Séance du 26 janvier 2000






SOMMAIRE


PRÉSIDENCE DE M. PAUL GIROD

1. Procès-verbal (p. 0 ).

2. Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale. - Adoption d'une proposition de loi (p. 1 ).
Discussion générale : Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat aux droits des femmes et à la formation professionnelle ; M. Bernard Seillier, rapporteur de la commission des affaires sociales ; Mme Gisèle Printz, M. Guy Fischer.
Clôture de la discussion générale.

Article 1er (p. 2 )

Amendement n° 1 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le secrétaire d'Etat, M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.

Articles 2 à 7 (p. 3 )

Amendements n°s 2 à 7 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le secrétaire d'Etat. - Adoption des amendements supprimant les six articles.

Article 8 (supprimé) (p. 4 )

Intitulé de la proposition de loi (p. 5 )

Amendement n° 8 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement rédigeant l'intitulé.
Adoption de l'ensemble de la proposition de loi.

Suspension et reprise de la séance (p. 6 )

3. Protection des trésors nationaux. - Adoption des conclusions modifiées du rapport d'une commission (p. 7 ).
Discussion générale : MM. Serge Lagauche, rapporteur de la commission des affaires culturelles ; Yann Gaillard, rapporteur pour avis de la commission des finances ; Ivan Renar, Claude Estier.
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication.
Clôture de la discussion générale.

Article 1er. - Adoption (p. 8 )

Article 2 (p. 9 )

Amendement n° 5 du Gouvernement. - Mme le ministre, M. le rapporteur. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Articles 3 et 4. - Adoption (p. 10 )

Articles additionnels avant l'article 5 (p. 11 )

Amendement n° 1 de M. Yann Gaillard, rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur pour avis, le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 2 de M. Yann Gaillard, rapporteur pour avis. - Retrait.

Article 5 (p. 12 )

Amendement n° 3 de M. Yann Gaillard, rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur pour avis, le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article additionnel après l'article 5 (p. 13 )

Amendement n° 4 de M. Yann Gaillard, rapporteur pour avis. - Retrait.

Articles 6 et 7. - Adoption (p. 14 )

Vote sur l'ensemble (p. 15 )

MM. Claude Estier, Ivan Renar, Jean-Paul Hugot.
Adoption des conclusions modifiées du rapport de la commission.

Suspension et reprise de la séance (p. 16 )

4. Liberté de communication. - Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi (p. 17 ).

Articles additionnels avant l'article 26 bis (p. 18 )

Amendement n° 160 rectifié de M. Jack Ralite. - MM. Ivan Renar, Jean-Paul Hugot, rapporteur de la commission des affaires culturelles ; Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. - Rejet.
Amendements n°s 166 de M. Pierre Hérisson, 253 et 251 de M. Paul Loridant. - MM. Pierre Hérisson, Ivan Renar, le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption de l'amendement n° 166 insérant un article additionnel, les amendements n°s 253 et 251 devenant sans objet.
Amendements identiques n°s 167 de M. Pierre Hérisson et 252 de M. Paul Loridant. - MM. Pierre Hérisson, Ivan Renar, le rapporteur, Mme le ministre, MM. Michel Pelchat, Louis de Broissia, Mme Danièle Pourtaud. - Retrait de l'amendement n° 167 ; rejet de l'amendement n° 252.

Article 26 bis . - Adoption (p. 19 )

Article 27 (p. 20 )

Amendements identiques n°s 113 de M. Louis de Broissia, 165 de M. Philippe Richert, 173 de M. Michel Pelchat et 231 de Mme Danièle Pourtaud. - MM. Louis de Broissia, Pierre Hérisson, Michel Pelchat, Mme Danièle Pourtaud, M. le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption des quatre amendements.
Amendement n° 64 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre, MM. Michel Charasse, Louis de Broissia. - Adoption.
Amendement n° 232 de Mme Danièle Pourtaud. - Mme Danièle Pourtaud, M. le rapporteur, Mme le ministre. - Retrait.
Amendement n° 65 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption.
Amendements identiques n°s 66 de la commission et 233 de Mme Danièle Pourtaud. - MM. le rapporteur, Henri Weber, Mmes le ministre, Danièle Pourtaud. - Retrait de l'amendement n° 233 ; adoption de l'amendement n° 66.
Amendements identiques n°s 67 de la commission et 193 du Gouvernement. - M. le rapporteur, Mme le ministre, M. Michel Pelchat. - Adoption des deux amendements.
Amendements n°s 68 à 70 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption des trois amendements.
Adoption de l'article modifié.

Article 27 bis (p. 21 )

Amendement n° 194 du Gouvernement. - Mme le ministre, M. le rapporteur. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article additionnel avant l'article 28 (p. 22 )

Amendement n° 71 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 28 (p. 23 )

Amendement n° 72 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption.
Amendement n° 73 de la commission. - Adoption.
Amendement n° 74 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption.
Amendement n° 133 de M. Michel Pelchat. - MM. Michel Pelchat, le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption.
Amendement n° 75 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption.
Amendements n°s 76 rectifié de la commission et 234 de Mme Danièle Pourtaud. - M. le rapporteur, Mmes Danièle Pourtaud, le ministre. - Retrait de l'amendement n° 76 rectifié ; adoption de l'amendement n° 234.
Amendements n°s 77 et 78 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption des deux amen-dements.
Adoption de l'article modifié.

Article 28 bis (p. 24 )

Amendement n° 79 de la commission et sous-amendement n° 235 rectifié de Mme Danièle Pourtaud. - M. le rapporteur, Mmes Danièle Pourtaud, le ministre. - Adoption du sous-amendement et de l'amendement modifié.
Adoption de l'article modifié.

Article 29 (p. 25 )

Amendements n°s 80 à 82 de la commission. - M. le rapporteur, Mmes le ministre, Danièle Pourtaud, M. Louis de Broissia. - Adoption des trois amendements.
Adoption de l'article modifié.

Article 29 bis (p. 26 )

Amendement n° 83 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.

Article 29 ter (p. 27 )

Amendement n° 84 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.

Article additionnel après l'article 29 ter (p. 28 )

Amendement n° 134 de M. Michel Pelchat. - MM. Michel Pelchat, le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Articles additionnels avant l'article 30 (p. 29 )

Amendements n°s 170 rectifié bis et 171 rectifié bis de M. André Diligent. - MM. André Diligent, le rapporteur, Mme le ministre, MM. Michel Pelchat, Louis de Broissia. - Adoption des amendements insérant deux articles additionnels.

PRÉSIDENCE DE M. GUY ALLOUCHE

Article 30 (p. 30 )

Amendements n°s 85 à 89 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption des cinq amendements.
Amendement n° 259 de M. Jacques Valade. - MM. Adrien Gouteyron, le rapporteur, Mme le ministe. - Adoption.
Amendements n°s 90 et 91 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.

Article additionnel après l'article 30 (p. 31 )

Amendement n° 236 rectifié de Mme Danièle Pourtaud. - MM. Michel Dreyfus-Schmidt, le rapporteur, Mme le ministre, MM. Michel Pelchat, Alain Joyandet, Mme Danièle Pourtaud. - Rejet.

Article 31 (p. 32 )

Amendement n° 92 de la commission. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 31 bis (p. 33 )

Amendements n°s 264 du Gouvernement, 93 de la commission et sous-amendement n° 237 de Mme Danièle Pourtaud ; amendement n° 135 de M. Michel Pelchat. - MM. le rapporteur, Michel Dreyfus-Schmidt, Michel Pelchat, Mme le ministre, M. Louis de Broissia. - Retrait des amendements n°s 135, 93 et du sous-amendement n° 237 ; adoption de l'amendement n° 264 supprimant l'article.

Article 32. - Adoption (p. 34 )

Article additionnel après l'article 32 (p. 35 )

Amendement n° 161 de M. Jack Ralite. - MM. Jack Ralite, le rapporteur, Mme le ministre, M. Michel Pelchat. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Vote sur l'ensemble (p. 36 )

MM. Jacques Machet, Alain Joyandet, Louis de Broissia, Michel Pelchat, Mme Danièle Pourtaud, MM. Jack Ralite, André Diligent, Pierre Laffitte.
Adoption du projet de loi.
Mme le ministre.

5. Dépôt d'un projet de loi (p. 37 ).

6. Transmission d'un projet de loi organique (p. 38 ).

7. Transmission d'un projet de loi (p. 39 ).

8. Dépôt de rapports (p. 40 ).

9. Ordre du jour (p. 41 ).



COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. PAUL GIROD,
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

