Séance du 6 mai 1999






SOMMAIRE


PRÉSIDENCE DE M. GÉRARD LARCHER

1. Procès-verbal (p. 0 ).

2. Epargne et sécurité financière. - Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence (p. 1 ).

Article 8 (p. 2 )

Amendements n°s 11 de la commission, 176 de M. Loridant et 177 rectifié de Mme Beaudeau. - MM. Philippe Marini, rapporteur de la commission des finances ; Paul Loridant, Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. - Adoption de l'amendement n° 11 rédigeant l'article, les amendements n°s 176 et 177 rectifié devenant sans objet.

Article 9 (p. 3 )

Amendements n°s 12 de la commission, 178 et 179 de M. Loridant. - M. le rapporteur, Mme Marie-Claude Beaudeau, M. le ministre. - Adoption de l'amendement n° 12 supprimant l'article, les amendements n°s 178 et 179 devenant sans objet.

Article 10 (p. 4 )

Amendements n°s 13, 14 de la commission, 180, 181 rectifié et 182 de M. Loridant. - M. le rapporteur, Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. le ministre, Marcel Deneux, Alain Lambert, président de la commission des finances ; Bernard Angels, Joël Bourdin. - Adoption de l'amendement n° 13, l'amendement n° 180 devenant sans objet ; retrait de l'amendement n° 181 rectifié ; adoption de l'amendement n° 14 ; rejet de l'amendement n° 182.
Adoption de l'article modifié.

Article 11 (p. 5 )

Amendement n° 15 de la commission. - Adoption.
Amendement n° 183 de M. Loridant. - MM. Paul Loridant, le rapporteur, le ministre. - Retrait.
Amendements identiques n°s 118 de M. Bourdin et 222 de M. Ostermann. - MM. Joël Bourdin, Joseph Ostermann, le rapporteur, le ministre. - Retrait des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.

Articles 12 à 14. - Adoption (p. 6 )

Article 15 (p. 7 )

Amendement n° 134 de M. Angels. - MM. Bernard Angels, le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 184 de M. Loridant. - MM. Paul Loridant, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Adoption de l'article modifié.

Article 16 (p. 8 )

Amendement n° 223 de M. Loueckhote. - MM. Joseph Ostermann, le rapporteur, le ministre. - Retrait.
Adoption de l'article.

Article 17 (p. 9 )

Amendements n°s 16 de la commission, 135 de M. Angels et 185 de M. Loridant. - MM. le rapporteur, Jean-louis Carrère, Guy Fischer, le ministre. - Adoption de l'amendement n° 16 supprimant l'article, les amendements n°s 135 et 185 devenant sans objet.

Article 18 (p. 10 )

Amendement n° 17 de la commission. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 19. - Adoption (p. 11 )

Articles additionnels après l'article 19 (p. 12 )

Amendements n°s 119 de M. Bourdin et 224 de M. Ostermann. - Retrait des deux amendements.
Amendement n° 258 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 20. - Adoption (p. 13 )

Article 21 (p. 14 )

Amendements n°s 18 rectifié ter de la commission et 120 de M. Bourdin. - MM. Le rapporteur, Joël Bourdin, le ministre, le président de la commission, Jean-Louis Carrère, Marcel Deneux, Mme Marie-Claude Beaudeau, M. Gérard Delfau. - Retrait de l'amendement n° 120 ; adoption, par scrutin public, de l'amendement n° 18 rectifié ter.

Suspension et reprise de la séance (p. 15 )

PRÉSIDENCE DE M. CHRISTIAN PONCELET

3. Questions d'actualité au Gouvernement (p. 16 ).

ACTION DU GROUPEMENT DE PELOTONS DE SÉCURITÉ
EN CORSE (p. 17 )

MM. Jean-Patrick Courtois, Alain Richard, ministre de la défense.

GRÈVES À LA SNCF (p. 18 )

MM. Paul Girod, Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement.

VOLET DIPLOMATIQUE DE LA CRISE DU KOSOVO (p. 19 )

MM. Paul Loridant, Alain Richard, ministre de la défense.

RESPONSABILITÉ DU GOUVERNEMENT
DANS LA SITUATION EN CORSE (p. 20 )

M. Jean-Jacques Hyest, Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

RESPONSABILITÉ DU GOUVERNEMENT
DANS LA SITUATION EN CORSE (p. 21 )

M. Henri de Raincourt, Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

VOLET HUMANITAIRE DE LA CRISE DU KOSOVO (p. 22 )

Mme Maryse Bergé-Lavigne, M. Alain Richard, ministre de la défense.

CONCLUSIONS DE LA COMMISSION
D'ENQUÊTE SÉNATORIALE SUR LES PERSONNELS
DE L'ÉDUCATION NATIONALE (p. 23 )

MM. Jean Bizet, Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

AVENIR DES RETRAITES (p. 24 )

MM. Claude Domeizel, Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

AVENIR DES RETRAITES (p. 25 )

MM. Philippe Marini, Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

BAISSE DU CHÔMAGE AU MOIS D'AVRIL (p. 26 )

MM. Roland Courteau, Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

AVENIR DE L'INDUSTRIE TEXTILE (p. 27 )

MM. Michel Mercier, Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie ; le président.

Suspension et reprise de la séance (p. 28 )

PRÉSIDENCE DE M. PAUL GIROD

4. Epargne et sécurité financière. - Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence (p. 29 ).

Article 21 (suite) (p. 30 )

Amendement n° 136 de M. Angels. - MM. Bernard Angels, Philippe Marini, rapporteur de la commission des finances ; Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. - Adoption.
Amendement n° 19 de la commission et sous-amendements n°s 121 à 123 et 199 de M. Bourdin ; amendements n°s 137 à 139 de M. Angels. - MM. le rapporteur, Joël Bourdin, Bernard Angels, le ministre. - Retrait des sous-amendements n°s 121 et 123 ; adoption des sous-amendements n°s 122, 199 et de l'amendement n° 19 modifié, les amendements n°s 137 à 139 devenant sans objet.
Adoption de l'article modifié.

Article 22 (p. 31 )

Amendements n°s 211 de M. Badré et 216 de M. Bourdin. - MM. Denis Badré, Joël Bourdin, le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement n° 211, l'amendement n° 216 devenant sans objet.
Amendements n°s 217 rectifié bis de M. Bourdin et 230 de M. Badré. - MM. Joël Bourdin, Denis Badré, le rapporteur, le ministre. - Retrait de l'amendement n° 230 ; adoption de l'amendement n° 217 rectifié bis.
Amendement n° 125 rectifié de M. Bourdin. - MM. Joël Bourdin, le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 23 (p. 32 )

Amendements n°s 20 de la commission et 140 de M. Angels. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement n° 20, l'amendement n° 140 étant devenu sans objet.
Amendement n° 21 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 24 (p. 33 )

Mme Marie-Claude Beaudeau, M. Alain Vasselle.
Amendements n°s 186 de M. Loridant, 22 de la commission et sous-amendements n°s 218, 219 rectifié de M. Bourdin, 225 de M. Ostermann et 259 de M. Badré ; amendements n°s 141, 142 de M. Angels et 187 de M. Loridant. - MM. le rapporteur, Joël Bourdin, Denis Badré, le ministre, Jean-Louis Carrère, Mme Marie-Claude Beaudeau. - Retrait des sous-amendements n°s 225 et 259 ; rejet de l'amendement n° 186 ; adoption des sous-amendements n°s 218, 219 et de l'amendement n° 22 modifié rédigeant l'article, les amendements n°s 141, 187 et 142 devenant sans objet.

Article 25 (p. 34 )

Amendements n°s 23 de la commission et 143 de M. Angels. - MM. le rapporteur, Bernard Angels, le ministre. - Adoption de l'amendement n° 23 supprimant l'article, l'amendement n° 143 devenant sans objet.

Article 25 bis (p. 35 )

Amendement n° 24 de la commission et sous-amendements n°s 220 de M. Bourdin et 260 de M. Badré ; amendement n° 144 de M. Angels. - MM. le rapporteur, Joël Bourdin, Denis Badré, le ministre. - Retrait des sous-amendements n°s 220 et 260 ; adoption de l'amendement n° 24 rédigeant l'article, l'amendement n° 144 étant devenu sans objet.

Article 26 (p. 36 )

Amendement n° 145 de M. Angels. - Devenu sans objet.
Amendement n° 25 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 232 rectifié de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Articles 27 et 28. - Adoption (p. 37 )

Article 29 (p. 38 )

Amendements n°s 188, 189 de M. Loridant et 124 de M. Bourdin. - Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Joël Bourdin, le rapporteur, le ministre. - Retrait de l'amendement n° 124 ; rejet des amendements n°s 188 et 189.
Adoption de l'article.

Article 30 (p. 39 )

Amendement n° 146 de M. Angels. - MM. Jean-Louis Carrère, le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Suspension et reprise de la séance (p. 40 )

M. le rapporteur.

Intitulé du titre Ier (p. 41 )

Amendement n° 233 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement modifiant l'intitulé.

Intitulé du chapitre Ier (p. 42 )

Amendement n° 234 de la commission. - Adoption de l'amendement modifiant l'intitulé.

Article 31. - Adoption (p. 43 )

Article 32 (p. 44 )

Amendement n° 235 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Retrait.
Adoption de l'article.

Article 33 (p. 45 )

Amendement n° 26 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Retrait.
Amendement n° 27 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 34 (p. 46 )

Amendement n° 236 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Retrait.
Amendement n° 28 de la commission. - Adoption.
Amendement n° 237 de la commission. - Retrait.
Adoption de l'article modifié.

Article 35 (p. 47 )

Amendement n° 29 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre, Marc Massion. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 36. - Adoption (p. 48 )

Article 37 (supprimé) (p. 49 )

Amendement n° 30 rectifié de la commission et sous-amendement n° 262 de M. Deneux. - MM. le rapporteur, Denis Badré, le ministre. - Retrait du sous-amendement ; adoption de l'amendement rétablissant l'article.

Article 38 (p. 50 )

Amendement n° 31 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre, Marc Massion. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article additionnel après l'article 38 (p. 51 )

Amendement n° 32 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 39 (p. 52 )

Amendements n°s 33 et 34 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Retrait des deux amendements.
Adoption de l'article.

Article additionnel après l'article 39 (p. 53 )

Amendement n° 35 de la commission. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 40 (p. 54 )

Amendement n° 36 de la commission. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 41. - Adoption (p. 55 )

Renvoi de la suite de la discussion.

5. Dépôt d'une proposition de loi (p. 56 ).

6. Dépôt d'une proposition de résolution (p. 57 ).

7. Renvoi pour avis (p. 58 ).

8. Dépôt d'un rapport (p. 59 ).

9. Ordre du jour (p. 60 ).



COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. GÉRARD LARCHER
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures quarante-cinq.)

1

PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

2

ÉPARGNE ET SÉCURITÉ FINANCIÈRE

Suite de la discussion d'un projet de loi
déclaré d'urgence

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi (n° 273, 1998-1999), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à l'épargne et à la sécurité financière. [Rapport n° 300 (1998-1999).]
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'article 8.

Chapitre III

Les groupements locaux d'épargne

Article 8



M. le président.
« Art. 8. - Les groupements locaux d'épargne sont des sociétés coopératives, soumises aux dispositions de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 précitée sous réserve des dispositions de la présente loi.
« Ils contribuent à l'élaboration, dans le cadre des missions d'intérêt général qui leur sont confiées, des orientations générales de la caisse d'épargne et de prévoyance à laquelle ils sont affiliés. Ils ont également pour objet, dans le cadre de ces orientations générales, de favoriser la détention la plus large du capital de cette caisse d'épargne et de prévoyance en animant le sociétariat.
« Les groupements locaux d'épargne ne peuvent faire d'opérations de banque. Ils sont dispensés de l'immatriculation au registre du commerce et des sociétés. Ils sont affiliés à la caisse d'épargne et de prévoyance dans la circonscription territoriale de laquelle ils exercent leur activité.
« Le niveau de la rémunération des parts sociales détenues par les sociétaires des groupements locaux d'épargne est fixé par l'assemblée générale de la caisse d'épargne et de prévoyance à laquelle ces groupements locaux d'épargne sont affiliés. »
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 11, M. Marini, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit cet article :
« Les statuts des caisses d'épargne et de prévoyance prévoient que les sociétaires d'une caisse d'épargne et de prévoyance sont répartis en sections locales d'épargne délibérant séparément, et dont les délégués constituent l'assemblée générale de la caisse d'épargne et de prévoyance. Les sections locales d'épargne doivent rassembler au moins 500 sociétaires personnes physiques ou dix sociétaires personnes morales. Elles ont pour objet de favoriser la détention la plus large du capital des caisses d'épargne et de prévoyance en animant le sociétariat. »
Par amendement n° 176, M. Loridant, Mme Beaudeau, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après le deuxième alinéa de l'article 8, un alinéa ainsi rédigé :
« Pour faciliter cette détention, les groupements locaux d'épargne sont habilités à proposer aux sociétaires définis à l'article 9 de la présente loi une première part sociale à un prix privilégié. »
Par amendement n° 177 rectifié, Mme Beaudeau, MM. Loridant et Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de compléter in fine l'article 8 par un alinéa ainsi rédigé :
« L'intérêt servi aux parts sociales hors les parts bénéficiant de prix de souscription priviligiés, rapporté à la valeur nominale de chaque part, ne peut être supérieur au taux de rémunération du livret A des caisses d'épargne. »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 11.
M. Philippe Marini, rapporteur de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Je ne surprendrai pas notre assemblée en disant que la commission des finances, constante dans ses positions, considère comme inutiles et exagérément compliqués les groupements locaux d'épargne, les GLE.
Nous estimons que l'on doit se passer de ces structures, mais, pour autant, qu'il faut prendre les dispositions nécessaires afin d'animer le sociétariat sur le plan local.
Il existe, à cet égard, une forme prévue par la loi de 1947 portant statut de la coopération, à savoir les sections locales d'assemblée générale. Ces sections locales peuvent être délimitées sur le terrain en fonction de la réalité commerciale, par exemple par groupe d'agences, si l'on veut faire en sorte que chaque territoire soit bien irrigué par les moyens de la Caisse d'épargne. En outre, ces sections locales sont appelées à se réunir, chacune déléguant ses représentants à l'assemblée générale de la Caisse d'épargne.
Il y a donc animation sur le plan local et, en même temps, expression du sociétariat à deux niveaux : celui de la section et celui de la Caisse. J'avoue que le système des GLE - je n'y reviens qu'en quelques mots - me surprend dans la mesure où il me paraît témoigner d'une véritable méfiance pour le sociétariat que l'on ne considère pas digne de se placer au seul niveau économiquement pertinant, c'est-à-dire celui de l'entreprise.
Or ces structures, mes chers collègues, ne sont pas conformes à la lettre et à l'esprit de la loi de 1947 portant statut de la coopération, puisqu'elles n'exercent aucune activité économique. (M. Carrère s'exclame.) En l'occurrence, je suis un coopérateur.
Une coopérative, c'est une entreprise, ce n'est pas une structure juridique sans activité, un simple écran pour organiser la dévolution des parts sociales d'une caisse d'épargne. On ne peut pas sortir de cette appréciation simple. Ce ne sont que des structures de portage. En tant que telles, elles ne sont pas conformes à la lettre et à l'esprit du droit de la coopération. Il suffit d'ailleurs d'entendre sur ce sujet les représentants du groupement national de la coopération, chez lesquels, cher collègue Carrère, vous avez sans doute bon nombre d'amis, qu'il vous suffirait d'écouter !
Je crois qu'il faut en revenir à des choses plus raisonnables, à une procédure de mutualisation plus simple permettant aux caisses d'épargne de porter transitoirement leurs propres parts sociales pendant la période de souscription.
Par cet amendement, nous indiquons à nouveau notre volonté de simplification, qui nous paraît aller tout à fait dans le sens des intérêts réels à long terme du réseau des caisses d'épargne.
M. le président. La parole est à M. Loridant, pour défendre les amendements n°s 176 et 177 rectifié.
M. Paul Loridant. L'amendement n° 176 a une grande importance.
Par un prix préférentiel de la première part sociale souscrite, nous voulons favoriser le sociétariat pour le plus grand nombre de nos concitoyens et pour les plus modestes d'entre eux.
Cet amendement participe de la conception générale que nous avons de l'organisation des caisses d'épargne et de leur sociétariat, et qu'illustent nos amendements sur les articles 6 et 8 relatifs à l'affectation des excédents de gestion comme à la quotité de la rémunération des parts sociales.
Il convient de favoriser la diffusion effective du sociétariat auprès du plus grand nombre de personnes possible en vue de faire preuve à la fois d'innovation et de favoriser une plus grande participation de nos concitoyens au devenir de notre réseau de caisses d'épargne.
Notre proposition vise donc à permettre que la première part sociale détenue par les particuliers soit mise à leur disposition à un tarif privilégié, qui pourrait être, par exemple, fixé à dix francs, afin que chacun des titulaires d'un compte courant auprès des caisses d'épargne et a fortiori d'un livret A soit en mesure de s'en porter acquéreur.
Bien évidemment, cette part sociale prioritaire demeurerait rémunérée selon les conditions ou les orientations que nous avons précisées par ailleurs.
C'est donc dans un souci de large diffusion des parts sociales des groupements locaux d'épargne, élément fondamental de la réussite de la réforme, et dans le cadre de la pleine application du statut de la coopération que nous vous invitons, mes chers collègues, à adopter cet amendement.
L'amendement n° 177 rectifié procède de la même logique.
En effet, il vise, en cohérence avec la rédaction que nous avons proposée pour compléter l'article 6, à procéder au plafonnement de la rémunération des parts sociales détenues par les groupements locaux d'épargne à la même hauteur, c'est-à-dire le taux du livret A.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 176 et 177 rectifié ?
M. Philippe Marini, rapporteur. Ces amendements s'inscrivent dans le cadre des dispositions relatives aux groupements locaux d'épargne. Or, comme je l'ai indiqué voilà quelques instants, la commission souhaite une simplification des structures du groupe des caisses d'épargne et le remplacement des groupements locaux d'épargne par des sections locales d'assemblée générale. Les amendements n°s 176 et 177 rectifié sont donc incompatibles avec la position qu'elle a adoptée.
M. Paul Loridant. Hélas !
M. Philippe Marini, rapporteur. C'est pourquoi elle émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 11, 176 et 177 rectifié ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Le Gouvernement s'étant largement exprimé hier sur la suppression des groupements locaux d'épargne, je n'y reviendrai pas. J'émets un avis défavorable sur l'amendement n° 11.
S'agissant de l'amendement n° 176 relatif à l'existence d'une part privilégiée, le Gouvernement émet un avis favorable.
En revanche, il est défavorable à l'amendement n° 177 rectifié, qui vise à octroyer une rémunération différente aux parts selon qu'elles sont privilégiées ou non. Aucune raison ne justifie d'aller au-delà de l'idée qui consiste à permettre un sociétariat large. La rémunération doit être la même pour chacun des coopérateurs.
M. Philippe Marini, rapporteur. Cher collègue Loridant, votre proposition serait censurée par le Conseil constitutionnel.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 11.
M. Paul Loridant. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. A l'évidence, les membres du groupe communiste républicain et citoyen ne peuvent vous suivre, monsieur le rapporteur, puisque l'amendement que vous avez présenté revient à supprimer l'article 8 en son état actuel.
En adoptant une logique différente de la nôtre, vous vous opposez, en fait, à la diffusion des parts sociales pour le plus grand nombre possible de nos concitoyens. Or je me souviens de l'époque où M. Balladur, Premier ministre, était favorable à ce qu'il appelait « le capitalisme populaire ». Il est bien loin ce capitalisme populaire !
Nous proposons de réserver une part privilégiée, fixée à dix francs pour tous les souscripteurs. Il y a donc respect du principe d'égalité. Aussi, selon nous, notre amendement n° 176 n'encourt pas la censure du Conseil constitutionnel. Il s'agit d'un amendement de repli, par rapport à nos positions de principe. Alors que le capital des caisses d'épargne sera ouvert à l'ensemble de nos concitoyens, et notamment aux porteurs de livret A et aux clients des caisses d'épargne, il s'agit de faire en sorte que chacun de nos concitoyens puisse être sociétaire. C'est pourquoi, encore une fois, nous proposons que la première part soit vendue à dix francs pour l'ensemble des souscripteurs.
M. Philippe Marini, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. Sans esprit de polémique et dans le ton habituel de nos rapports, je voudrais réagir aux propos de notre collègue Paul Loridant.
La commission est favorable à la diffusion la plus large possible des parts de caisses d'épargne. C'est pourquoi nous faisons deux propositions ; à travers deux amendements que nous examinerons plus tard.
En premier lieu, il s'agit de faciliter la souscription par les anciens salariés du groupe des caisses d'épargne, ce qui représente beaucoup de monde et je crois que, avant la commission des finances, cette idée n'avait été évoquée par personne.
En second lieu, il s'agit de mettre en place un système de bons de souscription, éventuellement gratuits, permettant de préparer, au bénéfice des épargnants et dans de bonnes conditions, des émissions ultérieures de certificats coopératifs d'investissement.
Si ces initiatives ne dénotent pas un souci de large diffusion du sociétariat et d'implication dans le devenir des caisses d'épargne, les mots n'ont plus de sens.
Enfin, cher collègue Loridant, vous qui êtes si attentif aux risques d'inconstitutionnalité - vous avez rappelé à juste titre hier soir le combat que vous aviez mené lors de la mutualisation du Crédit agricole - vous devriez être particulièrement attentif aux imperfections du présent projet de loi, et notamment au fait que l'on créerait des sociétaires à plusieurs vitesses, avec certains GLE formés de personnes physiques et d'autres constitués de personnes morales, avec une expression différente au sein des assemblées générales et avec une part différente dans le processus de décision.
Ces éléments devraient inciter à une grande vigilance. Les formules préconisées par la commission des finances sont largement aussi participatives, sont moins complexes et ne sont pas frappées des mêmes incertitudes juridiques, voire constitutionnelles. Dans ces conditions, vous devriez vous y rallier de bon coeur.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 11, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'article 8 est donc ainsi rédigé, et les amendements n°s 176 et 177 rectifié n'ont plus d'objet.

Article 9



M. le président.
« Art. 9. - Peuvent être sociétaires d'un groupement local d'épargne dans les conditions prévues par les statuts les personnes physiques ou personnes morales ayant effectué avec la caisse d'épargne et de prévoyance une des opérations prévues aux articles 1er, 5, 6 et 7 de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 précitée, les salariés de cette caisse d'épargne et de prévoyance, les collectivités territoriales et, dans les conditions définies par l'article 3 bis de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 précitée, les autres personnes physiques ou personnes morales mentionnées à cet article. Les collectivités territoriales ne peuvent toutefois pas détenir ensemble plus de 20 % du capital de chacun des groupements locaux d'épargne. »
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 12, M. Marini, au nom de la commission, propose de supprimer cet article.
Par amendement n° 178, M. Loridant, Mme Beaudeau, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de compléter in fine l'article 9 par deux alinéas ainsi rédigés :
« Les titulaires de livret A pourront, dans la limite de 51 % de son capital, devenir sociétaires d'un groupement local d'épargne, chacun d'entre eux pouvant obtenir une part sociale par tranche de 10 000 francs déposés sur ce livret et se voyant octroyer à cette occasion une part gratuite par livret A. Le nombre maximum de parts sociales détenu par un épargnant est plafonné à dix, ces parts restant inaliénables durant cinq années après leur souscription.
« En outre, chaque groupement local pourra émettre des certificats coopératifs d'investissement à destination d'investisseurs à statut public et semi-public et/ou agréés en qualité d'établissement mutualiste ou coopératif. »
Par amendement n° 179, M. Loridant, Mme Beaudeau, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de compléter in fine l'article 9 par deux alinéas ainsi rédigés :
« Tout sociétaire d'un groupement local d'épargne désirant liquider tout ou partie de ses parts sociales peut les revendre au nominal au groupement local d'épargne dont il relève.
« Chaque groupement local d'épargne revend au nominal les parts sociales qui lui sont cédées par les sociétaires. »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 12.
M. Philippe Marini, rapporteur. C'est un amendement de conséquence de la suppression des GLE.
M. le président. La parole est à Mme Beaudeau, pour présenter les amendements n°s 178 et 179.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Ces amendements ont pour objet de compléter la rédaction de l'article 9 en prévoyant de donner un poids spécifique aux titulaires de livrets A et de favoriser, dans des limites assez précises, leur sociétariat dans le cadre des groupements locaux d'épargne.
Ils visent à compléter, si l'on peut dire, la proposition que nous avons faite aux articles 6 et 8 en vue de diffuser des parts sociales à taux privilégiés auprès de l'ensemble des titulaires de livrets A, et procèdent quant au fond, des mêmes principes.
Nous ne parvenons pas, chers collègues de la majorité sénatoriale, à être convaincus des bienfaits du libéralisme.
Nous pensons toutefois qu'il est important que, pour réussir, cette réforme des caisses d'épargne favorise autant que faire se peut un développement positif d'un sociétariat véritablement populaire, que la mesure que nous préconisons peut d'ailleurs encourager.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 178 et 179 ?
M. Philippe Marini, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements, qui visent à aménager le système des GLE, alors même qu'elle souhaite sa supppression.
Nous sommes d'ailleurs attentifs aux préoccupations exprimées par le groupe communiste républicain et citoyen, mais nous estimons qu'il y a d'autres méthodes pour permettre une large diffusion du sociétariat. Au demeurant, madame Beaudeau, si l'on veut le succès d'une politique de diffusion du sociétariat, il faut trouver - c'est la première condition - un équilibre économique raisonnable entre la profitabilité des caisses, leur développement, la capacité de rémunérer les porteurs de parts. En effet, la souscription de parts de capital constitue non pas un geste charitable, mais une adhésion à la stratégie de développement d'un établissement de crédit. Par conséquent, ces parts, même si ce sont des parts de sociétaire, doivent être rémunérées. Afin d'y parvenir, encore faut-il inspirer suffisamment confiance.
Toutes les dispositions témoignant de générosité en visant à distribuer le plus largement possible des parts de sociétaire me paraissent se situer en dehors de la logique de fonctionnement des caisses si elles ne reposent pas sur une vision économique raisonnable assurant aux caisses la capacité d'assumer leur développement, de rémunérer leurs porteurs de parts, de préparer leur avenir, de nouer des alliances, de changer leur mode de gestion, d'affirmer plus de dynamisme. C'est en préfèrant cette logique aux artifices juridiques de toutes sortes que l'on pourra vraiment assurer le devenir des caisses d'épargne et leur ancrage dans le tissu économique régional.
La commission, je le répète, émet un avis défavorable sur les amendements n°s 178 et 179.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 12, 178 et 179 ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. J'ai déjà exprimé ma position sur les questions évoquées par les deux premiers amendements.
Le Gouvernement est favorable à l'existence d'une part à prix privilégié de façon à permettre la diffusion la plus large. Mais, pour des raisons que j'ai évoquées au cours de la discussion générale et qui touchent à la constitutionnalité de la mesure, le Gouvernement n'est pas favorable à la part gratuite présentée par l'amendement n° 178.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 12, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 9 est supprimé et les amendements n°s 178 et 179 n'ont plus d'objet.

Chapitre IV

La Caisse nationale des caisses d'épargne
et de prévoyance

Article 10



M. le président.
« Art. 10. - La Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance, constituée selon les modalités définies à l'article 26 de la présente loi, est une société anonyme à directoire et conseil de surveillance régie par les articles 118 à 150 de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 précitée, dont les caisses d'épargne et de prévoyance détiennent ensemble 60 % au moins du capital et des droits de vote. Elle est un établissement de crédit au sens de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 précitée. Elle est autorisée à fournir les services d'investissement prévus aux articles 4 et 5 de la loi n° 96-597 du 2 juillet 1996 de modernisation des activités financières.
« Le conseil de surveillance de la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance comprend notamment des membres élus par les salariés du réseau des caisses d'épargne dans les conditions prévues par ses statuts. La nomination du président du directoire de la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance est soumise à un agrément du ministre chargé de l'économie. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 13, M. Marini, au nom de la commission, propose, dans la première phrase du premier alinéa de cet article, de remplacer le pourcentage : « 60 % » par les mots : « la majorité ».
Par amendement n° 180, M. Loridant, Mme Beaudeau, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, dans la première phrase du premier alinéa de l'article 10, de remplacer le pourcentage : « 60 % » par le pourcentage : « 70 % ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 13.
M. Philippe Marini, rapporteur. Nous abordons un aspect tout à fait important sur lequel je me suis permis de mettre l'accent lors de mon intervention dans la discussion générale.
M. Jean-Louis Carrère. On a bien entendu !
M. Philippe Marini, rapporteur. D'ailleurs, monsieur le ministre, puisque vous nous disiez hier, lorsque nous évoquions les fameux GLE, qu'il fallait faire confiance à M. Charles Milhaud, président du directoire du Centre national des caisses d'épargne et de prévoyance, le CENCEP, je serais à la limite tenté, sur plusieurs autres sujets, de vous prendre au mot : monsieur le ministre, suivons les avis exprimés...
M. Jean-Louis Carrère. Pauvre dialectique !
M. Philippe Marini, rapporteur. « Pauvre dialectique », dites-vous, mon cher collègue ! Mais il y a des procès-verbaux, il y a des comptes rendus qui ont été publiés au bulletin des commissions, avec les positions exprimées par les personnalités que la commission a auditionnées !
M. Milhaud a été auditionné ; il s'est exprimé clairement sur trois points, que je vais vous rappeler.
Effectivement, sur les GLE, il a exprimé l'opinion que M. le ministre a indiquée après avoir tenu dans le passé d'autres positions et en étant encore susceptible d'en changer.
En ce qui concerne le dividende social et les projets d'intérêt général, d'économie locale, sociale, etc., M. Milhaud a dit - je suis prêt à vous communiquer l'extrait de l'audition - qu'il fallait en revenir au texte initial du Gouvernement.
Monsieur le ministre, si le Gouvernement considère que, sur les points concernant la gestion des caisses d'épargne, il faut faire confiance à ce qui est dit dans le réseau par les bons techniciens, par les gestionnaires, eh bien ! sur ce point aussi, il devrait ajuster sa position sur celle de M. Milhaud, qui s'est toutefois prononcé « pour un plafond de dépenses d'intérêt général en pourcentage du résultat net comptable des caisses plutôt que pour un plancher ». Les propos qu'il a tenus sont écrits noir sur blanc !
Enfin, s'agissant du point qui fait l'objet de notre amendement n° 13, là aussi, M. Milhaud, lors de son audition par la commission, a considéré qu'un contrôle à 50 % de la future Caisse nationale était amplement suffisant pour déterminer son contrôle et sa stratégie et que le seuil de 60 % prévu actuellement dans le projet de loi risquait de handicaper le devenir du réseau en restreignant la place possible pour d'éventuels échanges de capital dans le cadre d'alliances avec d'autres groupes et d'autres établissements de crédit.
La commission considère que la détention par les caisses d'épargne de 60 % au moins du capital et des droits de vote de la Caisse nationale est une disposition ou trop bénigne ou excessive.
En d'autres termes, il existe, en droit des sociétés, deux seuils significatifs : le seuil de 50 % et celui des deux tiers. Mais prévoir un pourcentage se situant entre les deux n'a pas de sens, car de deux choses l'une : ou bien l'on assigne aux caisses d'épargne un contrôle et, alors, la Caisse nationale étant une société anonyme de droit commun - certes à conseil de surveillance et directoire, mais une société anonyme tout de même - le pouvoir de décision en assemblée générale est de 50 % des actions plus une ; ou bien l'on souhaite verrouiller davantage le système, et c'est la majorité statutaire, celle qui est nécessaire pour modifier les statuts en assemblée générale extraordinaire, qui est le bon seuil, c'est-à-dire les deux tiers des actions plus une. Mais le pourcentage de 60 % n'a, de notre point de vue, pas de légitimité particulière.
C'est pourquoi cet amendement n° 13, sur lequel, d'ailleurs, bon nombre de personnes s'étant exprimées sur ce sujet me semblent d'accord, est soumis à la sagacité de la Haute Assemblée.
M. le président. La parole est à Mme Beaudeau, pour présenter l'amendement n° 180.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Monsieur le président, si vous le permettez, j'exposerai également les amendements n°s 181 rectifié et 182.
M. le président. Je vous en prie.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Cette série d'amendements concerne la question, moins importante, de la propriété du capital de la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance, capital dont la répartition peut d'ailleurs être un élément indicatif de l'orientation stratégique future du réseau dans son ensemble.
Il pourrait en effet sembler contradictoire avec nos propositions initiales que nous souhaitions mettre en quelque sorte en position minoritaire la Caisse des dépôts et consignations, eu égard au rôle que cette institution est sans doute appelée à jouer dans les années à venir.
Je voudrais aussi souligner que ces missions tout à fait particulières de la Caisse des dépôts et consignations sont un peu, depuis sa création et, singulièrement, depuis la Libération, le fil rouge ou le fil conducteur de son action.
Je ne voudrais pas que vous considériez notre amendement portant sur la part du capital détenue dans la Caisse nationale par la Caisse des dépôts et consignations comme une marque de défiance à l'égard de cet établissement. ll s'agit bien plutôt d'un complément indispensable à notre position de principe : les caisses d'épargne locales et/ou régionales doivent disposer, en termes de propriété, de l'essentiel du capital de la Caisse nationale.
Cette position - on l'aura remarqué - va de pair avec l'affirmation du rôle régulateur déterminant de la Caisse nationale auprès de l'ensemble des caisses du réseau, rôle que nous affirmons dans l'amendement n° 181 rectifié visant à compléter le premier alinéa de l'article 10.
Evidemment, vous pourriez nous objecter que cette orientation générale pourrait fermer la porte à toute association entre le réseau des caisses d'épargne et des réseaux équivalents au niveau européen ou d'autres partenaires de la place.
Je ferai simplement observer que la coopération entre institutions financières, comme d'ailleurs entre entreprises de manière générale, peut présenter d'autres formes que celle de la participation au capital et que cette participation n'est donc pas nécessairement le passage obligé pour la mise en oeuvre d'une synergie de moyens.
Evidemment, la présentation de ces trois amendements nous amène à considérer également les amendements déposés par la commission des finances, qui souhaite réduire au simple critère de détention de la majorité du capital la part prise par les caisses locales dans le capital de la Caisse nationale.
Je voudrais quand même faire ici un bref rappel des positions de M. le rapporteur depuis le début de ce débat.
On soulignera, par exemple, que cette volonté de réduire à 51 % la part du capital de la Caisse nationale détenue par les caisses locales va de pair avec la volonté de faire disparaître la notion de dividende social dans l'affectation du résultat des caisses et, évidemment, l'affirmation de la nécessité de majorer d'autant la rémunération des parts sociales.
L'ensemble de ces propositions illustre donc clairement, monsieur le rapporteur, le choix qui a été opéré par la commission des finances et qui consiste à prendre appui sur l'ouverture que représente le débat sur la mutation statutaire des caisses d'épargne pour pervertir, en fin de compte, les missions assumées par celles-ci au service de la collectivité, en banalisant de plus en plus leur mode de fonctionnement.
Cette démarche va d'ailleurs de pair avec une remise en cause de la quotité de leurs ressources propres, au-delà du débat déjà ancien sur le niveau des rémunérations des livrets défiscalisés.
Nous ne pouvons donc que proposer à la Haute Assemblée de voter plutôt nos amendements que ceux qui ont été déposés par M. le rapporteur.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 180 ?
M. Philippe Marini, rapporteur. Je rejoins tout à fait Mme Beaudeau, dont la logique est imperturbable. Cependant, cette logique n'est pas celle de la majorité de la commission, et celle-ci ne peut donc qu'émettre un avis défavorable sur l'amendement n° 180.
Je crois que vouloir instaurer un contrôle à plus des deux tiers peut se comprendre, même si je suis opposé à cette thèse. En revanche, vouloir mettre en place un contrôle à 60 %, c'est-à-dire rester au milieu du gué, me semble inadéquat, je le répète, et la proposition de Mme Beaudeau vient conforter celle de la commission : il faut choisir entre la majorité simple et la majorité qualifiée, mais on ne peut opter pour une solution intermédiaire.
En tout cas, la commission est opposée à l'amendement n° 180,
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 13 et 180 ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Le Gouvernement est plus conservateur que la majorité sénatoriale.
M. Philippe Marini, rapporteur. Ce n'est pas étonnant ! (Sourires.)
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Il a en effet estimé souhaitable, puisque les caisses détiennent aujourd'hui 60 % de la caisse centrale, d'en rester là.
Le juridisme, ou plutôt l'extrémisme - attitude que nous avons déjà rencontrée hier - qui conduit à vouloir tout ou rien me semble être, en matière financière et notamment sur un sujet aussi sensible, la meilleure manière de faire échouer le projet. Or je ne crois pas que ce soit l'objectif du Sénat, même si cela y ressemble !
Aller au-delà du seuil de 60 % conduirait à faire disparaître toute marge pour de possibles alliances, sauf à diminuer considérablement la part de la Caisse des dépôts, ce qui conduirait à diminuer la maîtrise publique, et donc le soutien qu'il faudra pourtant que la Caisse apporte pendant un certain temps au nouveau réseau, parce que, hélas ! on ne peut aller au-delà de 100 %.
C'est d'ailleurs en ce sens que l'amendement n° 180 me surprend. Mme Beaudeau a d'ailleurs elle-même relevé les contradictions qu'il comprend : on ne peut pas vouloir à la fois plus pour les caisses, un certain partenariat, suffisamment de parts pour la Caisse des dépôts, et conserver une signification au pôle public qu'elle appelle de ses voeux.
Dans ces conditions, on ne peut pas aller au-delà de 60 %. Doit-on diminuer ce seuil ? Ce serait contraire à ce qui se passe dans tous les réseaux ! Vous avez cité hier, monsieur le rapporteur, l'exemple du Crédit agricole pour ce qui est de la possibilité de conserver un capital variable et d'émettre néanmoins des CCI. Je vous renvoie à cet exemple, comme vous m'avez renvoyé tout à l'heure à celui du président du directoire.
Au Crédit agricole, 75 % du capital sont détenus par les caisses. Aucun organisme de type mutualiste ou coopératif n'a moins de 60 % !
M. Marcel Deneux. C'est faux !
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je vois donc mal pourquoi nous irions jusqu'à une situation de simple majorité. Avec 60 %, nous sommes déjà en bas de la fourchette ; il ne semble pas souhaitable de descendre plus bas.
La réforme a pour vocation de favoriser le développement des caisses d'épargne, elle n'a pas vocation à tout « chambouler » pour le plaisir. Aujourd'hui, nous sommes à 60 % et il existe plutôt des inconvénients à augmenter ou à diminuer ce pourcentage. Dans ces conditions, je suis d'avis d'en rester à 60 %.
De là, découle la position du Gouvernement sur les différents amendements : il est défavorable tant à celui de la commission qu'à celui de Mme Beaudeau.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 13.
M. Marcel Deneux. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Deneux.
M. Marcel Deneux. Je suis quelque peu étonné de la manière dont cette discussion s'instaure. Nous sommes quand même bien en train de doter d'un statut une structure qui sera peut-être, à l'avenir, l'une des premières banques importantes de ce pays ! Or nous nous comportons comme si ces statuts ressortissaient à la loi de 1901 sur les associations ! Nous sommes pourtant dans le cadre de la loi de 1966 sur les sociétés commerciales !
Cela étant, permettez-moi de rectifier au passage quelques-unes des erreurs que j'ai relevées, notamment dans les propos de M. le rapporteur.
Des seuils techniques sont fixés dans cette loi, et 50,1 % comme 66,1 % sont des pourcentages qui ont une signification ; tout le reste n'a aucune signification en matière de gestion de société !
A cet égard, monsieur le ministre, permettez-moi de souligner que les caisses régionales détiennent non pas 75 % mais 92 % de la Caisse nationale du Crédit agricole, et le personnel les 8 % restants.
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Votre formulation est plus exacte, mais les statuts prévoient « au moins 75 % ».
M. Philippe Marini, rapporteur. Ce n'est pas la loi !
M. Marcel Deneux. Quoi qu'il en soit, j'insiste : nous dotons d'un statut juridique une société qui deviendra l'une des grandes banques du pays, et il est nécessaire de lui donner les moyens de fonctionner. Or les seuil que nous retenons ne le permettent pas. Détenir 60 % ou 70 % ne présente aucun intérêt ! Je suis d'ailleurs étonné que M. Loridant, qui a une très bonne compétence technique en la matière, présente des propositions qui n'entrent pas dans la logique des sociétés commerciales.
M. Philippe Marini, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. Ce qui est proposé par la commission, c'est un plancher. Soyons donc bien clairs ! Lors de la promulgation de la réforme, quand la caisse nationale sera constituée, elle sera effectivement détenue au départ à 60 % par les caisses d'épargne et à 40 % par la Caisse des dépôts et consignations. Ce sera conforme à la loi telle que nous la concevons, 60 % étant supérieurs à 50 %.
Mes chers collègues, il ne faut pas travestir les positions de la commission. Nous estimons que la loi doit fixer un plancher représentant une garantie de contrôle pérenne des caisses d'épargne sur leur outil. C'est bien la fonction de la loi !
On s'est référé au Crédit agricole, mais les dispositions dont on a parlé sont, je crois, de nature non pas législative mais statutaire.
Que l'on veuille apporter des garanties supplémentaires de contrôle pérenne à la Caisse nationale des caisses d'épargne, je comprends bien, mais il s'agit d'un plancher, et tout taux de participation au-delà de 50 % nous convient.
Cependant, monsieur le ministre, le jour où une opération de partenariat supposant de faire évoluer rapidement tout le système se présentera, au plan européen, par exemple, faudra-t-il venir au Parlement en toute urgence ? Faudra-t-il déposer nuitamment un amendement gouvernemental dans un texte portant diverses dispositions d'ordre économique et financier ou dans le premier collectif qui viendra en discussion ? Est-ce une bonne façon de gérer l'évolution des phénomènes économiques ou d'éventuelles restructurations ?
Franchement, sur le fond, nous ne sommes pas du tout en désaccord, mais l'amendement de la commission se veut réaliste : nous voulons afficher avec beaucoup de fermeté et de clarté que la caisse nationale doit - et vous ne me contredirez pas - être contrôlée par les caisses d'épargne. C'est bien notre volonté, je crois, sur toutes ces travées. Qu'on l'écrive clairement et qu'on évite de devoir ultérieurement faire appel, dans l'urgence, au législateur parce que cela se révélerait indispensable pour parvenir à gérer la respiration naturelle des organismes économiques.
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. M. Deneux a raison, la formule que j'ai employée tout à l'heure était un peu cursive : les caisses régionales du Crédit agricole ne détiennent pas 75 %, elles détiennent « au moins 75 %. » En réalité, vous l'avez dit, c'est plutôt 90 % aujourd'hui.
M. Marcel Deneux. C'est 92 %, et 8 % pour le personnel.
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Cela étant, pour ma démonstration, le fait qu'elles doivent détenir au moins 60 % suffisait.
M. Marini nous a dit que cela relevait des statuts et non pas de la loi. Je suis au regret de devoir - c'est rare, mais cela peut arriver - le prendre en défaut : aux termes de l'article 17 de la loi de 1988 relative à la mutualisation du Crédit agricole, les caisses régionales ne peuvent disposer à elles toutes de moins de 75 %. C'est donc bien dans la loi que cela est inscrit !
Si cela vaut pour le Crédit agricole, cela vaut aussi pour les caisses d'épargne. Toute votre démonstration sur l'activité économique est donc intéressante, mais elle ne résiste pas au fait que, le Crédit agricole ayant sans conteste une activité économique florissante, il est prévu pour cet établissement un seuil supérieur à celui que nous voulons introduire pour les caisses d'épargne.
En réalité, détenir 50,1 % ou 60 % du capital, ce n'est pas la même chose, ou alors il vous faudra expliquer à tous les entrepreneurs privés qui détiennent entre 50 % et 66 % du capital qu'il ne sert à rien de détenir ces actions supplémentaires et qu'ils immobilisent leurs fonds pour rien. Je serais alors heureux d'entendre les réponses de MM. Arnault, Pinault, Bolloré, Bouygues ou d'autres, à qui vous êtes en train d'expliquer qu'ils gèrent mal leur entreprise.
En choisissant 60 %, nous laissons ainsi une plus grande latitude aux caisses d'épargne que celle qui était prévue en 1988 pour le Crédit agricole dans la loi de mutualisation. Mais les temps ont changé et il est bon de ne pas retenir un taux plus bas en prévoyant, par exemple, que les caisses d'épargne détiendront une part du capital supérieure à 50 %. Pourquoi, me direz-vous, n'avons-nous pas retenu 55 %, 56 % ou 57 % ? Ne chicanons pas à 1 % près ! Nous avons préféré retenir un taux rond, et celui de 60 % me paraît une bonne solution.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Personnellement, je ne souhaite jamais entrer dans ce jeu qui consiste à choisir des modèles. Hier, c'était le président du directoire ; aujourd'hui, c'est la loi sur le Crédit agricole.
Nous sommes ainsi, au hasard des amendements, soupçonnés d'extrémisme. La commission des finances affiche une position constante, que je connais et pratique depuis six ans : elle souhaite que la loi soit dépouillée de tout ce qui n'est pas absolument indispensable, alors que nous sommes, mes chers collègues, harcelés en permanence pour introduire dans notre ordre du jour des textes destinés à régler des problèmes liés à un balayage trop fin de nos textes, ce qui nous oblige à légiférer en permanence.
Il me semble qu'il n'y a aucune divergence de points de vue sur le sujet qui nous occupe ce matin. Comme M. le rapporteur l'a indiqué voilà un instant, il convient en effet que le sociétariat puisse avoir une majorité suffisante pour pouvoir garantir l'orientation des caisses, mais la suggestion que vous nous soumettez, monsieur le ministre, nous fait prendre le risque de devoir légiférer un jour dans la hâte pour répondre à une opportunité qui se présenterait et que tout le monde jugerait utile pour l'avenir des caisses d'épargne.
Je me tourne donc vers la majorité sénatoriale : si nous voulons être fidèles aux principes de Portalis sur la manière de rédiger la loi, faisons en sorte que celle-ci ne contienne que ce qui est absolument indispensable. N'ajoutons pas des seuils supplémentaires qui n'apporteraient aucune sécurité par rapport aux préoccupations des uns et des autres et qui ne feraient sans doute que surcharger l'ordre du jour futur de nos assemblées.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 13, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 180 n'a plus d'objet.
Par amendement n° 181 rectifié, M. Loridant, Mme Beaudeau, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de compléter in fine le premier alinéa de cet article par une phrase ainsi rédigée : « Elle joue le rôle de banque de référence des caisses d'épargne, sur mandat de la Fédération nationale des caisses d'épargne. »
Mme Beaudeau a déjà présenté cet amendement.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur. Cet amendement précise que la Caisse nationale joue le rôle de banque de référence des caisses d'épargne, sur mandat de la Fédération nationale des caisses d'épargne. Je crois que, si l'on incluait une disposition de cette nature, on créerait une véritable dyarchie dans le système en imposant un partage des responsabilités difficile à caractériser. Il pourrait en résulter des contestations, des luttes d'influence qui nuiraient à l'harmonie et aux capacités de développement du groupe.
Le rôle et la place de la Fédération nationale - nous y reviendrons - seront suffisamment définis dans le texte qui devrait résulter de nos travaux.
Voilà pourquoi la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je suis heureux de constater que M. le rapporteur reprend l'argumentation que j'ai développée dans mon propos liminaire, à savoir que l'un des objets de ce projet de loi est de supprimer la dyarchie, ou la confusion des rôles, qui existe aujourd'hui entre les deux organes, l'organe décisionnel et l'organe opérationnel, en réunissant le tout au sein de la Caisse nationale des caisses d'épargne. Or, si l'on précise que celle-ci agit sur mandat de la fédération, on retombe dans la même confusion.
Reste alors simplement l'énonciation du principe que la Caisse nationale est la banque de référence du réseau, ce qui est une évidence. C'est l'ensemble qui est construit de cette manière.
Voilà pourquoi je demande à Mme Beaudeau de bien vouloir retirer l'amendement, faute de quoi je ne pourrai que m'y opposer.
M. le président. L'amendement est-il maintenu, madame Beaudeau ?
Mme Marie-Claude Beaudeau. Sensible aux arguments de M. le ministre sur la confusion des responsabilités, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 181 rectifié est retiré.
Par amendement n° 14, M. Marini, au nom de la commission, propose de supprimer la seconde phrase du second alinéa de l'article 10.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. Dans sa logique, la commission estime qu'il faut faire du réseau des caisses d'épargne un réseau coopératif de droit commun.
M. Jean-Louis Carrère. C'est la banalisation !
M. Philippe Marini, rapporteur. Non, dans notre esprit, c'est un réseau coopératif de droit commun qui obéit à la loi que nous sommes en train de faire, qui définit les missions, la répartition du résultat, qui définit toute une architecture, avec des sections locales, des caisses d'épargne régionales, une Caisse nationale, et le contrôle de la Caisse nationale par les caisses d'épargne régionales.
Nous avons bien entendu M. le ministre, hier soir, nous dire qu'il cherchait une voie médiane, en quelque sorte un juste milieu, entre le statu quo impossible et pénalisant et la banalisation complète, qui serait contraire à l'esprit des caisses d'épargne.
Je crois que, sur cette voie, nous pouvons nous rejoindre.
M. Jean-Louis Carrère. Non, non !
M. Philippe Marini, rapporteur. Reportez-vous à toutes nos prises de position, relisez le rapport écrit, mon cher collègue : la commission des finances n'est pas en désaccord avec cette stratégie de par la voie médiane. Certes, nous ne plaçons pas la voie tout à fait au même endroit.
M. Jean-Louis Carrère. Ah ! Voilà !
M. Philippe Marini, rapporteur. Nous déplaçons légèrement les curseurs.
M. Jean-Louis Carrère. C'est une voie médiane de droite !
M. Philippe Marini, rapporteur. Ne politisez pas toujours le débat, monsieur Carrère !
M. Jean-Louis Carrère. C'est vous qui le politisez !
M. le président. Laissez parler M. le rapporteur, monsieur Carrère !
M. Jean-Louis Carrère. Il parle beaucoup et longtemps !
M. le président. Vous aurez vous-même la possibilité de parler d'abondance, tout à l'heure, si vous le souhaitez.
M. Philippe Marini, rapporteur. Ce n'est tout de même un méridional comme vous, monsieur Carrère, qui va critiquer le droit à la parole dans les assemblées ! Ayez au moins la patience d'entendre ce que j'ai à vous dire au nom de la commission des finances.
Je disais donc - je pensais que cela vous serait plutôt agréable - que nous n'étions pas en désaccord avec la stratégie de la voie médiane.
Toutefois, il faut donner à ce nouveau groupe, au travers de sa gestion, toutes ses chances de succès dans la compétition. En effet, qu'on le veuille ou non, ce groupe sera ouvert à la compétition, même s'il n'est pas strictement identique au Crédit agricole, au Crédit mutuel ou aux Banques populaires. Chacun de ces groupes a ses spécificités fortes, sa culture propre, sa façon à lui d'adhérer au terrain, sa représentativité des milieux socio-professionnels et économiques, mais il y a bien compétition entre eux.
Il faut donc que le groupe des caisses d'épargne puisse concevoir, mettre en oeuvre, développer sa propre stratégie selon les usages de la profession financière et bancaire.
Et, de ce point de vue, nous ne pouvons pas admettre qu'il faille, aux termes de la loi, l'agrément du ministre pour la désignation du président du directoire de la future Caisse nationale des caisses d'épargne. C'est une question de principe : le président du directoire de la Caisse nationale ne doit pas être traité différemment du directeur général de la Caisse nationale du Crédit agricole ou des dirigeants du Crédit mutuel ou des Banques populaires.
Cette position semble conforme à la nature même du projet qui nous est soumis.
En conclusion, je vais, moi aussi, me référer aux saints patrons en la matière. C'est en effet M. Raymond Douyère, dans son rapport au Premier ministre, qui émettait des critiques sévères - je ne sais si elles étaient d'essence libérale ou ultralibérale ! - sur ce principe de l'agrément au motif, disait-il, que cela affaiblissait l'autorité de l'organe central auprès du réseau.
Telles sont les raisons d'être de cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Ne vous en déplaise, monsieur le rapporteur, votre position me paraît complètement incohérente. Si vous voulez la banalisation, dites-le. Mais il vous faut alors refuser l'article 1er, que votre assemblée a adopté.
En effet, le début de cet article fait référence aux missions d'intérêt général. Par conséquent, la comparaison avec le président du Crédit agricole ou du Crédit mutuel n'a pas lieu d'être. S'il y a mission d'intérêt général, il y a intervention de la puissance publique, et il y a donc accord du Gouvernement pour la nomination du président du directoire.
S'il s'agissait d'un réseau coopératif comme les autres, comme vous venez de vous évertuer à le dire, vous auriez sans doute raison. Mais tel n'est pas le cas, en raison des missions d'intérêt général, que le Sénat a approuvées. Suivez donc la voie que le Sénat vous indique !
Le fait qu'il y ait des missions d'intérêt général a des conséquences, le dividende social par exemple, et entraîne un contrôle de la puissance publique, qui, jusqu'à nouvel ordre, est garante de l'intérêt général.
Pour ce qui est du rapport Douyère, il faut toujours lire le dogme dans sa dernière version, car le dogme évolue ! Vous aurez sans doute noté comme moi que, ce à quoi vous faites référence, une fois de plus, c'est le rapport au Premier ministre, mais que, depuis, dans son rapport à l'Assemblée nationale, M. Douyère en est revenu à des considérations plus sages et qu'il ne critique plus l'agrément du Gouvernement pour la nomination du président du directoire.
M. Philippe Marini, rapporteur. Vous l'avez ramené à la sagesse !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 14.
M. Bernard Angels. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Angels.
M. Bernard Angels. Sur ce point, nous sommes en désaccord complet avec la commission. L'agrément donné par M. le ministre de l'économie à la nomination du président du directoire est essentiel en ce qu'il participe du refus de la banalisation du réseau des caisses d'épargne.
M. Joël Bourdin. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Bourdin.
M. Joël Bourdin. Je voterai, bien sûr, cet amendement, car la procédure de l'agrément me paraît être d'un autre temps.
M. le ministre a exprimé le souci que l'intérêt général soit respecté. J'observe que la Caisse des dépôts et consignations sera tout de même largement représentée au sein du conseil de la Caisse nationale des caisses d'épargne. Voilà qui est de nature à nous rassurer.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Très bien !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 14, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 182, M. Loridant, Mme Beaudeau, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de compléter l'article 10 par un alinéa ainsi rédigé :
« Le solde du capital de la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance pourra être détenu par la Caisse des dépôts et consignations et d'autres investisseurs sans qu'aucun d'entre eux ne puisse dépasser le seuil de 25 %. »
Cet amendement a déjà été défendu par Mme Beaudeau.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur. L'un des points positifs du projet est que le taux de participation de la Caisse des dépôts et consignations dans le capital de la Caisse nationale des caisses d'épargne n'y figure point. Cela permet, dans le cadre des relations de partenariat, de faire évoluer les choses, le cas échéant, en fonction des nécessités de la vie économique.
De ce fait, la commission ne peut qu'être défavorable à la position strictement contraire que défend ici le groupe communiste républicain et citoyen.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. J'ai en partie répondu sur cet amendement tout à l'heure.
Je suis surpris de son contenu, compte tenu de son origine : en effet, s'il était adopté, il empêcherait la Caisse des dépôts et consignations de détenir plus de 25 % du capital, ce qui diminuerait la part publique dans le réseau des caisses d'épargne.
Cela ne me semble pas être en cohérence avec la volonté de créer ce pôle public dont nous avons tant débattu. Dans la mesure où, pour ma part, je tiens à ce pôle public, je suis défavorable à l'amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 182, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 10, modifié.

