas dire votre scepticisme, monsieur Hoeffel. Le Gouvernement a pris la décision, le 4 février dernier, de mettre en chantier ce TGV, parce qu'il croit à l'utilité de ce projet. Il a également pris la décision de doubler la subvention de l'Etat. Vous le voyez, je suis modeste, car je pourrais dire que la participation de l'Etat a plus que doublé, puisqu'elle est passée de 3,7 milliards de francs à 8 milliards de francs.
Les décisions qui ont été prises ne permettront pas, dites-vous, de mener à bien la réalisation de ce TGV. Mais celles qui l'avaient été auparavant ne le permettaient certainement pas.
Puisque vous voulez des réponses précises, je vous annonce que j'attends, d'ici à la fin de l'année, des propositions concernant la convention de financement. Le calendrier est et sera respecté, monsieur Ostermann.
Ce projet figure parmi les quatorze projets qui ont été reconnus prioritaires dans le domaine des transports et qui bénéficient, à ce titre, de subventions européennes.
Je me bats afin que la part des subventions européennes soit accrue pour la période 2000-2004.
Je puis vous dire que les études d'avant-projet détaillé, APD, vont démarrer. Le protocole de réalisation et de financement, qui a été signé, le 24 février dernier, par Réseau ferré de France, la SNCF et les collectivités locales, concerne l'ensemble du tracé déclaré d'utilité publique.
La détermination des emprises concernées par le projet de TGV ne pourra intervenir qu'à l'issue de l'APD, c'est-à-dire à l'automne 2000. Ce n'est donc qu'à partir de cette échéance qu'il sera possible d'envisager un projet de remembrement définitif.
Quant aux acquisitions de terrains, je vous le confirme, monsieur Hoeffel, elles auront lieu sur l'emprise de la première phrase et sur le reste de l'emprise, sur mise en demeure ou en raison d'opportunité.
Vous m'avez également interrogé, monsieur Hoeffel, sur le pont de chemin de fer entre Strasbourg et Kehl. Vous savez que sa modernisation est comprise dans la première étape du projet de TGV Est européen, avec la construction d'un deuxième tablier où il sera possible de circuler à 160 kilomètres à l'heure.
Des contacts ont été pris avec le ministère des transports allemand en vue de l'établissement d'une convention, qui prendra la forme d'un traité franco-allemand ratifié par une loi, sur les études à réaliser et le financement.
Monsieur Berchet, vous m'avez interrogé sur l'état d'avancement du TGV Tours-Bordeaux et du TGV Montpellier-Barcelone.
Les études préliminaires du TGV Aquitaine devant aboutir au choix d'un fuseau sont en cours. Les études proprement dites se sont déroulées jusqu'à l'automne 1998. Sur la base de ces études, une consultation des collectivités locales, des acteurs socio-économiques et des associations a été lancée en octobre 1998 et se poursuivra jusqu'à la fin de l'année.
A l'issue de la consultation, le préfet coordonnateur me transmettra le bilan de la consultation et son avis sur les choix à effectuer, notamment en matière de phasage.
Pour la partie internationale du TGV franco-espagnol entre Perpignan et Figueras, les études préalables à l'enquête publique sont en voie d'achèvement. Mon homologue espagnol et moi-même avons rappelé publiquement, lors du sommet de La Rochelle, notre attachement au projet et notre volonté de tenir les délais. Nos propos ont d'ailleurs été repris par le chef du Gouvernement espagnol et par le Premier ministre, Lionel Jospin.
La commission intergouvernementale franco-espagnole est désormais constituée et va se réunir pour la première fois la semaine prochaine.
Pour la partie française, à savoir Nîmes-Perpignan, il a été demandé à RFF de présenter ses propositions dans les meilleurs délais. Celles-ci devraient notamment porter sur l'amélioration des capacités, par la réalisation de contournements au droit de Nîmes et de Montpellier.
L'un de vos rapporteurs a soulevé la question des relations transeuropéennes. Nous étudions actuellement, avec nos amis suisses, la possibilité de réalisations importantes. Il s'agit des lignes Paris-Genève via Bourg-en-Bresse, de Paris-Lausanne via Dôle, mais aussi de Paris-Bâle.
Vous concevez les perspectives que ces trois axes peuvent nous ouvrir, surtout à la suite des choix que vient de faire par référendum le peuple suisse !
Monsieur Berchet, vous avez également évoqué la question de la ligne Paris-Bâle. Conscient de l'intérêt de cette ligne pour l'aménagement et le développement du territoire, il m'est apparu nécessaire d'entreprendre un programme d'amélioration des services et des matériels en circulation.
Cette amélioration est engagée depuis septembre 1997 et sera poursuivie. Un matériel « Corail rénové » circule désormais sur la ligne. De plus, la mise en service de nouveaux matériels TER est en cours d'examen entre la région Champagne-Ardenne et la SNCF.
L'amélioration de la ligne réside non pas obligatoirement dans une électrification, très coûteuse dans le cas de la ligne Paris-Bâle, mais plutôt dans des améliorations de services, telles que la régularité, la fréquence et les matériels qui viennent d'être évoqués.
Concernant la ligne Bourg-en-Bresse-Genève, j'ai demandé à RFF et à la SNCF d'étudier la réalisation d'une desserte TGV entre Paris et Genève en rouvrant la ligne à voie unique entre Bourg-en-Bresse et Genève. Pourquoi vous dis-je cela ? Cette ligne est actuellement fermée. Ainsi, si j'avais écouté ceux qui me demandaient de vendre une partie du patrimoine inutilisé de l'entreprise, je n'aurais pas pu proposer la réouverture de cette ligne-là. Cette option très pertinente intéresse les autorités fédérales et cantonales suisses qui se sont déclarées prêtes à participer au financement.