2

CONSEIL DE L'EMPLOI, DES REVENUS
ET DE LA COHÉSION SOCIALE

Adoption d'une proposition de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi (n° 19, 1999-2000), adoptée par l'Assemblée nationale, relative à la création d'un Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale (CERC). [Rapport n° 133 (1999-2000).]
Dans la discussion générale, la parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat aux droits des femmes et à la formation professionnelle. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, la proposition de loi visant à créer auprès du Premier ministre un Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale, a été adoptée en première lecture le 14 octobre dernier par l'Assemblée nationale.
Cette proposition de loi, qui a reçu le soutien du Gouvernement, arrive aujourd'hui en discussion au Sénat et je voudrais d'entrée souligner le caractère constructif des travaux de la commission des affaires sociales.
Le nouveau CERC sera chargé de contribuer à la connaissance des revenus, des inégalités sociales et des liens entre l'emploi, les revenus et la cohésion sociale. Son champ d'analyse se veut donc plus large que celui des organismes qui l'ont précédé, et il s'inscrit ainsi dans la volonté du Gouvernement de mener une politique de croissance soutenue par une action volontariste en matière d'emploi et de réduction des inégalités.
C'est au moment où notre économie va mieux, où des emplois sont créés en nombre, grâce à la croissance mais aussi aux emplois-jeunes et à la réduction du temps de travail, que nous devons en priorité faciliter le retour à l'emploi des personnes qui en sont le plus éloignées et veiller à réduire les poches d'exclusion.
Cette politique a rétabli la confiance des entreprises et des ménages et placé la France dans un cercle vertueux : création d'emplois, croissance, confiance. Tous doivent en profiter. C'est pourquoi il est indispensable d'étudier l'articulation entre revenus, emploi et inégalités sociales.
Dès le mois de septembre 1997, M. le Premier ministre avait souhaité que soit réexaminée la situation créée par la suppression, dans la loi quinquennale du 20 décembre 1993, du Centre d'études des revenus et des coûts, l'ancien CERC, organisme qui était doté d'une grande indépendance.
Cette suppression et la création du Conseil supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts, le CSERC, avaient soulevé de vives réactions, comme l'a d'ailleurs rappelé M. le rapporteur en citant les propos de Michel Dollé, l'actuel rapporteur général du CSERC, faisant référence au « péché originel » qui pèse sur les travaux du nouvel organisme à la suite de cette transformation.
Le Premier ministre avait confié à Mme Marie-Thérèse Join-Lambert, inspecteur général des affaires sociales, une mission de réflexion sur les évolutions à envisager.
Une première proposition avait déjà été présentée, sous la forme d'un amendement, au cours du débat en première lecture sur la loi d'orientation relative à la prévention et à la lutte contre les exclusions, au printemps 1998. Le Gouvernement, tout en reconnaissant l'intérêt de cette proposition, avait alors souhaité, avant de se prononcer, disposer du délai nécessaire à la poursuite de la consultation des partenaires sociaux sur les conclusions du rapport de Mme Join-Lambert, et l'amendement avait été retiré.
En deuxième lecture, un article avait été voté, mais le Conseil constitutionnel avait rejeté cette disposition au motif qu'elle était intervenue après la réunion de la commission mixte paritaire.
La proposition de loi qui a été adoptée à l'Assemblée nationale a repris les principales conclusions du rapport de Mme Join-Lambert.
Je voudrais d'abord rassurer M. le rapporteur, qui s'inquiétait de dérives éventuelles.
La volonté du Gouvernement est que le nouveau CERC porte un regard critique sur le fonctionnement économique et social de notre pays. Il lui appartiendra de souligner les relations entre emploi et revenus, de dresser un état des lieux des inégalités sociales et des limites que rencontrent les mécanismes redistributifs, et enfin d'attirer l'attention du Gouvernement, mais aussi de l'opinion publique, sur les évolutions souhaitables.
Pour ce faire, le CERC bénéficiera de toutes les garanties d'indépendance, notamment parce qu'il sera composé de personnalités reconnues pour leur compétence et représentant différentes sensibilités. Il sera ainsi résolument placé sous le signe de l'ouverture et du pluralisme.
Il interviendra également en complémentarité avec les institutions qui ont déjà été mises en place, dans le cadre de la loi contre les exclusions, pour faire progresser notre connaissance sur les questions sociales et pour donner la parole à ceux qui en sont généralement privés. Je pense en particulier à l'Observatoire national de la pauvreté et de l'exclusion sociale, dont la mission est de faire procéder à des études permettant de mieux connaître la situation de l'exclusion dans notre pays. Je pense également au Conseil national de la pauvreté et de l'exclusion sociale, qui a vu sa composition renouvelée de manière à représenter tous les éléments de la société.
Ces structures bénéficient maintenant d'une indépendance reconnue par la loi et contribuent à l'expression de tous les acteurs concernés par la lutte contre les exclusions, qu'il s'agisse des élus ou des associations intervenant dans ce secteur, mais aussi des exclus eux-mêmes.
Par ailleurs, l'administration s'est elle-même dotée, de façon interne, des moyens de mieux appréhender les phénomènes de revenus et de pauvreté, afin de pouvoir adapter les politiques qu'elle met en place et en évaluer les effets.
Le projet de nouveau CERC s'inscrit pleinement dans ce paysage institutionnel. L'objectif n'est pas de reconstituer un centre d'études avec des équipes permanentes lourdes, ce qui paraît inadapté au contexte d'aujourd'hui. Le CERC pourra en revanche mobiliser le potentiel des services et organismes existants pour impulser et réaliser des travaux.
Vous comprenez donc que l'objectif du Gouvernement est de retrouver ce qui a fait l'originalité et le succès de l'ancien CERC.
M. Seillier note dans son rapport que la recréation du CERC ne mérite ni un excès d'honneur ni l'indignité d'une guerre législative. Permettez-moi de souligner que les conditions de sa suppression par un amendement déposé lors de la discussion de la loi quinquennale de 1993 ici même et son remplacement par le CSERC ont eu pour conséquence d'affaiblir la notoriété du nouvel organisme.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard et M. Guy Fischer. Absolument !
Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat. Aujourd'hui, est requise une voix forte et indépendante, capable de se faire l'écho des difficultés auxquelles se heurte notre pays, des contradictions qu'engendre parfois notre système économique, mais aussi des opportunités liées à une croissance retrouvée.
Le Gouvernement, tout en ayant apporté son appui à la proposition de loi, est prêt à se ranger à l'avis de la commission des affaires sociales pour que le nouveau CERC voie le jour le plus rapidement possible et dans les meilleures conditions, avec le soutien et la reconnaissance de tous.
Il est donc favorable à la proposition de la commission des affaires sociales visant à abroger l'article 78 de la loi quinquennale de 1993 à compter du 1er avril 2000. Ce délai permettra au Gouvernement de créer par décret le nouveau CERC, en respectant les orientations ambitieuses que j'ai rappelées et qui nous permettront de disposer d'un conseil indépendant et reconnu, réalisant des travaux sur des questions qui sont au coeur de notre société. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous sommes réunis pour examiner une proposition de loi relative à la création d'un conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale.
Ce nouvel organisme, dénommé CERC, viendrait se substituer à l'actuel Conseil supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts, le CSERC, lui-même mis en place par la loi quinquennale du 20 décembre 1993.
Auparavant, il n'est pas inutile de rappeler qu'en 1965 un décret signé par le Président de la République, le général de Gaulle, et contresigné par le Premier ministre, Georges Pompidou, avait créé le Centre d'études des revenus et des coûts, lui aussi appelé CERC, dans le but de promouvoir la réflexion sur la politique des revenus à la suite de la grève des mineurs de 1963.
Le CERC est alors une structure légère, un centre d'études autonome, rattaché au Plan, disposant de rapporteurs placés sous la responsabilité d'un conseil de six à huit personnalités nommées en conseil des ministres, à raison de leur compétence et de leur expérience.
De 1966 à 1993, le CERC va réaliser de nombreuses études, notamment des rapports conjoncturels sur l'évolution des revenus des Français, qui le conduiront d'ailleurs à mettre l'accent sur l'accroissement des inégalités dans la société française au début des années quatre-vingt.
Simultanément, le CERC connaît une forte progression de ses effectifs : à peine composé d'une dizaine de personnes à l'origine, il compte, en 1993, quarante-deux emplois budgétaires, soit vingt-sept emplois de chargé de mission et quinze emplois de personnel administratif, auxquels s'ajoutent de nombreux vacataires.
En 1993, un double diagnostic est porté sur le CERC.
Tout d'abord, dans un contexte de crise, la réflexion sur les inégalités de revenus n'a pas de sens si elle est détachée de l'analyse des effets du ralentissement de la croissance et si elle ne porte pas sur l'examen des conditions de la création d'emplois.
En d'autres termes, le CERC semblait privilégier la question des inégalités de revenus appréciée de façon statique, en abandonnant la réflexion sur les effets des charges diverses qui pèsent sur les facteurs de production.
Or chacun sait que le poids des prélèvements peut avoir un impact négatif sur la croissance, et donc sur l'emploi, et générer à ce titre de nouvelles inégalités.
Le second élément du diagnostic portait sur le vieillissement du CERC, qui était devenu, non plus l'équipe légère des origines, mais une sorte d'institution où l'on faisait carrière au détriment du renouvellement des hommes et des idées.
Avec l'appronfondissement de la crise économique à partir de 1991, il importait que le CERC retrouve un rôle de « guetteur » ou de « vigie » dans l'analyse des relations entre les revenus, l'emploi et les coûts, et qu'il ne consacre plus son énergie à la collecte directe de statistiques, mission dont l'INSEE, par exemple, s'acquitte fort bien.
La loi quinquennale du 20 décembre 1993 est apparue comme un support adéquat pour montrer que le Parlement lui-même souhaitait donner une nouvelle impulsion au CERC et moderniser ses méthodes de travail dans le respect du principe d'indépendance.
C'est pourquoi, à l'initiative de la commission des affaires sociales, un amendement a été adopté en ce sens en première lecture par le Sénat, puis repris dans le texte élaboré en commission mixte paritaire.
A partir de 1993, la mission du nouveau Conseil supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts est donc élargie : il contribue à la connaissance « des liens entre l'emploi et les revenus » et non plus seulement à celle des coûts et des revenus de production. De plus, il est chargé d'une fonction de proposition ou, plus précisément, de « faire des recommandations de nature à favoriser l'emploi ».
Composé de neuf membres, nommés suivant une procédure définie par décret en Conseil d'Etat garantissant l'indépendance et la qualité de ses travaux, le CSERC n'est plus un centre autonome mais est un conseil supérieur, c'est-à-dire un organisme léger, qui a vocation à travailler sur les études existantes et à commander des travaux aux administrations de l'Etat plutôt que de les réaliser lui-même.
Le nombre de permanents se réduit. La durée de présence des rapporteurs est limitée à trois ans renouvelable une fois. Dans ce type de structure, il est important que les rapporteurs ne restent pas en poste trop longtemps, au risque de voir s'effilocher le réseau relationnel qu'ils ont réussi à se constituer dans leur administration d'origine et de bloquer toute possibilité d'évolution pour les rapporteurs nouvellement recrutés.
Il convient de souligner que les personnels du CERC d'avant 1993 ont été reclassés auprès du commissariat général du Plan ou de l'INSEE.
L'audience du nouvel organisme s'est progressivement améliorée malgré deux handicaps de départ. Tout d'abord, la transformation du CERC en CSERC a entaché d'une sorte de « péché originel » les productions du nouvel organisme.