(L'article 10 est adopté.)

Article 11



M. le président.
« Art. 11. - I. - La Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance est l'organe central du réseau des caisses d'épargne, au sens de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 précitée. Elle est chargée de :
« 1° Représenter le réseau des caisses d'épargne, y compris en qualité d'employeur, pour faire valoir ses droits et intérêts communs ;
« 2° Négocier et conclure, au nom du réseau des caisses d'épargne, les accords nationaux et internationaux ;
« 3° Etablir les statuts types des caisses d'épargne et de prévoyance et des groupements locaux d'épargne ;
« 4° Créer ou acquérir toute société ou tout organisme utile au développement des activités du réseau des caisses d'épargne et en assurer le contrôle, ou prendre des participations dans de tels sociétés ou organismes ;
« 5° Prendre toute disposition administrative, financière et technique sur l'organisation et la gestion des caisses d'épargne et de prévoyance, leurs filiales et organismes communs, notamment en ce qui concerne les moyens informatiques ;
« 6° Prendre toute mesure visant à la création de nouvelles caisses d'épargne et de prévoyance ou à la suppression de caisses d'épargne et de prévoyance existantes, soit par voie de liquidation amiable, soit par voie de fusion ;
« 7° Définir les produits et services offerts à la clientèle et coordonner la politique commerciale ;
« 8° Assurer la centralisation des excédents de ressources des caisses d'épargne et de prévoyance ;
« 9° Réaliser toutes les opérations financières utiles au développement et au refinancement du réseau, notamment en ce qui concerne la gestion de sa liquidité et son exposition aux risques de marché ;
« 10° Prendre toute mesure utile à l'organisation, au bon fonctionnement et au développement du réseau des caisses d'épargne, et appeler les cotisations nécessaires à l'accomplissement de ses missions d'organe central du réseau des caisses d'épargne ;
« 11° Veiller à l'application, par les caisses d'épargne et de prévoyance, des missions d'intérêt général énoncées à l'article 1er de la présente loi.
« II. - Les caisses d'épargne et de prévoyance sont affiliées de plein droit à la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance. Un décret en Conseil d'Etat détermine les cas et conditions dans lesquels les établissements de crédit contrôlés par les caisses d'épargne et de prévoyance ou les établissements dont l'activité est nécessaire au fonctionnement du réseau des caisses d'épargne peuvent être affiliés à la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance en vue de l'exercice par celle-ci des missions définies à l'article 21 de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 précitée. »
Par amendement n° 15, M. Marini, au nom de la commission, propose, à la fin du quatrième alinéa (3°) du I de cet article, de supprimer les mots : « et des groupements locaux d'épargne ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. Cet amendement tire la conséquence de la suppression des GLE.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 15, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 183, M. Loridant, Mme Beaudeau, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de compléter in fine le huitième alinéa (7°) du I de l'article 11 par les mots : « en concertation avec les organisations agréées de consommateurs et dans le respect des principes d'intérêt général énoncé dans les dispositions de l'article 1er de la présente loi ».
La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. L'article 11 précise les conditions de fonctionnement de la Caisse nationale des caisses d'épargne, et notamment la qualité des relations institutionnelles qu'elle sera amenée à nouer au bénéfice de l'ensemble du réseau constitué.
Notre amendement vise simplement à ajouter à la liste des partenaires institutionnels de la Caisse nationale les associations nationales représentant les consommateurs afin de définir au mieux les besoins de la clientèle et les conditions de développement de la politique commerciale des établissements du réseau.
C'est une forme d'adaptation de l'orientation générale des missions fixées au réseau par la lettre de l'article 1er du projet de loi dans le corps de l'article 11.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur. Cet amendement est finalement de nature assez clientéliste.
Les organes dirigeants d'un groupe comme celui des caisses d'épargne doivent être à l'abri des groupes de pression et des lobbies de toute nature.
La formulation de cet amendement est particulièrement malvenue : il n'appartient pas à la loi de prévoir l'immixtion des organisations de consommateurs dans la gestion d'une caisse nationale, société anonyme de droit commun et organe central d'un réseau coopératif très proche du droit commun.
Au demeurant, mon cher collègue, les assemblées générales sont faites pour que les sociétaires s'y expriment. Pour notre part, nous sommes favorables à une véritable démocratie, au sein des sections locales et à l'échelon de la Caisse nationale. De plus, nous estimons que les mécanismes du sociétariat doivent jouer pleinement, et que les sociétaires sont, à notre avis, assez grands pour faire valoir leurs intérêts. Ce sont eux qui devront prendre en charge la défense de ceux-ci, en consacrant le temps nécessaire à l'examen des documents qui leur seront adressés, de telle sorte qu'ils puissent peser, au sein des assemblées générales, sur les décisions de gestion des caisses.
Par conséquent, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Le Gouvernement pense qu'il est bon que les caisses d'épargne prennent l'avis des consommateurs pour déterminer leur politique commerciale, mais qu'elles le font d'ores et déjà d'une manière efficace au travers des groupes de contact et des relations qu'elles ont nouées, notamment avec les organisations de consommateurs. Cette concertation sera d'ailleurs encore plus étroite lorsque ces associations ou leurs représentants pourront être membres des différents organes de direction des caisses.
Il faut donc distinguer le domaine stratégique du domaine opérationnel. S'agissant de ce dernier, il revient évidemment à la direction des caisses de gérer les affaires sans interférence des associations de consommateurs.
En ce qui concerne les orientations stratégiques, les échanges peuvent avoir lieu au sein des conseils, et il ne me semble pas bon d'aller au-delà.
Je ne suis donc pas favorable à cet amendement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 183.
M. Paul Loridant. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. Je ne peux pas laisser dire par M. le rapporteur que notre amendement est un amendement clientéliste sans réagir.
Il me semble tout de même qu'il y a, en matière de tarification des chèques et plus généralement de tarification bancaire ainsi qu'au travers des débats récurrents liés à l'émergence de l'euro comme moyen de paiement, suffisamment de contacts étroits entre, précisément, les associations de consommateurs et les organismes bancaires pour nous autoriser à dire que ces associations jouent un rôle très important. D'ailleurs, au sein du comité des usagers qui existe actuellement, ces associations sont particulièrement présentes et actives.
Je ne saurais donc accepter que l'on qualifie notre proposition de démagogique.
J'entends bien ce que dit M. le ministre. Les caisses d'épargne doivent, c'est vrai, disposer de leur liberté commerciale et stratégique. Il n'empêche que, si l'on veut que leur réseau soit à l'écoute de la grande masse de nos concitoyens, en particulier de ceux qui sont exclus du système bancaire, voire de la société, et qui connaissent par ailleurs des difficultés dans la vie quotidienne, la participation des associations de consommateurs n'est pas sans intérêt. Ces dernières sont d'ailleurs parfois issues des organisations syndicales représentatives, lesquelles participent activement à l'animation du réseau des caisses d'épargne.
Cela dit, monsieur le président, sensible à l'argument du Gouvernement et après son avis défavorable, je préfère retirer l'amendement n° 183.
M. le président. L'amendement n° 183 est retiré.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
Le premier, n° 118, est présenté par M. Bourdin et les membres du groupe des Républicains et Indépendants.
Le second, n° 222, est déposé par MM. Ostermann et Fournier.
Tous deux ont pour objet :
I. - De compléter le onzième alinéa (10°) du I de l'article 11 par une phrase ainsi rédigée :
« Ces opérations sont hors du champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée ;
II. - Afin de compenser les pertes de recettes pour l'Etat résultant de l'application du I ci-dessus, de compléter ce même article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - Les pertes de recettes résultant pour l'Etat de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée instituée par le 10° du I du présent article au profit des cotisations versées à la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une taxe additionnelle aux droits mentionnés à l'article 403 du même code. »
La parole est à M. Bourdin, pour défendre l'amendement n° 118.
M. Joël Bourdin. Il s'agit de préciser le régime fiscal de certaines opérations des caisses d'épargne au regard de la TVA. D'ailleurs, cet amendement a un frère jumeau qui tendra à introduire un article additionnel après l'article 19.
Mon amendement a pour objet de préciser que les cotisations des caisses d'épargne à l'organe central sont exonérées de TVA. En effet, ces opérations tant internes - c'est un premier argument - que financières n'entrent pas dans le cadre de l'assujettissement à la TVA.
Je me pose la question ; si c'est à tort, je suis prêt à retirer mon amendement après avoir entendu les explications de M. le rapporteur et de M. le ministre.
M. le président. La parole est à M. Ostermann, pour défendre l'amendement n° 222.
M. Joseph Ostermann. Cet amendement est identique à celui que vient de défendre M. Bourdin. Je n'ai rien à ajouter à son argumentation.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 118 et 222 ?
M. Philippe Marini, rapporteur. La commission estime que nos collègues ont tout à fait raison de poser cette question du régime fiscal des cotisations versées par les caisses d'épargne à la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance. C'est un sujet qu'il faut traiter, monsieur le ministre, et sur lequel nous avons besoin d'entendre des réponses précises.
De quoi s'agit-il ?
Nos collègues Joël Bourdin, Joseph Ostermann et les autres signataires des amendements n°s 118 et 222 proposent d'exonérer de la TVA les services rendus par la Caisse nationale, financés par des cotisations versées par les caisses d'épargne. Cela traduit, si je ne m'abuse, une demande de l'institution des caisses d'épargne qui la justifient par le fait que, jusqu'à présent, les cotisations perçues par le CENCEP n'étaient pas en pratique soumises à la TVA.
Qu'en est-il aux termes de la législation fiscale et en pratique ?
En premier lieu, l'article 261 C du code général des impôts prescrit que les opérations bancaires et financières sont exonérées de TVA. Il en est de même, selon l'article 261 B du même code, « des services rendus à leurs adhérents par les groupements constitués par des pesonnes physiques ou morales exerçant une activité exonérée de la taxe sur la valeur ajoutée... à la condition qu'ils concourent directement à la réalisation de ces opérations et que les sommes réclamées aux adhérents correspondent exactement à la part leur incombant dans les dépenses communes ».
En conséquence, si les cotisations des caisses d'épargne à la Caisse nationale entrent bien dans ce cadre défini par les articles 261 B et 261 C du code général des impôts, elles seront exonérées de TVA et il n'est pas besoin de prévoir une disposition spécifique dans l'actuel projet de loi.
A l'inverse, il peut exister des cotisations qui seraient la contrepartie d'opérations situées dans le champ d'application de la TVA. Je fais allusion à des services non financiers, non strictement bancaires, tels que des études juridiques, des analyses de gestion, des missions d'audit, payés par la Caisse nationale et refacturés par le biais de cotisations aux caisses d'épargne. Il me semble que ces cotisations sont bien assujetties à la TVA, à l'instar du régime qui s'applique actuellement aux différents réseaux bancaires, en particulier aux autres réseaux mutualistes et coopératifs avec lesquels les caisses d'épargne seront en concurrence.
La position de la commission des finances est la suivante : les caisses d'épargne doivent entrer dans cette compétition à armes égales, c'est-à-dire à droits égaux et à charges égales. Il faut être certain que le régime fiscal de leurs transactions internes est bien identique à celui des réseaux concurrents. Il n'y aurait aucune raison de faire bénéficier les caisses d'épargne d'un régime fiscal plus favorable que les autres établissements bancaires coopératifs puisque nous voulons nous inscrire dans le droit commun de la coopération, mais il n'y aurait pas de raison non plus de les pénaliser en leur infligeant un traitement moins favorable.
Il importe donc, monsieur le ministre, que vous nous précisiez ces points ainsi que la position de l'administration à l'égard des propositions de MM. Bourdin et Ostermann.
La commission des finances, quant à elle, a déposé à ce sujet l'amendement n° 258 tendant à insérer un article additionnel après l'article 19 par lequel elle proposera d'aligner le régime des caisses d'épargne sur celui des autres établissements bancaires coopératifs dans le cadre de l'article 260 C du code général des impôts.
Sous réserve des explications que vous voudrez bien nous apporter, monsieur le ministre, la commission souhaiterait que MM. Bourdin et Ostermann veuillent bien se rallier à l'amendement n° 258 que nous examinerons ultérieurement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 118 et 222 ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Nous abordons un sujet technique sur lequel il est utile d'apporter des précisions. Les opérations intra-groupe du réseau des caisses d'épargne, en particulier les cotisations, ne seront pas soumises à la TVA dès lors que, d'une part, globalement elles correspondent à des services ou à des avantages effectifs qui sont rendus aux différents cotisants et que, d'autre part, la répartition entre les différents cotisants correspond à la réalité de la répartition des services ou des avantages reçus. Il y a bien deux éléments : cela doit correspondre à des dépenses réelles ; individuellement, cela doit correspondre à une répartition qui reflète la réalité. C'est en effet l'application du droit commun.
En conséquence, les amendements qui sont proposés sont certes bienvenus parce qu'ils permettent d'apporter cette précision, mais inutiles, comme d'ailleurs l'amendement visant à insérer un article additionnel après l'article 19, évoqué par M. le rapporteur, car ils ne font que réintroduire dans la loi le droit commun. Mais encore fallait-il que le Gouvernement précise que c'est bien le droit commun qui s'applique.
Ces précisions ayant été apportées, je demande aux auteurs des amendements de bien vouloir accepter de les retirer.
M. le président. Monsieur Bourdin, votre amendement est-il maintenu ?
M. Joël Bourdin. J'avais sollicité M. le ministre afin d'obtenir une réponse : je suis satisfait et je retire donc mon amendement.
M. le président. L'amendement n° 118 est retiré.
Monsieur Ostermann, votre amendement est-il maintenu ?
M. Joseph Ostermann. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 222 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 11, modifié.

(L'article 11 est adopté.)

Articles 12 à 14



M. le président.
« Art. 12. - La Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance assure la garantie des déposants et des souscripteurs. Elle prend toutes mesures nécessaires pour garantir la liquidité et la solvabilité des caisses d'épargne et de prévoyance et pour organiser la solidarité financière au sein du réseau des caisses d'épargne, notamment par la création d'un fonds commun de garantie et de solidarité du réseau.
« La définition des règles d'organisation, de fonctionnement et de gestion de ce fonds relève de la compétence exclusive de la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance. La Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance peut notamment appeler en tant que de besoin des cotisations auprès des caisses d'épargne et de prévoyance afin de doter ou de reconstituer le fonds commun de garantie et de solidarité du réseau. » - (Adopté.)
« Art. 13. - Le directoire de la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance désigne un censeur auprès de chaque caisse d'épargne et de prévoyance. Il peut en désigner un auprès de tout autre établissement affilié au sens du II de l'article 11.
« Le censeur est chargé de veiller au respect, par la caisse d'épargne et de prévoyance ou l'établissement auprès duquel il est nommé, des dispositions législatives et réglementaires en vigueur ainsi que des règles et orientations définies par la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance dans le cadre de ses attributions.
« Le censeur participe, sans droit de vote, aux réunions du conseil d'orientation et de surveillance des caisses d'épargne et de prévoyance ou, pour les autres établissements, du conseil d'administration ou du conseil de surveillance. Il peut demander l'inscription de tout sujet à l'ordre du jour ainsi qu'une seconde délibération sur toute question relevant de ses attributions. En ce cas, il saisit sans délai la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance de cette question. Il est avisé des décisions de l'établissement et est entendu, à sa demande, par le directoire de la caisse d'épargne et de prévoyance ou par les instances dirigeantes de l'établissement. » - (Adopté.)
« Art. 14. - La Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance peut procéder, notamment sur proposition du censeur, à la révocation collective du directoire ou du conseil d'orientation et de surveillance d'une caisse d'épargne et de prévoyance dans les cas où il cesserait d'exercer ses fonctions ou prendrait des décisions non conformes aux dispositions législatives ou réglementaires ou aux instructions émises dans le cadre de ses compétences par la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance. Dans ce cas, celle-ci nomme une commission qui assume provisoirement les missions du directoire ou du conseil d'orientation et de surveillance de la caisse d'épargne et de prévoyance en attendant la désignation d'un nouveau directoire ou conseil d'orientation et de surveillance. » - (Adopté.)

Chapitre V

La Fédération nationale des caisses d'épargne
et de prévoyance

Article 15



M. le président.
« Art. 15. - La Fédération nationale des caisses d'épargne et de prévoyance est constituée selon les modalités prévues par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association. Elle regroupe l'ensemble des caisses d'épargne et de prévoyance représentées par le président de leur conseil d'orientation et de surveillance et par le président de leur directoire.
« La Fédération nationale des caisses d'épargne et de prévoyance est chargée de :
« - coordonner les relations des caisses d'épargne et de prévoyance avec le sociétariat et représenter leurs intérêts communs, notamment auprès des pouvoirs publics ;
« - participer à la définition des orientations stratégiques du réseau ;
« - définir les orientations nationales de financement par les caisses d'épargne et de prévoyance des projets d'économie locale et sociale et des missions d'intérêt général telles que définies à l'article 1er de la présente loi ;
« - contribuer à la définition, par la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance, des orientations nationales en matière de relations sociales dans le réseau ; »
« - organiser, en liaison avec la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance, la formation des dirigeants ;
« - veiller au respect des règles déontologiques au sein du réseau des caisses d'épargne ;
« - contribuer à l'implication du réseau des caisses d'épargne français au sein des établissements européens de même nature.
« La Fédération nationale des caisses d'épargne et de prévoyance est consultée par la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance sur tout projet de réforme concernant les caisses d'épargne et de prévoyance.
« La Fédération nationale des caisses d'épargne et de prévoyance appelle, pour le financement de son budget de fonctionnement, des cotisations auprès des caisses d'épargne et de prévoyance. »
Par amendement n° 134, MM. Angels, Carrère, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, après le premier alinéa de cet article, d'insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le président de la Fédération nationale des caisses d'épargne et de prévoyance est désigné parmi les présidents de conseil d'orientation et de surveillance. Il a voix prépondérante en cas d'égalité lors d'un vote. »
La parole est à M. Angels.
M. Bernard Angels. La Fédération nationale des caisses d'épargne et de prévoyance coordonnera l'action des caisses d'épargne, représentera leurs intérêts communs, contribuera à la définition des orientations sociales, veillera au respect des règles déontologiques, définira les orientations des projets d'économie locale et sociale, ainsi que des missions d'intérêt général. Enfin, elle participera à la définition des orientations stratégiques du réseau.
Il s'agit donc clairement de l'organe de représentation, de concertation et de coordination des actions du réseau. Il nous semble en conséquence que les membres représentatifs, les présidents des conseils d'orientation et de surveillance devraient y être majoritaires.
Cette conception qui était celle du texte original a été bouleversée à l'Assemblée nationale pour des raisons de simplification. Nous ne proposons pas de revenir au texte initial. Il faut toutefois s'assurer au minimum que la fédération sera dirigée par un président d'un conseil d'orientation et de surveillance et qu'en cas d'égalité, lors d'un vote, celui-ci aura voix prépondérante.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur. La discussion sur ce point est utile car il faut bien comprendre comment fonctionnera la fédération nationale des caisses d'épargne et de prévoyance.
La fédération sera représentative des caisses. Des représentants des deux échelons existant au sein des caisses s'exprimeront, à savoir les conseils d'orientation et de surveillance et les directoires.
Siégeront donc, d'un côté, les représentants des collectivités territoriales, des sociétaires, des salariés, tous ceux qui seront membres des conseils d'orientation et de surveillance et, de l'autre, le management, qui a la légitimité technique de la gestion. Il conviendra de trouver un équilibre au sein de la Fédération nationale.
Je crois, monsieur le ministre, qu'il est dans l'esprit de votre projet de loi que la Fédération nationale soit majoritairement l'expression des conseils d'orientation et de surveillance, ce qui traduit la nature coopérative du réseau, la diversité des origines de ses membres. On ne peut négliger pour autant la composante technique, c'est-à-dire le management, qui va être partie prenante à la Fédération nationale et qui va lui aussi s'y exprimer.
L'amendement n° 134 de M. Bernard Angels me paraît un peu trop précis car, effectivement, avec les idées qui m'animent, que vous connaissez et que certains critiquent, j'ai tendance à dire qu'il faut faire confiance aux gens : ils sont majeurs ; ils vont choisir les bons dirigeants ; il ne faut pas entraver la liberté du réseau.
Mais, parallèlement, je suis sensible à la proposition des auteurs de l'amendement n° 134 aux termes duquel la Fédération a vocation à exprimer les préoccupations transmises par les conseils d'orientation et de surveillance.
Je souhaiterais donc, monsieur le ministre, connaître l'avis du Gouvernement sur la suggestion qui est ainsi faite par le groupe socialiste.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. L'amendement n° 134 de M. Angels, qui complète opportunément le texte de l'Assemblée nationale, me semble très bien venu. Le Gouvernement est donc favorable à son adoption.
M. le président. Quel est désormais l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur. La commission s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Personne ne demande la parole ?... Je mets aux voix l'amendement n° 134, accepté par le Gouvernement et pour lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 184, M. Loridant, Mme Beaudeau, M. Foucaud et les membres du groupe communiste, républicain et citoyen proposent de compléter in fine le septième alinéa de l'article 15 par les mots : « et des sociétaires par l'organisation régulière de séances pédagogiques gratuites dans le domaine économique entendu au sens large ».
La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. Cet amendement porte sur la question des missions de la Fédération nationale des caisses d'épargne et de prévoyance, association représentative du réseau des caisses d'épargne.
De manière générale, nous partageons les orientations imprimées pour l'activité de cette fédération et nous souhaitons attirer l'attention sur une proposition que nous avons déjà formulée lors du débat à l'Assemblée nationale et qui n'a, hélas ! pas été retenue.
Le septième alinéa de l'article 15 précise en effet que la Fédération nationale mettra en oeuvre des actions de formation au bénéfice des dirigeants des caisses d'épargne.
Nous estimons pour notre part que cette politique de formation doit également intégrer les demandes éventuelles des sociétaires en vue de faciliter leur formation et leur meilleure connaissance de données propres à l'activité du réseau comme des réalités économiques au sens large.
Il nous importe que des liens se tissent entre les sociétaires et leurs caisses. Nous pensons que ce que nous proposons en serait un bon moyen.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur. Cet amendement est sympathique ! (Sourires.) Il est en effet sympathique d'organiser régulièrement des séances pédagogiques gratuites dans le domaine économique entendu au sens large.
M. Jean-Louis Carrère. Mais...
M. Philippe Marini, rapporteur. J'allais ajouter que cela ne mange pas de pain, que cela n'engage pas à grand-chose.
J'ai donc tendance à penser - mais ce n'est qu'un pronostic que le ministre nous confirmera lui-même - que cet amendement devrait recevoir un avis favorable du Gouvernement.
En ce qui concerne la commission, elle a, vous le savez, émis un avis défavorable. Bien évidemment, elle n'est pas hostile aux sessions de formation. Nous connaissons non seulement le projet de loi, mais aussi le rapport de M. Douyère, qui insiste beaucoup sur la formation, et ce à juste titre.
Mais cette formation doit avoir lieu à différents niveaux, et il n'y a aucune raison qu'elle n'ait pas lieu dans les sections locales, donc à la base, par groupe d'agences et au niveau de la Caisse nationale, afin que l'assemblée générale ait une véritable expression, qu'il y ait une vraie vie démocratique de sociétariat.
C'est tout de même bien au niveau de l'établissement dont ils seraient porteurs de parts que les sociétaires vont exprimer leurs droits.
C'est dans le même esprit, mes chers collègues, que la majorité a supprimé les groupements locaux d'épargne : nous estimons en effet que les sociétaires ont des droits et qu'ils doivent les exercer, dans l'entreprise dont ils sont porteurs de parts, à l'assemblée générale de la caisse d'épargne.
Bien entendu, il est normal que la Fédération nationale soit partie prenante, qu'elle dispose d'un budget pour la formation des sociétaires et, bien plus, pour la formation des membres des conseils d'orientation et de surveillance, voire pour la formation des présidents. Il est nécessaire, en effet, compte tenu de la complexité croissante de la vie économique et financière, de diffuser des messages de saine gestion, d'ouvrir l'esprit des personnes qui auront la chance d'être sociétaires et membres de conseil, qui évolueront dans un univers nouveau pour elles. Il est donc indispensable de conduire une politique ambitieuse de formation à destination des sociétaires. Nous partageons tout à fait ce souci légitime.
Pour autant, faut-il que cette disposition figure dans la loi ? Cela ne nous semble pas essentiel. C'est en vertu de cette analyse, mais en partageant, bien entendu, la préoccupation émise, que la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 184, repoussé par la commission et accepté par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 15 modifié.

(L'article 15 est adopté.)

Chapitre VI

L'organisation des relations de travail
dans le réseau des caisses d'épargne

Article 16



M. le président.
« Art. 16. - Les accords collectifs nationaux applicables aux entreprises du réseau des caisses d'épargne, à leurs organismes communs et, si les accords le prévoient, à tout ou partie de leurs filiales, sont négociés au sein d'une commission paritaire nationale. Cette commission est composée de quatorze membres représentant les employeurs, désignés par la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance, et de quatorze membres représentant les personnels, désignés par les organisations syndicales. Chaque organisation syndicale représentative, au sens de l'article L. 132-2 du code du travail, dans les entreprises du réseau des caisses d'épargne, leurs filiales et organismes communs dispose d'un siège. Le reste des sièges revenant aux organisations syndicales leur est attribué en fonction des résultats qu'elles ont obtenus à la dernière élection professionnelle commune à l'ensemble des salariés.
« Pour la négociation des accords catégoriels, la commission peut décider d'adopter une formation spécifique respectant la règle de parité.
« Les dispositions des alinéas précédents ne peuvent avoir pour effet de modifier la situation des filiales où s'applique déjà une convention collective de branche, ni de rendre les accords collectifs nationaux applicables aux filiales ou organismes communs créés en vue d'une activité nouvelle ou acquis et qui relèvent, du fait de l'activité qu'ils exercent, d'une convention collective de branche. »
Par amendement n° 223, MM. Loueckhote, Ostermann et Fournier proposent de compléter in fine cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Les relations de travail au sein de la Caisse d'épargne et de prévoyance de Nouvelle-Calédonie demeurent régies par les dispositions de la convention collective négociée localement avec les syndicats représentés dans l'entreprise. »
La parole est à M. Ostermann.
M. Joseph Ostermann. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'article 16 du projet de loi règle l'organisation des relations de travail dans le réseau des caisses d'épargne, mais il ne fait référence qu'au seul dispositif national.
L'article 22 de la loi n° 99-209 du 19 mars 1999 portant loi organique relative à la Nouvelle-Calédonie stipule que ce territoire est compétent en matière de droit du travail.
En outre, le personnel de la Caisse d'épargne de Nouvelle-Calédonie est régi par une convention collective négociée localement avec les syndicats représentatifs en Nouvelle-Calédonie et représentés dans l'entreprise.
Il convient donc d'exclure du champ d'application de l'article 16 la Nouvelle-Calédonie, afin que sa spécificité soit prise en compte.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur. La commission estime qu'il s'agit là d'une excellente question.
L'article 16 organise les modalités de négociation des accords collectifs, et cet amendement vise à exclure du champ d'application de la loi la Nouvelle-Calédonie, en vertu de la loi organique du 19 mars 1999.
Chacun se souvient de la révision constitutionnelle qui nous a conduits à Versailles sur ce thème. Chacun se souvient également du contexte dans lequel la loi organique est intervenue.
Il est vrai que la Nouvelle-Calédonie dispose à présent d'un régime d'autonomie interne et de spécificités juridiques qui s'étendent au domaine du droit du travail. Il me semble clair que bien des dispositions de l'actuel projet de loi ne peuvent, dès lors, s'appliquer à la Nouvelle-Calédonie. Il me semble non moins clair que le Congrès du territoire doit être consulté avant d'inscrire certaines dispositions dans le droit local.
Je souhaite toutefois connaître le sentiment du Gouvernement avant d'exprimer de manière définitive l'avis de la commission.
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. La volonté d'exclure la Nouvelle-Calédonie de l'application des dispositions du projet de loi en matière du droit du travail est d'autant plus pertinente, mais d'autant moins nécessaire, que la Novelle-Calédonie est, par nature, exclue de l'ensemble du texte.
En effet, les projets de loi ne s'appliquent aux territoires d'outre-mer que si mention expresse en est faite et sous réserve d'autres modalités. Comme ce n'est pas le cas ici, et ce n'était déjà pas le cas pour la loi de 1983 ni pour celle de 1991, le texte sur les caisses d'épargne ne s'applique pas en Nouvelle-Calédonie.
Il serait donc quelque peu original de vouloir préciser que le droit du travail ne doit pas être appliqué en Nouvelle-Calédonie alors qu'aucune des dispositions du texte ne concerne le territoire.
M. le président. Quel est maintenant l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur. Dès lors qu'aucune des dispositions du projet de loi ne s'applique à la Nouvelle-Calédonie - M. le ministre vient de le confirmer de manière tout à fait précise - je pense que les auteurs de l'amendement ont satisfaction sur le fond et que rien ne s'opposerait à ce qu'ils le retirent.
M. le président. Monsieur Ostermann, l'amendement est-il maintenu ?
M. Joseph Ostermann. Je ne peux pas résister aux arguments de M. le rapporteur : je retire donc l'amendement.
M. le président. L'amendement n° 223 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 16.

(L'article 16 est adopté.)

Article 17



M. le président.
« Art. 17. - Dans un délai de quinze jours à compter de la signature par les employeurs et une ou plusieurs organisations syndicales représentatives d'un accord collectif national, les organisations syndicales dont les représentants à la commission paritaire nationale constituent plus de la moitié des quatorze membres représentant le personnel à la commission paritaire nationale peuvent s'opposer à l'entrée en vigueur de cet accord. L'opposition est formulée par écrit et motivée. Elle est notifiée à la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance et aux organisations syndicales signataires. »
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 16, M. Marini, au nom de la commission, propose de supprimer cet article.
Par amendement n° 135, MM. Angels, Carrère, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de rédiger comme suit l'article 17 :
« Les accords collectifs signés en commission paritaire nationale ne sont considérés comme valables que lorsqu'ils ont été signés par des organisations syndicales représentant la majorité des salariés. Cette représentativité s'apprécie en fonction des résultats obtenus à la dernière élection professionnelle commune à l'ensemble des salariés.
« Toutefois, dans un délai de quinze jours à compter de la signature d'un protocole d'accord entre les employeurs et une ou plusieurs organisations syndicales ne représentant pas la majorité des salariés au sens de l'alinéa précédent, la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance peut décider de le soumettre à ratification par référendum. Cette consultation doit intervenir dans un délai de trois mois sous la responsabilité de la commission paritaire ntionale. »
Par amendement n° 185, M. Loridant, Mme Beaudeau, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de compléter l'article 17 par un alinéa ainsi rédigé :
« N'ouvrent pas droit à opposition dans les conditions fixées à l'alinéa précédent, les accords qui déterminent les modalités d'application de l'accord du 8 décembre 1961 et de la convention collective nationale du 14 mars 1947 qui ont respectivement institué les régimes de retraite complémentaire légalement obligatoires des salariés et des cadres. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 16.
M. Philippe Marini, rapporteur. L'article 17 vise à soumettre les caisses d'épargne au droit commun du travail en ne reprenant pas la disposition de la loi de 1983 qui régit actuellement les relations du travail et qui prévoit que les conventions doivent recueillir l'accord des trois quarts au moins des membres présents au sein de la commission paritaire nationale.
Conséquence de l'article 16 du présent projet : les accords collectifs nationaux seront toujours négociés au sein de la commission paritaire nationale, mais ils seront adoptés selon les règles de droit commun, c'est-à-dire s'ils sont signés par au moins un syndicat représentatif.
Toutefois, cet article 17 dont je viens de résumer le propos ne va pas jusqu'au bout de la logique préconisée lors des travaux préparatoires, en particulier par l'auteur du rapport remis au Premier ministre, que je ne citerai plus parce que son nom est dans tous les esprits.
En effet, l'article 17 maintient une disposition dérogatoire au droit commun : c'est la possibilité, pour les organisations syndicales, de s'opposer à l'entrée en vigueur d'un accord si leurs représentants constituent plus de la moitié des quatorze membres de la commission paritaire nationale représentant le personnel.
Dans le droit commun du travail, l'exercice du droit d'opposition est limité aux seuls accords qui réduisent ou suppriment un ou plusieurs avantages individuels ou collectifs dont bénéficient les salariés. La commission pense être conséquente avec les intentions initiales des auteurs du projet de loi en proposant, par le présent amendement, d'aligner la procédure de dénonciation des accords collectifs au sein du réseau des caisses d'épargne sur le droit commun du travail.
M. le président. La parole est à M. Carrère, pour présenter l'amendement n° 135.
M. Jean-Louis Carrère. Cet amendement vise simplement à conserver le mode de conclusion des accords de branches tel qu'il existe depuis la loi Taddéi de juillet 1983.
En effet, le mode de négociation des accords collectifs, tel qu'il résulte des lois de 1983 et de 1991, nous semble être un bon mode de négociation. Il garantit l'adhésion d'une majorité des personnels aux accords.
Il lui a toutefois été reproché de permettre un blocage par certains syndicats majoritaires, ce qui est effectivement le cas. La critique n'est donc pas totalement infondée, et c'est pourquoi il fallait faire évoluer ce cadre de négociations collectives.
La première solution, c'est le passage au droit commun, comme le propose la commission. Cette approche, qui s'inscrit dans le droit-fil de la banalisation voulue par M. le rapporteur, serait une erreur, car elle aboutirait à supprimer un dispositif intéressant de négociation collective.
M. le rapporteur, je l'admets, sait être original - ou ne pas l'être - quand ça l'arrange !
La seconde solution, celle du Gouvernement, est en fait assez proche du droit commun, mais elle conserve des éléments intéressants permettant une meilleure adhésion des personnels.
Nous pensons quant à nous qu'il faut plutôt partir du dispositif actuel en faisant évoluer deux de ses éléments.
Premier élément : l'adoption d'une règle de majorité simple plutôt que le maintien de la règle de la majorité des trois quarts, ce qui constituerait une évolution significative.
Second élément : offrir la possibilité de signature par des syndicats minoritaires, sous réserve d'une validation par référendum.
Tel est l'objet de notre amendement. Il permet de maintenir un dispositif qui a le soutien des personnels et qui nous semble intéressant, tout en donnant la possibilité grâce au recours au référendum, de débloquer éventuellement certains dossiers majeurs.
M. le président. La parole est à M. Fischer, pour défendre l'amendement n° 185.
M. Guy Fischer. La consolidation des droits à retraite des personnels des caisses d'épargne implique que les droits correspondants à ceux qui sont mis en oeuvre par les régimes de retraites complémentaires légalement obligatoires, à savoir l'Association des régimes de retraites complémentaires, l'ARRCO, et l'Association générale des institutions de retraites des cadres, l'AGIRC, soient mis en oeuvre dans le cadre des mécanismes de compensation institués par l'ARRCO et l'AGIRC, et cela conformément aux dispositions arrêtées par chacune de ces deux fédérations d'institutions de retraite complémentaire.
Les salariés des caisses d'épargne sont, aujourd'hui, les seuls à ne pas bénéficier de la garantie que présente la participation à de vastes régimes couvrant l'ensemble des salariés.
Le présent amendement vise à corriger cette anomalie préjudiciable aux intérêts des salariés.
Le caractère conventionnel du régime de retraite des caisses d'épargne est respecté, les représentants des salariés et les employeurs devant conclure à cet effet les accords nécessaires.
Les régimes de retraites complémentaires ARRCO et AGIRC étant devenus obligatoires en vertu d'une loi du 29 décembre 1972, le droit d'opposition ne peut être ouvert aux organisations syndicales qui ne seraient pas signataires des accords conclu par les caisses d'épargne.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 135 et 185 ?
M. Philippe Marini, rapporteur. Ces amendements partent d'une logique inverse de celle qui est suivie par la commission dans l'amendement n° 16. La commission, qui ne peut donc manifestement adhérer aux amendements n°s 135 et 185, émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 16, 135 et 185 ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Nous avons là une bonne illustration de la démarche du Gouvernement dans l'ensemble de ce texte.
D'un côté, il y a le statu quo , qui a démontré, au cours des années, qu'il ne permettait pas le dialogue social. En effet, les caisses d'épargne sont une des rares institutions de cette taille qui, au cours des six dernières années, n'ont signé aucun accord. Quand on cherche à en connaître la raison, on s'aperçoit que c'est précisement cette capacité de blocage qui est en cause.
Si nous voulons favoriser le dialogue social et permettre la signature d'accords, il est donc nécessaire de faire sauter cette clause très particulière. Refusons donc le statu quo !
A l'autre extrême, M. le rapporteur général nous propose une situation dans laquelle nous revenons - sur ce sujet comme sur d'autres - sur la banalisation des caisses d'épargne. Nous ne voulons pas de cette banalisation et c'est pourquoi le Gouvernement a proposé une situation intermédiaire dans laquelle nous garantissons la spécificité des caisses d'épargne, qui est conservée, notamment par cette commission paritaire nationale, mais nous retirons les possibiltés de blocage qui ont montré, au cours des années passées, leur caractère fâcheux. La proposition qui figure dans le texte vise à tenir la balance égale entre ces deux contraintes. Je ne suis pas favorable à l'amendement n° 16, qui ferait disparaître toute spécificité.
Par ailleurs, même si j'en respecte l'origine, je ne suis pas favorable non plus à l'amendement n° 135, qui vient d'être présenté par le groupe socialiste, car il me semble que nous sommes trop près de la situation de blocage actuel, ou plutôt que, pour échapper à la situation de blocage, ce qui rejoint ma préoccupation, on monte un système qui est tout de même atrocement compliqué.
Dans la version actuelle du texte, nous avons à la fois la spécificité des caisses d'épargne par rapport au droit commun, mais aussi la possibilité de passer des accords. Il me semble que si nous recherchons tant soit peu la simplicité dans un texte qui, il est vrai, est déjà bien compliqué, il vaut mieux se rallier à la rédaction qui est aujourd'hui celle du projet.
Je demande donc aux deux intervenants, avec un espoir différent dans les deux cas, qu'ils veuillent bien retirer leurs amendements pour en rester à cette position médiane qui a été tracée par le texte du Gouvernement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 16, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 17 est supprimé et les amendements n°s 135 et 185 n'ont plus d'objet.

Chapitre VII

Dispositions diverses

Article 18



M. le président.
« Art. 18. - L'utilisation de la dénomination de : "Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance", de : "caisse d'épargne et de prévoyance", de : "caisse d'épargne" ou de : "groupement local d'épargne" par des organismes qui n'entrent pas dans le champ d'application de la présente loi est punie des peines prévues aux articles 313-1 et 313-2 du code pénal. »
Par amendement n° 17, M. Marini, au nom de la commission, propose, dans cet article, de remplacer les mots : "groupement local d'épargne" par les mots : "section locale d'épargne".
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. C'est un amendement de conséquence de la substitution des sections locales d'épargne aux GLE.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Etant pro-GLE, je suis défavorable à cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 17, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 18, ainsi modifié.

(L'article 18 est adopté.)

Article 19



M. le président.
« Art. 19. - A partir du 1er janvier 2000, dans l'article 18 de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 précitée, les mots : ", de caisse d'épargne et de prévoyance" et les mots : ", les caisses d'épargne et de prévoyance" sont supprimés. » - (Adopté.)

Articles additionnels après l'article 19



M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 119, M. Bourdin et les membres du groupe des Républicains et Indépendants proposent d'insérer, après l'article 19, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'ensemble des opérations, de quelque nature que ce soit, effectué par les affiliés de la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance, ainsi que leurs groupements, entre eux ou avec la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance, est exonéré de taxe sur la valeur ajoutée.
« Pour celles des opérations mentionnées ci-dessus qui relèvent de l'article 260 B du code général des impôts, l'option ne s'applique pas.
« II. - La perte de recette pour l'Etat est compensée à due concurrence par une augmentation des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° 224, MM. Ostermann et Fournier proposent d'insérer, après l'article 19, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'ensemble des opérations, de quelque nature que ce soit, effectué par les affiliés de la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance, ainsi que leurs groupements entre eux ou avec la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance, est exonéré de taxe sur la valeur ajoutée. Pour celles des opérations mentionnées ci-dessus, qui relèvent de l'article 260 B du code général des impôts, l'option ne s'applique pas.
« II. - La perte des recettes pour l'Etat résultant de l'application du I ci-dessus est compensée à due concurrence par un relèvement des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés à l'article 403 du même code. »
La parole est à M. Bourdin, pour défendre l'amendement n° 119.
M. Joël Bourdin. J'ai lié l'amendement précédent à celui-ci. Ayant eu la réponse de M. le ministre tout à l'heure, je retire cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 119 est retiré.
La parole est à M. Ostermann, pour défendre l'amendement n° 224.
M. Joseph Ostermann. Même position : je retire mon amendement.
M. le président. L'amendement n° 224 est retiré.
Par amendement n° 258, M. Marini, au nom de la commission, propose d'insérer, après l'article 19, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après le quatrième alinéa (3°) de l'article 260 C du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« 3° bis Aux opérations effectuées par les affiliés de la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance, ainsi que leurs groupements, entre eux ou avec la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance ; ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. C'est un complément que je voudrais apporter aux éléments qui ont été livrés tout à l'heure au débat en ce qui concerne le régime fiscal des opérations intragroupes.
Je rappelle qu'en vertu de l'article 260 B du code général des impôts les opérations qui se rattachent aux activités bancaires et financières peuvent être soumises, sur option, à la TVA, sauf lorsqu'il s'agit de certaines opérations intragroupes mentionnées à l'article 260 C du même code, notamment celles qui sont effectuées entre elles par les banques mutualistes ou coopératives, telles que les banques populaires et les caisses du Crédit agricole.
Le présent amendement vise à prévoir que les opérations effectuées entre elles par les caisses d'épargne ne peuvent être soumises sur option à la TVA. Cette précision nous semble nécessaire pour bien nous assurer de la neutralité du statut fiscal et de l'égalité de droits et de devoirs des réseaux coopératifs appelés à se faire concurrence dans un même marché.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. J'ai déjà apporté les précisions que je jugeais utiles.
La précision supplémentaire que nous fournit M. le rapporteur ne présente aucun élément nouveau, car c'est bien la situation qui prévaut.
Toutefois, si la commission y tient absolument, je m'en remettrai à la sagesse de la Haute Assemblée. Mais que les choses soient claires : il n'est pas nécessaire d'introduire une telle précision car l'ensemble de ces dispositions figurent déjà dans le code général des impôts.
M. le président. L'amendement n° 258 est-il maintenu, monsieur le rapporteur ?
M. Philippe Marini, rapporteur. Oui, monsieur le président.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 258, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 19.

Article 20



M. le président.
« Art. 20. - Un décret en Conseil d'Etat précise les modalités d'application du présent titre. » - (Adopté.)