Monsieur Gerbaud, vous m'avez interrogé sur le projet de modernisation de la ligne Paris-Orléans-Vierzon-Limoges-Brive-Toulouse. Ce projet sera bientôt examiné lors des discussions préparatoires au contrat de plan Etat-régions, ce qui permettrait de mobiliser les crédits d'une première tranche de travaux, que j'avais annoncée en février 1998, à hauteur de 200 millions de francs.
Monsieur Berchet, j'ai bien noté l'intérêt que vous portiez au projet de transport combiné à Chalindrey, qui fait actuellement l'objet d'études pour apprécier le potentiel d'activité.
Quant au SERNAM, un plan de restructuration a été mis en place afin de mieux satisfaire les attentes de ses clients et d'adapter son outil de production.
Les années 1998 et 1999 doivent être considérées comme des années de mobilisation et de transition, permettant d'examiner les différentes orientations possibles pour l'avenir.
Vous le savez, j'ai souhaité, après le désendettement supplémentaire de la SNCF, renforcer l'efficacité, l'unicité et la pérennité du service public ferroviaire.
Trois objectifs principaux ont été fixés. Le premier vise, dans un premier temps, à la stabilisation de la situation financière de RFF parce que nous étions repartis dans une spirale d'endettement, voire de surendettement, il fallait donc enrayer cette spirale.
Le deuxième objectif concerne le renforcement de l'unicité du service public ferroviaire, qui risquait d'être mis en cause, compte tenu des pressions exercées à l'échelon européen.
Enfin, le troisième objectif tend à renouer avec une politique d'emploi plus dynamique en restaurant, notamment, le dialogue social. Tels sont les trois volets de la réforme que je me suis fixés.
Les deux premiers objectifs sont bien engagés. Le troisième pose encore, comme vous le savez, de nombreuses difficultés.
Je considère que la stabilisation de la situation financière de RFF, qui n'était pas assurée lorsque nous sommes arrivés au Gouvernement, est indispensable pour la pérennité du système ferroviaire. Le Gouvernement a donc décidé de poursuivre et d'amplifier les efforts entrepris en ce sens en 1997 et en 1998, en consacrant à la stabilisation de la dette de RFF 12,5 milliards de francs en 1999, et non 13 milliards de francs compte tenu des problèmes de péage, puis 12 milliards de francs en 2000 et en 2001, soit 36,5 milliards de francs sur trois ans. Nous sommes loin des 8 milliards de francs que nous avions trouvés en 1997. Il s'agit donc d'un changement par rapport à la situation antérieure.
Vous avez regretté, monsieur Cazalet, que ces efforts suffisent à peine à régler les problèmes financiers récurrents et le passif, au détriment des investissements de développement. Sachez bien que je le regrette également, mais il s'agit de la situation que j'ai trouvée à mon arrivée. Je suis donc dans l'obligation d'assurer le financement de ce qui n'a pas été financé par mes prédécesseurs.
Pour renforcer l'unicité du système public ferroviaire, j'ai proposé la création d'un conseil supérieur du service public ferroviaire. Ce conseil ne jouera pas seulement le rôle d'un observatoire comme certains l'ont dit. Il sera notamment chargé de veiller à l'évolution équilibrée du secteur, au respect des missions de service public de la SNCF et de RFF et à la cohérence de la mise en oeuvre par ces deux établissements des orientations fixées par le Gouvernement et par la nation.
Ce conseil sera également chargé d'effectuer une évaluation de la réforme à l'issue d'une période de trois ans.
Le projet de décret sera très prochainement transmis au Conseil d'Etat afin que ce conseil puisse être opérationnel dès 1999 et si nos propositions sont acceptées, des représentants du Sénat et de l'Assemblée nationale siégeront en son sein.
Le troisième volet est le plus difficile à faire avancer. Il s'agit du dialogue social au sein de l'entreprise. Le développement du transport ferroviaire ne se fera pas sans la mobilisation des hommes et des femmes de la SNCF, dont dépendent les progrès nécessaires en matière d'efficacité économique et sociale. L'infléchissement engagé depuis 1997 en matière d'évolution des effectifs, ainsi que les garanties que j'ai données sur le statut des cheminots vont dans le sens d'une évolution positive du dialogue social.
Les voies du dialogue social et de la négociation ne sont pas fermées. C'est cette voie que le Gouvernement a choisie. Il est clair qu'on ne touchera pas au droit de grève. Toute tentative dans cette direction est d'ailleurs condamnée à l'échec.
Plusieurs d'entre vous, M. Lefebvre notamment, ont soulevé cette question. Je n'ai pas envie de la traiter sur un ton polémique. D'ailleurs, je constate que le Président de la République et le Gouvernement disent vouloir défendre le droit de grève. Ensuite, est évoquée la prévention nécessaire des conflits sociaux. Je rappelle que, à de nombreuses occasions, ma ligne de conduite a consisté à privilégier le dialogue social au conflit social. Sauf à interdire le droit de grève à certaines heures de la journée, je ne vois vraiment pas de quoi on parle lorsque l'on propose un service mininum dans les transports. Cela reviendrait, en fait, à une interdiction. M. Gallois, président de la SNCF, affirmait, voilà quelque temps, que ce n'était pas adapté.