Par ailleurs, du fait d'une présence insuffisante dans les médias, ni le président du CSERC, ni ses membres ni le rapporteur général n'ont réussi à se forger une image publique à une époque où la personnalisation des débats est un vecteur nécessaire pour toucher un large public.
Pour autant, le CSERC, qui travaillait sur des bases totalement nouvelles, est loin d'avoir démérité et il semblait commencer à entrer en régime de croisière lorsque le Gouvernement a souhaité revenir sur la question.
Par une lettre de septembre 1997, le Premier ministre, quatre mois après la nomination de son gouvernement, confie ainsi une mission à Mme Marie-Thérèse Join-Lambert. Constatant que « beaucoup ont regretté la disparition du CERC » et qu'il a été saisi de « demandes de réexamen de la situation », M. Lionel Jospin lui demande de faire le point sur la situation.
Le rapport de Mme Join-Lambert est nuancé. Elle se prononce finalement en faveur d'un organisme nouveau, mieux dimensionné par rapport aux attentes des acteurs sociaux, centré sur l'étude de la répartition et des inégalités, « qui mêlerait le retour à ce qui faisait l'originalité et le succès de l'ancien CERC et le maintien de certains aspects du nouveau CSERC », en particulier le maintien d'une équipe de petite taille.
La question rebondit lors de la discussion de la loi d'orientation du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions : on se souvient que l'Assemblée nationale avait adopté, en nouvelle lecture, un amendement afin de reconstituer le CERC, mais que le Conseil constitutionnel avait invalidé cette disposition pour des raisons de procédure, en constatant que l'amendement était intervenu trop tardivement dans la procédure parlementaire.
Il est à noter qu'à la suite de cette opération manquée la procédure de renouvellement des membres du CSERC n'a pas été engagée à l'automne 1998 et que, à la demande du directeur de cabinet du Premier ministre, les membres actuels sont restés en fonction pour continuer à animer le conseil durant la phase transitoire précédant le vote d'une nouvelle loi.
Aujourd'hui, dix-huit mois après, le CSERC, en phase transitoire prolongée, se vide peu à peu de sa substance : aucun nouveau recrutement n'est effectué par le conseil intérimaire et les rapporteurs en place partent au fur et à mesure, transformant le CSERC en une coquille vide.
La proposition de loi qui nous est transmise par l'Assemblée nationale vise donc à recréer le CERC. Par certains aspects, elle rend hommage à la réforme voulue en 1993 ; elle comporte toutefois une volonté symbolique de « restauration » même si celle-ci ne ressort pas toujours du texte ni de son exposé des motifs.
Le CERC « nouvelle formule » serait toujours un conseil composé d'un nombre réduit de membres et non pas un centre autonome. Il faut y voir le souci de maintenir le principe d'une équipe de petite taille en mesure d'utiliser le potentiel des organismes existants plutôt que de s'institutionnaliser.
Sa mission est étendue, au-delà de la connaissance des revenus, à celle des inégalités sociales. Le principe d'une réflexion sur les liens entre l'emploi et les revenus est conservé, mais on y ajoute la notion de cohésion sociale issue des travaux préparatoires à la loi contre les exclusions.
Le texte de la proposition de loi constitue un cadre très général renvoyant au pouvoir réglementaire le soin de constituer un nouvel organisme d'études.
La nomination du président et des six membres du conseil et renvoyée à un décret, c'est-à-dire à une décision du Premier ministre, sans précision particulière.
Les autres dispositions de la proposition de loi sont d'ordre non pas législatif, mais plutôt réglementaire.
Il en est ainsi de l'article qui précise que les rapports sont rendus publics et transmis au Parlement.
Il en est de même de la disposition prévoyant que le président du CERC peut être entendu par les commissions parlementaires, alors que l'ordonnance du 17 novembre 1958 prévoit déjà qu'une commission spéciale ou permanente peut convoquer toute personne dont l'audition est nécessaire.
Quant à l'article interdisant aux membres du CERC de solliciter ou d'accepter des instructions extérieures, il est le strict décalque d'une disposition déjà prévue par un décret du 26 mai 1994.
Au fond, la proposition de loi ne comprend que deux dispositions vraiment législatives. Encore sont-elles sujettes à caution.
Il est prévu tout d'abord que le CERC peut se faire communiquer tout élément nécessaire par les administrations de l'Etat, les collectivités territoriales et les établissements publics.
Pour ce qui concerne l'Etat et ses établissements publics sous tutelle, on sait que le Premier ministre est parfaitement en droit de s'adresser directement à ces derniers pour leur imposer des obligations d'information statistique, obligations qui, au demeurant, sont déjà prévues.
En revanche, depuis les lois de décentralisation, une loi est effectivement nécessaire pour imposer une obligation d'information aux collectivités locales.
On peut s'étonner de voir ainsi envisagée la possibilité d'enquête auprès des collectivités locales, alors que l'on affirme toujours que le CERC aura vocation, non pas à collecter des statistiques, mais à les commander auprès des organismes extérieurs. Surtout, il est essentiel de ne pas multiplier les saisines à des fins statistiques des collectivités territoriales sans coordination d'ensemble : dans un régime décentralisé, il appartient plutôt au rapporteur général du CERC de prendre contact avec les associations d'élus pour déterminer dans quelles conditions des expérimentations peuvent être conduites.
Avec humour, on peut observer que la deuxième innovation législative de ce texte est d'ordre sémantique : il s'agit, dans l'intitulé de la proposition de loi, de rétablir l'acronyme CERC. Ce « retour vers le passé » s'effectue au prix d'un petit artifice qui consiste à ne pas retenir l'initiale du dernier mot de l'intitulé de l'organisme, à savoir le mot « social ». Cette initiative extrêmement symbolique montre bien le sens de la démarche voulue par nos collègues députés.
Le sentiment en faveur d'une restauration du CERC « à l'ancienne » ressort encore plus nettement des débats à l'Assemblée nationale.
Les déclarations de certains orateurs laissent à penser qu'ils souhaitent prédéterminer les conclusions du CERC.
Ainsi un député souligne-t-il en séance que « le CERC se doit d'accompagner les politiques de l'emploi et, en particulier, la mise en oeuvre des 35 heures » ou encore que « la réussite de la réduction du temps de travail doit être garantie par les bons diagnostics du CERC ».
Je ne m'arrêterai pas davantage pour méditer sur la notion de « bon diagnostic », s'agissant d'un organisme censé contribuer à la meilleure connaissance de la réalité économique et financière.
Par ailleurs, bien que l'on semble s'en tenir à l'idée d'un organisme léger, un autre orateur partage l'opinion selon laquelle l'expérience doit être « capitalisée dans la durée » et ne saurait être remplacée par des « expertises ponctuelles menées par des équipes de passage ».
Pour définir sa position sur ce texte, la commission des affaires sociales a estimé que le nouveau CERC ne méritait ni excès d'honneur ni indignité.
Il ne mérite pas un excès d'honneur parce qu'il s'agit, au fond, d'un organisme qui a vocation à rassembler des statistiques, à les commenter et à les mettre en perspective de façon scientifique, rigoureuse et objective. Il ne s'agit pas d'une autorité administrative apte à trancher des litiges ou à prendre des décisions.
S'agissant du fonctionnement, entrer dans le détail des obligations de mobilité ou limiter les effectifs serait sans doute excéder les limites de notre compétence. Aussi, il ne nous a pas paru opportun d'aller dans le détail, en fixant des bornes et des garanties plus précises à propos de la composition et du mode de fonctionnement du nouvel organisme, d'autant que nous savons bien que, dans ce type d'organisme, l'indépendance repose plus sur la qualité des hommes que sur le formalisme de la procédure.
Le sujet en question ne mérite pas davantage l'indignité d'une guerre législative. Sur le principe, on ne saurait s'opposer à l'amélioration de la connaissance en matière de revenus et d'inégalités sociales. Il n'y aurait pas grand sens à engager, sur ce thème, un vaste débat législatif avec l'Assemblée nationale au cours de deux lectures, dans chaque assemblée, d'une commission mixte paritaire éventuellement infructueuse, suivie d'une nouvelle lecture dans chaque assemblée et d'un dernier mot à l'Assemblée nationale. Que penserait les Français si les deux assemblées se livraient à une guerre picrocholine sur le CERC ?
Au nom de la commission des affaires sociales, la solution que je vous propose est de ne pas donner à ce texte symbolique plus d'importance qu'il n'en mérite. Aujourd'hui, nous pouvons remettre le CERC dans le domaine qui a été le sien et dans lequel il doit revenir, c'est-à-dire le domaine réglementaire.
En 1993, l'intervention législative était nécessaire et légitime. A cette époque, il s'agissait de réorienter l'action d'un organisme qui avait près de trente ans d'existence et qui comprenait des personnels dont plus de la moitié était en place depuis plus de quinze ans.
Le Gouvernement et le Parlement devaient marquer clairement leur volonté de changement et envoyer un « signal fort » à l'égard de la structure administrative appelée à une réforme radicale. Il fallait donner un « coup de boutoir » pour modifier le cours des choses.
Aujourd'hui, la situation n'est plus la même et le diagnostic semble partagé, tant sur le souci d'éviter l'alourdissement et le veillissement de la structure que sur la nécessité de lier la réflexion sur les revenus à la réflexion sur l'emploi.
Lorsqu'il a constitué le conseil d'analyse économique, le Premier ministre n'a pas estimé nécessaire de consulter le Parlement. Il n'est pas anormal de laisser le Premier ministre organiser à sa guise les services placés auprès de lui et assumer la responsabilité de leur évolution et de leur efficacité. La responsabilité propre de l'exécutif comporte la maîtrise des demandes qui ne manqueront pas de lui être faites, particulièrement de celles qui s'inspireront des errements antérieurs.
C'est pourquoi la commission des affaires sociales vous propose un dispositif d'une parfaite simplicité consistant à abroger l'article 78 de la loi de 1993 à compter du 1er avril 2000. Dans l'intervalle des trois mois à venir, le Gouvernement aura le temps de prendre le décret nécessaire et d'agir avec rapidité pour mettre fin au délitement progressif de l'actuel conseil supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts, le CSERC. Bien entendu, nous sommes ouverts à toute proposition que le Gouvernement pourrait nous faire pour adapter le délai de trois mois à ses contraintes.
Bien sûr, l'Assemblée nationale pourrait regretter que la « re-création » du CERC ne soit pas effectuée par la loi. Mais elle devrait comprendre que notre proposition - qui consiste à réaffirmer la pleine responsabilité du Gouvernement dans son champ de compétence - est plus conforme à l'esprit de la Constitution de la ve République et qu'il vaut mieux la suivre que se focaliser sur une revanche dont l'enjeu symbolique est largement virtuel.
Je vous remercie, madame la secrétaire d'Etat, d'avoir lu attentivement le rapport de la commission des affaires sociales et de nous avoir fait savoir que vous étiez sensible à l'argumentation que nous y développions. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme Printz.
Mme Gisèle Printz. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui permettra de mettre fin au feuilleton qui se déroule depuis 1993 avec la suppression du Centre d'études des revenus et des coûts, à l'occasion de la loi quinquennale relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle.
Chacun garde en mémoire les travaux remarquables qui avaient été réalisés par les chercheurs de cet organisme jusqu'à sa suppression en 1993.
A cet égard, je voudrais rappeler que le CERC avait été créé par un décret signé par le général de Gaulle, sur l'initiative du ministre des finances et du ministre des affaires sociales de l'époque, respectivement Michel Debré et Jean-Marcel Jeanneney. C'est M. Raymond Barre qui devait donner une forte impulsion au CERC en augmentant les moyens de cet organisme, en instituant un rapport périodique et, surtout, en permettant la publicité des rapports sans autorisation préalable du Gouvernement. Faut-il voir là une marque de respect d'un économiste réputé pour les travaux de ses pairs ? Je ne sais. En tout cas, c'était accorder une réelle autonomie aux chercheurs et avancer dans le sens de la démocratie. L'opinion publique tout entière pouvait désormais connaître l'état réel de l'évolution des revenus et de leur réparation.