TITRE II

DISPOSITIONS TRANSITOIRES

Article 21



M. le président.
« Art. 21. - Les caisses d'épargne et de prévoyance existant à la date de publication de la présente loi sont transformées en sociétés coopératives dans les conditions ci-après :
« I. - Les caisses d'épargne et de prévoyance disposent au plus tard quatre mois à compter de la publication de la présente loi d'un capital initial composé de parts sociales au sens de l'article 11 de la 1oi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 précitée ainsi que, en tant que de besoin, de certificats coopératifs d'investissement au sens du titre II ter de la même loi.
« Le montant total du capital initial des caisses d'épargne et de prévoyance est égal à la somme de la dotation statutaire de chacune des caisses, telle que cette somme figure dans les comptes consolidés du groupe des caisses d'épargne arrêtés au 31 décembre 1997. Pour les exercices clos jusqu'au 1er janvier 2004, les certificats coopératifs d'investissement entrant dans la composition du capital initial des caisses d'épargne et de prévoyance ne peuvent pas représenter plus de 25 % de ce capital. La Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance est chargée de veiller au respect, à tout moment, de cette proportion. L'article 19 decies de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 précitée ne s'applique pas à ces certificats coopératifs d'investissement.
« II. - La Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance fixe le capital initial de chaque caisse d'épargne et de prévoyance au plus tard deux mois après la publication de la présente loi, après avis du conseil d'orientation et de surveillance de la caisse d'épargne et de prévoyance, en tenant compte notamment du montant de la dotation statutaire tel qu'il figure dans le bilan de la caisse d'épargne et de prévoyance arrêté au 31 décembre 1997, du montant total des fonds propres et du montant total du bilan de la caisse d'épargne et de prévoyance au 31 décembre 1997. Ce capital initial est notifié au ministre chargé de l'économie. A défaut, ce capital est fixé, au plus tard quatre mois à compter de la publication de la présente loi, par décret en Conseil d'Etat, en fonction des mêmes critères.
« III. - Le conseil d'orientation et de surveillance de chaque caisse d'épargne et de prévoyance fixe le montant nominal des parts sociales de cette caisse dans les limites définies par la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance.
« IV. - Au plus tard cinq mois à compter de la publication de la présente loi, le conseil d'orientation et de surveillance de chaque caisse d'épargne et de prévoyance fixe le nombre des parts sociales de cette caisse à souscrire par chacun des groupements locaux d'épargne de sa circonscription territoriale, en fonction notamment de l'importance de la population comprise dans le territoire qu'ils couvrent. Chaque groupement local d'épargne souscrit les parts sociales lui revenant grâce à un prêt sans intérêt, d'un montant égal à la valeur totale de ces parts, que lui consent la caisse d'épargne et de prévoyance. Ce prêt est amorti au fur et à mesure de la souscription des parts sociales qui constituent le capital du groupement local d'épargne par les sociétaires.
« IV bis. - Jusqu'au 31 décembre 2003, les collectivités territoriales sont autorisées à détenir ensemble 10 % au maximum de la valeur totale des parts sociales revenant à chaque groupement local d'épargne en application du IV du présent article.
« V. - Jusqu'au 31 décembre 2003, les parts sociales acquises par les groupements locaux d'épargne ne sont cessibles qu'avec l'accord du directoire de la caisse d'épargne et de prévoyance. La propriété de ces parts sociales ne peut être transférée qu'à d'autres groupements locaux d'épargne exerçant dans le même ressort territorial, et moyennant le transfert, pour un montant égal, d'une fraction du prêt octroyé par la caisse d'épargne et de prévoyance au groupement local d'épargne qui transfère.
« VI. - Au 31 décembre 2003, chaque caisse d'épargne et de prévoyance rembourse à chaque groupement local d'épargne affilié les parts sociales représentatives de son capital détenues par celui-ci, à hauteur du montant restant dû par ledit groupement local d'épargne sur le prêt que lui a consenti la caisse d'épargne et de prévoyance et du montant des parts sociales détenues ensemble par les collectivités territoriales au-delà de la limite de 10 % du capital du groupement local d'épargne au 31 décembre 2003. Le montant du remboursement des parts est utilisé par les groupements locaux d'épargne pour l'amortissement intégral de la fraction restant due du prêt de la caisse d'épargne et de prévoyance et pour le remboursement aux collectivités territoriales des parts sociales qu'elles détiennent ensemble au-delà de la limite de 10 % du capital du groupement local d'épargne. A cette même date, il est procédé à l'annulation des certificats coopératifs d'investissement non souscrits.
« Le capital de la caisse d'épargne et de prévoyance est réduit à concurrence du montant total des certificats coopératifs d'investissement non souscrits et des parts sociales remboursées aux groupements locaux d'épargne affiliés à la caisse d'épargne et de prévoyance. Ces opérations n'ont aucun effet sur le résultat des groupements locaux d'épargne ni sur celui de la caisse d'épargne et de prévoyance et ne sont pas soumises à la présomption prévue à la deuxième phrase du 1° de l'article 112 du code général des impôts.
« VII. - Les dispositions de la présente loi n'emportent pas, pour les caisses d'épargne et de prévoyance, changement dans la personne morale.
« Les caisses d'épargne et de prévoyance qui, au 1er janvier 2000, sont agréées par le Comité des établissements de crédit et des entreprises d'investissement sont réputées être agréées en tant que banques coopératives. »
Sur cet article, je suis d'abord saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 18 rectifié, M. Marini, au nom de la commission, propose de remplacer les paragraphes I et II de cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« I. - Dans les deux mois qui suivent la publication de la présente loi, le montant du capital initial de chaque caisse d'épargne et de prévoyance est déerminé par le ministre chargé de l'économie sur proposition de la caisse nationale des caisses d'épargne et après avis de la commission des participations et des transferts. Ce montant ne peut excéder un pourcentage de fonds propres égal au pourcentage moyen des fonds propres correspondant au capital social dans les autres réseaux bancaires coopératifs ou mutualistes, tel qu'il ressort des données du comité des établissements de crédit et des entreprises d'investissement au 31 décembre 1998. »
Par amendement n° 120, M. Bourdin et les membres du groupe des Républicains et Indépendants proposent :
A. - De rédiger comme suit le paragraphe I de l'article 21 :
« Dans les quatre mois à compter de la publication de la présente loi, le capital initial de chaque caisse d'épargne et de prévoyance est fixé par la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance. Son montant est égal au pourcentage moyen du capital dans les capitaux propres des autres réseaux bancaires coopératifs et mutualistes, tel qu'il ressort des données du comité des établissements de crédit et des entreprises d'investissement au 31 décembre 1998. »
B. - En conséquence, de supprimer le paragraphe II de cet article.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 18 rectifié.
M. Philippe Marini, rapporteur. Nous abordons un point très important du projet de loi : celui de l'évaluation des fonds propres qui vont être transformés en parts de sociétaires.
Pour l'essentiel, cet amendement a deux objectifs.
En premier lieu, monsieur le ministre - nous nous en sommes expliqués assez longuement lors de la discussion générale - l'amendement vise à supprimer la référence à la somme des dotations statutaires pour déterminer le montant du capital initial des caisses d'épargne et renvoie au ministre le soin de fixer le capital initial de chaque caisse, sur proposition de la caisse nationale et après avis de la commission des participations et des transferts.
Nous persistons à penser qu'il n'est pas raisonnable de maintenir la référence à des dotations statutaires fixées de façon arbitraire, mécanique, devrais-je dire, sans souci de la réalité économique, au lendemain de la réforme des caisses d'épargne de 1991.
Certaines caisses, vous le savez, mes chers collègues, notamment ceux d'entre vous qui sont plus impliqués que d'autres dans la gestion du réseau des caisses d'épargne, ont appelé « dotations statutaires » la totalité de leurs fonds propres, alors que d'autres ont maintenu des réserves très substantielles par rapport à l'ensemble des fonds propres.
En réalité, j'ai la conviction, monsieur le ministre - vous ne nous avez pas dit strictement le contraire que le montant de 18,8 milliards de francs, qui est la sommation des dotations statutaires des caisses, résulte d'un marchandage et non pas d'une vision économique des choses, un marchandage entre les services du ministère de l'économie et le réseau des caisses d'épargne.
Je sais qu'il faut bien un jour sortir d'une négociation, ainsi que la vie nous l'enseigne, que parfois une règle forfaitaire permet d'en sortir et que mieux vaut un accord imparfait qu'un conflit latent, ouvert, susceptible de durer et d'engendrer toutes sortes de conséquences, mais je persiste à penser que le niveau auquel on est parvenu ne permettra pas au réseau des caisses d'épargne de maximiser ses chances de développement.
En d'autres termes, les arguments que vous nous avez apportés au cours de la discussion ne m'ont pas fait changer d'opinion. Je pense que la barque est trop lourdement chargée, qu'elle est placée à un niveau trop élevé pour attirer des sociétaires et les rémunérer à l'aide de la capacité bénéficiaire d'un réseau qui n'a pas encore fait ses preuves, qui a besoin de restructurer certains établissements, car il faut le dire, mes chers collègues, le coefficient d'exploitation de certaines caisses d'épargne est trop élevé pour que l'on puisse assurer leur pérennité économique.
L'efficacité de cette politique de dynamisation du réseau n'a pas encore fait ses preuves, et on envisage d'infliger à celui-ci, avec les 18,8 milliards de francs à rémunérer (M. Carrère proteste)...
Mais vous aurez à en assumer les conséquences, mon cher collègue ! Si vous restez président de conseil d'orientation et de surveillance, vous verrez les comptes année après année ! Je pense à vous,...
M. Jean-Louis Carrère. J'y suis très sensible !
M. Philippe Marini, rapporteur. ... comme je pense aux autres présidents de conseil d'orientation et de surveillance qui auront à porter la responsabilité de la réforme, chacun dans son établissement.
Donc, écoutez-moi avec attention, s'il vous plaît !
M. Jean-Louis Carrère. Je ne fais que cela !
M. Philippe Marini, rapporteur. La solution qu'on a trouvée est défavorable aux réseaux des caisses d'épargne puisque le ratio moyen capital social sur fonds propres des autres réseaux bancaires coopératifs s'élève à 27 % si l'on se réfère à la moyenne pondérée ou à 33 % si l'on se réfère à la moyenne arithmétique, alors que les 18,8 milliards de francs représenteraient 40 % des fonds propres des caisses d'épargne. Au Crédit agricole, ce même ratio est de 20 %, soit la moitié.
Il n'est donc pas raisonnable de fixer des objectifs qui vont pénaliser les caisses d'épargne et, par voie de conséquence, toutes les parties prenantes, c'est-à-dire aussi bien les salariés, que les sociétaires, les collectivités territoriales, et les caisses d'épargne elles-mêmes dans leur développement.
Je vous conseille donc, mes chers collègues, de suivre la proposition de la commission qui vise à fixer, comme plafond au montant du capital initial des caisses d'épargne, le pourcentage moyen des fonds propres correspondant au capital social dans les autres réseaux bancaires coopératifs ou mutualistes, tel qu'il ressort des données du comité des établissements de crédit et des entreprises d'investissement au 31 décembre 1998.
Enfin, mes chers collègues, le second objectif de cet amendement n° 18 rectifié est de supprimer la décomposition du capital initial des caisses en parts sociales et certificats coopératifs d'investissement, décomposition qui n'est pas conforme à la loi de 1947 sur la coopération.
En outre, cette disposition a pour conséquence que les éventuelles émissions de CCI serviront non pas à renforcer les fonds propres des caisses d'épargne mais à abonder le fonds de réserve pour les retraites, c'est-à-dire les finances de l'Etat. En effet, le fonds de réserve pour les retraites n'est que l'expression de la responsabilité financière de l'Etat à l'égard des régimes par répartition.
J'ai bien entendu l'argument de M. Strauss-Kahn selon lequel il s'agit non pas de 18,8 milliards de francs, mais de 13 milliards sous forme de parts de sociétaires, auxquels s'ajoutent 5,8 milliards sous forme de CCI.
Soit ! Convenez pourtant, monsieur le ministre, que l'argent ne pourra pas être collecté ! En effet, comment pourra-t-on reprendre la prospection qui aura été faite pour drainer 5,8 milliards de francs sous forme de certificats coopératifs d'investissement, alors que ce seront toujours les mêmes entreprises, les mêmes outils économiques et la même capacité bénéficiaire qui seront sollicités ?
Il est clair que, lorsque les caisses de l'Etat auront été alimentées dans le cadre de cette privatisation - puisqu'il s'agit bien, en définitive, d'une privatisation, au moins en termes comptables - on ne pourra pas recommencer l'opération dès le lendemain matin pour renforcer les fonds propres des caisses d'épargne. Or peut-être en auront-elles besoin pour assurer leurs perspectives de développement, pour s'allier à d'autres établissements, pour avoir une vision offensive de leur avenir. En réalité, vous en faites des marcheurs à qui on donnerait, sur terre, des chaussures à semelles de plomb faites pour se mouvoir sur les fonds marins.
Ces dispositions font preuve d'une certaine inadaptation en imposant un niveau de contrainte excessif. L'adoption de l'amendement n° 18 rectifié permettrait d'alléger ces contraintes et d'envisager les choses de manière plus raisonnable.
M. le président. La parole est à M. Bourdin, pour défendre l'amendement n° 120.
M. Joël Bourdin. Cet amendement respecte l'architecture du texte présenté par M. le rapporteur.
Il tend à préciser plusieurs points.
Tout d'abord, il vise à maintenir un délai de quatre mois, très certainement nécessaire pour procéder aux recherches et simulations qui permettraient de définir le capital de chaque caisse d'épargne.
Ensuite, il tend à éviter le recours à la Commission des participations et des transferts, qui, on le sait, est l'ancienne Commission des privatisations.
Il serait fâcheux de soumettre des entreprises publiques, de statut privé, à une procédure de transformation d'entreprise publique en entreprise privée.
Par ailleurs, ce recours à la Commission des participations et des transferts est un peu gênant dans la mesure où cette commission est plus habituée à procéder à des évaluations de sociétés dont l'actif net évolue en fonction du marché ; s'agissant des parts sociales, nous n'aurons pas ce souci.
Enfin, il n'est pas nécessaire que ce soit le ministre qui détermine le montant du capital de chaque caisse d'épargne dans la mesure où existent des données objectives provenant du Comité des établissements de crédit et des entreprises d'investissement, permettant de connaître le pourcentage moyen des fonds propres correspondant au capital social des réseaux coopératifs et mutualistes.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 120 ?
M. Philippe Marini, rapporteur. La logique de la commission n'est pas très différente de celle de M. Bourdin.
Nous estimons, les uns et les autres, que la barque est trop chargée. Seule la méthode de travail employée pour définir le bon niveau du curseur nous sépare.
Dans la mesure où je rectifie l'amendement de la commission de manière à ne plus faire apparaître la Commission des participations et des transferts, je pense que M. Bourdin pourrait s'y rallier.
Puisque nous assignons une limite supérieure à l'évaluation, nous pouvons en rester là et considérer que le montant des fonds propres à diffuser dans le public ne doit pas dépasser la moyenne pondérée du ratio capital sur fonds propre de l'ensemble des groupes mutualistes.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 18 rectifié bis , tendant à remplacer les paragraphes I et II de l'article 21 par un paragraphe ainsi rédigé :
« I. - Dans les deux mois qui suivent la publication de la présente loi, le montant du capital initial de chaque caisse d'épargne et de prévoyance est déterminé par le ministre chargé de l'économie sur proposition de la Caisse nationale des caisses d'épargne. Ce montant ne peut excéder un pourcentage de fonds propres égal au pourcentage moyen des fonds propres correspondant au capital social dans les autres réseaux bancaires coopératifs ou mutualistes, tel qu'il ressort des données du Comité des établissements de crédit et des entreprises d'investissement au 31 décembre 1998. »
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 18 rectifié bis et 120 ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Nous avons déjà longuement débattu sur ce point, mais je vais en quelques mots redéfinir clairement la position du Gouvernement.
Premièrement, il ne s'agit pas d'une privatisation. Il n'y a donc pas lieu de faire intervenir la Commission des participations et transferts, qui évalue, lorsqu'on procède à une privatisation, la valeur d'une entreprise et non pas son capital social. Il s'agit tellement peu d'une privatisation que le produit de la mise sur le marché des certificats coopératifs auprès des épargnants n'ira pas, contrairement à ce que vous avez dit, monsieur le rapporteur, dans les caisses de l'Etat.
M. Philippe Marini, rapporteur. Juste à côté !
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Cela ira dans le fonds de réserve pour le système de retraites par répartition. Vous me rétorquerez que, précisément, le Sénat supprime cette affectation. Alors, oui, si vous supprimez cette affectation et faites entrer les fonds dans les caisses de l'Etat, vous vous rapprochez de la privatisation ! Mais comme ce n'est pas ce que recherche le Gouvernement, cela prouve, a contrario , que l'opération qu'il envisage n'est pas une privatisation.
Deuxièmement, si l'on faisait intervenir la CPT, je crains fort, compte tenu de son orientation actuelle, de la façon dont elle agit en toute indépendance - et sans doute avec raison - sur de nombreux autres dossiers, qu'elle ne fixe un chiffre sensiblement supérieur à 18,8 milliards de francs.
Sa mission consiste à préserver le plus possible les intérêts de l'Etat et des contribuables et, par voie de conséquence, à valoriser au maximum ce qu'elle a à mettre sur le marché.
Troisièmement, monsieur le rapporteur, je tiens à vous répondre sur l'idée que vous avez émise d'un marchandage entre les services de mon ministère et les réseaux des caisses d'épargne.
La République, monsieur Marini, ne fonctionne pas sur la base d'un marchandage. Au demeurant, et je m'en réjouis, vous n'avez pas l'air, vous-même, d'être familier du marchandage, ce qui est tout à votre honneur ! Car, s'il s'agissait d'un marchandage, je ne vois pas très bien comment, par quel miracle, on serait tombé pile sur la valeur qu'il y a aujourd'hui dans les comptes et dans les réserves des sociétés des caisses d'épargne. Un marchandage, par définition, aboutit à une cote mal taillée.
M. Philippe Marini, rapporteur. C'est le hasard des chiffres !
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Il faudrait un sacré hasard pour qu'un marchandage aboutisse pile à 18,8 milliards de francs !
Enfin, quatrièmement, j'en viens au point le plus important, au ratio capital sur fonds propres, que vous avez analysé.
D'abord, je n'obtiens pas le même résultat que vous : vous trouvez 40 % et moi, 35 %.
D'où vient cette différence ? Elle provient de ce que, pour ma part, je prends pour la dotation du fonds de retraites ce qui, au 31 décembre 1998, était inscrit dans les comptes du réseau, à savoir 10 milliards de francs. Vous, pour obtenir un ratio de 40 % - j'ai refait le calcul rapidement - vous raisonnez sur 15 milliards de francs en préjugeant les résultats d'une négociation qui est en cours, sur la base de je ne sais quelle information. On ne peut se fier à autre chose qu'à ce qui figure, aujourd'hui, dans les comptes. Y sont provisionnés 10 milliards de francs, et non pas 15 milliards de francs ! Pourquoi, sinon, ne pas raisonner sur 14 milliards de francs, 18 milliards de francs, n'importe quelle autre somme ?
Raisonnons sur les chiffres qui sont établis : au 31 décembre, il y avait 10 milliards de francs dans les comptes du réseau et, sur cette base, le ratio capital sur fonds propres sera de 35 %.
Est-ce bien ou non ? Pour le savoir, vous établissez une comparaison avec des établissements de nature analogue.
J'ai déjà fourni ces chiffres hier : pour le réseau des banques particulières, le ratio capital sur fonds propres est de 37 %, ce n'est pas très loin de 35 % ; pour le Crédit mutuel, il est de 40 % ou 41 %. Comment se fait-il que vous arriviez à 27 % environ ? Parce que vous introduisez dans votre calcul le ratio du Crédit agricole, qui se situe à 20 %. Mais le Crédit agricole est une exception par rapport à tout le reste du réseau mutualiste ou coopératif. Tous les autres établissements ont un ratio situé entre 35 % et 40 %. Je ne pense pas qu'il soit opportun de prendre exemple sur ce cas particulier plutôt que sur les autres.
Quand on considère ces autres établissements, le ratio de 35 % des caisses d'épargne est satisfaisant, celui de 40 % que vous avez vous-même trouvé, sur la base d'un calcul un peu fantaisiste, serait d'ailleurs satisfaisant lui aussi.
M. Philippe Marini, rapporteur. Il n'est pas fantaisiste.
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Ce n'est que lorsque l'on introduit dans le calcul le ratio du Crédit agricole, qui est très à l'écart de l'ensemble de la constellation des établissements mutualistes coopératifs, que l'on fait baisser la moyenne, mais il n'y a a priori absolument aucune raison de le faire.
M. Philippe Marini, rapporteur. Le thermomètre ne vous convenant pas, vous le cassez !
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Non, monsieur le rapporteur, ce n'est pas le thermomètre qui ne me convient pas, c'est l'endroit où vous le mettez ! (Rires.)
M. Philippe Marini, rapporteur. Nous dérivons, monsieur le ministre !
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. J'en viens au dernier point : l'évaluation même des 18,8 milliards de francs.
Vous dites qu'il ne faut pas inclure les certificats coopératifs d'investissement dans le calcul. J'affirme tout le contraire : nous pouvons placer pour 13 milliards de francs de parts auprès des épargnants et le reste, en certificats coopératifs d'investissement, auprès d'autres catégories d'agents économiques, des institutionnels qui n'ont rien à voir avec les épargnants.
M. Philippe Marini, rapporteur. Ce sont aussi des épargnants !
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Il n'y a pas recouvrement : on ne sollicite pas deux fois les mêmes épargnants.
Auprès des épargnants qui sont les clients des caisses d'épargne et qui sont ceux qui nous intéressent de façon privilégiée, nous espérons récolter 13 milliards de francs, soit, à un milliard près, le chiffre auquel tout le monde arrive : c'est la somme que le réseau affirme pouvoir placer ; c'est à peu près le chiffre auquel vous-même, monsieur le rapporteur, et un certain nombre de vos collègues êtes parvenus. Donc, en gros, tout le monde est d'accord sur le chiffre concernant les parts coopératives placées dans le public.
Par ailleurs, il est possible d'obtenir 5,8 milliards de francs auprès d'investisseurs institutionnels, qui constituent une autre catégorie d'épargnants et qui ne seront nullement touchés par le fait que, par ailleurs, on aura collecté 13 milliards de francs auprès de la première catégorie d'épargnants, à savoir les déposants dans les caisses d'épargne.
Puisque vous ne contestez pas le chiffre des 13 milliards de francs pouvant être collectés auprès des épargnants, la somme de 18,8 milliards de francs ne devrait pas vous paraître excessive, à moins que vous ne considériez qu'il est impossible de placer 5,8 milliards de francs auprès des institutionnels, mais vous n'avez même pas avancé cet argument tant vous savez qu'il est faux. Vous êtes donc d'accord avec nous sur le fait que, au total, on peut placer pour 18,8 milliards de francs de parts. Il n'existe aucun moyen de réfuter cette addition simple. A partir du moment où on peut le faire, il n'y a aucune raison de ne pas le faire.
Le problème, c'est que vous ne souhaitez pas que cela soit affecté au fonds de réserve des retraites par répartition.
Encore une fois, j'ai du mal à comprendre pourquoi vous ne voulez pas aider notre système de retraite à se « remplumer », sauf à croire - mais, honnêtement, c'est tellement loin de ma pensée que j'hésite même à évoquer ici cette hypothèse ! - ...
M. Jean-Louis Carrère. Vous avez tort, monsieur le ministre ! (Sourires.)
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ... que la majorité sénatoriale se trouverait quelque peu gênée de voir que, pour la première fois dans ce pays, par milliards de francs, et même par dizaines de milliards de francs...
M. Philippe Marini, rapporteur. Monsieur le ministre, nous avons voté une loi en mars 1997 et nous attendons encore les textes d'application !
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le rapporteur, je ne me rappelle pas m'être à ce point énervé en vous écoutant ! Souffrez que j'aille jusqu'au bout de ma démonstration. D'ailleurs, j'arrive à la fin.
M. Philippe Marini, rapporteur. Acceptez mes excuses, monsieur le ministre.
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Oh, je vous pardonne bien volontiers ce mouvement qui a dépassé votre intention, car je sais que vous êtes en fait très heureux que cet argent aille au fonds de réserve des retraites par répartition, et c'est cette confusion même qui est à l'origine de votre énervement. Personnellement, vous êtes pour, mais vous n'osez pas le dire. Je vais donc le dire pour vous.
Votre rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, est favorable - il vient de le redire - à ce que nous alimentions ainsi le fonds des retraites par répartition !
M. Philippe Marini, rapporteur. Si je l'étais, je le dirais moi-même !
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. La majorité, à l'Assemblée nationale, est pour. Je crois comprendre que l'opposition, au Sénat, est aussi pour. Si nous sommes tous d'accord, il n'y a vraiment pas de raison de vouloir priver de ces premiers vingt milliards de francs - il y en aura d'autres - notre système de retraites par répartition, qui en a besoin et que, nous, nous voulons soutenir.
Certes, ce gouvernement est le premier à y consacrer des dizaines de milliards de francs.
M. Jean Chérioux. Pour le moment, il n'y en a que deux !
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Que ce ne soit pas encore suffisant, c'est sûr ! Il en faudra d'autres, c'est sûr ! Il y aura déjà deux dizaines de milliards quand vous aurez voté cette disposition !
M. Jean Chérioux. Nous n'aurons pas toujours l'aubaine des caisses d'épargne !
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Oh, monsieur le sénateur, il y aura d'autres sources !
Pourquoi faut-il, à chaque fois qu'une proposition est faite pour améliorer la situation,...
M. Jean Chérioux. Je ne suis pas contre, mais vous êtes en train de vous en glorifier !
M. le président. Monsieur Chérioux, laissez M. le ministre s'exprimer.
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Ah ? Vous n'êtes pas contre ? Alors, je retire la remarque que je m'apprêtais à faire. Comme M. Marini, vous n'êtes pas contre, et je sais bien que, au fond de vous-mêmes, vous êtes tous pour !
Alors, d'un bon mouvement, ne votez pas contre votre sentiment ! Ne votez pas cet amendement qui n'a guère de signification, qui vise seulement à empêcher de renforcer notre système de répartition.
M. Philippe Marini, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. Monsieur le ministre, nous risquerions de tomber dans les rets de votre habileté oratoire mais nous devons y résister. Pour ce faire, je me permets de vous poser une simple question : quand le Crédit lyonnais sera privatisé, à quoi sera affecté le produit de la privatisation ?
M. le président. Monsieur le ministre, voulez-vous répondre à M. le rapporteur général ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je le veux bien, quoique je ne comprenne pas parfaitement le sens de sa question : elle doit receler un piège qui m'échappe.
Le Crédit lyonnais va être privatisé parce que nous devons le faire : la récapitalisation dont il a été l'objet a eu des conséquences telles que se trouvant enfreintes les règles communautaires en matière de concurrence communautaire. La Communauté européenne nous impose, en effet de procéder à cette privatisation.
Comme vous le savez, les ressources qui seront ainsi dégagées viendront compenser pour partie - non pas en totalité, malheureusement - les dépenses qui ont dû être engagées pour couvrir les pertes du Crédit lyonnais.
Est-ce bien le problème que vous vouliez soulever, monsieur le rapporteur général ?
M. Philippe Marini, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteurgénéral.
M. Philippe Marini, rapporteur. Monsieur le ministre, vous avez fort bien compris ma question mais vous n'y avez pas répondu. Le produit de la privatisation du Crédit lyonnais sera-t-il affecté au fonds de garantie du fonds de solidarité vieillesse, le FSV ?
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Comme pour nous faire gagner du temps, M. le ministre prétend exprimer nos souhaits profonds. Eh bien ! monsieur le ministre, je suis contre le choix politique que vous faites de consacrer cette somme au fonds de garantie pour les retraites.
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Vous êtes courageux !
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. J'ai un peu honte pour notre génération qui, au fond, aura cumulé les inconvénients de notre système, quels qu'aient été les gouvernements - depuis 1992, cela s'est même accentué du fait du retournement conjoncturel que nous avons connu à l'époque - en creusant des déficits abyssaux, en laissant filer une augmentation de la dette que l'on n'a pas su contenir parce que les déficits étaient eux-mêmes extrêmement difficiles à contenir.
Face à des projections qui apparaissent comme catastrophiques en matière de retraite que fait cette génération que nous représentons ? Elle vend le capital des Français pour préparer ses retraites. Quelle honte !
Ayons donc le courage de mobiliser l'argent des Français pour préparer les retraites ! Mettons en application les textes qui ont été votés et qui instituent les fonds de pension. Voilà une politique responsable !
Monsieur le ministre, moi, je ne serais pas fier de rentrer chez moi ce soir en disant à mes enfants : « Eh bien ! mes chers enfants, j'ai fait une bonne action aujourd'hui : nous avons vendu une partie des caisses d'épargne pour constituer nos propres retraites. » Quelle idée vont-ils se faire de nous ?
Je comprends très bien que vous en soyez fier, mais pardonnez-moi de ne pas partager cette fierté. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et du RPR, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je suis désolé d'allonger le débat mais, devant un tel morceau de bravoure, il serait indélicat de ne pas apporter un élément de réponse.
Vous devez, monsieur le président de la commission, avoir des enfants fort jeunes, ce dont je vous félicite au demeurant, car, s'ils avaient atteint l'âge de la maturité et s'ils étaient déjà dans le monde du travail, vous sauriez que c'est pour eux que le système de retraite est remis sur pied. Ce n'est ni pour vous ni pour moi, qui serons à la retraite dans une période à laquelle notre système ne connaîtra pas encore de grandes difficultés. C'est pour eux que nous travaillons.
Depuis 1992, effectivement - je serais plutôt parti de 1993, mais soit ! - notre endettement a beaucoup augmenté du fait de déficits divers, que, d'ailleurs, si je me souviens bien, la majorité sénatoriale a votés chaque année en approuvant les lois de finances successives de 1994, 1995, 1996 et 1997.
N'ayez pas trop honte, je viens vous consoler...
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Je n'en ai pas besoin !
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Nous sommes tous responsables d'un système de retraite qui, aujourd'hui, fait la preuve qu'il a bien fonctionné pendant cinquante ans - c'est la première constatation que l'on peut faire - mais qui risque en effet de connaître des difficultés en raison des perspectives démographiques qui sont maintenant les nôtres. Si notre génération doit avoir honte, monsieur Lambert, c'est de ne pas avoir fait assez d'enfants. Car, si nous avions fait assez d'enfants, nous n'aurions pas de telles perspectives démographiques...
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Nous avons, vous et moi, fait pareil en ce domaine ! (Sourires.)
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Si tel est le cas, nous avons, l'un et l'autre, fait notre devoir de ce point de vue, mais ce n'est pas obligatoirement le cas de tout le monde.
Compte tenu de la situation qui se présente aujourd'hui, il nous faut mettre des « noisettes », comme disait hier M. le rapporteur, de côté.
Nous avons là l'occasion de verser quelque chose en faveur de ce fonds. Faisons-le pour le pays. Il y aura d'autres occasions : je reviendrai devant vous, cette année, l'année prochaine, l'année suivante, et peut-être encore au-delà, vous proposer d'autres utilisations de ressources collectives en faveur du fonds de soutien aux retraites par répartition. Je suis sûr que vous finirez - oui, même vous, monsieur le président de la commission - par être convaincu du bien-fondé, au regard des intérêts de notre pays, de mesures qui tendent à assurer la pérennité d'un système des retraites par répartition qui, depuis la guerre, a effectivement si bien servi notre pays en assurant à nos retraités un niveau de vie tout à fait convenable. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Jean Chérioux. On n'a pas toujours des aubaines ! On peut le souhaiter, mais on n'en a pas toujours !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 18 rectifié bis.
M. Joël Bourdin. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Bourdin.
M. Joël Bourdin. Je n'ai pas beaucoup entendu parler de mon amendement. (Sourires.)
En outre, je n'ai pas saisi, sans doute parce que je suis fatigué, le sens de la discussion qui vient d'avoir lieu.
Puisqu'un débat s'est engagé les retraites, je tiens à préciser que, tout comme M. le ministre, j'estime qu'il est possible de mobiliser des ressources pour les fonds de retraite. J'ai d'ailleurs déposé aujourd'hui même une proposition de loi tendant à affecter 100 milliards de francs, prélevés sur nos stocks d'or qui ne servent à rien, à un fonds de retraite, à l'instar de ce que viennent de faire les Suisses. Nous aurons, je l'espère, l'occasion d'en reparler dans cet hémicycle. Si l'on ajoutait ces 100 milliards de francs aux 18,8 milliards de francs dont il est à présent question, cela commencerait à faire un joli fonds pour les retraites !
Mais, j'en reviens à l'article 21.
M. le rapporteur m'a suggéré de retirer mon amendement n° 120 en indiquant qu'il était prêt à rectifier le sien. Je ne procéderai à aucun marchandage, puisque c'est une pratique qui ne doit pas avoir cours ici (Sourires), mais je souhaiterais, afin d'être pleinement rassuré et de pouvoir retirer mon amendement en toute sérénité, que M. le rapporteur veuille bien ne confirmer que la référence à la commission des participations et des transferts est effectivement supprimée et aussi qu'il accepte de porter le délai de deux mois à quatre mois.
Qui peut le plus peut le moins ! Je ne vois pas pourquoi on obligerait les caisses d'épargne et la Caisse nationale des caisses d'épargne à procéder dans la précipitation.
M. Philippe Marini, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. Sur le premier point, je confirme que l'amendement n° 18 rectifié bis ne fait plus allusion à la commission des participations et destransferts.
Sur le second point, je suggère que, entre deux mois et quatre mois, nous retenions trois mois, et je rectifie à nouveau mon amendement en conséquence.
M. le président. A la suite, non pas d'un marchandage mais d'une transaction (Sourires), je suis donc saisi par M. Marini, au nom de la commission des finances, d'un amendement n° 18 rectifié ter, tendant à remplacer les paragraphes I et II de l'article 21 par un paragraphe ainsi rédigé :
« I. - Dans les trois mois qui suivent la publication de la présente loi, le montant du capital initial de chaque caisse d'épargne et de prévoyance est déterminé par le ministre chargé de l'économie sur proposition de la Caisse nationale des caisses d'épargne. Ce montant ne peut excéder un pourcentage de fonds propres égal au pourcentage moyen des fonds propres correspondant au capital social dans les autres réseaux bancaires coopératifs ou mutualistes, tel qu'il ressort des données du Comité des établissements de crédit et des entreprises d'investissement au 31 décembre 1998. »
Monsieur Bourdin, puis-je considérer que vous retirez l'amendement n° 120 ?
M. Joël Bourdin. Oui, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 120 est retiré.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 18 rectifié ter.
M. Jean-Louis Carrère. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Carrère.
M. Jean-Louis Carrère. On ne peut nier qu'une interrogation demeure quant au montant du capital initial.
Il est certain qu'il sera difficile de placer la somme prévue ; 18,8 milliards de francs représentent une partie non négligeable des fonds propres, soit une assiette à rémunérer plus importante que pour la plupart des autres réseaux. Cela fait donc peser une contrainte de rémunération lourde, supérieure à celles qui existent pour les autres réseaux coopératifs.
De plus, aucun réseau coopératif n'a placé de tels montants en une si courte période.
Or ce placement est important : si l'opération n'est pas complètement réussie par une caisse, celle-ci devra vraisemblablement racheter les parts non placées, ce qui pourrait amplifier un appauvrissement relatif de cette caisse.
C'est pourquoi nous nous étions demandés s'il ne convenait pas de proposer une réduction de ce montant, notamment après que l'Assemblée nationale eut accru l'affectation au financement de projets d'économie locale et sociale.
Mais le ministre nous a, je crois, convaincus que le montant choisi était, tout bien réfléchi, non pas le moins mauvais, mais le meilleur. Il se situe - et, là, je reprends la dialectique de M. le rapporteur - dans la fourchette établie par l'excellent rapport de Raymond Douyère, qui connaît bien son affaire.
M. Philippe Marini, rapporteur. Le premier ou le deuxième rapport ?
M. Jean-Louis Carrère. Le deuxième corrobore le premier.
Surtout, il faut distinguer la part des certificats coopératifs. Le véritable montant à prendre en compte est en effet 13 milliards de francs, ce qui apparaît relativement réaliste.
En revanche, il nous semble nécessaire, non pas de multiplier par deux la durée de placement, mais de la porter de quatre ans à cinq ans afin d'augmenter les chances de réussite pour toutes les caisses et de rendre supportable l'effort qui leur sera demandé.
Quant à l'amendement de la commission, il ne doit pas être retenu, mes chers collègues, puisqu'il confie au ministre le soin de fixer le montant du capital initial,...
M. Philippe Marini, rapporteur. Dans une limite !
M. Jean-Louis Carrère. ... ce qui est tout de même étrange, car il n'y a pas de raison qu'il modifie sa position. De plus, le Parlement n'a pas à se défausser de ce choix sur l'exécutif.
Pour ce qui est de la non-intervention de la commission des participations et des transferts, nous notons avec satisfaction l'évolution qu'a connu l'amendement, mais il n'y a jamais eu de confusion dans nos esprits.
M. Joseph Ostermann. Oh !
M. Jean-Louis Carrère. La modification du statut des caisses d'épargne n'est pas leur privatisation, monsieur le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. Si, c'est une privatisation.
M. Jean-Louis Carrère. Voilà la divergence entre nous !
M. Marcel Deneux. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Deneux.
M. Marcel Deneux. Quelque chose m'a échappé dans l'argumentation qu'a développée M. le ministre sur la répartition du capital entre parts sociales et certificats coopératifs d'investissement. Je suis à ce point étonné que je veux intervenir pour me faire le défenseur des futurs porteurs de parts sociales des caisses d'épargne.
Monsieur le ministre, le capital sera désormais composé de deux éléments dont la valeur ne va pas varier dans le temps de la même manière. Ainsi, les certificats coopératifs d'investissement, les CCI, ont vocation à évoluer en fonction d'un marché, alors que les parts sociales sont des titres à capital nominal dont la valeur est fixe.
Au bout de quelques années, les souscripteurs de certificats coopératifs d'investissement gagneront de l'argent sur ce capital des caisses d'épargne, et c'est tout à fait légitime. Or, monsieur le ministre, vous nous proposez d'attribuer ces CCI sinon par priorité, du moins par préférence aux « zinzins », c'est-à-dire aux investisseurs institutionnels. Autrement dit, vous lésez les porteurs de capital social, dont vous nous dites qu'ils représentent l'épargne populaire, au profit des « zinzins ». C'est là un raisonnement d'inspecteur des finances et non pas de militant coopératif.
A ce titre-là, je m'insurge. Il n'est pas normal que les pauvres gens auxquels on aura fait souscrire des parts sociales soient ruinés par d'autres, les détenteurs de CCI, qui profiteront du système.
L'équité, la justice même, exige que l'on distribue les CCI et les droits à souscription de CCI à ceux qui sont déjà porteurs de parts sociales. Je peux vous dire par expérience que l'on y arrive, bien que ce ne soit pas réglementé, car les réseaux commerciaux des banques qui émettent des CCI y veillent et s'organisent pour que les porteurs de parts sociales, qui étaient là au départ et qui ont soutenu la maison depuis toujours, ne soient pas lésés par ces porteurs de CCI prêts à gagner de l'argent sur leur dos !
Monsieur le ministre, il serait anormal que vous procédiez à la répartition du capital suivant les perspectives que vous avez évoquées tout à l'heure. Je veux le dire publiquement : en tant que porteur de parts sociales des caisses d'épargne, je me ferai militant et je ferai campagne pour que cela ne se produise pas. Ce que vous proposez est parfaitement anormal au regard tant de la coopérative que nous voulons créer que des intérêts de ses coopérateurs. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste. - M. le rapporteur applaudit également.)
Mme Marie-Claude Beaudeau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Les amendements n°s 18 rectifié ter et 19 de la commission des finances ont la spécificité de correspondre, de manière assez logique, à la position que M. le rapporteur a adoptée depuis le début de la discussion de ce projet de loi.
Sur le fond, la nature assez spécifique du statut qui sera dévolu aux caisses d'épargne à l'issue de la discussion du texte pose en effet un certain nombre de problèmes.
Nous ne pouvons évidemment manquer de souligner qu'au-delà de tout ce qui est dit et écrit sur le fait de savoir si ce statut est inspiré pour partie du statut de la coopération et si le montant du capital initial de l'ensemble des caisses du réseau correspond effectivement à une réalité économique fiable et offre toutes les garanties juridiques possibles, la question qui nous est directement posée est celle de l'ordre des priorités définies à la nouvelle structuration du réseau.
Ces priorités, nous l'avons vu, sont contenues dans le texe initial des articles et elles ont pour elles le défaut de ne pas tout à fait correspondre à ce que notre rapporteur souhaite voir appliquer comme orientation nouvelle au réseau des caisses d'épargne.
Sur le fond, notre collègue Philippe Marini est un partisan de la banalisation la plus large possible du statut des caisses d'épargne, tout le monde l'a compris depuis le début de ce débat.
M. le rapporteur, en fait, n'apprécie guère qu'un établissement de crédit puisse se voir confier des missions d'intérêt général et apporter par là même une couleur ou une tonalité différentes à des pratiques assez uniformément répandues dans notre pays en matière bancaire et financière.
M. Philippe Marini, rapporteur. Je souhaite surtout qu'elles ne fassent pas faillite et qu'elles gardent leur indépendance !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Ce que vous voulez, monsieur le rapporteur, est assez clair : vous souhaitez que la constitution et la diffusion des parts sociales des caisses d'épargne finissent par détourner définitivement ces établissements de leurs missions, au bénéfice exclusif de la rémunération des sociétaires pris individuellement.
Cette démarche va de pair avec celle qui consiste à scier la branche sur laquelle sont assis ces établissements, c'est-à-dire les livrets défiscalisés, pour ce qui est des ressources, et le caractère assez spécifique de leurs interventions, pour ce qui est des emplois.
L'article 21 peut donc, à terme, poser un certain nombre de problèmes. Il est, en effet, au coeur de la contradiction que présente l'évolution du statut des caisses, notamment la constitution de leur capital social.
Il importe donc de savoir, mes chers collègues, une fois repoussées les propositions de M. le rapporteur, ce que cet article pourra effectivement devenir à l'issue de l'examen du texte.
M. Paul Loridant. Très bien !
M. Gérard Delfau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau. Je voterai contre l'amendement de la commission, m'inscrivant pleinement dans la logique de M. le ministre et du projet de loi tel qu'il nous arrive de l'Assemblée nationale.
Cela étant, monsieur le ministre, je voudrais, à ce moment très important du débat, redire mon inquiétude.
Dès le vote de la loi, durant la période transitoire, toutes sortes de contraintes vont peser, et pas seulement des contraintes financières, dans mon esprit. Elles doivent être surmontées si nous voulons que les mesures que nous allons voter aient un effet positif pour les caisses d'épargne et leurs salariés, pour les déposants et pour le pays tout entier, j'ajouterai même pour l'idée coopérative, parce que cela m'importe aussi beaucoup.
Il s'agit, bien entendu, de la rémunération des parts sociales, de la ponction sur les fonds propres décidée dans la dernière loi de finances, du problème encore non résolu des retraites et aussi - raison pour laquelle les problèmes ne sont pas uniquement d'ordre financier - du changement de statut, qui va tout de même confronter cette maison, dont je salue au passage la qualité des personnels et de la direction, à un certain nombre d'ajustements délicats. Bref, cela se fera, mais pas sans douleur.
C'est pour faciliter cette période transitoire, monsieur le ministre, que, comme d'autres d'ailleurs, j'ai suggéré que vous modifiez votre position sur deux points.
Il s'agit, d'abord, de réduire le montant du capital social. J'ai cru comprendre dans vos propos que le ratio actuel n'était pas nécessairement le seul qui puisse stabiliser l'édifice.
Il s'agit, ensuite, d'allonger la durée de la période transitoire, même si j'admets que la discussion m'a fait changer d'avis et que la durée de huit ans que je proposais dans mon intervention liminaire est bien longue.
Cela étant, monsieur le ministre, sur la réduction du montant du capital social comme sur l'allongement de la période transitoire, qui fait d'ailleurs l'objet d'amendements, un effort est indispensable.
Bref, monsieur le ministre, m'inscrivant totalement dans votre philosophie et souscrivant pleinement aux procédures que vous préconisez, je me permets de vous suggérer de faire un geste, au nom du Gouvernement, sinon à ce moment de la discussion, du moins un peu plus tard.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 18 rectifié ter, repoussé par le Gouvernement.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 93:

Nombre de votants 319
Nombre de suffrages exprimés 319
Majorité absolue des suffrages 160
Pour l'adoption 220
Contre 99

Mes chers collègues, à la demande de M. le ministre, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures quinze, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Christian Poncelet.)

PRÉSIDENCE DE M. CHRISTIAN PONCELET

M. le président. La séance est reprise.

3

QUESTIONS D'ACTUALITÉ
AU GOUVERNEMENT

M. le président. L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.
Conformément à la règle posée par la conférence des présidents, je rappelle que l'auteur de la question et le ministre qui lui répond disposent chacun de deux minutes et demie.
Chaque intervenant aura bien évidemment à coeur de respecter le temps qui lui est imparti, afin que toutes les questions et toutes les réponses puissent bénéficier de la retransmission télévisée. Chacun doit faire un effort, c'est une question d'élégance à l'égard de ses collègues.

ACTION DU GROUPEMENT DE PELOTONS
DE SÉCURITÉ EN CORSE

M. le président. La parole est à M. Courtois. (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants. - M. Machet applaudit également.)
M. Jean-Patrick Courtois. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre... ou à son représentant. (Murmures sur les travées du RPR.)
Vous avez déclaré, monsieur le Premier ministre, que vous-même, les membres de votre Gouvernement et vos collaborateurs, n'aviez rien à voir avec l'incendie d'une paillote en Corse et que vous étiez d'autant moins soupçonnable que ces agissements sont contraires à votre conception de la République, à vos méthodes d'action et aux valeurs que vous défendez.
M. Jacques Mahéas. J'espère que vous n'en doutez pas !
M. Jean-Patrick Courtois. Nous ne demandons pas mieux que de vous croire. Mais il ne faut pas dissocier la morale de la vérité. Nous avons assisté à trop de déclarations successives et contradictoires pour être rassurés sur la mise en oeuvre de vos intentions.
Nous entendons savoir qui a permis la création, en juillet 1998, du groupement de pelotons de sécurité, le GPS. Quelles missions étaient assignées à cette unité ? De quelle autorité relevait-elle ? De la vôtre ? De celle du ministre de la défense ? De celle du ministre de l'intérieur ? De celle du préfet ?
Pourquoi cette formation a-t-elle fonctionné comme une police parallèle et pour quelle raison aucune disposition n'a-t-elle été prise pour encadrer ses moyens d'action ? Pourquoi avoir créé le GPS sans que, selon ses propres dires, le ministre de la défense lui-même en ait été averti ?
Les zones d'ombre ou plutôt, devrais-je dire, d'opacité qui entourent cette triste affaire trahissent un grave dysfonctionnement de l'Etat. Il importe que la lumière soit faite rapidement et, surtout, totalement sur tous les faits qui portent atteinte au crédit de la République et au rétablissement de la paix civile en Corse.
Nous attendons de vous, monsieur le Premier ministre, non seulement la vérité mais un retour à un comportement et à des pratiques qui fassent de l'Etat de droit non pas un sujet de discours, mais une réalité incontournable et, surtout, indiscutable. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole à M. le ministre de la défense, que nous allons écouter dans la sérénité. Lui seul a la parole.
M. Alain Richard, ministre de la défense. Monsieur le sénateur, vous demandez la lumière sur les faits, ce qui est légitime. C'est l'option que le Gouvernement a prise dès l'instant où des faits graves de nature délictueuse, criminelle ont été portés à notre connaissance et où l'implication de personnels de l'Etat y a été perceptible. L'ensemble des services de l'Etat se sont mis au service de la justice pour que toute la lumière soit faite. Chacun peut être témoin, jour après jour, du total engagement de tous les services de l'Etat, notamment des services de la gendarmerie, pour que l'enquête judiciaire puisse se dérouler avec efficacité.
La création du GPS a été souhaitée par le Gouvernement - elle a été mise en oeuvre, comme c'est toujours la règle en matière de moyens de la gendarmerie, par le ministère de la défense - parce que, dans le contexte postérieur à l'assassinat du préfet Erignac, de nombreuses voix s'étaient élevées, d'ailleurs sur tous les bancs des assemblées, pour que les moyens des forces de sécurité en Corse soient renforcés.
Je rappelle - je l'ai déjà fait - que le niveau de délinquance, notamment en ce qui concerne les atteintes aux personnes, que l'on constatait alors en Corse avait déjà justifié la présence de policiers et de gendarmes dans l'île à des niveaux beaucoup plus élevés que dans tout autre département et que certaines missions devaient être renforcées.
Trois missions ont été imparties à cette formation, et elles figurent de façon très précise dans l'instruction qui a organisé sa constitution.
La première, c'est une mission d'intervention, c'est-à-dire de soutien aux interpellations ou aux arrestations d'hommes armés. Il en a été réalisé trente-cinq entre le mois d'octobre et le mois d'avril dernier. La plupart des personnes interpellées étaient en effet armées.
La deuxième mission, c'est une mission de protection. Un peloton de ce groupement a été chargé, pendant toute cette période, de protéger physiquement et quotidiennement un certain nombre de personnalités de l'Etat à l'encontre desquelles des menaces répétées avaient pu être vérifiées.
Enfin, la troisième mission, c'est la surveillance. Il s'agit d'un moyen complémentaire pour réussir un certain nombre d'enquêtes judiciaires : filatures, repérages d'allées et venues, et cela a toujours été fait, dans le cas du GPS, en complément et sur la demande des autorités judiciaires.
L'autorité sur ce groupement revenait au commandant de la région de Corse, puisque ce groupement devait agir sur les deux départements et ne pouvait donc pas être mis à la disposition de l'un des deux groupements départementaux.
La qualification de « police parallèle » relève de votre seule appréciation... (Exclamations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Alain Gournac. Tout de même !
M. Philippe Marini. Le préfet menait « des enquêtes parallèles », est-il précisé dans Le Monde !
M. Alain Richard, ministre de la défense. Vous pouvez lire le journal en séance, monsieur Marini, c'est une activité parlementaire comme une autre ! Pour ma part, je m'efforce de répondre avec la signification qui s'attache à l'expression du Gouvernement.
Je dis donc que cette imputation ne correspond pas à la réalité. Les missions du GPS, qui a été dissous, sont reventilées, par une circulaire signée aujourd'hui, auprès d'unités habituelles, permanentes, de la gendarmerie. Mais si quelqu'un pense que ces missions sont inutiles, il serait intéressant qu'il prenne la responsabilité de l'affirmer. Chacun sait que le rétablissement de l'ordre et de la loi républicaine en Corse nécessite des moyens importants, et le Gouvernement est dans son rôle en attribuant ces moyens.
Quant aux progrès de l'Etat de droit, ils sont suffisamment au centre de la politique d'ensemble du Gouvernement dans de multiples domaines pour que l'on puisse avoir une certaine sécurité, une certaine solidité en disant que ce sera l'axe de la politique du Gouvernement à l'égard de la Corse, politique qui comporte aussi un important volet de développement et de dialogue. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur plusieurs travées du groupe communiste républicain et citoyen.)

GRE`VES À LA SNCF

M. le président. La parole est à M. Paul Girod.
M. Paul Girod. Monsieur le président, ma question s'adressait à M. le Premier ministre, car elle concerne la cohésion gouvernementale.
Depuis plus d'une semaine, les Français doivent, pour la énième fois, supporter les humeurs des syndicalistes de la SNCF qui, pour un différend portant sur seize minutes de temps de travail, appellent à la grève générale et bloquent la vie du pays. Comme quoi la grenade dégoupillée des trente-cinq heures, que tout le monde se repasse comme une patate chaude, peut aboutir à des effets inattendus. (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Alain Gournac. Très bien !
Un sénateur socialiste. Cela n'a rien à voir !
M. Paul Girod. Le Gouvernement a rejeté toute initiative parlementaire visant, dans le cadre constitutionnel, à organiser un service minimum dans les services publics. Quand nous voulions le faire, nous avons été accusés de vouloir toucher aux droits essentiels des personnes.
M. Alain Gournac. Eh oui !
M. Paul Girod. Je constate aujourd'hui que tous ceux qui ont porté cette accusation sont en train de négliger tranquillement la souffrance, les protestations et les difficultés que connaissent tous nos concitoyens victimes de cette action.
M. Pierre Hérisson. Très juste !
M. Paul Girod. Si le droit constitutionnel et le droit de grève sont respectés, force est de constater qu'il n'en va pas de même du droit de nos concitoyens de vivre légitimement dans la tranquillité et de se déplacer librement, comme cela devrait être le cas.
M. Alain Gournac. Très bien !
M. Paul Girod. Je crois que le droit de grève tel qu'il est pratiqué aujourd'hui n'est plus en rapport avec les réalités de notre époque.
De plus, il y a une contradiction gouvernementale interne à vouloir nous expliquer chaque jour, par la voix de Mme le ministre de l'environnement, par la voix de M. le ministre des transports - qui aurait peut-être pu me répondre aussi - qu'il faut privilégier les transports collectifs sur les transports individuels, arrêter de développer les infrastructures routières et, en même temps, laisser la France se faire paralyser par les grévistes de la SNCF. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
Il y a là des incohérences. Il faudrait, au nom de l'éducation civique que l'on prône partout, que le Gouvernement nous aide à faire comprendre aux uns et aux autres que le respect des personnes au sein du service public, dont la mission est d'abord d'être au service du public, passe avant les revendications catégorielles. (Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement. Permettez-moi tout d'abord d'excuser l'absence de M. Gayssot qui rencontre en ce moment même son homologue italien à propos de la gestion des conséquences de la tragédie du tunnel du Mont-Blanc. Je l'ai quitté voilà deux heures à peine, mais nous avons eu le temps de faire le point sur le conflit à la SNCF qui est l'objet de votre question.
Je vous annonce d'emblée une première nouvelle qui est positive. De nombreuses assemblées générales du personnel en grève se tiennent en ce moment même : la plupart de celles qui se sont prononcées ont voté pour la reprise du travail.
M. Jean Bizet. A quel prix !
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Vous avez, par ailleurs, regretté que le Gouvernement ait écarté la perspective d'instaurer un service minimum. Permettez-moi de vous faire observer que ce conflit n'a jamais concerné plus du quart des conducteurs. (Exclamations sur les travées du RPR.) Nous sommes donc bien au-delà de ce que représenterait le service public minimum. Or il en résulte néanmoins les perturbations que vous déplorez. Le service minimum ne serait donc même pas la réponse que vous espérez ou que vous en attendez.
M. Philippe François. On veut le service maximum !
M. André Rouvière. Mais ils ne veulent pas écouter.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Enfin, les organisations syndicales les plus représentatives, à savoir les deux grandes confédérations que sont la CGT et la CFDT, ont souligné, pour leur part, les avancées positives de la négociation qui a été conduite avec la direction de la SNCF depuis plusieurs mois. En ce qui concerne les conducteurs, la spécificité de leurs fonctions débouche sur certaines sujétions à partir desquelles des désaccords et des incompréhensions sont apparus ; parfois même, de fausses nouvelles ont été diffusées.
Les organisations syndicales, qui avaient apprécié les éléments positifs des avancées constituées par cette négocation, ont, avec la direction, pesé pour que puisse aboutir le déblocage qui est en cours et que je vous ai annoncé.
Je souhaite souligner les avancées. Dans les trois ans à venir, la SNCF procédera à 25 000 embauches statutaires. (Exclamations sur les travées du RPR.) Qui peut ne pas mesurer l'intérêt, pour les milliers de jeunes concernés, de la perspective d'obtenir un emploi ?
M. Philippe François. Alors, il faut acheter des boules de pétanque ! (Sourires.)
M. Pierre Lefebvre. Vous préférez le chômage ?
Mme Hélène Luc. Vous devriez applaudir !
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Enfin, pour conclure, je vous indiquerai que les organisations syndicales ont émis le souhait que le dialogue social se poursuive par une consultation de tous les cheminots sur le contenu de cet accord. La direction de la SNCF a répondu positivement à cette demande, et le Gouvernement est tout à fait favorable à une telle démarche. Il estime en effet que c'est par le dialogue social, y compris par ses formes nouvelles, que l'on peut parvenir, dans cette grande entreprise qu'est la SNCF,...
M. Alain Gournac. Et la consultation des usagers ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. ... à faire vivre les rapports sociaux différemment, de façon non conflictuelle.
Mme Hélène Luc. Très bien !
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. C'est la voie du progrès, celle de l'intérêt de tous les usagers, qu'ils soient voyageurs ou utilisateurs du fret. C'est aussi, bien sûr, l'intérêt de l'entreprise et de tous les cheminots. (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)

VOLET DIPLOMATIQUE DE LA CRISE DU KOSOVO

M. le président. La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. Monsieur le président, monsieur le ministre de la défense, mes chers collègues, il n'y a plus de mots pour décrire l'horreur de la tragédie humaine qui se déroule au Kosovo.
M. Milosevic et son régime portent la responsabilité pleine et entière de ces crimes, de ces exactions. Aucune complaisance ne peut être de mise avec ces actes de barbarie, à commencer par les déportations massives.
M. Jacques Mahéas. Très bien !
M. Philippe François. M. Milosevic est un communiste !
M. Paul Loridant. Les événements de ces derniers jours en Macédoine, les difficultés de l'acheminement de l'aide en Albanie montrent bien que la situation devient intenable aussi bien pour ces centaines de milliers de personnes chassées de chez elles que pour les peuples qui les accueillent.
Au Kosovo, les violences continuent. En Serbie, c'est le peuple et non pas le régime lui-même qui subit de plein fouet les frappes. Il n'est pas de guerre propre, monsieur le ministre, et vous savez que, chaque jour, la liste des victimes civiles s'allonge...
Je fais partie de ceux qui ont critiqué le recours aux bombardements, en soulignant les risques d'un déchaînement de violence, d'un embrasement. J'ai aussi vivement regretté que notre pays, que l'Europe perdent la main dans le règlement de la crise des Balkans au profit de l'OTAN et de ceux qui dirigent réellement cette organisation, les Etats-Unis.
Il faut remettre la légitimité internationale à l'ordre du jour et placer les Nations unies au centre de la sécurité internationale.
De toute évidence, après quarante-quatre jours de frappes, l'urgence d'une solution négociée s'impose pour éviter l'enlisement, pour éviter l'extension du conflit.
Les heures qui viennent sont primordiales en ce sens. La réunion du G8 de ce jour permettra-t-elle d'avancer significativement avec, nous l'espérons, la proposition d'un plan de paix ?
Monsieur le ministre, comment interprétez-vous les petits signes positifs donnés par M. Milosevic, telles la libération des trois militaires américains, la présence de M. Rugovar en Italie et l'entrée de convois humanitaires au Kosovo ?
S'agit-il selon vous, comme le pense M. Clinton, d'un « développement positif » ?
Ne serait-il pas temps, monsieur le ministre, d'envisager une suspension des bombardements en échange d'un arrêt des expulsions des populations civiles et du retour, chez eux, des réfugiés. A l'issue du G8, un mandat pourrait être donné en ce sens à la diplomatie russe. Cela rendrait possible une nouvelle négociation sur l'autonomie du Kosovo garantie par le déploiement des forces de l'ONU. Monsieur le ministre, la France est-elle prête à favoriser une telle initiative ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen. - M. Aymeri de Montesquiou applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Alain Richard, ministre de la défense. Monsieur le sénateur, j'aurais souhaité vous répondre longuement, mais nous ne disposons que de peu de temps, et j'ai le plaisir de pouvoir vous faire une première lecture - elle sera malheureusement sommaire, car je ne dispose que du texte en anglais - de la déclaration des ministres des affaires étrangères du G 8, réunis près de Bonn, qui a été portée à ma connaissance à quinze heures quatre.
Les huit ministres des affaires étrangères se sont mis d'accord sur les principes suivants : la fin immédiate et vérifiable de la violence et de la répression au Kosovo ; le retrait du Kosovo des forces militaires, paramilitaires et de police ; le déploiement au Kosovo de présences internationales, civiles et de sécurité efficaces, endossées et adoptées par les Nations unies, capables de garantir la réalisation des objectifs communs ; l'établissement d'une administration intérimaire au Kosovo à décider par le Conseil de sécurité ; le retour libre et en sûreté des réfugiés et des personnes déplacées au Kosovo ; un processus politique vers l'établissement d'un cadre politique intérimaire d'accords pour une autonomie substantielle du Kosovo.
Les directeurs politiques des pays membres du G 8 élaboreront un plan de travail sur les étapes suivantes vers la réalisation d'une solution politique au Kosovo.
Pour mettre en oeuvre ces principes, les ministres du G 8 ont donné comme instruction à leurs directeurs politiques de préparer les éléments d'un projet de résolution du Conseil de sécurité.
Le groupe des huit ministres a bien travaillé. En fonction des principes et des conditions que nous avons estimés nécessaires depuis le départ, un pas en avant significatif, me semble-t-il, a été franchi dans le travail diplomatique, pas qui n'a, hélas ! été possible que par l'engagement de la force. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur certaines travées du groupe communiste républicain et citoyen, du RDSE et de l'Union centriste.)