Il n'est d'ailleurs pas le seul à le penser. En effet, quand la majorité actuelle du Sénat était majoritaire dans le pays et notamment à l'Assemblée nationale où elle détenait une majorité écrasante, et alors que nous avons connu l'une des plus grandes grèves de tous les temps à la SNCF, elle n'a pas mis en place le service minimum. Il doit y avoir quelque raison. En tout cas ce n'est pas notre démarche. Mais je vous l'ai dit, je ne veux pas polémiquer.
Le dialogue social doit l'emporter sur le conflit. S'agissant du développement du rail, des ruptures réelles sont intervenues par rapport aux situations passées. Depuis 1997, il existe une volonté politique de développer le transport ferroviaire.
Aussi, je vous le dis : je n'hésite pas un seul instant, comme je l'ai fait lors de tous les conflits, y compris le conflit des routiers ou le conflit d'Air France, à en appeller à la responsabilité de chacune et de chacun.
Je sais ce que coûtent les conflis actuels aux usagers et à l'entreprise. Je sais ce que la grève coûte aux cheminots, d'abord sur le plan financier, mais aussi parce que ceux qui ne rêvent que de libéralisme et de réduction du secteur public y puisent beaucoup d'arguments et de force. Nous devons, au contraire, démontrer l'efficacité du secteur public.
Voilà ce que je voulais dire à cet égard puisque plusieurs orateurs, notamment M. Lefebvre, m'ont interrogé sur ce point.
L'ouverture de la négociation sur la réduction du temps de travail à la SNCF, avec la table ronde annoncée pour le 14 décembre, peut être un moment exceptionnel de réflexion sur l'organisation du travail dans l'entreprise, l'efficacité et l'emploi. Elle peut déboucher sur un nouveau type de dialogue social permettant un règlement plus souvent négocié en amont des risques de conflit social.
Je fais confiance à tous pour savoir prendre toute la mesure des changements d'orientation de ce gouvernement, et je sais qu'ils ne gâcheront pas la chance qui leur est offerte de démontrer ce que peut faire une entreprise publique en termes de qualité et de performances.
En ce qui concerne la régionalisation des services ferroviaires, les rapporteurs MM. Cazalet et Berchet se sont demandé si elle permettrait de garantir l'équilibre des territoires. Je dois préciser que cette régionalisation, qui doit être bugétairement neutre pour les régions, se fait en intégrant le souci d'équilibre des territoires, et donc la densité de population des différentes régions. C'est d'ailleurs ce qui permet une tarification identique pour tous les clients, quels que soient les régions ou le taux d'occupation des trains.
Vous m'avez également interrogé sur mes orientations européennes. Vous connaissez ma position quant à la libéralisation du transport ferroviaire. J'agis contre cette libéralisation. En effet, je ne suis pas convaincu que l'ouverture à la concurrence intramodale soit de nature à permettre au transport ferroviaire de se développer réellement et durablement sur l'ensemble du territoire.
Je sais que je partage cette préoccupation avec nombre d'entre vous, notamment MM. Berchet, Teston et Bellanger, qui se disaient inquiets des effets que pourrait avoir la dérégulation ferroviaire sur la cohésion du territoire national.
Cette position, que je défends à l'échelon européen, est pour l'instant minoritaire, mais, si je me réfère aux propos de mes collègues européens, l'absence de majorité qualifiée pour faire avancer les projets de nouvelles directives me conduit à penser que les positions des uns et des autres peuvent empêcher pendant quelque temps la mise en oeuvre des propositions de la Commission. Je ne désespère cependant pas de l'emporter.
A l'heure actuelle, la Belgique, le Luxembourg et la France partagent la même position. Certes, cela ne suffit pas à constituer une minorité de blocage. J'essaie de faire progresser notre point de vue au niveau européen lors des contacts que j'ai à l'échelon européen. Aujourd'hui, nos collègues espagnols considèrent, comme nous, qu'il serait anormal d'imposer à un pays quel qu'il soit une libéralisation dont il ne voudrait pas.
A cet égard, ma position est simple : ceux qui veulent libéraliser libéralisent. D'ailleurs, cela ne résussit pas obligatoirement ; j'en veux pour preuve l'exemple de la Grande-Bretagne. Récemment, le ministre britannique des transports a dit que, depuis la privatisation, la situation des chemins de fer anglais est une honte nationale. Après tout, chacun fait ce qu'il veut et on ne peut imposer à un pays ou à un autre d'aller au-delà de la directive 91-440. Nous sommes en train de marquer des points et nos partenaires italiens partagent cette appréciation, nous en avions discuté et avions fait une déclaration commune à ce sujet, ce qui nous amène d'ailleurs à la minorité de blocage. Mais on peut aller plus loin. Nous marquerons d'autant plus de points si nous ne nous cantonnons pas sur cette position et si nous jouons la cate du développement du transport ferroviaire à l'échelon européen.
Il ne s'agit pas simplement de dire : « Non, on ne veut pas ça ! » En effet, il faut développer le transport ferroviaire à l'échelle européenne. Nous devons notamment nous attaquer à des problèmes réels.
On m'a demandé ce qui s'était passé lors de la dernière réunion des ministres des transports européens. La presse en a rendu compte, des dépêches ont été publiées. Lors de cette réunion, j'ai agi, j'ai parlé et d'ailleurs un plus grand accord s'est fait jour entre les ministres des transports pour développer, au-delà d'une simple coopération, des efforts en matière d'interopérabilité, d'harmonisation technique, normative, administrative, de simplification des procédures, de mise en place d'infrastructures de qualité capables de soutenir l'essor du trafic européen, notamment le fret.