Incontestablement, c'était prendre un risque, mais aussi, pour un homme politique, se donner les moyens d'une meilleure connaissance des réalités et se doter d'un aiguillon utile pour agir.
Avec l'apparition de la crise économique, les analyses du CERC mirent de plus en plus en évidence les difficultés d'une partie de la population à disposer de revenus décents. Les inégalités croissantes de répartition du revenu, dues au chômage, et la précarisation des salariés furent mises en évidence.
La valeur de ces travaux, leur fondement scientifique incontestable n'en rendaient sans doute pas la lecture agréable pour les gouvernements de l'époque, malgré les efforts qu'ils faisaient pour corriger ces disparités de revenus.
Ce fut le courage des gouvernements d'alors de s'être saisis de ces rapports pour en tirer les enseignements dans la mise en oeuvre de leur politique.
Telle ne fut pas l'attitude du gouvernement nommé en 1993 et de la majorité qui le soutenait. Ce n'est pas un hasard si c'est au plus fort de l'aggravation du chômage, avec toutes ses conséquences en matière sociale, économique et fiscale, que la disparition du CERC fut décidée.
Si je peux utiliser une expression imagée : puisque la santé du patient était mauvaise et puisque celui-ci avait la fièvre, il fut décidé de casser le thermomètre.
M. Guy Fischer. C'est tout à fait ça !
Mme Gisèle Printz. C'était une solution de facilité, qui n'améliorait en rien la situation de nos concitoyens, mais révélait une intention de leur dissimuler l'aggravation de la situation.
La création du CSERC, le Conseil supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts, fut marquée de cette empreinte initiale.
Quelle que soit la qualité des membres de ce conseil, l'indépendance, la liberté dont avaient bénéficié les chercheurs du CERC avaient été délibérément détruites, et les travaux du nouveau conseil en étaient marqués dans l'esprit du public.
Tirer un trait sur cet épisode est donc une sage décision. Mais la démarche serait incomplète si n'était recréé non pas l'ancien CERC à l'identique - car ce qui fut ne peut être ressuscité - mais un organisme qui bénéficie de la même indépendance à l'égard du pouvoir politique, de la même qualité scientifique, et donc de la même crédibilité.
Ainsi, il est expressément mentionné que les rapports du CERC seront publiés sans qu'une autorisation préalable soit exigée.
Il est de même indiqué que les membres du CERC ne pourront solliciter ni accepter d'instruction d'aucune autorité. Selon nous, après ces regrettables péripéties, c'est là le point nodal de la proposition de loi.
Ce texte nous arrive de l'Assemblée nationale après une discussion intéressante, qui a permis d'ailleurs l'adoption d'un amendement de l'opposition élargissant la transmission des rapports du nouveau CERC au Conseil économique et social.
La majorité sénatoriale, par l'intermédiaire de M. le rapporteur, fait une proposition légèrement différente.
Comme cela est mentionné à la page vingt-trois du rapport, « on ne saurait s'opposer à l'amélioration de la connaissance en matière de revenus et d'inégalités sociales ».
Il est en même temps difficile de se déjuger au regard de ce qui fut fait dans ce même hémicycle voilà six ans. Il nous est donc proposé de renvoyer au décret la création éventuelle du CERC, tout en maintenant la suppression du CSERC, dont chacun voit bien qu'elle s'impose. Il est vrai que le CERC, dans sa première mouture, avait été créé par voie réglementaire.
Pour notre part, nous relevons que le CERC a été certes créé par décret mais supprimé par la voie législative. C'était lui reconnaître une grande place. Mais là n'est pas l'essentiel.
Ce qui importe, c'est que dans les meilleurs délais puisse revoir le jour un organisme qui réponde aux objectifs fixés par la proposition de loi, acceptés par le Gouvernement et auxquels vous ne vous opposez finalement pas.
Dans un esprit de conciliation et afin de ne pas prolonger inutilement la procédure parlementaire, nous voterons donc l'abrogation de l'article 78 de la loi quinquennale relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle et nous laissons au Gouvernement le soin de créer par décret le Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale. (Applaudissements sur les travées socialistes. - M. le rapporteur applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous examinons, cet après-midi, une proposition de loi déposée par M. Le Garrec et les membres du groupe socialiste, visant à reconstituer, auprès du Premier ministre, un Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale. Cette proposition de loi a été adoptée à l'Assemblée nationale le 14 octobre dernier, grâce aux seules voix des députés de la gauche plurielle.
Bien que nous connaissions tous la chronologie des événements qui ont ponctué l'évolution de cet organisme utile à l'information et à l'analyse des faits économiques et sociaux qui transforment notre société, je tiens à rappeler quelques dates indispensables pour comprendre la position de la majorité sénatoriale dans ce débat.
Créé par décret en 1966, le Centre d'études des revenus et des coûts, le CERC, structure autonome destinée à apporter tant à l'opinion publique qu'au Gouvernement des éléments d'information sur l'évolution des revenus en France, s'est rapidement imposé pour la précision, la qualité scientifique et l'objectivité de ses études et analyses qui, réalisées sans complaisance, ont largement permis de nourrir le débat public. Je pense notamment aux études mettant en évidence l'accroissement spectaculaire des inégalités de revenus et de patrimoine, au creusement des inégalités sociales au cours des années quatre-vingt.
Dérangeante pour tous les gouvernements, cette indépendance intellectuelle et cette liberté de ton, écornant la pensée unique, dans un contexte d'aggravation du chômage, ont été fatales au CERC. En 1993, répondant aux souhaits du gouvernement Balladur, au détour d'un amendement lors du débat sur le projet de loi quinquennale relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle, notre Haute Assemblée l'a dissous et remplacé par le Conseil supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts, le CERC.
Alors qu'officiellement, il s'agissait d'étendre les compétences de cet organisme à l'étude des liens entre l'emploi et les revenus et de lui donner compétence pour formuler des recommandations de nature à favoriser l'emploi, concrètement, en supprimant l'équipe permanente de chercheurs et d'économistes, en décidant que les études seraient obligatoirement menées par un rapporteur haut fonctionnaire ou expert, en diminuant les subventions, tout a été mis en oeuvre pour policer l'information publique sur les revenus, la rendre politiquement et électoralement correcte, brider les activités du conseil, le dénaturer.
Economistes et chercheurs regroupés au sein du CERC-Association ont continué à produire des études. L'objectif était d'alerter l'opinion et les pouvoirs publics sur les réalités du sous-emploi en France, de la précarisation des salariés, du faible niveau de vie de nombreux bénéficiaires de minima sociaux.
Autant d'éléments de nature à inciter les gouvernements, d'une part, à réfléchir à une répartition plus égalitaires des richesses et, d'autre part, à s'interroger notamment sur l'efficacité des politiques de l'emploi.
Autant d'éléments irritants car révélateurs des perversités du système libéral, source d'inégalités, d'insécurité et d'exclusion sociale.
On peut dire que ces analyses ont créé le socle du projet de loi d'orientation relatif à la lutte contre les exclusions, dont M. Seillier était le rapporteur au Sénat.
Depuis ce démantèlement, à mon avis précité, dénoncé par des personnalités politiques - de gauche surtout, car peu de personnalités dans les rangs de la majorité, excepté peut-être Raymond Barre, se sont émues -, les syndicats et la communauté scientifique, nous avons été nombreux à intervenir pour que ce « baromètre » des revenus, de l'état de la société française renaisse dans ses objectifs initiaux.
Chargée en septembre 1997 par le Premier ministre de réfléchir à la recréation du CERC, Mme Join-Lambert a mis en évidence la nécessité de faire évoluer les missions du CSERC, d'intégrer dans le contexte institutionnel, notamment dans les institutions publiques de statistiques, un nouvel organisme de recherche sur la répartition et les inégalités, « dans un cadre qui garantisse à la fois le pluralisme et l'ouverture à la société civile ».
Lors du débat en deuxième lecture à l'Assemblée nationale sur le projet de loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions, un amendement que nous avions soutenu visait à dissoudre le CSERC et à instituer à sa place un nouveau CERC : disposition que vous vous étiez empressés, messieurs, de faire disparaître, d'aucuns allant jusqu'à se prononcer pour la suppression - excusez-moi du terme, mais je ne fais que vous citer - de « tous les organismes croupions » !
La présente proposition de loi reprend les dispositions rejetées pour des motifs de forme par le Conseil constitutionnel.
Composé d'un conseil réduit de personnalités représentatives de la société civile, et non pas exclusivement de hauts fonctionnaires, le CERC sera chargé de contribuer à la connaissance de l'ensemble des revenus, de leurs éléments constitutifs, de l'emploi et des inégalités sociales, ainsi que de leurs liens réciproques.
A travers ses rapports réguliers et études spécifiques dont la publicité sera assurée et non conditionnée à la transmission préalable des travaux tant au Premier ministre qu'aux assemblées ou au Conseil économique et social, le CERC est appelé à être un outil précieux non seulement pour prendre la mesure des implications sociales de notre système économique et de l'articulation des différents facteurs qui concourent à la cohésion sociale, mais aussi pour démocratiser le débat social et éclairer les réponses apportées par la politique aux maux de la société.
Pour justifier leur vote contre la présente proposition de loi, les députés de l'opposition ont fait part de leurs doutes quant à l'objectivité et à l'indépendance du futur CERC, allant même jusqu'à dénoncer « la volonté de recréer une sorte de porte-voix idéologique, chargé de développer les thèses officielles de l'actuelle majorité » !
Ceux qui, hier, avaient mis à mal le CERC se sont opposés à sa très symbolique « restauration ».
La majorité sénatoriale soucieuse, quant à elle, de ne pas apparaître comme étant hostile au principe même d'une amélioration des connaissances, d'une plus grande transparence sur les coûts, les salaires et les inégalités sociales, fait le choix de renvoyer au seul Gouvernement le soin de rétablir par décret cet organisme, passant outre les pouvoirs du Parlement.
Arguant du fait que la voie législative ne serait pas nécessaire pour mettre fin à l'actuel CSERC, alors même qu'en 1993 la même voie avait été suivie, au nom de la commission des affaires sociales, le rapporteur propose d'abroger, à compter du 1er avril 2000, l'article 78 de la loi quinquennale relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle. Il n'est jamais trop tard pour reconnaître ses erreurs !
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Oh ! On pourrait remonter plus loin dans le temps, mon cher collègue !
M. Guy Fischer. Ne prenez pas mal mes propos, monsieur le président Delaneau, mais vous admettrez qu'il manque aujourd'hui un certain nombre de sénateurs qui avaient pris une part prépondérante dans l'abrogation de cet article 78. J'ai d'ailleurs relu pour l'occasion les propos du président de la commission des affaires sociales de l'époque.
Partageant la volonté politique, qui a animé les auteurs de la proposition de loi, de doter notre démocratie d'un organisme indépendant, pluraliste, transparent, autonome, capable de porter sur notre société un oeil critique, nous pensons, pour notre part, que ce que la loi avait défait, seule une loi pouvait le refaire, et que la voix législative était la meilleure pour conforter la pérennité du CERC.
Souhaitant toutefois qu'une décision intervienne le plus tôt possible, nous ne nous opposerons pas à la démarche de la majorité sénatoriale ; nous serons attentifs, madame la secrétaire d'Etat, au fait que le décret marque bien notre volonté de garantir à cet organisme une réelle indépendance, gage de crédibilité. Nous nous abstiendrons donc sur ce texte. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.

