Séance du 18 novembre 1999







M. le président. « Art. 1er. - Est approuvé le rapport annexé à la présente loi relatif aux orientations de la politique de santé et de sécurité sociale et aux objectifs qui déterminent les conditions générales de l'équilibre financier de la sécurité sociale pour l'année 2000. »
Je donne lecture du rapport annexé :

« RAPPORT SUR LES ORIENTATIONS DE LA POLITIQUE DE SANTÉ ET DE LA SÉCURITÉ SOCIALE ET LES OBJECTIFS QUI DÉTERMINENT LES CONDITIONS GÉNÉRALES DE L'ÉQUILIBRE FINANCIER
« Le Gouvernement entend conforter notre système de protection sociale parce qu'il organise des solidarités fondamentales nécessaires à chacun pour faire face aux risques de la vie. Il constitue en cela un puissant facteur de cohésion sociale et, loin d'être un obstacle à la croissance économique, il en est un des supports.
« Une sécurité sociale en déficit est une sécurité sociale affaiblie ; le redressement des comptes sociaux a donc été engagé. Dès 1999, l'ensemble des organismes de protection sociale - régimes maladie, vieillesse, famille et chômage - dégagera un excédent d'environ 10 milliards de francs. Il ne subsiste, en 1999, qu'un léger déficit du régime général d'environ 4 milliards après un déficit de 53 milliards en 1996, de 34 en 1997 réduit à 16,5 milliards en 1998. Les prévisions pour 2000 font apparaître un excédent d'environ 2 milliards.
« Convaincu de la nécessité de disposer de comptes fiables en temps utiles pour améliorer la gestion de la sécurité sociale, le Gouvernement s'engage à promouvoir l'harmonisation des plans comptables des différents régimes et l'accélération de la publication des comptes, ainsi qu'à présenter en annexe au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 les principaux agrégats en droits constatés et les éléments permettant le passage d'une présentation à l'autre.
« S'appuyant sur ce redressement des comptes, la politique de protection sociale s'articule autour des axes suivants :
« - permettre à tous d'accéder aux soins, améliorer leur qualité, promouvoir la participation des citoyens, assurer la maîtrise de l'évolution des dépenses et garantir un financement pérenne reposant sur le revenu du travail et du capital, incluant les profits financiers des entreprises, sont les objectifs généraux de la politique de santé ;
« - conforter les parents dans leur rôle éducatif, faciliter la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle, accroître l'appui aux familles en charge de jeunes adultes, faciliter l'accueil de l'enfant constituent les axes majeurs de la politique familiale ;
« - pour faire face au défi du vieillissement, les réformes nécessaires pour assurer la consolidation de nos régimes par répartition au nouveau contexte démographique seront entreprises dans le dialogue et la concertation ; les conditions de prise en charge de la dépendance seront améliorées ;
« - l'intégration des personnes handicapées sera favorisée à travers, notamment, la révision de la loi n° 75-535 du 30 juin 1975 relative aux institutions sociales et médico-sociales ;
« - dans le souci de favoriser l'emploi, une réforme d'ampleur réduisant les cotisations sociales assises sur les salaires, notamment ceux des moins qualifiés, sera entreprise.
« A. - Une politique de santé au service des populations.
« 1. Des soins de qualité pour tous.
« a) Permettre à tous d'accéder aux soins.
« La loi n° 99-641 du 27 juillet 1999 portant création d'une couverture maladie universelle constitue un progrès majeur pour garantir à tous l'accès aux soins. Elle ouvre le droit à une couverture complémentaire gratuite pour les plus modestes de nos concitoyens ; 6 millions de personnes sont concernées. Elle permettra également à l'ensemble des résidents d'accéder à une couverture maladie de base.
« Le Gouvernement entend assurer, en liaison avec l'ensemble des acteurs concernés - professionnels de santé, caisses d'assurance maladie, collectivités locales, associations humanitaires, organismes de couverture complémentaire -, une pleine application de cette loi à partir du 1er janvier 2000.
« b) Promouvoir le droit des malades et construire la démocratie sanitaire.
« Les états généraux de la santé ont donné la parole aux citoyens et ont permis d'engager un véritable débat public autour de la santé. Leur succès - près de mille réunions, une forte mobilisation des usagers - a montré un grand désir de participation. Les débats ont montré une forte attente d'information et d'écoute en matière de santé et une exigence de qualité portant sur les aspects relationnels, plus que sur les aspects techniques. L'accès aux soins, la lutte contre la douleur, le vieillissement, la santé des jeunes, la prévention sont également au centre des préoccupations de nos concitoyens.
« Le Gouvernement, pour tenir compte de ces préoccupations, propose une loi visant à affirmer les droits des malades, notamment en ce qui concerne l'accès au dossier médical. Des dispositifs plus efficaces de recours et de médiation seront mis en place. La participation des usagers à la définition et à la mise en oeuvre des politiques de santé publique, en particulier sur le plan régional, sera renforcée. Une réflexion sera menée pour prendre en compte l'aléa thérapeutique.
« c) Renforcer les actions de prévention et de promotion de la santé.
« Un plan d'information et d'actions pour garantir un exercice effectif du droit à la contraception a été engagé. Il s'agit de promouvoir une meilleure maîtrise de la contraception et de permettre le recours à la contraception d'urgence. Le Gouvernement entend améliorer la prévention des grossesses non désirées et garantir l'accès à l'interruption volontaire de grossesse sur l'ensemble du territoire. Concernant les pilules dites de troisième génération, le Gouvernement poursuivra ses efforts afin de garantir à toutes les femmes un égal accès au choix le plus large de contraceptifs oraux.
« La santé au féminin étant un volet incontournable de la politique de santé publique, le Gouvernement s'engage à veiller à renforcer la formation en gynécologie médicale.
« L'éducation thérapeutique des patients atteints de pathologies chroniques sera développée pour améliorer l'efficacité de la prise en charge et permettre une plus grande autonomie de la personne malade. Le diabète et l'asthme feront l'objet, dès 2000, d'expérimentations locales et régionales.
« Dans les premiers mois de l'an 2000, tous les départements disposeront d'un programme de dépistage du cancer du sein, réalisé à partir d'un cahier des charges et garanti par un contrôle de qualité définis nationalement. Le dépistage du cancer du col de l'utérus sera généralisé dans les deux ans. Celui du cancer du côlon sera étendu à de nouveaux départements.
« Le Gouvernement poursuivra les actions entreprises dans le cadre du programme de prévention du suicide 1998-2000, notamment chez les jeunes. L'objectif est de réduire à moins de 10 000 le nombre des morts dues à des suicides chaque année en France.
« La prévention a également été renforcée en matière de lutte contre le saturnisme. Il n'était pas acceptable que de jeunes enfants puissent contracter des maladies graves uniquement parce qu'ils n'ont pas la chance d'habiter dans des logements récents ou rénovés. La loi n° 98-657 du 29 juillet 1998 d'orientation relative à la lutte contre les exclusions a rendu obligatoire la déclaration de tout cas de saturnisme observé chez une personne mineure, ainsi qu'un diagnostic de l'habitat lorsque celui-ci présente un risque manifeste ou lorsqu'un cas d'intoxication au plomb chez un mineur y a été identifié.
« En 1999, un plan de lutte contre la drogue, les toxicomanies et en faveur de la prévention des dépendances aux substances psychoactives tenant compte des nouvelles modalités de consommation, en particulier chez les jeunes, a été établi. L'an 2000 permettra la mise en place d'une politique nationale de prévention des pratiques addictives, notamment pour les jeunes en milieu scolaire et extra-scolaire.
« A la suite du rapport de M. Recours, le Gouvernement entend accentuer sa politique de lutte contre le tabagisme :
« - s'inscrivant dans la perspective de la hausse des prix de 20 % proposée par M. Recours, afin d'avoir un réel impact sur la consommation, le Gouvernement recherchera au cours des années 2000-2002 une hausse des prix du tabac d'au moins 5 % par an ;
« - les minima des perceptions des taxes seront progressivement relevés et uniformisés entre les différents types de cigarettes ;
« - à l'occasion de sa présidence de l'Union européenne, la France proposera à ses partenaires un réexamen des règles de la fiscalité du tabac afin de réduire la consommation et d'harmoniser les règles fiscales dans l'Union ;
« - les moyens dont disposeront l'Etat et la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) pour la prévention du tabagisme seront renforcés ;
« - le Gouvernement permettra un meilleur accès aux substituts nicotiniques utilisés dans le sevrage tabagique ;
« - il organisera une concertation sur l'intérêt, en termes de santé publique, d'interdire la vente de tabac aux personnes de moins de seize ans, en s'inspirant des résultats obtenus dans les pays étrangers, et en associant davantage les petits débitants de tabac, pour qu'ils participent à des actions de prévention en direction des jeunes.
« Enfin, le nombre et les moyens des centres de cure ambulatoire en alcoologie, qui relèvent depuis le 1er janvier 1999 de l'assurance maladie, seront renforcés.
« En 1999, des orientations d'actions en matière de politique nutritionnelle et de carences nutritionnelles ont été définies. Le Gouvernement entend inscrire la nutrition parmi les thèmes prioritaires de santé publique au niveau de l'Union européenne, en 2000.
« La lutte contre les maladies sexuellement transmissibles sera renforcée. En 1999, les missions des centres de dépistage anonyme et gratuit ont été étendues au dépistage de l'hépatite B et C et aux maladies sexuellement transmissibles. Ce dépistage sera en 2000 entièrement pris en charge par l'assurance maladie.
« d) Améliorer la qualité des soins.
« Pour améliorer la qualité des soins en cancérologie, la pluridisciplinarité des prises en charge sera favorisée et des réseaux seront constitués pour garantir la coordination et la continuité des soins.
« Le Gouvernement a engagé une démarche identique pour améliorer la prise en charge des personnes diabétiques. Un programme d'organisation des soins sera mis en oeuvre en 2000 en se fondant en particulier sur les recommandations de l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé (ANAES).
« La sécurité et la qualité de prise en charge de la grossesse seront améliorées. La mise en place d'une politique périnatale, favorisant au niveau régional le travail en réseau de l'ensemble des établissements de santé et des professionnels concernés, débutée en 1999, sera poursuivie en 2000. Au niveau individuel, chaque femme enceinte devrait pouvoir bénéficier d'un premier entretien spécialisé centré sur la prévention.
« Attaché à conforter et développer la pratique de la dyalise dans notre pays, le Gouvernement mettra en place un système de recensement des malades permettant d'adapter les structures de soins aux besoins recensés.
« L'évaluation du respect des mesures de sécurité anesthésique, en s'assurant de la formation en nombre suffisant d'anesthésistes, et de la qualité de prise en charge des urgences à l'hôpital sera poursuivie.
« Les actions débutées en 1999, dans le cadre du plan national de lutte contre l'hépatite C, seront poursuivies, en particulier en matière de prévention, afin que le plus grand nombre des personnes porteuses du virus de l'hépatite C connaissent leur état sérologique et reçoivent les traitements nécessaires.
« Le programme de lutte contre la douleur, débuté en 1998, sera renforcé avec la généralisation des protocoles déléguant aux infirmiers la prescription d'antalgiques et la poursuite d'une large information du public. Le dispositif de prise en charge à domicile des personnes en fin de vie sera renforcé.
« e) Poursuivre l'organisation du dispositif de sécurité sanitaire.
« La loi n° 98-535 du 1er juillet 1998 relative au renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité sanitaire des produits destinés à l'homme a permis la création d'une Agence de sécurité sanitaire des aliments, la transformation du réseau national de santé publique en Institut de veille sanitaire et celle de l'Agence du médicament en Agence de sécurité sanitaire des produits de santé.
« Un Comité national de la sécurité sanitaire réunit l'ensemble des autorités compétentes et permet d'assurer une coordination générale de l'action publique. Des systèmes d'alerte ont été mis en place dans les grands secteurs de risque et permettent des interventions plus rapides et plus précoces des pouvoirs publics.
« Ces institutions sont désormais opérationnelles ; leurs conseils d'administration ont été récemment installés. Elles donneront toute leur portée aux actions de prévention, d'alerte et d'évaluation mais également de gestion des risques lorsqu'ils surviennent.
« De même, l'obligation de lutte contre les infections nosocomiales a été renforcée. La mise en place des comités de lutte contre les infections nosocomiales (CLIN) est désormais une obligation légale, y compris dans les établissements privés. La loi du 1er juillet 1998 organise un système de signalement de ces infections.
« Le Gouvernement entend poursuivre le renforcement de ce dispositif :
« - l'Agence française du sang laissera place au 1er janvier 2000 au nouvel Etablissement français du sang chargé de la collecte, de la production et de la distribution des produits sanguins labiles sur l'ensemble du territoire ;
« - une Agence de sécurité sanitaire environnementale destinée à mieux expertiser et évaluer l'impact, sur la santé, des perturbations de l'environnement sera créée.
« f) Améliorer la sécurité au travail, mieux prendre en charge les maladies professionnelles.
« Le nombre des accidents du travail est à nouveau en augmentation. Si la reprise de l'activité peut expliquer ce phénomène, il n'en appelle pas moins une vigilance accrue.
« Le Gouvernement a donc ouvert une réflexion collective et concertée afin d'assurer une meilleure prévention des risques professionnels. Il s'agit d'assurer une meilleure articulation de l'action, au sein de l'entreprise, des représentants du personnel, de la médecine du travail, des services de prévention de l'assurance maladie et de l'inspection du travail.