RESPONSABILITÉ DU GOUVERNEMENT
DANS LA SITUATION EN CORSE

M. le président. La parole est à M. Hyest.
M. Jean-Jacques Hyest. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s'adressait à M. le Premier ministre.
Pour la première fois dans l'histoire de la Ve République, un préfet et son directeur de cabinet ont été mis, hier soir, en examen et écroués à la prison de la Santé, à Paris.
Le juge a donc officiellement désigné ces personnes comme les auteurs probables, à ses yeux, de l'infraction de complicité de destruction volontaire d'un bien appartenant à autrui, par incendie en bande organisée. Que l'on ne me parle pas de la présomption d'innocence, car j'emploie les termes mêmes du code de procédure pénale !
Personne ne peut nier désormais qu'il s'agit d'une affaire d'une gravité extrême qui frappe l'autorité de l'Etat, et non d'actions isolées.
Est-il imaginable qu'un préfet de la République ait pu agir de son propre chef sans en informer, à un moment ou à un autre, sa hiérarchie ?
M. Alain Gournac. Impossible !
M. Jean-Jacques Hyest. Est-il imaginable qu'une absence de contrôle ait pu mener à des actions criminelles au nom justement de la restauration de l'autorité de l'Etat ?
En réalité, les termes de l'alternative sont simples.
M. Marc Massion. Mais non !
M. Jean-Jacques Hyest. Soit le Gouvernement ne savait pas, et c'est une grave défaillance, et alors, où est l'Etat ?
Un sénateur du RPR. Absolument !
M. Jean-Jacques Hyest. Soit il savait, et nous sommes, comme l'a dit l'un de nos collègues, en présence d'un mensonge d'Etat. Dans les deux cas, la responsabilité du Gouvernement est engagée.
M. Alain Vasselle. Tout à fait !
M. Jean-Jacques Hyest. Quand allez-vous en tirer les conséquences ? (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Jacques Mahéas. Pitoyable !
M. Claude Estier. C'est assez lamentable ! (Protestations sur les travées du RPR.)
Un sénateur de l'Union centriste C'est vous qui êtes pitoyables !
M. Claude Estier. Vous oubliez d'autres périodes ! (Nouvelles protestations sur les travées du RPR.)
Un sénateur du RPR. C'est grave !
M. le président. La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, c'est en effet une affaire grave, très grave - M. le Premier ministre l'a dit lui-même, tant à l'Assemblée nationale que devant le pays, l'autre soir - non seulement parce qu'il s'agit d'un incendie criminel, mais également parce que ce sont les responsables précisément chargés de faire respecter la loi qui sont soupçonnés...
M. Charles de Cuttoli. Et en prison !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. ... d'avoir violé la loi. Par conséquent, il s'agit effectivement d'une affaire très grave.
Par ailleurs, M. le Premier ministre a dit, devant le pays, que, en effet, aucun membre du Gouvernement ni aucun de ses collaborateurs n'avait été informé auparavant de cette opération. D'ailleurs, l'enquête judiciaire et l'audition du préfet Bonnet donneront certainement des éclaircissements sur ce point, en provenance de la justice. (Murmures sur les travées du RPR.)
Enfin, monsieur le sénateur, vous soulevez dans cette affaire la question de la responsabilité. Je dirai tout d'abord que la responsabilité pénale est une responsabilité personnelle...
M. Jean-Jacques Hyest. Je n'ai pas parlé de cela !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. ... et, par conséquent, nous ne parlons que de responsabilité politique. (Vives exclamations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
Le Gouvernement a pris cette responsabilité politique immédiatement. En effet, parallèlement à l'enquête judiciaire qui, bien évidemment, je le rappelle, n'a souffert et ne souffrira aucune entrave - et c'est nouveau parce qu'il fut un temps, en effet, où l'on demandait aux magistrats d'agir avec circonspection,...
M. Claude Estier. Très bien !
M. Jean Chérioux. Par exemple, le Rainbow Warrior !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. ... et, en Corse, on se souvient de circulaires, d'instructions ; en tout cas, la justice agit avec rapidité et sans aucune entrave - parallèlement à l'enquête judiciaire, disais-je, des décisions administratives ont été prises : envoi de deux inspections, l'une par le ministre de la défense, l'autre pas le ministre de l'intérieur, décision de dissolution du GPS, suspension des fonctions du colonel Mazères et du préfet de Corse. (Exclamations sur les travées du RPR.)
Tout cela ne doit pas nous faire oublier que nous devons respecter non seulement la loi, mais également les procédures. (Exclamations sur les travées du RPR.)
Nous ne devons pas oublier, s'agissant d'une affaire grave en effet - car nous voulons poursuivre notre politique de respect de la loi en Corse - ce qui a été fait dans ces départements.
Je voudrais rappeler ici que, en 1995, il y a eu 602 attentats ; en 1998, 198 attentats ont été commis,...
Un sénateur du RPR. C'est trop !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. ... c'est-à-dire cinq fois moins. (Murmures sur les travées du RPR.)
En 1995, sur ces 602 attentats, 59 personnes ont été interpellées et 28 personnes écrouées alors que, en 1998, pour 198 attentats, 430 personnes ont été interpellées et 55 personnes écrouées : cinq fois moins d'attentats, quatre fois plus de personnes déférées devant la justice ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes et sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Philippe François. Honneur aux gendarmes !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. En ce qui concerne le terrorisme corse - le Sénat, qui fait un travail sérieux, est friand d'informations précises, et je vous communique donc des chiffres qui n'ont jamais été rendus publics jusqu'à présent -...
M. Philippe François. Honneur aux gendarmes !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. ... au 12 février 1999, il y avait 107 dossiers d'information ouverts, 25 détenus provisoires, 165 personnes mises en examen. Les affaires sont non seulement instruites, mais elles sont également jugées.
Je vous indique que, dans les semaines à venir, la Cour d'assises spécialement composée ou le tribunal correctionnel de Paris aura à statuer de sept affaires liées au terrorisme.
N'oublions pas non plus que les assassins du préfet Erignac ne sont encore ni confondus ni déférés devant la justice...
Un sénateur du RPR. Eh oui !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. ... malgré la persévérance menée dans l'enquête. En conséquence, nous devons soutenir les personnels de police et de lutte contre l'action terroriste liés à cette enquête.
Par ailleurs, nous devons garder présent à l'esprit que la politique, c'est non seulement le rétablissement du respect de la loi mais aussi, pour les Corses qui ont le droit de vivre en paix et dans la sérénité, une action interministérielle : seize visites ministérielles ont eu lieu dans l'île... (Exclamations sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. Jean-Claude Carle. Avec quel résultat ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. ... depuis un an et demi, avec la volonté de développer ces départements.
Croyez bien que cet épisode pénible ne fera pas oublier au Gouvernement la nécessité absolue de mettre la priorité sur le contrat de plan, qui doit être négocié,...
Un sénateur du RPR. Ah oui !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. ... et sur la politique d'aménagement du territoire en Corse. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen. - Exclamations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Philippe Marini, rapporteur. Quelle autosatisfaction !

RESPONSABILITÉ DU GOUVERNEMENT
DANS LA SITUATION EN CORSE

M. le président. La parole est à M. de Raincourt.
M. Henri de Raincourt. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le Premier ministre et à lui seul. Elle s'inscrit dans le prolongement de celles qui ont été posées à l'instant par nos amis Jean-Patrick Courtois et Jean-Jacques Hyest.
M. Roland Courteau. On vient de vous répondre !
M. Henri de Raincourt. En effet, si le sujet ne prêtait à la gravité, le Sénat pourrait être tenté de penser que ce qui se passe en Corse est une anomalie parmi les démocraties. (Sourires sur les travées du RPR.)
L'incarcération et la mise en examen d'officiers de gendarmerie, d'un préfet et de son directeur de cabinet sont effectivement des événements d'une portée considérable.
Contrairement à ce qu'a affirmé un peu rapidement M. le Premier ministre, ce n'est pas une affaire de l'Etat, c'est, hélas ! une affaire d'Etat...
M. Henri Weber. Très fort !
M. Henri de Raincourt. ... et, par conséquent, le Gouvernement ne peut plus repousser sa responsabilité politique, puisque c'est le coeur de l'Etat qui se trouve touché.
M. Philippe François. Très bien !
M. Henri de Raincourt. La représentation nationale est tout à fait dans son rôle lorsqu'elle demande au Gouvernement de faire apparaître la vérité sur le fonctionnement de l'Etat et sur les agissements d'autorités civiles et militaires dont il a la responsabilité.
MM. Louis Althapé et Philippe Marini. Très bien !
M. Henri de Raincourt. Sur le plan judiciaire, madame le garde des sceaux, l'affaire semble suivre son cours, et je vous en donne acte.
M. Claude Estier. C'est nouveau !
M. Jacques Mahéas. Ne « semble » pas, ce n'est pas comme avant ! Elle « suit » son cours !
M. Henri de Raincourt. Sur le plan politique, il faut maintenant reconnaître que le traitement prioritairement et presque exclusivement répressif du dossier corse ne suffit pas pour restaurer l'Etat de droit.
M. Henri Weber. Nous y voilà !
M. Jean-Louis Carrère. Il y vient !
M. Henri de Raincourt. Absolument !
M. Jean-Louis Carrère. Il faut construire des paillotes !
M. le président. Messieurs, je vous en prie ! Seul M. de Raincourt a la parole.
M. Henri de Raincourt. La progression sans précédent de l'aile la plus radicale du mouvement nationaliste lors du dernier scrutin le prouve, un lien de confiance doit être patiemment tissé avec le peuple. Il est aujourd'hui rompu !
M. Jacques Mahéas. Et la droite, qu'a-t-elle fait en Corse ?
M. Henri de Raincourt. Soit on ne nous dit pas la vérité, soit le pays n'est pas gouverné. (Protestations sur les travées socialistes.)
Comment restaurer l'exemplarité et l'autorité de l'Etat, bafouées aux yeux de nos compatriotes ? (Nouvelles protestations sur les mêmes travées.)
M. le président. Mes chers collègues, un peu de silence, s'il vous plaît !
M. Henri de Raincourt. C'est à ce niveau-là que votre responsabilité politique est engagée, monsieur le Premier ministre, et nous attendons toujours votre réponse.
Hier, le Gouvernement ne se disait ni responsable ni coupable.
M. Alain Gournac. C'est exact !
M. Henri de Raincourt. Aujourd'hui, il se reconnaît responsable, mais pas coupable.
M. Jacques Mahéas. C'est un peu court, de Raincourt !
M. Henri de Raincourt. Demain, sera-t-il responsable et coupable ?
A affaire d'Etat, responsabilité d'Etat ; à crise politique, solution politique.
Quelles conséquences entendez-vous donc tirer, monsieur le Premier ministre, de ce grave dysfonctionnement de l'Etat et de ce manquement au droit ?
M. Michel Charasse. C'est l'hôpital qui se fout de la charité !
M. Henri de Raincourt. Quelles initiatives politiques allez-vous prendre pour sortir l'Etat par le haut de cette crise politique majeure ?
J'ajoute, monsieur le président, que ma question s'adresse bien au Premier ministre et que je suis extrêmement surpris - pour ne pas dire plus ! - de constater que celui-ci n'est pas présent parmi nous aujourd'hui. Y a-t-il une raison d'Etat qui explique cette absence ?
M. Alain Gournac. Très bien !
M. Henri de Raincourt. Si oui, peut-on nous la faire connaître ? Si non, je tiens à vous dire que, pour ma part, je considère que c'est un affront fait au Sénat (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR ainsi que sur certaines travées de l'Union centriste. - Exclamations sur les travées socialistes) et que, dans ces conditions, j'inviterai mes collègues à quitter la séance. (Vifs applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants et du RPR ainsi que sur certaines travées de l'Union centriste et du RDSE. - Protestations sur les travées socialistes.)
M. Claude Estier. Ce n'est pas sérieux !
M. le président. Qui répond à la question de M. de Raincourt ? Est-ce M. le minsitre chargé des relations avec le Parlement, pour nous donner la justification de l'absence de M. le Premier ministre - que nous avions invité - ou est-ce Mme le garde des sceaux ? (Mme le garde des sceaux demande la parole.)
La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, tout d'abord, vous voudrez bien reconnaître, s'agissant de l'absence aujourd'hui de M. le Premier ministre, que celui-ci a toujours été très assidu - ce qui n'a pas été toujours le cas avec ses prédécesseurs - aux séances de questions d'actualité au Sénat. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen. - Vives protestations sur les travées des Républicains et Indépendants et du RPR.)
M. Jean Chérioux. C'est faux !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Je crois même, monsieur le président, que vous lui en avez vous-même donné acte une fois ici.
Ensuite, sachez que M. le Premier ministre est retenu par des obligations (Lesquelles ? sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste)...
Un sénateur du RPR. Il est en prison ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. ... qui ne manifestent en aucune façon une désaffection vis-à-vis du Sénat, vous allez le voir : il a souhaité, en effet, recevoir en ce moment même le préfet Lacroix, nouvellement nommé en Corse,...
Un sénateur du RPR. Cela ne pouvait pas attendre une heure ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. ... précisément parce qu'il importe - et j'en viens maintenant à la première partie de votre question -...
De nombreux sénateurs des groupes des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste. Allez, on s'en va ! (La plupart des sénateurs des groupes des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste se lèvent et quittent l'hémicycle, sous les huées socialistes.)
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. ... que la politique du Gouvernement soit poursuivie en Corse.
Le Gouvernement ne peut pas être comptable des semi-vérités ou des entiers mensonges qui sont proférés, hélas ! par des agents de l'Etat, car le fonctionnement de l'Etat repose sur le principe de loyauté. Et il est vrai que, lorsque ce principe est méconnu, il y a une crise.
Cette crise, il faut la surmonter. Je vous ai indiqué tout à l'heure - et je le répète - comment nous voulons agir.
Nous avons pris les décisions qui s'imposaient, sur les personnes et sur le GPS. Nous avons la volonté de mettre en place immédiatement les remplaçants : c'est le cas du colonel Rémy, pour la légion de gendarmerie en Corse ; c'est le cas du préfet Lacroix, qui sera opérationnel très rapidement.
Enfin, nous poursuivons notre politique interministérielle en Corse pour faire en sorte que ce département ait droit non seulement à la sécurité, à la paix et à une justice égale à celle que connaît le continent, mais aussi à la reconnaissance de son identité culturelle et au développement économique. (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Jacques Larché. Responsable, mais pas coupable !

VOLET HUMANITAIRE DE LA CRISE DU KOSOVO

M. le président. La parole est à Mme Bergé-Lavigne.
Mme Maryse Bergé-Lavigne. Ma question s'adresse à M. le ministre de la défense.
Monsieur le ministre, le malheur des réfugiés du Kosovo a provoqué chez nos concitoyens un mouvement de solidarité et de générosité jamais atteint jusqu'à maintenant.
Les Français ont répondu massivement aux appels des organisations humanitaires, notamment de la Croix-Rouge.
Après les collectes de produits alimentaires, de produits sanitaires, ils ont envoyé des chèques pour financer l'acheminement des colis. Or les médias et les témoignages directs des transporteurs routiers font état d'un phénomène très préoccupant : une partie de cette aide - le chiffre de 60 % a été avancé - serait détournée par des mafias locales ; les passages des camions seraient soumis à des tracasseries administratives résolues très souvent par des « dons en nature. »
Monsieur le ministre, vous vous êtes rendu à plusieurs reprises, et encore récemment, en Albanie et en Macédoine, où vous avez rencontré les autorités locales, les organisations et les militaires français très engagés dans l'action humanitaire. Ce problème a-t-il été évoqué ?
Comment faire pour s'assurer que l'aide humanitaire parvient effectivement et en temps voulu aux personnes qui en ont le plus besoin ?
Des mesures sont-elles envisagées par les différents pays participant à l'aide aux réfugiés kosovars pour mettre fin à ce triste racket et créer des conditions satisfaisantes d'acheminement des colis ?
Monsieur le ministre, les Français, qui ont fait preuve de solidarité, de générosité, de tant d'humanité, ont besoin d'être informés. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Alain Richard, ministre de la défense. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, Charles Josselin est lui-même aujourd'hui en déplacement en Macédoine. C'est la raison pour laquelle je réponds à sa place, mais nous avons travaillé côte à côte, comme d'ailleurs les humanitaires et les militaires français ont travaillé au coude à coude sur le terrain.
M. le Premier ministre s'est rendu lui-même en Albanie et en Macédoine la semaine dernière. Sous son autorité, le Gouvernement a décidé la mise en oeuvre d'un plan humanitaire français pour les pays de la région, qui représente 225 millions de francs d'engagements, auxquels s'ajoutent des aides budgétaires qui ont par ailleurs été mises en oeuvre par Dominique Strauss-Kahn et des aides à la reconstruction à titre bilatéral, mais aussi dans le cadre de l'Union, pour un total de près de 1 milliard de francs.
Comme vous l'avez souligné, l'effort de solidarité des Français a, de son côté, été remarquable : sur plus de 10 000 tonnes d'aides recueillies auprès de nos concitoyens à partir du Numéro Vert, 2 500 tonnes sont déjà en train d'être déchargées à Durrës, en Albanie. Elles seront distribuées sur place par les organisations non gouvernementale en direction des familles qui accueillent de très nombreux réfugiés.
S'agissant des modalités d'acheminement et de distribution de l'aide en Albanie - puisque c'est principalement en Albanie que se posent ces problèmes de sécurité autour des convois - une cellule de coordination a été mise en place, à Tirana, autour d'un représentant du Premier ministre albanais, M. Islami. Ce dernier, nous tenons à le souligner, accomplit un travail remarquable. C'est, par ailleurs, un ami de notre pays.
Une concertation entre les différents acteurs de l'aide française est, en outre, organisée par nos partenaires de la cellule d'urgence du ministère des affaires étrangères, qui a montré, une fois de plus, son efficacité.
En ce qui concerne les difficultés d'acheminement que vous rapportez, je peux vous fournir quelques précisions.
L'aide humanitaire gouvernementale française et les colis familiaux collectés auprès des Français sont acheminés par avion et, depuis le début du mois de mai, par bateau. Le risque d'interception ou de menace le long des convois est donc limité. Quant au transport par camion, il n'est pas, à notre connaissance, soumis à des difficultés supérieures - je vois mon ami Bernard Kouchner opiner - à celles que l'on a pu connaître lors d'autres crises humanitaires.
Je rappelle que, si les pays de l'Alliance - la France étant particulièrement active - ont décidé de déployer une force d'appui humanitaire en Albanie, c'est parce qu'il existait un certain nombre de faiblesses dans les structures publiques des provinces de ce pays.
Je souhaite appeler l'attention de ceux qui organisent généreusement les convois sur le caractère indispensable des formalités nécessaires au moment du départ.
Et, pour répondre complètement à votre question sur les meilleures conditions d'acheminement, le soutien au renforcement des structures administratives et hospitalières albanaises ainsi que le respect d'un effort de coordination par le Haut Commissariat de l'ONU pour les réfugiés et par les ONG restent les meilleures garanties de l'efficacité de l'aide apportée.
Il faut rendre encore une fois hommage à l'ensemble des Français et aux personnels des services publics et des ONG qui se sont engagés ainsi qu'à l'extraordinaire volonté des autorités du peuple albanais, qui ont accueilli volontairement et fraternellement 400 000 Kosovars sur leur territoire. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)

CONCLUSIONS DE LA COMMISSION
D'ENQUÊTE SÉNATORIALE
SUR LES PERSONNELS DE L'ÉDUCATION NATIONALE

M. le président. La parole est à M. Bizet.
M. Jean-Louis Carrère. Tiens, ils reviennent ! (Quelques sénateurs des groupes des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste regagnent l'hémicycle.)
M. Jean Bizet. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
M. Jean-Louis Carrère. Il est là !
M. Jean Bizet. La commission d'enquête présidée par notre excellent collègue Adrien Gouteyron sur la gestion des personnels de l'éducation nationale a travaillé pendant six mois, auditionnant les spécialistes, se déplaçant dans diverses académies.
Comme vous le savez, monsieur le ministre, elle a rendu ses conclusions hier, et le constat est loin d'être satisfaisant.
Ainsi, 10 000 enseignants sont en surnombre, pour un coût de 3 milliards de francs par an ; le volant d'heures supplémentaires représente l'équivalent de 39 000 postes à temps plein ; la terminologie confuse des mises à disposition ne permet d'appréhender ni le nombre des personnels concernés ni leur affectation - sans doute très utile, mais, à l'évidence, ces personnes n'enseignent pas - ce qui signifie, en clair que plus de 40 000 titulaires sont en état d'apesanteur...
On constate que le budget de l'éducation nationale, de loin le plus important, a doublé en quinze ans, que le nombre de personnels, notamment dans le second degré, n'a cessé de croître.
On observe parallèlement que les effectifs des élèves ne cessent de diminuer.
M. Jacques Mahéas. Et alors ?
M. Jean Bizet. On note, enfin, qu'un bon quart des élèves n'a pas les compétences de base à l'entrée en sixième.
M. Jean-Louis Carrère. Vous le découvrez ? Avec Bayrou, vous n'avez jamais vu cela ?
M. Jean Bizet. Monsieur le ministre, il est clair que les enseignants, dont on connaît et reconnaît tant l'éthique que l'engagement près de nos enfants, ne doivent surtout pas se sentir mis en accusation au travers des conclusions de cette commission d'enquête.
Ce qu'il convient, en revanche, de dénoncer, et vous le savez, c'est le dysfonctionnement du système éducatif et le manque de souplesse dans la gestion des ressources humaines.
M. Jean-Louis Carrère. Au secours, la droite revient ! (Les sénateurs des groupes des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste regagnent peu à peu l'hémicycle.)
M. Claude Estier. C'est ridicule !
M. Jean Bizet. Vous connaissez sans doute déjà les propositions de la commission pour remédier à ces dysfonctionnement : renforcement du rôle du Parlement, transparence dans les mises à disposition, détachement et décharges, etc.
J'aurais souhaité savoir, monsieur le ministre, au-delà des incantations et des effets d'annonce, quelles étaient les suites que vous comptiez réserver à ces différentes propositions. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie. Monsieur le sénateur, hier, à dix-huit heures quatre, j'ai reçu ce rapport. (M. le ministre brandit un document.) Puis, à dix-huit heures douze, j'ai appris qu'une question me serait posée à ce sujet le lendemain au Sénat. La presse s'en était fait largement l'écho, deux conférences de presse avaient été tenues, mais le ministre n'était toujours pas saisi.
J'aurais pu être formaliste et m'abstenir de venir au Sénat dans ces conditions ! (Marques d'approbation sur les travées socialistes. - Protestations sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.) Mais j'ai estimé que cette demande exceptionnelle, qui m'était adressée alors que tous les médias étaient déjà informés, était un hommage rendu à ma capacité de travail. En conséquence, j'ai étudié ce document la nuit dernière...
M. Charles Ceccaldi-Raynaud. Bravo !
M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie. ... et je vais donc pouvoir vous répondre.
Tout d'abord, ce document, qui a fait l'objet d'un travail vraiment remarquable, ne m'a rien appris. (Rires sur les travées socialistes.) Il semble cependant qu'il ait appris à des membres de la commission qui étaient membres du cabinet ministériel de mon prédécesseur ce qui se passait à l'éducation nationale, car j'observe qu'un certain nombre de ces suggestions auraient pu être faites avantageusement avant ma prise de fonction. (M. Claude Estier applaudit.) En fait, j'ai, au contraire, trouvé dans ce document un appui à la politique que nous menons.
Un sénateur socialiste. C'est vrai !
M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie. J'en viens aux informations que je souhaite vous donner.
D'abord, la déconcentration est en marche. Sa première phase est achevée. Elle a été réalisée dans des conditions exceptionnellement satisfaisantes, en deux jours et demi, si bien que, le 18 juin prochain, la totalité des affectations seront effectuées, alors qu'elles l'étaient, auparavant, en septembre. Cela, ce sont des faits.
Je rends grâce et je rends hommage, d'ailleurs, aux personnels de l'administration de l'éducation nationale, qui, dans des circonstances difficiles, ont réussi à mener à bien cette tâche exceptionnelle. (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes.)
Par ailleurs, nous avons, au cours de ce mouvement de déconcentration, mis fin aux 40 000 postes de titulaires académiques pour enfin les affecter dans des établissements aux fins de remplacement.
A ce sujet, je veux vous communiquer des chiffres extrêmement précis. Quand je suis arrivé à l'éducation nationale, il y avait, selon un rapport de l'inspection générale, 6,8 classes sur cent sans enseignant. Aujourd'hui, nous en sommes à 2,4. Nous avons oeuvré pour que des élèves ne puissent pas se retrouver sans enseignant, et cela ne m'a pas valu un gain de popularité fantastique dans la profession !
Si toutes les recommandations que vous faites, et auxquelles nous donnons corps en partie, avaient été suivies par mon prédécesseur, ma tâche serait plus facile, messieurs. (Très bien ! sur les travées socialistes.)
Le plus cocasse, à mes yeux, est d'avoir pu lire dans la presse que le président de la commission des affaires culturelles du Sénat, qui demande avec juste raison depuis des années la déconcentration des services de l'Etat - c'est bien normal, dans la mesure où il est le lieu de représentation des collectivités locales -...
M. le président. Très bien !
M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie. ... estimait que la déconcentration que nous menions allait augmenter le pouvoir des syndicats, et se fondait, pour ce dire, sur le témoignage d'un leader syndical.
Je ne savais pas que le syndicat en question, qui manifeste et demande ma démission de manière répétée, le faisait parce qu'il avait peur d'un accroissement de son pouvoir. Je l'ai découvert à cette occasion. (Exclamations sur les travées du RPR.)
J'ai donc été extrêmement étonné de cette réaction émanant du Sénat.
M. Adrien Gouteyron. Nous en reparlerons, monsieur le ministre ! Vous caricaturez !
M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie. C'est la première fois que j'entends un commentaire de cette nature.
Tout cela pour dire - ce sera ma conclusion - qu'un rapport de qualité se suffit à lui-même.
M. Adrien Gouteyron. Vous ne l'avez pas lu !
M. Jean-Louis Carrère. Et parmi vous, qui l'a lu ?
M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie. Depuis hier soir, j'ai pris le temps de le lire, monsieur Gouteyron (Rires et exclamations sur les travées du RPR), bien que j'aie eu à le faire dans des conditions difficiles.
Monsieur Gouteyron, sans doute savez-vous, vous qui êtes un littéraire, que, fut un temps, la poésie avait besoin d'indications en marge. Cela s'appelait la glose. Les mauvais poèmes en avaient besoin. Quant aux bons poèmes, ils n'ont pas besoin de commentaires.
En conclusion, le rapport est intéressant et les commentaires que vous avez faits, qui n'ont rien à voir avec ce rapport, ne sont pas nécessaires. Je note toutefois avec satisfaction le soutien massif du Sénat aux réformes menées dans l'éducation nationale par ce gouvernement, et je l'en remercie. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. Merci, monsieur le ministre, d'apprécier les travaux du Sénat !

AVENIR DES RETRAITES

M. le président. La parole est à M. Domeizel.
M. Claude Domeizel. Ma question s'adresse à Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité.
L'avenir des retraites est l'une des premières préoccupations de l'ensemble des Français. Les réformes sont inéluctables. Elles concernent toutes les générations, en particulier les jeunes, dans la mesure où, bien évidemment, ces réformes ne remettent pas en cause les droits jusqu'ici acquis par ceux qui, d'ores et déjà, bénéficient d'une retraite.
Pour mener à bien ces futurs changements, M. le Premier ministre a tenu à disposer d'une analyse d'ensemble, aussi complète que précise, des différents régimes de retraite. Cette méthode a globalement reçu une appréciation très favorable.
Au terme de sa mission, M. Jean-Michel Charpin, chargé de cette analyse, vient de remettre un rapport qui témoigne de la qualité des travaux réalisés, et ce dans la plus grande transparence, ainsi que l'ont unanimement reconnu tous les acteurs de ce dossier.
Ce rapport, qui établit un diagnostic, a le mérite de montrer la complexité du sujet et de faire comprendre qu'il n'y a pas de solution miracle. Il ouvre des pistes de solutions laissées à l'appréciation du Gouvernement.
Comme vous le savez, les socialistes sont attachés au système par répartition. Tout doit donc être mis en oeuvre pour le consolider.
Je pense, en premier lieu, au fonds de réserve que le Gouvernement a créé l'an dernier. Concernant cette excellente initiative, que j'ai soutenue devant cette assemblée au nom du groupe socialiste, pourriez-vous nous donner toutes assurances que le fonds sera géré selon des modalités offrant toutes les garanties et qu'il associera, dans sa gestion, les représentants des salariés, des employeurs et les pouvoirs publics ?
En second lieu, s'agissant des fonds de pensions, je souhaite connaître les intentions du Gouvernement quant à l'abrogation de la loi Thomas, votée avant la dissolution de l'Assemblée nationale et qui porte atteinte au système par répartition. (Mais non ! sur les travées du RPR.)
Enfin, pouvez-vous nous donner des précisions sur le dispositif permanent de pilotage à long terme de la réforme des retraites préconisé dans le rapport Charpin et sur son articulation avec la commission des comptes de la sécurité sociale ? (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale. Monsieur le sénateur, M. Charpin, commissaire général au Plan, nous a effectivement remis récemment un rapport qui devait à la fois faire le point sur notre système de retraites, caractérisé en France par la répartition, et parler d'avenir.
Premièrement, la répartition a été un succès pour notre pays. La retraite issue de ce système était égalitaire et permettait de passer à la période postérieure à la vie active dans de bonnes conditions. Il faut donc poursuivre ce système.
Deuxièmement, selon le rapport, à partir de 2005-2040, nous serons confrontés à l'effet de ce que l'on a appelé le baby-boom, c'est-à-dire à l'arrivée à l'âge de la retraite des classes d'âge nées après la guerre, ce qui mettra notre système de retraite dans une situation critique.
Troisièmement, il s'agit de savoir comment nous allons nous en sortir, d'autant que s'ajoute à ce changement démographique l'allongement de la vie, à raison de trois mois chaque année.
Nous ne sommes donc pas au pied du mur, même s'il nous faut réagir. C'est important, car cela veut dire qu'il n'y a pas urgence, que c'est à partir de 2005 que le problème se posera. Nous avons le temps, d'ici là, de nous concerter. (Protestations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Alain Vasselle. Mais 2005, c'est demain !
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Pour vous, 2005, c'est peut-être une urgence pour nous, cela laisse le temps de la concertation, et nous n'attendrons d'ailleurs pas 2005.
M. Alain Vasselle. Il sera trop tard !
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. C'est un problème d'appréciation !
M. Jean-Louis Carrère. Ils le savent bien !
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Quant à la loi Thomas, qui privilégie l'apport personnel et la retraite par capitalisation, qui suppose une démarche individuelle, le Gouvernement s'est engagé à la supprimer. Nous le ferons, en fonction du calendrier parlementaire, qui, vous le savez, est très chargé, dans un avenir extrêmement proche. Cela a déjà été dit, et je le répète.
Enfin, j'énoncerai rapidement trois principes.
Les dispositifs d'épargne retraite ne sont pas condamnés. Dans certaines circonstances, ils seront indispensables.
C'est un cadre collectif qu'il nous faut. Dans ce cadre collectif, il ne faudra pas fragiliser les systèmes par répartition, et nous ne le ferons pas.
Enfin, dans tous les cas, les partenaires sociaux seront associés à la gestion des retraites, comme d'ailleurs à la gestion du fonds de réserve auquel vous avez fait allusion, monsieur le sénateur. (Applaudissements sur les travées socialistes.)

AVENIR DES RETRAITES

M. le président. La parole est à M. Marini. (Il est revenu ! sur les travées socialistes.)
M. Philippe Marini. Cette question s'adressait à M. le Premier ministre. (Exclamations ironiques sur les mêmes travées.) Elle est relative, comme la précédente, au rapport, récemment remis par le commissaire général au Plan, sur l'avenir des régimes de retraite.
Une préconisation de ce rapport a retenu l'attention de l'opinion publique et des médias : l'allongement de la durée des cotisations, portée, pour les salariés des secteurs public et privé, à 42 années et demie d'ici à 2019.
Par ailleurs, le rapport met en évidence l'explosion programmée du coût des retraites de la fonction publique. A l'horizon 2040, ce coût s'élèverait en effet, selon le Plan, à 450 milliards de francs, contre 170 milliards de francs actuellement.
Ma question est simple : que comptez-vous faire devant l'urgence de la situation ? Comment comptez-vous réformer, en premier lieu, les régimes de retraite des fonctionnaires (Exclamations sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen) , dont Mme Nicole Notat elle-même a reconnu récemment « qu'il fallait remettre en chantier leur réforme » ?
En particulier, comptez-vous allonger la durée de la vie active dans le privé, dans le public et pour les régimes spéciaux ?
Que comptez-vous faire du fonds de réserve instauré à l'automne dernier par la loi de financement de la sécurité sociale avec 2 petits milliards de francs, fonds de réserve que le conseil d'analyse économique auprès du Premier ministre considère comme devant englober progressivement un capital de plusieurs milliers de milliards de francs ?
Monsieur le secrétaire d'Etat, si vous représentez, en cet instant, M. le Premier ministre, pouvez-vous nous donner quelques assurances sur le mode de gestion de ce fonds de réserve ? Nous craignons en effet qu'il ne constitue un instrument fantastique de bureaucratisation de l'économie.
Allez-vous nous expliquer que l'on créerait ainsi le plus grand fonds de pension jamais imaginé, en transformant, de fait, notre système de retraite en un système de capitalisation, si l'on devait aboutir à ces quelques milliers de milliards de francs évoqués par le conseil d'analyse économique ? (Trop long ! sur les travées socialistes.)
Comment envisagez-vous de sortir de vos contradictions et quand ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale. Monsieur le sénateur, vous souhaitez donc que ce fonds de réserve, que vous avez critiqué parce qu'il n'était pas abondé, soit alimenté de manière beaucoup plus importante et que l'on s'en serve comme d'un fonds de capitalisation ! Vous ai-je bien compris ?
M. Philippe Marini. Pas tout à fait !
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Ah bon ! Sinon votre suggestion me serait apparue quelque peu contradictoire. Mais pardonnez-moi d'avoir mal compris !
Sur le fond, le rapport Charpin n'est pas chargé de déterminer la politique du Gouvernement.
MM. Claude Estier et Jean-Louis Carrère. Très bien !
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Les conclusions de ce rapport ne sont pas, si j'ose dire impératives. Elles donnent des indications, des directions de recherche. Ces directions seront suivies, mais dans la concertation.
Le diagnostic sur la démographie et sur la nécessité de trouver un système additionnel à notre système de retraite par répartition, tout le monde ici l'a fait. Nous sommes tous convaincus de cette nécessité.
Nous allons d'abord conforter la répartition.
L'étape du diagnostic étant achevée, celle de la concertation commence. Mme Aubry, avec MM. Zuccarelli, Strauss-Kahn et Gayssot, sont chargés de rencontrer les partenaires sociaux. Ils le feront dans les jours qui viennent.
Cette concertation, ne vous y trompez pas, sera longue. Les habitudes françaises sont enracinées, et il nous faudra pourtant tenir compte des réalités, à savoir la difficulté à prendre en compte dans notre pays l'égalité.
Bien entendu, si nous décidions, à l'instar d'autres pays, de mettre en place des retraites par capitalisation - chacun, à titre individuel cotise pour constituer sa propre retraite - ce serait excellent pour ceux qui peuvent le faire. Mais nous avons une conception différente : nous pensons que tous nos concitoyens doivent pouvoir bénéficier de ce complément de retraite, et, pour cela, il nous faut construire des retraites supplémentaires collectives.
C'est une novation, comme d'autres idées encore que la France a proposé à l'Europe, et je prends le pari que nous allons réussir. (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Paul Loridant. Très bien !
M. Philippe Marini. Donc, vous ne ferez rien et tout le monde paiera !

BAISSE DU CHÔMAGE AU MOIS D'AVRIL

M. le président. La parole est à M. Courteau.
M. Roland Courteau. Monsieur le secrétaire d'Etat, les derniers chiffres de l'emploi qui ont été publiés font état d'une nouvelle diminution du chômage avec une baisse de 37 900 demandeurs d'emploi au mois de mars.
Malgré une stagnation de la croissance économique ces derniers mois, le chômage continue donc de régresser. En effet, depuis le chiffre maximum atteint en juin 1997, le nombre de chômeurs a baissé de 260 000 dans notre pays. En un an, il a ainsi diminué de près de 5 % ; pour la seule année 1998, 350 000 emplois salariés ont été créés. Il s'agit bien de créations nettes d'emplois et non pas d'emplois qui se substituent à d'autres.
Il est tout aussi important de souligner que la part des embauches en contrats à durée indéterminée commence à augmenter, ce qui est le signe d'une consolidation de la reprise. Cela est également capital pour les conditions de vie des salariés et pour mettre fin à l'angoisse de la précarité.
On peut certes estimer que les choses ne vont pas encore assez vite, mais un tel résultat était inespéré voilà encore quelques mois, comme la presse économique ne manque pas d'ailleurs de le reconnaître.
Chacun peut ainsi constater que la politique du gouvernement de Lionel Jospin porte ses fruits en matière d'emploi, politique dans laquelle le ministère de l'emploi et de la solidarité prend une part déterminante avec notamment la création des emplois-jeunes, le soutien à la création d'entreprise, le programme TRACE - trajet d'accès à l'emploi - en direction des jeunes en difficulté et la signature des premiers accords de réduction du temps de travail.
Si ces mesures n'expliquent pas tout, elles contribuent à créer un nouveau climat de confiance pour les entreprises et les ménages, qui recommencent à consommer.
Ma question est donc la suivante : quelles sont les perspectives envisageables pour les prochains mois, notamment dans l'optique de la mise en oeuvre des mesures d'accès à l'emploi et des accords de réduction du temps de travail ? (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale. Monsieur le sénateur, vous avez cité des chiffres que je rappelle par plaisir : on compte 38 000 demandeurs d'emploi de moins par rapport au mois précédent, dont 14 000 demandeurs d'emploi de longue durée, et le nombre des offres d'emploi a encore augmenté, de 2,9% par rapport à février et de 5,3% sur un an.
On ne peut bien sûr s'en satisfaire, et personne ne songe à crier victoire à ce propos, mais nous sommes heureux que cet infléchissement de la courbe du chômage se poursuive depuis que celle-ci a culminé, en juin 1997, à une hauteur qui était difficilement supportable pour la population. On dénombre 250 000 chômeurs de moins depuis cette date. Ce n'est pas suffisant, il faut continuer, mais je vous remercie, monsieur le sénateur, d'avoir noté cette évolution positive.
Vous avez posé une question très précise : outre que notre politique, qui a été volontariste, ne s'est pas bornée à accompagner la croissance, nous avons été ceux qui ont créé la confiance nécessaire à la relance de la consommation des ménages en France. Ce n'est pas rien, car quand on ne consomme pas, on vend évidemment moins. Très directement, que pouvons-nous faire pour poursuivre dans cette direction ?
Tout d'abord, 180 000 emplois-jeunes ont été créés. Ce n'est pas terminé, et cette confiance témoignée aux emplois-jeunes, la façon dont ils seront pérennisés, de par la nécessité même de maintenir ces pistes innovantes, permettra, nous l'espérons, Martine Aubry et moi-même, d'accroître le nombre des jeunes qui accèdent à l'emploi.
En outre, voilà quelques jours, le cap de un million de salariés passés aux trente-cinq heures a été franchi. Que ne nous disait-on pas sur la difficulté du passage aux 35 heures ? Eh bien, elle ont induit 50 000 emplois supplémentaires, chiffre qu'il ne faut pas oublier quand on se félicite de la baisse du chômage.
Le mouvement est sans précédent ; aujourd'hui, c'est la moitié des salariés de notre pays qui négocient sur les 35 heures, négociation parfois difficile, on le voit en ce moment, parfois beaucoup plus facile, cela dépend des branches.
Surtout, et on le sait moins, depuis l'adoption de la loi contre les exclusions - vous avez fait allusion, monsieur le sénateur, aux programmes TRACE, aux emplois consolidés, etc. - 60 000 chômeurs de longue durée ont pu changer de conditions de vie grâce au volet emploi de cette loi.
Nous allons encore accentuer la lutte contre l'exclusion dans des domaines encore inexplorés. Nous n'allons pas inventer un nouveau procédé, mais nous allons essayer - c'est ma réponse, et elle est peut-être plus sage, moins audacieuse - de conforter les trois systèmes que nous avons mis en place. (Applaudissements sur les travées socialistes.)

AVENIR DE L'INDUSTRIE TEXTILE

M. le président. La parole est à M. Michel Mercier, qui pose une question importante, au nom du groupe de l'Union centriste.
M. Claude Estier. Parce que les autres ne l'étaient pas ?...
M. Jean-Louis Carrère. Nous, on n'est pas parti, on est resté pour l'écouter !
M. Michel Mercier. Je vous en remercie et vous avez sûrement eu raison !
Je souhaite interroger M. le secrétaire d'Etat à l'industrie sur la situation de l'industrie textile en France.
Dans notre pays, ce secteur industriel est l'un des premiers employeurs de main-d'oeuvre. Or cette industrie subit depuis quelques mois une nouvelle crise grave qui se traduit par des fermetures, des dépôts de bilan et de très nombreux licenciements. Je pense pourtant que cette industrie a un avenir : les chefs d'entreprises et les salariés, ces dernières années, ont consenti d'énormes efforts pour se battre contre leurs concurrents du monde entier.
Or, depuis quelques mois, le marché européen est à nouveau confronté à une concurrence très dure de produits manufacturés en provenance de l'Asie et de Turquie. Notre industrie ne peut pas y faire face dans la situation actuelle.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je voudrais vous interroger sur trois points.
Tout d'abord, ne pensez-vous pas que le moment est venu de demander à la Commission de Bruxelles de mettre en place les clauses de sauvegarde qui sont prévues lorsqu'un marché subit un déséquilibre évident et que des entreprises subissent un dommage constant ? En effet, le problème français est aussi celui des autres pays textiles de l'Europe.
Ensuite, ne pensez-vous pas que nous devons également agir pour rendre nos produits textiles plus compétitifs en avançant hardiment sur le chemin de la diminution des charges sociales puisque l'industrie textile emploie beaucoup de monde ?
Enfin, vous savez qu'est en instance devant la Commission de Bruxelles la question du remboursement des allégements de charges dont l'industrie textile française avait bénéficié voilà quelques années.
Il y a quelques jours, le gouvernement belge a conclu un accord avec la Commission de Bruxelles aux termes duquel le remboursement ne sera pas opéré mais sera transformé en un plan général d'allégement des charges sociales. N'est-ce pas là une voie à suivre pour éviter d'alourdir encore la trésorerie des entreprises textiles et de nature à sauvegarder tant des entreprises que des emplois ? (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR, des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Jacques Machet. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie. Monsieur le sénateur, il faut en effet se battre pour défendre notre industrie textile, et le Gouvernement ne ménage pas ses efforts pour alléger aujourd'hui les conséquences néfastes pour les entreprises du plan « Borotra » qui a été déclaré contraire aux règlements européens dès le mois d'avril 1997.
Au nom du Gouvernement, j'ai fait appel de cette décision auprès de la Cour de justice de Luxembourg en ce qui concerne le remboursement. Sans attendre cependant l'arrêt de la cour, je suis intervenu auprès du commissaire Van Miert, responsable des problèmes de concurrence.
Nous avons ainsi déjà obtenu que les entreprises de moins de cinquante salariés soient exonérées totalement de remboursement ; qu'une franchise de 650 000 francs soit opérée pour toutes les autres et que seule la fraction d'allégement « Borotra » excédant les allégements de plein droit sur les bas salaires soit calculée.
C'est un premier résultat. Ainsi, sur les 5 500 entreprises concernées, au plus 950 resteraient redevables de l'aide litigeuse. Pour les moins grandes d'entre elles, dont l'effectif est proche de 50 personnes, la somme en cause est minime puisqu'elle ne représente que quelques dizaines de millions de francs, ce qui est parfaitement supportable.
Nous poursuivons nos négociations avec la Commission européenne dans deux directions : d'une part, l'étalement dans le temps du remboursement des aides, et je voudrais obtenir un délai de plusieurs années pour que ces remboursements s'effectuent sans déséquilibrer la trésorerie et les résultats des entreprises ; d'autre part, l'application d'un taux d'intérêt le plus modeste possible, bataille que nous menons ensemble, d'ailleurs.
Mon objectif demeure que ces remboursements ne pénalisent pas l'emploi dans les entreprises concernées.
Vous proposez une deuxième piste de travail. Les industriels demandent en effet que les clauses de sauvegarde de certains accords internationaux puissent être mises en oeuvre pour se prémunir contre les effets de dévaluations monétaires, d'importations massives ou de conditions particulières de certains pays en voie de développement qui menacent certains segments de la production de l'habillement et du textile.
Comme vous le savez - nous devons comprendre cette démarche, et je la comprends très bien - l'initiative de la mise en jeu des clauses de sauvegarde revient au secteur économique lui-même. Le Gouvernement appréciera, le moment venu, si des démarches sont faites en ce sens par nos industriels devant la Commission, quelle attitude nous devons adopter pour aider à la résolution des très graves problèmes qui mettent en jeu plusieurs centaines d'emplois chaque mois sur notre territoire dans ces secteurs.
Enfin, vous avez appelé le Gouvernement - et il le fait déjà largement - à un certain nombre d'initiatives pour l'ensemble de notre industrie de main-d'oeuvre parmi laquelle on trouve, naturellement, les 285 000 emplois du textile, de l'habillement, des cuirs et peaux et de la chaussure.
Nous voulons en effet développer la créativité, favoriser l'investissement, favoriser le développement de la marque et de la qualité.
Enfin, hier, avec Mme Marylise Lebranchu, nous avons tenu une réunion qui a rassemblé les représentants de la grande distribution et les représentants du secteur textile-habillement afin que distribution et industrie se comprennent mieux et puissent - ce sera le cas, je pense, dès le mois de septembre - trouver les conditions conventionnelles ou contractuelles d'une meilleure régulation de leur relation.
Si j'ajoute à cela les nombreux appels à projets ou à propositions que le ministère de l'industrie a lancés en faveur de ce secteur, vous voyez que nous ne restons pas les bras croisés et l'arme au pied dans ce domaine. Nous nous battons pour une industrie qui compte pour l'emploi et pour le rayonnement industriel et économique de notre pays. (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur certaines travées de l'Union centriste.)
M. le président. Je n'ai pas, bien sûr, monsieur le secrétaire d'Etat, la prétention de vous donner un conseil sur ce sujet important, mais peut-être pourriez-vous faire revivre pour un temps déterminé ce que l'on a appelé l'accord multifibres, que vous connaissez bien, et qui était bénéfique à l'industrie textile.
M. Claude Estier. Débat vosgien !
M. le président. Cela dit, nous en avons terminé avec les questions d'actualité au Gouvernement.
Mes chers collègues, avant d'aborder la suite de l'ordre du jour, nous allons interrompre nos travaux pendant quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures quinze, est reprise à seize heures vingt, sous la présidence de M. Paul Girod.)