Article 1er



M. le président.
« Art. 1er. _ Il est créé auprès du Premier ministre un Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale (CERC) chargé de contribuer à la connaissance des revenus, des inégalités sociales et des liens entre l'emploi, les revenus et la cohésion sociale. »
Par amendement n° 1, M. Seillier, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit cet article :
« L'article 78 de la loi n° 93-1313 du 20 décembre 1993 quinquennale relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle est abrogé à compter du 1er avril 2000. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Cet amendement vise à l'abrogation de l'article 78 de la loi du 20 décembre 1993. Cette loi a d'ailleurs fait son oeuvre puisque l'orientation pressentie et prévisible du nouveau CERC serait conforme - le rapport de Mme Join-Lambert l'a bien souligné - à ce qu'est devenu, dans la pratique, le CSERC.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat. Favorable, monsieur le président.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Delaneau, président de la commission. M. Guy Fischer a dit tout à l'heure que ce que la loi a défait, seule une loi peut le refaire. Certes, mais ce qu'un décret a fait, un autre décret va le refaire. C'est, en effet, un décret du général de Gaulle qui a créé, au départ, le CERC !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1, accepté par le Gouvernement.
M. Guy Fischer. Le groupe communiste s'abstient sur cet amendement, comme il s'abstiendra aussi sur tous les amendements suivants.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 1er est ainsi rédigé.

Article 2



M. le président.
« Art. 2. _ Le conseil est composé d'un président et de six membres, nommés par décret. »
Par amendement n° 2, M. Seillier, au nom de la commission, propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur. C'est un amendement de conséquence de l'adoption de l'amendement n° 1. J'indique d'ores et déjà qu'il en va de même des amendements n°s 2 à 7, déposés aux articles 2 à 7.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement émet un avis favorable sur l'amendement n° 2, ainsi que sur les amendements suivants, qui sont également des amendements de conséquence de l'adoption de l'amendement n° 1.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 2, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 2 est supprimé.

Article 3

M. le président. « Art. 3. _ Les rapports du Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale sont transmis au Premier ministre ainsi qu'aux présidents de l'Assemblée nationale, du Sénat et du Conseil économique et social. Ils sont rendus publics par le conseil.
« Le président du Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale est entendu par les commissions de l'Assemblée nationale et du Sénat, à la demande de leur président, pour leur présenter les rapports du conseil. »
Par amendement n° 3, M. Seillier, au nom de la commission, propose de supprimer cet article.
La commission et le Gouvernement se sont déjà exprimés.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 3, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 3 est supprimé.

Article 4

M. le président. « Art. 4. _ Dans l'exercice de ses activités, le Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale, en la personne de son président ou de l'un de ses membres, ne peut solliciter ni accepter d'instructions d'aucune autorité. »
Par amendement n° 4, M. Seillier, au nom de la commission, propose de supprimer cet article.
La commission et le Gouvernement se sont déjà exprimés.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 4, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 4 est supprimé.

Article 5

M. le président. « Art. 5. _ Les administrations de l'Etat, des collectivités territoriales et des établissements publics sont tenues de communiquer au Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale les éléments qui lui sont nécessaires pour l'exercice de ses missions, sous réserve de l'application des dispositions législatives imposant une obligation de secret. »
Par amendement n° 5, M. Seillier, au nom de la commission, propose de supprimer cet article.
La commission et le Gouvernement se sont déjà exprimés.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 5, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 5 est supprimé.

Article 6

M. le président. « Art. 6. _ Un décret en Conseil d'Etat précise la composition et les modalités de fonctionnement du Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale. »
Par amendement n° 6, M. Seillier, au nom de la commission, propose de supprimer cet article.
La commission et le Gouvernement se sont déjà exprimés.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 6, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 6 est supprimé.

Article 7

M. le président. « Art. 7. _ Le Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale se substitue au Conseil supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts institué par l'article 78 de la loi n° 93-1313 du 20 décembre 1993 quinquennale relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle.
« Cet article est abrogé à la date de la publication du décret mentionné à l'article 6. »
Par amendement n° 7, M. Seillier, au nom de la commission, propose de supprimer cet article.
La commission et le Gouvernement se sont déjà exprimés.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 7, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 3 est supprimé.

Article 8



M. le président.
L'article 8 a été supprimé par l'Assemblée nationale.

Intitulé de la proposition de loi



M. le président.
Par amendement n° 8, M. Seillier, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit l'intitulé de la proposition de loi :
« Proposition de loi portant abrogation de l'article 78 de la loi n° 93-1313 du 20 décembre 1993 quinquennale relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Cet amendement vise à modifier l'intitulé de la proposition de loi, par coordination avec l'amendement adopté à l'article 1er, afin de préciser que le présent texte a pour objet d'abroger l'article 78 de la loi quinquennale du 20 décembre 1993. La commission ne peut, en effet, qualifier le centre d'études qui sera institué par décret.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat. Par voie de conséquence, le Gouvernement émet un avis favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 8, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'intitulé de la proposition de loi est ainsi rédigé.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.
M. Guy Fischer. Le groupe communiste républicain et citoyen s'abstient.

(La proposition de loi est adoptée.)
M. le président. Mes chers collègues, en attendant l'arrivée de Mme le ministre de la culture et de la communication, nous allons interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à quinze heures cinquante, est reprise à seize heures.)