Plusieurs d'entre vous, notamment MM. Cazalet et Lefebvre, ont évoqué la question des péages ferroviaires. M. Lefebvre s'est inquiété du prix des péages. M. Cazalet estime que les 6 milliards de francs acquittés par la SNCF jusqu'en 1998 étaient insuffisants. M. Gerbaud, quant à lui, a évoqué des chiffres bien plus élevés.
Je partage l'opinion selon laquelle il fallait relever le prix des péages. Vous le savez, je viens de conclure une négociation, d'ailleurs difficile, qui permet de porter le montant des péages à 8,1 milliards de francs en 1999 pour atteindre 9 milliards de francs en 2001.
Je tiens d'abord à rappeler que le montant de 6 milliards de francs avait été arrêté par un décret pris par mon prédécesseur en mai 1995.
Dans son rapport, M. Cazalet reconstitue de façon très précise les dispositions retenues en matière de péage. Il souligne les difficultés éprouvées par le Parlement pour s'y retrouver. Permettez-moi, monsieur le rapporteur, de partager votre sentiment et de regretter cette situation qui s'explique uniquement par un bouclage interministériel tardif de ce dossier, qui vous le savez, est délicat.
La solution retenue, qui a été qualifiée à plusieurs reprises de solution équilibrée et même intelligente, est bien celle que vous avez décrite. J'en profite pour vous confirmer que 300 millions de francs sont inscrits dans le collectif pour 1998, qui est en cours de discussion. Cette somme va concourir à améliorer la capacité contributive de la SNCF, tout en anticipant sur la généralisation des services régionaux de voyageurs, si tel est l'objectif fixé à l'issue de l'expérimentation.
Le développement des transports collectifs constitue une autre de mes priorités.
En ce qui concerne la province, le cap a été tenu : en dix-huit mois, j'ai signé onze décisions de prise en considération de projets de transports collectifs en site propre : tramways à Nantes, Saint-Etienne, Lyon, Valenciennes, Bordeaux, Caen, Nancy, La Seyne-sur-Mer, Toulon ; bus en site propre à Saint-Denis-de-la-Réunion, Rennes et Maubeuge. Au total, cela représente plus de 122 kilomètres de voies nouvelles. Au cours de l'été, les projets de Nantes, d'Orléans, de Strasbourg et de Lyon ont été déclarés d'utilité publique.
Le projet de budget que je vous présente répond à cette priorité avec une dotation qui atteindra, comme vous l'avez souligné, messieurs les rapporteurs, 719,5 millions de francs en autorisations de programme, soit une augmentation de 11 % par rapport à 1998, dotation qui elle-même était supérieure de 11 % à la dotation de 1997. Il s'agit déjà d'une évolution quantitative importante. En crédits de paiement, l'augmentation est même de 40 % entre 1997 et 1999.
Ces moyens supplémentaires permettront d'honorer les engagements de l'Etat sur les projets déjà engagés et de lancer, en fonction de leur état d'avancement, les nouvelles opérations que je viens de citer.
Dans la région d'Ile-de-France, les aides aux investissements atteindront, avec les moyens dégagés sur le FARIF, 345 millions de francs. MM. Plancade et Lefebvre se sont préoccupés de l'augmentation de la TIPP sur le gazole, qui pourrait pénaliser les transports collectifs. Ce point ne m'a pas échappé.
Certaines propositions favorables au transport collectif n'ont pas été retenues. Rien n'interdisait cependant au Parlement, notamment au Sénat, de faire des propositions lors de l'examen de la première partie du présent projet de loi de finances. Par ailleurs et surtout, je rappelle que le prix du gazole à la pompe a fortement baissé. Le prix du baril est actuellement de 12 dollars, alors qu'il dépassait 30 dollars à la fin des années soixante-dix. Certains peuvent déplorer cette baisse, mais elle profite aux entreprises de transports de voyageurs.
Je ne reviendrai pas sur le transport routier de marchandises, car c'est un sujet sur lequel nous avons eu souvent l'occasion de débattre.
J'aborderai cependant la question de la libéralisation du cabotage au niveau européen, puisque M. Lefebvre m'a interrogé sur ce point. Cette libéralisation est survenue en effet sans que l'harmonisation sociale soit obtenue.
Je suis intervenu à tous les conseils des ministres européens sans exception pour rappeler la position de la France. Nous avons voulu laisser les partenaires sociaux au niveau européen rechercher un accord, et je ne vous cache pas que ma déception a été grande d'apprendre, le 30 septembre dernier, l'échec des négociations.
Je pense qu'il y avait là une occasion historique à saisir, mais cet accord était impossible dès lors qu'une partie du patronat européen exigeait un niveau de dérogations vidant l'accord de son contenu. La dérogation devenait la règle, et il n'y avait donc pas d'harmonisation sociale.
Au conseil des ministres européens du 1er octobre, j'ai demandé à M. Kinnock de respecter son engagement d'élaborer dans les meilleurs délais une directive sur le temps de travail. Nous allons examiner avec la profession la première version du projet de directive que la commission vient de nous faire parvenir.
M. Lefebvre a posé la question du bilan de la loi du 7 février 1998 visant à assainir l'exercice de la profession de transporteur routier. Mes services préparent actuellement ce bilan, que je serai prochainement en mesure de transmettre au Parlement.
M. Ostermann m'a interrogé sur le chronotachygraphe, qui a fait l'objet d'une directive antérieure à mon entrée en fonctions. Je n'ai pas tous les éléments précis en mémoire. Je peux néanmoins vous dire que des appareils neufs doivent être mis en place au fur et à mesure des remplacements et qu'un délai limite a été fixé.