« Dans ce cadre, les organisations de salariés et d'employeurs ont engagé, depuis avril 1999, une concertation sur les améliorations à apporter à notre système de prévention. Le Gouvernement souhaite que ces réflexions contribuent à la définition d'une réforme de la médecine du travail qui permettra de garantir l'indépendance des médecins et de développer les actions de prévention dans le milieu du travail.
« L'Institut de veille sanitaire renforcera, pour sa part, la surveillance des risques professionnels. L'inspection du travail sera mobilisée dans le cadre d'orientations prioritaires portant sur l'évaluation des risques dans les entreprises, notamment la lutte contre le risque cancérogène et la surveillance de la qualité des équipements de travail et de protection.
« Par ailleurs, le dispositif de prise en charge des maladies professionnelles a été profondément rénové pour mieux garantir les droits des victimes.
« Ainsi, un délai raisonnable est désormais imposé aux caisses pour reconnaître le caractère professionnel de la maladie. Les délais de prescription ont été redéfinis afin d'empêcher que les victimes soient privées de leurs droits du seul fait de la méconnaissance de l'origine professionnelle de leur état. Pour les victimes de l'amiante, tous les dossiers prescrits peuvent désormais être rouverts. »
« Le barème d'invalidité en matière de maladie professionnelle a été rendu opposable aux caisses. La création de nouveaux tableaux, comme en 1999 celui relatif aux lombalgies et aux dorsalgies graves, permettra la prise en charge de nouvelles pathologies.
« Des mesures particulières ont par ailleurs été prises en faveur des victimes de l'amiante. Les modalités de reconnaissance des pneumoconioses ont été alignées sur le droit commun. Un fonds a été créé pour financer l'allocation de cessation anticipée des travailleurs de l'amiante. Dans un premier temps, les personnes concernées étaient celles ayant travaillé dans des entreprises de fabrication de matériaux contenant de l'amiante. Le Gouvernement propose d'ouvrir le champ de l'allocation à d'autres secteurs d'activité : dockers, entreprises de flocage et calorifugeage, réparation et construction navales. Le Gouvernement étudie également la possibilité d'accorder cette allocation aux salariés relevant de la sidérurgie ayant travaillé au contact de l'amiante.
« Enfin, il n'est plus supportable que les victimes d'accidents successifs du travail ne soient pas indemnisées sur la base d'un taux cumulé d'incapacité.
« 2. Moderniser notre système de santé et d'assurance maladie.
« a) La médecine de ville : confier une pleine responsabilité aux caisses et aux professionnels de santé pour réguler la médecine de ville.
« La modernisation de notre système de santé passe par un partenariat actif entre les caisses d'assurance maladie et des professionnels de santé tant au niveau national qu'au niveau local.
« C'est en grande partie à travers ce partenariat que peuvent aboutir les politiques structurelles qui conditionnent la qualité et l'efficience de notre système de santé en ville.
« Les possibilités offertes aux partenaires conventionnels ont été élargies. Ainsi, ils peuvent modifier les modalités de rémunération des professionnels libéraux, adapter les dispositifs de régulation de la démographie médicale, favoriser le développement des réseaux ou accroître la transparence des informations sur l'activité médicale.
« Le Gouvernement soutient le processus d'informatisation des cabinets médicaux qui, malgré des difficultés techniques initiales, connaît un développement significatif : 70 % des cabinets médicaux sont aujourd'hui informatisés. Il a pris les dispositions législatives nécessaires au développement de la carte médicalisée qui se substituera à la première génération de cartes Vitale.
« Il propose au Parlement de renforcer cette politique conventionnelle en confiant aux caisses et aux professionnels de santé une pleine délégation pour réguler les soins de ville.
« Les caisses et les syndicats représentatifs auront la responsabilité de gérer une enveloppe englobant la rémunération de l'ensemble des professionnels libéraux. Il leur appartiendra de prendre les mesures de toute nature nécessaires pour assurer le respect de cet objectif. Les caisses disposeront, dans ce cadre, de prérogatives accrues lorsqu'un accord avec les professionnels n'est pas possible. En contrepartie de cette délégation de responsabilités, elles devront établir périodiquement que leurs décisions sont conformes aux objectifs qui leur sont assignés.
« De même, les caisses en charge de la gestion du risque et du contrôle médical ont une responsabilité essentielle quant à l'évolution des prescriptions. Elles seront appelées à rendre compte périodiquement de leur action dans ce domaine.
« La perspective d'un reversement du corps médical, en cas d'évolution excessive de prescriptions, n'a pas prouvé son efficacité en termes de modifications de comportements et n'apporte pas de réelles garanties en termes financiers à l'assurance maladie. Aussi le Gouvernement entend-il promouvoir un meilleur usage de prescription notamment en matière de médicament en s'appuyant sur des bases médicalisées et en privilégiant des mécanismes incitatifs. Ainsi, les caisses et les professionnels de santé seront appelés à définir des programmes de bon usage des soins au plan national ou local dont la réussite ouvrira droit à un intéressement des professionnels. De même, possibilité leur sera ouverte d'augmenter la prise en charge des cotisations sociales des professionnels qui acceptent de prendre des engagements particuliers sur la qualité de leur pratique.
« Par ailleurs, le Gouvernement poursuit la modernisation de notre système de ville. Ainsi, après une large concertation avec les pharmaciens, une réforme des règles d'implantation des officines et de la marge des pharmaciens a été mise en oeuvre. De même, il entend, en accord avec les professionnels paramédicaux, promouvoir une meilleure adaptation des soins aux besoins des patients. Pour cela, les professionnels auront la possibilité, si le médecin l'accepte et sous son contrôle, de définir un plan de soin.
« Enfin, une réforme des études médicales initiales, dans la perspective notamment de renforcer la formation de médecine générale, ainsi qu'une réforme du dispositif de formation médicale continue seront proposées au Parlement au cours de l'an 2000.
« b) L'hôpital : promouvoir la qualité des soins et adapter l'offre aux besoins.
« Promouvoir la qualité des soins, adapter notre offre hospitalière aux besoins, favoriser la coopération entre établissements et avec la médecine de ville, améliorer l'efficience globale du système hospitalier et adapter le financement correspondant à ces besoins constituent les objectifs généraux de la politique hospitalière du Gouvernement.
« La démarche d'accréditation est engagée dans plusieurs dizaines d'établissements hospitaliers. Cette démarche est essentielle non seulement parce qu'elle permet de contrôler la qualité des soins dispensés mais également parce qu'elle est l'occasion d'engager une démarche de progrès dans les établissements concernés. Le Gouvernement est attaché à ce que les résultats de l'accréditation soient rendus publics pour répondre à l'exigence légitime de transparence de nos concitoyens.
« De nouveaux schémas d'organisation sanitaire ont été établis. Leur élaboration a donné lieu à une large concertation avec les représentants des établissements et de leurs personnels ainsi qu'avec les représentants des usagers et les élus locaux. Ces documents ont permis de définir les priorités régionales qui serviront de base à la recomposition de l'offre hospitalière. Ainsi, certaines activités (cardiologie, cancérologie) vont connaître des développements pour mieux répondre aux besoins. D'autres activités (urgences...) sont appelées à se concentrer sur certains sites du fait des exigences de sécurité et de l'évolution des techniques et des modes de prises en charge. Les schémas régionaux d'organisation sanitaire (SROS) dessinent enfin le contour des réseaux qui seront instaurés entre les établissements notamment pour adapter la prise en charge à la situation des patients (périnatalité, cancérologie). Enfin, les SROS permettent d'organiser les conversions progressives du court séjour vers les long et moyen séjours.
« Le Gouvernement poursuit la politique de réduction des inégalités entre régions et engage une réforme profonde des modes d'allocation des ressources pour mieux prendre en compte l'activité médicale des établissements. D'ores et déjà, la loi prévoit la possibilité d'expérimenter la tarification à la pathologie. L'étude des conditions techniques d'une généralisation de ce mode de tarification est engagée avec les représentants de l'hospitalisation publique et privée. Une attention particulière sera portée, dans ce cadre, à la prise en compte des charges particulières liées aux exigences du service public (permanence de soins, recherche, formation...). C'est dans cet esprit que le Gouvernement propose un nouveau mode d'allocation des ressources aux cliniques privées. Elle vise à entamer dès à présent la transition vers la tarification à la pathologie, en faisant varier progressivement les tarifs, tant au niveau des régions que des établissements, pour tenir compte de l'activité médicale.
« Le Gouvernement s'engage à mener une réflexion sur un renforcement de la régionalisation et de la fongibilité des enveloppes du système de santé et notamment sur la mise en place d'une enveloppe spéciale d'un montant de 0,1 % de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie confiée aux régions les plus en retard du point de vue sanitaire.
« c) Le médicament : optimiser les prescriptions et les remboursements.
« La politique du Gouvernement est guidée par le souci de mettre à la disposition de nos concitoyens les progrès réalisés dans le domaine du médicament, tout en maîtrisant l'évolution des dépenses. Aussi, il convient d'optimiser la prescription et les remboursements pour pouvoir valoriser les efforts de recherche et bien rembourser les médicaments les plus utiles.
« Dans cet esprit, le Gouvernement a donc pris les dispositions nécessaires pour promouvoir le développement des génériques. Les pharmaciens sont aujourd'hui autorisés à substituer des génériques aux produits princeps. La profession, dans le cadre d'un accord global, a pris des engagements sur le niveau de substitution des génériques aux produits princeps.
« Le service médical rendu a vocation à servir de base à la définition des prix et du taux de remboursement des spécialités thérapeutiques. L'intérêt thérapeutique de l'ensemble des spécialités commercialisées fera l'objet d'une réévaluation dans l'année à venir. Cette démarche est d'ores et déjà engagée pour plus de mille spécialités.
« La politique du Gouvernement en matière de médicament s'appuie sur les relations conventionnelles avec les laboratoires dans le cadre fixé par l'accord signé en 1999 avec le syndicat national de l'industrie pharmaceutique. Cet accord fixe la base d'une coopération entre les pouvoirs publics et l'industrie pour, notamment, maîtriser les frais de promotion ou réduire les surconsommations avérées dans certaines classes thérapeutiques.
« Il conviendrait de permettre le développement de l'automédication.
« Le Gouvernement mènera une réflexion afin d'engager une réforme de la fonction logistique dans la distribution du médicament.
« Les lois de financement de la sécurité sociale ne peuvent accueillir que des dispositions ayant une incidence financière. Le Gouvernement proposera donc au printemps de l'année 2000 un texte relatif à la santé. Ce texte sera construit dans le partenariat autour des objectifs suivants :
« - moderniser l'assurance maladie et le cadre de ses relations avec les professionnels de santé ;
« - instaurer une véritable démocratie sanitaire et garantir les droits des malades ;
« - améliorer la qualité de notre système de soins, notamment en modernisant les conditions d'exercice des professionnels et en développant la prévention et l'éducation pour la santé ;
« - mieux coordonner politique de santé et lois de financement de la sécurité sociale.
« B. - Rénover la politique familiale.
« Le Gouvernement entend aider et soutenir les familles pour qu'elles puissent pleinement assumer le rôle majeur qui leur revient dans l'éducation des enfants, la cohésion sociale, la construction de notre avenir.
« Il a entrepris une rénovation en profondeur de la politique familiale dont la Conférence de la famille, réunie annuellement depuis 1998, marque les étapes. Il entend ainsi associer à sa définition l'ensemble des acteurs concernés, notamment le mouvement familial.
« Le Gouvernement s'attache à conforter les parents dans leur rôle éducatif, notamment en favorisant leur participation à la vie de l'école. Il a entrepris la mise en place d'un réseau national d'appui, d'écoute et de conseil aux parents. Il poursuit avec la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) une politique active pour favoriser l'accueil des enfants hors du temps scolaire à travers les contrats temps libre et les contrats éducatifs locaux.
« Il a entrepris de rendre les aides aux familles plus justes à travers la réforme du quotient familial.
« Il est particulièrement sensible aux problèmes rencontrés par les familles ayant en charge les jeunes adultes. Après avoir étendu à vingt ans les allocations familiales pour tous les enfants à charge de leurs parents, il propose de porter à vingt et un ans l'âge pris en compte pour le calcul des allocations logement et le complément familial.
« Il sera remis au Parlement avant le 1er octobre 2000, en vue de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, un rapport sur l'ensemble des aides auxquelles ouvre droit la charge de jeunes adultes, ainsi que sur celles qui leur sont versées.
« La politique de réduction du temps de travail libérera du temps pour la vie familiale et les contraintes particulières des parents seront prises en compte dans le nouveau dispositif d'aménagement du temps de travail.
« Dans la perspective de la Conférence de la famille de l'an 2000, la Délégation interministérielle à la famille est chargée de conduire une réflexion et de faire des propositions sur les structures et les conditions de l'accueil du jeune enfant.
« Les aides au logement ont été améliorées en assurant leur revalorisation effective et en programmant l'alignement des loyers plafond de l'allocation de logement familial sur ceux de l'aide personnalisée au logement. Cette action sera poursuivie avec, pour objectif, une harmonisation des barèmes et des conditions de ressources pour répondre à un souci de simplification, de cohérence et de justice sociale.
« Pour permettre la mise en oeuvre sur le long terme de cette politique, il est proposé de garantir l'évolution des ressources de la branche famille.
« C. - Faire face au défi du vieillissement.
« 1. Consolider nos régimes par répartition.
« Le Gouvernement entend assurer la pérennité de nos régimes par répartition, dans la concertation et le souci de l'équité entre générations et entre régimes.
