Séance du 5 mai 1999







M. le président. « Art. 6. - Les sommes disponibles après imputation sur le résultat net comptable des versements aux réserves légales et statutaires sont réparties par l'assemblée générale entre l'intérêt servi aux parts sociales, les distributions opérées conformément aux articles 11 bis, 18 et 19 nonies de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 précitée, les mises en réserve et les affectations définitives au financement de projets d'économie locale et sociale. Les sommes mises en réserve doivent représenter au minimum le tiers des sommes disponibles telles que définies au présent article. Cette proportion peut toutefois être augmentée sur décision de la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance, au vu de la situation financière de la caisse d'épargne et de prévoyance dont il s'agit. Les sommes affectées au financement des projets d'économie locale et sociale, de protection de l'environnement et de développement durable du territoire ne peuvent être inférieures au tiers des sommes disponibles après la mise en réserve.
« Les projets d'économie locale et sociale ainsi que les missions contenues à l'article 1er de la présente loi doivent présenter à la fois un intérêt en termes de développement local ou d'aménagement du territoire et un intérêt en termes de développement social ou de l'emploi. Chaque caisse d'épargne et de prévoyance tient compte des orientations définies par la Fédération nationale des caisses d'épargne et de prévoyance pour le choix des projets d'économie locale et sociale sur son ressort territorial ou pour apporter sa contribution à des actions régionales ou nationales entreprises par le réseau. »
Sur l'article, la parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. L'article 6, qui concerne l'affectation des résultats de chacune des caisses d'épargne, est une disposition importante du projet.
Il prévoit, en particulier, que peuvent être financées avec une partie du résultat des missions d'intérêt général ou d'utilité économique et sociale.
Monsieur le ministre, j'aimerais que vous m'assuriez que des règles strictes de concurrence et de transparence seront effectivement appliquées par les caisses d'épargne.
Je m'explique. On peut très bien imaginer qu'une caisse d'épargne, voulant favoriser tel client, lui propose de financer tel projet, mais en adjoignant à ce financement des crédits d'utilité sociale, ce qui viendrait en quelque sorte fausser les règles normales de la concurrence avec les autres établissements de crédit. Je n'entre pas dans le détail ; vous voyez bien ce que je vise.
Pouvez-vous nous préciser, monsieur le ministre, dans quelles conditions les fonds affectés aux missions d'intérêt général seront distribués ?
M. le président. Par amendement n° 5, M. Marini, au nom de la commission, propose, dans la première phrase du premier alinéa de l'article 6, de supprimer le mot : « définitives. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. L'article 6 définit les conditions d'affectation du résultat, et nous nous préoccupons plus particulièrement ici du financement des projets d'économie locale et sociale.
Il prévoit les affectations définitives d'une partie du résultat distribuable des caisses. Nous proposons, nous, de supprimer le mot « définitives ».
Nous considérons en effet que des prêts consentis à des conditions exceptionnellement favorables - donc des prêts de caractère concessionnel, monsieur le ministre - ainsi que des investissements en capital de petites et moyennes entreprises devraient pouvoir être éligibles à l'affectation du résultat au titre des projets d'économie locale et sociale.
Or, ces prêts à des conditions préférentielles ou ces investissements en capital développement dans de petites entreprises sont susceptibles de ne pas intervenir à titre définitif, dès lors que la caisse d'épargne peut, s'agissant d'un investissement en capital, le recéder en cas de succès de l'entreprise et, s'agissant d'un prêt à titre concessionnel, c'est-à-dire à un très bas taux d'intérêt, escompter, bien entendu, son remboursement.
Cet amendement permettrait de laisser une liberté suffisante aux caisses d'épargne dans l'affectation de leurs résultats tout en respectant l'esprit des dispositions qui nous sont proposées, et donc de favoriser un certain nombre de décisions conformes à l'intérêt général.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Tout d'abord, le Gouvernement est sensible à la préoccupation de M. Loridant.
Il ne faudrait pas qu'au travers du dividende social les caisses d'épargne puissent exercer une concurrence déloyale à l'encontre d'autres établissements.
Voilà pourquoi je tiens à bien préciser ici que le dividende social n'a pas vocation à compléter les opérations commerciales menées par les caisses d'épargne. Mais, dans ces conditions, il ne faut pas non plus que la tentation devienne trop grande.
