Séance du 15 décembre 1998







M. le président. « Art. 19 bis . - L'article 1648 B bis du code général des impôts est ainsi modifié :
« 1° Après le III, il est inséré un III bis ainsi rédigé :
« III bis. - Bénéficient également du fonds les fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle visés à l'article 1648 A qui, à la suite d'un changement d'exploitant intervenu après le 1er janvier 1997 et concernant des entreprises visées à l'article 1471, enregistrent une perte de ressources supérieure au quart des ressources dont ils bénéficiaient l'année de survenance de ce changement.
« Cette attribution est versée de manière dégressive sur trois ans. Les fonds éligibles bénéficient :
« _ la première année, d'une attribution au plus égale à 90 % de la perte subie ;
« _ la deuxième année, de 75 % de l'attribution reçue l'année précédente ;
« _ la troisième année, de 50 % de l'attribution reçue la première année. » ;
« 2° Le début du IV est ainsi rédigé :
« Outre les attributions versées aux fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle en application du III bis, le produit... (Le reste sans changement.) »
Par amendement n° 56, M. Marini, au nom de la commission, propose :
A. - Dans le troisième alinéa du texte présenté par le 1° de cet article pour le III bis à insérer dans l'article 1648 B bis du code général des impôts, de remplacer le taux « 90 % » par le taux « 75 % » ;
B. - Dans le quatrième alinéa du même texte, de remplacer le taux « 75 % » par le taux « 50 % » ;
C. - Dans le cinquième alinéa du même texte, de remplacer le taux « 50 % » par le taux « 25 % ».
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement a pour objet de réduire le montant de la compensation versée par le fonds national de péréquation, le FNP, au fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle de l'Essonne, de manière à préserver les ressources des autres bénéficiaires du fonds national de péréquation.
La commission des finances ne souhaite pas remettre en cause le dispositif adopté en première lecture par l'Assemblée nationale. Il est manifeste que le fonds départemental de la taxe professionnelle de l'Essonne est dans une situation pour le moins étrange, sinon dramatique. Il a, en effet, perdu la moitié de ses ressources en 1997, lors de la fusion d'Air France et d'Air Inter, cette dernière compagnie étant devenue Air France Europe. Les raisons techniques en sont explicitées dans le rapport écrit.
Or, contrairement à ce que vous avez déclaré à l'Assemblée nationale, monsieur le secrétaire d'Etat, à savoir que la charge supplémentaire induite par ce dispositif n'aurait pas d'effets négatifs sur les autres collectivités bénéficiaires du fonds, ce dispositif, me semble-t-il, a nécessairement un effet négatif sur le montant des crédits susceptibles d'être distribués aux 18 000 petites communes rurales qui sont les attributaires habituels du fonds national de péréquation.
Vos propos m'ont surpris, monsieur le secrétaire d'Etat. En l'état actuel du dispositif, l'extension du champ des attributions du FNP se fait au sein d'une enveloppe inchangée. Plus d'attributaires, enveloppe inchangée ? Un effet d'éviction est à craindre au détriment des attributaires habituels. Ce sera toujours le même gâteau, mais les convives seront plus nombreux !
En conséquence, les 45 millions de francs qui seront versés au fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle de l'Essonne ne profiteront pas, par définition, aux collectivités qui en auraient bénéficié si l'article 19 bis n'avait pas été introduit dans le collectif budgétaire !
Certes, les collectivités qui bénéficient du fonds national de péréquation percevront les dividendes de l'augmentation des crédits dudit fonds, laquelle sera de 0,9 % en 1999. Permettez-moi deux remarques à cet égard.
En premier lieu, nous ne savons pas ce que sera le taux d'inflation. Peut-être sera-t-il de l'ordre de 0,9 %, voire inférieur. C'est du moins la crainte que l'on peut avoir, monsieur le secrétaire d'Etat, pour les recettes budgétaires de l'année 1999. Mais c'est un autre débat !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Ce n'est pas une crainte pour les consommateurs !
M. Philippe Marini, rapporteur général. L'intérêt des consommateurs et l'intérêt budgétaire de l'Etat sont, malheureusement, un peu opposés, monsieur le secrétaire d'Etat.
En second lieu, s'agissant de l'ensemble des ressources consacrées à la péréquation de la taxe professionnelle, dans le projet de loi de finances pour 1999, les ressources du FNPTP, le fonds national de péréquation de la taxe professionnelle, et du FNP affichaient un taux de progression de 15 %. A la suite d'amendements adoptés tant à l'Assemblée nationale qu'au Sénat en faveur des communes et des groupements défavorisés, le taux de progression est tombé à 2,5 %. Et aujourd'hui, après l'adoption de l'article 19 bis, ce même taux ne serait plus que de 0,9 %. Par conséquent, sur les 529 millions de francs supplémentaires qui seront consacrés en 1999 à la péréquation de la taxe professionnelle, seuls 34 millions de francs iront aux bénéficiaires traditionnels du FNPTP et du FNP.
C'est la raison pour laquelle, monsieur le secrétaire d'Etat, j'aimerais savoir ce qui vous fait penser que le dispositif de l'article 19 bis n'aura pas d'effets négatifs sur les autres collectivités bénéficiaires du FNP et, s'agissant du dispositif proposé, qui prévoit que le montant de la compensation est, au plus, de 90 %, quel est le taux effectif que vous envisagez de retenir.