Je tiens enfin à souligner l'importance du transport combiné dans le développement du transport de marchandises et la reconquête de parts de marché pour le fret ferroviaire.
J'ai d'ailleurs confié au président du Conseil national des transports, M. Perrod, une mission de réflexion sur le développement du transport combiné. Mes services examinent attentivement les douze propositions qu'il a faites.
D'ores et déjà, les crédits prévus au titre du FITTVN seront augmentés de 10 % en 1999 et permettront de soutenir davantage les opérateurs pour l'aménagement de plates-formes. Il a ainsi été décidé de soutenir trois chantiers en 1998 : Vaires-sur-Marne, Hourcade et Avignon.
Enfin, pour en terminer avec les transports terrestres, je voudrais souligner l'intérêt que je porte à une relance de l'utilisation de la voie d'eau, et donc à la mise en valeur du potentiel du transport fluvial.
La dotation au titre du FITTVN sera une nouvelle fois augmentée et portée à 450 millions de francs, au lieu de 430 millions de francs en 1998 et 350 millions de francs en 1997. Elle permettra d'accroître les efforts en faveur du réseau navigable, efforts qui concerneront tout particulièrement la restauration du réseau existant - il en a bien besoin, comme l'a souligné M. Fatous ! - notamment les voies présentant un fort enjeu pour le transport de marchandises et la navigation de plaisance.
L'autre volet de la politique que je poursuis en matière fluviale est l'accompagnement de la modernisation de la profession, en particulier dans la perspective, désormais proche, de la fin du tour de rôle au niveau européen. Cela passe par le renforcement de l'organisation commerciale, à travers la constitution de groupements et l'aide à la modernisation de la flotte.
Par ailleurs, s'agissant du projet Seine-Nord, la consultation publique très riche sur le tracé de la partie centrale a montré la grande diversité des points de vues, les positions favorables, mais aussi les interrogations.
A la suite du rapport de conclusion établi par le préfet coordonnateur, des compléments d'études sur les aspects socio-économiques et sur les segments Sud - vallée de l'Oise aval - et Nord - canal Dunkerque-Escaut - ont semblé nécessaires et sont en cours pour démontrer la grande utilité et l'efficacité de cette infrastructure.
C'est en fonction de ces différents éléments que nous pourrons prendre, au début de 1999, les décisions les plus pertinentes en matière de développement du transport intermodal vers la voie navigable, dans le cadre de l'élaboration des schémas de service. Dans cette perspective, j'ai demandé à mes services de veiller tout particulièrement à l'environnement et à la prévention des risques d'inondation. J'ai également voulu que soient correctement pris en compte les intérêts socio-économiques et environnementaux des deux débouchés naturels que sont, je le répète, l'Oise aval et le canal Dunkerque-Escaut.
Avant d'aborder la question des infrastructures routières, je voudrais souligner les arbitrages que j'ai souhaité faire au bénéfice de la sécurité dans les transports.
C'est un enjeu pour les entreprises de transport pour lesquelles elle constitue tout autant un baromètre de l'activité et de la qualité des services rendus à l'usager qu'un facteur de croissance qui influe sur les résultats.
C'est un enjeu, une préoccupation de chaque instant pour le ministre des transports et pour les entreprises publiques.
C'est aussi un enjeu particulièrement fragile et sensible - vous l'avez tous constaté voilà maintenant quelques semaines - face aux problèmes de violence, aux agressions et aux incivilités dont peuvent être l'objet les agents des entreprises de transports et les usagers.
La mise en oeuvre des douze mesures pour la prévention et la sécurité dans les transports de voyageurs annoncées l'an passé a été accélérée pour réagir à ces agressions et pour développer l'humanisation des réseaux, qui joue un rôle décisif pour la prévention.
A cet effet, des redéploiements d'effectifs ont été décidés tant sur les réseaux SNCF que sur le réseau RATP, notamment dans les bus. Cela permettra d'ouvrir, dès 1999, 100 gares supplémentaires au-delà de vingt heures en Ile-de-France et de renforcer l'accompagnement à bord des trains ainsi que l'accueil en gare.
Plus de 1 500 emplois-jeunes seront créés en trois ans - 400 à la SNCF et un peu plus de 1 000 à la RATP - afin de renforcer très rapidement les fonctions de médiation, notamment dans les bus.
Les effectifs de police seront renforcés et portés à 900 sur les réseaux de la SNCF et de la RATP, et douze bureaux de police seront ouverts dans les gares de banlieue en 1999.
En province, l'effort accompli par l'Etat en 1998, en partenariat avec les collectivités locales, sera reconduit. Ainsi, en 1999, j'ai proposé d'affecter 50 millions de francs aux dépenses de sécurité, ce qui permet de prendre en charge 50 % des coûts des équipements.
Il nous a été parfois reproché de faire plus pour la région parisienne que pour la province : j'indique donc que 350 millions seront consacrés à la région parisienne, et 300 millions au total à la province, dont 150 millions de participation de l'Etat. On voit bien qu'il s'agit là d'efforts comparables.
Enfin, des dispositions législatives sont prévues afin d'aggraver les sanctions pour atteinte aux agents des entreprises de transport public. A cet effet, un amendement du Gouvernement sera déposé la semaine prochaine à l'Assemblée nationale lors de l'examen du projet de loi sur la sécurité routière.
Je voudrais terminer cette revue du projet de budget des transports par les infrastructures routières.
Ma priorité dans ce domaine, comme dans les autres, est bien sûr le développement du réseau, mais c'est d'abord la sécurité.