PRÉSIDENCE DE M. PAUL GIROD
vice-président

M. le président. La séance est reprise.

4

EPARGNE ET SÉCURITÉ FINANCIÈRE

Suite de la discussion d'un projet de loi
déclaré d'urgence

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi (n° 273, 1998-1999), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à l'épargne et à la sécurité financière.
Dans la discussion des articles, nous avons abordé l'examen de l'article 21, dont je rappelle les termes :

TITRE II

DISPOSITIONS TRANSITOIRES

Article 21 (suite)



M. le président.
« Art. 21. - Les caisses d'épargne et de prévoyance existant à la date de publication de la présente loi sont transformées en sociétés coopératives dans les conditions ci-après :
« I. - Les caisses d'épargne et de prévoyance disposent au plus tard quatre mois à compter de la publication de la présente loi d'un capital initial composé de parts sociales au sens de l'article 11 de la 1oi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 précitée ainsi que, en tant que de besoin, de certificats coopératifs d'investissement au sens du titre II ter de la même loi.
« Le montant total du capital initial des caisses d'épargne et de prévoyance est égal à la somme de la dotation statutaire de chacune des caisses, telle que cette somme figure dans les comptes consolidés du groupe des caisses d'épargne arrêtés au 31 décembre 1997. Pour les exercices clos jusqu'au 1er janvier 2004, les certificats coopératifs d'investissement entrant dans la composition du capital initial des caisses d'épargne et de prévoyance ne peuvent pas représenter plus de 25 % de ce capital. La Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance est chargée de veiller au respect, à tout moment, de cette proportion. L'article 19 decies de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 précitée ne s'applique pas à ces certificats coopératifs d'investissement.
« II. - La Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance fixe le capital initial de chaque caisse d'épargne et de prévoyance au plus tard deux mois après la publication de la présente loi, après avis du conseil d'orientation et de surveillance de la caisse d'épargne et de prévoyance, en tenant compte notamment du montant de la dotation statutaire telle qu'il figure dans le bilan de la caisse d'épargne et de prévoyance arrêté au 31 décembre 1997, du montant total des fonds propres et du montant total du bilan de la caisse d'épargne et de prévoyance au 31 décembre 1997. Ce capital initial est notifié au ministre chargé de l'économie. A défaut, ce capital est fixé, au plus tard quatre mois à compter de la publication de la présente loi, par décret en Conseil d'Etat, en fonction des mêmes critères.
« III. - Le conseil d'orientation et de surveillance de chaque caisse d'épargne et de prévoyance fixe le montant nominal des parts sociales de cette caisse dans les limites définies par la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance.
« IV. - Au plus tard cinq mois à compter de la publication de la présente loi, le conseil d'orientation et de surveillance de chaque caisse d'épargne et de prévoyance fixe le nombre des parts sociales de cette caisse à souscrire par chacun des groupements locaux d'épargne de sa circonscription territoriale, en fonction notamment de l'importance de la population comprise dans le territoire qu'ils couvrent. Chaque groupement local d'épargne souscrit les parts sociales lui revenant grâce à un prêt sans intérêt, d'un montant égal à la valeur totale de ces parts, que lui consent la caisse d'épargne et de prévoyance. Ce prêt est amorti au fur et à mesure de la souscription des parts sociales qui constituent le capital du groupement local d'épargne par les sociétaires.
« IV bis. - Jusqu'au 31 décembre 2003, les collectivités territoriales sont autorisées à détenir ensemble 10 % au maximum de la valeur totale des parts sociales revenant à chaque groupement local d'épargne en application du IV du présent article.
« V. - Jusqu'au 31 décembre 2003, les parts sociales acquises par les groupements locaux d'épargne ne sont cessibles qu'avec l'accord du directoire de la caisse d'épargne et de prévoyance. La propriété de ces parts sociales ne peut être transférée qu'à d'autres groupements locaux d'épargne exerçant dans le même ressort territorial, et moyennant le transfert, pour un montant égal, d'une fraction du prêt octroyé par la caisse d'épargne et de prévoyance au groupement local d'épargne qui transfère.
« VI. - Au 31 décembre 2003, chaque caisse d'épargne et de prévoyance rembourse à chaque groupement local d'épargne affilié les parts sociales représentatives de son capital détenues par celui-ci, à hauteur du montant restant dû par ledit groupement local d'épargne sur le prêt que lui a consenti la caisse d'épargne et de prévoyance et du montant des parts sociales détenues ensemble par les collectivités territoriales au-delà de la limite de 10 % du capital du groupement local d'épargne au 31 décembre 2003. Le montant du remboursement des parts est utilisé par les groupements locaux d'épargne pour l'amortissement intégral de la fraction restant due du prêt de la caisse d'épargne et de prévoyance et pour le remboursement aux collectivités territoriales des parts sociales qu'elles détiennent ensemble au-delà de la limite de 10 % du capital du groupement local d'épargne. A cette même date, il est procédé à l'annulation des certificats coopératifs d'investissement non souscrits.
« Le capital de la caisse d'épargne et de prévoyance est réduit à concurrence du montant total des certificats coopératifs d'investissement non souscrits et des parts sociales remboursées aux groupements locaux d'épargne affiliés à la caisse d'épargne et de prévoyance. Ces opérations n'ont aucun effet sur le résultat des groupements locaux d'épargne ni sur celui de la caisse d'épargne et de prévoyance et ne sont pas soumises à la présomption prévue à la deuxième phrase du 1° de l'article 112 du code général des impôts.
« VII. - Les dispositions de la présente loi n'emportent pas, pour les caisses d'épargne et de prévoyance, changement dans la personne morale.
« Les caisses d'épargne et de prévoyance qui, au 1er janvier 2000, sont agréées par le Comité des établissements de crédit et des entreprises d'investissement sont réputées être agréées en tant que banques coopératives. »
Au sein de cet article, nous en sommes parvenus à l'amendement n° 136.
Par amendement n° 136, MM. Angels, Carrère, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, dans le III de l'article 21, après les mots : « dans les limites définies », d'insérer les mots : « , après avis du ministre chargé de l'économie, ».
La parole est à M. Angels.
M. Bernard Angels. Cet amendement vise à répondre à une inquiétude.
Si chaque caisse décide du montant nominal des parts, cela risque d'entraîner de profondes différences d'une caisse à l'autre ; cela présente surtout le danger d'un écrémage de clientèle par certaines caisses du fait d'une fixation haute du montant des parts.
Le projet de loi prévoit d'ailleurs que la Caisse nationale d'épargne et de prévoyance fixe des limites. Nous pensons toutefois qu'il convient de prévoir un dispositif encadrant plus fortement encore ce montant.
La meilleure solution serait que ce montant soit décidé après avis de la Fédération nationale. Mais celle-ci ne sera pas encore mise en place, me semble-t-il, à la date de décision des caisses.
Au vu de l'importance de cette décision, il nous semble opportun de prévoir l'avis du ministre de l'économie et des finances.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Cet amendement a pour objet de soumettre la fixation du montant nominal des parts sociales à un avis du ministre chargé de l'économie.
Le texte que nous avons voté ce matin donne au ministre chargé de l'économie le pouvoir, dans certaines conditions, et sous certaines limites dont nous avons longuement discuté, de fixer le montant du capital à mettre sur le marché.
Il s'agit en l'occurrence d'une mutualisation, et notre collègue, M. Angels, suggère que le ministre donne son avis sur le montant nominal des parts.
J'ai bien noté qu'il ne s'agit que d'un avis et que la décision sera prise par la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance.
La commission a donc émis un avis favorable sur l'amendement n° 136. Mais elle ne voudrait pas être plus royaliste que le roi et, s'agissant de compétences dévolues à M. le ministre, elle est naturellement intéressée par son point de vue.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je suis favorable à l'amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 136, accepté par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 19, M. Marini, au nom de la commission, propose de remplacer les paragraphes IV, IV bis , V et VI de l'article 21 par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - Les caisses d'épargne et de prévoyance disposent d'un délai de huit ans, à compter de la publication de la présente loi, pour placer les parts sociales représentatives de leur capital initial auprès des sociétaires. Dans des conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'économie, des bons de souscription de certificats coopératifs d'investissement peuvent être attachés à ces parts sociales. A l'issue du délai de huit ans, le capital initial de chaque caisse d'épargne et de prévoyance est réduit à concurrence du montant des parts sociales qui n'ont pas été souscrites.
« Au cours de la période mentionnée à l'alinéa précédent, les parts sociales des caisses d'épargne et de prévoyance qui n'ont pas été souscrites ne confèrent aucun droit. Elles entrent toutefois dans la composition des fonds propres pris en compte pour déterminer les ratios prudentiels.
« Les sociétaires réunis en assemblée générale extraordinaire peuvent décider l'émission de certificats coopératifs d'investissement. Par dérogation aux dispositions de l'article 19 sexies de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 précitée, l'émission des certificats coopératifs d'investissement s'effectue par augmentation du capital correspondant au nombre de parts sociales souscrites à la clôture de l'exercice précédant cette émission. Les sociétaires détenteurs de bons de souscription de certificats coopératifs d'investissement peuvent alors exercer leur bon. »
Cet amendement est assorti de quatre sous-amendements présentés par M. Bourdin et les membres du groupe des Républicains et Indépendants.
Le sous-amendement n° 121 tend à supprimer la deuxième phrase du premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 19.
Le sous-amendement n° 122 vise à rédiger comme suit la dernière phrase du premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 19 : « A l'issue du délai de huit ans, les parts sociales qui n'ont pas été souscrites sont annulées. »
Le sous-amendement n° 123 a pour objet de supprimer le dernier alinéa du texte présenté par l'amendement n° 19.
Enfin, le sous-amendement n° 199 est ainsi rédigé :
A. - Compléter in fine le texte présenté par l'amendement n° 19 par l'alinéa suivant :
« Les opérations rendues nécessaires par l'application du présent paragraphe n'ont aucun effet sur le résultat de la caisse d'épargne et de prévoyance et ne sont pas soumises à la présomption prévue à la deuxième phrase de l'article 112-1° du code général des impôts. »
B. - Pour compenser les pertes de recettes éventuelles résultant des dispositions du paragraphe A ci-dessus, compléter le texte de cet amendement par un paragraphe ainsi rédigé :
« Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées, à due concurrence, par une augmentation des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Les trois amendements suivants sont présentés par MM. Angels, Carrère, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés.
L'amendement n° 137 tend, dans le paragraphe IV bis de l'article 21, à remplacer le millésime « 2003 » par le millésime « 2004 ».
L'amendement n° 138 vise, dans le paragraphe V de ce même article, à remplacer le millésime « 2003 » par le millésime « 2004 ».
Enfin, l'amendement n° 139 a pour objet, dans le paragraphe VI de cet article de remplacer le millésime « 2003 » par le millésime « 2004 ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 19.
M. Philippe Marini, rapporteur. C'est un amendement important car il explicite les conditions du placement des parts sociales représentatives du capital des caisses d'épargne.
Après nous être interrogés ce matin sur le montant à placer, nous abordons maintenant un autre point, celui du délai du placement.
A titre conservatoire, nous souhaitons que le délai de huit ans soit fixé au lieu et place du délai de quatre ans.
Dans l'intervalle, le montant du capital correspondant aux parts non souscrites sera porté par les caisses d'épargne et entrera en ligne de compte pour la détermination des ratios prudentiels.
Les parts sociales non souscrites ne confèrent toutefois aucun droit. Et, à l'issue de la période de huit ans, terme des opérations de placement, les parts sociales non souscrites auront vocation à être annulées, le capital initial étant donc réduit à due concurrence.
De plus, le présent amendement prévoit la faculté pour les caisses d'épargne d'émettre des certificats coopératifs d'investissement pendant la période de souscription de leur capital. Les caisses d'épargne qui souhaitent recourir à cette faculté pourront d'ailleurs attacher des bons de souscription de certificats coopératifs d'investissement à leurs parts sociales.
Nous avons ajouté cet élément, monsieur le ministre, parce que nous avons confiance dans ce procédé qui nous paraît efficace pour faciliter la diffusion des certificats coopératifs d'investissement et, donc, pour faciliter le recours des caisses d'épargne à des augmentations de capital sur le marché.
Des bons de souscription attachés aux parts sociales, des bons de souscription qui peuvent donc être accordés à la clientèle à des conditions symboliques, cela nous semble techniquement tout à fait possible et de nature à mieux organiser l'accroissement des fonds propres des caisses en fonction de leurs besoins ultérieurs.
Monsieur le ministre, je souhaite saisir l'occasion de la discussion de cet amendement pour réaffirmer que les caisses d'épargne - j'y ai déjà fait allusion à un autre stade de la discussion des articles - pourront parfaitement émettre des certificats coopératifs d'investissement tout en étant des sociétés coopératives à capital variable.
Je terminerai cette présentation en revenant d'un mot sur le débat que nous avons eu ce matin. Monsieur le ministre, le présent projet de loi s'analyse, me semble-t-il - au moins sur le plan économique - comme une opération simultanée, en un instant de raison en quelque sorte, de nationalisation et de mutualisation, de nationalisation et de privatisation, car il faut bien décider - c'est ce que fait la loi - à qui appartiennent les fonds propres des caisses d'épargne.
On s'interroge sur ce point depuis le duc de La Rochefoucauld et depuis Benjamin Delessert, sans apporter de réponse juridiquement précise. On pouvait donc prétendre que les fonds propres étaient en autocontrôle et que les caisses s'autopossédaient, et cette théorie a été longtemps défendue.
Le Gouvernement n'a pas choisi cette voie, qui n'aurait pas été complètement impossible, et il a proposé le dispositif que nous examinons.
De ce fait, dans le même instant, on décide que ces fonds propres appartiennent à la nation et qu'ils ont vocation à être divisés en parts sociales et à être diffusés dans le public dans le cadre d'établissements de crédit de nature coopérative.
M. le président. La parole est à M. Bourdin, pour défendre les sous-amendements n°s 121, 122, 123 et 199.
M. Joël Bourdin. L'amendement n° 19 que vient de présenter M. le rapporteur est, bien évidemment, un amendement de qualité, mais je propose d'essayer de l'améliorer encore.
Avec le sous-amendement n° 121, je suggère de supprimer la référence aux bons de souscription des parts sociales.
Je ne suis pas contre les bons de souscription ; c'est un produit financier de grande qualité et, que ce soit sur le plan théorique ou sur le plan pratique, ces bons rendent bien des services. Toutefois, ils n'ont d'utilité que s'ils sont cotés sur un marché.
Il existe certes un marché des bons de souscription d'actions. Mais je ne vois pas l'intérêt de prévoir des bons de souscription pour les parts sociales, car ce genre d'opération me paraît relativement complexe pour un système coopératif.
L'émission de bons de souscription signifie l'engagement, bien sûr, de créer à terme des certificats coopératifs d'investissement.
En outre, comment ces bons de souscription pourraient-ils être valorisés ? Or l'intérêt d'un bon de souscription est de permettre à celui qui l'a acheté de bénéficier de son pari avec un marché qui le sous-tend. Là, je vois mal comment pourrait fonctionner un marché de bons de souscription.
Le sous-amendement n° 122 prévoit qu'à l'issue du délai de huit ans les parts sociales qui n'ont pas été souscrites sont annulées alors que l'amendement de M. le rapporteur fait état d'une réduction de capital, ce qui n'est pas du tout la même chose. Il dispose que les parts qui ne sont pas souscrites ne constitueront pas le capital et n'entraîneront donc pas de complications administratives et fiscales. Je souhaiterais que cette précision fût inscrite dans l'amendement de M. le rapporteur.
Le sous-amendement n° 123 consiste, quant à lui, à supprimer le dernier alinéa du texte proposé par M. le rapporteur. En effet, dans la mesure où le projet de loi pose le principe de l'existence d'un capital initial, c'est le droit commun, défini par la loi du 10 septembre 1947, qui doit s'appliquer, en particulier son article 19 sexies.
Le sous-amendement n° 199, enfin, tire la conséquence d'un sous-amendement précédent.
Dans l'éventualité d'une annulation des parts non souscrites et dans la mesure où le mode opératoire n'a pas à être développé, il convient, du point de vue fiscal, de reprendre la terminologie de l'article 28. En effet, l'article 112 du code général des impôts prévoit une taxation en cas de réduction de capital qu'il « assimile » à une distribution de dividende.
M. le président. La parole est à M. Angels, pour présenter les amendements n°s 137, 138 et 139.
M. Bernard Angels. Comme l'a dit précédemment mon collègue Jean-Louis Carrère, il nous semble nécessaire d'allonger légèrement la durée de placement des parts sociales en la portant de quatre à cinq ans afin d'augmenter les chances de réussite de toutes les caisses et que l'opération de placement soit un total succès.
En effet, il faut prendre en compte la capacité de placement des parts par les caisses d'épargne. Or la capacité des caisses et leur dynamisme commercial sur ce produit spécifique sont difficiles à évaluer. Par souci de prudence, et pour augmenter les chances de réussite de l'opération, nous proposons un allongement d'une année de la durée de placement.
Il ne faut pas l'allonger trop afin de ne pas accroître la période d'incertitude qui est inhérente à la mise en place des nouveaux statuts et qui ne pourrait que nuire au développement dudit réseau. A cet égard, la proposition de la commission de porter cette durée de quatre à huit ans nous paraît dangereuse.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les sous-amendements n°s 121, 122, 123 et 199, ainsi que sur les amendements n°s 137, 138 et 139 ?
M. Philippe Marini, rapporteur. La commission est favorable au sous-amendement n° 122, qui apporte une précision utile. Il est en effet nécessaire de préciser que les parts sociales non souscrites sont annulées à l'issue du délai de huit ans, ce que nous avions omis de prévoir dans l'amendement de la commission.
La commission est également favorable au sous-amendement n° 199, qui porte sur la neutralisation de la réduction éventuelle du capital des caisses d'épargne au regard de l'impôt. Cette précision est également utile. En effet, M. Bourdin répare un oubli. Il arrive même à la commission et à ses services de ne pas maîtriser la totalité d'un sujet aussi technique !
Il est donc nécessaire de préciser que les modalités de la mutualisation prévues par l'article 21 n'emportent pas de conséquences fiscales pour les caisses d'épargne, faute de quoi une éventuelle réduction de leur capital induite par une souscription insuffisante des parts sociales pourrait être assimilée à une distribution de dividendes et taxée en tant que telle.
Je souhaite que le sous-amendement n° 121 soit retiré. En effet, la commission tient au dispositif des bons de souscription, car cet instrument supplémentaire vise à favoriser le succès du placement des certificats coopératifs d'investissement. Ces bons de souscription constituent un levier permettant de mieux diffuser le capital et de préparer les augmentations de capital à venir.
Les modalités seront fixées - cela résulte de l'amendement n° 19 - par arrêté du ministre. Dans le texte de la loi, nous ne pouvons que définir les principes, donc l'existence de ces bons de souscription, qui peuvent être attachés aux parts sociales, ce qui n'est pas non plus une obligation.
Ces bons sont donc, au sein d'une palette, un instrument supplémentaire dont on aura peut-être besoin. Aussi avons-nous estimé que ce dispositif pouvait être prévu, d'autant qu'il ne peut être défavorable aux caisses, bien au contraire, puisqu'il a été conçu dans une optique tout à fait favorable au développement de celles-ci.
Je souhaite que soit également retiré le sous-amendement n° 123, qui vise à supprimer le troisième alinéa de l'amendement n° 19.
M. Bourdin a certainement raison - ce n'est pas moi qui contesterai sa position - de vouloir aligner le statut des caisses d'épargne sur le droit commun de la coopération, qui prévoit déjà la faculté, pour les coopératives, d'émettre des certificats coopératifs d'investissement. Il n'est donc pas, a priori, utile de rappeler à cet endroit de la loi ce principe général, qui s'applique en tout état de cause.
Toutefois, ce troisième alinéa est nécessaire pour préciser les modalités selon lesquelles les caisses d'épargne qui le souhaiteront pourront émettre des certificats avant d'avoir placé la totalité de leurs parts sociales. C'est bien de cette situation qu'il s'agit.
Pendant la période de placement des parts sociales, dont la durée - quatre ans, huit ans ou cinq ans ? - sera arrêtée au cours de la négociation, il est possible que les caisses d'épargne aient besoin d'augmenter leur capital pour alimenter leur développement. Il s'agit bien de régir les dispositions qui vont s'appliquer à ces émissions de certificats coopératifs d'investissement. Il s'agit non pas d'alimenter le fonds de garantie des retraites, mais de procurer des fonds propres supplémentaires pour les caisses elles-mêmes.
Or l'article 19 sexies de la loi de 1947 sur la coopération prévoit que l'émission de certificats coopératifs d'investissement s'effectue par augmentation du capital atteint à la clôture de l'exercice précédant cette émission et que les CCI ne peuvent représenter plus de la moitié de ce capital.
Si cette disposition devait s'appliquer, les caisses d'épargne qui n'auraient pas encore placé la totalité de leur capital initial dans le public pourraient en réalité émettre un montant de CCI plus important en pourcentage de leur capital effectivement souscrit que ce que le législateur a souhaité.
Aussi est-ce en vertu de cette considération purement technique et de l'incohérence à laquelle nous conduirait l'application de l'article 19 sexies de la loi de 1947 sur la coopération que le troisième alinéa de notre amendement n° 19 a été rédigé.
J'espère que vous avez tous saisi les subtilités de cette démonstration. (Rires et exclamations sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Jean-Louis Carrère. Vous êtes d'une clarté !
M. Philippe Marini, rapporteur. J'ai essayé d'être aussi clair que possible, mais, malheureusement, cette matière est assez touffue. Souhaitez-vous que je recommence ?
M. Michel Sergent. Oui ! nous n'avons pas bien compris.
M. Bernard Angels. Surtout la fin !
M. Jean-Louis Carrère. Non, depuis le début ! (Sourires.)
M. le président. Mes chers collègues, puis-je vous rappeler à un peu de sérieux ?
M. Philippe Marini, rapporteur. J'espère avoir convaincu M. Bourdin de la nécessité de conserver le troisième alinéa de notre amendement n° 19. J'espère l'avoir convaincu aussi de bien vouloir retirer son sous-amendement n° 123 à la suite de ces explications.
Monsieur le ministre, nous n'y pouvons rien si ce sujet est tellement complexe !
M. Jean-Louis Carrère. On comprend pourquoi vous n'avez pas fait la réforme !
M. Philippe Marini, rapporteur. Je suggère à nos collègues du groupe socialiste de bien vouloir retirer l'amendement n° 137 visant à allonger la durée de placement des parts sociales à cinq ans. Ce sujet allant encore être discuté, mieux vaut peut-être que le Sénat parte d'une position quelque peu maximaliste, celle d'une durée de huit ans, pour voir où les curseurs s'arrêteront, au sein de la commission mixte paritaire. Le voeu que nous formulons est de parvenir à un accord. Mais n'allons pas trop vite ni trop loin pour laisser le temps à la concertation d'être fructueuse.
C'est la seule raison pour laquelle je vous demande, à ce stade, de bien vouloir vous rallier à l'amendement n° 19 de la commission, et cela vaut avis défavorable sur les amendements n°s 137, 138 et 139.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 19, les sous-amendements n°s 121, 122, 123 et 199, ainsi que sur les amendements n°s 137, 138 et 139 ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le président, je ne vais pas avoir à préciser les numéros des amendements et des sous-amendements, car le Gouvernement les rejette tous en bloc.
M. Philippe Marini, rapporteur. Oh !
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je ne reviendrai pas sur le refus des groupements locaux d'épargne ; nous en avons déjà parlé pendant des heures ! C'est votre point de vue, mais ce n'est pas le nôtre. Vos amendements le reprenant, je ne peux donc pas les accepter.
Ensuite, vous nous proposez de rallonger à huit ans la durée de placement des parts sociales. Honnêtement, ce n'est pas raisonnable ! Vous-même, à l'instant, avez d'ailleurs qualifié votre position de maximaliste, ce qui signifie donc qu'elle n'est pas raisonnable. Nous n'allons pas commencer à placer aujourd'hui des certificats coopératifs pour finir dans huit ans. Rendez-vous compte ! Nous n'allons pas mettre autant de temps à réaliser la réforme que vous en avez mis pour l'étudier sans la faire. Nous allons essayer d'avancer un peu plus vite ! Dans ces conditions, une durée de placement de huit ans ne me paraît pas acceptable.
Faut-il aller au-delà de quatre ans ? Faut-il retenir cinq ans ? C'est un point qui peut se discuter et qui méritera que l'on y revienne. Le Gouvernement est favorable à une durée de quatre ans, mais les arguments qui pèsent pour allonger un peu plus cette durée peuvent être examinés. Cela dit, je ne m'étendrai pas sur ce point, car le Sénat va sûrement adopter votre amendement n° 19 de telle sorte que l'amendement n° 137, qui vise à instaurer un délai de cinq ans, deviendra sans objet.
Sur le fonds,...
M. Philippe Marini, rapporteur. Vous y êtes plutôt favorable !
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je n'ai pas dit que j'y étais plutôt favorable, monsieur le rapporteur ! J'ai dit que cela méritait une discussion et que, entre quatre ans et cinq ans, je ne concluais pas. Je reste a priori favorable au délai de quatre ans, qui figure dans le texte du Gouvernement, mais je conçois que l'on puisse discuter, alors qu'un délai de huit ans ne peut certainement pas être accepté !
Quant à la réforme que vous nous proposez sur les bons de souscription, sa limpidité est apparue à tout le monde et nous avons tous vu que les souscripteurs eux-mêmes allaient constater une très grande simplification de la réforme que nous suggérons.
A plusieurs reprises, vous avez qualifié cette réforme « d'usine à gaz », qualificatif sans doute péjoratif dans votre bouche. Je ne me permettrai donc pas de reprendre un argument de cette nature, qui ferait de la peine aux dizaines de milliers de salariés de Gaz de France. Mais il est clair que vous ne simplifiez pas ce que nous voulons faire en introduisant les éléments sur lesquels vous venez de rapporter.
Je n'irai pas jusqu'à dire qu'ils n'ont pas de sens. Ils en ont un. Mais c'est tellement compliqué ! Cela ouvre tellement de voies possibles selon les situations ! Cela rend tellement opaque la réforme que nous voulons faire ! Cela engage tellement, à terme, par les bons de souscription, l'éventualité d'émissions de nouveaux certificats coopératifs d'investissement alors que, pour le moment, personne n'a parlé de cette idée ! Enfin, cet amendement, qui se veut technique, remet tellement en cause la logique même de la réforme ! Honnêtement, il n'est nullement nécessaire d'en rajouter dans un texte dont chacun a déjà souligné la complexité.
En conclusion, n'approuvant pas la suppression des GLE, n'étant pas favorable au passage à huit ans et ne souhaitant pas compliquer le texte, et donc « donner de l'embonpoint à la loi », comme l'excellent président de la commission, M. Lambert, le rappelle souvent, il vaut mieux que le Gouvernement dise tout de go qu'il préfère s'opposer à tous les amendements et sous-amendements en question.
M. le président. Monsieur Bourdin, acceptez-vous de retirer les sous-amendements n°s 121 et 123, comme vous l'a suggéré M. le rapporteur ?
M. Joël Bourdin. Je suis sensible, vous le savez, monsieur le président, à ces demandes de retrait. Je retire donc ces deux sous-amendements, mais j'indique tout de suite que je ne suis pas convaincu.
Je connais bien le système des bons de souscription ; j'ai l'occasion de l'enseigner par ailleurs. Il implique qu'il existe un véritable marché des bons de souscription avec des informations ; la cotation du bon de souscription est en soi une information qui est donnée aux épargnants. Les bons de souscription ne seront pas cotés en bourse, c'est évident. Ce que je crains, c'est que nous n'instituions un marché mal informé qui ne soit pas efficient. Or un marché qui n'est pas efficient, c'est un marché injuste.
Je retire ces sous-amendements, parce que ce n'est qu'une simple possibilité qui est inscrite dans l'amendement, mais - je le répète - en ce qui me concerne, j'hésiterais beaucoup à créer des bons de souscription dans ce cadre-là, pour une raison très simple, c'est qu'on ne peut pas les concevoir en dehors d'un marché efficient.
M. le président. Les sous-amendements n°s 121 et 123 sont retirés.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 122, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 199, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, l'amendement n° 19, repoussé par le Gouvernement.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Le groupe communiste républicain et citoyen vote contre.
M. Jean-Louis Carrère. Le groupe socialiste également.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, les amendements n°s 137, 138 et 139 n'ont plus d'objet.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 21, modifié.

(L'article 21 est adopté.)

Article 22



M. le président.
« Art. 22. - Le fonds commun de réserve et de garantie du réseau et le fonds de solidarité et de modernisation des caisses d'épargne sont supprimés à la date de création de la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance. Les obligations couvertes par ces fonds sont intégralement transférées à la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance. Les sommes inscrites au bilan du fonds commun de réserve et de garantie et du fonds de solidarité et de modernisation sont dévolues, selon des modalités fixées par la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance, aux caisses d'épargne et de prévoyance, qui en affectent une partie à une augmentation de capital de la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance. »
Sur cet article, je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 211, M. Badré et les membres du groupe de l'Union centriste proposent, après les mots : « sont supprimés », de rédiger comme suit la fin de la première phrase de cet article : « dans des délais définis par la Caisse nationale des caisses ».
Par amendement n° 216, M. Bourdin et les membres du groupe des Républicains et Indépendants proposent, dans la première phrase de cet article, de remplacer les mots : « à la date de création de » par les mots : « dans des délais définis par ».
La parole est à M. Badré, pour défendre l'amendement n° 211.
M. Denis Badré. Mes amendements n°s 211 et 230, qui sont complémentaires, sont inspirés par le souci de voir l'article 22 retenir quatre principes.
Il ne faut pas enfermer dans des délais inutilement stricts le déroulement des opérations.
Le transfert des obligations des fonds centraux implique nécessairement le transfert des droits qui permettront de les honorer.
Il ne faut pas préjuger les modalités et l'ordre de déroulement des opérations de dévolution des fonds centraux.
Il convient de préciser le mode de constitution du nouveau fonds commun de garantie et de solidarité du réseau.
Dans ce contexte, l'amendement n° 211 vise à donner à la Caisse nationale le temps nécessaire pour fixer les modalités de dévolution des sommes inscrites au bilan du fonds commun de réserve et de garantie et du fonds de solidarité et de modernisation.
M. le président. La parole est à M. Bourdin, pour présenter l'amendement n° 213.
M. Joël Bourdin. Je n'ai rien à ajouter à l'argumentation très bien exposée par notre collègue M. Badré.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 211 et 216 ?
M. Philippe Marini, rapporteur. Ces amendements concernent la date de suppression des fonds centraux.
Vous savez, mes chers collègues, que l'article 22 prévoit que les fonds centraux des caisses d'épargne sont supprimés à la date de création de la Caisse nationale, c'est-à-dire un mois après la publication de la loi.
Les amendements de MM. Badré et Bourdin confient à la Caisse nationale le soin de fixer les délais dans lesquels ces fonds centraux seront supprimés afin de laisser le temps à ladite caisse, qui s'attend à avoir beaucoup de travail, de déterminer les modalités de dévolution aux caisses d'épargne des sommes inscrites au bilan de ces fonds.
Mes chers collègues, naturellement, on peut tout demander, on peut toujours solliciter des mesures d'amélioration supplémentaires. En l'occurrence, reconnaissez que la Caisse nationale est l'héritière du CENCEP, que ce sont les mêmes personnes et les mêmes services qui restent en place. Ils connaissent le sujet et sont en mesure de le maîtriser depuis déjà de nombreux mois, car cette réforme n'est pas une surprise, que je sache !
En tout état de cause, l'actuel CENCEP, qui n'est pas encore transformé en Caisse nationale, a le temps, d'ici à la promulgation du texte, de réfléchir aux modalités de dévolution des fonds centraux.
Autant la commission est sensible à un certain nombre de demandes légitimes formulées par le réseau des caisses d'épargne et par son centre national, autant il semble que la présente demande ne soit pas totalement justifiée. Mais, après tout, peut-être m'avancé-je trop et devrais-je attendre que M. le ministre nous donne son avis...
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 211 et 216 ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Le Gouvernement a deux raisons d'accepter l'amendement que propose M. Badré.
La première, c'est que cet amendement apporte une certaine souplesse, laquelle, certes, n'est pas absolument indispensable - c'est pour cela qu'elle n'avait pas été prévue - mais dont, néanmoins, on ne voit pas pourquoi on priverait le système.
La seconde raison est de faire plaisir au Sénat en acceptant un des amendements qu'il va sans doute adopter.
M. le président. Monsieur le rapporteur, quel est donc l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur. Elle s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 211, accepté par le Gouvernement et pour lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 216 n'a plus d'objet.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 217 rectifié, M. Bourdin et les membres du groupe des Républicains et Indépendants proposent de rédiger comme suit la deuxième phrase de l'article 22 :
« Les obligations couvertes par ces fonds et les droits y afférents sont intégralement transférés à la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance ou, sous la responsabilité de la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance, à toute autre entité du réseau. »
Par amendement n° 230, M. Badré et les membres du groupe de l'Union centriste proposent de rédiger ainsi la deuxième phrase de l'article 22 :
« Les droits et obligations couverts par ces fonds sont intégralement transférés à la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance ou, sous la responsabilité de la Caisse nationale des caisses d'épargne, à toute autre entité du réseau. »
La parole est à M. Bourdin, pour défendre l'amendement n° 217 rectifié.
M. Joël Bourdin. Cet amendement vise à tenir compte d'une situation bien réelle.
Le fonds de solidarité de modernisation des caisses d'épargne s'est engagé à verser des subventions au titre de certains projets de modernisation des caisses d'épargne.
Ces obligations sont en cours et ne sont pas reprises par les caisses d'épargne au titre de la dévolution. Elles sont reprises par la Caisse nationale, qui devra se faire allouer les actifs nécessaires pour honorer les versements de ces subventions, c'est-à-dire les provisions qui ont été constituées.
Pour éviter tout risque, il m'a paru utile de préciser explicitement dans le texte que l'objectif est de permettre à la Caisse nationale, bien sûr d'assurer ses obligations quand les subventions ont été engagées, mais aussi de conserver la partie des fonds qui sont mis en provision et qui étaient précisément destinés à liquider ces obligations.
M. le président. La parole est à M. Badré, pour défendre l'amendement n° 230.
M. Denis Badré. Je pense que l'éloquence de notre collègue M. Bourdin et la qualité de l'argumentation qu'il vient de développer ont totalement convaincu notre assemblée. Nos deux amendements étant quasiment identiques, je retire le mien au profit de celui de M. Bourdin.
M. le président. L'amendement n° 230 est retiré.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 217 rectifié ?
M. Philippe Marini, rapporteur. Cet amendement a posé un problème à la commission des finances, lors de son examen.
En effet, l'article 22 prévoit que les obligations couvertes par les fonds centraux sont intégralement transférées à la Caisse nationale.
MM. Bourdin et Badré proposent que les obligations couvertes par ces fonds et les droits afférents soient intégralement transférés à la Caisse nationale ou, sous la responsabilité de la Caisse nationale, à toute autre entité du réseau.
J'avoue ne pas être convaincu par la nécessité de cette modification. La commission préfère maintenir l'article 22 dans sa rédaction actuelle dans la mesure où c'est bien la Caisse nationale qui exercera la plénitude des attributions de chef de réseau et d'organe central.
L'article 22 est le pendant de l'article 12, qui confie à la Caisse nationale le soin de prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir la liquidité et la solvabilité des caisses d'épargne.
C'est donc à la Caisse nationale - et à elle seule - qu'il convient, à mon avis, dans la logique de la réforme, de transférer les obligations qui étaient jusqu'à présent couvertes par les fonds centraux.
S'il en allait autrement, on abaisserait la Caisse nationale, on ne lui permettrait pas d'aborder ses nouvelles fonctions d'organe central et de chef de réseau dans les meilleures conditions possibles. Il faut bien avoir présent à l'esprit que le rôle de cette caisse nationale vis-à-vis du réseau décentralisé - heureusement décentralisé ! - ne sera pas simple.
M. Badré ne sera certainement pas insensible à mon argument lorsque je lui dirai que le progrès des organisations implique parfois, avec le temps ou avec l'énergie des hommes, un certain fédéralisme. En tout cas, en la matière, il est important, je crois, que l'organe central puisse bien exercer toutes ses responsabilités.
M. Denis Badré. Tout en responsabilisant l'ensemble des acteurs !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 217 rectifié ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Le Gouvernement partage l'avis de M. le rapporteur : il faut que l'ensemble des obligations et l'ensemble des droits soient transférés à la Caisse centrale. Je vois bien quelle souplesse pourrait introduire dans la gestion du réseau la possibilité de transférer ces droits à d'autres éléments de ce même réseau. Il me semble néanmoins que ce serait une source plus de complication que de simplification.
M. le président. Monsieur Bourdin, l'amendement est-il maintenu ?
M. Joël Bourdin. Oui, monsieur le président, mais je souhaite le rectifier en supprimant le membre de phrase suivant : « ou, sous la responsabilité de la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance, à toute autre entité du réseau ».
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 217 rectifié bis , tendant à rédiger comme suit la deuxième phrase de l'article 22 : « Les obligations couvertes par ces fonds et les droits y afférents sont intégralement transférés à la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance. »
Quel est l'avis de la commission sur cet amendement n° 217 rectifié bis ?
M. Philippe Marini, rapporteur. Dans ces conditions, la commission émet un avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Favorable également.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 217 rectifié bis , accepté par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 125 rectifié, M. Bourdin et les membres du groupe des Républicains et Indépendants proposent de remplacer la dernière phrase de l'article 22 par deux phrases ainsi rédigées :
« Les sommes inscrites au bilan du fonds de réserve et de garantie et du fonds de solidarité et de modernisation sont dévolues, selon des modalités fixées par la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance, aux caisses d'épargne et de prévoyance. Une partie de ces sommes est affectée à une augmentation de capital de la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance et, le cas échéant, au fonds commun de garantie et de solidarité du réseau créé par l'article 12 de la présente loi. »
La parole est à M. Bourdin.
M. Joël Bourdin. Cet amendement tend simplement à préciser l'ordre de déroulement des opérations.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur. Il s'agit d'une précision utile ; la commission est donc favorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Cette précision paraît inutile au Gouvernement, qui émet donc un avis défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 125 rectifié, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 22, modifié.

(L'article 22 est adopté.)

Article 23



M. le président.
« Art. 23. - Jusqu'au 1er décembre 2003, les salariés des caisses d'épargne et de prévoyance peuvent souscrire des parts sociales d'un groupement local d'épargne affilié à la caisse d'épargne et de prévoyance dont ils sont salariés dans les conditions suivantes et dans le respect des conditions générales fixées par la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance :
« - dans la limite globale du dixième du capital initial de la caisse d'épargne et de prévoyance souscrit par le groupement local d'épargne, leurs demandes doivent être intégralement servies à concurrence, chaque année, du plus grand de 10 % du capital social du groupement local déjà souscrit, ou de 3 % du capital initial de la caisse d'épargne et de prévoyance souscrit par le groupement local d'épargne. Si les demandes des salariés excèdent ces montants, la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance fixe les conditions de leur réduction ;
« - chaque caisse d'épargne et de prévoyance peut accorder des conditions préférentielles de souscription aux salariés mentionnés au présent article, sous forme de rabais et de délais de paiement. Le taux de rabais ne peut excéder 20 % de la valeur des parts sociales acquises. Les délais totaux de paiement ne peuvent excéder trois ans ;
« - chaque caisse d'épargne et de prévoyance peut également décider une attribution gratuite de parts sociales aux salariés mentionnés au présent article, dans la limite d'une part sociale par part sociale de même montant nominal acquise par le salarié. En aucun cas, la valeur des parts sociales ainsi attribuées ne peut excéder la moitié du plafond mensuel de la sécurité sociale.
« Les avantages mentionnés ci-dessus sont cumulables. Sous réserve des dispositions de l'article 94 A du code général des impôts, ils ne sont pas retenus pour le calcul de l'assiette de tous impôts, prélèvement ou cotisations assis sur les salaires ou les revenus.
« Les salariés des autres entreprises du réseau, des filiales et organismes communs soumis aux accords collectifs nationaux visés à l'article 16 de la présente loi peuvent également souscrire, dans les mêmes conditions, des parts sociales de groupements locaux d'épargne affiliés à une caisse d'épargne et de prévoyance dont ils sont clients. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 20, M. Marini, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit les premier et deuxième alinéas de cet article :
« Jusqu'au terme du délai de huit ans prévu à l'article 21 de la présente loi, les salariés des caisses d'épargne et de prévoyance peuvent souscrire des parts sociales de leur caisse dans les conditions suivantes et dans le respect des conditions générales fixées par la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance :
« - dans la limite globale du dixième du capital initial de la caisse d'épargne et de prévoyance, leurs demandes doivent être intégralement servies à concurrence, chaque année, de 10 % du capital de la caisse d'épargne et de prévoyance déjà souscrit. Si les demandes des salariés excèdent ces montants, la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance fixe les conditions de leur réduction ; ».
Par amendement n° 140, MM. Angels, Carrère, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, dans le premier alinéa de ce même article, de remplacer le millésime « 2003 » par le millésime « 2004 ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 20.
M. Philippe Marini, rapporteur. Cet amendement est essentiellement un amendement de conséquence de la suppression des GLE.
J'en profite pour rappeler que les conditions de souscription préférentielles de parts sociales dont bénéficient les salariés sont inspirées de celles qui sont prévues par les articles 10 et 11 de la loi du 6 août 1986 relative aux modalités des privatisations. J'espère que cela ne vous choque tout de même pas trop, monsieur Carrère ! Ces conditions s'appliquent dans la limite du dizième du capital initial de chaque caisse d'épargne.
M. le président. La parole est à M. Angels, pour présenter l'amendement n° 140.
M. Bernard Angels. Compte tenu du vote intervenu tout à l'heure, cet amendement n'a plus d'objet, et je le retire.
M. le président. L'amendement n° 140 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 20 ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 20 repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 21, M. Marini, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit le dernier alinéa de l'article 23 :
« Les salariés des autres entreprises du réseau, des filiales et organismes communs soumis aux accords collectifs nationaux visés à l'article 16 de la présente loi, peuvent également souscrire, dans les mêmes conditions, des parts sociales de la caisse d'épargne et de prévoyance dont ils sont clients. Il en est de même pour les anciens salariés s'ils justifient d'un contrat d'une durée accomplie d'au moins cinq ans avec l'entreprise ou ses filiales. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. Je me permets d'insister, en particulier auprès du Gouvernement, sur l'objet de cet amendement, qui est d'ouvrir encore plus largement le sociétariat en étendant aux anciens salariés du groupe des caisses d'épargne les conditions privilégiées de souscription des parts sociales qui sont ouvertes par ailleurs aux salariés en fonction dans les caisses d'épargne.
Bien entendu, sur le plan rédactionnel, cet amendement tient compte de la suppression des GLE.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 21, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 23, modifié.

(L'article 23 est adopté.)