En ce sens, l'amendement de la commission, même s'il est inspiré, j'en suis certain, par les meilleures intentions, risque, au contraire, en passant d'opérations à caractère définitif à des opérations à caractère non définitif, et par conséquent à des prêts, d'accroître cette zone de recouvrement qu'il faut, au contraire, éviter entre les opérations commerciales, d'une part, et les opérations relevant du dividende social, d'autre part.
Je ne suis donc pas favorable à l'amendement, qui accroît le risque de confusion, et je confirme à M. Loridant que cette confusion n'a pas lieu d'être.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 5, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 6, M. Marini, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit la dernière phrase du premier alinéa de l'article 6 :
« Les sommes affectées au financement des projets d'économie locale et sociale ne peuvent excéder, pour chaque caisse d'épargne et de prévoyance, le montant total de l'intérêt servi aux parts sociales et des distributions effectuées conformément aux articles 11 bis, 18 et 19 nonies de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 précitée. »
Par amendement n° 174, M. Loridant, Mme Beaudeau, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, après les mots : « être inférieures », de rédiger comme suit la fin du premier alinéa de cet article : « pour chaque caisse d'épargne et de prévoyance, au montant des sommes mises en réserve ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 6.
M. Philippe Marini, rapporteur. Cet amendement vise à en revenir au texte initial du Gouvernement, qui nous semble acceptable.
Nous souhaitons en effet rétablir le plafonnement de l'affectation aux projets d'économie locale et sociale, et supprimer le plancher de ce dividende dit social.
En effet, les députés ont souhaité inverser l'ordre de priorité prévu initialement par le texte dans l'affectation du résultat. Ainsi, selon eux, les caisses devraient d'abord consacrer un tiers de leurs résultats, après constitution des réserves, au financement de projets d'économie locale et sociale, et ce n'est que dans un second temps qu'elles pourraient rémunérer leurs sociétaires avec le solde.
Or, avec un capital initial prévu à hauteur de 18,8 milliards de francs, les caisses devraient débourser au minimum 600 millions de francs au titre de l'intérêt statutaire à verser aux porteurs de parts.
Si le solde du résultat est insuffisant - ce n'est pas impossible - les caisses d'épargne risquent d'être contraintes de puiser dans leurs réserves, c'est-à-dire dans leurs fonds propres, pour rémunérer leur part sociale, comme le permet d'ailleurs l'article 17 de la loi de 1947 portant statut de la coopération. En tout état de cause, elles verront leur capacité à accroître leurs fonds propres sérieusement obérée, à tout le moins.
Pour ne pas fragiliser la capacité de développement futur des caisses d'épargne, notre amendement vise à rétablir le texte initial du Gouvernement, qui prévoyait que la fraction du résultat consacrée aux projets d'économie locale et sociale ne peut excéder la fraction du résultat destinée à rémunérer les sociétaires. On reviendrait ainsi à quelque chose de raisonnable, alors que les débats à l'Assemblée nationale ont pollué ce texte des concessions que vous avez été contraint de faire, monsieur le ministre, pour en obtenir le vote.
M. le président. La parole est à Mme Beaudeau, pour défendre l'amendement n° 174.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Cet amendement portant sur les conditions d'affectation des excédents de gestion des caisses d'épargne est un amendement de principe.
Pour que ce qui nous concerne, nous sommes particulièrement attentifs au fait que l'article 6 prévoit expressément une utilisation sociale des excédents de gestion dégagés.
On peut faire aujourd'hui une première observation : ces excédents de gestion existent déjà - pour un montant de 2,5 milliards de francs - et ne sont pas encore affectés de façon tout à fait positive, ce qui implique donc que nous y réfléchissions.
En l'état actuel du texte, il importe donc de se demander si les principes que nous allons finalement adopter seront suffisamment précis pour favoriser effectivement l'accomplissement des missions d'intérêt général dévolues au réseau des caisses d'épargne ou si les sommes en jeu ne permettront de soutenir qu'un nombre trop réduit de projets au regard des besoins de financement exprimés.
Dans sa rédaction actuelle, l'article 6 précise qu'un tiers au moins des excédents de gestion est inscrit en réserve dans les comptes sociaux des organismes d'épargne. Pour le solde, c'est-à-dire deux tiers, un tiers de cet ensemble, soit 22 % ou, par exemple, un peu plus de 500 millions de francs aujourd'hui, serait consacré à aider des actions concourant au développement économique et social sous forme de subventions directes.
