Séance du 7 décembre 1998







M. le président. « Art. 44. _ Le montant des crédits ouverts aux ministres, pour 1999, au titre des services votés du budget général, est fixé à la somme de 1 844 123 142 881 F. »
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, si je suis monté à cette tribune, c'est parce que je souhaite donner une certaine solennité au vote de cet article 44, qui est le plus lourd du projet de loi de finances pour 1999 avec 1 844 milliards de francs.
Il s'agit de l'article qui ne donne jamais lieu à débat. C'est celui, monsieur le secrétaire d'Etat, qui limite drastiquement les pouvoirs du Parlement dans la discussion budgétaire.
L'ordonnance organique de 1958 définit en effet les services votés et dispose, en son article 44, que les dépenses du budget général font l'objet d'un vote unique en ce qui concerne les services votés.
Cet article engage, mes chers collègues, et je l'ai souvent dit pendant la discussion des fascicules, entre 92 % et 93 % des crédits sur lesquels vous n'avez pouvoir que d'approuver ou de rejeter ; mais, dans cette hypothèse, la discussion s'arrêterait de fait.
Monsieur le secrétaire d'Etat, le vote unique des services votés est une disposition très contestée. Elle l'est d'ailleurs depuis l'origine, depuis sa première utilisation, mais elle reste curieusement méconnue de beaucoup de mes collègues, si j'en juge par les interventions que j'ai entendues à l'occasion des débats sur les fascicules.
Sans accabler mes collègues de la définition des services votés, je veux rappeler simplement qu'ils servent de point de départ pour l'examen des crédits. Bien qu'ils représentent, comme je l'ai dit voilà quelques instants, 93 % des crédits demandés, les règles de recevabilité financière réduisent les initiatives du Parlement aux seuls amendements tendant à proposer une réduction de crédits.
Le dépôt de tout amendement, quelle qu'en soit son origine, même s'il s'agit d'un amendement du Gouvernement, sur cet article, est impossible.
Monsieur le secrétaire d'Etat, cela relativise l'affirmation de M. Strauss-Kahn à cette même tribune qui, à l'occasion de la discussion générale, nous indiquait, quant à la possibilité d'amender le projet de budget, que nous pourrions facilement nous soustraire aux obligations de cette ordonnance organique.
Monsieur le secrétaire d'Etat, c'est à cet article que je veux rappeler la proposition alternative du Sénat que le rapporteur général a bien voulu lui proposer et pour laquelle il a été soutenu sans aucune défaillance.
Cette proposition, c'est de réduire le déficit budgétaire - mais il le rappellera à son tour tout à l'heure lorsque le temps viendra - de 14 milliards de francs pour pouvoir regarder nos enfants dans les yeux et leur dire que, en cette fin d'année 1998, cette année de croissance, nous avons enfin pu stabiliser, plafonner la dette en ratio de produit intérieur brut.
Monsieur le secrétaire d'Etat, votre refus d'entendre cet appel qui est très modéré, lorsque l'on rapporte 14 milliards de francs à 1 844 milliards de francs, nous a conduits à traduire la limitation des augmentations de dépenses sur de nombreux budgets et de tenir parfois de manière lancinante les mêmes débats qui engendraient les mêmes indignations de nos collègues...
M. Michel Charasse. Justifiées !
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. ... et suscitaient les mêmes réponses de la commission des finances.
Je veux donc, en cet instant, mes chers collègues, puisque vous vous intéressez aux services votés, rappeler au Sénat que la commission des finances a considéré qu'une progression pour 1999 de 147,7 milliards de francs de dépenses supplémentaires venant s'ajouter aux 1 844 milliards de francs de services votés témoignait d'un manque de maîtrise des dépenses par le Gouvernement.
La limitation de cette augmentation trop forte de dépenses ne peut, paradoxalement, s'appliquer à cet article, mais simplement lors des mesures nouvelles.
Cette précision devait être apportée à cet instant - je l'ai d'ailleurs promise à chaque discussion de fascicule budgétaire - pour juger honnêtement et loyalement de la pertinence et du caractère très réaliste des propositions qui nous ont été faites par M. le rapporteur général et que la majorité sénatoriale a bien voulu confirmer. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Claude Estier. La majorité sénatoriale n'est pas en grand nombre !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article 44.

(L'article 44 est adopté.)

Article 45 et état B