« Le Commissariat général du Plan a établi un diagnostic de la situation de nos régimes de retraite en associant à cet exercice les partenaires sociaux et les représentants des divers régimes.
« Ce diagnostic montre que nos régimes par répartition ont réussi à assurer aux retraités un niveau de vie équivalent à celui des actifs. Il montre également les charges croissantes auxquelles ils devront faire face après 2005 du fait de l'arrivée à l'âge de la retraite des générations nombreuses nées après 1945 et de l'allongement de la durée de vie.
« Sur la base de ce diagnostic, le Gouvernement a ouvert une concertation avec les partenaires sociaux afin de définir les principes directeurs qui permettront de consolider l'ensemble des régimes au nouveau contexte démographique. Cette phase de concertation s'échelonnera jusqu'au début de l'année 2000.
« Pour faciliter l'adaptation des régimes de retraites, la constitution d'un fonds de réserve sera poursuivie notamment par l'affectation des excédents de la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés (CNAVTS).
« 2. Accroître la qualité des réponses données au problème de la dépendance.
« Le nombre des personnes dépendantes est appelé à s'accroître. Il est actuellement d'environ 700 000. L'effort consenti pour assurer le développement des services de soins infirmiers à domicile (2 000 places en 1999) et des lits de sections de cure médicale (7 000 en 1999) sera poursuivi.
« L'action du Gouvernement s'oriente selon trois axes :
« - améliorer la coordination des aides autour de la personne. Pour cela, des expérimentations de "guichets uniques" ou de "bureaux d'informations et de conseils" seront lancées sur un certain nombre de sites volontaires ;
« - favoriser le maintien à domicile. Le développement des services d'aide à domicile sera soutenu. La loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 a ainsi prévu l'exonération à 100 % des charges patronales de sécurité sociale pour les interventions de ces services auprès de personnes handicapées ou dépendantes. Les modalités de tarification des aides à domicile seront améliorées, en concertation avec l'ensemble des acteurs de ce secteur d'activité ;
« - préparer, dans les meilleures conditions, l'entrée en vigueur de la réforme de la tarification des établissements pour personnes âgées. Cette réforme permettra de rendre plus transparente et équitable l'allocation des moyens de l'assurance maladie entre les établissements. Elle permettra en outre d'améliorer la qualité des prestations fournies et la formation des personnels et de mieux affirmer les droits des personnes âgées accueillies dans les établissements.
« En ce qui concerne, enfin, la prestation spécifique dépendance (PSD) instituée par la loi n° 97-60 du 24 janvier 1997, le Gouvernement s'est engagé, lors du Comité national de coordination gérontologique (CNCG) du 29 avril 1999, à prendre des mesures législatives et réglementaires permettant d'améliorer le fonctionnement de cette prestation, dont les résultats sont inférieurs aux prévisions et témoignent d'importantes inégalités de traitement entre les départements.
« D. - Favoriser l'intégration des personnes handicapées ; améliorer la prise en charge des personnes les plus gravement handicapées.
« Près de 3 millions de personnes sont confrontées à un handicap plus ou moins grave. Le Gouvernement conduit une politique globale en faveur de ces personnes, autour de deux objectifs majeurs : favoriser l'intégration des personnes handicapées dans le milieu de vie ordinaire, améliorer la prise en charge des plus gravement handicapées d'entre elles.
« Ces principes commandent la mise en oeuvre de trois grandes catégories de mesures :
« - promouvoir le développement des dispositifs les plus favorables à l'intégration. La socialisation et l'intégration la plus précoce possible dans leur famille et à l'école ordinaire constituent un objectif prioritaire. Tous les départements seront dotés progressivement de centres d'action médico-sociale précoce (CAMSP). La création ou l'extension de capacités de services d'éducation spécialisée et de soins à domicile (SESSAD) sera favorisée. Pour les adultes, le Gouvernement entend encourager toutes les initiatives favorisant le soutien à la vie à domicile des personnes handicapées. L'amélioration de l'accès aux aides techniques fait l'objet d'un examen concerté avec l'ensemble des acteurs ;
« - apporter une réponse adaptée et durable à l'insuffisance de places dans les établissements spécialisés pour les adultes handicapés. La mise en oeuvre du plan pluriannuel (1999-2003) destiné à créer 5 500 places nouvelles dans les maisons d'accueil spécialisées (MAS) et les foyers à double tarification (FDT) sera poursuivie en 2000 ;
« - certains types de handicaps sont encore insuffisamment pris en charge parce que trop lourds ou mal connus. Tel est le cas des polyhandicapés, des autistes, des traumatisés crâniens ou des personnes atteintes de handicaps rares. Un effort spécifique est conduit en direction de ces personnes notamment par la création en 1999 de 450 places nouvelles pour les adultes et les enfants autistes. Trois centres ressources sur les handicaps rares ont été créés. Ces actions seront poursuivies et amplifiées.
« E. - Réformer le financement de la protection sociale pour favoriser l'emploi.
« Après le transfert des cotisations salariales maladie sur la CSG, le Gouvernement propose une réforme d'ampleur des cotisations patronales pour favoriser l'emploi.
« L'assiette des cotisations patronales est rééquilibrée en faveur des entreprises de main-d'oeuvre :
« - par la suppression de l'actuelle ristourne dégressive de charges patronales sur les salaires inférieurs à 1,3 SMIC et son remplacement par un nouveau mécanisme d'allégements à la fois plus ample - les allégements vont jusqu'à 1,8 SMIC - et plus puissant - le nouvel allégement représente 26 points de cotisations patronales au SMIC, soit plus de 85 % des cotisations patronales du régime général ;
« - par la création d'une contribution des employeurs sur d'autres éléments que les salaires : les bénéfices des sociétés de plus de 50 millions de francs de chiffre d'affaires et les activités polluantes.
« Le bénéfice du nouvel allégement sera réservé aux entreprises ayant conclu un accord fixant la durée du travail à trente-cinq heures ou moins. L'exigence d'un accord garantit que les allégements des charges auront une contrepartie en termes d'emplois.
« Cette réforme des cotisations employeurs répond ainsi aux trois objectifs majeurs que s'était fixés le Gouvernement :
« - l'emploi tout d'abord. En baissant très significativement les charges sociales sur les bas et moyens salaires, cette réforme s'attaque à un handicap important de nos industries de main-d'oeuvre ;
« - en étendant le bénéfice des allégements jusqu'à 1,8 SMIC, c'est-à-dire à plus de deux tiers des salariés, le nouveau dispositif fait disparaître les effets pervers de freinage des évolutions salariales au niveau du SMIC introduits par la ristourne actuellement en vigueur ("trappe à bas salaire") ;
« - cette réforme sera réalisée sans coût supplémentaire pour les ménages, mais également sans augmenter le montant global des prélèvements sur les entreprises. »
La parole est à M. Leclerc.
M. Dominique Leclerc. L'article 1er porte sur l'approbation du rapport annexé, qui présente la politique de santé publique souhaitée par le Gouvernement pour prendre en compte les problèmes de notre pays.
Dans ce rapport, madame le ministre, vous nous affirmez que le redressement des comptes sociaux est engagé. Nous vous croyons, mais la présentation est telle qu'il nous est difficile de l'apprécier.
En effet, malgré les remarques de la Cour des comptes et quelques progrès engagés, la présentation de la loi de financement de la sécurité sociale reste opaque en raison des circuits de financement complexes, ce qui rend le contrôle du Parlement particulièrement difficile. En outre, la réception beaucoup trop tardive de l'essentiel des documents ne contribue pas à faciliter notre travail.
La logique de la loi de financement était pourtant d'identifier, pour chaque branche et pour chaque régime concerné, les recettes et les dépenses afin d'accroître la visibilité indispensable pour une bonne gestion. Cet objectif de clarification est loin d'être là. La Cour des comptes l'a d'ailleurs aussi souligné puisqu'elle considère les progrès comme encore trop peu nombreux et les éléments de diagnostic et de connaissance encore largement insuffisants.
Il en est ainsi de la présentation même des comptes de la sécurité sociale.
En effet, même si de réels progrès ont été réalisés dans l'élaboration des comptes des organismes de base, qui sont établis en droits constatés, les magistrats de la Cour des comptes estiment que la qualité de beaucoup de données reste inégale, que l'appréciation quantitative des conséquences des dispositions du projet de loi de financement est imparfaite et, chose beaucoup plus grave, que les comptes eux-mêmes sont parfois encore imparfaits.
M. François Autain. La perfection n'est pas de ce monde !
M. Dominique Leclerc. Aussi la Cour estime-t-elle qu'il est urgent d'achever la réforme des droits constatés.
En effet, si les comptes des organismes de base sont présentés en droits constatés, ce qui offre l'avantage de permettre une gestion plus responsable, les comptes agrégés, tout comme les agrégats de la loi de financement, restent en comptabilité de caisse.
Aussi, dans un souci de transparence, il est urgent que des clarifications interviennent au plus vite !
Au-delà de ces réserves de forme sur la présentation des comptes, nous regrettons qu'en quatre ans nous n'ayons pas amélioré notre façon de discuter de cette loi de financement.
En effet - et notre intention n'est pas d'ironiser sur le titre de cet article - il semble qu'il eût été utile de se rappeler que l'objet réel de ces lois n'est autre que d'envisager les moyens de financement de la protection sociale de nos concitoyens.
Or - cela a été dit - cela ne peut se réaliser qu'après avoir fixé des objectifs, chiffré le coût de ces derniers et, au besoin, fait des choix si tout ne peut être mis en oeuvre.
Malheureusement, cette année encore, tel n'est pas le cas.
Vous vous êtes limitée à prendre les objectifs de l'année précédente, auxquels vous appliquez un taux complémentaire, sans réelle connexion avec la réalité des besoins. Nous pourrions croire, à vous écouter, que vos préoccupations sont d'abord d'ordre comptable. Quel dommage ! Une annexe chiffrée aurait permis non seulement de définir un taux approprié, mais aussi de savoir ce qui n'est pas budgété.
Pour étayer ces propos, je voudrais parler de l'hôpital. Mais après les discours de nos deux collègues, Mmes Beaudeau et Borvo, je crois que vous avez fait de l'hôpital un domaine réservé.
Vous nous dites que tout va bien. Aucun article de ce projet de loi ne traite de ce sujet qui n'est abordé dans le rapport que de façon générale et, là encore, sous forme d'autosatisfecit. Mais, en réalité, on le sait tous, l'hôpital va mal, non pas uniquement à Paris, mais dans toute la France.
Les praticiens sont inquiets, les conditions de fonctionnement se dégradent, tandis que nous voyons certains transferts se réaliser entre différents secteurs. Je n'invente rien. En effet, le 8 octobre dernier, dans la presse, un groupe de médecins et de directeurs d'hôpitaux ont, dans un article, tiré la sonnette d'alarme. Ils constatent que l'hôpital est aujourd'hui caractérisé par le maintien de structures ou d'activités qui ne sont pas toujours très performantes, qu'il est incapable de se remettre en question et souvent qu'il souffre d'une dispersion des moyens.
Pour conclure, la situation est préoccupante, et je passe sur toutes les lourdeurs statutaires !
Vous l'aurez compris, madame le ministre, adopter cet article en l'état ne nous satisfait pas ; c'est pourquoi je soutiendrai avec d'autant plus d'énergie la nouvelle rédaction du rapport annexé que la commission a adoptée sur l'initiative de notre excellent rapporteur Charles Descours. M. le président. La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo. Madame la ministre, le rapport annexé au présent projet de loi énonce un certain nombre d'objectifs que nous ne pouvons que partager, comme je l'ai déjà dit dans la discussion générale. Certaines mesures, sur lesquelles je ne reviendrai pas, constituent des avancées qui me tenaient particulièrement à coeur.
S'agissant du retour à l'équilibre des comptes sociaux, effectivement, il convient de le saluer, même si, comme j'ai eu l'occasion de le rappeler dans la discussion générale, nous regrettons qu'il résulte en partie d'une pression constante sur les dépenses sociales, quand bien même la croissance a permis de redresser le niveau des recettes.
Madame la ministre, les excédents dégagés ouvrent certaines marges de manoeuvre. Pourquoi, dès cette année, ne pas prendre l'engagement de relever sur plusieurs années le taux moyen de remboursement de l'ensemble des dépenses de santé, en définissant des priorités concernant, notamment, la lunetterie, les soins dentaires, etc. ?
Vous allez dire que je suis obstinée, mais je crois que j'ai de bonnes raisons de l'être quand je constate que nous n'en sommes pas là.
Vous savez que nous avons, comme vous, défendu la couverture maladie universelle, et nous nous sommes réjouis que la loi l'instituant soit votée. Cependant, les associations qui ont tant fait pour lutter contre les exclusions et qui ont salué la création de la couverture maladie universelle sont aujourd'hui inquiètes sur la réalité de son application.
Je le suis aussi quand je lis, aujourd'hui même, dans le journal Le Monde , que vous avez cédé aux associations et aux mutuelles pour plafonner le remboursement des lunettes et de la dentisterie. C'est la logique de la plupart des régimes complémentaires que de limiter le remboursement du nombre des lunettes ou des appareils dentaires par an. Mais, en l'occurrence, cette logique va s'appliquer aux remboursements de base et à des personnes qui, si elles ne bénéficient pas de remboursements complémentaires, ne peuvent assurer elles-mêmes le paiement des services rendus.
Nous entrons ainsi dans une logique de limitation des remboursements, de paniers de soins indépassables en matière de remboursement, logique que nous réprouvons et qui va dans un sens opposé à celui dans lequel vous aviez annoncé vous engager. Je ne peux évidemment qu'être inquiète.