Nous estimons, pour notre part, nécessaire de renforcer clairement cette priorité en précisant, par le biais de cet amendement, que les sommes ainsi affectées sont, en pratique, équivalentes à celles qui sont mises en réserve et permettent donc de compléter utilement la liste des projets éligibles, qu'ils soient portés par des acteurs de l'économie sociale ou par des collectivités locales.
L'affirmation de cette orientation va de pair avec notre position de fond quant au niveau de la rémunération des sociétaires qui ne peut présenter de caractère excessif - cela ramènerait en effet le curseur du potentiel de rémunération aux alentours du taux du livret A majoré d'un point, comme nous le proposons - et avec notre conception du rôle des caisses d'épargne dans le paysage financier français, rôle dont nous avons déjà souligné la particularité lors de l'examen des articles initiaux du projet de loi.
Tel est l'objet de l'amendement n° 174.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 174 ?
M. Philippe Marini, rapporteur. Je l'ai déjà dit en présentant l'amendement n° 5 de la commission, nous considérons que la disposition retenue par l'Assemblée nationale est trop contraignante pour les caisses d'épargne et qu'il faut en revenir à un dispositif plus raisonnable, à savoir supprimer le plancher et rétablir le plafond. Or Mme Beaudeau va strictement dans le sens opposé.
Dans ces conditions, la commission ne peut qu'émettre un avis défavorable sur l'amendement n° 174 considérant que la disposition que présente Mme Beaudeau mettrait en péril l'avenir économique des caisses d'épargne.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 6 et 174 ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Les arguments de Mme Beaudeau détruisent l'amendement de M. le rapporteur et les arguments de M. le rapporteur détruisent l'amendement de Mme Beaudeau !
Il faut un plancher au dividende social. L'Assemblée nationale a retenu un tiers des excédents de gestion, ce qui me paraît raisonnable. Si l'on optait pour un plancher inférieur, la réalité du dividende social aurait tendance à disparaître, ce qui est d'ailleurs cohérent avec les propos qu'a tenus M. le rapporteur depuis le début de ce débat. Toutefois, lorsqu'il nous a dit qu'il n'y a pas de réalité formelle et contraignante dans le texte qui réponde à l'intérêt général, c'est qu'il anticipait déjà la suppression du plancher du dividende social. A partir du moment où il existe, il ne faut donc pas le supprimer.
A l'inverse, il ne faut pas non plus que nous empêchions la rémunération normale des coopérateurs car nous voulons tous qu'ils soient le plus nombreux possible.
Des amendements viendront en discussion, m'a-t-on dit, qui visent à instaurer, ce à quoi le Gouvernement est disposé, une première part à un coût particulièrement faible. Cela démontre bien que nous voulons que le plus grand nombre soit sociétaire.
Le plus grand nombre de sociétaires possible inclut à l'évidence des épargnants modestes. Or je ne vois pas pourquoi les épargnants modestes devraient obligatoirement se contenter de taux de rendement faibles, laissant aux gros épargnants les taux de rendement élevés du reste du marché financier.
Il faut que nous puissions garantir une rentabilité raisonnable aux petits épargnants pour lesquels nous créons cette part de coopérative particulièrement bon marché. Il n'y a pas de raison de les défavoriser. Il faut donc qu'il reste de quoi rémunérer les parts coopératives.
C'est pourquoi, entre ces deux positions extrêmes, je crois qu'il faut s'en tenir au texte actuel. En conséquence, je suis défavorable aux amendements n°s 6 et 174.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 6.
M. Bernard Angels. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Angels.
M. Bernard Angels. Comme nous l'avons précédemment exprimé lors de la discussion de l'article 1er, la rédaction de l'article 6 adoptée par l'Assemblée nationale concernant la part affectée aux financements des projets d'économie sociale et locale nous satisfait dans le sens où la répartition choisie permet tout à la fois un financement efficace desdits projets et une marge de manoeuvre suffisante pour les caisses d'épargne dans la rémunération des sociétaires et l'accroissement des fonds propres.
Ce partage des résultats, conjugué à l'assurance que le financement des projets d'économie locale et sociale ne sera pas un vain mot, sont des éléments fondamentaux de ce projet.
D'aucuns ont mis en avant la difficulté pour le réseau et pour quelques caisses en particulier d'être en capacité à, conjointement, rémunérer les sociétaires, consolider les fonds propres et assurer le financement des actions d'intérêt général.
Cette inquiétude est légitime mais la question ne se pose en réalité que pour la période initiale de placement et doit alors être reliée aux contraintes inhérentes à cette même période. Il serait illogique et malvenu de résoudre cette question en restreignant les capacités offertes aux caisses d'épargne de financer des projets d'économie sociale et locale.
