Séance du 7 octobre 1999







M. le président. La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Si j'en crois, monsieur le ministre, le rapport économique et financier que vous venez de nous livrer, vous voulez placer le budget pour 2000 sous le signe de la modernisation budgétaire. Ce serait une très bonne orientation !
Nous sommes tous conscients de l'impérieuse nécessité d'une réforme en profondeur du système financier de l'Etat, passant notamment par une meilleure connaissance, par exemple, du patrimoine immobilier de l'Etat - l'expérience des lycées et des collèges a été tout à fait instructive à cet égard - et par des engagements à long terme, ne serait-ce que pour mieux faire face au coût des retraites des fonctionnaires.
Je reconnais d'ailleurs que, sur ce dernier point, votre rapport donne pour la première fois le chiffre exact de la contribution de l'Etat : 150 milliards de francs, soit 71 % du total.
Cependant, un haut fonctionnaire, à la demande de votre prédécesseur et à votre demande - car vous avez eu l'excellente idée de reprendre la proposition de Jean Arthuis - vient de vous remettre un rapport sur les graves dysfonctionnements du système de gestion financière de l'Etat. Mais pourquoi ce rapport demeure-t-il secret ?
Craignez-vous certaines de ses conclusions sur la multiplicité et l'opacité des établissements publics, simples démembrements de l'Etat que l'on voit fleurir, au moment où vous vous apprêtez à créer trois fonds - le fonds d'allégement des cotisations sociales, le fonds de financement de la couverture maladie universelle, le fonds amiante -, soit, au total, 75 milliards de francs débudgétisés, ce qui fausse complètement l'optique de stabilisation des dépenses que vous défendez ?
Sinon, pourquoi l'effort de transparence dont vous vous prévalez si souvent s'arrête-t-il aux portes du Parlement ? Car j'ai bien lu le communiqué du président de la commission des finances et du rapporteur général : le Parlement, dont le rôle fondamental reste le contrôle des deniers publics, ignore tout des propositions de M. Jean-Jacques François.
Alors, monsieur le ministre, ma question est très simple : allez-vous lever le secret sur ce rapport, secret indigne d'une grande démocratie parlementaire, et allez-vous associer le Parlement à la réforme en profondeur du patrimoine de l'Etat ? (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le sénateur, le rapport auquel vous faites allusion a en effet été commandé par Christian Sautter et par moi-même à M. Jean-Jacques François, agent comptable central du Trésor, succédant à d'autres travaux qui avaient été initiés par mon prédécesseur, M. Jean Arthuis. Ce document a été remis à la date prévue.
Contrairement à ce que vous avez l'air de croire, il n'est en rien secret. Il a été transmis immédiatement aux instances compétentes, au Parlement, y compris le Sénat, et à la Cour des comptes. D'ailleurs, je m'étonne, monsieur le sénateur : s'il n'avait pas été transmis, s'il avait été secret, comment pourriez-vous disposer des informations que vous dévoiliez à l'instant et qui, évidemment, proviennent de ce rapport ? (Sourires sur les travées socialistes et murmures sur les travées de l'Union centriste.) C'est bien parce que vous avez pu en prendre lecture, monsieur le sénateur, que vous êtes en mesure de citer les différents fonds qui, en effet, fonctionnent si mal. Et si vous en avez eu connaissance, c'est bien parce que ce rapport n'est en rien secret et qu'il est à votre disposition !
A la suite de ce rapport, M. Christian Sautter et moi-même avons décidé la mise en place d'une mission permanente de modernisation financière et comptable de l'administration de l'Etat. Beaucoup de choses sont à revoir dans ce domaine. Vous avez cité des exemples, mais il y en a d'autres.
Cette modernisation passe, notamment, par un grand projet informatique appelé « ACCORD », qui est à l'étude, et qui a pour objet la révision de l'ensemble de la comptabilité de l'Etat. A cette occasion, nous recueillerons des informations non seulement sur les patrimoines et les stocks, mais également sur les flux. A mesure que cette procédure elle-même sera à l'oeuvre - ce n'est pas encore le cas, nous en sommes au stade expérimental - le Parlement en sera tenu informé, car vous savez le souci du Gouvernement d'informer aussi complètement que possible le Parlement. D'ailleurs, vous l'avez reconnu vous-même tout à l'heure dans votre question, et je vous remercie de ces félicitations. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Alain Lambert. Le rapport n'est pas arrivé jusqu'à nous !
M. le président. Quant à moi, je vous félicite, monsieur le ministre, d'avoir respecté le temps de parole qui vous était imparti. (Sourires.)

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