J'ai dit, par ailleurs, que les personnels des caisses de sécurité sociale s'interrogeaient sur leur capacité à mettre en oeuvre la couverture maladie universelle, puisque l'instauration de cette dernière va entraîner pour eux une augmentation de la charge de travail. Si nous n'avons pas les moyens de faire face aux sujétions qui vont découler de la mise en oeuvre de la couverture maladie universelle, la loi ne sera pas réellement appliquée.
Tel est l'objet de notre amendement n° 104, sur lequel je ne reviendrai pas lors de l'examen des amendements.
D'une façon générale, poursuivons nos efforts pour mettre sur pied une politique de santé au service de la population en élargissant le champ de la protection sociale. Améliorons significativement et progressivement les niveaux de remboursement.
Nous tenons beaucoup à cette proposition, qui fait l'objet de l'amendement n° 105.
Voter celui-ci serait le symbole de l'adoption d'une nouvelle politique en matière de sécurité sociale.
Bien que nous déplorions que ce rapport annexé soit dépourvu de toute valeur normative, nous attachons une grande importance à son contenu, puisqu'il définit les orientations de la politique de santé et de sécurité sociale. C'est le seul point du texte où il nous est donné la possibilité de débattre, sur le fond, du qualitatif et non uniquement du quantitatif.
Des points qui nous tenaient à coeur ont pu être introduits par amendements lors de l'examen du texte à l'Assemblée nationale. Vous avez, madame le ministre, confirmé la révision prochaine de la loi de 1975, le renforcement de la formation en gynécologie médicale, ainsi que la mise en place d'un système de recensement des insuffisants rénaux permettant d'adapter les structures de soins aux besoins en matière de dialyse.
Vous avez également manifesté la volonté de garantir à toutes les femmes l'égal accès aux choix le plus large de contraceptifs oraux ; je pense à la pilule de troisième génération. Nous verrons ce qu'il en sera.
A priori , la commission des affaires sociales ne partage pas notre souci de dialogue sur le contenu d'une politique de prévention ambitieuse, sur les priorités à retenir en matière de santé publique ou pour satisfaire les besoins fondamentaux de l'ensemble de nos concitoyens.
La seule dimension du rapport annexé, tel qu'il a été réécrit par la majorité sénatoriale, est budgétaire. Il ne contient pas une ligne ni une référence concernant l'accès de tous à des soins de qualité, à la construction de la démocratie sanitaire, au renforcement de la prévention, à l'hôpital, à la rénovation de la politique familiale, à laquelle elle semblait s'attacher, ou à l'amélioration de la prise en charge de la dépendance.
Pour toutes ces raisons, nous voterons contre la nouvelle rédaction proposée par la commission. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet. Pour porter une appréciation et se déterminer sur le rapport sur les orientations et les objectifs de la politique de santé, il serait possible de se livrer à une analyse point par point des différentes rubriques figurant sur le document. Mais je m'en garderai bien.
Je voudrais cependant insister, madame la ministre, sur quelques points qui, je l'espère, pourraient faire l'objet de votre part de quelques éléments de réponse. Je voudrais savoir, à propos des droits des malades et de la sécurité sanitaire, quelles sont les intentions du Gouvernement quant à l'indemnisation de l'aléa médical.
Avec notre collègue M. Evin, nous avons organisé, voilà quelques jours seulement, un colloque à l'Assemblée nationale qui a fait apparaître l'urgence de prendre des dispositions en la matière.
De même, je pourrais souligner, pour m'en réjouir, la mention faite à propos de la sécurité sanitaire de la double mission des organismes que nous avons mis en place, je pense notamment à la mission d'évaluation et de gestion des risques. J'ose espérer que votre collègue M. le ministre de l'agriculture sera d'accord avec vous sur ce point.
Je pourrais, bien sûr, formuler quelques réflexions sur l'hôpital, mais l'argumentation développée tout à l'heure par deux intervenants rejoint l'angoisse que certains de mes collègues chefs de service des hôpitaux de l'assistance publique des hôpitaux de Paris, l'APHP, sont venus me livrer.
Cette inquiétude me paraît fondée et je me garderai bien de jouer Paris contre la province ou l'APHP contre les autres établissements de l'Ile-de-France.
Plutôt que de me livrer à cette analyse, je voudrais faire un double constat. Tout d'abord, le fait que nous ayons été d'accord, cette année encore, pour réserver l'examen de cet article 1er et du rapport annexé à la fin de la discussion des articles montre bien que nous ne nous faisons aucune illusion sur la portée de celui-ci.
Je rappelle, en effet, que le rapport annexé porte sur les orientations de la politique de santé et de la sécurité sociale et sur les objectifs qui déterminent les conditions générales de l'équilibre financier.
Mes chers collègues, nous mettons la charrue devant les boeufs parce que nous ne croyons guère à la réalité de l'exercice qui nous est demandé. Cela fait des heures que nous discutons de dispositions qui touchent à l'équilibre financier et que nous ramenons à la fin de notre débat une réflexion, qui sera sans doute extrêmement rapide, sur les conditions générales, les objectifs et les orientations de la politique de santé.
Il y a là un vrai problème. Je n'en fais pas le reproche au Gouvernement car il est inhérent à l'extrême difficulté de cet exercice pourtant nécessaire.
Bien sûr, les motifs d'insatisfaction sont nombreux : quant aux finalités de ce rapport qui ne sont pas, à mes yeux, satisfaites, quant aux interrogations sur la nature juridique de ce document, puisque l'arrêt du Conseil d'Etat montre bien qu'il n'a pas de valeur juridique, enfin, quant à l'annualité de ce rapport, car, madame la ministre, la référence au temps me paraît indispensable en matière de politique de santé.
Il suffit de faire une lecture comparative du document concernant les objectifs pour 1999 et les objectifs pour 2000 : c'est, à quelques phrases près, à quelques mots près, à quelques virgules près, pratiquement la même formulation. Là encore, ce n'est pas une critique que je formule, c'est le constat qu'une politique de santé ne peut que s'inscrire dans le temps, ce qui vide d'une partie de leur utilité les conférences annuelles de la santé.
Il est donc nécessaire de perfectionner cette démarche pour parvenir à moderniser le système de santé et d'assurance maladie. « Vaste entreprise », aurait dit un grand homme qui fut longtemps à la tête du pays !
Cet exercice, nous y avons apporté notre participation. Mais je m'interroge, madame la ministre, pour savoir si, plutôt que ce rapport annuel sur les objectifs, il ne serait pas préférable de prévoir une loi de programmation en matière de politique de santé. Cela donnerait une autre portée à cette loi de financement de la sécurité sociale, qui devrait alors s'inscrire dans une réflexion à moyen terme, ce qui, à l'évidence, manque actuellement pour la politique de santé de notre pays.
M. le président. La parole est à M. Domeizel.
M. Claude Domeizel. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je vais essayer d'imaginer ce qui se passerait si la loi telle qu'elle va être votée au Sénat allait jusqu'à son terme.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Ah ! (Sourires.)
M. Claude Domeizel. L'article 1er disposerait : « Est approuvé le rapport annexé à la présente loi relatif aux orientations de la politique de santé et de sécurité sociale et aux objectifs qui déterminent les conditions générales de l'équilibre financier de la sécurité sociale pour l'année 2000. »
Je me suis dit : dans ces conditions, lisons ce rapport ! Et je vous invite à le lire, mes chers collègues ! Ce n'est pas un rapport qui est annexé à l'article 1er ; c'est un nouveau discours ! C'est vraiment la copie des discours qui auraient pu être prononcés au cours de la discussion générale. Il n'y a aucune proposition. Il n'y a qu'un discours négatif à l'égard de la loi telle qu'elle nous a été proposée.
Sur les huit pages, j'ai retenu un paragraphe que je vous livre :
« C'est pourquoi il importe d'inscrire dans la loi deux objectifs » - tout de même ! - « la mise en place d'un plan comptable unique pour les organismes de sécurité sociale et un butoir fixé au 31 mars pour la remise des comptes. Ces objectifs sont d'autant plus raisonnables qu'une période d'adaptation d'un an serait laissée aux organismes de sécurité sociale. »
C'est le seul paragraphe qui corresponde à ce que l'on pense trouver dans un rapport.
Comment voulez-vous que nous approuvions un tel rapport ? Bien sûr, nous voterons fermement contre !
M. François Autain. Absolument !
M. le président. Je suis saisi de neuf amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 61, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose de rédiger comme suit le rapport annexé à l'article 1er :
« Rapport sur les orientations de la politique de santé et de la sécurité sociale et les objectifs qui déterminent les conditions générales de l'équilibre financier »
« L'an dernier, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 était apparu "fragile dans ses équilibres, inabouti dans ses analyses et incohérent dans ses propositions".
« De fait, le retour à l'équilibre de la sécurité sociale, malgré une conjoncture très favorable, n'a pas été atteint.
« Trois "grandes" réformes étaient annoncées par le Gouvernement : la "consolidation" des régimes de retraite par répartition, la réforme de l'assiette des cotisations patronales et la mise en place d'une couverture maladie universelle.
« La première a accouché d'une souris : le Gouvernement qui, selon le rapport annexé à la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 devait "prendre les décisions qui s'imposent", entend désormais "préciser ses orientations générales au début de l'année 2000".
« La deuxième a donné naissance à un monstre : le fonds de financement des 35 heures et à une crise grave de paritarisme.
« La troisième, pour l'instant, n'a rien donné du tout : la couverture maladie universelle a bien été votée en urgence par le Parlement pour une entrée en vigueur au 1er janvier 2000, mais les décrets d'application ne sont toujours pas publiés, son coût est contesté et son financement amputé.
« Enfin, l'essentiel du dispositif de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 a été annulé par le Conseil constitutionnel s'agissant de l'assurance maladie.
« Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 ne s'annonce pas sous de meilleurs auspices.
« Organisant l'opacité des comptes, le Gouvernement entend agir seul dans le domaine de l'assurance maladie sans pour autant que soient claires les lignes directrices de son action.
« Les comptes sociaux : L'opacité organisée
« Les comptes sociaux n'ont pas encore atteint une fiabilité suffisante. Ils ne sont disponibles que tardivement. Ainsi, le Parlement ne dispose pas d'une analyse sérieuse des comptes de 1998... quand il aborde ceux de 2000.
« Ce problème technique peut être résolu dès lors que la volonté et les moyens existent.
« C'est pourquoi il importe d'inscrire dans la loi deux objectifs : la mise en place d'un plan comptable unique pour les organismes de sécurité sociale et un butoir fixé au 31 mars pour la remise des comptes. Ces objectifs sont d'autant plus raisonnables qu'une période d'adaptation d'un an serait laissée aux organismes de sécurité sociale.
« Mais au-delà de cette question technique, l'intelligibilité des comptes sociaux, c'est-à-dire la compréhension par chacun, assuré ou contribuable, de la destination et de la raison d'être des prélèvements sociaux, est le fondement des lois de financement de la sécurité sociale.
« Or, le Gouvernement organise l'opacité des comptes sociaux.
« - Le projet de loi de financement est faussé dans sa présentation
« Officiellement, le régime général de sécurité sociale affiche un solde tendanciel positif de 6 milliards de francs. Le projet de loi ramènerait cet excédent à 2 milliards de francs à travers un certain nombre de mesures, notamment la revalorisation de la base de calcul des allocations familiales ou des pensions.
« En réalité, le projet de loi est présenté sur des bases fausses.
« Le compte tendanciel pour 2000, présenté à la Commission des comptes en septembre, est loin d'être une évolution spontanée : il intègre un certain nombre d'anticipations dont les principales sont la contribution au financement des 35 heures (5,5 milliards de francs) et la prise en charge par la sécurité sociale d'une partie de la majoration de l'allocation de rentrée scolaire (2,5 milliards de francs).
« Au total, avant toute "mesure" et toute "anticipation", le solde du régime général serait positif de 13,5 milliards de francs.
« Le débat sur le projet de loi de financement est ainsi biaisé, tant au Parlement que dans l'opinion publique : la Commission des comptes de la sécurité sociale ne doit pas être le "faux-nez" du Gouvernement.
« Actuellement, le secrétaire général de la Commission des comptes de la sécurité sociale est un homme seul à qui le Gouvernement dicte les "anticipations" qu'il souhaite voir figurer dans les comptes "tendanciels" de la sécurité sociale.
« Il est proposé, en conséquence, que le secrétaire général de la Commission des comptes de la sécurité sociale soit nommé sur proposition conjointe des présidents des deux Assemblées et soit assisté d'une véritable équipe de collaborateurs de sorte qu'il ait une autonomie politique et technique lui permettant d'avancer de véritables analyses.
« - Le projet de loi de financement de la sécurité sociale compromet le redressement durable des comptes sociaux.
« Les trois premières lois de financement s'étaient efforcées, avec plus ou moins de bonheur, de redresser les comptes sociaux.
« Le présent projet de loi s'attache à les dégrader, essentiellement par des mesures de débudgétisation : la majoration de l'allocation de rentrée scolaire était jusqu'à présent inscrite au budget de l'Etat, les exonérations de charges sociales accordées dans le cadre des 35 heures devraient être intégralement compensées à la sécurité sociale par le budget de l'Etat.
« Ce faisant, le Gouvernement compromet le redressement durable des comptes sociaux.
« Ce redressement est fragile car il est en quelque sorte mécanique ; il n'est guère le fruit d'une maîtrise des dépenses mais il est le résultat de l'alourdissement spectaculaire des prélèvements affectés à la sécurité sociale, dont l'effet est amplifié par une conjoncture économique favorable.
