Séance du 15 décembre 1998







M. le président. La parole est à M. Blin, auteur de la question n° 356, adressée à Mme le ministe de la culture et de la communication.
M. Maurice Blin. Madame la ministre, cette question orale, j'aurais souhaité, vous le savez bien, ne pas avoir à vous la poser. J'y suis contraint, et je le regrette, à la suite du retard incompréhensible que subit la publication des décrets d'application de la loi du 28 février 1997 née d'une proposition de loi d'origine sénatoriale et adoptée à l'unanimité par les deux assemblées. Elle reprenait celle qu'avait déposée, le 8 février 1996, notre collègue Claude Huriet et qu'avaient signée quatre-vingt-quinze sénateurs.
Cette loi, vous le savez mieux que personne, madame la ministre, a pour objet une meilleure définition des pouvoirs des architectes des bâtiments de France. Elle prévoit modestement la création d'une commission régionale auprès de laquelle les élus pourraient éventuellement en appeler d'une décision des architectes qui leur paraîtrait manifestement contestable.
Depuis cette date, pas moins de six questions écrites, une question orale sans débat et une question d'actualité vous ont été posées, madame la ministre, et leurs auteurs demandent tous que soient enfin publiés ces décrets d'application. Le 11 juin dernier, vous leur répondiez : « Les décrets seront bientôt signés, c'est une affaire de jours. »
Aujourd'hui, plus de six mois après cette déclaration et vingt-deux mois après la promulgation de la loi, ces décrets ne sont toujours pas parus. Dois-je rappeler que le Gouvernement ne dispose, en principe, que de six mois pour les publier ?
Il s'ensuit deux interrogations.
D'abord, quand ces décrets, impatiemment attendus par tous les élus locaux et tout particulièrement par l'Association des maires de France, sortiront-ils enfin ?
Nous ne pouvons en effet que nous alarmer d'un retard qui, reconnaissez-le, madame la ministre, n'est guère compatible avec le respect dû à la volonté du législateur, surtout lorsque celle-ci s'est aussi unanimement exprimée.
M. Charles Descours. Très bien !
M. Maurice Blin. Ensuite, quelle assurance pouvons-nous avoir que ces futurs décrets seront bien fidèles à la loi, c'est-à-dire qu'ils garantiront, au sein de la commission, la parité entre les élus et les membres de l'administration, parité quantitative, mais parité qualitative également ? Dans le cas contraire, celle-ci serait vidée de sa substance. Les parlementaires que nous sommes accepteraient difficilement que leur volonté soit ainsi tournée.
Qu'on m'entende bien, et ce sera mon dernier mot : par cette initiative, je le rappelle une dernière fois, le Parlement n'a eu aucunement l'intention de mettre en péril la sauvegarde du patrimoine national, auquel tous les élus sont attachés et que les architectes des bâtiments de France servent le plus souvent avec zèle et compétence. Il a seulement voulu que soient évités à l'avenir certains abus consistant à imposer aux communes qui abritent des bâtiments classés ou inscrits des charges soit inutiles, soit insupportables.
Bref, il souhaite tout simplement que soient créées, enfin, les conditions d'une concertation entre des élus et des fonctionnaires également responsables, et ce Parlement, madame, voudrait ne pas être déçu.
M. Charles Descours. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le sénateur, je partage tout à fait votre souci, comme celui de l'ensemble des élus qui ont estimé qu'il était important de disposer d'une instance de recours par rapport à des décisions dont ils ont contesté les motifs ou le fond.
Mais je voudrais faire une remarque de méthode. J'ai pris connaissance de ce texte lors de ma prise de fonctions. Je veux bien accepter tous les reproches relatifs aux délais, mais je souligne l'absence d'instruction juridique préalable à l'adoption de la loi. Sa réalisation nous aurait pourtant permis de promulguer ce décret beaucoup plus rapidement.
En effet, les difficultés se sont posées ultérieurement. Il a donc fallu mener un travail de fond, y compris au niveau interministériel, car le ministère de la culture et de la communication n'est pas le seul à être impliqué dans cette affaire.