Si vos réponses ne sont pas de nature à nous convaincre tout à fait, je pourrai maintenir l'amendement n° 56 qui est, à ce stade, un amendement d'appel. Tout dépend donc des assurances que vous pourrez nous apporter, monsieur le secrétaire d'Etat, à la suite des déclarations que vous avez faites à l'Assemblée nationale et que je n'ai vraiment pas comprises.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ? M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Effectivement, monsieur le rapporteur général, je comprends votre amendement comme un appel à plus d'explications, mais il me semble que vous les avez vous-même fournies dans votre question.
Il s'agit bien, en effet, d'une compensation supplémentaire, dont vous avez bien voulu reconnaître qu'elle était légitime, puisque le fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle de l'Essonne va perdre une très grande partie de ses ressources. Vous avez indiqué de façon tout à fait claire que le Fonds national de péréquation de la taxe professionnelle allait bénéficier, en 1999, de ressources complémentaires provenant, d'une part, de l'augmentation des recettes au titre de France Télécom - où l'on voit que le mécanisme mis au point pour France Télécom présente quelques avantages pour les communes les plus en difficulté - d'autre part, de l'augmentation de la cotisation de péréquation, complétées par des recettes de l'Etat.
Au total, en arrondissant, cela permet de dégager environ 600 millions de francs de plus pour 1999. Cette somme sera largement suffisante pour compenser tout à la fois les diminutions de la dotation de compensation de la taxe professionnelle des collectivités éligibles à la dotation de solidarité urbaine ou à la dotation de solidarité rurale pour les bourgs-centres et le versement au Fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle de l'Essonne.
Donc, aucune commune ne perdra en 1999 par rapport à 1998.
Voilà donc les explications que vous avez souhaitées, monsieur le rapporteur général, et les assurances que vous avez demandées. Je le confirme, la compensation supplémentaire accordée aux communes de l'Essonne ne se fera aucunement par diminution des transferts de péréquation aux autres communes. Vous pouvez donc maintenant retirer votre amendement.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur le secrétaire d'Etat, j'ai bien compris qu'aucune commune bénéficiaire de la péréquation ne verrait son attribution diminuer en 1999 par rapport à 1998. Or telle n'était pas exactement la question que je posais.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Ah ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. En effet, les sommes redistribuées ou susceptibles de l'être au titre de la péréquation de taxe professionnelle atteignaient plus de 500 millions de francs avant les différentes mesures qui ont été votées tant à l'Assemblée nationale qu'au Sénat, en particulier avant la prise en compte des 45 millions de francs destinés à être reversés au fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle de l'Essonne. Donc, s'il est bien vrai que les communes rurales ne vont pas voir leur situation se détériorer par rapport aux attributions de l'année 1998, en revanche, il est non moins vrai que, par rapport aux espérances qu'elles auraient pu avoir au vu des premiers éléments de la loi de finances pour 1999, la réalité va leur apparaître singulièrement plus défavorable ou, plus exactement, beaucoup moins favorable !
Je persiste donc à penser qu'il y aura un réel effet d'éviction au détriment des communes rurales, qui ont pu être plus ou moins bien traitées au cours des années précédentes mais qui l'auraient été mieux en 1999 si ce dispositif n'avait pas existé.
Je n'ai pas le sentiment, sous réserve de l'opinion de collègues plus férus que moi de ces difficiles sujets, que votre réponse soit de nature à lever véritablement toutes les craintes de la commission, monsieur le secrétaire d'Etat.
Avec l'amendement n° 56, la commission ne conteste pas les droits à répartition au bénéfice du département de l'Essonne, mais elle propose de les faire décroître de manière un peu plus rapide que dans votre dispositif.
A ce stade, monsieur le secrétaire d'Etat, la commission ne croit pas avoir reçu d'assurances suffisantes pour retirer l'amendement n° 56.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Monsieur le rapporteur général, au moins convenez avec moi que les termes du débat sont clairs.
Le Gouvernement, avec la majorité qui le soutient, a souhaité utiliser les surcroîts de moyens du Fonds national de péréquation de la taxe professionnelle - mais sans remettre en cause aucunement ce que recevaient déjà les bénéficiaires antérieurs - en les concentrant, d'une part, sur des communes bien particulières, à savoir les communes urbaines éligibles à la dotation de solidarité urbaine et les communes rurales qui ont des charges de centralité en tant que bourgs-centres, d'autre part, sur le département de l'Essonne.
Ce faisant, le Gouvernement a donc effectivement choisit pour l'attribution des moyens supplémentaires affectés à ce fonds de péréquation des collectivités particulièrement en difficulté.
Vous souhaitez, vous, et c'est votre droit, continuer à « saupoudrer ». Nous voulons, nous, véritablement concentrer les moyens supplémentaires sur des collectivités qui en ont particulièrement besoin, mais sans rien prendre aux bénéficiaires habituels. C'est un choix politique.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 56 repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 19 bis , ainsi modifié.

(L'article 19 bis est adopté.)

Article additionnel après l'article 19 bis