« Le Gouvernement se satisfait aujourd'hui d'un excédent symbolique de 2 milliards de francs alors que, depuis 1997, le régime général bénéficie, en moyenne, chaque année, de 55 milliards de francs de recettes supplémentaires ; il a été, en outre, déchargé d'une dette de 220 milliards de francs financée jusqu'en 2014 par un prélèvement supplémentaire sur les ménages de l'ordre de 30 milliards de francs par an.
« Les prélèvements opérés sur la sécurité sociale, soit sous la forme de charges indues ou de détournement de ses recettes au profit de "fonds spéciaux" sont inacceptables. Aussi importe-t-il de les supprimer et de rétablir les comptes du régime général qui seraient ainsi en excédent de plus de 10 milliards de francs.
« - Le Gouvernement multiplie les "fonds spéciaux" et les "tuyauteries"
« La multiplication des fonds spéciaux par la loi de financement pour 1999 et par le projet de loi de financement pour 2000 achève de brouiller les comptes sociaux.
« La loi de 1994 avait posé une règle simple et fondamentale pour une gestion claire de la sécurité sociale : la compensation intégrale par le budget des exonérations de charges sociales décidées par l'Etat.
« Le fonds de financement des 35 heures créé par le projet de loi de financement pour 2000 conduit à la confusion la plus totale.
« Les exonérations de charges - qui mélangent la compensation du coût des 35 heures et l'allégement des charges sur les bas salaires - seront désormais financées :
« - par les droits sur les tabacs ;
« - par la création d'un impôt nouveau sur les entreprises (la contribution sur le bénéfice des entreprises) ;
« - par l'affectation de la TGAP dont l'assiette sera étendue et le taux relevé ;
« - par une taxation des heures supplémentaires payées par les entreprises mais pesant sur les salariés ;
« - par les droits sur les alcools antérieurement affectés au FSV.
« Ces deux derniers prélèvements sont venus se substituer au dernier moment à la contribution que le Gouvernement entendait imposer à la sécurité sociale et à l'UNEDIC.
« De sorte que "la réforme d'ampleur de l'assiette des cotisations patronales" annoncée par le Gouvernement débouche sur l'affectation à la compensation des exonérations de charges d'une collection hétérogène et sans fondement de recettes de poche et d'impôts nouveaux.
« Ce "nouveau plan de financement" reste au demeurant partiel : le tiers (15 à 20 milliards de francs) du surcoût du projet de loi 35 heures reste non financé pour l'avenir alors même que la sécurité sociale reste taxée, cette fois indirectement.
« Le fonds de réserve pour les retraites s'inscrit dans un contexte flou. Dès lors que le Gouvernement n'a toujours pas précisé, ne serait-ce que « ses orientations générales » sur la réforme des retraites, les missions du fonds de réserve restent indéterminées, alors même que son financement par la sécurité sociale apparaît litigieux.
« Constituées à l'origine par les excédents du FSV, les ressources du fonds de réserve se compliquent singulièrement dans le projet de loi de financement pour 2000.
« Désormais, le fonds de réserve bénéficierait d'une part des excédents prévisionnels de la branche vieillesse à hauteur de 2,9 milliards de francs. Il serait d'autre part alimenté par le détournement, au détriment des branches maladie, vieillesse et famille, de la majeure partie (5,5 milliards de francs) du prélèvement de 2 % sur les revenus du patrimoine.
« En effet, les excédents du FSV dont le fonds de réserve bénéficiait ont été confisqués en catastrophe pour financer les 35 heures (affectation du droit sur les alcools).
« Ainsi, le nouveau plan de financement des 35 heures :
« - assèche dans un premier temps une des voies d'alimentation du fonds de réserve pour les retraites en privant le FSV du droit sur les alcools directement affecté aux 35 heures en remplacement de la contribution que le Gouvernement entendait initialement imposer à la sécurité sociale ;
« - compense cette mesure par l'affectation directement au fonds de réserve pour les retraites du prélèvement de 2 % sur les revenus du patrimoine mais en prive, ce faisant, la sécurité sociale.
« Au total, la sécurité sociale finance bien, mais indirectement, les 35 heures.
« Pour la CNAM, la situation est particulièrement inquiétante : le présent projet de loi la prive de l'essentiel de la recette que la loi du 27 juillet 1999 lui avait affectée pour financer la couverture maladie universelle.
« Du fait de la multiplication des tuyauteries décidées par le Gouvernement, le prélèvement de 2 % sur les revenus du patrimoine aura ainsi été modifié trois fois en moins d'un an par le Gouvernement.

Affectation du prélèvement 2 %



LFSS 1999

LOI DU
27 juillet 1999

(CMU)


PLFSS 2000
CNAF 50 % 22 % 13 %
CNAV 50 % 50 % 30 %
CNAM - 28 % 8 %
Fonds de réserve pour les retraites - -
49 %
Total 100 % 100 % 100 %


« Le Gouvernement met ainsi en place, dans la confusion et l'opacité, des mécanismes de transfert au détriment de la sécurité sociale dans son ensemble mais qui visent particulièrement la branche famille.
« Aussi est-il proposé de supprimer l'ensemble de ces mécanismes de prélèvements et de transferts : impôts nouveaux sur les entreprises (CSB et TGAP), spoliation des salariés (taxation des heures supplémentaires) ou transfert aux dépens de la sécurité sociale (détournement du droit sur les alcools ou du prélèvement de 2 % sur les revenus du patrimoine).
« Il est donc prévu, dans le respect de l'autonomie des branches de la sécurité sociale, que celles-ci bénéficient des excédents qu'elles créent (CNAF-CNAV) ou assument a contrario des dettes qu'elles génèrent (CNAMTS).
« Il y va de la clarté dans laquelle doit se poursuivre le redressement des comptes sociaux et de la responsabilisation de chacun.
« Dans le rapport annexé à la loi de financement pour 1998, le Gouvernement affirmait sa "volonté de restructurer l'équilibre financier gravement compromis aujourd'hui de la branche famille" et décidait la mise sous conditions de ressources des allocations familiales.
« Le fait que la branche famille enregistre aujourd'hui des excédents n'a rien de surprenant : le contraire serait même étonnant dans un contexte de croissance.
« Les réserves qu'elle peut accumuler aujourd'hui lui permettront demain d'éviter une nouvelle remise en cause des fondements de notre politique familiale.
« De même, la branche vieillesse est dans l'oeil du cyclone à la veille du choc démographique de 2005. Dans cette attente, il est sain qu'elle puisse constituer des réserves productives d'intérêts. Et il est prudent que ces réserves restent en son sein plutôt que de migrer vers un fonds de réserve dont les missions sont aussi incertaines.
« A terme, si la sécurité sociale présente des excédents durables, au-delà des cycles conjoncturels, il importera d'ouvrir dans la transparence un débat sur l'affectation de ces réserves : amélioration des prestations, diminution des prélèvements d'aujourd'hui ou encore remboursement anticipé de la dette sociale, c'est-à-dire diminution des prélèvements qui pèsent sur les générations à venir jusqu'en 2014.
« L'assurance maladie : Le Gouvernement entend agir seul.
« Dans le domaine de l'assurance maladie, le Gouvernement semble vouloir se passer tout à la fois du Parlement, des professionnels de santé et de la CNAMTS. Pour autant, les lignes directrices de son action sont loin d'être claires.
« - Le Gouvernement semble vouloir se passer du Parlement
« L'ONDAM pour 1998 a été dépassé de près de 10 milliards de francs. L'ONDAM 1999 le sera de 13,1 milliards de francs.
« En "rebasant" l'ONDAM 2000 qui ne progresserait ainsi que de 2,5 % par rapport aux "dépenses attendues pour 1999", le Gouvernement évite d'afficher un taux de progression de 4,5 % par rapport à la loi de financement pour 1999.
« Il prétend ainsi masquer les dérapages intervenant depuis deux ans.
« Ce faisant, il relègue l'ONDAM au rang d'une simple "hypothèse économique" et fait perdre au vote de l'ONDAM une bonne part de sa substance.
« A cet égard, il est significatif que onze des quatorze articles de la loi de financement pour 1999 ne sont pas encore appliqués : le dépistage du cancer, la création d'un Conseil pour la transparence des statistiques de l'assurance maladie, la mission d'évaluation des Unions de médecins exerçant à titre libéral, la modulation du MICA, le fonds d'aide à la qualité des soins de ville, le contenu du devis et de la facture des chirurgiens-dentistes, l'exercice des professionnels de santé dans les établissements d'hébergement des personnes âgées dépendantes.
« - Le Gouvernement semble vouloir se passer des professionnels de santé
« Les relations conventionnelles avec la majorité des professionnels de santé sont dans une situation de blocage :
« - les relations avec les médecins généralistes sont régies par une convention sans dispositif de régulation ;
« - les relations avec les médecins spécialistes, en l'absence de convention, sont régies par un règlement conventionnel minimal partiellement annulé ;
« - la vie conventionnelle des chirurgiensdentistes est bloquée depuis la décision ministérielle du 26 juin 1998 ;
« - les relations conventionnelles avec les sages-femmes ont été menacées, en 1999, par un projet d'arrêté ministériel ;
« - l'objectif d'évolution des dépenses des directeurs de laboratoires d'analyses de biologie n'a pas été fixé en l'absence d'un accord tripartite en 1999 ;
« - les négociations tripartites entre l'Etat, l'assurance maladie et les cliniques ont également échoué en 1999.
« Cette situation de vide conventionnel ne peut être masquée par les avancées enregistrées dans les relations conventionnelles avec les auxiliaires médicaux ou la conclusion d'un accord avec l'industrie pharmaceutique, à la suite du vote par le Parlement, d'un mécanisme de taxation automatique.
« De fait, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 consacre, en droit, la fin des relations conventionnelles globales :
« - l'article 17 du projet de loi définit des conventions dans lesquelles plus rien n'est à négocier. On imagine mal, en effet, qu'un syndicat représentatif d'une profession de santé libérale accepte de signer une convention et des tarifs qui pourront être modifiés au quatrième, puis au huitième mois de l'année au gré des fluctuations conjoncturelles de dépenses ;
« - en complément, un amendement adopté à l'Assemblée nationale s'attaque directement à l'existence des syndicats représentatifs de l'ensemble des médecins spécialistes. Il donne en effet à tout syndicat représentatif d'une spécialité médicale la possibilité de conclure un accord sectoriel avec l'assurance maladie, qu'il y ait ou non convention. La porte est ouverte à toutes les surenchères, à toutes les négociations séparées, entre syndicats ou à l'intérieur des syndicats.
« Le Gouvernement semble vouloir se passer de la CNAMTS
« Utilisant pour la première fois, depuis les ordonnances de 1967, le rôle de proposition qui leur avait été confié, les partenaires sociaux réunis au sein du conseil d'administration de la CNAMTS ont élaboré un plan ambitieux et audacieux de refondation du système de soins. Il aurait gagné à être analysé par le Gouvernement et débattu devant le Parlement. Cependant, la CNAMTS semble s'être mêlée, aux yeux du Gouvernement, de "ce qui ne la regardait pas" : l'hôpital.
« La réponse du Gouvernement à la CNAMTS tient en trois points :
« - une réponse indirecte, d'abord : trois accords sectoriels ont été conclus en 1999 par l'Etat, sans l'assurance maladie, avec des représentants de deux spécialités médicales et des biologistes ;
« - trois réponses directes : d'abord, le projet de loi de financement ne met en oeuvre aucune des propositions de la CNAMTS. Bien au contraire, il exclut ensuite l'assurance maladie de la régulation des cliniques privées, allant ainsi à l'encontre de toutes les politiques visant à développer la coordination entre l'hospitalisation et la ville, et négligeant les économies qui pourraient être réalisées du fait de cette coordination. Enfin, il instaure un dispositif d'obstruction à l'égard de la CNAMTS, qui serait chargée, au détriment de sa mission d'assureur, de rédiger chaque année une centaine de rapports d'équilibre destinés au Gouvernement : la CNAMTS passerait ainsi du statut de "payeur aveugle" à celui de "gratte-papier éclairé"...
« Pour autant, les lignes directrices de sa politique pour l'assurance maladie n'apparaissent pas clairement.
« Ainsi, de nombreux médecins sont inquiets du silence gouvernemental en matière de politique de réduction de déséquilibres de la démographie médicale, et notamment de l'avenir incertain du MICA. Les dispositions réglementaires instituant la modulation du dispositif qui devaient intervenir au 1er juillet 1999 ne sont toujours pas publiées, et la situation financière du FORMMEL, qui assure la gestion du MICA, est déjà déficitaire.
« De même, si votre commission souligne le travail accompli par les agences régionales de l'hospitalisation pour rédiger les nouveaux SROS, la commission s'inquiète du retard pris dans la conclusion des contrats d'objectifs et de moyens avec les établissements publics de santé ainsi que dans la procédure d'accréditation. Alors que tous les établissements devaient s'être engagés dans la démarche avant 2001, seuls 70 établissements l'ont fait à ce jour. Et aucun établissement n'a encore été accrédité. Les mesures de revalorisation du statut des PH demeurent hos de proportion avec celles qui seraient nécessaires pour attirer les jeunes médecins vers l'hôpital public. Enfin, le Gouvernement n'a toujours pas fourni à la commission des affaires sociales une estimation financière du coût, pour les finances sociales, de l'application des 35 heures à l'hôpital public.