En conclusion, nous ne voterons pas l'amendement proposé par le rapporteur.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 6, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 174 n'a plus d'objet.
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 132, MM. Angels, Carrère, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de supprimer le second alinéa de l'article 6.
Par amendement n° 7, M. Marini, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit la première phrase du second alinéa de ce même article :
« Les projets d'économie locale et sociale doivent présenter à la fois un intérêt en termes de développement local ou d'aménagement du territoire ou de protection de l'environnement, et un intérêt en termes de développement social ou d'emploi. »
Par amendement n° 8, M. Marini, au nom de la commission, propose de compléter le second alinéa de cet article par une phrase ainsi rédigée :
« Les projets d'économie locale et sociale financés par les caisses d'épargne et de prévoyance font l'objet d'une annexe détaillée au rapport annuel de la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance. »
La parole est à M. Angels, pour défendre l'amendement n° 132.
M. Bernard Angels. Cet amendement n'a plus d'objet dans la mesure où les amendements que j'avais déposés à l'article 1er n'ont pas été adoptés.
M. le président. L'amendement n° 132 n'a plus d'objet.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre les amendements n°s 7 et 8.
M. Philippe Marini, rapporteur. L'amendement n° 7 vise à rétablir le texte initial du Gouvernement. Je ne sais pas, monsieur le ministre, si vous qualifierez cette disposition d'extrémiste, comme vous l'avait fait tout à l'heure s'agissant d'une proposition qui ne faisait que reprendre la version initiale du Gouvernement ! (Sourires.)
Il s'agit là d'un sujet qui est, je pense, beaucoup moins sensible puisqu'il s'agit d'ajouter aux missions d'intérêt général des caisses d'épargne, la protection de l'environnement. Nous avions évoqué cette question avec M. Angels, lors de l'examen de l'article 1er, et je lui avais annoncé cet amendement n° 7, qui vise, je le répète, à rétablir le texte initial du Gouvernement en y ajoutant l'allusion aux missions d'aménagement du territoire et de protection de l'environnement.
Quant à l'amendement n° 8, il vise à permettre l'information des sociétaires sur les projets d'économie locale et sociale financés sur le résultat distribuable, et ce dans la préoccupation du « gouvernement d'entreprise » qu'évoquait au début du débat le président de la commission, M. Lambert, et pour que la politique d'imputation sur le dividende social soit parfaitement transparente, pour que l'on ne se serve pas de cette affectation du résultat pour procéder à je ne sais quel saupoudrage clientéliste ou financer je ne sais quel projet qui ne serait pas vraiment justifié par l'intérêt social de la caisse d'épargne.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 7 et 8 ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. En ce qui concerne l'amendement n° 7, la réécriture proposée par M. le rapporteur est bienvenue, mais, dans cette réécriture, il a supprimé la référence aux missions figurant à l'article 1er. C'est dommage !
Si cette suppression n'est pas intentionnelle, réinsérons le membre de phrase et reprenons la réécriture de M. le rapporteur qui me paraît meilleure que celle du projet de loi.
Si la suppression de ce membre de phrase est intentionnelle, je ne suis pas favorable à cet amendement. Peut-être M. le rapporteur pourra-t-il nous éclairer sur ce point...
Quant à l'amendement n° 8, il tend à introduire un élément de transparence : établir un rapport sur le dividende en question me paraît judicieux. Le Gouvernement émet un avis favorable.
M. Philippe Marini, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. J'accepte bien volontiers de rectifier l'amendement n° 7 dans le sens suggéré par M. le ministre. Il se lirait donc ainsi : « Les missions définies à l'article 1er de la présente loi ainsi que les projets d'économie locale et sociale doivent présenter à la fois un intérêt en termes de développement local ou d'aménagement du territoire ou de protection de l'environnement, et un intérêt en termes de développement social ou d'emploi. »
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 7 rectifié, présenté par M. Marini, au nom de la commission, et tendant à rédiger comme suit la première phrase du second alinéa de l'article 6 :
« Les missions définies à l'article 1er de la présente loi ainsi que les projets d'économie locale et sociale doivent présenter à la fois un intérêt en termes de développement local ou d'aménagement du territoire ou de protection de l'environnement, et un intérêt en termes de développement social ou d'emploi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 7 rectifié, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 8, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 175 rectifié, Mme Beaudeau, MM. Loridant et Foucaud, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de compléter in fine l'article 6 par un alinéa ainsi rédigé :
« L'intérêt servi aux parts sociales, hors les parts bénéficiant de prix de souscription privilégiés, rapporté à la valeur nominale de chaque part ne peut être supérieur au taux de rémunération du livret A des caisses d'épargne. »
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Cet amendement relatif à la rémunération des parts sociales présente une certaine cohérence avec notre amendement portant sur l'utilisation de ce que l'on appelle le « dividende social » de l'activité des caisses d'épargne.