Article 24



M. le président.
« Art. 24. - La Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance gère dans ses livres un fonds de mutualisation qui reçoit tous les six mois, à compter du 1er juin 2000 et jusqu'au 1er décembre 2003 inclus, le versement par chaque caisse d'épargne et de prévoyance d'un montant représentatif du produit de la souscription des parts sociales des groupements locaux d'épargne et des certificats coopératifs d'investissement, égal au huitième de son capital initial. Le total des versements au fonds de mutualisation ne peut excéder le montant total du capital initial des caisses d'épargne et de prévoyance. Ces versements sont sans effet sur la détermination du résultat fiscal et comptable des caisses d'épargne et de prévoyance.
« Le fonds de mutualisation reverse avant le 31 décembre de chaque année, de 2000 à 2003 inclus, le produit des versements reçus dans l'année des caisses d'épargne et de prévoyance. Ce produit est affecté au fonds de réserve géré par le Fonds de solidarité vieillesse en application de l'article L. 135-1 du code de la sécurité sociale. Le fonds de mutualisation est exonéré d'impôt sur les sociétés. »
Sur l'article, la parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. L'article 24 soulève un certain nombre de questions essentielles.
La rédaction de cet article est sans doute l'un des points qui ont incité les organisations syndicales des salariés du réseau des caisses d'épargne à solliciter, durant les derniers mois, la représentation nationale. Force est de reconnaître qu'elles étaient fondées à le faire.
Il s'agit en effet, avec l'article 24 tel qu'il est rédigé, de procéder au reversement, dans un délai relativement rapproché, du produit de la diffusion des parts sociales des caisses d'épargne, par le biais des groupements locaux, au bénéfice du fonds de réserve créé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999.
Nous avons en effet, lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999, marqué notre grande perplexité sur la pertinence de la constitution du fonds de réserve pour les retraites.
Ainsi, mon collègue Guy Fischer, dans son intervention lors de la discussion générale de ce projet de loi de financement, faisait part de ses profondes interrogations quant au mode d'abondement du fonds de réserve ainsi qu'aux modalités de son fonctionnement.
Moi-même, dans la discussion de l'article 2 de la loi de financement, je soulignais : « La question du financement des retraites doit être posée dans un cadre beaucoup plus large. Le véritable problème qui est posé est non celui de la réponse conjoncturelle aux besoins de financement, mais celui de la définition de solutions durables pour un financement stable. »
J'indiquais également que « la constitution d'un fonds de réserve ne doit donc pas faire oublier la nécessité, dans ce domaine de l'assurance vieillesse comme dans d'autres, d'une profonde réforme des cotisations sociales des entreprises et des modalités de financement du régime de protection sociale ».
Je rappelle que le fonds de réserve pour les retraites a été abondé cette année par l'affectation d'un excédent d'un montant de 2 milliards de francs.
Ce financement du fonds de réserve sera-t-il reconduit dans les années ultérieures ou bien le choix opéré avec cet article 24 sera-t-il la source principale de financement du fonds ?
Ce sont donc 18,8 milliards de francs de versements qui sont attendus de la mise en oeuvre de cet article, somme prélevée sur les fonds propres des caisses du réseau des caisses d'épargne. A défaut d'être une opération budgétaire pour le compte de l'Etat, ce versement permettra au moins à celui-ci de réaliser une économie.
Monsieur le ministre, nous ne croyons pas à la pertinence de cette disposition.
Certes, aux termes de la seconde phase du premier alinéa de l'article 1er, le réseau a « pour objet la promotion et la collecte de l'épargne ainsi que le développement de la prévoyance, pour satisfaire notamment les besoins collectifs et familiaux ».
Il reste que nous ne sommes pas convaincus que la voie choisie soit nécessairement la bonne.
Mettre à contribution les caisses d'épargne, comme le prévoit l'article 24, revient à dédouaner par avance les entreprises de leur nécessaire contribution à l'effort collectif de financement des retraites, qui est tout de même la pierre angulaire de tout financement durable de notre régime de retraite par répartition.
On ne peut, par exemple, organiser un prélèvement durable sur les fonds propres des caisses d'épargne, qui est assez proche des recettes d'ordre que l'on a, dans le passé, mis en oeuvre dans des collectifs budgétaires incertains, quand on semble exclure en même temps une réforme de l'assiette des cotisations des entreprises plus favorable à l'emploi et mettant notamment le régime de retraite par répartition en situation de disposer des moyens réels de son financement.
On ne peut pas, en fait, concilier prélèvement sur les fonds propres des caisses d'épargne et limitation des prélèvements obligatoires, car cela revient à déresponsabiliser les entreprises au regard du financement de la protection sociale.
Telles sont les raisons qui nous ont amenés à proposer la suppression de cet article.
Bien entendu, monsieur le président, ces explications valent présentation de notre amendement n° 186.
M. le président. La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. L'article 24 organise les modalités de reversement du produit de la souscription du capital des caisses d'épargne au fonds de réserve pour les retraites créé par l'article 2 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999, comme l'a rappelé à l'instant Mme Beaudeau.
Lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999, à l'automne dernier, j'avais été amené, en tant que rapporteur de la commission des affaires sociales, à formuler, au sujet de ce fonds de réserve, un certain nombre de remarques et d'interrogations que je souhaiterais rappeler ici.
La commission des affaires sociales avait tout d'abord constaté que l'objet de ce fonds était particulièrement flou : s'agissait-il d'un fonds destiné à lisser la hausse prévue des taux de cotisation, afin d'en réduire le rythme au moment du changement démographique, ou bien d'un fonds permanent dont les revenus compléteraient les ressources des régimes ?
La commission des affaires sociales avait également observé que les modalités d'alimentation de ce fonds étaient très incertaines et ne paraissaient pas à la hauteur des besoins futurs.
Le fonds de réserve allait, dans l'immédiat, être alimenté à hauteur de 2 milliards de francs, soit l'équivalent d'un jour de versement de prestations vieillesse dans notre pays ! On était là bien loin du montant minimal que devrait atteindre ce fonds : au moins trois points de PIB en 2023 pour un fonds de lissage et au moins dix points de PIB pour un fonds permanent, selon les dernières estimations figurant dans le rapport Charpin sur les retraites.
Le Gouvernement avait, en outre, été très discret quant aux autres sources éventuelles d'alimentation de ce fonds, se contentant d'évoquer l'affectation du produit de la souscription du capital des caisses d'épargne, qui fait l'objet du présent article, les excédents futurs de la sécurité sociale et le produit de privatisations.
Pour la commission des affaires sociales, la création de ce fonds de réserve soulevait enfin d'autres interrogations qui n'avaient pas davantage reçu de réponse. Quel serait l'horizon de placement - et, par conséquent, les supports financiers - de ce fonds ? Qui serait chargé de sa gestion et selon quelles modalités de contrôle ?
Ces interrogations ont d'ailleurs été reprises par le commissaire général au Plan, M. Jean-Michel Charpin, que la commission des affaires sociales a auditionné hier après-midi, dans le rapport sur l'avenir des retraites qu'il vient de remettre au Premier ministre.
Ayant pris acte du caractère « symbolique » de cette mesure, la commission des affaires sociales n'avait pas souhaité supprimer ce fonds de réserve. Elle avait cependant jugé inutile de « faire semblant », comme le faisait le projet de loi, d'attribuer à ce fonds un embryon de ressources, de peaufiner la composition du comité de surveillance du Fonds de solidarité vieillesse ou de préciser les régimes bénéficiaires.
De telles dispositions semblaient déplacées alors même que restaient parfaitement indéterminées à la fois la nature des « vraies » ressources qui alimenteront le fonds et qui devront se chiffrer en centaines de milliards de francs, l'affectation de ces fonds, leur mode et leur horizon de placement ou enfin les modalités de gestion, qui devront être cohérentes tant avec l'origine des ressources qu'avec l'objectif des emplois.
Pour la commission des affaires sociales, les différentes dispositions relatives au fonds de réserve formaient un tout dont il n'était pas possible de dissocier certains éléments.
Elle avait, par conséquent, considéré que la mise en place d'un tel fonds de réserve relevait, à l'évidence, d'un texte d'ensemble, cohérent et complet, incluant des mesures permettant de faire cesser les déficits d'aujourd'hui, de clarifier la situation des régimes spéciaux et de définir un véritable régime des fonctionnaires de l'Etat.
Sept mois plus tard, la situation n'a guère évolué. Sur l'ensemble des questions soulevées par la commission des affaires sociales lors du débat sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999, aucune précision n'a été apportée par le Gouvernement, qui est d'ailleurs encore resté muet sur ce point pendant la séance de questions d'actualité qui vient de se dérouler.
Dans ces conditions, j'approuve pleinement la position de la commission des finances. L'analyse qu'elle formule est semblable à celle qu'a exprimée la commission des affaires sociales lors du débat sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Elle la conduit à proposer de ne pas affecter le produit de la souscription du capital des caisses d'épargne au fonds de réserve pour les retraites avant de connaître précisément quelles seront les missions de ce fonds et de quel montant estimatif le Gouvernement compte le doter, c'est-à-dire, en résumé, sans connaître les projets du Gouvernement pour les retraites des Français.
Je voterai par conséquent, avec le groupe du RPR, l'amendement que nous propose la commission des finances, qui m'apparaît comme dicté par la sagesse. (M. le rapporteur applaudit.)
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 186, M. Loridant, Mme Beaudeau, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de supprimer l'article 24.
Par amendement n° 22, M. Marini, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit l'article 24 :
« Pendant la période de huit ans mentionnée à l'article 21 de la présente loi, les caisses d'épargne et de prévoyance reversent tous les six mois à un fonds de mutualisation géré par la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance un montant représentatif du produit de la souscription de leurs parts sociales qui ne peut être inférieur au seizième de leur capital initial. Le total des versements au fonds de mutualisation ne peut excéder le montant total du capital initial des caisses d'épargne et de prévoyance. Ces versements sont sans effet sur la détermination du résultat fiscal et comptable des caisses d'épargne et de prévoyance. Le fonds de mutualisation est exonéré d'impôt sur les sociétés.
« L'affectation des sommes ainsi versées au fonds de mutualisation est déterminée dans la plus prochaine loi de finances. »
Cet amendement est assorti de quatre sous-amendements.
Le sous-amendement n° 218, présenté par M. Bourdin et les membres du groupe des Républicains et Indépendants, tend, dans la troisième phrase du premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 22, après les mots : « sur la détermination du résultat », à supprimer les mots : « fiscal et ».
Le sous-amendement n° 219 rectifié, présenté également par M. Bourdin et les membres du groupe des Républicains et Indépendants, vise :
A. - Après la troisième phrase du premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 22, à insérer une phrase ainsi rédigée : « Au plan fiscal, ces versements seront déductibles à hauteur des montants qui ne trouvent pas leur contrepartie effective dans la souscription des parts ou des certificats coopératifs d'investissement émis par les caisses d'épargne et de prévoyance à l'issue de cette période de huit ans. »
B. - A compléter l'amendement n° 22 par un paragraphe nouveau ainsi rédigé :
« ... Les pertes de recettes pour l'Etat résultant de la déductibilité des versements au fonds de mutualisation prévus au I ci-dessus sont compensées à due concurrence par une augmentation des droits prévus aux articles 575 et 575-A du code général des impôts. »
C. - En conséquence, à faire précéder le premier alinéa de l'amendement n° 22 de la mention : « I. »
Les deux sous-amendements suivant sont identiques.
Le sous-amendement n° 225 est présenté par MM. Ostermann et Fournier.
Le sous-amendement n° 259 est déposé par M. Badré et les membres du groupe de l'Union centriste.
Tous deux visent, après la troisième phrase du premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 22, à insérer une phrase ainsi rédigée : « Au plan fiscal, ces versements seront déductibles à hauteur des montants qui ne trouvent pas leur contrepartie effective dans la souscription des parts ou des certificats coopératifs d'investissement émis par les caisses d'épargne et de prévoyance à l'issue de cette période de huit ans. »
Toutefois, M. Ostermann m'a fait savoir qu'il retirait le sous-amendement n° 225 au profit du sous-amendement n° 259.
Par amendement n° 141, MM. Angels, Carrère, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, dans la première phrase du premier alinéa, de remplacer le millésime : « 2003 » par le millésime : « 2004 ».
Par amendement n° 187, M. Loridant, Mme Beaudeau, M. Foucaud, les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de rédiger comme suit le second alinéa de l'article 24 :
« Nonobstant les règles d'affectation des résultats fixés par l'article 6 de la présente loi, le fonds de mutualisation utilise avant le 31 décembre de chaque année, de 2000 à 2003 inclus, le produit de versements reçus dans l'année précédente des caisses d'épargne et de prévoyance. Cette utilisation se fait, sur décision des organismes dirigeants du réseau tant au niveau national qu'au niveau de chaque caisse, au bénéfice du financement des actions répondant aux missions d'intérêt général qui lui sont confiées par la présente loi. Le fonds de mutualisation est exonéré d'impôt sur les sociétés. »
Enfin, par amendement n° 142, MM. Angels, Carrère, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, dans la première phrase du second alinéa de l'article 24, de remplacer le millésime « 2003 » par le millésime « 2004».
L'amendement n° 186 a déjà été présenté par Mme Beaudeau.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 22.
M. Philippe Marini, rapporteur. Je voudrais tout d'abord remercier notre collègue Alain Vasselle, qui a exprimé le point de vue de la commission des affaires sociales. Comme on l'a observé, sur cette question du fonds de réserve pour les retraites au sein du Fonds de solidarité vieillesse, la position de la commission des affaires sociales et celle de la commission des finances coïncident complètement.
M. Jean-Louis Carrère. Comme c'est étonnant ! (Sourires.)
M. Philippe Marini, rapporteur. Non, ce n'est pas étonnant ; bien au contraire, c'est la preuve d'une analyse commune et c'est surtout la démonstration que ceux qui suivent attentivement ces questions des retraites ne peuvent qu'être très insatisfaits par les solutions qui nous sont ici proposées.
L'amendement n° 22 vise à supprimer l'affectation du produit du placement des parts sociales des caisses d'épargne au fonds de réserve pour les retraites. L'affectation définitive de ces sommes doit faire l'objet, à notre sens, d'une disposition dans la plus prochaine loi de finances, voire dans la plus prochaine loi de financement de la sécurité sociale : en définitive, cela me serait, à ce stade, assez indifférent.
Monsieur le ministre, il ne faut pas travestir notre position. Il ne faut pas dire, comme vous l'avez déjà fait au cours de ce débat, que le refus de cette affectation prématurée serait la marque d'un désintérêt pour les questions très préoccupantes que pose l'avenir financier de nos systèmes de retraite par répartition.
M. Jean-Louis Carrère. Et pourtant !
M. Philippe Marini, rapporteur. Nous sommes, au sein de la commission des finances comme au sein de la commission des affaires sociales, de ceux qui ne cessent, depuis bien des années, de tirer la sonnette d'alarme, et nous voyons se rapprocher les échéances.
Tout à l'heure, M. Kouchner, répondant à une question d'actualité d'un de nos collègues du groupe socialiste, puis à celle que j'ai moi-même eu l'honneur de poser, nous a dit que 2005, c'était loin et que nous avions le temps. Une telle réponse est absolument stupéfiante !
M. Jean-Louis Carrère. C'est du temps pour la concertation !
M. Philippe Marini, rapporteur. Certes, mais il y a des dispositions concrètes à prendre !
Le dispositif que l'on nous propose ici est-il satisfaisant ? A cette question, vous le savez, la commission des finances répond par la négative. En effet, prévoir une telle affectation avant de définir les fonctions de ce fonds de réserve ainsi que ses objectifs, à la fois quantifiés et de gestion, et sans replacer le problème dans le contexte d'ensemble de l'avenir financier des retraites, c'est mettre la charrue devant les boeufs ! Et la responsabilité de l'Etat ? Et la responsabilité des partenaires sociaux ? Et l'évolution des prélèvements obligatoires dans notre pays ? Et la place pour l'effort individuel d'épargne ? Ce sont bien là les questions essentielles qui doivent être posées. De même que l'on ne fera pas l'économie d'une évolution du calcul des droits, de même on ne fera pas l'économie d'un rapprochement des différents régimes et d'une solution apportée simultanément, donc de façon convergente, aux problèmes qui se posent au régime de retraite des fonctionnaires, au régime par répartition et aux régimes spéciaux.
Non, monsieur le ministre, nous ne pouvons pas vous suivre - quelles que soient, par ailleurs, les convictions que vous avez certainement à titre personnel sur ce sujet - sur la proposition d'affectation qui figure dans le projet de loi.
Par notre amendement, en revanche, nous maintenons l'obligation, pour les caisses d'épargne, de verser tous les six mois une fraction de leur capital initial à un fonds de mutualisation géré par la Caisse nationale des caisses d'épargne, afin de les inciter à placer leurs parts le plus vite possible. Cependant, compte tenu de l'allongement de la durée de placement des parts à huit ans que nous avons décidé tout à l'heure, le montant minimal du versement semestriel doit être au moins égal à un seizième du capital initial, et non plus à un huitième. Mais ce n'est qu'une conséquence arithmétique.
M. le président. La parole est à M. Bourdin, pour présenter les sous-amendements n°s 218 et 219 rectifié.
M. Joël Bourdin. Dans le système ici prévu, les caisses d'épargne s'obligent à verser l'équivalent de 18,8 milliards de francs en parts sociales, en certificats. Cependant, si, au bout du compte, elles n'arrivent pas à la somme requise, il leur faudra bien payer et prélever sur leurs propres ressources. Nous proposons que cet appauvrissement, cette réduction de l'actif net des caisses d'épargne, soit considéré comme une perte, et donc soit mis en déduction des résultats.
M. le président. La parole est à M. Badré, pour défendre le sous-amendement n° 259.
M. Denis Badré. Je ne prétendrai pas que ce sous-amendement soit meilleur que le sous-amendement n° 219 rectifié, car ils sont presque identiques. En revanche, le sous-amendement n° 219 rectifié me paraît, lui, être meilleur que le mien. Je retire donc le sous-amendement n° 259 ! (Sourires.)
M. le président. Le sous-amendement n° 259 est retiré.
Par ailleurs, compte tenu des votes intervenus précédemment, les amendements n°s 141, 187 et 142 n'ont plus d'objet.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 186 ainsi que sur les sous-amendements n°s 218 et 219 rectifié ?
M. Philippe Marini, rapporteur. La commission est défavorable à l'amendement n° 186, qui n'est pas compatible avec sa position.
La commission des finances a également émis un avis défavorable sur les sous-amendements n°s 218 et 219 rectifié, et ce pour deux raisons.
En premier lieu, il convient, selon nous, de responsabiliser les caisses d'épargne en les incitant à placer leurs parts sociales le plus rapidement possible dans le public. Les caisses d'épargne devront supporter sur leurs propres deniers un éventuel échec du placement. A défaut d'une telle disposition, les caisses d'épargne pourraient être tentées d'attendre la fin du délai pour procéder à la diffusion de leur capital social dans le public, ce qui serait préoccupant si le délai de huit ans est in fine retenu. A l'inverse, les caisses d'épargne qui procéderont rapidement au placement de leurs parts sociales disposeront d'un avantage en trésorerie par rapport à celles qui traîneront les pieds, puisqu'elles auront à reverser au fonds de mutualisation une somme inférieure au produit réel de la souscription de leurs parts et pourront placer le reste.
Nous pensons donc qu'il n'est pas opportun de modifier notre amendement sur ce point.
En second lieu, les deux sous-amendements font mention de certificats coopératifs d'investissement, alors que l'amendement n° 22 de la commission des finances, dans la logique de la position adoptée à l'article 21, vise à restreindre les sommes dont le fonds de mutualisation sera destinataire aux seuls fonds collectés à l'occasion de la souscription des parts sociales des caisses d'épargne, à l'exclusion des certificats coopératifs d'investissement qu'elles pourraient éventuellement émettre.
Compte tenu de ces arguments, j'invite M. Bourdin à retirer les sous-amendements n°s 218 et 219 rectifié.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 186 et 22, ainsi que sur les sous-amendements n°s 218 et 219 rectifié ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous trouve formidables ! (Sourires.) Vous vous préoccupez tous des retraites depuis très longtemps, vous suivez le dossier depuis aussi longtemps, mais vous ne le rattrapez jamais car, lorsque des mesures sont prises, vous vous y opposez. Il faudrait réfléchir ; il faudrait étudier ; il faudrait connaître l'ensemble ; il faudrait savoir où nous allons, dites-vous. C'est un problème qui taraude malheureusement notre société depuis assez longtemps et qu'il incombait aux gouvernements successifs de traiter depuis de nombreuses années.
Nous prenons des mesures financièrement massives. Certes, lorsque le fonds de réserve a été mis en place, il a été symboliquement doté, comme on verse une petite somme pour ouvrir un compte-chèque dans une banque. Maintenant, il s'agit de le remplir. Nous commençons à alimenter le fonds d'épargne et nous continuerons avec des excédents de sécurité sociale qui ne manqueront pas d'apparaître l'année prochaine, par exemple, ou par d'autres sources de financement dont l'Etat peut disposer à l'occasion.
Dire que l'on ne sait pas encore exactement comment on va constituer son propre compte d'épargne ne légitime pas que l'on refuse d'en constituer un. Dire que l'on ne sait pas encore exactement comment on va dépenser l'argent que l'on épargne ne justifie pas, à titre individuel, que l'on refuse de se mettre à épargner. C'est la situation dans laquelle nous nous trouvons.
Nous n'avons pas encore collectivement terminé le débat national que le Gouvernement a voulu sur le système de retraite, débat initié par le diagnostic qu'a établi M. Charpin dans son rapport. Néanmoins, il n'est que temps - sans doute aurait-il fallu commencer plus tôt - de mettre de l'argent de côté pour notre système de retraite par répartition.
J'insiste, le fait d'accumuler des réserves pour un système de répartition ne le transforme pas en système de capitalisation. D'ailleurs, les Norvégiens et les Suédois ont depuis longtemps mis en oeuvre des procédures de ce genre et ont accumulé, au cours des vingt dernières années, des sommes considérables qui viennent aujourd'hui soutenir leur système par répartition.
M. Philippe Marini, rapporteur. Avec des excédents budgétaires !
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. On peut être pour ou contre la retraite par capitalisation, c'est un autre débat qui n'interfère nullement avec le fait de créer un fonds de réserve pour soutenir le système par répartition.
Par conséquent, n'organisons pas de faux débat. C'est bien de la répartition qu'il s'agit. Nous savons que se posera, à terme, un problème largement lié à la structure démographique de notre pays, dont l'ampleur variera, le rapport Charpin le démontre, en fonction de la situation économique du moment. Or personne ne sait ce que sera la situation économique en 2015 ou en 2020, combien il y aura de chômeurs, quel sera le taux de croissance. Mais enfin, même dans le meilleur des cas, nous savons que le problème se posera parce que la démographie française est ainsi faite.
Dans ces conditions, il est utile de prendre toutes sortes de dispositions et le débat qui s'engage permettra sans doute d'arriver sinon à des consensus, du moins à des convergences sur les mesures à prendre. Parmi celles-là, à l'évidence, figure celle qui consiste à mettre de côté des réserves qui seront utiles quel qu'en soit finalement le montant.
Nous avons commencé à le faire dans la loi de financement de la sécurité sociale, en dotant le fonds, à sa création, d'un montant, symbolique, il est vrai, de 2 milliards de francs. Nous continuons aujourd'hui en portant cette dotation, par la démarche qui est en cours, à 20 milliards de francs. Quoi de plus légitime, s'agissant d'un réseau qui appartient à la nation, de faire en sorte que le produit des parts coopératives revienne à la nation, c'est-à-dire, en fait, à tous les retraités futurs ?
Que voudrait-on faire d'autre de cet argent ? L'affecter au budget de l'Etat ? N'allons pas, tout de même, gaspiller ce qui, encore une fois, appartient à la nation. Faut-il le laisser dans les caisses d'épargne ? Il y aurait alors enrichissement sans cause au profit du réseau des caisses d'épargne, qui collecteraient une vingtaine de milliards de francs et les garderaient sans aucune raison.
Non, il faut mettre cet argent au service de l'intérêt général. Je ne dis pas que le fonds de réserve pour la retraite par répartition est la seule affectation qui réponde au critère de l'intérêt général. On pourrait en imaginer d'autres, mais c'est celle-là qui est proposée et elle correspond à l'un des grands débats du moment, chacun en a bien conscience.
Si donc le Sénat, à l'inverse de l'Assemblée nationale, refuse cette affectation au motif que cela fait trop longtemps qu'on étudie le problème pour agir sans avoir obtenu au préalable de réponses complètes, cela n'a pas beaucoup de sens. Si cela fait si longtemps, et je vous en donne acte, monsieur le rapporteur, que la commission des finances du Sénat étudie cette question, que n'a-t-elle alors obtenu des gouvernements précédents qu'ils mettent déjà quelques sommes en réserve ! Nous en aurions un peu plus maintenant et, n'ayant aucun amour-propre, aucune fierté d'auteur en la matière, je serais très heureux de prendre la suite des gouvernements de MM. Balladur, Juppé et d'autres qui auraient commencé à alimenter ce fonds...
Tel n'a pas été le cas. Cela dit, je ne jette la pierre à personne, mais ne venez pas nous dire maintenant que, faute de savoir exactement comment vont se passer les choses en 2020, il ne faut pas alimenter ce fonds. Ce n'est pas raisonnable et je pense que les Français - s'ils ont choisi de nous écouter - reconnaîtront que, ce qui importe, c'est de prendre des décisions dans la direction que l'on sait devoir suivre.
En l'occurrence, cela consiste à placer des ressources en réserve. Faisons-le ! De toute façon, il n'y en aura pas trop. Comme vous l'avez répété à plusieurs reprises, si l'on voulait résoudre le problème par ce seul moyen, il faudrait des centaines de milliards de francs. Donc, en toute hypothèse, d'autres mesures s'imposeront, mais elles seront d'autant moins douloureuses pour nos concitoyens, notamment au regard des prélèvements obligatoires, dont vous vous souciez légitimement, que ce qui aura pu être accumulé l'aura été !
Dans ces conditions, l'affectation que nous vous proposons est certainement la meilleure qui puisse être trouvée, mais, à la limite - vous connaissez l'ouverture d'esprit du Gouvernement, toujours prêt à écouter les suggestions du Sénat - si vous aviez fait d'autres propositions conformes à l'intérêt général, je les aurais volontiers, sinon approuvées, du moins examinées. Mais enfin, encore fallait-il que vous en formuliez. Or je n'ai entendu dans cet hémicycle aucune autre proposition.
Donc, nous avons 18,8 milliards de francs - un peu moins selon vous, entre 14 milliards de francs et 15 milliards de francs à tout le moins - qui sont en quelque sorte « en l'air » et pour lesquels vous ne proposez aucune affectation. Vous vous contentez de proposer de supprimer l'article.
Pardonnez-moi de trouver cela un peu léger ! Si vous voulez proposer une affectation, je rappelle qu'elle devra impérativement suivre l'article 1er du projet de loi, c'est-à-dire être conforme à l'intérêt général. Trouver une affectation qui réponde aussi bien que celle-là à l'intérêt général n'est peut-être pas impossible, mais pourquoi aller en chercher une autre, alors que nous avons celle-là ?
Le Gouvernement invite donc le Sénat à bien vouloir le suivre et à suivre l'Assemblée nationale dans sa proposition d'utiliser les fonds récoltés au titre de la transformation du réseau des caisses d'épargne en structure coopérative à l'appui d'un grand chantier - objet d'une inquiétude peut-être exagérée, néanmoins légitime, de nos concitoyens - à savoir l'amélioration, à terme, de l'équilibre financier de notre système de retraite.
J'invite mes amis du groupe communiste républicain et citoyen à ne pas s'effrayer de cette proposition, qui ne comporte aucun caractère structurel susceptible de changer la nature de notre système de répartition. Nous avons là des sommes : elles ne seront utiles ; utilisons-les. Je serais très heureux que Mme Beaudeau et M. Loridant retirent leur amendement, car il n'y a strictement aucune raison politique pour ne pas vouloir répondre à une attente de nos concitoyens et alimenter un fonds qui a été créé.
Pour ce qui est de la majorité sénatoriale, je suis moins surpris de sa réaction. Je l'ai dit tout à l'heure, monsieur le rapporteur, cela vous a déplu. Pardonnez-moi, il arrive aussi que vous disiez des choses qui ne me plaisent que modérément. Je vois un peu de dépit dans votre refus : dépit de ne pas avoir créé ce fonds plus tôt, de ne pas vous être occupé plus tôt de ces problèmes, non pas uniquement intellectuellement, mais concrètement, financièrement. Passez par-dessus votre dépit, monsieur le rapporteur, et venez nous rejoindre pour répondre à une grande préoccupation des Français.
Je suis donc défavorable à tous les amendements et aux sous-amendements dont ils sont assortis. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Philippe Marini, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. Monsieur le ministre, vais-je vous rejoindre ? Logiquement, nous devrions aboutir à un accord, intellectuellement parlant, surtout sur un tel sujet, qui concerne l'économie et la gestion des finances publiques.
De quoi parlons-nous, en effet, sinon d'un fonds de réserve constitué par un Etat dont les finances publiques continuent à dégager un solde négatif ? Il s'agit tout de même bien de cela, si on évoque la question sur le plan macro-économique.
Il est une proposition qui, sur le plan économique, serait équivalente à la vôtre et à laquelle je serais prêt à me rallier : il faudrait que vous vous engagiez à réduire l'endettement de l'Etat à due concurrence de la somme qui sera issue du placement des parts des caisses d'épargne.
En l'occurrence, il est en effet nécessaire d'accumuler une épargne publique, une épargne de l'Etat, pour faire face à un passif qui est inéluctable et que l'Etat devra honorer d'une manière ou d'une autre. Nous ne savons pas dans quel cadre, ni quand, ni pour quel montant. Mais nous savons, l'un et l'autre, qu'il existe un passif et qu'il faudra payer cette dette ! Il y a, en quelque sorte, un hors bilan de l'Etat - il s'agit bien de cela - qu'il est temps de chiffrer, d'évaluer et, probablement, de provisionner.
Vous proposez de le provisionner avec ce fonds spécial. Ne serait-il pas aussi simple de le provisionner en réduisant à due concurrence l'endettement de l'Etat ? L'effet serait équivalent.
Pourquoi proposons-nous de renvoyer cette question à la prochaine loi de finances ? Nous ne contestons nullement le fait qu'il est nécessaire d'engranger de l'argent et d'épargner pour faire face, demain ou après-demain, au problème du bouclage financier des retraites. Nous ne cessons, à cet égard, d'apporter de l'eau au même moulin que vous. Nous considérons que d'ici à la prochaine loi de finances vos fameuses concertations auront peut-être évolué. Peut-être pourrez-vous alors nous donner un peu plus de précisions. En effet, des questions qui peuvent fâcher les uns ou les autres sont posées et il serait urgent de les traiter. Aussi, nous espérons que d'ici là vous aurez suffisamment avancé pour qu'on y voit plus clair. Nous voulons croire que la gestion du solde des finances publiques permettra un jour de dégager un excédent. Nous aurions ainsi tous l'assurance que ce problème des retraites pourra être pris en charge par le pays lorsque l'échéance se présentera.
Monsieur le ministre, vous avez évoqué - je terminerai par ce point - des pays qui ont épargné dans le passé. Si je ne m'abuse, les pays auxquels vous avez fait allusion dégageaient des excédents budgétaires et les utilisaient pour anticiper des charges futures. Nous sommes en désaccord non pas sur le fonds, mais sur la méthode, et c'est pourquoi nous présentons cet amendement.
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je rejoins M. le rapporteur sur de nombreux points. Il a raison. Cependant, la proposition qu'il évoque, visant à diminuer la dette publique, est équivalente à celle que je propose. Parce qu'elle est équivalente, je ne comprends pas pourquoi il refuse la mienne, si ce n'est en raison du dépit que je soulignais tout à l'heure.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 186, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 218.
M. Joël Bourdin. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Bourdin.
M. Joël Bourdin. Je suis en désaccord avec M. le rapporteur - ce n'est pas grave - et je vais m'en expliquer.
S'agissant de son argument relatif au comportement des caisses d'épargne, il faut, a-t-il dit, inciter ces dernières à placer leurs parts sociales. Cela me paraît un peu fort. En effet, les caisses d'épargne ont elles-mêmes demandé ce type de réforme, même si elles ne l'ont pas fait au niveau qui est prévu. Elles se sont donc mobilisées. Je pense qu'elles consacreront toute leur énergie pour placer les parts sociales et les certificats coopératifs d'investissement. Aussi, il me semble un peu excessif de vouloir les inciter à effectuer ce qu'elles ont l'intention de faire.
J'ajoute - je partage, sur ce point, l'avis de M. le rapporteur - que le niveau de la mise en vente est trop élevé. Dès lors, il ne faut pas s'étonner si, à l'arrivée, on constate un écart, si les obligations qui ont été fixées ne sont pas toutes tenues et s'il est nécessaire d'effectuer un prélèvement sur le patrimoine des caisses d'épargne.
Il me semblerait injuste que, en plus du prélèvement qu'elles subiront pour cette mise en vente, elles subissent un préjudice fiscal.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 218, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 219 rectifié.
M. Denis Badré. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Badré.
M. Denis Badré. L'argument que M. Bourdin vient d'avancer à propos du sous-amendement n° 218 vaut, en fait, surtout pour le sous-amendement n° 219 rectifié.
Si les caisses ne parviennent pas au niveau de souscription qu'elles garantissent, ce n'est pas forcément ni systématiquement parce qu'elles traînent les pieds ou qu'elles n'ont pas les compétences voulues. Cela peut-être simplement parce qu'elles n'ont pas physiquement la capacité de le faire, car le marché ne s'y prête pas. J'ajoute que le sous-amendement proposé par notre collègue Joël Bourdin et qui m'a conduit à retirer le sous-amendement n° 259 que j'avais moi-même déposé vise à limiter la déduction fiscale aux seuls montants qui ne trouvent pas leur contrepartie effective dans la souscription des parts ou des CCI.
Tout cela est très raisonnable et équitable.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 219 rectifié, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 22.
M. Jean-Louis Carrère. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Carrère.
M. Jean-Louis Carrère. Je ne reprendrai pas les excellents arguments développés par M. le ministre.
A ce point de la discussion, je voudrais simplement expliquer que si, à chaque fois que le Gouvernement a une bonne idée, M. le rapporteur essaie, avec la technicité qui est la sienne, de la diaboliser, comme il l'a fait s'agissant des retraites - on l'a vérifié à deux reprises, au cours de ce débat et tout à l'heure lors des questions d'actualité au Gouvernement - ou naguère au moment du vote du budget de l'Etat, cela n'ajoutera rien à la clarté du débat.
Il me semble que les excellents arguments avancés par M. le ministre suffisent à justifier notre opposition à l'adoption de l'amendement n° 22. S'engage à nouveau un débat à propos de la privatisation ou de la non-privatisation des caisses d'épargne. Or, monsieur le rapporteur, il ne s'agit pas, même si vous le souhaitez - et je comprends que vous le souhaitiez - de privatiser le groupe des caisses d'épargne. Il n'en est pas question ! Si vous avez un jour la majorité, peut-être reviendrez-vous sur cette question et tenterez-vous alors de le privatiser. Mais, en tout état de cause, nous ne pouvons pas vous suivre.
M. Philippe Marini, rapporteur. Mais vous êtes en train de privatiser le groupe des caisses d'épargne, sans vous en rendre compte !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. L'amendement n° 22, présenté par la commission des finances et qui vise à modifier la rédaction de l'article 24 du projet de loi, pourrait, sous certaines apparences, prêter à confusion avec l'amendement que j'ai exposé voilà quelques instants et qui tendait à supprimer ledit article.
Je ferai observer cependant quelques éléments de différence pour le moins sensibles. Le fait que nous les soulignions motivera clairement notre vote négatif sur l'amendement n° 22.
Dans sa rédaction, l'amendement de la commission est en totale cohérence avec les positions que M. le rapporteur a cru devoir défendre depuis le début de ce débat, notamment en ce qui concerne les conditions de la diffusion des parts sociales.
Il s'intègre aussi dans son souci de faire prévaloir une conception plus étroite de l'application des nouvelles dispositions statutaires propres au réseau des caisses d'épargne, notamment en rémunérant à un plus haut niveau les parts sociales, au détriment de la constitution du dividende social et de son utilisation.
Aussi, nous posons une question : pourquoi reporter à la discussion de la prochaine loi de finances la décision relative à l'affectation du produit des versements des caisses d'épargne au fonds de mutualisation ?
Cette orientation de la commission des finances appelle plusieurs observations.
La première, d'ailleurs soulignée dans le rapport de notre collègue Marini, aux pages 144 et 145, porte sur la conception générale que l'on peut avoir du rôle du fonds de réserve pour les retraites, et que M. le rapporteur a précisé tout à l'heure.
Le rapport est clair : il indique, à ce niveau, que les moyens du fonds sont largement insuffisants s'il s'agit de prévenir les effets de la démographie sur l'équilibre du régime par répartition.
Je relève également que ce que M. le rapporteur semble le plus attendre de ce fonds de réserve, c'est bien le lissage des effets démographiques sur le montant des cotisations d'assurance vieillesse et, bien entendu, avant tout, sur celle des entreprises.
En clair, dans l'attente de précisions sur les moyens et les missions du fonds de réserve pour les retraites, M. le rapporteur indique qu'il verrait bien ce fonds financer la réduction des cotisations patronales, ou en tout cas permettre leur gel, alors que, je le dis au passage, c'est précisément cette situation qui, ces dernières années, a conduit au déficit structurel de la branche vieillesse.
Nous ne partageons évidemment pas cette orientation qui tend à faire croire - encore faudrait-il le prouver - qu'un haut niveau de protection sociale est un obstacle à la croissance et à l'emploi.
Il nous revient ensuite de débattre des trois autres possibilités que M. le rapporteur semble appeler de ses voeux.
Première hypothèse : le fait de renvoyer à la discussion de la loi de finances la question de l'utilisation des versements des caisses d'épargne au fonds de mutualisation pourrait conduire M. le rapporteur à juger judicieux d'affecter les sommes concernées au financement de la politique de l'emploi, entendant par là, bien sûr, la politique de réduction des cotisations sociales des entreprises.
Deuxième hypothèse : M. le rapporteur nous invite à consacrer le produit des versements effectués par les caisses d'épargne à la prise en charge d'une partie du financement de la dette publique, par affectation du produit des versements au compte d'affectation spéciale qui en retrace l'évolution.
Enfin, troisième hypothèse : les sommes collectées par le fonds de mutualisation viendraient alimenter les dotations en capital de l'Etat aux entreprises publiques appelées à être privatisées.
Dans tous les cas, cette orientation est assez éloignée des missions d'intérêt général qui sont dévolues aux caisses d'épargne et est sans doute peu recevable, de notre point de vue.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous ne voterons pas l'amendement n° 22.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, l'amendement n° 22, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 24 est ainsi rédigé.

Article 25



M. le président.
« Art. 25. - I. - Deux mois au plus tard après la publication de la présente loi, le directoire de chaque caisse d'épargne et de prévoyance soumet à l'approbation de la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance un plan de création de groupements locaux d'épargne pour sa circonscription territoriale. Ce plan comprend notamment :
« - le nombre de groupements locaux d'épargne qui seraient créés ;
« - pour chaque groupement local d'épargne dont la création est envisagée, le nom de deux personnes au moins, répondant aux conditions exigées par l'article 9 pour être sociétaire d'un groupement local d'épargne, qui ont pris chacune l'engagement de souscrire, immédiatement après l'approbation mentionnée ci-dessus, au moins une part sociale du groupement local d'épargne. La valeur nominale de ces parts est précisée et acceptée par ces personnes ;
« - le nom de l'administrateur provisoire du groupement désigné par la caisse d'épargne et de prévoyance.
« II. - Dès que la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance a approuvé le plan d'une caisse d'épargne et de prévoyance et que les engagements de souscription au capital d'un groupement local d'épargne prévus par ce plan sont remplis, ce groupement est réputé constitué et doté de la personnalité morale et son administrateur provisoire dispose, sous le contrôle de la caisse d'épargne et de prévoyance, des pouvoirs les plus étendus pour contracter en son nom, admettre de nouveaux associés et le représenter vis-à-vis des tiers.
« III. - Si, neuf mois après la publication de la présente loi, un groupement local d'épargne a admis moins de 500 sociétaires personnes physiques ou 10 sociétaires personnes morales, la caisse d'épargne et de prévoyance à laquelle il est affilié organise sa fusion dans un délai d'un mois avec un autre groupement local d'épargne affilié à la même caisse, de telle sorte que le nombre de sociétaires du groupement local d'épargne issu de la fusion atteigne au moins 500 sociétaires personnes physiques ou 10 sociétaires personnes morales.
« Dix mois après la publication de la présente loi, l'administrateur provisoire de tout groupement local d'épargne qui a admis au moins 500 sociétaires personnes physiques ou 10 sociétaires personnes morales convoque une assemblée générale pour adopter les statuts du groupement et désigner son conseil d'administration. Le mandat initial de ce conseil prend fin le 1er février 2003. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 23, M. Marini, au nom de la commission, propose de supprimer cet article.
Par amendement n° 143, MM. Angels, Carrère, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, dans la première phrase du premier alinéa du I de l'article 25, après les mots : « le directoire de chaque caisse d'épargne et de prévoyance, », d'insérer les mots : « après avis de son conseil d'orientation et de surveillance, ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 23.
M. Philippe Marini, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de conséquence à la suite de la suppression des GLE.
M. le président. La parole est à M. Angels, pour défendre l'amendement n° 143.
M. Bernard Angels. L'amendement de la commission des finances sera sans doute adopté et le présent amendement n'aura alors plus d'objet. Aussi, je ne développe pas mon argumentation.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 23 ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 23, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 25 est supprimé et l'amendement n° 143 n'a plus d'objet.

Article 25 bis



M. le président.
« Art. 25 bis . - A partir du moment où les groupements locaux d'épargne sont réputés constitués selon les modalités fixées au II de l'article 25 de la présente loi, et jusqu'au 31 décembre 2003, chaque caisse d'épargne et de prévoyance doit publier et tenir à la disposition de toute personne intéressée un document d'information portant sur le contenu et les modalités de l'émission de parts sociales représentatives du capital des groupements locaux d'épargne qui lui sont affiliés, sur les liens, notamment juridiques et financiers, entre la caisse d'épargne et de prévoyance et les groupements locaux d'épargne affiliés, ainsi que sur la situation financière et l'évolution de l'activité de la caisse d'épargne et de prévoyance.
« Ce document est établi tous les ans. Son contenu est précisé par décret. Ce document est soumis au visa préalable, en premier lieu de la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance, en deuxième lieu de la Commission des opérations de bourse. Cette dernière indique, le cas échéant, les énonciations à modifier ou les informations complémentaires à insérer. Elle peut également demander toutes explications et justifications, notamment au sujet de la situation, de l'activité et des résultats des caisses d'épargne et de prévoyance, de groupements locaux d'épargne et de la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance. Le non-respect par les caisses d'épargne et de prévoyance, les groupements locaux d'épargne ou la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance des dispositions du présent article est passible des sanctions prévues aux articles 9-1 à 10 de l'ordonnance n° 67-833 du 28 septembre 1967 instituant une Commission des opérations de bourse et relative à l'information des porteurs de valeurs mobilières et à la publicité de certaines opérations de bourse. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 24, M. Marini, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit l'article 25 bis :
« Jusqu'à l'échéance du délai de huit ans mentionné à l'article 21 de la présente loi, chaque caisse d'épargne et de prévoyance doit publier et tenir à la disposition de toute personne intéressée un document d'information portant sur le contenu et les modalités de l'émission de parts sociales représentatives de son capital ainsi que sur sa situation financière et l'évolution de son activité.
« Ce document est établi tous les ans. Son contenu est précisé par décret. Il est approuvé par la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance puis soumis au visa de la Commission des opérations de bourse. Cette dernière indique le cas échéant les énonciations à modifier ou les informations complémentaires à insérer. Elle peut également demander toutes explications et justifications, notamment au sujet de la situation, de l'activité et des résultats des caisses d'épargne et de prévoyance et de la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance. Le non-respect par ces dernières des dispositions du présent article est passible des sanctions prévues aux articles 9-1 à 10 de l'ordonnance n° 67-833 du 28 septembre 1967 instituant une Commission des opérations de bourse et relative à l'information des porteurs de valeurs mobilières et à la publicité de certaines opérations de bourse. »
Cet amendement est assorti de deux sous-amendements.
Le sous-amendement n° 220, déposé par M. Bourdin et les membres du groupe des Républicains et Indépendants, vise à compléter in fine le texte proposé par l'amendement n° 24 par un alinéa ainsi rédigé :
« Cette mise à disposition d'informations ne fait pas acquérir aux caisses d'épargne le statut d'émetteur faisant appel public à l'épargne au sens de l'article 6 de l'ordonnance n° 67-833 du 28 septembre 1967. »
Le sous-amendement n° 260, présenté par M. Badré et les membres du groupe de l'Union centriste, a pour objet de compléter in fine le second alinéa du texte de l'amendement n° 24 par une phrase ainsi rédigée : « Cette mise à disposition d'informations ne fait pas acquérir aux caisses d'épargne le statut d'émetteur faisant appel public à l'épargne au sens de l'article 6 de l'ordonnance n° 67-833 du 28 septembre 1967. »
Par amendement n° 144, MM. Angels, Carrère, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, dans le premier alinéa de l'article 25 bis, de remplacer le millésime : « 2003 » par le millésime : « 2004 ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 24.
M. Philippe Marini, rapporteur. Monsieur le ministre, l'Assemblée nationale a souhaité que le placement dans le public de 18,8 milliards de francs de parts sociales - tel était le chiffre retenu jusqu'ici - soit accompagné d'une information précise et encadré par les souscripteurs.
Cette préoccupation est tout à fait légitime. Notre amendement tient simplement compte de la suppression des GLE et transforme, par ailleurs, le visa de la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance en agrément. En effet, nous pensons qu'il n'y a pas lieu de placer sur le même plan la Commission des opérations de bourse, qui est une autorité administrative indépendante, et la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance, qui est l'organe central d'un réseau bancaire coopératif et qui est donc une entité de droit privé. Nous ne pouvons pas les mettre dans une position symétrique dans un texte de loi : ce serait minorer la position éminente de la Commission des opérations de bourse ce qui, assurément, serait regrettable.
M. le président. La parole est à M. Bourdin, pour défendre le sous-amendement n° 220.
M. Joël Bourdin. Le sous-amendement n° 220 étant moins bien rédigé que le sous-amendement n° 260, je le retire, au profit de ce dernier.
M. le président. Le sous-amendement n° 220 est retiré.
La parole est à M. Badré, pour défendre le sous-amendement n° 260.
M. Denis Badré. Je remercie M. Bourdin pour sa courtoisie. Le sous-amendement n° 260 tend à compléter l'amendement n° 24 par une phrase, alors que le sous-amendement n° 220 fait référence à un alinéa. C'est là, sans doute, que notre collègue voit un grand progrès, et je lui en sais gré.
Le sous-amendement n° 260 vise à compléter le très bon amendement n° 24 de la commission des finances en précisant que l'émission de parts sociales des caisses d'épargne au cours de la période transitoire n'a pas vocation à faire acquérir aux caisses d'épargne le statut d'émetteur faisant appel public à l'épargne.
Le cas qui nous intéresse constitue une émission très particulière, pour laquelle il est difficile de faire jouer la réglementation en vigueur.
En effet, actuellement, la réalisation d'une opération par appel public à l'épargne confère automatiquement le statut d'émetteur faisant appel public à l'épargne avec les contraintes d'information récurrente qui y sont liées.
Si l'article 6 de l'ordonnance de 1967 envisage la possibilité pour les émetteurs de justifier qu'ils n'ont plus le statut d'émetteur faisant appel public à l'épargne, l'organisation de la « sortie » du statut par un règlement de la COB en cours d'élaboration prévoit un certain nombre de critères qui cadrent mal avec l'opération temporaire envisagée par le projet de loi et le statut coopératif des caisses d'épargne.
La précision que vise à insérer le sous-amendement n° 260 est donc utile.
M. le président. Monsieur Angels, sans doute serez-vous d'accord pour considérer que l'amendement n° 144 n'a plus d'objet ?
M. Bernard Angels. Tout à fait !
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 260 ?
M. Philippe Marini, rapporteur. Dans la nouvelle structure juridique qui va être mise en place avec diffusion de parts sociales auprès de nombreux souscripteurs, il est indispensable que les caisses d'épargne diffusent des informations financières ; en effet, on ne comprendrait pas cette diffusion de parts sociales si cette dernière ne se traduisait pas par la transparence indispensable sur la gestion de ces établissements et sur leurs perspectives financières ; d'où le document d'information qui est prescrit à juste titre par l'article 25 bis, introduit par l'Assemblée nationale.
Pour autant, il est tout à fait clair, mes chers collègues, me semble-t-il - mais à vous, monsieur le ministre, de nous le confirmer - que les caisses d'épargne n'acquièrent pas, du fait de l'obligation de diffuser une telle information, le statut d'un émetteur faisant appel public à l'épargne.
Au demeurant, si les caisses d'épargne s'étaient placées dans le cadre de l'appel public à l'épargne au sens de la loi existante, l'article 25 bis n'aurait pas été nécessaire.
Si l'article 25 bis a été ajouté par l'Assemblée nationale, c'est bien parce que cette dernière a considéré que les caisses d'épargne ne sont pas admises aux dispositions relatives à l'appel public à l'épargne.
Pouvez-vous, monsieur le ministre, confirmer cette analyse ? Si tel était le cas, notre collègue Denis Badré pourrait alors retirer le sous-amendement n° 260 dans la mesure où il aurait reçu toutes les assurances nécessaires.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 24 et sur le sous-amendement n° 260 ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. S'agissant du sous-amendement n° 260, je ne peux mieux dire que M. le rapporteur. L'article 25 bis décrit des modalités particulières d'information des épargnants dans la mesure où, justement, ce ne sont pas les règles d'appel public à l'épargne qui s'appliquent, les caisses d'épargne n'ayant pas le statut d'émetteur. Ce sous-amendement est en effet inutile selon la logique évoquée par M. le rapporteur, et M. Badré peut donc le retirer.
L'amendement n° 24 est un texte de cohérence avec la prolongation à huit ans de la période de placement. Je me suis déjà exprimé sur cette prolongation. Je suis donc défavorable à l'amendement n° 24.
M. le président. Le sous-amendement n° 260 est-il maintenu, monsieur Badré ?
M. Denis Badré. Non, monsieur le président, je le retire.
M. le président. Le sous-amendement n° 260 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 24, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 25 bis est ainsi rédigé.

Article 26



M. le président.
« Art. 26. - I. - Dans le délai d'un mois à compter de la publication de la présente loi, la Caisse centrale des caisses d'épargne et de prévoyance :
« - modifie ses statuts en vue de sa transformation en société anonyme à directoire et conseil de surveillance régie par les articles 118 à 150 de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 précitée ;
« - désigne son conseil de surveillance et son directoire pour une durée initiale s'achevant le 31 décembre 2003. La nomination du président de ce directoire est soumise à un agrément du ministre chargé de l'économie.
« II. - A la date de cet agrément :
« - la société mentionnée au I prend le nom de Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance et est substituée au Centre national des caisses d'épargne et de prévoyance comme organe central au sens des articles 20, 21 et 22 de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 précitée ;
« - le Centre national des caisses d'épargne et de prévoyance est dissous. Ses biens, droits et obligations sont intégralement transférés à la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance. Par exception, certains biens, droits et obligations du Centre national des caisses d'épargne et de prévoyance peuvent, sur décision de la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance, être apportés à la Fédération nationale des caisses d'épargne et de prévoyance en proportion des missions conférées à cette dernière par l'article 15 ;
« - les titres Ier et III de la loi n° 83-557 du 1er juillet 1983 portant réforme des caisses d'épargne et de prévoyance sont abrogés ;
« - dans les textes législatifs et réglementaires en vigueur, les mots : "Centre national des caisses d'épargne et de prévoyance" sont remplacés par les mots : "Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance". »
Par amendement n° 145, MM. Angels, Carrère, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, dans le dernier alinéa du I de cet article, de remplacer le millésime : « 2003 » par le millésime : « 2004 ».
Mais en raison d'un vote intervenu précédemment, cet amendement n'a plus d'objet.
Par amendement n° 25, M. Marini, au nom de la commission, propose :
I. De supprimer la dernière phrase du dernier alinéa du I de l'article 26.
II. En conséquence, à la fin du premier alinéa du II de l'article 26, de remplacer les mots : « de cet agrément » par les mots : « de cette désignation ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. Comme nous le savons, puisque nous avons déjà discuté de ce point, la nomination du président du directoire de la future Caisse nationale serait, selon le texte, subordonnée à l'agrément du ministre chargé de l'économie.
Par cohérence avec les conceptions défendues par la commission et avec le vote déjà intervenu sur cette question, nous proposons de mettre fin à cette pratique de l'agrément, considérant que le groupe des caisses d'épargne, une fois la réforme intervenue, ne doit plus avoir besoin de tutelle.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Le Gouvernement ayant été défavorable à la suppression de l'agrément, il émet un avis défavorable sur les amendements de conséquence.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 25, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 232, M. Marini, au nom de la commission, propose de compléter in fine le I de l'article 26 par un alinéa ainsi rédigé :
« A l'expiration de ce délai, le ministre chargé de l'économie constate la modification des statuts de la Caisse centrale des caisses d'épargne et de prévoyance opérée en conformité avec la présente loi. Il prononce l'installation du conseil de surveillance et du directoire. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. Cet amendement vise à rendre contraignante la modification des statuts de la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance en vue de sa transformation en société anonyme à directoire et conseil de surveillance.
L'article 26 prévoit que la Caisse centrale se transforme en Caisse nationale, qui reprend l'ensemble du patrimoine des droits et des obligations de l'ancienne Caisse centrale. Mais, selon la rédaction actuelle du projet de loi, cette transformation opérée par l'assemblée générale extraordinaire de la Caisse centrale risquerait - je sais bien, monsieur le ministre, que c'est un cas de figure un peu théorique - d'être bloquée par d'éventuels conflits internes au sein de cette assemblée générale, conflits qui ne lui permettraient pas de déboucher sur une décision dans le délai d'un mois prescrit par la loi.
L'amendement n° 232 vise donc à mettre en place, en quelque sorte, un filet de sécurité et à prévoir que, si l'assemblée générale n'a pas été en mesure, pour diverses raisons, de voter à la majorité requise les résolutions lui permettant de transformer la Caisse centrale en Caisse nationale, il est alors constaté la modification des statuts telle que prévue par la loi et par les résolutions formulées auprès de ladite assemblée générale. Nous prévoyons donc que cette modification ait lieu, dans cette hypothèse, de plein droit, en conformité avec la loi.
Pour que le dispositif soit bien complet et cohérent, nous suggérons, monsieur le ministre, que vous constatiez vous-même la modification à l'expiration du délai légal et que, dès lors, vous prononciez vous-même l'installation du conseil de surveillance et du directoire.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je comprends le souci de M. le rapporteur. Le cas de figure qu'il dit théorique est peut-être moins théorique qu'il n'y paraît. Dans ces conditions, je pense que la motivation de cet amendement est fondée.
Le problème, c'est que je ne suis pas sûr que cet amendement, tel qu'il est actuellement rédigé, soit opérant. Il prévoit en effet qu'« à l'expiration de ce délai, le ministre chargé de l'économie constate la modification des statuts. » Mais si le ministre ne constate pas, nous n'aurons pas beaucoup avancé !
Ne pensez-vous pas, monsieur le rapporteur, qu'il vaudrait mieux faire reposer sur la Caisse centrale la charge que la loi impose en rédigeant ainsi l'amendement : « A l'expiration de ce délai, la Caisse centrale des caisses d'épargne et de prévoyance fait constater au ministre chargé de l'économie que la modification des statuts s'est opérée en conformité avec la présente loi. Le ministre prononce l'installation du conseil de surveillance et du directoire. » ?
M. Philippe Marini, rapporteur. Tout à fait, et je rectifie mon amendement en ce sens.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 232 rectifié.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 232 rectifié, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 26, modifié.

(L'article 26 est adopté.)

Articles 27 et 28



M. le président.
« Art. 27. - Dans un délai de trois mois à compter de la publication de la présente loi, les caisses d'épargne et de prévoyance existant à cette date, représentées par le président de leur conseil d'orientation et de surveillance et le président de leur directoire, réunies en assemblée générale constitutive, adoptent les statuts de la Fédération nationale des caisses d'épargne et de prévoyance prévue à l'article 15 et désignent son conseil d'administration. » - (Adopté.)
« Art. 28. - Sous réserve des dispositions de l'article 23, les opérations rendues nécessaires par la mise en place du nouveau réseau des caisses d'épargne et de prévoyance prévue par la présente loi ne donnent lieu ni à indemnité, ni à perception d'impôts, droits ou taxes, ni au versement de salaires ou d'honoraires au profit d'agents de l'Etat.
« Pour la détermination de leurs résultats imposables, les cessionnaires et bénéficiaires des apports doivent se conformer aux conditions prévues au 3 de l'article 210 A du code général des impôts à raison des biens, droits et obligations qui leur ont été cédés ou transmis. Pour l'application de cette mesure, la société absorbée s'entend de l'entité qui possédait les biens avant l'intervention de l'opération, et la société absorbante s'entend de l'entité possédant ces mêmes biens après l'opération. » - (Adopté.)