M. le président. La séance est reprise.

3

PROTECTION DES TRÉSORS NATIONAUX

Adoption des conclusions modifiées
du rapport d'une commission

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion des conclusions du rapport (n° 169, 1999-2000) de M. Serge Lagauche, fait au nom de la commission des affaires culturelles sur la proposition de loi (n° 444, 1998-1999) de M. Serge Lagauche, Mme Dinah Derycke et les membres du groupe socialiste et apparentés relative à la protection des trésors nationaux et modifiant la loi n° 92-1477 du 31 décembre 1992 relative aux produits soumis à certaines restrictions de circulation et à la complémentarité entre les services de police, de gendarmerie et de douane. [Avis n° 184 (1999-2000).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.
M. Serge Lagauche, rapporteur de la commission des affaires culturelles. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la proposition de loi adoptée par la commission des affaires culturelles qui vous est soumise aujourd'hui tend à remédier aux imperfections du dispositif de contrôle des exportations d'oeuvres d'art, tel qu'il résulte de la loi du 31 décembre 1992.
Ce dispositif législatif a succédé à la loi du 23 juin 1941, qui permettait à l'Etat à la fois d'exercer un contrôle très strict des exportations d'oeuvres d'art et d'acheter les biens au prix déclaré par l'exportateur, mais que la constitution du marché unique et la suppression des frontières intérieures au sein de la Communauté européenne avaient rendue caduque.
Je vous en rappellerai brièvement l'économie, étroitement calquée sur les textes communautaires qui instaurent un contrôle minimal uniforme des exportations de biens culturels.
Dès lors qu'un bien dépasse certains seuils d'ancienneté ou de valeur, son exportation est subordonnée à l'obtention d'un certificat attestant qu'il ne présente pas un intérêt suffisant pour justifier sa conservation sur le territoire national.
Ce certificat, valable cinq ans, ne peut être refusé qu'aux « trésors nationaux », c'est-à-dire, outre, bien entendu, aux objets appartenant aux collections publiques et aux objets classés, aux biens qui « présentent un intérêt majeur pour le patrimoine national au point de vue de l'histoire, de l'art ou de l'archéologie ».
Cette qualification se traduit par une décision du ministre de la culture de refus de certificat, prise après avis d'une commission composée de représentants de l'Etat et de personnalités qualifiées. Ce refus est valable trois ans, délai au terme duquel, si le bien n'est pas classé ou n'a pas été acquis pour entrer dans les collections publiques, il ne peut être renouvelé.
Ce système, d'inspiration libérale dans la mesure où le certificat est la règle et le refus l'exception, s'est révélé dans les faits fort peu efficace pour assurer la protection du patrimoine national. En effet, dans l'esprit du texte de 1992, le classement, dont l'un des effets est d'interdire l'exportation, devait permettre d'assurer le maintien sur le territoire national des oeuvres qui se seraient vu refuser le certificat. Or l'évolution de la jurisprudence judiciaire a conduit à neutraliser cette alternative : l'indemnité que doit verser l'Etat, aux termes de la loi de 1913, en cas de classement sans le consentement du propriétaire a été évaluée par référence au prix d'oeuvres comparables vendues sur le marché international, ce qui contraint donc l'Etat à payer des sommes considérables sans pour autant devenir propriétaire des biens concernés.
L'Etat ne dispose donc plus, pour retenir une oeuvre sur le territoire national, que du refus de certificat, par nature provisoire, ou de l'acquisition. Nous sommes donc très loin des objectifs qui présidaient aux textes de 1913 ou de 1941.
La proposition de la loi dont nous allons examiner les dispositions n'a pas pour objet de revenir à la situation antérieure à 1992. Au demeurant, nos engagements européens ne nous le permettraient pas.
Par ailleurs, force est de constater qu'une réglementation trop restrictive des exportations d'oeuvres d'art handicape le commerce de l'art et encourage la fraude.
Faute de modifier la loi de 1913 sur le point de l'indemnisation qui doit être versée au propriétaire en cas de classement sans son consentement - ce qui n'est guère envisageable compte tenu de la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur le principe d'égalité devant les charges publiques -, il nous incombe d'organiser l'acquisition par l'Etat des oeuvres qui font l'objet d'un refus de certificat.
On se rapproche donc du système britannique, qui ne permet de refuser la licence d'exportation que si l'Etat fait une offre d'achat au propriétaire.
Le texte adopté par la commission des affaires culturelles s'attache donc d'abord à remédier aux lacunes de la loi de 1992 sur ce point. En effet, à condition qu'il bénéficie des moyens budgétaires nécessaires - ce qui n'est pas toujours le cas -, l'Etat, pour acquérir une oeuvre, doit convaincre son propriétaire de la lui céder, ce qui, faute de la menace du classement, est souvent difficile, d'autant plus qu'il n'existe pas de procédure pour évaluer son prix de façon à ce qu'il ne soit pas contesté par le propriétaire.
A la différence de la loi de 1941, qui fixait le prix auquel l'Etat devait acheter un bien proposé à l'exportation, la loi de 1992 ne comporte aucune disposition permettant de déterminer la valeur d'acquisition des oeuvres auxquelles l'Etat a refusé le certificat.
La proposition de loi complète la loi de 1992 afin de prévoir une procédure d'expertise : la valeur du bien sera déterminée par deux experts désignés respectivement par l'autorité administrative et le propriétaire, ou, à défaut d'accord, par un troisième expert désigné conjointement.
Cette procédure garantit que l'offre d'achat sera aussi proche que possible des prix du marché et favorise un dialogue entre l'Etat et le propriétaire.
Une fois sa valeur déterminée, l'Etat peut soit renoncer à acquérir le bien, soit se porter acquéreur au prix fixé par les experts. Dans cette hypothèse, si le propriétaire refuse de céder son bien, le refus de délivrance du certificat peut être renouvelé, ce qui permet de maintenir le bien sur le territoire national.
Compte tenu des garanties apportées aux propriétaires par l'expertise en ce qui concerne le prix du bien comme de la possibilité qui leur est ouverte de demander une nouvelle expertise, le renouvellement du refus de certificat n'ouvre droit à aucune indemnisation, ce qui met l'Etat à l'abri d'interprétations contraires qui priveraient d'intérêt la réforme proposée.
La procédure d'acquisition est entourée de garanties afin de préserver les intérêts de l'Etat. Ainsi, le propriétaire qui a reçu une offre de l'Etat doit maintenir le bien sur le territoire national jusqu'au terme de la procédure d'acquisition.
De même est prévue la nullité de toute vente consentie par le propriétaire après qu'il a accepté une offre d'achat de l'Etat.
Enfin, les dispositions de la loi s'appliqueront aux certificats ou aux refus de certificat en cours. Il s'agit, je crois, d'une solution prudente : dans l'hypothèse d'une application aux seules demandes de certificats introduites après la promulgation de la loi, on pourrait craindre d'ici là une affluence de demandes de la part de propriétaires soucieux d'échapper aux conséquences d'un refus de vendre à l'Etat.
Cette procédure d'acquisition a le mérite de ne pas entraver le libre fonctionnement du marché de l'art. Cependant, son efficacité dépendra des conditions dans lesquelles la loi sera appliquée. Je pense, en particulier, aux délais : nous nous sommes efforcés de fixer des délais aussi brefs que possible pour chaque étape de la procédure ; cependant, il s'agit là de délais maxima.
L'administration devra s'efforcer d'agir avec célérité afin d'éviter de nuire aux intérêts du propriétaire et de compromettre les chances de l'Etat, notamment en se préoccupant le plus rapidement possible des moyens financiers nécessaires pour réaliser l'acquisition.
Au-delà de cette procédure d'acquisition, la proposition de loi tend également à limiter les incidences du contrôle des exportations des biens culturels sur le fonctionnement du marché de l'art. Ces deux objectifs sont, je crois, complémentaires dans un souci bien compris de protection de notre patrimoine.
Il est souvent souligné que notre législation dissuade les collectionneurs d'acheter et de domicilier leurs biens en France comme les propriétaires de venir vendre sur le marché français.
La faiblesse de nos importations d'oeuvres d'art est préoccupante. Ainsi que le démontre l'exemple britannique, un marché de l'art dynamique est un marché qui importe autant qu'il exporte.
Le gisement d'oeuvres dont s'est longtemps enorgueillie la France et qui lui permet encore de prétendre à une place dans le marché international de l'art n'est pas inépuisable, surtout si l'on considère la création contemporaine, désormais mieux représentée aux Etats-Unis.
Par ailleurs, cette situation n'est guère favorable au maintien sur le territoire national de notre patrimoine : nous savons qu'une oeuvre vendue en France a plus de chances d'y demeurer.
Compte tenu de ce constat, il est apparu nécessaire à la commission de modifier le régime prévu par la loi de 1992 afin de rassurer les propriétaires d'oeuvres d'art. Plusieurs des dispositions de la proposition de loi y concourent.
Ainsi, la durée de validité du certificat, jusqu'ici limitée à cinq ans, est allongée : pour les biens dont l'ancienneté excède cent ans, cette durée serait illimitée et, pour les autres biens, elle serait de vingt ans renouvelables.
Le certificat ne pourra être refusé aux biens importés licitement depuis moins de cinquante ans. Il s'agit là d'une modification significative de la loi de 1992, mais aussi de la loi de 1913 sur les monuments historiques, puisque permettre l'exportation de ces biens interdit, de fait, leur classement.
Cette modification répond à une revendication des professionnels, revendication légitime parce qu'il est difficile de considérer que les oeuvres entrées depuis moins de cinquante ans font véritablement partie du « patrimoine national ». D'ailleurs, dans la pratique, elles ne font pas l'objet de procédures de classement.
Par ailleurs, les biens importés à titre temporaire - c'est-à-dire principalement ceux qui sont importés en vue d'être vendus - ne seront plus soumis à la procédure de délivrance du certificat, afin d'éviter aux vendeurs étrangers désireux de recourir aux marchands français des démarches administratives.
Dans le même souci de simplification administrative, est prévu un régime de délivrance tacite du certificat afin de permettre un traitement plus rapide des dossiers.
En outre, il est apparu nécessaire de restaurer un climat de confiance entre les propriétaires et les responsables de collections publiques qui, faute de disposer d'instruments juridiques adaptés, ont pu parfois commettre des maladresses qui se sont soldées par des contentieux.
Certes, les prérogatives dont dispose l'Etat pour enrichir les collections publiques, qu'il s'agisse du contrôle des exportations ou du droit de préemption, n'ont pas, si l'on considère les chiffres, les incidences sur le fonctionnement du marché de l'art qu'on leur impute volontiers.