Nous avons précédemment indiqué notre souci de voir s'accroître la part des excédents de gestion affectés au financement des projets de développement économique et social et se réduire en conséquence la part des résultats utilisés au bénéfice des sociétaires.
Il importe clairement pour nous de spécifier que le niveau maximal de rémunération des sociétaires ne peut excéder le taux moyen des obligations privées - 4,1 % - et d'« accrocher » la rémunération des parts sociales à l'élément fondamental de la collecte du réseau, c'est-à-dire au livret A.
Il s'agit pour nous de compléter notre conception propre de la réforme en affirmant par cet amendement que les priorités de l'allocation des ressources dégagées par les caisses doivent primer sur la simple rémunération des sociétaires, celle-ci demeurant toutefois attractive dans un contexte de très faible inflation.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur. La commission estime qu'il n'est pas possible de placer dans le public 14, 15 ou 18 milliards de francs de parts sociales sans que les souscripteurs puissent en attendre une rémunération correcte.
Cette rémunération est déjà plafonnée par l'article 14 de la loi relative à la coopération. Mme Beaudeau voudrait la plafonner davantage. Si on la suivait, c'est la diffusion dans le public des parts de sociétaires qui serait vouée à l'échec. La commission ne peut donc qu'émettre un avis défavorable sur cet amendement.
A ce propos, monsieur le ministre, nous voudrions souligner que la difficulté du placement peut être accrue par le niveau des taux administrés.
En ce domaine, sachant que les souscripteurs seront en même temps des titulaires de livrets de caisse d'épargne et qu'ils auront probablement tendance à déplacer un peu d'épargne du livret A vers la souscription de parts, nous nous demandons si nous sommes bien aujourd'hui - mais c'est un débat que nous reprendrons peut-être dans la suite de la discussion - dans une conjoncture vraiment propice au placement des parts.
M. Jean-Louis Carrère. On a intérêt à abandonner le livret A, c'est incroyable !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je ne comprends pas bien la rationnalité de l'amendement. En effet, le taux de rendement d'une épargne dépend de deux facteurs : le risque lié à l'émetteur et la liquidité.
En l'occurrence, entre le livret A et les parts de coopérative, c'est le même émetteur et le risque est le même. Par conséquent, il ne reste plus que le facteur liquidité. Or, à l'évidence, le livret A est plus liquide que la part de coopérateur. Il paraît donc tout à fait naturel que la rémunération de la part de coopérateur soit, en pourcentage, supérieure au taux du livret A.
Sinon nous mettrions tout cul par-dessus tête. Il n'y a pas beaucoup de lois économiques qui soient vérité d'Evangile, mais quelques-unes ont tout de même un peu de sens. En l'occurrence, c'est la liquidité qui fait la différence entre les deux titres ou les deux placements - appelez-les comme vous voulez - provenant du même émetteur, et il est clair que celui qui est plus liquide doit être moins rémunéré que celui qui est moins liquide.
Par conséquent, je ne peux pas accepter cet amendement, même si je comprends les motivations qui sont à l'origine de son dépôt. En effet, on ne peut pas vouloir tout changer, même lorsque l'objectif que l'on vise est louable. Il y a quand même un minimum de règles de fonctionnement de notre économie qui s'imposent à nous, et je ne voudrais pas que, en suivant votre proposition, madame Beaudeau, nous finissions par donner raison à M. Marini, qui veut que, étant donné deux placements provenant du même émetteur, l'un étant plus liquide que l'autre, le plus liquide soit le plus rémunérateur.
Plus personne ne voudrait dès lors prendre des parts de coopérateur, et nous n'aurions pas atteint l'objectif visé, qui est bien de moderniser les caisses d'épargne.
En conclusion, nous ne pouvons pas accepter ce plafonnement du rendement que vous nous proposez, madame Beaudeau.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Quelle déception pour Mme Beaudeau qui voulait changer la vie !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 175 rectifié, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 6, modifié.

(L'article 6 est adopté.)

Article 7