Nous nous y sommes consacrés sans attendre, même si je reconnais que les délais sont longs. Je suis moi-même évidemment concernée, car je souhaite que les commissions soient rapidement mises en place.
Nous arrivons maintenant au bout du processus, puisque le décret d'application relatif à l'instruction des autorisations de travaux dans le champ de visibilité des édifices classés ou inscrits dans les secteurs sauvegardés est sorti du Conseil d'Etat depuis peu de temps et entrera en application le 1er mai 1999.
Conformément à la loi, ce décret prévoit la mise en place des commissions régionales du patrimoine et des sites. Elles comportent - je vous rassure sur leur composition, monsieur le sénateur - sept membres de droit représentant l'administration, huit élus, huit personnalités qualifiées, trois représentants des associations et quatre représentants des professionnels. Une telle composition devrait donner à ces commissions la représentativité et la possibilité d'expertise nécessaires à l'instruction objective des cas qui leur seront soumis.
Ces commissions remplaceront, il est vrai, les deux instances qui existent aujourd'hui. J'ai d'ores et déjà informé les préfets, lors d'un exposé que j'ai fait devant eux le 11 décembre dernier, de la nécessité d'organiser et de préparer ces commissions afin que leur mise en place s'effectue dans les meilleures conditions à partir du 1er mai 1999.
Les directions régionales des affaires culturelles sont également informées, et cela depuis déjà quelque temps, afin d'être en mesure de pallier les problèmes d'organisation et de mettre en place ces commissions dans les meilleures conditions.
Après avoir pris connaissance des observations qui ont été formulées par la Haute Assemblée, le Gouvernement va donc assurer la publication du décret dès que les dernières signatures - puisque le texte est en navette - auront été apportées, ce qui ne change rien quant à la date de mise en application prévue pour le 1er mai 1999.
Je me réjouis que le dispositif se mette en place et que nous répondions ainsi à l'attente, exprimée à plusieurs reprises, des élus. Croyez-le, monsieur le sénateur : je souhaite vraiment que tout soit fait pour qu'il n'y ait, ensuite, ni contestation ni difficulté juridique quant au fonctionnement de ces nouvelles commissions régionales.
Permettez-moi de souligner également, puisque je m'exprime devant le Sénat, que cela suppose des moyens supplémentaires pour les DRAC, pour les services du ministère de la culture et de la communication. J'entendais précédemment l'un de vos collègues évoquer la nécessité d'une meilleure prise en compte de la dépense des petites communes en faveur de la protection du patrimoine archéologique, des dépenses motivées par les fouilles.
Or, lorsque j'ai présenté mon budget au Sénat, j'ai été surprise que soit décidée sa diminution, et cela d'une manière importante, à un moment où, par ailleurs, votre assemblée m'engage dans des dépenses nouvelles et accrues, notamment pour que ces instances démocratiques puissent fonctionner au mieux !
M. Maurice Blin. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Blin.
M. Maurice Blin. Madame la ministre, je vous remercie vivement des précisions que vous venez de nous apporter, et je retiens deux éléments de satisfaction dont je vous sais gré.
Le premier concerne la composition de ces commissions, qui me paraît moins critiquable qu'il ne semblait qu'elle fût ; j'espère que la voix des élus pourra s'y faire entendre comme elle le doit.
Le second tient au fait que nous arrivons au terme de ce marathon, qui nous a retenus, vous et moi, beaucoup trop longtemps, je vous le concède bien volontiers.
J'éprouve un regret cependant : celui de devoir patienter encore jusqu'au mois de mai prochain pour que cette disposition soit appliquée. Cela me paraît difficilement justifiable, étant donné que nous attendons déjà maintenant depuis bientôt deux ans.
Enfin, j'estime très sincèrement que la mise en place de ces commissions régionales ne devrait pas entraîner de difficultés financières. Nombre d'organismes moins utiles fonctionnent aujourd'hui. Peut-être serait-il possible de mieux équilibrer les charges.

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