A cet égard, je rappellerai que, depuis l'entrée en vigueur de la loi de 1992, sur les 4 500 oeuvres environ pour lesquelles est sollicité chaque année un certificat, 68 ont été déclarées « trésors nationaux » et que, sur ce total, 30 seulement ont été acquises par l'Etat ou des collectivités locales.
Cependant, si le système britannique fonctionne si bien, il faut y voir l'effet des dispositifs fiscaux, de ressources financières plus importantes que les nôtres - notamment grâce aux recettes de la loterie - mais aussi d'un ensemble de facteurs.
Parmi ces facteurs figurent le respect traditionnel dont font preuve les responsables de collections publiques à l'égard des propriétaires et les relations étroites qui existent entre les collectionneurs et les musées, facilitées par l'indépendance de leurs organes dirigeants.
Compte tenu de ce constat, la commission des affaires culturelles a souhaité accroître la transparence de la procédure de délivrance du certificat afin d'atténuer l'image négative trop souvent évoquée - à tort, à mon avis - d'une administration jalouse de ses prérogatives et d'une avidité injustifiée.
Ainsi, la composition de la commission compétente pour donner un avis au ministre en cas de refus de certificat est modifiée pour instaurer une parité entre les représentants de l'Etat et les personnalités qualifiées.
La place plus importante qui devra être accordée aux représentants du marché ou à des mécènes suscitera un dialogue sans doute fructueux sur les décisions de refus de certificat, mais permettra également d'évoquer les modalités d'une éventuelle acquisition, qu'il s'agisse de l'estimation de l'oeuvre ou des financements nécessaires.
Telles sont les orientations que traduit le dispositif en sept articles que vous propose la commission des affaires culturelles. Nous espérons que le rapprochement qu'il doit favoriser entre les responsables de collections publiques et les propriétaires permettra d'éviter le cas encore trop fréquent où une offre d'achat faite par l'Etat s'achève par un contentieux ou par le départ de l'oeuvre vers l'étranger.
Saisie pour avis, la commission des finances a déposé quatre amendements destinés à compléter par un volet fiscal le dispositif que je viens de vous présenter.
Ces propositions partent du constat de l'insuffisance des ressources dont dispose l'Etat pour acquérir les oeuvres frappées d'une interdiction d'exportation, constat que nul ne peut contester.
L'objet de ces amendements est d'encourager l'acquisition de trésors nationaux par des propriétaires privés qui s'engageraient à en demander le classement, lequel ouvrirait droit à des avantages fiscaux.
Assurément, cette voie ne peut pas être négligée et, à ce titre, mérite examen.
Les dispositifs proposés reposent sur des mécanismes originaux, mais ne vont pas sans soulever des objections techniques. Ils doivent être minutieusement étudiés afin d'en mesurer l'impact et d'en apprécier l'efficacité. En effet, il convient de réfléchir à l'équilibre à établir entre les impératifs de la protection du patrimoine et l'ampleur des avantages fiscaux consentis à ce titre.
Si le Gouvernement nous laissait entrevoir une chance de surmonter les obstacles qui, jusqu'ici, se sont opposés à l'adoption de dispositifs fiscaux plus favorables à la protection de notre patrimoine, nous ne pourrions que soutenir les efforts qu'il ferait en ce sens.
La réflexion doit, enfin, s'engager sur les moyens budgétaires qu'il convient de dégager pour conduire, en ce domaine, une politique conforme à nos ambitions. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Yann Gaillard, rapporteur pour avis de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la proposition de loi déposée par M. Serge Lagauche et Mme Dinah Derycke, relative à la protection des trésors nationaux, ne pouvait laisser la commission des finances indifférente : d'abord, parce qu'elle avait été saisie au fond de la loi du 31 décembre 1992, qui est ainsi modifiée ; ensuite, parce que l'étude à laquelle elle s'est livrée récemment sur l'évolution du marché de l'art en France a souligné toutes les difficultés auxquelles notre pays doit faire face pour protéger son patrimoine dans un marché ouvert. Cette étude a montré qu'il était urgent de réformer le système de contrôle mis en place le 31 décembre 1992, qui a montré ses limites du point de vue de la protection du patrimoine national.
La commission des affaires culturelles, saisie au fond, a fait des propositions extrêmement intéressantes. Elles représentent une avancée qui mérite d'être appuyée, mais dont l'efficacité reste tout de même limitée du fait de l'insuffisance des moyens financiers de l'Etat.
D'où l'idée de la commission des finances, poursuivant se réflexion sur le marché de l'art, qu'une action en amont soit entreprise afin d'inciter les propriétaires à conserver les oeuvres sur le territoire national, ce qui peut avoir des effets bénéfiques sans entraîner de charges excessives pour le budget de l'Etat.
En effet, ce qui importe avant tout, c'est que les oeuvres essentielles ne quittent pas le territoire, car on sait que, si elles restent en France, même dans des collections privées, elles ont une bonne chance, un jour, de se retrouver dans les collections publiques, et donc d'enrichir le patrimoine national.
Avant la loi de 1992, était en vigueur un système d'inspiration très régalienne fondé sur l'interdiction à l'exportation et la retenue en douane. Ce système a laissé la place à un régime libéral, qui a de facto privé l'Etat de ses moyens d'action et permis un exode de notre patrimoine. On en voit les effets sur notre commerce extérieur puisque l'excédent des exportations sur les importations d'oeuvres d'art atteint quelque 2 milliards de francs par an, ce qui signifie que le patrimoine français est en train de se vider d'une partie de ses richesses. Cela se fait, certes, au bénéfice de la balance des comptes, mais ceci ne console pas de cela.
Au départ, l'oeuvre qualifiée de trésor national pouvait, à l'issue de la période de trois ans, après le refus de délivrance du certificat, être soit acquise, soit classée. Mais, vous le savez, mes chers collègues, la jurisprudence issue de l'affaire du Jardin à Auvers , de Van Gogh, a placé l'Etat devant un dilemme : soit acheter le trésor national, soit le laisser sortir. En effet, le classement est maintenant accompagné d'une obligation d'indemnisation presque aussi coûteuse que l'achat, sans que l'oeuvre reste dans la propriété publique.
Cette jurisprudence Walter a complètement modifié l'équilibre du marché de l'art et mis à mal la protection du patrimoine national.
Comment faire lorsque les crédits du fonds du patrimoine sont de 105 millions de francs par an, auxquels on peut ajouter en moyenne de 10 à 20 millions de francs de mécénat privé, et que l'on est confronté au risque de sortie d'une oeuvre qui, pour prendre les deux derniers exemples, le Jardinier Vallier, de Cézanne, et la Duchesse de Montejasi et ses filles Elena et Camilla, de Degas, vaut autour de 200 ou 220 millions de francs ? C'est impossible ! C'est tellement vrai que, les trois ans étant passés, les certificats de sortie de ces deux oeuvres essentielles viennent d'être délivrés. Cela démontre bien l'insuffisance du système actuel, même après les améliorations apportées par la proposition de loi.
La commission des affaires culturelles s'est inspirée très justement - M. le rapporteur a réalisé là un travail vraiment intéressant - du système anglais, en permettant à l'Etat, en l'absence d'accord amiable avec le propriétaire, d'acquérir l'oeuvre à un prix déterminé après une expertise contradictoire, sauf si le propriétaire n'accepte pas l'offre, auquel cas le refus de certificat est indéfiniment renouvelé.
Des garanties supplémentaires sont données pour l'Etat, les propriétaires et les tiers, notamment par la publicité faite de toutes les étapes de la procédure.
Je passe sur les apports que la commission des affaires culturelles, modifiant légèrement la proposition de M. Lagauche, a effectués, puisque ce dernier vient de nous les préciser.
Je note que l'assouplissement consistant à ne pas lier refus de certificat et offre d'achat présente tout de même un double inconvénient : d'une part, il peut aboutir, si l'offre est faite à la fin de la période de refus de certificat, à un allongement du délai entre la décision de ne pas laisser sortir une oeuvre et son paiement effectif en cas d'acquisition - cela peut aller jusqu'à quatre ans ; d'autre part, il reste un risque de voir le refus de certificat ne servir qu'à retarder la sortie des oeuvres, alors même que l'on sait très rapidement que l'Etat n'est pas en mesure de faire une offre. Rien ne prouve qu'une telle pratique ne donne pas lieu à contentieux à raison du préjudice causé aux propriétaires privés.
La commission des finances a donc proposé un système limité qui se veut plus incitatif que coercitif. A quoi bon, en effet, obliger les propriétaires à vendre des oeuvres si l'on n'a pas les crédits pour les acheter ? D'où les quatre mesures principales que nous proposons pour accompagner et compléter le dispositif de la commission des affaires culturelles.
La première, c'est une exonération partielle des droits de mutation à titre gratuit pour les oeuvres et mobiliers classés avec l'accord des propriétaires. Il est proposé d'assortir, à compter du 1er janvier 2000, le classement de cette exonération à raison de 50 % de leur valeur. Pourrait ainsi se créer un marché pour des actifs partiellement défiscalisés avec le consentement de leur propriétaire, ce qui viendrait atténuer pour les propriétaires d'oeuvres classées la pénalisation résultant de l'interdiction d'exportation.
J'y insiste, il ne s'agit ni de créer un « Pinay » des oeuvres d'art ni d'ouvrir une brèche considérable dans le système fiscal français, car le classement n'est pas automatique. Il ne suffit pas qu'un propriétaire demande le classement pour l'obtenir ; celui-ci dépend de la décision de la commission des monuments historiques, qui est sous la haute main de l'Etat et de Mme la ministre de la culture.
La deuxième mesure, ce serait de prévoir, à côté de l'offre de l'Etat, une possibilité d'offre émanant du secteur privé. Nous prolongeons là la réflexion de la commission des affaires culturelles, qui s'est inspirée de la procédure anglaise, en l'imitant sur ce point précis. A l'instar de ce qui se passe en Grande-Bretagne, l'autorité administrative aurait en effet la possibilité, si elle estime ne pas avoir les moyens budgétaires de faire une offre, de présenter une offre provenant de personnes privées, toujours aux conditions fixées par les experts, dès lors que celles-ci s'engagent à demander le classement et, le cas échéant, à respecter certaines obligations concernant l'accès du public à l'oeuvre.
Toutefois, le privilège ainsi conféré à des personnes autres que l'Etat ne saurait conduire à assimiler offres publiques et privées, au regard du report indéfini de la délivrance du certificat. Le propriétaire doit être incité, mais pas obligé de vendre à une personne privée. Telle est la raison pour laquelle le refus de prendre en considération une offre émanant d'une personne autre que l'Etat n'a pour conséquence que d'entraîner la prolongation de la validité du refus de délivrance du certificat de la durée de validité de l'offre, soit entre un et deux ans, et non pas indéfiniment.