La sécurité sur les routes, c'est, d'une part, les missions de la délégation à la sécurité routière et, d'autre part, la mise en sécurité des infrastructures routières.
Comme cela a été souligné, le budget de la sécurité routière pour 1999 est en nette augmentation par rapport à celui de 1998 : plus 4 % environ en moyens de paiement et d'engagement.
Ce budget permettra notamment d'assurer la gestion du parc des équipements d'information routière, le fonctionnement des centres d'information routière et le renouvellement d'une partie du matériel dédié à la sécurité routière. Il permettra aussi la mise en place des grands systèmes d'exploitation inscrits aux contrats Etat-région, comme Coraly à Lyon et Marius à Marseille.
Bien évidemment, les politiques d'incitation à la sécurité routière, menées au plan local - M. Plasait a ainsi cité la feria de Dax - seront poursuivies.
Mais la sécurité routière, c'est aussi beaucoup plus qu'un budget. Au risque de me répéter, je dirai que, chaque année, la route tue plus de 8 000 personnes en France ; le risque d'être tué sur la route est deux fois plus élevé en France qu'en Grande-Bretagne et dans d'autres pays européens. Les derniers chiffres sont à ce titre particulièrement préoccupants, comme l'ont rappelé MM. Plasait et Miquel. Ils montrent que l'effort de la collectivité tend à se relâcher, et qu'il faut donc le renforcer.
Je vous rappelle, monsieur Plasait, qu'il n'y avait pas eu de comité interministériel de la sécurité routière depuis 1993 ou 1994. Et encore, il avait fallu, pour que ce comité se réunisse, qu'un terrible accident causant une dizaine de morts se produise.
Une véritable dynamique est à relancer. Il faut que chacun prenne conscience du fait que la conduite est un acte privé, mais aussi un acte social.
Un nouveau comité interministériel de la sécurité routière, après celui qui a eu lieu l'an dernier, se tiendra rapidement afin de faire le point sur l'état d'avancement des vingt-cinq mesures retenues par le CISR de novembre 1997 et afin de faire en sorte d'activer, en tant que de besoin, leur application.
Par ailleurs, comme vous le savez bien évidemment, un projet de loi portant diverses mesures relatives à la sécurité routière a été présenté en première lecture au Sénat, qui l'a adopté à l'unanimité. Il sera examiné par l'Assemblée nationale, la semaine prochaine, en principe le 10 décembre.
Par ailleurs, en parallèle à l'ensemble de ces mesures d'information, de sensibilisation et de formation, il faudra aussi intensifier, comme l'a rappelé tout à l'heure M. Fatous, le nombre des contrôles. J'ai déjà pris contact avec mes collègues ministres de l'intérieur et de la défense pour que, à la lumière des analyses précises des accidents se produisant dans chaque département, des contrôles appropriés soient multipliés, associés à une information sur le risque pris par le contrevenant.
Je voudrais aussi revenir sur l'intervention de M. Miquel, qui a proposé que la mise en oeuvre du projet de loi sur la sécurité routière s'accompagne d'une forte hausse des crédits de communication et d'évaluation de la sécurité routière. Je suis tout à fait d'accord avec lui sur ce point. S'agissant de la communication, le budget pour 1999 est déjà en hausse, et le budget pour 2000 le sera également. Pour ce qui est de l'évaluation, il a d'ores et déjà été demandé à l'Institut national de recherche sur les transports et leur sécurité, l'INRETS, d'accentuer, en 1999, l'évaluation des actions entreprises, comme le brevet de sécurité routière et les actions locales.
Enfin, je souligne que j'ai demandé à mes services de généraliser l'évaluation dans le domaine de la sécurité routière et de préparer en conséquence le budget pour 2000.
Beaucoup reste à faire - chacun d'entre nous peut le constater chaque jour dans sa circonscription - pour que l'objectif central de réduction du nombre de tués sur la route soit davantage pris en charge par les automobilistes eux-mêmes. C'est affaire de volonté politique et d'évolution des comportements. Même si l'on peut regretter qu'un long délai s'écoule entre la prise de décision et sa mise en oeuvre les mesures qui sont en train de se mettre en place vont, je pense, dans le sens souhaité.
De manière plus générale, les investissements de sécurité ont été privilégiés dans les arbitrages. Je ne citerai qu'un seul exemple, relevé par nombre d'intervenants, celui du programme pluriannuel de résorption des passages à niveau les plus dangereux, qui a été engagé grâce à une contribution de 50 millions de francs inscrite au FITTVN. Ces réductions se feront bien évidemment en partenariat. Ce dispositif est, à mes yeux, insuffisamment utilisé. Il suppose, en effet, une négociation entre la SNCF, RFF et, bien souvent, une collectivité locale. Ces procédures mettent du temps à aboutir. Il faut donc les accélérer.
La sécurité, c'est également le niveau de sécurité offert par les infrastructures routières. C'est la raison pour laquelle j'ai poursuivi et amplifié l'orientation à laquelle vous aviez souscrit en 1998, qui consiste à affecter davantage de crédits à la remise à niveau et à l'entretien du réseau routier existant.
Cette remise à niveau s'imposait. En effet, je rappelle que, de 1988 à 1996, les crédits destinés à l'entretien courant ont été réduits de 10 % et que ceux qui étaient destinés à la réhabilitation l'ont été de 66 %. Or, dans le même temps, les trafics augmentaient de 22 % et la consistance des ouvrages à entretenir progressait de 11 %.
Compte tenu de cette situation, un premier effort a été fait en 1998, et il convient de poursuivre cette orientation en 1999.