« Dans le domaine de l'assurance maladie, les relations conventionnelles des professionnels de santé avec l'assurance maladie doivent être impérativement maintenues. Il est ainsi proposé un mécanisme alternatif de régulation des dépenses médicales faisant appel à la responsabilité individuelle des médecins et contribuant à l'amélioration des pratiques médicales, dans l'intérêt des patients. Il présente les caractéristiques suivantes :
« - il assure le maintien de la vie conventionnelle ;
« - il est simple (il se lit en une page, au lieu des quelque treize pages du projet de la loi utilisées pour décrire celui du Gouvernement) ;
« - il est médicalisé, et a donc l'avantage de contribuer à améliorer la qualité des soins tout en maîtrisant les dépenses ;
« - il est régionalisé, car c'est au niveau régional que seront le mieux appréciés les dépassements, leurs causes, et les modalités de leur résorption ;
« - il est efficace, puisqu'il garantit le respect de l'objectif de dépenses ;
« - il permet aux médecins d'amender individuellement leurs pratiques professionnelles, si les mécanismes collectifs de maîtrise médicalisée n'ont pas suffi à assurer le respect de l'objectif.
« Il est également proposé de réintégrer l'assurance maladie dans la régulation des cliniques privées. Enfin l'article 21 du projet de loi, qui institue un objectif des dépenses pour le secteur du médicament, est contraire à la loi organique qui prévoit que les lois de financement fixent un objectif national de dépenses d'assurance maladie, et non des objectifs par secteurs de dépenses. »
Par amendement n° 104, Mme Borvo, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de compléter le a) du 1. du A du rapport annexé à l'article 1er par un alinéa ainsi rédigé :
« A ce titre, le Gouvernement s'engage à affecter des personnels en nombre suffisant aux caisses des organismes sociaux pour faire face au surcroît de charges résultant notamment de la mise en oeuvre des obligations nouvelles consécutives au dispositif de la couverture maladie universelle. »
Par amendement n° 105, Mme Borvo, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de compléter le a) du 1. du A du rapport annexé à l'article 1er par un alinéa ainsi rédigé :
« Le Gouvernement établira un plan pluriannuel d'augmentation du taux moyen de remboursement en fixant des priorités, notamment en lunetterie, soins optiques et dentaires. »
Par amendement n° 79, M. Autain, Mme Dieulangard, MM. Chabroux, Domeizel, Mme Printz, M. Cazeaux et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de rédiger comme suit le début de la troisième phrase du deuxième alinéa du c) du 1. du A du rapport annexé à l'article 1er :
« Au vu des conclusions du rapport Nisand, le Gouvernement... »
Par amendement n° 106, Mme Borvo, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de compléter le cinquième alinéa du c) du 1. du A du rapport annexé à l'article 1er par une phrase ainsi rédigée : « Le Gouvernement déterminera les modalités de la prise en charge par l'assurance maladie du dépistage de l'ostéoporose avant le 31 décembre 2000. »
Par amendement n° 107, Mme Borvo, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, après le huitième alinéa du c) du 1. du A du rapport annexé à l'article 1er, d'insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Enfin, dans le cadre de ses actions de prévention, et en particulier dans sa lutte contre le dopage, le Gouvernement déterminera les modalités de prise en charge par l'assurance maladie des visites médicales annuelles des sportifs, condition préalable à l'obtention d'une licence sportive. »
Par amendement n° 80, M. Autain, Mme Dieulangard, MM. Chabroux, Domeizel, Mme Printz, M. Cazeaux et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de rédiger comme suit le début du sixième alinéa du a) du 2. du A du rapport annexé à l'article 1er :
« Dans l'attente du projet de loi qui sera déposé au printemps prochain visant à une meilleure coordination des acteurs de la politique de santé et à une meilleure complémentarité des soins, il propose... »
Par amendement n° 108, Mme Borvo, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de compléter le sixième alinéa du a) du 2. du A du rapport annexé à l'article 1er par les mots : « et de développer des conditions de gestion plus démocratiques des caisses. »
Enfin, par amendement n° 109, Mme Borvo et M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de rédiger comme suite le dernier alinéa du 2. du C du rapport annexé à l'article 1er :
« En ce qui concerne enfin la prestation spécifique dépendance (PSD), le Gouvernement s'engage à abroger la loi n° 97-60 du 24 janvier 1997 et à travailler sur la base du rapport de Mme Guinchard-Kunstler à la reconnaissance d'une prestation unique d'autonomie pour les personnes âgées dépendantes. »
La parole est à M. Descours, rapporteur, pour défendre l'amendement n° 61.
M. Charles Descours, rapporteur. Tout d'abord, monsieur Domeizel, je voudrais vous rassurer : quel que soit ce qui figure dans le rapport, le Conseil d'Etat a décidé, dans un arrêt récent, l'arrêt Rouquette, du 5 mars 1999, qu'il n'avait aucune valeur normative.
M. Claude Domeizel. Il fallait donc supprimer l'article 1er !
M. Charles Descours, rapporteur. Cela pose tout le problème de l'article 1er, problème que nous avons dénoncé dès le début, et que nous avons continué à dénoncer, avec une constance qui ne doit rien à un effet de mode.
Effectivement, l'article 1er, qui n'a pas de valeur normative, comme nous nous en doutions d'ailleurs, ressortit à un exercice purement intellectuel. D'ailleurs, madame le ministre, le mot intellectuel n'a rien de péjoratif.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Certes !
M. Charles Descours, rapporteur. Il est vrai que notre amendement se borne à présenter les analyses et propositions du Sénat, telles qu'elles résultent des votes qui ont été émis au cours de ces derniers jours.
Au demeurant, madame le ministre, vous avez annoncé la tenue d'un débat d'orientation budgétaire sanitaire ; je vous en remercie en vous disant : « encore un effort ! ». En effet, comme vient de le dire Claude Huriet, si l'on veut que ce débat d'orientation ne se résume pas à une journée passée agréablement ensemble mais qu'il débouche sur des décisions précises, il faut qu'il se traduise par une loi de programmation pluriannuelle, ainsi que nous le demandons depuis plusieurs années.
Je sais bien que, parfois, les lois d'orientation sont violées, mais je crois qu'une telle loi permettrait de dégager les volontés politiques du Gouvernement d'aujourd'hui et des gouvernements de demain.
Madame le ministre, ainsi que je vous l'ai dit récemment lors d'une réunion de la commission des comptes de la sécurité sociale, la commission des affaires sociales du Sénat souhaite vivement qu'on s'engage vers l'élaboration d'une loi de programmation pluriannuelle pour la santé publique. On ne sera peut-être pas d'accord sur toutes les priorités, mais on en discutera... En tout cas, il est certain qu'on ne peut pas mener une politique de la santé au coup par coup.
En outre, le rapport n'ayant aucune valeur normative, ainsi que l'a confirmé l'arrêt du Conseil d'Etat, paradoxalement aujourd'hui - sur ce point, Madame Borvo, vous avez raison - aucun texte ne reflète véritablement l'avis de la représentation nationale sur les orientations de la politique sanitaire.
Nous avons le sentiment d'avoir souvent des débats comptables. Or les travaux que nous menons en commission sont souvent très intéressants : c'est notamment le cas lorsque nous auditionnons les médecins de la Conférence nationale de la santé, les membres du Haut comité de la santé publique ou d'autres experts. Nous n'arrivons cependant jamais à faire déboucher sur des réalités pratiques les grandes orientations sanitaires que nous pouvons en déduire et qui intéressent pourtant nos concitoyens. Les chiffres, ils en sont revenus ! Ils savent parfaitement que tout va bien pour le Gouvernement en place, quel qu'il soit, et que tout va mal pour l'opposition, quelle qu'elle soit.
Ce qui intéresse nos concitoyens, c'est de savoir comment on peut faire avancer la prévention du cancer ou des accidents cardio-vasculaires, le traitement du sida ou d'autres maladies, sans parler des intoxications par le tabac ou l'alcool, des maladies iatrogènes, et j'en passe.
Bref, il y a mille sujets qui pourraient donner lieu à des débats tout à fait passionnants et susceptibles d'aboutir à des consensus dans cet hémicycle.
Malheureusement, de tels débats, nous n'avons pas l'occasion d'en avoir ici.
Bien sûr, monsieur Domeizel, je ne prétends pas que notre rapport soit l'alpha et l'omega de notre politique de santé. Ce que je souhaite essentiellement, c'est que le Gouvernement nous présente un projet de loi de programmation pluriannuelle. L'ensemble des parlementaires, je le pense, seraient heureux de pouvoir enfin débattre de problèmes qui les intéressent, et je suis convaincu que l'opinion publique y serait très attentive.
M. le président. La parole est à Mme Borzo pour défendre les amendements n°s 104 et 105.
Mme Nicole Borvo. Je les ai déjà présentés dans mon intervention sur l'article.
M. le président. La parole est à M. Autain, pour défendre l'amendement n° 79.
M. François Autain. Cet amendement a perdu une partie de son utilité puisque, entre le moment où je l'ai rédigé et aujourd'hui, il s'est passé un certain nombre de choses. En particulier, madame la ministre, vous avez répondu à une question à l'Assemblée nationale et vous avez accordé un entretien au journal Libération, ce qui vous a également permis d'apporter des réponses très positives sur les problèmes qui étaient à l'origine de cet amendement.
A l'Assemblée nationale, vous avez notamment indiqué, concernant l'interruption volontaire de grossesse, que vous souhaitiez vous donner encore quelques mois pour exploiter les conclusions du rapport Nisand mais que vous étiez tout à fait favorable à l'allongement jusqu'à douze semaines du temps pendant lequel peut être pratiquée une IVG.
Ayant donc obtenu satisfaction sur ces questions, je veux simplement vous demander - votre réponse me conduira éventuellement à retirer cet amendement, geste de pure forme puisque la très probable adoption de l'amendement de la commission le fera de toute façon tomber - si l'accréditation d'un hôpital où se trouve un service de gynécologie obstétrique devra désormais comporter, comme le suggère le rapport Nisand, un critère portant sur l'existence d'une unité fonctionnelle d'orthogénie. Si vous approuvez cette proposition, madame la ministre, pensez-vous qu'elle doit entrer très rapidement dans les faits ? Vous l'avez fait remarquer tout à l'heure, un certain nombre d'hôpitaux ont déjà fait l'objet de cette accréditation. Un plus grand nombre encore la recevront dans quelques mois. Des instructions ont-elles déjà été données pour que cet aspect soit pris en compte ?
M. le président. La parole est à Mme Borvo, pour défendre l'amendement n° 106.
Mme Nicole Borvo. Je l'ai déjà présenté.
M. le président. La parole est à M. Fischer, pour défendre l'amendement n° 107.
M. Guy Fischer. Le Gouvernement a engagé un juste combat contre un fléau qui mine les activités sportives : le dopage. Plusieurs mesures ont été prises en ce sens, qui sont contenues dans une loi défendue par Mme la ministre de la jeunesse et des sports.
L'une d'entre elles prévoit l'obligation d'une visite médicale préalable à la délivrance de la licence sportive. Cette mesure permet de mener une véritable politique de santé publique, en particulier en direction des jeunes, mais aussi des sportifs plus âgés, car on sait que la surveillance médicale est très réduite entre l'adolescence et le premier accident de santé majeur.
Cependant, pour que ce dispositif soit efficace, il ne doit pas exister de frein financier qui en entrave l'application ; il faut donc que la visite médicale en question donne lieu à un remboursement total. La prise en charge est très variable selon les zones géographiques, certaines caisses refusant de la manière la plus ferme de rembourser, alors que d'autres adoptent une position plus souple à cet égard.
Là où le remboursement est inexistant, nous constatons une chute notable du nombre des licenciés. Le phénomène est particulièrement significatif chez les scolaires des quartiers défavorisés, d'autant que les familles hésitent à ajouter aux 60 francs que coûte la licence les 115 francs d'une consultation. C'est là une situation particulièrement anormale au regard du rôle d'intégration sociale que peut jouer le sport dans ces quartiers.
En conséquence, conformément aux principes inscrits dans la loi relative à la lutte contre les exclusions, et qui tendent à favoriser l'accès à la culture, aux loisirs et aux sports, nous demandons la prise en charge intégrale du coût de cette visite médicale.
Une telle prise en charge n'est pas contraire aux missions de la sécurité sociale puisque, au sein du titre VI du livre II du code de la sécurité sociale, il existe un chapitre 2 intitulé « Prévention, information et éducation sanitaire, action sanitaire et sociale dans la branche maladie ».
M. le président. La parole est à M. Autain, pour présenter l'amendement n° 80.
M. François Autain. Le rapport annexé au projet de loi confirme que l'article 17 a bien pour objet de redéfinir le champ de la négociation conventionnelle.
Par cet amendement, je souhaite simplement marquer que, au-delà de la définition juridique de ce champ, le projet de loi dont vous avez annoncé le dépôt l'an prochain, madame la ministre, visera bien à favoriser une meilleure coordination des acteurs de la politique de santé et une plus grande complémentarité des soins, faute de quoi il ne saurait y avoir de maîtrise effective des dépenses de santé, sans oublier la nécessaire régionalisation de la distribution des soins.
Le développement des réseaux de santé, la recherche d'une meilleure complémentarité entre l'hôpital, les cliniques et la médecine libérale, une réflexion commune sur l'amélioration des pratiques de l'ensemble des professions de santé doivent constituer, au-delà des textes conventionnels, la garantie d'un engagement commun et contractuel en vue d'une maîtrise renforcée des dépenses de santé.