Article 29



M. le président.
« Art. 29. - Les demandes de modification du statut du personnel, mentionné à l'article 15 de la loi n° 83-557 du 1er juillet 1983 précitée, déjà exprimées à la date de publication de la présente loi et qui n'ont pas fait l'objet d'un accord ou d'un arbitrage à cette date sont soumises, en cas de désaccord persistant pendant dix-huit mois à compter de la demande de révision, à une commission arbitrale. La composition de cette commission est définie par arrêté conjoint du ministre chargé de l'économie et du ministre chargé du travail. Elle rend sa décision après avoir recherché une conciliation entre les parties. Elle prend en compte, d'une part, la situation et les perspectives financières du réseau des caisses d'épargne et, d'autre part, les droits sociaux des salariés et notamment en matière de régime de retraite.
« En ce qui concerne les accords conclus antérieurement à la publication de la présente loi et pour l'application des dispositions de l'article L. 132-8 du code du travail, l'ensemble des organisations syndicales représentatives mentionnées à l'article 16 et la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance sont considérées comme signataires des accords collectifs adoptés par la commission paritaire nationale et en vigueur à la date de publication de la présente loi. »
Sur cet article, je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 188, M. Loridant, Mme Beaudeau, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de supprimer cet article.
Par amendement n° 124, M. Bourdin et les membres du groupe des Républicains et Indépendants proposent :
A. - De compléter in fine le premier alinéa de l'article 29 par une phrase ainsi rédigée :
« Les dotations par les caisses d'épargne et les établissements concernés, rendues nécessaires pour faire face à leurs engagements dans le cadre de la réforme du régime de retraites des personnels des caisses d'épargne et de l'intégration de ces personnels dans le champ d'application des accords visés à l'article L. 921-4 du code de la sécurité sociale conformément aux dispositions de l'article L. 921-1 du même code, n'ont pas le caractère d'élément de salaire ni de contribution des employeurs au financement des prestations complémentaires au sens de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale. »
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, de compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... la perte de recettes pour l'Etat due à l'exonération de charges sociales et d'impôt sur le revenu des sommes versées au titre de la réforme du régime de retraite de salaires des caisses d'épargne. »
C. - En conséquence, de faire précéder le début de cet article de la mention : « I ».
Par amendement n° 189, M. Loridant, Mme Beaudeau, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de compléter l'article 29 par un alinéa ainsi rédigé :
« A compter de l'entrée en vigueur des accords mentionnés au second alinéa de l'article 17, les droits à retraite nés de périodes d'emploi antérieures à ces accords et qui s'ajoutent à ceux résultant des régimes de retraite complémentaire légalement obligatoires mentionnés à l'article L. 921-1 du code de la sécurité sociale sont intégralement garantis par la constitution de provisions techniques suffisantes représentées par des actifs équivalents. La constitution de ces provisions peut être répartie sur une période de dix ans. »
La parole est à Mme Beaudeau, pour défendre l'amendement n° 188.
Mme Marie-Claude Beaudeau. L'amendement n° 188 vise à supprimer l'article 29.
Les organisations syndicales unanimes - CGT, CFDT, FO, CFTC, CGC, Syndicat Unifié - ont condamné la dénonciation par le CENCEP, le Centre national des caisses d'épargne et de prévoyance, en décembre 1997, des accords sur la CGR, la caisse générale des retraites.
La loi en vigueur dans les caisses d'épargne stipule que, en l'absence de nouvel accord au plus tard en décembre 1999, le dossier sera transmis à une commission arbitrale constituée pour l'occasion et chargée d'édicter de nouvelles règles.
L'article 29 vise donc à ramener le délai de deux ans à dix-huit mois. Il concerne explicitement cette caisse générale de retraite à laquelle les salariés sont particulièrement attachés, aucune autre disposition statutaire n'ayant été dénoncée.
On nous demande donc finalement de réduire les délais normaux de conclusion de cet accord, alors même que les positions respectives de chacune des parties sont pour le moment divergentes.
Nous ne pensons pas qu'il soit nécessairement justifié d'interférer sur le déroulement normal du dialogue social au travers d'une disposition législative qui pourrait s'apparenter, dans les faits, à une forme de mise en demeure ou d'obligation de résultat.
Ce sont donc là les raisons qui nous conduisent à vous proposer la suppression de cet article.
L'amendement n° 188 procède de la même logique que celle que nous avions défendue à l'article 17.
On observera d'ailleurs que les autres amendements déposés sur cet article et sur lesquels nous reviendrons soulignent d'une certaine manière les données du problème, notamment la question des provisions constituées dans le cadre du régime propre des caisses.
M. le président. La parole est à M. Bourdin, pour présenter l'amendement n° 124.
M. Joël Bourdin. Les accords collectifs relatifs au régime de retraite du personnel des caisses d'épargne sont en cours de révision par les partenaires sociaux. Cette révision pourra aboutir à l'intégration des personnels des caisses d'épargne aux régimes de retraite complémentaires interprofessionnels, ARRCO et AGIRC.
Pour faire face aux engagements liés au maintien des droits des salariés, les caisses d'épargne ont constitué des provisions dans leurs comptes sociaux. Un ajustement périodique est prévu afin de prendre en compte l'actualisation de ces engagements. Ces provisions seront ensuite affectées à la couverture effective des charges de retraite, sous forme de concours exceptionnels.
Ces concours exceptionnels des entreprises du groupe des caisses d'épargne ne doivent en aucun cas être assimilables à une rémunération au regard des dispositions du code de la sécurité sociale ni du code général des impôts pour ce qui concerne l'impôt sur le revenu des personnes physiques.
C'est pour cette raison que nous proposons un amendement visant à prévoir l'exonération de charges sociales et d'impôt sur le revenu des sommes versées au titre de la réforme du régime de retraite des salariés des caisses d'épargne.
M. le président. La parole est à Mme Beaudeau, pour défendre l'amendement n° 189.
Mme Marie-Claude Beaudeau. L'entrée complète dans les régimes de retraite complémentaire ARRCO et AGIRC laisse à la charge des caisses d'épargne des prestations de retraite à caractère supplémentaire.
Si le régime qui existe aujourd'hui peut, pour l'avenir, faire l'objet de modifications, rien ne justifie que les droits issus de périodes d'emploi antérieures à ces modifications puissent être remis en cause. Il est donc nécessaire, afin d'assurer la protection des droits à retraite supplémentaire des salariés des caisses d'épargne, que les engagements pris à ce titre par le passé soient garantis par la constitution de provisions techniques suffisantes.
La charge que représente la constitution de ces provisions peut être étalée sur une période de dix ans. Il appartiendra aux partenaires sociaux des caisses d'épargne de se prononcer sur l'éventuelle adaptation, pour l'avenir, de ce régime, en application des dispositions de l'article 17, alinéa premier, du présent projet de loi.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ces trois amendements ?
M. Philippe Marini, rapporteur. La commission est défavorable à l'amendement n° 188, qui est incompatible avec la position prise par la commission. Nous ne suivons pas la même logique.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Nous ne défendons pas les mêmes gens !
M. Philippe Marini, rapporteur. Non, nous ne sommes pas sur la même ligne !
M. le président. Mes chers collègues, je vous en prie ! Les dialogues en séance nuisent au bon déroulement des travaux !
M. Philippe Marini, rapporteur. J'en viens à l'amendement n° 124. Le Gouvernement a apporté, s'exprimant sur des amendements identiques présentés à l'Assemblée nationale, la réponse suivante : vous avez tout d'abord indiqué, monsieur le ministre, que les versements qui seront effectués par les caisses d'épargne pour garantir les droits que leurs salariés auront acquis antérieurement à la transformation de leur régime de retraite en un régime de droit commun ARRCO-AGIRC n'auront pas la nature juridique de salaires, dès lors qu'ils ne créeront pas de nouveaux droits mais qu'ils viseront simplement à permettre le passage d'un régime de retraite à un autre.
En second lieu, vous avez observé, monsieur le ministre, que les versements aux caisses de retraite ne pourront être déductibles de l'impôt sur les sociétés que si l'entreprise perd la disponibilité des sommes qu'elle verse, ce qui est conforme aux principes habituels en matière de droit fiscal, mais ce qui n'est pas le cas ici.
La proposition de M. Bourdin consiste à laisser les sommes dans l'entreprise tout en permettant de les déduire de l'impôt sur les sociétés. Elle déroge à un principe usuel de financement des régimes de retraite par les entreprises, et je crains fort que, si nous l'adoptions, nous n'ouvrions ainsi une brèche dans laquelle de nombreuses entreprises pourraient s'engager.
Je me demande en outre si, au regard du droit communautaire, certains de ceux qui nous observent - puisque c'est leur responsabilité - ne seraient pas fondés à considérer que cette disposition est une aide publique devant être notifiée à la Commission européenne.
Je souhaiterais savoir, monsieur le ministre, si vous maintenez l'analyse que vous avez présentée à l'Assemblée nationale et, en fonction de votre réponse, je pense que M. Bourdin pourrait peut-être accepter de retirer son amendement.
S'agissant de l'amendement n° 189, je rappelle que des négociations sont en cours au sein du réseau en vue de régler le problème de la caisse générale de retraite, nous y avons fait allusion.
La loi n'a pas à préjuger le résultat de ces négociations ! Au demeurant, les caisses d'épargne ont déjà constitué des provisions en vue de garantir les droits à la retraite des salariés.
La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement, qui ne lui semble pas indispensable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 188, 124 et 189 ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. La durée normale d'une négociation en matière de caisses de retraite est fixée à deux ans. Le présent projet de loi prévoit de la ramener à dix-huit mois, ce que conteste Mme Beaudeau dans son amendement n° 188.
Si nous avons fait cette proposition, c'est pour que la négociation soit terminée au moment où la loi sera promulguée et appliquée. Il paraîtrait délicat de lancer l'opération de placement des certificats coopératifs sans que la question très importante pour les salariés - et, donc, pour l'entreprise - de la caisse de retraite ait été soldée, d'une manière ou d'une autre, à un niveau ou à un autre. Il faut que les données soient connues !
Le délai de deux ans nous conduit jusqu'au début de l'année prochaine. Cela retarderait d'autant le démarrage des opérations, car je conçois mal que l'on puisse proposer aux épargnants de devenir coopérateurs dans le réseau des caisses d'épargne sans leur préciser le montant exact des réserves, puisque celles-ci devront être amputées de ce qui devra être versé au titre de la constitution des retraites. Il faut donc que les opérations se déroulent dans un ordre logique : d'abord, conclure la négociation des retraites, et ensuite seulement, engager la poursuite de l'opération. C'est pourquoi nous ne pouvons pas attendre deux ans. Au demeurant, dix-huit mois, c'est tout de même une longue période pour parvenir à un accord !
Quoi qu'il en soit, il est clair que le Gouvernement - je l'ai déjà dit et je le répète - se porte garant de ce que les droits acquis par les salariés seront respectés. La négociation doit se poursuivre et aboutir - sans doute plus rapidement qu'elle n'aurait abouti dans le droit commun - car, sinon, c'est l'ensemble du dispositif qui devient bancal. Mais je suis convaincu que cela ne réduit pas les droits des salariés dans la négociation ! Si celle-ci peut se conclure à la fin de l'année ou au début de l'année prochaine, elle peut aussi se conclure maintenant : c'est une affaire non pas de temps, mais de volonté d'aboutir.
Pour ces différentes raisons, le Gouvernement est hostile à l'amendement n° 188.
Pour ce qui est de l'amendement n° 124, je reprendrai devant vous une explication que j'ai été amené à développer, comme il est naturel, à l'Assemblée nationale, face à des propositions d'amendements similaires. Ces explications ont satisfait vos collègues députés et les ont conduits à retirer leurs amendements. J'espère qu'il en sera de même ici.
S'agissant des caractéristiques fiscales de cette opération, les sommes qui seront versées pour la constitution des droits à la retraite n'auront pas la nature juridique de salaires. Elles créeront donc une situation dans laquelle on passe d'un système de retraite à un autre, mais il n'est pas nécessaire d'introduire une disposition spécifique prévoyant une exonération de l'impôt sur le revenu car, n'étant pas des salaires, elles ne sont pas soumises à celui-ci.
La même remarque est valable s'agissant des cotisations de sécurité sociale : les versements effectués par les caisses d'épargne, s'ils visent au seul maintien des droits d'ores et déjà acquis, n'auront pas le caractère de salaires, et ne seront donc pas assujettis aux charges sociales.
Il s'agit donc, en fait, de reconstituer des versements qui correspondent à une situation qui aurait prévalu si, depuis l'origine, le système de retraite avait été géré par l'ARRCO et par l'AGIRC. Il est donc normal que cela se fasse à fiscalité neutre.
Au bénéfice de cette explication, je vous demande, monsieur Bourdin, de bien vouloir retirer l'amendement n° 124.
Enfin, l'amendement n° 189 vise à provisionner les droits acquis.
J'ai dit un mot à ce sujet quand je me suis exprimé sur l'amendement n° 188 : le Gouvernement s'engage à ce que les droits acquis soient respectés, mais il ne faut pas non plus - et vous l'avez dit vous-même tout à l'heure, madame Beaudeau - interférer dans la négociation. Si nous introduisons dans la loi des éléments qui déséquilibrent cette négociation, nous pourrons difficilement espérer que les partenaires sociaux parviennent à un résultat, et surtout à un résultat rapide !
C'est donc la responsabilité du Gouvernement que de faire respecter les droits acquis, mais ce n'est pas, me semble-t-il, une bonne manière de pousser à la conclusion d'un accord et de faciliter la négociation que de le prévoir dans la loi.
Je ne suis donc pas favorable à cet amendement, et j'en profite pour indiquer brièvement combien j'ai été heureux d'entendre M. le rapporteur non pas soutenir la même thèse - même si cela arrive parfois - mais rappeler à l'occasion du soutien de cette thèse que des mesures avaient d'ores et déjà été prises pour garantir les droits acquis des salariés de la caisse d'épargne pour leur retraite. Il a donc fait référence aux 10 milliards de francs qui ont été inscrits dans les comptes de la Caisse nationale des caisses d'épargne au 31 décembre dernier, ce qui nous conduit bien au taux de 35 % pour le rapport capital sur fonds propres. C'est un retour sur notre discussion précédente, monsieur le rapporteur !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 188, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Monsieur Bourdin, l'amendement n° 124 est-il maintenu ?
M. Joël Bourdin. Les explications qui m'ont été fournies sont si claires que j'aurais mauvaise grâce à ne pas retirer mon amendement !
M. le président. L'amendement n° 124 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 189, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 29.

(L'article 29 est adopté.)

Article 30



M. le président.
« Art. 30. - I. - Les membres du directoire et du conseil d'orientation et de surveillance de chaque caisse d'épargne et de prévoyance sont désignés, dans les conditions précisées à l'article 5, au plus tard treize mois après la publication de la présente loi, pour un premier mandat de trois ans.
« Jusqu'à cette désignation :
« - les mandats des membres des directoires, des conseils d'orientation et de surveillance et des conseils consultatifs des caisses d'épargne et de prévoyance, en fonction à la date de publication de la présente loi, sont prolongés, nonobstant toute disposition relative à la limite d'âge ;
« - les caisses d'épargne et de prévoyance restent régies par les dispositions des titres II et IV de la loi n° 83-557 du 1er juillet 1983 précitée en tant qu'elles ne sont pas contraires aux dispositions de la présente loi. Les membres et présidents de conseil d'orientation et de surveillance peuvent recevoir un défraiement dans des conditions fixées par l'organe central ;
« - les modalités de financement de projets d'économie locale et sociale sont définies par le conseil d'orientation et de surveillance selon les conditions fixées par l'article 6.
« II. - Les titres II et IV de la loi n° 83-557 du 1er juillet 1983 précitée sont abrogés le premier jour du quatorzième mois suivant la date de publication de la présente loi. »
Par amendement n° 146, MM. Angels, Carrère, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, après les mots : « précisées à l'article 5 », de rédiger ainsi la fin du premier alinéa du I de cet article : « pour un premier mandat de trois ans, au plus tard deux ans après la publication de la présente loi et à la condition que 50 % des parts sociales aient été souscrites par des sociétaires. ».
La parole est à M. Carrère.
M. Jean-Louis Carrère. Cet amendement vise à permettre l'élection des nouveaux conseils d'orientation et de surveillance dans de bonnes conditions.
Ces conseils seront élus à partir du moment où il y aura des sociétaires, puisque le collège émanant de ces derniers sera, sinon le plus significatif - j'hésite à employer ce terme - du moins le plus nombreux.
Si nous déclenchions cette opération d'élection concomitamment à la promulgation de la loi, fatalement, sans sociétaire, les conseils d'orientation et de surveillance ne pourraient pas avoir de légitimité.
J'ajoute que la complexité de la mise en oeuvre de la réforme s'ajouterait à une non-représentativité des conseils d'orientation et de surveillance. Si cet amendement n'était pas adopté, je ne suis pas sûr que cette manière d'engager la réforme des statuts de la Caisse d'épargne soit la meilleure !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur. Cet amendement est inspiré par un souci tout à fait louable de légitimité des nouveaux conseils d'orientation et de surveillance : il faut assurément que ceux-ci aient été élus par des sociétaires suffisamment nombreux et détenant déjà une fraction significative du capital.
Je ferai toutefois observer au passage - vous voudrez bien me pardonner cette malice, mon cher collègue - que cela démontre que vous reconnaissez les inconvénients qui peuvent résulter du système des GLE.
En effet, dans le système des GLE, les caisses d'épargne verraient leur capital immédiatement détenu à 100 % par ces derniers en tant que simple structure de portage. Or, vous le dites vous-même : pour que les COS aient une légitimité, il faut que, derrière les GLE, il y ait de véritables porteurs de parts engagés dans la structure coopérative.
Vous relativisez en quelque sorte le système des GLE et raisonnez comme il le faut, c'est-à-dire en fonction de la réalité du sociétariat et non pas de la structure écran qui va porter les parts en attendant qu'elles puissent être diffusées dans le public.
Cela étant dit, l'amendement peut tout à fait s'inscrire dans la logique des propositions de la commission des finances visant à établir un sociétariat direct, et c'est pourquoi j'émettrai un avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 146, accepté par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 30, ainsi modifié.
(L'article 30 est adopté.)
M. le président. A la demande du Gouvernement, le Sénat va maintenant interrompre ses travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures vingt, est reprise à dix-huit heures vingt-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

SECONDE PARTIE

DU RENFORCEMENT
DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE

M. Philippe Marini, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. Au moment où nous entamons l'examen de la seconde partie du texte, abandonnant les caisses d'épargne pour aborder le thème de la sécurité financière, je tiens à indiquer la logique et les grandes lignes des propositions de la commission. Cela nous permettra d'ailleurs d'accélérer le débat lors de l'examen des articles.
S'agissant des caisses d'épargne, notre logique a été bien comprise, même si elle n'a pas été admise par tous.
Pour ce qui est de la sécurité financière, nous avons posé cinq principes.
Le premier principe, c'est de garantir les intérêts des épargnants et non la survie des entreprises.
Il faut éviter l'écueil consistant à maintenir à tout prix, à flots, et à grands frais, des établissements non viables, situation contraire au droit de la concurrence et aux intérêts globaux de l'économie.
A cet égard, la commission propose, en particulier, deux dispositifs.
Premièrement, lorsque les fonds de garantie sont amenés à intervenir à titre préventif à la demande des autorités publiques, il est nécessaire qu'ils posent des conditions, telles que la cession totale ou partielle de l'établissement, ou l'extinction de son activité.
Deuxièmement, lorsque les fonds de garantie interviennent à titre curatif, c'est-à-dire pour indemniser les clients, il doit être précisé que l'établissement se voit retirer l'agrément lui permettant d'exercer son activité.
Le deuxième principe consiste à préciser les modalités de financement des fonds de garantie.
S'agissant du fonds de garantie des dépôts, tous les établissements adhérents ne seront pas nécessairement teneurs de comptes pour compte de tiers. C'est pourquoi la commission propose de préciser que ces établissements seront tenus d'acquitter une cotisation minimale forfaitaire, qui devrait être quasi symbolique.
En outre, le mode de calcul des contributions principales mérite d'être précisé.
Ces contributions doivent reposer sur une assiette : les dépôts pour la garantie des dépôts, la valeur des instruments financiers pour la garantie des investisseurs et, enfin, les provisions mathématiques pour la garantie des assurés.
Ensuite, des pondérations doivent intervenir afin d'atténuer ou de majorer la cotisation due par chaque adhérent en fonction du risque objectif que fait courir l'établissement au fonds de garantie.
La commission propose également de prévoir que la moitié au moins des cotisations ne seront pas appelées.
Constante dans ses positions à l'égard de la contribution des institutions financières, dont elle conteste le bien-fondé, la commission propose de majorer le crédit d'impôt de contribution des institutions financières auquel donne droit la cotisation aux divers fonds de garantie.
Le troisième principe consiste à instaurer un dialogue équitable entre les professionnels et les autorités publiques.
Le présent projet de loi renforce les pouvoirs des autorités publiques, mais il confie aux professionnels plus de responsabilités et de charges dans le traitement des crises. Un dialogue équilibré s'impose.
Cela conduit en particulier à considérer que les présidents du conseil de surveillance des différents fonds de garantie seront plus représentatifs des professionnels que les présidents de directoire. Il convient donc qu'ils puissent être entendus par les autorités publiques lorsque celles-ci envisagent l'intervention des fonds. De même, il paraît plus convenable que le président du conseil de surveillance du fonds de garantie des dépôts et des titres soit membre du comité des établissements de crédit et des entreprises d'investissement, le CECEI.
S'agissant du cas particulier du fonds de garantie des assurés, la commission propose qu'en cas de conflit entre le président du directoire et la commission de contrôle des assurances, une commission arbitrale intervienne et que le ministre de l'économie demande à la CCA une nouvelle délibération.
Le quatrième principe tend à renforcer la sécurité de la place et l'efficacité des dispositifs prévus.
La commission propose tout d'abord un dispositif de transposition, qui n'a que trop tardé, de la directive 95/26/LCE du Conseil relative au renforcement de la surveillance prudentielle des établissements de crédit, des entreprises d'assurance, des entreprises d'investissement et des institutions de prévoyance, en particulier lorsqu'ils font partie d'un groupe, dite directive « post BCCI. »
La commission propose ensuite de poser le principe de la mise en place, à terme, d'un dispositif de garantie légale pour les mutuelles et les institutions de prévoyance.
Elle propose enfin une série de modifications destinées à renforcer les dispositifs de sécurité prévus par le présent projet, que j'exposerai lors de l'examen des différents amendements.
S'agissant du fonds de garantie des investisseurs, il est proposé d'étendre son champ d'application à la couverture des porteurs de titres d'OPCVM lorsque ces porteurs sont des personnes physiques.
Le cinquième et dernier principe vise à rétablir une liberté limitée pour la rémunération des parts sociales des établissements coopératifs.
La commission propose de rétablir partiellement le dispositif initialement prévu à l'article 37 du présent projet de loi qui déplafonnait l'intérêt attaché aux parts sociales des banques coopératives.
Sans supprimer le principe du plafonnement, votre commission souhaite introduire une faculté d'y déroger pour les banques coopératives. Elles devraient en ce cas prévoir cette faculté dans leurs statuts, il s'agit là d'un dispositif plus protecteur que la suppression pure et simple du plafond, qui serait d'application directe.

TITRE Ier


DISPOSITIONS RELATIVES À LA SURVEILLANCE DES ÉTABLISSEMENTS DE CRÉDIT, DES ENTREPRISES D'INVESTISSEMENT ET DES ENTREPRISES D'ASSURANCE ET À LA COOPÉRATION ENTRE AUTORITÉS DE CONTRÔLE

M. le président. Par amendement n° 233, M. Marini, au nom de la commission, propose, dans l'intitulé de ce titre, de remplacer les mots : « et des entreprises d'assurance » par les mots : « , des entreprises d'assurance et des institutions de prévoyance ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. L'amendement n° 233 est un amendement de coordination avec l'introduction dans ce texte du dispositif post-BCCI que je viens d'évoquer, lequel traite également des institutions de prévoyance.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. S'il y a un fonds unique des dépôts en matière bancaire, c'est parce qu'il y a un droit unique des activités bancaires. Ce point ne soulève pas de difficulté.
En revanche, en matière d'assurances, les droits en cause sont différents. Il en existe trois, qui concernent des situations différentes, selon qu'elles découlent des assurances, de la mutualité ou de la sécurité sociale.
Nous ne pouvons pas couvrir, avec le même fonds de garantie, des structures qui relèvent de droits différents. C'est la raison pour laquelle le texte ne prévoit pas cette extension. Il faut deux autorités : la commission de contrôle des assurances et la commission de contrôle des mutuelles.
Je ne suis pas sûr, dans ces conditions, que nous ayons une possibilité, qui soit fondée juridiquement, de procéder à l'extension que vous souhaitez aux institutions de prévoyance.
Selon mon opinion, même si, sur le plan de la réflexion, il peut sembler séduisant d'étendre le fonds de garantie, tel qu'il a été prévu, aux institutions de prévoyance, nous nous mettons là dans une situation juridique délicate.
Il n'en sera pas de même lorsque la transposition de la directive européenne sur les mutuelles aura été opérée. Mais ce n'est pas encore le cas. Il me semble donc que nous anticipons sur le droit interne, ce qui ne me paraît pas juridiquement satisfaisant.
Je ne peux pas accepter cet amendement, même si son esprit me semble fondé. Il faut attendre que la directive européenne sur les mutuelles ait été transposée en droit interne pour que, l'unification du droit ayant eu lieu, il soit possible de procéder éventuellement à cette extension.
M. le président. Monsieur le rapporteur, l'amendement n° 233 est-il maintenu ?
M. Philippe Marini, rapporteur. Je ne partage pas tout à fait l'argumentaire de M. le ministre, dans la mesure où il s'agit là de l'intitulé du titre Ier et non pas du dispositif. Or cet intitulé doit être cohérent avec l'ensemble des dispositions qui vont figurer dans ce titre.
Si les propositions de la commission sont suivies, nous allons transposer la directive européenne dite post-BCCI, et non pas la directive sur les mutuelles, qui, si je ne me trompe, couvre les institutions de prévoyance dans le cadre du contrôle des conglomérats financiers.
Donc, c'est seulement à ce titre et pour que l'architecture du texte soit bien correcte que l'on englobe sous le bon tronçon toutes les colonnes qui vont soutenir le temple que nous sommes en train d'édifier. C'est uniquement dans ce but d'architecture et dans nul autre but que l'amendement n° 233 a été conçu.
M. le président. Monsieur le ministre, après ces explications, maintenez-vous votre avis défavorable ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. S'il s'agit simplement de faire de l'architecture, comme vous le dites, monsieur le rapporteur, sans pour autant que le dispositif suive, alors, il n'y a pas de difficulté.
Mais vous conviendrez avec moi que, pour avoir un dispositif qui puisse couvrir les institutions de prévoyance, il faudra que nous attendions que le droit ait évolué.
Quant au titre et au chapeau général donc, soit !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 233, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'intitulé du titre Ier du projet de loi est ainsi modifié.

Chapitre Ier


Surveillance des établissements de crédit, des entreprises d'investissement et des entreprises d'assurance

M. le président. Par amendement n° 234, M. Marini, au nom de la commission, propose, à la fin de l'intitulé de ce chapitre, de remplacer les mots : « et des entreprises d'assurance » par les mots : « , des entreprises d'assurance et des institutions de prévoyance ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. Il s'agit d'un amendement du même ordre que le précédent.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 234, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'intitulé du chapitre Ier est donc ainsi modifié.

Article 31



M. le président.
« Art. 31. - Il est inséré, après le troisième alinéa de l'article 15 de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 relative à l'activité et au contrôle des établissements de crédit, un alinéa ainsi rédigé :
« Le comité peut limiter l'agrément qu'il délivre à l'exercice de certaines opérations définies par l'objet social du demandeur. » - (Adopté.)

Article 32



M. le président.
« Art. 32. - L'article 21 de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 précitée est ainsi modifié :
« 1° Le troisième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Les contrôles sur place des organes centraux peuvent être étendus à leurs filiales, directes ou indirectes, ainsi qu'à celles des établissements qui leur sont affiliés. » ;
« 2° Le deuxième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Ils peuvent également décider d'interdire ou de limiter la distribution d'un dividende aux actionnaires ou d'une rémunération des parts sociales aux sociétaires des établissements de crédit ou des entreprises d'investissement qui leur sont affiliés. » ;
« 3° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Après en avoir informé la Commission bancaire et sous réserve des compétences du Comité des établissements de crédit et des entreprises d'investissement, les organes centraux peuvent, lorsque la situation financière des établissements concernés le justifie, et nonobstant toutes dispositions ou stipulations contraires, décider la fusion de deux ou plusieurs personnes morales qui leur sont affiliées, la cession totale ou partielle de leur fonds de commerce ainsi que leur dissolution. Les organes dirigeants des personnes morales concernées doivent au préalable avoir été consultés par les organes centraux. Ces derniers sont chargés de la liquidation des établissements de crédit qui leur sont affiliés ou de la cession totale ou partielle de leur fonds de commerce. »
Par amendement n° 235, M. Marini, au nom de la commission, propose :
I. - Dans le cinquième alinéa de cet article, après les mots : « aux actionnaires » d'insérer le mot : « dirigeants. »
II. - Dans le même alinéa, après les mots : « aux sociétaires » d'insérer le mot : « dirigeants .»
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. L'article 32 prévoit un nouveau pouvoir de sanction des organes centraux qui pourront désormais limiter ou interdire la distribution d'un dividende aux actionnaires ou d'une rémunération des parts sociales aux sociétaires des établissements de crédit ou des entreprises d'investissement qui leur sont affiliées.
Dans l'esprit du texte il importe, me semble-t-il, de limiter ce pouvoir de sanction aux seuls actionnaires ou sociétaires dirigeants, afin de considérer que l'actionnaire bancaire qui n'a pas de fonctions dirigeantes dans l'entité concernée est un actionnaire comme les autres et de responsabiliser de façon plus efficace les dirigeants à la bonne gestion de leur établissement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je crois que nous n'avons pas le même objectif, monsieur le rapporteur.
Votre restriction est une sanction, et vous l'avez d'ailleurs évoqué dans votre argumentaire. En revanche, le Gouvernement cherche non pas tant à sanctionner ceux qui ne pourraient plus bénéficier de dividendes, mais plutôt à garantir une logique financière visant à éviter la distribution de dividendes pour améliorer la situation financière.
Le problème n'est pas de sanctionner particulièrement certains responsables par rapport à d'autres, il s'agit de conserver le plus de ressources possibles à l'intérieur de l'établissement financier pour éviter une fragilisation qui résulterait d'une distribution de dividendes.
Notre dispositif doit donc bien viser tout le monde. Il répond en effet non à une logique de sanction, mais à une logique de solidité financière.
M. Philippe Marini, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. J'ai été convaincu par le propos de M. le ministre : je retire donc l'amendement n° 235.
M. le président. L'amendement n° 235 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 32.

(L'article 32 est adopté.)

Article 33



M. le président.
« Art. 33. - Les articles 30, 31 et 31-1 de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 précitée sont ainsi modifiés :
« 1° Au troisième alinéa de l'article 30, les mots : "ou son représentant" sont insérés après les mots : "le président de la Commission des opérations de bourse" et après les mots : "le président du Conseil des marchés financiers" ;
« 2° Au deuxième alinéa de l'article 31, les mots : "ou leur représentant" sont insérés après les mots : "la demande d'agrément" ;
« 3° Dans le deuxième alinéa de l'article 31, après les mots : "de la personne dont le comité examine la demande d'agrément,", sont insérés les mots : "le président du directoire du fonds de garantie mentionné aux articles 52-1 et suivants de la présente loi, ou un membre du directoire le représentant," ;
« 4° Le troisième alinéa de l'article 31 est supprimé ;
« 5° Après le quatrième alinéa de l'article 31, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« En cas d'urgence constatée par son président, le comité peut statuer par voie de consultation écrite sur une proposition de décision, selon des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat. Le comité peut déléguer à son président le pouvoir de prendre des décisions ou d'accorder des autorisations ou dérogations individuelles, sauf en matière d'agrément, de retrait d'agrément ou de changement de contrôle effectif d'un établissement assujetti, à l'exception des dispositions prévues au dernier alinéa de l'article 21 et à l'article 46-1 de la présente loi. » ;
« 6° Le dernier alinéa de l'article 31-1 est supprimé. »
Par amendement n° 26, M. Marini, au nom de la commission propose, dans le quatrième alinéa ( 3° ) de cet article, de remplacer deux fois le mot : « directoire » par les mots : « conseil de surveillance ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. Cet amendement a pour objet de prévoir que le président du conseil de surveillance du fonds de garantie des dépôts - et non pas le président du directoire - est membre de droit du comité des établissements de crédit et des entreprises d'investissement.
Monsieur le ministre, nous souhaiterions surtout vous entendre sur ce point, car nous voudrions être assurés que l'autorité qui siégera au CECEI sera bien un professionnel, ou un représentant des professionnels, et non pas un technicien, un haut fonctionnaire détaché, en d'autres termes, qu'il s'agisse bien d'un homme de pratique, issu de la profession et qui ait une certaine légitimité dans cette profession.
C'est plus une question de profil qu'une question strictement juridique.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Sur le principe, monsieur le rapporteur, c'est bien le président du directoire qui a qualité, dans les sociétés à conseil de surveillance et à directoire, à représenter la société vis-à-vis des tiers. En outre, convenez avec moi que c'est lui qui dispose de l'information, beaucoup plus que le président du conseil de surveillance.
Par conséquent, selon la tradition - pour la légalité, d'une part, et l'efficacité, d'autre part - ce doit être le président du directoire.
J'ai peur de comprendre la crainte que vous avez exprimée de voir un haut fonctionnaire entretenir des relations consanguines avec l'organe dans lequel il devra siéger. (Sourires.) Vous avez raison ! Les fonctionnaires doivent rester dans la fonction publique. On se demande bien ce qu'ils iraient faire à gérer les fonds de garantie ou à se faire élire au Sénat, ou ailleurs. (Nouveaux sourires.) Cela n'a aucune logique ! Pourtant, cela arrive parfois.
Mais je vous rassure : il est bien prévu que ce soit un professionnel. Comme j'ai d'ailleurs eu l'occasion de le dire au Sénat à propos du président du directoire des caisses d'épargne - et vous conviendrez avec moi que cela a été suivi - c'est bien un professionnel qui doit être le président du directoire. Cette précision devrait lever vos craintes.
M. le président. Monsieur le rapporteur, l'amendement est-il maintenu ?
M. Philippe Marini, rapporteur. Sous le bénéfice de ces explications, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 26 est retiré.
Par amendement n° 27, M. Marini, au nom de la commission, propose de supprimer le cinquième alinéa (4°) de l'article 33.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. Cet amendement a pour objet de rétablir la présence, au sein du comité des établissements de crédit et des entreprises d'investissement, d'un représentant de l'organe professionnel ou de l'organe central auquel est affiliée ou est susceptible d'être affiliée l'entreprise requérante dont le comité va examiner la situation.
La suppression de cette présence avait été présentée dans le projet de loi comme la contrepartie à l'entrée dans le CECEI du président du fonds de garantie. Nous souhaiterions vous entendre sur ce point, monsieur le ministre.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Il est prévu que le président du fonds de garantie puisse représenter l'ensemble des établissements de crédit.
J'ai évoqué le thème de la maison commune, qui m'est cher, et le président du fonds de garantie, puisque le fonds de garantie couvre justement tous les types d'établissements de crédit, a justement cette capacité à représenter l'ensemble.
Il faut que ce soit un professionnel, nous en sommes d'accord et nous nous en sommes expliqués à propos de l'amendement précédent.
Mais, au bout du compte, ce qui est important, c'est que siège au CECEI une personne qui dispose de l'information sur les situations plus ou moins bonnes des différents établissements et qu'elle en informe le Comité. Or qui mieux que le président du fonds de garantie a cette information, puisque son métier consiste précisément à vérifier que les différents établissements remplissent selon les cas, bien, moins bien ou peut-être mal, les conditions de solvabilité qui leur sont imposées ?
Il me paraît donc opportun et même logique que le président du fonds représente l'ensemble des établissements de crédit.
Par ailleurs, dans la mesure où il s'agit, je l'ai déjà précisé tout à l'heure, d'un professionnel, je crois que, là aussi, vos craintes peuvent être levées.
Nous aurons ainsi au CECEI une représentation efficace, puisqu'il s'agira de la personne, sur l'ensemble de la place financière de Paris, qui sera la mieux à même d'avoir l'information sur la solidité financière des différentes institutions.
En conséquence, monsieur le président, je ne suis pas favorable à l'amendement.
M. Philippe Marini, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. Cette fois, je ne suis pas complètement convaincu par l'argumentation de M. le ministre, car il peut arriver que des membres de professions relativement restreintes ne se sentent pas représentés par les personnes siégeant au sein du CECEI. Cette remarque nous a été faite notamment par les courtiers, mais il existe sans doute d'autres exemples de ce type parmi les divers métiers financiers.
Il nous semble que cet amendement devrait être adopté, car cela permettrait à de telles professions d'être représentées au CECEI pour les affaires qui les concernent et seulement pour celles-ci.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 27, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 33, ainsi modifié.

(L'article 33 est adopté.)

Article 34



M. le président.
« Art. 34. - L'article 43 de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 précitée est ainsi rédigé :
« Art. 43 . - La Commission bancaire peut adresser à un établissement de crédit une recommandation de prendre les mesures appropriées pour restaurer ou renforcer sa situation financière, améliorer ses méthodes de gestion ou assurer l'adéquation de son organisation à ses activités ou à ses objectifs de développement. L'établissement concerné est tenu de répondre dans un délai de deux mois en détaillant les mesures prises à la suite de cette recommandation.
« La Commission bancaire peut, indépendamment des dispositions prévues à l'alinéa précédent, adresser à tout établissement de crédit, entreprise ou personne soumis à son contrôle en application de l'article 37-1 une injonction à l'effet notamment de prendre dans un délai déterminé toutes mesures destinées à restaurer ou renforcer sa situation financière, à améliorer ses méthodes de gestion ou à assurer l'adéquation de son organisation à ses activités ou à ses objectifs de développement. »
Par amendement n° 236, M. Marini, au nom de la Commission propose, après la première phrase du premier alinéa du texte présenté par cet article pour l'article 43 de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 relative à l'activité et au contrôle des établissements de crédit, d'insérer deux phrases ainsi rédigées : « Cette recommandation est communiquée pour information aux commissaires aux comptes de l'établissement de crédit concerné. Cette communication est couverte par la règle de secret professionnel. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. Cet amendement prévoit que la commission bancaire communique pour information la recommandation qu'elle prend à l'égard d'un établissement de crédit aux commissaires aux comptes de celui-ci.
Cette coordination paraît logique et nécessaire. Les commissaires aux comptes seront ainsi informés des recommandations que la Commission bancaire pourrait faire aux dirigeants, celles-ci pouvant avoir des répercussions financières et comptables dont il est bon qu'ils aient communication.
Afin d'éviter que les commissaires aux comptes ne publient cette information dans leur rapport de certification des comptes et ne dénaturent ainsi la recommandation en sanction disciplinaire, il est prévu d'en soumettre la communication aux règles du secret professionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Revenons un instant, si vous le voulez bien, monsieur le rapporteur, à l'objet de ce dispositif.
Il vise à donner à la Commission bancaire une action préventive. Or l'action préventive, vous le reconnaîtrez avec moi, suppose la confidentialité, car s'il n'y a plus de confidentialité l'action n'est plus préventive. Elle est mise sur la place publique, qui peut être plus ou moins publique, mais, dans tous les cas, nous savons que les informations circulent.
Dès lors, il devient beaucoup plus difficile à la Commission bancaire de donner des indications visant à la prévention si la crainte la saisit, incontinent, de voir ces informations diffusées dans l'ensemble du public, avec des conséquences beaucoup plus graves que la simple mise en garde ou prévention qu'elle voulait opérer.
Je sais bien, vous venez de le répéter, que la recommandation que vous prévoyez de faire communiquer aux commissaires aux comptes serait soumise au secret professionnel. Malheureusement, si je respecte au plus haut point la qualité des commissaires aux comptes, en particulier leur respect du secret professionnel, force est de constater que, dans un certain nombre de circonstances, une information a pu circuler.
Je ne voudrais pas, ne serait-ce que parce qu'un seul de ces commissaires aux comptes pourrait un jour être pris en défaut - il y a des erreurs de ce type dans toutes les professions - risquer d'affaiblir le dispositif que nous souhaitons instituer.
Si nous voulons véritablement instaurer de la prévention, il faut qu'il y ait une relation totalement confidentielle entre l'organisme qui est à l'origine des indications et ceux qui en sont les destinataires.
Je me permettrai une comparaison qui vaut ce qu'elle vaut. Au sein du Fonds monétaire international, nous réfléchissons à des modalités d'action préventive en direction des pays qui ont des difficultés financières.
De la même manière, pour que l'action soit véritablement préventive, pour qu'elle ne déclenche aucun mécanisme de rejet, soit dans le pays, soit de la part des différents spéculateurs, un des éléments majeurs qui a été retenu par le FMI est justement la confidentialité totale.
La comparaison n'est pas parfaite, bien entendu, car les situations sont différentes. Néanmoins, c'est le même esprit. Si nous voulons de la prévention, l'organisme qui en est chargé doit pouvoir transmettre ses informations à l'établissement concerné sans craindre qu'elles ne soient à l'origine d'une détérioration de la situation.
Par conséquent, il est du plus grand intérêt, me semble-t-il, de conserver la confidentialité de ces mises en garde préventives.
M. Philippe Marini, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. Si le texte ne faisait pas l'objet d'une procédure d'urgence - ce que, par ailleurs, je regrette - je recommanderais au Sénat d'adopter l'amendement n° 236 et nous prendrions le temps nécessaire pour mieux élucider ce point.
Mais l'urgence a été déclarée. Même si les éléments de réponse apportés par M. le ministre méritent examen et réflexion, s'agissant notamment du risque de détérioration de la situation de l'établissement faisant l'objet de l'approche préventive, nous n'aurons pas le temps nécessaire pour revenir sur ce sujet. Je vais donc, si vous le voulez bien, mes chers collègues, et pensant ne pas trahir les positions de la commission des finances, retirer l'amendement n° 236, compte tenu de l'explication donnée par M. le ministre.
M. le président. L'amendement n° 236 est retiré.
Par amendement n° 28, M. Marini, au nom de la commission, propose, dans le second alinéa du texte présenté par l'article 34 pour l'article 43 de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 relative à l'activité et au contrôle des établissements de crédit de remplacer le mot : « soumis » par le mot : « soumise ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. Il s'agit d'une rectification d'erreur matérielle.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 28, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 237, M. Marini, au nom de la commission, propose de compléter in fine le deuxième alinéa du texte présenté par l'article 34 pour l'article 43 de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 relative à l'activité et au contrôle des établissements de crédit par deux phrases ainsi rédigées :
« Cette injonction est communiquée pour information aux commissaires aux comptes de l'entité concernée. Cette communication est couverte par la règle de secret professionnel. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. Cet amendement va de pair avec l'amendement n° 236, puisqu'il s'agit de prévoir que la Commission bancaire communique pour information aux commissaires aux comptes l'injonction qu'elle prend à l'égard d'une entité.
Je suppose que M. le ministre utilisera la même argumentation que tout à l'heure. M'étant rallié à cette argumentation, je retire donc aussi cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 237 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 34, modifié.

(L'article 34 est adopté.)

Article 35



M. le président.
« Art. 35. - Les trois premiers alinéas de l'article 50 de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 précitée sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :
« Le ministre chargé de l'économie nomme un commissaire du Gouvernement auprès de tout organe central mentionné à l'article 20 ou établissement de crédit lorsque l'Etat leur a confié des prérogatives de puissance publique ou une mission d'intérêt public. »
Par amendement n° 29, M. Marini, au nom de la commission, propose, dans le texte présenté par l'article 35 pour remplacer les trois premiers alinéas de l'article 50 de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 relative à l'activité et au contrôle des établissements de crédit, de remplacer le mot : « nomme » par les mots : « peut nommer ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. Cet amendement a pour objet de revenir à la rédaction initiale de l'article qui a été proposée par le Gouvernement et qui prévoit que le ministre chargé de l'économie a la faculté - et non l'obligation - de nommer un commissaire du Gouvernement auprès de tout organe central ou établissement de crédit lorsque l'Etat a confié à cet organe central ou à cet établissement de crédit des prérogatives de puissance publique ou une mission d'intérêt public. Exemple et illustration : les caisses d'épargne.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je suis sensible au fait que M. le rapporteur souhaite revenir au texte initial du Gouvernement. Néanmoins, je pense que l'amélioration apportée par l'Assemblée nationale est intéressante.
En effet, lorsqu'une mission d'intérêt public a été confiée, je ne pense pas qu'il faille se limiter à une « possibilité » de nomination par le Gouvernement d'un commissaire du Gouvernement. Il faut que ce soit obligatoire. Pourquoi ?
Ce n'est pas tellement parce que, dans chacun des cas, on aurait obligatoirement besoin d'un commissaire du Gouvernement ; sur ce point, vous avez raison. C'est parce que, chaque fois que le Gouvernement ne nommera pas un commissaire du Gouvernement, une sorte de suspicion pèsera sur le caractère réel de la mission d'intérêt public.
Vous mettez le Gouvernement, les gouvernements à venir, dans une situation impossible : ou bien ils nommeront à chaque fois un commissaire du Gouvernement, et ce n'est alors pas la peine de changer le texte de l'Assemblée nationale, ou bien, parfois, ils ne le feront pas, et vous êtes trop connaisseur de ces choses pour ne pas imaginer ce qui sera écrit dans la presse et dans les gazettes ! On se demandera pourquoi, dans tel cas, il n'y a pas eu nomination d'un commissaire du Gouvernement et tout un débat s'instaurera sur la réalité de la mission d'intérêt public !
C'est donc rendre un mauvais service au gouvernement qui, un jour peut-être, finira par succéder à celui-ci, et au nôtre aussi, que de le mettre dans une situation inconfortable, dont je sais par avance qu'il la tranchera en nommant systématiquement un commissaire du Gouvernement. Faisons donc en sorte que le droit colle à la réalité et restons-en au texte de l'Assemblée nationale !
Votre intention est juste : vous avez raison de souligner qu'une nomination n'est pas obligatoirement nécessaire dans chaque cas, mais la réalité à la fois politique et institutionnelle rendra votre amendement inopérant. Il est donc plus correct et plus transparent de rester sur la position de l'Assemblée nationale, et c'est ce à quoi je vous invite.
M. Philippe Marini, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. On peut laisser du temps au temps, maintenir cette faculté et n'exprimer aucune obligation. Si les inconvénients signalés par le ministre sont bien réels, il suffira d'un petit article au sein d'un quelconque projet de loi portant DDOEF dans je ne sais combien de temps, pour rectifier ce petit aspect des choses !
Quand je vous écoutais, je me disais qu'après tout un futur gouvernement pourrait adopter un autre comportement et ne nommer aucun commissaire du Gouvernement. C'est aussi une façon de résoudre la difficulté et, peut-être, de simplifier les procédures !
Ce n'est pas un point bien essentiel. N'ayant pas été, cette fois-ci, totalement convaincu, monsieur le ministre, je maintiens donc cet amendement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 29.
M. Marc Massion. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Massion.
M. Marc Massion. Contrairement à ce qu'a dit M. le rapporteur, il nous semble utile de systématiser la nomination d'un commissaire du Gouvernement dans tout organisme privé qui exerce des prérogatives de puissance publique ou une mission d'intérêt public.
Nous sommes donc contre cet amendement.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 29, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 35, ainsi modifié.

(L'article 35 est adopté.)

Article 36



M. le président.
« Art. 36. - I. - Après le deuxième alinéa de l'article 51 de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 précitée, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les établissements de crédit doivent également disposer d'un système adéquat de contrôle interne leur permettant notamment de mesurer les risques et la rentabilité de leurs activités. Lorsque la surveillance est exercée sur la base de la situation financière consolidée, les groupes financiers doivent adopter des procédures de contrôle interne adéquates pour la production des informations et renseignements utiles aux fins de l'exercice de cette surveillance. Un règlement du Comité de la réglementation bancaire et financière définit les conditions d'application du présent alinéa. »
« II. - Après l'article 57 de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 précitée, il est inséré un article 57-1 ainsi rédigé :
« Art. 57-1 . - Pour les besoins de la surveillance sur la base de la situation financière consolidée d'un ou plusieurs établissements de crédit ou entreprises d'investissement ayant leur siège social dans un Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen, les entreprises établies en France et qui font partie du groupe financier ou de la compagnie mixte auquel appartiennent ces établissements de crédit ou entreprises d'investissement sont tenues, nonobstant toutes dispositions législatives contraires, de transmettre les renseignements nécessaires à des entreprises du même groupe ayant leur siège social dans un Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen.
« Les personnes recevant ces informations sont tenues au secret professionnel dans les conditions et sous les peines visées au précédent article, pour tous renseignements ou documents qu'elles seraient ainsi amenées à recevoir ou à détenir.
« Les dispositions du présent article ne font pas obstacle à l'application de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés. » - (Adopté.)

Article 37



M. le président.
L'article 37 a été supprimé par l'Assemblée nationale.
Mais, par amendement n° 30 rectifié, M. Marini, au nom de la commission, propose de rétablir cet article dans la rédaction suivante :
« L'article 14 de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 précitée est ainsi modifié :
« 1° Après les mots : "est au plus égal", la fin de cet article est ainsi rédigée : "à la moyenne annuelle du taux à échéance constante à dix ans (TEC 10), calculé quotidiennement par le comité de normalisation obligataire, plus un point" ».
« 2° Cet article est complété par un second alinéa ainsi rédigé :
« Les statuts des coopératives qui sont agréées en qualité de banque mutualiste ou coopérative peuvent toutefois prévoir que l'assemblée générale extraordinaire des associés peut déroger à cette disposition. Les dispositions de l'article 17 de la présente loi ne sont alors pas applicables. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 262 présenté par M. Deneux et les membres du groupe de l'Union centriste, et tendant : « après les mots : "(TEC 10)", à rédiger ainsi la fin du troisième alinéa du texte de l'amendement n° 30 rectifié : ", c'est-à-dire le taux de rendement actuariel d'une valeur du trésor fictive dont la durée de la vie serait égale, à chaque instant, à 10 ans, calculé quotidiennement par le comité de normalisation obligataire." ».
La parole est à M. Marini, pour présenter l'amendement n° 30 rectifié.
M. Philippe Marini, rapporteur. Monsieur le ministre, la commission va dans votre sens, puisqu'elle tâche d'imaginer un dispositif permettant raisonnablement le déplafonnement du taux de rémunération des parts sociales pour les coopératives agréées en tant que banques.
L'article 14 de la loi sur la coopération du 10 septembre 1947 plafonne le montant de l'intérêt que les coopératives peuvent servir à leurs sociétaires. Ce plafond est déterminé par référence au taux moyen de rendement des obligations des sociétés privées, le TMO.
Tout d'abord, il est indispensable de substituer à cet indicateur, qui n'est plus utilisé, le taux représentatif du taux de rendement actuariel des emprunts d'Etat à dix ans majoré d'un point, substitution évoquée avec les professionnels eux-mêmes.
Sur le principe du déplafonnement, l'article 37, qui a été supprimé par l'Assemblée nationale, prévoyait, dans sa version initiale, de faire exception pour les seules sociétés coopératives agréées en qualité de banque à ce plafonnement, qui est général en droit de la coopération. Il assignait, en outre, aux banques mutualistes et coopératives les mêmes obligations que celles qui sont prévues par l'article 6 pour les caisses d'épargne en matière d'affectation du résultat distribuable.
Notre amendement est quelque peu différent du dispositif que vous avez initialement prévu, puisqu'il donne la faculté aux coopératives bancaires de décider, par une révision de leur statut et à la majorité qualifiée, le déplafonnement de l'intérêt servi à leurs sociétaires.
Cela signifie, je le répète, que seule l'assemblée générale extraordinaire des associés peut exercer cette option.
Cela signifie encore davantage que seuls les dirigeants de la coopérative peuvent soumettre à l'assemblée générale une résolution au terme de laquelle ce déplafonnement serait réalisé. Ce dernier ne doit pas avoir pour effet d'appauvrir les établissements de crédit coopératifs ou mutualistes en puisant dans leurs réserves.
Il faut, me semble-t-il, écarter expressément les dispositions de l'article 17 de la loi de 1947, qui prévoit cette possibilité de puiser dans les réserves en cas d'insuffisance de résultat.
Monsieur le ministre, ces dispositions me semblent équitables, ne compromettre en rien les principes du droit de la coopération auxquels nous tenons beaucoup et de nature à faire évoluer les choses de façon raisonnable. Au cours du débat, vous avez dit in medio stat virtus. Nous avons essayé de nous conformer à ce principe.
M. le président. La parole est à M. Badré, pour défendre le sous-amendement n° 262.
M. Denis Badré. Ce sous-amendement tend à retenir comme plafond de rémunération des parts sociales le taux de rendement actuariel des emprunts d'Etat à dix ans, principal indicateur obligataire des marchés. M. le rapporteur vient de préciser que le TMO n'est plus usité. Nous sommes bien dans la même logique.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ce sous-amendement ?
M. Philippe Marini, rapporteur. Il ne me semble pas possible d'accepter cette modification du plafond. Dans l'amendement n° 262, nous substituons au TMO le TEC majoré d'un point. Si nous retenions le TEC sans majoration, comme il est inférieur au TMO, le plafonnement serait plus bas que dans le statu quo , ce qui ne serait pas raisonnable.
M. Denis Badré. Dans tous les cas ?
M. Philippe Marini, rapporteur. En tout cas dans la situation actuelle, compte tenu de la courbe des taux d'intérêt. Je ne peux pas jurer que cette échelle sera toujours la même.
Je pense qu'au bénéfice de cette explication nos collègues devraient retirer le sous-amendement n° 262.
M. le président. Monsieur Badré, maintenez-vous le sous-amendement n° 262 ?
M. Denis Badré. Les membres du groupe de l'Union centriste ont comme seul souci d'essayer de faire du très bon travail. Cela étant, mon collègue Marcel Deneux aurait sûrement été convaincu par les arguments développés par M. le rapporteur. Je pense donc être en droit de retirer ce sous-amendement.
M. le président. Le sous-amendement n° 262 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 30 rectifié ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Le Gouvernement est admiratif devant la qualité technique des amendements qui sont proposés par les sénateurs et la qualité technique non moins grande de leur réfutation.
Revenons à l'amendement.
Comme je l'ai déjà dit, l'article 37 a été mal rédigé, je suis donc mal placé pour émettre des critiques. J'ai accepté sa suppression à l'Assemblée nationale de façon que nous ayons le temps de réfléchir, conjointement avec les organismes concernés, à la mise en place d'un dispositif plus satisfaisant.
Vous proposez une solution qui va dans le bon sens, monsieur le rapporteur. Je ne suis pas sûr pour autant que nous puissions la retenir en l'état.
D'abord, la concertation qui a été engagée avec l'ensemble du mouvement coopérative n'est pas terminée. Or, il me semble que nous devons à ces organismes d'attendre leurs propositions. C'est là un argument de forme, auquel, j'en suis sûr, vous serez sensible, monsieur le rapporteur.
Au demeurant, en l'état, l'amendement ne me paraît pas totalement satisfaisant. Ainsi, il fait référence aux OAT. Je sais bien que le caractère un peu désuet du TMO nous impose de choisir un autre indicateur, mais il convient d'en choisir un qui reflète la situation du secteur privé et non pas la situation de l'émetteur souverain.
Il y aurait tout de même un paradoxe à vouloir plafonner la rémunération de titres qui - vous l'avez suffisamment souligné, monsieur le rapporteur - relèvent d'une activité analogue à une activité privée, en la comparant - fût-ce majorée d'un point - à l'évolution des rémunérations des titres du secteur public.
Monsieur le rapporteur, vous ne pouvez pas à la fois avoir défendu, tout au long du débat, la thèse d'une institution de nature privée, commerciale, concurrentielle, contre celle de Mme Beaudeau, que vous avez tellement chagrinée en refusant de croire comme elle en la constitution d'un pôle public car, disiez-vous, les caisses d'épargne se comporteront en structure privée, et revenir à la logique de Mme Beaudeau en utilisant les titres d'Etat comme indicateurs.
Comme je vous le disais, la réflexion est nécessaire pour trouver un indicateur bien adapté.
La seconde raison technique pour laquelle il me paraît difficile de retenir votre proposition en l'état, c'est que, pour déplafonner, il faudra, comme vous l'avez rappelé, passer par l'assemblée générale extraordinaire. Mais passer par l'assemblée générale extraordinaire, c'est non seulement extrêmement lourd, c'est aussi faire fi du droit des sociétés dans la mesure où cela revient à prévoir l'affectation du résultat au niveau de l'assemblée générale plutôt qu'au niveau du conseil d'administration. Actuellement, le mode de distribution de résultats est organisé en dehors de l'assemblée générale.
Pour ces deux raisons techniques, la solution que vous proposez, qui va pourtant dans le bon sens, n'est donc pas encore parfaite, monsieur le rapporteur.
Il faudra trouver une autre solution. Je propose que nous n'arrêtions pas dès maintenant la rédaction définitive de l'article 37, laquelle sera sans doute, au bout du compte, assez proche de celle que vous préconisez, monsieur le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. Monsieur le ministre, la concertation dont vous parlez, nous l'avons menée, même si ce n'est pas avec les mêmes moyens que ceux dont vous disposez. J'ai ainsi reçu les réactions du Crédit agricole, du Crédit mutuel et du Groupement national de la coopération.
D'ailleurs, si la solution que nous envisageons n'avait pas reçu un accueil favorable, je pense que vous auriez constaté un grand émoi ici ou là. S'il n'en a pas été ainsi, c'est probablement que la concertation a été assez bien entamée, car si je ne me trompe, monsieur le ministre, à l'Assemblée nationale, les réactions ont été fortes sur ce thème extrêmement sensible que vous avez vous-même inscrit dans le projet de loi, sans concertation préalable.
Si cette concertation préalable avait eu lieu, au moment du dépôt du projet de loi, il n'y aurait pas eu toutes ces réactions, attisées par les réseaux coopératifs que j'ai cités, lesquels étaient légitimement inquiets.
S'ils ne se sont pas manifestés de la même façon avant la première lecture du projet de loi au sénat, on peut y voir la preuve de ce début de concertation que j'évoquais.
Au demeurant, la formulation actuelle du dispositif n'est sans doute pas parfaite.
Pour ma part, j'avais envisagé un autre index ; ce sont les représentants de l'un des groupes que j'ai cités qui m'ont suggéré de retenir celui-là. Comme il était à peu près acceptable sur le plan financier, je me suis dit : pourquoi pas ? En effet, le choix de l'index m'est tout à fait indifférent, dès lors qu'il s'agit d'un index que l'on peut consulter, qui est pratique d'accès, qui est publié périodiquement ou qui se situe à un niveau raisonnable dans la hiérarchie des taux. Je n'ai pas vraiment les moyens de choisir et ce débat technique m'est quelque peu indifférent.
En tout cas, monsieur le ministre, il me semble opportun que le Sénat prenne acte aujourd'hui du point où nous en sommes sur ce sujet, donc que l'amendement de la commission soit voté. Trois semaines environ nous séparent de la réunion de la commission mixte paritaire. Après tout, si, d'ici là, le Sénat vous rendait le service de régler ce petit problème en trouvant une bonne formulation, cela permettrait à vos services de passer à un autre sujet ! (Sourires.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 30 rectifié, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 37 est rétabli dans cette rédaction.