Les dotations proposées pour les programmes d'entretien, de réhabilitation et de mise en sécurité du réseau augmentent globalement de 6,2 % en moyens d'engagement et de 4,8 % en moyens de paiement. Elles s'établissent à environ 3,472 milliards de francs si l'on intègre les dotations des comptes d'affectation spéciale, le FITTVN et le FARIF.
Ce choix n'est évidemment pas sans conséquences pour l'ensemble du budget routier. Celui-ci est en effet globalement en diminution par rapport à 1998, comme vous l'avez souligné, monsieur Miquel, et s'établit à 9,2 milliards de francs de crédits de paiement en 1999.
La poursuite de l'effort en faveur de l'entretien routier signifie donc une diminution des crédits affectés au développement du réseau routier national, c'est-à-dire aux nouvelles opérations.
Ainsi, s'agissant des contrats Etat-région, le budget de 1999 ne permettra pas de rattraper les importants retards accumulés au cours des années antérieures. Les autorisations de programme prévues porteront ainsi à 81 % - peut-être un peu plus - le taux d'exécution de ces contrats, ce qui, comme vous l'avez fort justement indiqué, peut porter atteinte à la crédibilité de l'Etat.
Pour être précis, je dois dire que, dans le projet de collectif pour 1998 qui a été transmis au Parlement le 18 novembre dernier, 250 millions de francs de crédits de paiement supplémentaires ont été obtenus.
Cette mesure est importante. En effet, lorsque nous sommes arrivés, au mois de juin 1997, il y avait 3 milliards de francs de retard de crédits de paiement. Or, à la fin de 1999, ce retard devrait être réduit à 1 milliard de francs seulement. Vous savez - et c'est pourquoi cette mesure est si importante - que si, avec les autorisations de programme, on fait des effets d'annonce avant les élections, c'est avec les crédits de paiement que l'on peut régler les entreprises.
Sur le fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables, les moyens consacrés aux routes permettront de tenir les engagements, particulièrement ceux qui concourent au désenclavement du Massif central, comme l'achèvement de l'autoroute A 75 de part et d'autre du viaduc de Millau - l'enquête d'utilité publique va être lancée le 16 décembre - ou la poursuite de l'autoroute A 20. Nous financerons aussi les programmes qui s'inscrivent dans un objectif de sécurisation de certaines routes nationales, comme la RN 10 dans les Landes ou le programme spécifique de la RN 7.
Les crédits budgétaires et le FITTVN nous permettent également, comme l'a souligné M. Gerbaud, d'accélérer la réalisation de la route Centre Europe Atlantique, la route des Estuaires et la RN 88.
Puisque nous en sommes aux cas particuliers, je vais répondre à M. Lambert sur l'autoroute A 28, Rouen-Alençon.
M. Alain Lambert. C'est le seul tronçon qui reste à faire !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je vous confirme que l'appel d'offres sera lancé avant la fin de l'année et que les différents partenaires, Etat et collectivités, disposeront de tous les éléments leur permettant de choisir l'investissement le plus pertinent, concédé ou non, au printemps de 1999.
Ce budget routier ne me paraît pas, cependant, satisfaisant. Même si cette situation résulte des priorités du Gouvernement - soutenues par le Parlement - nous ne pourrons en rester là car, même si je pense comme M. Miquel qu'il faudra désormais revenir à une programmation plus réaliste des prochains plans, force est de constater que ce budget ne permet pas de répondre à l'ensemble des besoins dans le domaine routier.
Il convient, sur cette question, de se mettre en situation de préparer le budget de l'an 2000, qui sera aussi celui du démarrage des prochains contrats de plan, pour lesquels vous êtes déjà nombreux à me solliciter et à vous inquiéter.
La présentation budgétaire qui vient d'être faite est loin d'être complète et n'épuise pas le sujet des infrastructures routières. De nombreuses questions me sont posées, chaque semaine, au Parlement ou chaque fois que je vais sur le terrain.
Parmi ces questions, l'une revient très souvent : où en est la réforme du financement des autoroutes ?
Cette réforme est en cours. Elle a pris un peu de retard, ce qui n'est pas surprenant car le sujet est particulièrement complexe.
Parmi les plus importantes difficultés, je citerai l'annulation par le Conseil d'Etat, en février dernier, des décrets de concession de l'autoroute A 86 à COFIROUTE et de TEO à Lyon.
Cela étant, monsieur Lambert, s'il est vrai que les automobilistes ne roulent pas sur des appels d'offres,...
M. Alain Lambert. Ni sur des cartes !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. ... il vaut mieux s'assurer que ces appels d'offres sont correctement réalisés pour qu'un jour ils puissent rouler sur des routes. J'ai donc le souci de respecter scrupuleusement les règles et les directives dans ce domaine, de telle sorte que les contentieux devant le Conseil d'Etat ne viennent pas annuler et bloquer les décisions, paralysant les travaux et paralysant, de ce fait, les usagers. Le cas de l'A 86, que j'ai cité, vous montre l'importance de la question !
Ces annulations nous ont rappelé la force des directives communautaires, que nos prédécesseurs avaient tardé à transposer.
Il faut maintenant remettre le système autoroutier sur pieds, notamment celui qui est constitué par les sociétés d'économie mixte, les SEMCA.
Le système français de concessions autoroutières a déjà permis, je le répète, de réaliser un réseau de 6 700 kilomètres. Il a donc présenté de nombreux avantages, mais, aujourd'hui, il faut à la fois le consolider, le redresser et le réformer. De plus, son endettement n'est pas négligeable puisqu'il représente déjà 150 milliards de francs.
