Séance du 9 novembre 1999







M. le président. La parole est à M. Foucaud, auteur de la question n° 631, adressée à Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité.
M. Thierry Foucaud. Monsieur le ministre, des manquements graves à l'exercice de la liberté d'information syndicale ont actuellement cours à l'usine Renault de Cléon.
Le 27 décembre 1968 était adoptée une loi qui comportait de réelles avancées pour l'exercice des mandats des élus du personnel dans les entreprises ainsi que pour l'activité syndicale.
Ce texte était le fruit du grand mouvement social de mai et juin 1968, dont l'empreinte est encore ressentie aujourd'hui.
Aux termes de l'alinéa 4 de l'article L. 412-8 du code du travail, le droit à l'information était reconnu pour les salariés : « Les publications et tracts de nature syndicale peuvent être librement diffusés aux travailleurs dans l'entreprise, dans l'enceinte de celle-ci, aux heures d'entrée et de sortie du travail. »
Ainsi les délégués pouvaient-ils, dès ce moment, rendre compte de leurs mandats, et les syndicats et leurs militants bénéficier de libertés nouvelles.
Depuis 1968, toutefois bien des changements sont intervenus dans l'organisation du travail : horaires variables, introduction de la flexibilité dans nombre d'entreprises. Les conditions d'application des dispositions auxquelles j'ai fait référence précédemment sont donc devenues différentes.
C'est le cas à l'usine Renault de Cléon, en Seine-Maritime : il existe désormais sept accès différents pour les employés de cette unité de production et, pour ne prendre l'exemple que du seul bâtiment E, soixante-quatre portes d'entrée et des dizaines de vestiaires.
Les horaires principaux, qui étaient au nombre de quatre il y a vingt ans, sont devenus plus de deux cents aujourd'hui si l'on prend en compte l'individualisation du travail et les reprises et cessations d'activité à horaires décalés.
Comme vous le voyez, monsieur le ministre, la législation est devenue inapplicable au sens strict. Dans le même temps, la direction de ce site s'emploie à l'interpréter à la lettre, c'est-à-dire de façon restrictive. Elle s'obstine à ne pas vouloir ouvrir de négociation sur l'adaptation à la réalité du site de l'article L. 412-8, alinéa 4, du code du travail. La situation continue donc de se dégrader.
Les conséquences d'une telle situation sont graves. Plus de cinquante sanctions ont été prononcées, et un tel blocage ne peut, évidemment, que concourir à dégrader le climat social.
Laisser porter atteinte aux droits fondamentaux des salariés et de leurs délégués me paraît contraire à l'esprit du droit français et aux acquis des luttes sociales. Issu d'une profonde volonté de changement, le Gouvernement actuel de gauche ne peut laisser une telle situation en l'état, sauf, monsieur le ministre, à courir un risque d'affaiblissement.
C'est la raison pour laquelle je souhaite savoir quelles mesures vous comptez prendre pour que la liberté d'information des salariés par leurs élus ne subisse pas d'entraves. La situation que je viens d'évoquer pour Renault-Cléon n'est évidemment pas la seule en France !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Claude Bartolone, ministre délégué à la ville. Monsieur le sénateur, vous avez appelé mon attention sur la situation de salariés de l'entreprise Renault, à Cléon, qui ont été sanctionnés après avoir distribué des tracts syndicaux en dehors des conditions prévues par l'article L. 412-8 du code du travail, lequel précise, dans son alinéa 4, que : « Les publications et tracts de nature syndicale peuvent être librement diffusés aux travailleurs de l'entreprise, dans l'enceinte de celle-ci, aux heures d'entrée et de sortie du travail ».
Aux termes de cet article, des accords collectifs peuvent comporter des clauses plus favorables et prévoir ainsi les modalités concrètes d'exercice du droit syndical.
C'est dans ce cadre qu'il y a lieu de rechercher des dispositions adaptées au régime des horaires de travail appliqué dans l'entreprise. Je rappelle à cet égard qu'en cas d'horaires individualisés la diffusion des documents syndicaux est possible pendant la totalité de la plage mobile des horaires.
Pour ce qui concerne plus particulièrement le site de Cléon, se trouve posée la question de la remise en cause des modalités de diffusion de l'information syndicale au sein de l'établissement.
Indépendamment des procédures susceptibles d'être engagées devant la juridiction compétente pour la levée des sanctions ou la contestation du non-respect de la dénonciation de l'usage, je souhaite que, dans cette situation, direction et organisations syndicales s'entendent pour déterminer un régime permettant de concilier, d'une part, le respect de cette liberté fondamentale qu'est le libre exercice du droit syndical dans l'entreprise et, d'autre part, les règles attachées à l'exécution normale du travail et au fonctionnement de l'entreprise.
C'est bien à ce niveau que peut s'engager une négociation sur les adaptations susceptibles d'être apportées aux modalités de diffusion de l'information syndicale en tenant compte de la diversité des formes d'organisation du travail - que vous avez mise en avant dans votre question, monsieur le sénateur -, mais aussi de l'exécution normale de celui-ci et du respect des libertés et des droits syndicaux dans l'entreprise.
Je reste comme vous très attentif à ce que la réaffirmation par la Cour de cassation d'une interprétation littérale des termes de l'article L. 412-8 ne se traduise pas par la remise en cause d'usages établis, pour ce qui est de la diffusion de l'information syndicale, dans des conditions qui porteraient préjudice à l'exercice normal des droits syndicaux.
Les difficultés rencontrées par certains salariés exerçant des fonctions représentatives au sein de l'entreprise Renault à Cléon continuent de faire l'objet de la plus grande attention de la part de l'inspection du travail, qui a déjà reçu à plusieurs reprises sur ce sujet des délégations de représentants du personnel.
M. Thierry Foucaud. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Monsieur le ministre, s'il faut absolument faire respecter le quatrième alinéa de l'article L. 412-8 du code du travail, je crois cependant qu'il est devenu nécessaire de le modifier en fonction des données nouvelles, qui sont très nombreuses depuis 1968. Les salariés doivent pourtant être informés et leurs élus exercer leurs droits sans entrave, sans sanction et sans brimade.
Entre 1968 et aujourd'hui, trente et un ans se sont écoulés et beaucoup de choses ont changé. Il convient donc d'actualiser la législation afin qu'il ne soit plus possible de sanctionner des délégués qui informent régulièrement les salariés de l'entreprise.

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