Article 38



« Art. 38. - I. - L'article L. 310-9 du code des assurances est ainsi modifié :
« 1° Au premier alinéa, les mots : "et de réassurance" sont insérés après les mots : "en matière d'assurance" ;
« 2° Le second alinéa est ainsi rédigé :
« Les primes ou cotisations retenues se calculent en ajoutant au montant des primes ou cotisations émises et acceptées, y compris les accessoires de primes et coûts de police, nettes d'impôts, de cessions et d'annulations de l'exercice et de tous les exercices antérieurs, le total des primes ou cotisations acquises à l'exercice et non émises. »
« II. - Les dispositions du présent article s'appliquent aux contributions mises en recouvrement à compter du 1er janvier 2000. »
Par amendement n° 31, M. Marini, au nom de la commission propose de compléter le texte proposé par le 2° du I de l'article 38 pour le second alinéa de l'article L. 310-9 du code des assurances par une phrase ainsi rédigée : « Le montant des primes ou cotisations acceptées en réassurance ou en rétrocession fait l'objet d'un abattement de 20 %. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. Le contrôle auquel sont soumises les entreprises de réassurance est relativement réduit par rapport à celui que la commission de contrôle exerce sur les compagnies d'assurance, car il n'y a pas en matière de réassurance d'agrément préalable. Il n'y a pas de calcul de la marge et il n'y a pas de ratio de solvabilité.
En conséquence, il semble équitable de réduire de 20 % l'assiette de la contribution pour frais de contrôle et de surveillance que les sociétés de réassurance devront désormais acquitter en vertu du présent article.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Les règles qui régissent les compagnies d'assurance et les compagnies de réassurance sont les mêmes. Je ne vois pas pourquoi elles auraient un traitement différent. Si elles devaient en avoir un, encore faudrait-il justifier le fondement du taux de 20 % que vous avancez, qui ne me paraît pas évident. Peut-être avez-vous reçu une lettre sur ce sujet ! (Sourires.)
En ce qui me concerne, je n'ai aucun élément qui me permette de penser que l'assurance et la réassurance doivent donner lieu à un traitement différent. Je pense que c'est à bon droit que le texte initial les traitait de la même manière. Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 31.
M. Marc Massion. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Massion.
M. Marc Massion. L'objet de cet amendement est de réduire l'assiette du prélèvement opéré sur les primes et cotisations acceptées en réassurance pour assurer le financement du contrôle des entreprises.
Cette réduction d'assiette ne nous semble pas justifiée. La surveillance de ce type d'opération n'est pas plus légère, bien au contraire. Par ailleurs, les opérations de réassurance cédées sont déjà pleinement prises en compte dans l'assiette puisqu'elles en sont totalement déduites.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 31, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 38, ainsi modifié.

(L'article 38 est adopté.)

Article additionnel après l'article 38



M. le président.
Par amendement n° 32, M. Marini, au nom de la commission, propose d'insérer, après l'article 38, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le second alinéa de l'article L. 322-2-4 du code des assurances est complété par les mots : "et à la commission de contrôle des assurances". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. L'article 67 de la loi du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier a institué l'obligation, pour les entreprises d'assurance, d'établir un rapport de solvabilité exposant les conditions dans lesquelles elles garantissent les engagements qu'elles prennent à l'égard des assurés. Ce rapport contient également une analyse des conditions dans lesquelles l'entreprise s'estime en mesure de faire face à l'ensemble de ses engagements à moyen et à long termes.
Nous proposons simplement de rendre la commission de contrôle des assurances destinataire de ce rapport.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 32, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 38.

Article 39



M. le président.
« Art. 39. - I. - Le cinquième alinéa de l'article L. 310-12 du code des assurances est complété par les mots : "ou la présentation d'opérations d'assurance".
« II. - Il est inséré, dans le code des assurances, un article L. 514 ainsi rédigé :
« Art. L. 514 . - Les associations souscriptrices bénéficiant d'une dérogation aux règles de présentation d'opérations d'assurance qui se livrent à la présentation de produits d'assurance sont tenues de déclarer à la Commission de contrôle des assurances leur activité et le type de produits qu'elles présentent. Elles informent celle-ci de toute modification dans la nature de leur activité ainsi que de la cessation de leur activité. »
Par amendement n° 33, M. Marini, au nom de la commission, propose, dans la première phrase du texte présenté par le II de cet article pour insérer un article L. 514 dans le code des assurances, de remplacer les mots : « associations souscriptrices » par les mots : « personnes physiques ou morales ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. L'article 39 prévoit de soumettre les associations souscriptrices qui se livrent à la présentation de produits d'assurance, par exemple les associations d'assurés comme l'AFER, à une obligation de déclaration de leur activité à la Commission de contrôle des assurances.
Cette disposition est excellente, mais il ne paraît pas souhaitable de n'imposer cette obligation qu'aux seules associations souscriptrices de contrats d'assurance, dont la définition ne figure au demeurant nulle part dans la partie législative du code des assurances.
L'amendement n° 39 vise donc à étendre l'obligation de déclaration à toutes les personnes qui présentent des opérations d'assurance par dérogation et de renvoyer à un décret en Conseil d'Etat la définition exacte des personnes ainsi visées.
Cette rédaction permettra par la suite au Gouvernement d'étendre la liste des personnes qu'il voudrait soumettre à déclaration d'activité sans avoir recours à de nouvelles dispositions législatives.
Je signale au passage que les dispositions du texte concernant le contrôle de la présentation des opérations d'assurance sont tout à fait bienvenues, notamment s'agissant des associations d'épargnants, dont certaines ont pris une importance considérable et qui doivent faire l'objet d'un contrôle aussi rigoureux que celui qui touche les compagnies d'assurance elles-mêmes.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je veux attirer l'attention du Sénat, et celle de M. le rapporteur en particulier, sur le fait que la notion d'association souscriptrice est définie dans le code des assurances. Ainsi, nous savons où nous allons.
Si l'objectif de l'amendement est d'élargir considérablement la mesure, elle deviendra rapidement ingérable, car le champ des personnes physiques ou morales susceptibles de souscrire est infini : il y a des notaires - le président de la commission des finances pourrait en témoigner - les grands magasins, qui sont susceptibles de souscrire des assurances collectives. Bref, il y a toutes sortes d'intervenants.
A vous suivre, monsieur le rapporteur, nous mettrions en oeuvre un dispositif dont nous ne connaissons pas les limites, et je crois donc plus raisonnable de s'en tenir à la procédure proposée, selon laquelle la liste des associations susceptibles d'être souscriptrices est définie par un décret.
Bien sûr, ce décret peut évoluer dans le temps, en fonction de l'évolution même des pratiques commerciales et financières.
Aller au-delà de ce que prévoit actuellement le texte, ce serait nous exposer à des difficultes pratiques qui risqueraient fort de devenir ingérables.
C'est pourquoi, monsieur le rapporteur, je vous demande de bien vouloir reconsidérer votre point de vue.
Je vois bien votre intention et, en soi, la couverture la plus large est toujours la plus satisfaisante sur le plan intellectuel. Mais il y a là des obstacles pratiques insurmontables. Par conséquent, je préfère qu'on en reste à la disposition qui repose sur la définition de l'article R. 512-4 du code des assurances.
M. Philippe Marini, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. Monsieur le ministre, cela fait longtemps que je m'intéresse aux questions concernant le démarchage financier.
En fait, depuis 1993 ou 1994 - ce qui prouve combien l'efficacité d'un sénateur est faible ! - je ne cesse de dire que la loi de 1972 sur le démarchage financier est complètement obsolète et que le Parlement doit être saisi d'un nouveau texte en la matière.
La question qui est soulevée ici fait partie de cette problématique. Nous constatons que certaines associations d'épargnants se sont constituées dans des conditions impures. Je parle non pas de celles que j'ai citées mais, par exemple, de celle qui a été à l'origine de l'affaire Europavie.
Cette affaire a servi de révélateur et c'est elle qui a conduit à proposer, dans le présent texte, la création du fonds de garantie des assurés. Le scandale ou du moins la défaillance en question n'aurait pas eu lieu s'il n'y avait eu, à la base, une association d'épargnants non contrôlée ou mal contrôlée parce que les textes en vigueur ne permettaient pas de faire ce qu'il fallait.
Monsieur le ministre, pouvez-vous nous donner quelques informations et un minimum d'assurances sur ce dossier de la réforme du démarchage financier ? Quand serons-nous destinataires d'un projet de loi sur ce sujet ?
Je puis vous affirmer qu'il existe de nombreuses situations de personnes morales ou physiques qui démarchent des épargnants dans des conditions qui sont loin d'être parfaites.
Ce sujet du démarchage financier est également sensible compte tenu de la précarité et des modes de rémunération dont on use à l'égard des personnes physiques qui, pour le compte de tel ou tel, effectuent concrètement le démarchage. C'est aussi un problème social, qui ne se résorbe probablement pas, qui s'accroît peut-être.
Vraiment, il est important que l'on puisse prendre ces questions à bras le corps.
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le rapporteur, il y a effectivement là un vaste domaine qui est resté depuis trop longtemps en friche ou, plutôt, qui a évolué si rapidement que la législation actuelle n'est plus en mesure de le couvrir.
Pour autant, je ne pense pas qu'une question qui vous a occupé pendant des années puisse être résolue simplement par un amendement et vous conviendrez avec moi qu'il y a beaucoup à faire.
Un premier pas est franchi avec ce texte : il s'agit de faire en sorte que les associations souscriptrices soient contraintes de faire une déclaration quant à leur activité auprès de la Commission de contrôle des assurances.
Bien entendu, cela n'épuise pas le sujet, et vous m'interrogez à juste raison sur les intentions du Gouvernement quant aux étapes suivantes.
La COB a inscrit cette question du démarchage financier à son programme de travail. Des propositions devraient en découler.
Remettre en chantier l'ensemble de la loi 1972 me paraît très difficile ; néanmoins, il faut indiscutablement avancer.
Je propose donc que vous-même, monsieur le rapporteur, si vous le voulez bien, éventuellement entouré de vos collègues de la commission des finances ou d'autres commissions qui seraient intéressés, fassiez des propositions, que j'examinerai évidemment avec la plus grande attention, tendant à définir des dispositions, qui pourraient faire l'objet d'un texte spécifique ou être intégrées dans tel ou tel texte financier, en vue de modifier substantiellement notre législation de manière à améliorer la situation du démarchage financier, qui présente effectivement les défauts que vous avez décrits.
Une telle solution me semble meilleure que celle qui consisterait à adopter un amendement qui va, certes, dans le bon sens sur le plan du principe mais qui aurait pour résultat de créer d'importants problèmes pratiques.
M. le président. Monsieur le rapporteur, l'amendement n° 33 est-il maintenu ?
M. Philippe Marini, rapporteur. Monsieur le président, je remercie M. le ministre de l'ouverture de cette piste de travail. Je retiens donc sa proposition : nous allons reprendre nos vieux dossiers, nous mettre à l'ouvrage et formuler des propositions.
Pour l'heure, en me réjouissant que cet amendement ait permis d'aller plus loin, je le retire.
M. le président. L'amendement n° 33 est retiré.
Par amendement n° 34, M. Marini, au nom de la commission, propose de compléter in fine le texte présenté par le II de l'article 39 pour l'article L. 514 du code des assurances par un alinéa ainsi rédigé :
« Un décret en Conseil d'Etat détermine les personnes soumises à l'obligation de déclaration. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. Je retire également cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 34 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 39.

(L'article 39 est adopté.)

Article additionnel après l'article 39



M. le président.
Par amendement n° 35, M. Marini, au nom de la commission, propose d'insérer, après l'article 39, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le premier alinéa de l'article L. 310-28 du code des assurances est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Les mêmes dispositions s'appliquent aux dirigeants des personnes morales et aux personnes physiques que la commission de contrôle des assurances aura décidé de soumettre à son contrôle en application du cinquième alinéa de l'article L. 310-12. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. Cet amendement a pour objet d'étendre les sanctions pour entrave au contrôle de la Commission de contrôle des assurances à tous les intermédiaires d'assurance.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 35, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 39.

Article 40



M. le président.
« Art. 40. - Il est inséré, dans le code des assurances, un article L. 324-5 ainsi rédigé :
« Art. L. 324-5 . - Lorsqu'une entreprise fait l'objet d'une procédure de transfert d'office du portefeuille, la Commission de contrôle des assurances peut, si elle estime que les personnes physiques ou morales, autres que les mandataires et salariés d'entreprises d'assurance, par l'intermédiaire desquelles des contrats comportant la garantie de risques mentionnés à l'article L. 423-1 ont été présentés ou souscrits ont eu un comportement ayant contribué aux difficultés de cette entreprise, décider à l'issue d'une procédure contradictoire que les personnes susmentionnées doivent reverser au cessionnaire du portefeuille ou, à défaut, au fonds de garantie tout ou partie des commissions ou rémunérations de toutes natures, directes ou indirectes, encaissées à l'occasion de la présentation ou de la souscription de ces contrats, au cours des dix-huit mois précédant le mois au cours duquel la procédure de transfert de portefeuille est lancée.
« Les mêmes dispositions s'appliquent aux personnes morales ayant souscrit au bénéfice de leurs adhérents un contrat d'assurance de groupe.
« Un décret en Conseil d'Etat détermine les modalités d'application du présent article. »
Par amendement n° 36, M. Marini, au nom de la commission, propose de supprimer le deuxième alinéa du texte présenté par cet article pour insérer un article L. 324-5 dans le code des assurances.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel tendant à supprimer un alinéa qui est à notre avis inutile, car la définition des intermédiaires d'assurance figurant à l'alinéa précédent nous paraît suffisante.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 36, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 40, ainsi modifié.

(L'article 40 est adopté.)

Article 41



M. le président.
« Art. 41. - Le premier alinéa de l'article L. 530-2-2 du code des assurances est ainsi rédigé :
« Le ministre chargé de l'économie veille au respect des prescriptions prévues aux articles L. 511-1 (premier alinéa), L. 511-2, L. 530-1 et L. 530-2. La liste des courtiers et des sociétés de courtage d'assurance établis en France est tenue par les professions de l'assurance concernées dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. » - (Adopté.)
M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la séance du mercredi 12 mai 1999.

5

DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE LOI

M. le président. J'ai reçu de MM. Joël Bourdin et Jean-Philippe Lachenaud une proposition de loi relative à la vente d'une partie des avoirs en or de l'Etat détenus et gérés par la Banque de France.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 340, distribuée et renvoyée à la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

6

DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE RÉSOLUTION

M. le président. J'ai reçu de MM. Jean Arthuis, Guy Cabanel, Henri de Raincourt et Josselin de Rohan une proposition de résolution tendant à créer une commission d'enquête sur la conduite de la politique de l'Etat en Corse.
La proposition de résolution sera imprimée sous le n° 342, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale.

7

RENVOI POUR AVIS

M. le président. J'informe le Sénat que le projet de loi portant création d'une couverture maladie universelle, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence (n° 338, 1998-1999) dont la commission des affaires sociales est saisie au fond est renvoyé pour avis à sa demande, à la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.

8

DÉPÔT D'UN RAPPORT

M. le président. J'ai reçu de M. Lucien Lanier, rapporteur pour le Sénat, un rapport fait au nom de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant diverses mesures relatives à la sécurité routière et aux infractions sur les agents des exploitants de réseau de transport public de voyageurs.
Le rapport sera imprimé sous le n° 341 et distribué.

9

ORDRE DU JOUR

M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 11 mai 1999 :
A neuf heures trente :
1. Questions orales sans débat suivantes :
I. - M. Adrien Gouteyron attire l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur la nécessaire modernisation de la ligne SNCF Le Puy-en-Velay-Saint-Etienne. Il lui indique que cette ligne souffre de problèmes d'infrastructures : le matériel, âgé de plus de quarante ans, souffre d'évidents problèmes d'obsolescence : autorail X 2008 issu des années cinquante, remorques vétustes et en mauvais état.
Il lui indique, d'autre part, que l'augmentation du nombre de voyageurs entraîne la nécessité d'augmenter les cadences : ainsi, la ligne Bas-Monistrol a vu augmenter sa fréquentation de 20 %. C'est pourquoi il lui demande comment il entend promouvoir la modernisation d'une ligne qui ne saurait pâtir d'un éventuel désengagement de la part de l'Etat au profit d'autres choix prioritaires. (N° 474.)
II. - M. Yann Gaillard attire l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur les horaires de fermeture des gares SNCF.
Il lui rappelle qu'à l'occasion de la rencontre des élus champardennais, le 16 mars 1999, concernant la ligne Paris-Bâle, il avait déjà évoqué cette question. En effet, les horaires de fermeture des gares se font beaucoup trop tôt, souvent bien avant le dernier train. La gare de Troyes (Aube), par exemple, ferme à vingt et une heures alors que le dernier train est à vingt-deux heures seize. Il en résulte que les voyageurs qui attendent une correspondance doivent patienter dans un petit hall, faisant office de salle d'attente, assez inconfortable notamment quand il fait froid. De plus, cette absence de vie sociale en fait un espace livré aux populations marginales où règne, il faut bien le dire, une certaine insécurité. Sans oublier les dégâts matériels qui sont régulièrement constatés (bancs cassés, vitres brisées...). Il reste le buffet de la gare, mais lui aussi ferme tôt et les bars et restaurants aux alentours ne tarderont pas à faire de même. On se retrouve dans une sorte de no man's land qui ne fait qu'ajouter à l'insécurité urbaine. Il tient à faire remarquer que ce problème n'est malheureusement pas spécifique à la gare de Troyes et qu'il s'avère indispensable d'en tenir le plus grand compte.
Aussi, il lui demande s'il envisage, dans un souci d'amélioration du service public, de repousser l'horaire de fermeture des gares, conformément aux engagements qu'il avait pris lors de cette rencontre du 16 mars 1999. (N° 497.)
III. - Jean-Marc Pastor attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie sur le projet de réforme du mouvement des enseignants du second degré, tel qu'il est prévu pour la rentrée 1999.
En effet, dans le but de rapprocher l'éducation nationale de ses personnels, et en particulier d'en « humaniser » la gestion, il est prévu de déconcentrer le mouvement national, qui se déroulerait en deux temps : une phase inter-académique, préparatoire, suivie d'une phase intra-académique, préparatoire, ce qui permettrait l'affectation définitive des personnels.
Il est certes nécessaire de réviser les procédures actuellement en vigueur pour la mutation des enseignants : en effet, à l'heure actuelle, un enseignant qui souhaite muter d'un collège à un autre dans une ville doit participer au mouvement national qui est long (il dure plus de six mois) et complexe dans son organisation. De plus, sur 100 000 demandes annuelles de changement d'affectation, un tiers seulement concerne un changement d'académie, la majorité des candidats à la mutation effectuant des voeux internes à leur académie.
C'est pourquoi les principes de la réforme projetée semblent aller dans le sens d'une accélération des procédures et d'une amélioration du service rendu aux enseignants. Toutefois, des inquiétudes se font jour, notamment sur le déroulement de chaque phase : qui y participera ? Selon quels critères ? Comment et par qui seront prises les décisions au sein de chaque « étape » ? Qu'adviendra-t-il des barèmes ? Il le remercie de bien vouloir lui apporter toutes les précisions relatives à ce projet et de lui confirmer sa date de mise en oeuvre. (N° 423.)
IV. - Mme Marie-Madeleine Dieulangard souhaite interroger Mme le ministre délégué chargé de l'enseignement scolaire sur le devenir du dispositif de distribution de lait dans les écoles.
Cette opération plonge ses racines dans les mesures mises en place dès 1954 et a connu un renouveau en 1976 dans le cadre des soutiens financiers communautaires.
Aujourd'hui, la diminution des crédits en provenance du budget européen, la réorganisation des interventions interministérielles associant les ministères de l'agriculture, de l'emploi et de la solidarité et de l'éducation nationale ont abouti à un recentrage des moyens financiers sur les zones d'éducation prioritaire (ZEP) et les zones urbaines sensibles (ZUS).
Face à une diminution de ces moyens, les collectivités territoriales rencontrent de grandes difficultés pour assurer une part de plus en plus importante du financement de ces distributions.
Or les problèmes de nutrition demeurent, et bien au-delà des zones vulnérables. Par ailleurs, les opérations telles que « Le petit déjeuner à l'école » démontrent que celle-ci a toujours son rôle à jouer dans l'apprentissage des fondements de l'hygiène alimentaire. (N° 517.)
V. - Mme Marie-Claude Beaudeau attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur le projet de filialisation de l'Institut d'émission des départements d'outre-mer (IEDOM). Elle lui fait remarquer que cette mesure appliquée de façon spécifique à une partie du territoire national heurte le principe d'égalité républicaine car privatisant des activités de la Banque centrale en complète contradiction avec la nationalisation des activités de la Banque de France. Elle lui fait remarquer également le caractère discriminatoire du fonctionnement d'agences n'étant pas considérées comme succursales Banque de France, mais sociétés de droit privé, avec toutes les conséquences sur les responsabilités, les droits, les garanties, les conditions de travail, le maintien et la promotion de l'emploi des personnels. Elle lui demande de lui faire connaître son avis sur les dangers de voir réapparaître la situation vieille de cinquante ans où l'émission de la monnaie était confiée à une société privée dite « Banque coloniale ». Elle lui demande quelles mesures il envisage pour abandonner un tel projet et lui substituer une intégration de l'IEDOM et une reconnaissance de succursale de la Banque de France, mesures respectant les principes d'égalité et d'harmonisation du dispositif monétaire existant dans les DOM (Réunion, Guyane, Martinique, Guadeloupe) et les collectivités territoriales (Saint-Pierre-et-Miquelon, Mayotte) avec celui en vigueur dans l'ensemble du territoire national. (N° 442.)
VI. - M. André Vallet attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la lisibilité des avis d'imposition locale.
Il lui rappelle que, si le Trésor public distingue bien la part de chaque collectivité locale - communes, département et région - dans l'avis d'imposition destiné aux contribuables, le montant à payer reste global.
Il lui indique que cette unicité est souvent source de confusions de la part des usagers, puisque ceux-ci sont sensibles essentiellement aux variations de la somme globale qu'ils auront à débourser.
De ce fait, il lui indique que les communes sont souvent rendues responsables d'une éventuelle augmentation des impôts locaux qui n'est pas toujours de leur fait.
Dès lors, il lui demande s'il ne serait pas envisageable d'individualiser les impôts locaux en adressant aux contribuables un formulaire à trois volets - un par collectivité territoriale, celui-ci indiquant sans ambiguïté la somme d'imposition décidée par chacune d'elles. (N° 492.)
VII. - M. René Marquès attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la situation de certains de nos compatriotes rapatriés, qui n'ont pas encore bénéficié des mesures visant à dédommager leur réinstallation sur le territoire métropolitain. Ce dossier de la réinstallation dure depuis maintenant près de trente-sept ans, et il demeure toujours un certain nombre de dossiers, non encore traités, qui, pour la plupart, concernent des personnes qui sont dans une situation matérielle et morale désespérée.
Après l'intervention, notamment, de la représentation parlementaire, diverses mesures ont été adoptées en 1998 afin de suspendre les poursuites à l'égard de rapatriés endettés.
Il était prévu, en particulier, la mise en place d'une commission nationale chargée de régler les derniers dossiers.
Or, d'après les informations dont il dispose, les textes sont restés jusqu'à maintenant inopérants. Les procédures judiciaires à l'encontre des rapatriés reprennent et s'intensifient, et laissent craindre un certain nombre de ventes aux enchères et d'expulsions au cours des prochaines semaines. Par ailleurs, plusieurs problèmes sont encore en suspens. Il s'agit, par exemple, du cas des personnes mineures au moment du rapatriement, dont les parents n'ont pas pu s'installer pour cause de santé, ou de décès, et qui se sont installées à leur place.
Il lui demande ce qu'il compte faire afin que le nouveau dispositif d'aide aux rapatriés réinstallés, voté par le Parlement en 1998, soit mis en place rapidement, et que les moyens nécessaires soient accordés à la délégation aux rapatriés afin de solder ce dossier. (N° 503.)
VIII. - M. Jean Chérioux attire l'attention de Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité sur les graves répercussions qu'entraîne la réduction de l'exonération de cotisations sociales dont bénéficiaient les personnes âgées de plus de soixante-dix ans pour l'emploi d'une personne à domicile.
L'article 5 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour 1999 a en effet supprimé l'exonération totale de cotisations sociales patronales accordée à ces personnes. Désormais, l'exonération ne sera plus accordée qu'aux personnes les plus dépendantes et sera limitée à 65 heures rémunérées au SMIC par mois dans les autres cas.
Lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999, le Sénat s'était très vigoureusement opposé à cette mesure qui paraissait tout à fait contraire à la politique menée depuis plusieurs années visant à favoriser le maintien à domicile des personnes âgées tout en créant de véritables emplois d'aide à domicile.
Force est de constater que les faits lui donnent aujourd'hui raison.
De nombreuses personnes âgées ont déjà décidé de limiter, pour des raisons financières, leur recours à l'emploi à domicile. Les associations mandataires voient leur activité se réduire brutalement et rencontrent des difficultés financières qui pourraient conduire à leur disparition. A terme, c'est l'avenir même de ce secteur, qui joue pourtant un rôle essentiel dans le maintien à domicile des personnes âgées, qui est menacé. Les conséquences pour l'emploi s'annoncent d'ores et déjà désastreuses.
Il lui demande donc comment elle entend remédier rapidement à cette situation qu'elle a elle-même provoquée. (N° 518.)
IX. - M. Xavier Darcos attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale sur l'indemnisation des personnes contaminées par le virus de l'hépatite C post-transfusionnelle. En France, 500 000 à 650 000 personnes seraient actuellement infectées par le virus de l'hépatite C (VHC) dont la contamination se fait principalement lors d'un contact direct avec du sang infecté par ce virus. Dans son rapport annuel rendu public, le Conseil d'Etat a estimé qu'il n'était plus possible de régler au cas par cas l'indemnisation de ces victimes et que, compte tenu de l'ampleur de la contamination, l'adoption d'une loi spécifique d'indemnisation était nécessaire.
Il souhaite donc connaître l'état d'avancement des travaux entrepris par le secrétariat d'Etat à la santé pour définir un cadre juridique d'ensemble sur la prise en charge du risque médical et savoir dans quel délai le Parlement sera saisi d'un projet de loi qui permettra notamment d'assurer l'indemnisation des victimes qui ont été contaminées par le virus de l'hépatite C à la suite d'une transfusion sanguine. (N° 482.)
X. - M. Jean Bizet attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur les informations faisant état de la présence de listeria dans différents fromages au lait cru de grand renom, notamment une prestigieuse marque de camembert de Normandie.
En effet, la presse s'est fait largement l'écho d'une présence de listeria en deçà de la tolérance administrative définie par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et le Conseil supérieur d'hygiène publique de France. Il semble excessif de créer une telle psychose près des consommateurs sur ce qui n'est qu'une contamination sporadique alors que la France ne comptabilise que 2,5 cas de listériose par million d'habitants, et cela tous produits alimentaires confondus.
Il insiste sur le fait que les producteurs et les entreprises ont accompli des efforts considérables pour assurer le maximum de sécurité. Malgré cela, il est impossible de prétendre annuler totalement tout risque bactériologique avec du lait cru. Toutefois, l'application des normes zéro pathogènes sans aucun discernement et la répercussion médiatique à laquelle nous avons assisté condamnent à très court terme l'ensemble des produits au lait cru. Il s'interroge donc sur le manque de cohérence entre les ministères de la santé et de l'agriculture et de la pêche.
Il craint que de telles campagnes médiatiques, outre qu'elles ternissent l'image de marque de produits ancestraux et des régions qui les produisent, finissent par conduire le consommateur vers des produits totalement aseptisés qu'il ne désire pas vraiment. De plus, une telle situation met fortement en péril l'ensemble des emplois de la filière. Il précise qu'en Normandie les entreprises fabriquant des appellations d'origine contrôlées au lait cru emploient plus de 600 personnes et collectent le lait d'environ 1 500 producteurs, fruit de cent trente années d'expérience et de tradition.
Sans vouloir remettre en cause la sécurité alimentaire des consommateurs, qui est absolument essentielle, il lui demande s'il n'envisage pas une évolution de la réglementation actuelle, notamment au regard de la diffusion des informations, afin de mieux les encadrer et ainsi éviter de porter inutilement un discrédit sur les entreprises de transformation. (N° 510.)
XI. - M. Christian Bonnet appelle l'attention de Mme le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la situation du centre pénitentiaire de Ploemeur, qui lui paraît souffrir de deux dysfonctionnements : en premier lieu, l'absence, dans un milieu à risques, de toute visite médicale du personnel de l'administration, et ce depuis des années ; par ailleurs, une insuffisance de l'encadrement, issue du non-remplacement de deux CSP 2 et de deux premiers surveillants.
Il lui demande si elle n'estime pas nécessaire de diligenter, dans l'établissement en cause, une brève mission de l'inspection générale des services judiciaires pour dresser un constat et proposer les mesures qui paraissent s'imposer pour mettre fin à un tel état de choses. (N° 499.)
XII. - M. Georges Mouly attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur le problème posé par la réflexion engagée par le ministère de l'éducation nationale en vue de proposer une réforme de la loi en matière de responsabilité pour faits de nature involontaire. A cet effet, un groupe de travail, réunissant les syndicats, les fédérations de parents d'élèves et les services du ministère de la justice, est chargé de faire des propositions. N'ont pas été conviés cependant à participer à ce groupe de travail : les élus. En conséquence, il lui demande de quelle manière il entend faire en sorte que les élus locaux, pourtant concernés au premier chef comme cela a été bien souligné lors du dernier congrès des maires de France, soient associés à cette réflexion. (N° 505.)
XIII. - M. Gérard Delfau attire l'attention de Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement sur la grande misère budgétaire et morale du bassin minier de Graissessac qui comprend, en outre, les communes de Camplong et Saint-Etienne-d'Estrechoux. L'extraction du charbon, durant un siècle, a donné à ce territoire, jusqu'au début des années soixante, une prospérité, payée, il est vrai, par la souffrance des hommes et par la destruction de magnifiques paysages. Aujourd'hui, Graissessac, par exemple, n'a plus un seul emploi industriel sur son site et la commune est passée de 2 500 habitants au début du siècle à environ 600. Plus grave encore, une politique mal conduite de reconversion industrielle a accumulé les friches industrielles, les ateliers-relais à la charge de la collectivité et les équipements dont les houillères du Centre Midi (HBCM) se sont déchargées. Pour compléter ce tableau, le fonds d'industrialisation toujours en place fonctionne à partir de critères qui écartent impitoyablement tout projet des communes proprement minières, au profit de collectivités situées en aval, ce qui accroît l'amertume des habitants. A présent, les houillères ont amorcé leur désengagement total et prétendent vendre au plus offrant le patrimoine, laissant à la charge de la commune tout le reste. Faute d'intervention spécifique des pouvoirs publics, les communes de ce bassin minier n'ont aucune chance de sortir de ce sous-développement, car tous les projets se heurtent à des lignes de financement établies selon des critères qu'elles ne peuvent respecter. Aussi, au moment où les HBCM s'apprêtent à négocier leur départ, il lui apparaît naturel que, sous son autorité, s'engage un programme financé dans le cadre du Fonds national d'aménagement du territoire pour remédier, avec l'aide du conseil général et du conseil régional, aux handicaps de ces communes et faciliter leur projet de développement, notamment en termes de reconstitution des paysages et de protection de la faune et de la flore, particulièrement riches selon une étude universitaire récente. (N° 465.)
XIV. - M. Franck Sérusclat interroge M. le ministre de l'intérieur sur la procédure actuelle de l'asile territorial.
Mise officiellement en place par la loi n° 98-349 du 11 mai 1998, elle permet la demande d'un asile temporaire, sans rupture définitive avec le pays d'origine, mais ne donnant droit qu'au séjour sur le territoire français.
Elle est en particulier choisie par de nombreux Algériens actuellement, en raison de la situation qui règne dans leur pays.
Il semblerait que le droit à la dignité ainsi que la volonté gouvernementale de lutter contre l'exclusion comme contre le travail au noir devraient conduire à envisager d'accorder plus que ce simple droit au séjour aux demandeurs d'asile territorial.
Aussi, il l'interroge sur ses intentions en matière d'extension de droits afin de remédier aux situations de précarité des bénéficiaires de l'asile territorial, vécu comme un « sous-asile ». (N° 396.)
XV. - M. Bernard Dussaut souhaite attirer l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur le fonctionnement des caisses des écoles. Les textes législatifs et réglementaires relatifs aux caisses des écoles sont anciens et épars. Créés par une loi du 10 avril 1867 et rendus obligatoires par celle du 28 mars 1882, ces organismes avaient pour but initial de favoriser la fréquentation de l'école publique. En l'absence de compétence obligatoire, leurs champs d'activité se sont considérablement élargis avec la prise en charge de services sociaux importants comme la cantine et le transport scolaire, voire les colonies de vacances. Toutefois, les caisses des écoles des petites communes n'ont dorénavant que peu d'activité, voire pas d'activité du tout. La charge des transports scolaires entre très fréquemment dans la compétence des syndicats intercommunaux et la gestion des cantines revient souvent directement aux communes. L'obligation faite aux communes de moins de 3 500 habitants de créer une comptabilité annexe au budget de la commune pour la caisse des écoles est une contrainte lourde pour nombre d'entre elles et qui n'apparaît plus justifiée. Il lui demande s'il ne serait pas possible d'envisager une révision globale de la réglementation relative à ces organismes permettant notamment de revenir sur le caractère obligatoire de la création d'une caisse des écoles pour les communes de moins de 3 500 habitants. (N° 484.)
XVI. - M. Roland du Luart attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur les effets du décret du 16 décembre 1998 sur la réglementation des armes - dont on peut comprendre l'inspiration - mais qui soulève plusieurs difficultés graves pour les chasseurs.
Il s'agit tout d'abord du fusil dit « à pompe », qui est maintenant classé en quatrième catégorie et ne peut plus être utilisé par les chasseurs de gibier d'eau, soit 200 000 chasseurs aux moyens modestes. C'est une véritable spoliation, puisqu'ils ne peuvent plus ni utiliser ni revendre ces fusils, et cela est d'autant plus choquant qu'ils venaient de déclarer ces armes au titre d'un autre décret de 1995. Il convient donc de prendre rapidement des mesures transitoires confirmant, peut-être, les interdictions à la vente mais permettant en tout cas aux détenteurs actuels de continuer à les utiliser.
Il s'agit ensuite de régler les problèmes juridiques liés à l'emploi, à l'article 5 du décret, du mot « acquisition » qui interdirait à toute personne, par exemple, de détenir des armes de chasse acquises par héritage si elle n'est pas elle-même détentrice d'un permis de chasse visé et validé. Ce décret pose enfin de nombreux problèmes pour les tireurs sportifs, les collectionneurs, les candidats au permis de chasser et les organisateurs de ball-trap qu'il convient de régler, étant entendu qu'ils n'ont absolument aucun impact en termes de sécurité publique. (N° 519.)
XVII. - M. Fernand Demilly attire l'attention de M. le ministre de la défense sur l'avion de transport militaire du futur, l'ATF.
Sept pays européens sont concernés par ce marché de 150 milliards de francs pour près de 300 appareils ; la France prévoit d'en acquérir une cinquantaine pour remplacer ses Transal dans l'armée de l'air.
Trois solutions ont été remises par les industriels aux gouvernements concernés : l'achat d'appareils américains déjà existants, la construction de l'ATF par Airbus Industrie, un transporteur développé sur la base de l'Antonov russe.
Le délégué général pour l'armement précise que le lancement de l'ATF ne pourra avoir lieu que si le budget 2000 inscrit les 30 milliards de francs d'autorisations de programme nécessaire pour la cinquantaine d'appareils que la France doit acheter.
Plusieurs inconnues subsistent : l'attitude des Allemands vis-à-vis de l'Antonov, l'attitude du Royaume-Uni qui a déjà commandé des appareils américains et l'attitude du gouvernement français qui tarde à prendre position.
En conséquence, il lui demande de bien vouloir lui préciser la position du Gouvernement. (N° 502.)
A seize heures et le soir :
2. Discussion, en deuxième lecture, de la proposition de loi (n° 310, 1998-1999), adoptée avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, relative au pacte civil de solidarité.
Rapport (n° 335, 1998-1999) de M. Patrice Gélard, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Avis de M. Philippe Marini, au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.
Délai limite pour le dépôt des amendements à cette proposition de loi : lundi 10 mai 1999, à dix-sept heures.
3. Discussion, en deuxième lecture, du projet de loi (n° 306, 1998-1999), modifié par l'Assemblée nationale, renforçant l'efficacité de la procédure pénale.
Rapport (n° 336, 1998-1999) de M. Pierre Fauchon, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi : lundi 10 mai 1999, à dix-sept heures.
4. Discussion, en deuxième lecture, de la proposition de loi (n° 253, 1998-1999), adoptée avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, tendant à limiter les licenciements des salariés de plus de cinquante ans.
Rapport (n° 297, 1998-1999) de M. Louis Souvet, fait au nom de la commission des affaires sociales.
Délai limite pour le dépôt des amendements à cette proposition de loi : lundi 10 mai 1999, à dix-sept heures.
5. Discussion, en deuxième lecture, du projet de loi (n° 275, 1998-1999), modifié par l'Assemblée nationale, modifiant l'ordonnance n° 82-283 du 26 mars 1982 portant création des chèques-vacances.
Rapport (n° 296, 1998-1999) de M. Paul Blanc, fait au nom de la commission des affaires sociales.
Délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi : lundi 10 mai 1999, à dix-sept heures.

Délais limites pour le dépôt des amendements

Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, relative à la délivrance des grades dans les disciplines relevant des arts martiaux (n° 274, 1998-1999).
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 17 mai 1999, à dix-sept heures.
Projet de loi d'orientation agricole, adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture (n° 311, 1998-1999).
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 17 mai 1999, à douze heures.
Projet de loi portant organisation de la réserve militaire et du service de la défense (n° 171, 1998-1999).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 18 mai 1999, à dix-sept heures.
Projet de loi relatif au référé devant les juridictions administratives (n° 269, 1998-1999).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 18 mai 1999, à dix-sept heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures vingt-cinq.)

Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON





NOMINATIONS DE RAPPORTEURS
COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

M. Charles Descours a été nommé rapporteur pour les titres préliminaire, Ier, II, III, IV et V, et M. Claude Huriet a été nommé rapporteur pour le titre IV du projet de loi n° 338 (1998-1999), adopté par l'Assemblée nationale, portant création d'une couverture maladie universelle.
M. Alain Vasselle a été nommé rapporteur de la proposition de loi n° 245 (1998-1999) de M. Hubert Haenel tendant à prendre en compte le temps du service national dans le calcul de la retraite.

COMMISSION DES FINANCES

M. Jacques Oudin a été nommé rapporteur pour avis du projet de loi n° 338 (1998-1999) portant création d'une couverture maladie universelle, dont la commission des affaires sociales est saisie au fond.
M. Philippe Marini a été nommé rapporteur de la proposition de résolution n° 271 (1998-1999) de M. Bernard Angels, présentée en application de l'article 73 bis du règlement, sur la proposition de directive du Conseil visant à garantir un minimum d'imposition effective des revenus de l'épargne sous forme d'intérêts à l'intérieur de la Communauté (n° E 1105), en remplacement de M. Bernard Angels.

COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LÉGISLATION, DU SUFFRAGE UNIVERSEL, DU RÈGLEMENT ET D'ADMINISTRATION GÉNÉRALE
M. Jean-Jacques Hyest a été nommé rapporteur de la proposition de résolution n° 295 (1998-1999) de M. Michel Barnier tendant à modifier l'article 73 bis du règlement du Sénat.



Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)


Dispositions relatives
à l'attribution de l'indemnité compensatrice de transports
pour les fonctionnaires de Corse

536. - 6 mai 1999. - Les décrets du 20 avril 1989 et du 3 août de la même année ont institué une indemnité compensatrice pour frais de transport en faveur, d'une part, des magistrats, des militaires, des fonctionnaires et agents de la fonction publique de l'Etat et, d'autre part, des fonctionnaires et agents de la fonction publique territoriale en service dans les deux départements de Corse. Il est cependant à noter que les agents de la base aérienne 126 de Solenzara, dont le statut de droit public a été pourtant reconnu par le tribunal des confilts de Lyon dans sa décision du 25 mars 1996, ne bénéficient pas de ces dispositions sans que les raisons de cette exclusion n'aient été données. Quelques éclaircissements à ce sujet sont indispensables. Par ailleurs, la loi n° 97-940 du 16 octobre 1997 relative au développement d'activités pour l'emploi des jeunes, a prévu leur recrutement par contrats dont la durée maximale est de cinq ans, par les collectivités territoriales notamment. Or, depuis quelques mois, les personnes recrutées à ce titre dans les deux départements de Corse revendiquent le bénéfice des dispositions relatives à l'attribution de l'indemnité compensatrice de transports. En conséquence, M. Louis-Ferdinand de Rocca Serra demande à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation si ce dispositif est applicable aux personnes recrutées au titre des emplois jeunes et, le cas échéant, quelles en seront les conditions.

Lenteur du processus d'indemnisation des porteurs d'emprunts russes

537. - 6 mai 1999. - M. Philippe Marini appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur l'attente et l'inquiétude des porteurs d'emprunts russes suscitées par la lenteur du processus d'indemnisation. Le règlement de la question de l'indemnisation des emprunts russes a fait l'objet d'un accord entre la France et la Russie signé le 27 mai 1997, soit il y a plus de deux ans. A la suite de cet accord, le Gouvernement a mis en oeuvre une opération de recensement des créances détenues par les porteurs français, qui s'est terminée le 5 janvier de cette année. Or, les résultats définitifs de ce recensement ne sont toujours pas disponibles plusieurs mois après la fin des opérations. Les porteurs d'emprunts russes s'inquiètent légitimement des retards pris sur le calendrier annoncé par le Gouvernement et l'attente d'une réparation souvent symbolique demande une mise en oeuvre rapide des indemnisations. En effet, la longueur de la procédure risque de porter atteinte à la crédibilité de la parole de l'Etat, qui a toujours affirmé vouloir clore définitivement la question des emprunts russes. Le Gouvernement ne semble pas manifester d'intentions précises quant à la présentation d'un projet de loi d'indemnisation au Parlement dans les prochains mois. Ces incertitudes sont difficilement acceptées par les centaines de milliers de personnes concernées, dont certaines personnes âgées qui attendent une réparation légitime pour leurs titres depuis plusieurs décennies. La loi devra déterminer les modalités pratiques du versement des indemnisations ainsi que la liste des titres recevables, ce qui conduira inévitablement à exclure certains porteurs du bénéfice des indemnisations. L'étude de ce problème particulièrement délicat exige que le Parlement puisse bénéficier d'une information complète. La commission de suivi des accords franco-russes présidée par le conseiller d'Etat Jean-Claude Paye a effectué de nombreuses auditions afin de proposer des modalités d'indemnisation. Or, le rapport rendu au Premier ministre n'a pas été publié, privant la représentation nationale d'informations essentielles pour une discussion approfondie et un débat démocratique indispensable sur ce sujet. La diffusion des résultats du recensement et du rapport de la commission de suivi des accords franco-russes constitue donc un préalable indispensable à la discussion d'un texte. En conséquence, il lui demande d'assurer les conditions d'un débat approfondi sur les problèmes liés à l'indemnisation et souhaite un engagement ferme de la part du Gouvernement sur la date de présentation d'un projet de loi au Parlement et sur le versement effectif des indemnisations des porteurs d'emprunt russes.

Carences du système judiciaire
en matière d'atteintes aux représentants de l'ordre public

538. - 6 mai 1999. - M. Christian Demuynck attire l'attention de Mme le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les carences du système judiciaire en matière d'atteintes aux représentants de l'ordre public. La généralisation de la violence urbaine s'accompagne d'un rejet inquiétant de toute forme d'autorité. Les forces de police sont, au premier chef, concernées. Elles subissent, chaque jour, dans l'exercice de leur difficile mission, les manifestations les plus outrageantes. Dernière en date : l'agression de 4 policiers plaignants par les prévenus eux-mêmes lors de la comparution de ces derniers devant la 17e chambre correctionnelle de Bobigny le 2 février dernier. Cet épisode navrant doit faire réfléchir. Car si, face à cet outrage, l'inaction politique et l'impunité prévalent, comment éviter alors la démoralisation des forces de l'ordre ? Pourtant, notre code pénal n'offre-t-il pas aux juges les moyens d'une sanction ? A terme, qui pourra parler d'égalité de tous les citoyens devant la sécurité ? Il y a donc urgence ! Il lui demande quelles seront les mesures prises par le ministère de la justice pour que l'outrage à un représentant de l'Etat soit mieux sanctionné et les dispositions du code pénal appliquées avec fermeté.



ANNEXE AU PROCÈS-VERBAL
de la séance du jeudi 6 mai 1999


SCRUTIN (n° 93)



sur l'amendement n° 18 rectifié ter , présenté par M. Philippe Marini, au nom de la commission des finances, tendant à modifier l'article 21 du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à l'épargne et à la sécurité financière (détermination du montant du capital initial des caisses d'épargne).

Nombre de votants : 319
Nombre de suffrages exprimés : 319
Pour : 220
Contre : 99

Le Sénat a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (16) :
Contre : 16.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (22) :

Pour : 18.
Contre : 4. _ MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, André Boyer et Yvon Collin.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (99) :

Pour : 97.
N'ont pas pris part au vote : 2. _ M. Christian Poncelet, président du Sénat, et M. Gérard Larcher, qui présidait la séance.

GROUPE SOCIALISTE (78) :

Contre : 78.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (52) :

Pour : 52.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (47) :

Pour : 47.

Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (7) :

Pour : 6.
Contre : 1. _ M. Gérard Delfau.

Ont voté pour


Nicolas About
Philippe Adnot
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Pierre André
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Denis Badré
José Balarello
René Ballayer
Janine Bardou
Michel Barnier
Bernard Barraux
Jean-Paul Bataille
Jacques Baudot
Michel Bécot
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jacques Bimbenet
Jean Bizet
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Jean Boyer
Louis Boyer
Jean-Guy Branger
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Guy-Pierre Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Gérard Cornu
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Charles de Cuttoli
Xavier Darcos
Philippe Darniche
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Robert Del Picchia
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Gérard Deriot
Charles Descours
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Michel Esneu
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
André Ferrand
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yves Fréville
Yann Gaillard
René Garrec
Jean-Claude Gaudin
Philippe de Gaulle
Patrice Gélard
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Francis Giraud
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Jean-Paul Hugot
Jean-François Humbert
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jarlier
Pierre Jeambrun
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Patrick Lassourd
Robert Laufoaulu
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Serge Lepeltier
Marcel Lesbros
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
Serge Mathieu
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Jean-Luc Miraux
Louis Moinard
René Monory
Aymeri de Montesquiou
Georges Mouly
Bernard Murat
Philippe Nachbar
Paul Natali
Lucien Neuwirth
Philippe Nogrix
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Charles Pasqua
Lylian Payet
Michel Pelchat
Jacques Pelletier
Jean Pépin
Jacques Peyrat
Alain Peyrefitte
Xavier Pintat
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Ladislas Poniatowski
André Pourny
Jean Puech
Jean-Pierre Raffarin
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Henri de Richemont
Philippe Richert
Yves Rispat
Jean-Jacques Robert
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Bernard Seillier
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy

Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Guy Vissac

Ont voté contre


François Abadie
Guy Allouche
Bernard Angels
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
François Autain
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Yolande Boyer
Robert Bret
Jean-Louis Carrère
Bernard Cazeau
Monique Cerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
Yvon Collin
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Dinah Derycke
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Claude Domeizel
Michel Dreyfus-Schmidt
Michel Duffour
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Thierry Foucaud
Serge Godard
Jean-Noël Guérini
Claude Haut
Roger Hesling
Roland Huguet
Alain Journet
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Dominique Larifla
Gérard Le Cam
Louis Le Pensec
Pierre Lefebvre
André Lejeune
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
François Marc
Marc Massion
Pierre Mauroy
Jean-Luc Mélenchon
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jack Ralite
Paul Raoult
Ivan Renar
Roger Rinchet
Gérard Roujas
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat

René-Pierre Signé
Simon Sutour
Odette Terrade
Michel Teston
Pierre-Yvon Tremel
Paul Vergès
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber

N'ont pas pris part au vote


MM. Christian Poncelet, président du Sénat, et Gérard Larcher, qui présidait la séance.
Les nombres annoncés en séance ont été reconnus, après vérification, conformes à la liste de scrutin ci-dessus.