Par ailleurs, l'accélération de la réalisation du schéma autoroutier en 1994 s'est traduite par des tensions financières dans certaines sociétés, comme celle du Tunnel du Fréjus, actuellement en déficit.
La facilité de financement procurée par la technique de l'adossement a conduit à certains choix d'investissement contestables et à créer des biais dans l'allocation des ressources entre réseau concédé et réseau non concédé, entre travaux neufs et entretien.
Le contexte juridique, notamment communautaire, conduit à remettre en cause le mode d'attribution des nouvelles concessions, à un moment où la transparence des choix d'investissement public se fait plus exigeante.
Monsieur Lambert, vous avez vous aussi évoqué la question de l'adossement, qui a permis, jusqu'à maintenant, de financer des constructions nouvelles par les péages des tronçons existants, amortis ou non amortis. Vous estimez, avec le Sénat, que ce n'est pas contraire aux directives communautaires.
Je vous confirme que cette question est au coeur des réunions qui se déroulent actuellement à Bruxelles avec la Commission. Je ne puis donc, à ce stade, vous en dire davantage, mais sachez que nous examinons à la fois la prolongation de la durée des concessions, la transposition des directives et le renforcement de la sécurité juridique sur toutes ces questions.
Je citerai enfin, parmi les sujets à faire évoluer, la durée des amortissements, les changements de méthode comptable demandés par la Cour des comptes - c'est un problème réel que tout le monde reconnaît - et la contestation par la Commission européenne du régime de TVA des sociétés autoroutières, MM. Gerbaud et Miquel en ont d'ailleurs fait état dans leur intervention.
Face à ces difficultés, il faut construire une réforme du système autoroutier permettant de poursuivre le développement du réseau d'autoroutes à un rythme adapté à la demande de transport.
Cette évolution, à laquelle nous travaillons depuis un an, doit bien entendu s'inscrire dans le droit communautaire. Elle doit permettre des mises en concurrence transparentes et non discriminatoires pour l'attribution de nouvelles concessions et assurer - c'était un de nos objectifs de départ - une plus grande neutralité des choix entre types d'investissements et entre modes de transport.
J'attends de cette réforme qu'elle renforce durablement pour l'avenir la place des sociétés d'économie mixte concessionnaires d'autoroutes dans la construction et l'exploitation de la route, dans le cadre d'un véritable partenariat public-privé.
Il s'agit de préserver, au côté d'entreprises privées, qui ont évidemment toute leur place, des entreprises publiques dynamiques et renforcées à l'issue de la réforme en cours.
La mise en place de cette réforme, qui passe par des systèmes comptables et fiscaux plus proches du droit commun ainsi que par la constitution de fonds propres, ne peut se faire, à mon avis, sans un allongement des concessions actuelles.
A cet effet, des discussions ont été engagées avec la Commission européenne, que j'espère voir aboutir au tout début de l'année prochaine.
Je souhaite être en mesure de pouvoir en tenir compte dans le travail législatif de l'an prochain.
Comme vous le constatez, cette réforme est importante. Il s'agit tout simplement de conforter durablement le système des concessions « à la française ».
Je ne saurais terminer mon propos sur les infrastructures routières sans répondre à M. Gerbaud sur le concept d'autoroute évolutive à coût réduit, dite « autoroute allégée ».
Cette suggestion a été formulée dans le rapport de la commission d'enquête du Sénat sur les infrastructures terrestres, qui constitue, au-delà de ce point particulier, un apport réel aux réflexions de mes services sur l'ensemble de ces problèmes.
J'ai déjà eu l'occasion de m'entretenir avec certains d'entre vous de ces « autoroutes allégées » et je souhaite, ici même, confirmer mon engagement dans ce domaine.
Mes services travaillent actuellement à la définition d'un nouveau type d'autoroute, susceptible de répondre à des volumes de trafic de l'ordre de 6 000 à 12 000 véhicules par jour - soit des trafics très inférieurs à ceux des autoroutes à deux fois deux voies - et susceptible d'être concédée. Une expérimentation interviendra dès le premier semestre de 1999.
Enfin, messieurs Miquel et Gerbaud, dans le prolongement de la commission d'enquête citée précédemment, vous avez souhaité une programmation autoroutière décidée par le Parlement.
De quoi peut-il s'agir ? D'une loi de programmation ? L'expérience prouve que, confrontées à l'annualité budgétaire, ces lois sont constamment révisées, à la baisse le plus souvent.
Il me semble préférable de retenir les démarches que nous engageons sur les schémas de service et la négociation des contrats de plan. Ces dispositifs permettront d'afficher des perspectives claires sur l'avenir et offriront aux collectivités territoriales la possibilité de participer aux enjeux de planification et de programmation. Ils me semblent offrir davantage de garantie dès lors que la contractualisation correspond véritablement aux besoins.
Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, les principaux éléments d'information que je souhaitais vous apporter sur les budgets des transports. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président. Monsieur le ministre, permettez-moi de vous dire que vous avez été le champion de la réponse devant le Sénat, avec une heure et douze minutes !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. J'ai été trop long ?
M. le président. Non, mais c'était impressionnant !
Je rappelle au Sénat que les crédits concernant les transports terrestres, les routes et la sécurité routière, inscrits à la ligne « Equipement, transports et logement », seront mis aux voix le dimanche 6 décembre, à la suite de l'examen des crédits affectés à la mer. Mais j'appellerai en discussion l'amendement présenté par la commission des finances sur le titre IV.

ÉTAT B

M. le président. « Titre III : 94 188 268 francs. »