Vous vous êtes déjà exprimée sur ce point, madame la ministre, mais, si vous avez d'autres précisions à apporter, je les écouterai avec attention. Cela étant, j'ai bien conscience que cet amendement connaîtra le sort de ceux qui ont été présentés par mes collègues : il tombera à la suite de l'adoption quasi-certaine de l'amendement de M. le rapporteur par la majorité sénatoriale.
M. le président. La parole est à Mme Borvo, pour défendre l'amendement n° 108.
Mme Nicole Borvo. Cet amendement a déjà été défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Fischer, pour défendre l'amendement n° 109.
M. Guy Fischer. Cet amendement concerne la prestation spécifique dépendance, sur laquelle je suis déjà intervenu au cours de la discussion générale.
Irai-je jusqu'à dire qu'il est un peu provocateur ? En tout cas, il se veut un appel lancé au Gouvernement pour que celui-ci s'engage à abroger la loi du 24 janvier 1997 et à travailler, sur la base du rapport de Mme Guinchard-Kunstler, à la reconnaissance d'une prestation unique d'autonomie pour les personnes âgées dépendantes.
Vous le savez, madame la ministre, les manifestations d'hostilité envers la prestation spécifique dépendance, la PSD, se font de plus en plus pressantes du fait, notamment, des disparités qui sont constatées.
Parmi les nombreux griefs dont cette prestation fait l'objet, je rappellerai simplement le niveau trop bas des conditions de ressources, l'insuffisance de son montant, les disparités scandaleuses qui existent entre les départements et aussi selon que la personne est maintenue à domicile ou accueillie dans un établissement, le caractère contestable des critères permettant de définir les stades de dépendance, l'inadaptation de la grille AGIR, notamment pour les mal-voyants et les aveugles.
Tous ces défauts conjugués font que des personnes qui bénéficiaient précédemment de l'allocation compensatrice pour tierce personne, l'ACTP, en établissement se retrouvent sans aucune aide puisqu'elles n'entrent plus dans le champ d'application de la PSD et que le plafond bien trop bas du recours sur succession décourage nombre de personnes âgées modestes.
Pour toutes ces raisons, il m'est impossible de me rallier au bilan positif que dresse de la loi de 1997 l'Association des départements de France. Sans doute cette loi a-t-elle permis aux départements de réaliser des économies substantielles - on parle de 600 millions de francs - mais le problème de fond reste posé.
Nous souhaitons donc, madame la ministre, que vous puissiez nous dire si nous nous dirigeons vers la mise en place d'une prestation autonomie ou si des mesures seront inscrites dans un prochain projet de loi portant DMOS, pour modifier comme il est souhaitable la législation relative à la PSD.
M. le président. Je suppose, monsieur le rapporteur, que la commission est défavorable aux différents amendements qui viennent d'être présentés, à l'exception du sien, bien entendu...
M. Charles Descours, rapporteur. Monsieur le président, si vous le permettez, je vais tout de même m'efforcer de justifier la position de la commission sur ces différents amendements.
L'amendement n° 104 tend à prendre la mesure de l'inquiétude des personnels des caisses, notamment au moment où se met en place la CMU, prestation supplémentaire dont la gestion est mise à la charge des personnels des caisses d'allocations familiales ou d'assurance maladie.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. La CMU n'est pas en place !
M. Charles Descours, rapporteur. Je rappelle qu'aujourd'hui ces personnels sont en grève. Je croyais d'ailleurs que Mme Borvo ou M. Fischer allaient le rappeler.
M. Guy Fischer. Nous le savons et nous les soutenons !
M. Charles Descours, rapporteur. D'habitude, lorsque des personnels sont en grève, c'est vous qui vous plaisez à le souligner. Aujourd'hui, vous laissez ce soin à la majorité sénatoriale, et je m'en félicite. (Sourires.)
M. Guy Fischer. Quelle démagogie !
M. Charles Descours, rapporteur. Voilà si longtemps que vous nous donnez de rudes leçons de démagogie ! Dans cet exercice, j'en conviens, vous êtes meilleurs que nous !
Quoi qu'il en soit, la mise en place de la CMU suscite des inquiétudes, et cela apparaît clairement depuis quelques jours.
Selon un article paru ce soir dans Le Monde, Mme Aubry reconnaît dans une lettre adressée au président de la CNAM que « le niveau de 1 500 francs pourrait être réexaminé si nécessaire ».
Autrement dit, madame le ministre, vous êtes prête à admettre avec nous que le forfait de 1 500 francs est insuffisant.
Hier, dans Le Quotidien du médecin, une mutuelle du Midi a déclaré qu'elle ne voulait pas participer à la CMU et qu'elle était prête à payer les amendes dont ce refus la rendrait passible.
Nous avons toujours défendu le principe de la CMU tout en soulignant que son financement n'était pas bouclé. Avant même qu'elle soit en place, on voit apparaître des difficultés avec les partenaires, c'est-à-dire les caisses d'assurance maladie ou les organismes de prévoyance.
Il existe donc un vrai problème. Cependant, madame Borvo, si l'amendement n° 61 est adopté, je crains que votre amendement n° 104 ne devienne sans objet.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Vous le reprenez à votre compte, monsieur le rapporteur ? (Sourires.)
M. Charles Descours, rapporteur. Non, car il faudrait que je modifie mon rapport... (Nouveaux sourires.)
En ce qui concerne l'amendement n° 105 relatif à l'amélioration des remboursements des dépenses de santé, là aussi, comme nous l'avons dit pour la CMU, il y aura des lunettes de riches et des lunettes de pauvres. A l'époque, on ne nous avait pas crus. Je constate que le système se met en place progressivement.
L'amendement n° 79 concerne le rapport Nisand. Je pensais que notre collègue François Autain, qui est toujours extrêmement sensible à ce problème, ferait allusion aux gynécologues médicales ; en général, il s'agit de femmes. Aujourd'hui même, nous avons reçu sur nos fax un appel extrêmement pressant des gynécologues médicales faisant état des 400 000 signatures qu'elles ont obtenues. Elles disent clairement qu'elles ne sont pas satisfaites du projet d'examen qui leur est proposé. Elles veulent que cet examen soit différent de celui de gynécologue obstétricien classique.
Aujourd'hui, ces gynécologues médicales ont montré, d'une part, leur utilité dans les centres de planification de la femme et de la jeune fille, et, d'autre part, leur différence et leur complémentarité avec les gynécologues obstétriciens classiques.
Elles se mobilisent depuis plusieurs mois, et il faut les soutenir. Puisque vous parliez du rapport Nisand, monsieur Autain, je pensais que vous alliez soutenir les gynécologues médicales, ce qui aurait été une excellente chose.
M. François Autain. Mais je les soutiens !
M. Charles Descours, rapporteur. Peut-être aurais-je alors repris à mon compte votre amendement. Malheureusement, je crains qu'il ne devienne sans objet.
L'amendement n° 106 évoque le probème de la prise en charge de l'ostéoporose qui, on le sait, est devenue une pathologie extrêmement coûteuse, y compris pour l'assurance maladie. En effet, une ostéoporose non traitée entraîne des fractures et une morbidité très importante. Le dépistage, également coûteux, n'est pas pris en charge. Il s'agit là d'une mesure qu'il faudrait inscrire dans une loi de programmation pluriannuelle.
Madame le ministre, si, comme vous l'avez annoncé, au mois de mai ou juin, vous prévoyez la prise en charge de l'ostéoporose, j'y serai favorable. Mais je ne peux pas reprendre aujourd'hui cette disposition à mon compte, car je ne sais pas quel en sera le coût.
C'est un réel problème. En effet, nous vivons de plus en plus vieux. L'ostéoporose devient donc de plus en plus fréquente, et il faut également traiter les affections qui y sont associées, comme les fractures, par exemple.
On peut améliorer la qualité de confort des personnes âgées et, surtout, éviter les complications. On réduirait ainsi le coût pour la sécurité sociale des complications de fractures.
L'amendement n° 107 concerne la prise en charge par l'assurance maladie des visites médicales annuelles de sportifs. Là encore, il s'agit d'un réel problème. Malheureusement, cet amendement risque de devenir également sans objet.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Dommage !
M. Charles Descours, rapporteur. Effectivement, mais le Gouvernement peut le reprendre à son compte ! En outre, il ne serait pas nécessaire de prévoir un gage, ce qui serait le cas si nous le reprenions.
L'amendement n° 80 de M. Autain évoque le projet de loi qui sera déposé au printemps prochain. Donc, tout va bien !
L'amendement n° 108, présenté par Mme Borvo, est relatif au développement des conditions de gestion plus démocratiques des caisses. On a longuement discuté des élections au niveau des caisses. Malheureusement, le Gouvernement y était défavorable. De ce fait, l'amendement que vous aviez présenté au cours du débat n'a pas été adopté, madame Borvo. Là non plus, nous n'allons pas reprendre la discussion. Malheureusement, cet amendement va devenir sans objet.
Pour ce qui est de l'amendement n° 109 concernant la prestation spécifique dépendance, je rappelle que, jusque voilà quelques années, seule existait l'allocation pour tierce personne. C'est le Sénat qui a mis en place la prestation spécifique dépendance. D'ailleurs, dès le départ, la commission des affaires sociales a indiqué - le Sénat et ensuite le Parlement en étaient tout à fait conscients - qu'elle était largement insuffisante pour combler tous les besoins.
En outre, ce qu'a dit M. Fischer est exact, et je le constate notamment dans mon département, où nous essayons pourtant de jouer le jeu : toutes les personnes qui pourraient bénéficier de cette prestation spécifique dépendance ne font pas jouer leurs droits. Il faut en déterminer les raisons. Un rapport est en cours. Mme le ministre a dit qu'elle demandait à son auteur de poursuivre ses travaux.
Il faudra prendre en compte cet élément, de sorte que, grâce à la fois aux lois votées, en attendant une cinquième branche de la sécurité sociale, et aux fonds investis par les départements dans cette affaire, nous puissions prendre en charge plus de personnes âgées dépendantes qu'aujourd'hui.
Tous ces amendements étaient très intéressants. Il en ressort qu'une loi de programmation pluriannuelle doit être adoptée au printemps prochain, loi qui aura des conséquences budgétaires, en tout cas sur le budget de la sécurité sociale.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'ensemble de ces amendements ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 61.
Je rappelle à M. le rapporteur et à M. Huriet que l'annualité existe, heureusement, dans un certain nombre de programmes que nous mettons en place. Je pense, par exemple, au personnel médical hospitalier, à la lutte contre le tabagisme, au programme de lutte contre l'hépatite C, aux soins palliatifs, au programme sur l'accueil des handicapés. C'est peut-être insuffisant, mais nous travaillons déjà sur le moyen terme.
J'ai dit qu'il me paraissait souhaitable d'engager, avant l'été, un débat non pas budgétaire, mais sur les priorités en matière de santé publique, afin d'éclairer la discussion sur la loi de financement de la sécurité sociale.
Je ne suis pas certaine aujourd'hui qu'une loi de programmation sur plusieurs années ait un véritable sens en matière de santé publique. Il faut effectivement des programmes, étalés sur plusieurs années, mais je ne suis pas sûre qu'il soit possible de tout prévoir et, surtout, de connaître l'évolution à la fois des pathologies et des traitements. Mais nous en reparlerons lorsque nous débattrons de cette loi sur la santé publique. Notre réflexion ne fait que commencer.
Le Gouvernement est également défavorable à l'amendement n° 104 relatif à la couverture maladie universelle. Mais je souhaite apporter à Mme Borvo un certain nombre de précisions qui devraient apaiser ses craintes.
Tout d'abord, après en avoir discuté avec les intéressés, nous avons autorisé l'embauche de 1 400 personnes pour la mise en place de la couverture maladie universelle.
Ensuite, contrairement à ce que je lis dans une certaine presse, je voudrais confirmer ici - je ne fais que rapppeler ce que j'ai toujours dit, monsieur le rapporteur ; il suffit de se rapporter aux débats parlementaires relatifs à la couverture maladie universelle - que, en ce qui concerne les consultations médicales, les médicaments et l'hôpital, la couverture maladie universelle permettra une prise en charge à 100 % des dépenses engagées par les bénéficiaires de ce dispositif.
S'agissant des biens dont les prix sont libres et pour lesquels un remboursement sur la base des tarifs de sécurité sociale doit être mis en oeuvre pour que l'accès effectif aux soins existe, nous en avons discuté avec les caisses. Il s'agit des prothèses dentaires, de l'optique, des audio-prothèses et de certains matériels médicaux. Ce sont d'ailleurs ces éléments qui sont mal remboursés aujourd'hui par la sécurité sociale.
Comme je m'y étais engagée, je souhaite que la CMU, en définissant des remboursements à 100 %, avec des bases suffisantes pour couvrir les besoins - c'est tout l'objet du panier de soins - constitue une première étape vers une meilleure prise en charge, notamment de l'optique, des soins dentaires et des prothèses.
Les discussions que nous avons eues avec la CNAM et les mutuelles, ces derniers jours, nous ont conduits à leur demander un certain nombre de modifications. Alors, quand j'entends parler aujourd'hui de plafonnement de dépenses, je voudrais quand même que l'on sache de quoi il s'agit ! Au-delà de la prise en charge intégrale, pour six millions de personnes, des consultations médicales, des médicaments, des soins hospitaliers, le remboursement d'une paire de lunettes par an sera assuré, ce qui est déjà prévu pour les jeunes de six ans à seize ans, sauf cas médical urgent qui permettrait au patient de disposer d'une paire supplémentaire si les lunettes sont perdues ou cassées, mais pas s'il souhaite simplement changer de monture.
En ce qui concerne les soins dentaires, la CNAM proposait un plafonnement à 850 francs sur un an ou 1 700 francs sur deux ans. Nous avons demandé que ce plafonnement soit porté à 1 300 francs sur un an et 2 600 francs sur deux ans, qui peuvent d'ailleurs être ramenés à un an selon le texte. La limite est supprimée s'il y a une prescription médicale ou si la prothèse est amovible, c'est-à-dire s'il s'agit d'un dentier.
Cela représente quatre couronnes par an. Vous reconnaîtrez avec moi que l'on ne peut pas parler ici de plafonnement. Heureusement, en France, peu de personnes ont de tels besoins, et, je le rappelle, lorsque les raisons médicales seront évidentes, les frais engagés pourront être pris en charge.
J'ai toujours dit, monsieur le rapporteur - relisez nos discussions sur la couverture maladie universelle ; j'ai même accepté un amendement à ce sujet - que nous dresserons un bilan au bout d'un an. Nous verrons alors si les 1 500 francs qui, au départ, avaient été fixés par M. Goulard, chargé de mission par le Gouvernement, en accord avec les mutuelles, suffisent ou non !
J'ai précisé devant vous qu'au vu des pratiques dans certains départements je n'avais aucune raison de penser que cela ne suffirait pas. Eh bien, nous verrons ! Je m'étais engagée à dresser un bilan et à revoir ces dispositions si nécessaire. Je ne fais que confirmer ce que j'ai toujours dit !
L'ensemble des décrets concernant la couverture maladie universelle sont maintenant prêts ; certains sont déjà publiés et ils le seront quasiment tous à la fin du mois de novembre.
Nous avons préparé une campagne d'information et de sensibilisation des publics avec l'ensemble des associations, que je réunirai le 9 décembre prochain, afin de lancer cette campagne.
Un livret a été élaboré à l'intention de tous ceux qui vont aider les personnes à choisir entre une mutuelle, une institution de prévoyance ou une compagnie d'assurance, c'est-à-dire les personnels des centres communaux d'action sociale, des commissions locales d'insertion, des caisses primaires d'assurance maladie et des associations.
Tout ce travail a été réalisé en liaison étroite avec les institutions concernées, à savoir, d'une part, la caisse primaire d'assurance maladie, les organismes de prévoyance ou les mutuelles, et, d'autre part, les associations et les représentants des personnels concernés.
Par conséquent, la CMU pourra entrer en application au 1er janvier prochain.
Mon souci majeur est de faire en sorte que l'ensemble de ceux qui peuvent bénéficier de ces droits puissent en avoir connaissance. C'est la raison pour laquelle nous avons beaucoup oeuvré avec les associations, auxquelles nous allons d'ailleurs accorder un financement spécifique à cet effet.
Par exemple, aujourd'hui, un grand nombre de RMIstes ne disposent pas de l'aide médicale gratuite, car ils ne l'ont pas demandée : pour certains, c'est parce qu'ils ont d'autres couvertures ; pour d'autres, c'est parce qu'ils ne savent même pas qu'ils peuvent en bénéficier. Eh bien, avec la couverture maladie universelle, avec la campagne de sensibilisation que nous allons lancer, nous allons faire connaître leurs droits à ceux qui, aujourd'hui, les ignorent !
Aujourd'hui, il n'est pas un pays au monde, me semble-t-il, où les soins sont garantis à 100 %, où l'on peut se faire rembourser une paire de lunettes par an et bénéficier de tels soins dentaires. D'ailleurs, c'est un grand pas par rapport aux autres Français qui ne disposent pas de la CMU. Je souhaite vivement - je le redis à Mme Borvo, car j'ai bien entendu ses explications sur son amendement n° 105 - que, très rapidement, et peut-être même plus rapidement qu'on peut le croire, nous puissions progresser en ce qui concerne ces personnes qui n'ont pas la couverture maladie universelle.
Par conséquent, je crois que nous avons totalement respecté nos engagements. Je suis convaincue, monsieur le rapporteur, qu'il s'agit là d'une réforme considérable. Des difficultés existent ; vous en soulevez un certain nombre. Mais je ne crois pas que l'on soigne six millions de personnes gratuitement sans se donner un peu de peine pour résoudre ces difficultés.
M. François Autain. Très bien !
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Eh bien, c'est ce que nous essayons de faire ! Pour ma part, au lieu de regarder toujours ce qui ne va pas, je me bats pour que le système fonctionne, et je pense que tel sera le cas, grâce, notamment, aux associations, aux caisses primaires d'assurance maladie et aux mutuelles, qui vont nous apporter leur aide à partir du 1er janvier prochain.
En ce qui concerne l'amendement n° 79, je suis en accord avec M. Autain. Comme il l'a dit lui-même, j'ai été conduite à répondre à une question à ce sujet, mercredi dernier, à l'Assemblée nationale.
Actuellement, nous préparons une grande campagne sur la contraception. Il ne faut jamais oublier, en effet, que l'interruption volontaire de grossesse ne doit pas être banalisée et qu'elle est toujours un échec de la contraception.
Nous disposons maintenant - et cela n'a pas été facile - de la pilule du lendemain, de la production du RU 486, et nous poursuivons les discussions sur la pilule de troisième génération, en attendant le générique qui doit arriver à la fin de l'année prochaine, si les grands laboratoires n'acceptent pas de baisser leurs prix.
Le rapport Nisand, en ce qui concerne l'IVG, faisait plusieurs propositions sur le service public, que vous avez rappelées, monsieur Autain. Nous avons fait un rapport dès cet été, ce qui nous permet aujourd'hui de connaître la réalité dans chaque région du nombre de places d'IVG, de la place qui y est accordée dans les services de gynécologie-obstétrique et de l'ouverture de ces services au public, notamment, bien sûr, pendant les périodes de vacances et l'été.
J'ai demandé par circulaire aux directeurs d'ARH, répondant ainsi, d'ailleurs, aux demandes du professeur Nisand, de prendre en compte, dans les contrats d'objectifs qui vont être signés avec les hôpitaux, la présence de services d'IVG dans les services de gynécologie-obstétrique.
Par ailleurs, nous travaillons pour que l'on ne puisse plus être chef d'un service de gynécologie-obstétrique si l'on ne s'engage pas à laisser pratiquer l'IVG, même si, en vertu de la clause de conscience, on ne veut pas réaliser soi-même d'IVG.
Dans cette même circulaire, j'ai demandé aux commissions de la naissance, qui ont été mises en place par la loi de 1998, de définir dans chaque région un numéro vert permanent - cela peut être une association ou un hôpital - que les femmes pourront appeler pour obtenir toutes informations sur la contraception et l'IVG, car en ce domaine les situations sont extrêmement dramatiques.
Par ailleurs, comme je l'ai dit, nous travaillons actuellement - je reçois d'ailleurs demain un certain nombre de grands spécialistes de ces questions - sur le passage de dix à douze semaines. Je remarque que la quasi-totalité des autres pays, y compris ceux qui ont adopté l'interruption volontaire de grossesse récemment, sont au moins à douze semaines. Je souhaite que les experts s'expriment car, en l'occurrence, il s'agit bien de cette question-là. Je vais donc continuer le travail qui a été mené par le professeur Nisand. Pour ce qui me concerne, j'ai été convaincue par ses arguments, mais nous poursuivons le travail comme je m'y étais engagée.
M. Emmanuel Hamel. Protégez la vie qui va naître !
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Le 27 novembre prochain, j'accueillerai l'ensemble des associations avec lesquelles nous travaillons sur la campagne en faveur de la contraception et pour ces mesures concernant l'IVG. Nous continuons donc à avancer en respectant les délais que nous nous étions engagés à tenir.
La campagne sur la contraception aura lieu à partir du début du mois de janvier, c'est-à-dire au moment du vingt-cinquième anniversaire de la loi Veil. C'est ainsi que nous avons prévu les choses.
Au-delà de la campagne télévisée, une carte Z, qui est prête aujourd'hui, sera distribuée à 10 millions d'exemplaires. Nous mettons à profit le délai qui nous sépare de début janvier pour former les infirmières scolaires, avec Mme Ségolène Royal, pour travailler avec les associations de jeunesse, avec Mme Marie-George Buffet, pour mobiliser les missions locales, bref pour que tous les organismes qui sont en liaison avec les jeunes filles puissent effectivement, à l'occasion de la diffusion de cette information sur la contraception, engager un débat avec elles et les orienter vers des structures leur permettant d'avoir une contraception qui soit à la hauteur de ce qu'elles recherchent.
J'en viens à l'amendement n° 106 et au dépistage de l'ostéoporose. Aujourd'hui, 3 000 000 de Français, essentiellement des femmes de plus de soixante-dix ans, sont effectivement touchées par l'ostéoporose, qui, chaque année, est à l'origine de quelque 50 000 fractures osseuses.
Un rapport concernant l'évaluation des différentes méthodes de prévention a été établi à la fin de 1998 sous la conduite du professeur Gérard Breart, directeur de l'unité de recherches épidémiologiques sur la santé des femmes et des enfants, à l'INSERM. Dans ce rapport sont recensés l'ensemble des problèmes liés à l'ostéoporose et est proposé un dépistage systématique pour les femmes de plus de soixante ans, mais à titre expérimental, afin de valider la pertinence de la population envisagée et de définir les modalités techniques de ce dépistage.
Récemment, des recommandations d'experts ont été publiées par la Commission européenne. A la suite de ces recommandations, l'ANAES, l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé, a été saisie afin de déterminer quelles sont les personnes à haut risque. A partir de là, sera étudiée la pertinence du remboursement de cet examen par l'assurance maladie.
Il est donc prématuré, à ce stade, que le Gouvernement s'engage sur les options qui sont envisagées. Nous y reviendrons certainement dans le cadre de l'examen du projet de loi que nous évoquions tout à l'heure.
Par ailleurs, je soulignerai que les soins nécessaires au traitement de l'ostéoporose figurent au nombre des prestations en nature d'ores et déjà remboursables par l'assurance maladie.
J'en viens à l'amendement n° 107. Les modalités de financement des consultations prévues par la loi présentée par Mme Marie-George Buffet sont actuellement à l'étude ou en cours de réalisation. Il n'est pas évident que cette prise en charge doive être assurée par l'assurance maladie. Aussi, le Gouvernement considère qu'il est prématuré de s'engager sur les modalités de financement.
Par ailleurs, le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 80, qui est d'ailleurs dans le droit-fil du projet de loi sur la santé publique que nous présenterons au printemps prochain. Nous aborderons alors ces questions.
Pour des raisons que j'ai déjà précisées, le Gouvernement n'est pas favorable à l'amendement n° 108.
Je m'arrêterai quelques instants sur l'amendement n° 109. Je partage assez fortement le bilan de M. Fischer sur la prestation spécifique dépendance. Dès mon arrivée au ministère, j'avais dit, devant le Sénat, que j'étais tout à fait prête à laisser faire les choses en tentant de les améliorer. Nous avons essayé, en réunissant les divers comités, en discutant avec les représentants des départements, de laisser au dispositif le temps de s'appliquer. Sortez la tarification des établissements et la situation s'améliorera, nous avait-on dit. Cela a été fait, et l'amélioration n'est pas sensible ; elle est véritablement insuffisante.
Aujourd'hui, 106 000 personnes bénéficient de la PSD. Ce nombre est très certainement inférieur à celui des personnes âgées qui en auraient besoin. Les départements ont réalisés un milliard de francs d'économies par rapport à ce qui était versé au titre de l'ACTP, l'allocation compensatrice pour tierce personne.
La dépendance est un sujet qui doit nous intéresser de manière beaucoup plus large. J'avais demandé à Mme Guinchard-Kunstler d'y travailler. Dès cette année, l'Etat financera des expérimentations sur la coordination gérontologique autour des personnes âgées. Mais nous devons repenser le problème de la prise en charge de la dépendance.
En attendant de mettre en place un système qui pourrait effectivement être différent, il faut, je crois, améliorer le système existant, car nous ne pouvons pas rester dans la situation actuelle.
Dans quelques jours - ces dispositions sont en cours de signature - sera instauré un montant minimal pour la PSD en établissement, et le montant maximal de la PSD, pouvant être consacré à des dépenses autres que les dépenses de personnel, passera de 10 % à 30 %. Cela nous conduira à ramener les différences entre les départements, qui sont actuellement de l'ordre de un à quatre, notamment pour la prestation à domicile, de un à deux environ.
Comme je m'y étais engagée dans le projet de loi portant DMOS, nous mettrons en place un dispositif visant à doubler le montant retenu pour les recours sur succession. En effet, nous le savons bien, un certain nombre de personnes âgées hésitent aujourd'hui à demander le bénéfice de la PSD au motif que leurs enfants pourraient se voir retirer leur seul bien, qui peut être, par exemple, une habitation.
Pour améliorer la situation, ces mesures doivent être prises à court terme. Mais nous engageons une réflexion plus large, qui porte sur les montants financiers et, d'une manière plus générale, sur la possibilité de mieux prendre en compte la dépendance.
Enfin, dans quelques jours, je confierai une mission sur les maladies de la sénilité précoce, notamment la maladie d'Alzheimer, à un membre de votre assemblée parmi les plus éminents spécialistes de cette question.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 61, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, le rapport annexé au projet de loi est ainsi rédigé et les amendements n°s 104, 105, 79, 106, 107, 80, 108 et 109 n'ont plus d'objet.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de l'article 1er et du rapport annexé, modifié.

(L'article 1er et le rapport annexé sont adoptés.)

Vote sur l'ensemble