Un autre de nos amendements - c'est la troisième mesure - articule le système des lois de 1913 et de 1992, en prévoyant que les objets auxquels on a refusé le certificat puissent, à la demande et avec le consentement de leur propriétaire, être classés de droit, dès lors que le classement s'accompagne d'un avantage fiscal. Il s'agit d'assurer une coordination dans les interventions de l'Etat, car on ne comprendrait pas qu'un bien reconnu trésor national ne puisse obtenir le classement au titre de la législation sur les monuments historiques.
Enfin, un dernier amendement - c'est la quatrième mesure - relie le système à celui de la dation puisque, au cas où il n'y aurait pas de mutation, dès lors qu'il y a eu classement accepté sur la base du prix défini par les experts, l'agrément par la commission de la dation serait de droit au prix fixé par les experts dans le cadre de cette procédure. C'est également une question de cohérence.
Voilà les quelques mesures d'accompagnement et d'élargissement de la réflexion entamée très justement par la commission des affaires culturelles que nous proposons pour doubler les possibilités de l'Etat par celles du secteur privé, pour inciter les propriétaires à accepter le classement, voire à le demander, dans le souci de protéger les trésors nationaux à long terme, en dehors même des possibilités d'acquisition des collections publiques. Car, encore une fois, ce qui compte, c'est que l'oeuvre, en tout cas quand il s'agit d'une oeuvre essentielle, reste sur le territoire national. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Renar.
M. Ivan Renar. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la proposition de loi qui nous est soumise sur l'initiative de nos collègues Serge Lagauche et, paritairement, Dinah Derycke vient ajouter de manière constructive au débat concernant le marché de l'art, inauguré par la réforme des ventes volontaires aux enchères publiques.
Nul ne niera la nécessité qu'il y a pour notre pays de dynamiser le marché de l'art, mis à mal depuis plusieurs décennies.
Dans le même temps, et nous y sommes très attachés, l'on doit veiller à la protection des trésors nationaux, en permettant à la puissance publique de les acquérir avant qu'ils ne passent nos frontières.
L'équilibre est difficile à trouver entre dynamisme du marché et protection du patrimoine national. Nombre de facteurs participent de cette difficulté, dont le prix du marché, parfois exorbitant, n'est pas des moindres, au regard des efforts consentis en matière de politique d'achat d'oeuvres.
En l'état, la proposition de loi présentée par nos collègues n'a pas la prétention de régler l'ensemble des problèmes posés, mais elle apporte des réponses que nous pensons adaptées à la protection de notre patrimoine.
Du fait de la législation actuelle, si l'autorité administrative refuse la délivrance d'un certificat attestant que le bien proposé à la vente n'a pas de valeur de trésor national, le propriétaire du bien est garanti de pouvoir sortir l'oeuvre à l'issue d'un délai de trois ans.
La proposition de loi qui nous est soumise met en place une expertise contradictoire, la fixation contradictoire d'un prix de marché et, dès lors que l'Etat fait une offre d'achat et que le propriétaire la récuse, un maintien « indéfini » du refus de délivrer le certificat de non-appartenance au trésor national.
Cette proposition, on le voit, laisse en suspens cette question du maintien indéfini de la situation en l'état. Pour autant, n'est-ce pas une forme de protection de l'oeuvre ?
Il en va autrement des amendements qui nous sont proposés par la commission des finances de notre Haute Assemblée.
En effet, la logique de ces amendements est tout autre et reviendrait, si nous les adoptions, à mettre en concurrence la puissance publique et les acquéreurs privés, avec un assortiment d'avantages fiscaux.
Ce dispositif, qui nous éloigne de l'esprit de la loi de 1992, permettrait, certes, un maintien sur le territoire des oeuvres, mais ce uniquement dans la sphère des collections privées.
Nos musées actuels, la notion même de patrimoine national doivent l'essentiel de ce qu'ils sont aujourd'hui aux pouvoirs sortant de l'ordinaire de l'Etat en matière de protection, de sauvegarde du patrimoine.
Sans souhaiter faire obstacle au marché de l'art, utile, pour l'essentiel, aux jeunes créateurs, peut-on dire que la spéculation du marché de l'art sur les oeuvres « consacrées » sert l'art d'une manière générale ? Matisse, Picasso, de Staël, Van Gogh ont-ils besoin, aujourd'hui, du marché de l'art ?
Qui mieux que la puissance publique peut assurer une parfaite conservation des oeuvres dans l'intérêt général ?
Ces questions, on le voit, débordent très largement le contenu initial de la proposition de loi qui nous est soumise. Les amendements proposés par la commission des finances, quant à eux, dénaturent le contenu d'un texte à portée d'intérêt général.
Telle est la raison pour laquelle nous sommes pour le maintien du texte en l'état, ce qui nous permettrait de le voter des deux mains. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. Estier.
M. Claude Estier. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le groupe socialiste se félicite que nous puissions discuter aujourd'hui d'un dispositif moderne proposant un système équilibré, permettant de protéger les trésors nationaux et d'enrichir les collections nationales, en respectant les prérogatives de l'Etat et les intérêts des propriétaires.
J'ai bien entendu tout ce qui vient d'être dit et je tiens d'abord à saluer l'excellent travail de notre rapporteur et auteur de la proposition de loi, M. Serge Lagauche. Le nouveau dispositif issu de la proposition de loi permettra d'octroyer un caractère pérenne, ou quasi pérenne, selon les cas, au certificat attestant qu'un bien ne présente pas un caractère de trésor national, ce qui apportera davantage de garanties au propriétaire d'un bien ; les dispositions ayant trait à la fixation du prix d'un objet, pour lequel le certificat a été refusé, par des experts représentant les deux parties, l'Etat et le propriétaire, est également un gage d'équilibre entre les intérêts des propriétaires et ceux de l'Etat. Ces dispositions devraient permettre de redynamiser le marché de l'art et également de donner à l'Etat français la possibilité de sauvegarder son patrimoine.
Cette nouvelle loi s'inscrira d'ailleurs, si elle est adoptée, dans la liste de celles qui viendront compléter les réformes du marché de l'art déjà engagées avec le projet de loi relatif aux ventes aux enchères publiques actuellement en navette. Sont particulièrement attendues les réformes visant à l'harmonisation du droit de suite et du taux de TVA à l'importation des oeuvres d'art. Pour pouvoir assister à un réel nouveau départ du marché de l'art français, il faudra aller jusqu'au bout de ces réformes.
Dois-je rappeler qu'à la veille de la Seconde Guerre mondiale Paris occupait encore la première place sur le marché de l'art international ? Elle arrive aujourd'hui en troisième position, loin derrière New York et Londres, et l'écart ne cesse de se creuser. Les causes de ce recul sont multiples mais sont principalement liées à la très lourde fiscalité qui pèse sur le marché de l'art français.
Les deux principaux obstacles au marché français sont indéniablement la TVA à l'importation, très lourde, et le droit de suite.
La TVA à l'importation connaît, en France, un taux supérieur à celui en vigueur chez la plupart de nos voisins : elle est de 5,5 % et de 20,6 % en fonction des objets et selon des critères assez arbitraires puisque sont taxés à 20,6 % les bijoux mais aussi certains objets d'art primitif comme les masques, alors que les statues d'art primitif sont, pour leur part, taxées à 5,5 %. En Grande-Bretagne, le taux de TVA à l'importation est de 2,5 % et il est nul en Suisse. Le problème de la TVA à l'importation est donc double puisqu'il existe une disparité de taxation entre la France et certains Etats et qu'en France les objets sont taxés différemment selon leur nature. C'est ainsi que l'on dissuade d'éventuels vendeurs d'enrichir le patrimoine national français d'une oeuvre achetée à l'étranger alors qu'à l'inverse il n'existe aucune TVA à l'exportation.
Le droit de suite, instauré par la loi du 20 mai 1920 pour les ventes d'oeuvres publiques ou en galeries, permet à un artiste ou à ses héritiers de prélever, pendant soixante-dix ans, 3 % - ou 4 % pour les oeuvres d'une valeur inférieure à 330 000 francs - à la charge du vendeur, sur le montant de la vente afin de profiter de la hausse de la cote de l'artiste. Ce droit de la propriété se justifie aisément, mais il est appliqué à des taux divers dans onze des quinze Etats de la Communauté européenne et il n'existe ni aux Etats-Unis, ni en Grande-Bretagne, ce qui pénalise lourdement les ventes d'art françaises. La directive en cours d'élaboration, visant à harmoniser les taux du droit de suite dans les différents Etats européens, devrait déjà permettre de repartir sur des bases plus saines pour le marché français. Mais son adoption tarde, compte tenu des intérêts divergents qui sont en jeu.
Aussi, je profite de votre présence dans cet hémicycle, madame la ministre, et de ce débat sur le marché de l'art, pour vous demander d'user de votre influence afin que ces deux problèmes importants qui grèvent lourdement le marché de l'art français trouvent rapidement une solution.
Pour en revenir à la proposition de loi, j'ajouterai seulement quelques mots sur les amendements qui ont été présentés par le rapporteur pour avis de la commission des finances, Yann Gaillard. Certes, ils tentent de dynamiser le marché de l'art par une série de mesures fiscales, mais je crains néanmoins que de telles mesures ne trouvent pas leur place dans le dispositif de la proposition de loi visant à protéger les trésors nationaux. De surcroît, elles n'opèrent que dans un sens : celui des détenteurs de biens. Nous ne saurions donc cautionner ces amendements et, je le dis dès maintenant, s'ils étaient adoptés, le groupe socialiste, qui était pourtant totalement favorable à la proposition de loi rapportée par Serge Lagauche, serait amené à s'abstenir.
Nous nous réjouissons cependant de savoir que le texte dont nous discutons à l'instant ne restera pas lettre morte, puisque son examen à l'Assemblée nationale est déjà fixé au 23 février prochain. (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.) M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, voilà quelque mois, à cette même tribune, je soulignais, au nom du Gouvernement, l'importance d'une relance de notre marché de l'art à l'occasion de l'examen du projet de loi sur les ventes volontaires de meubles aux enchères publiques. Dans cette perspective, l'aménagement de la loi du 31 décembre 1992, relative aux produits soumis à certaines restrictions de circulation et à la complémentarité entre les services de police, de gendarmerie et de douane s'est révélé indispensable.
L'Etat et les professionnels du marché s'accordent sur la nécessité d'offrir plus de souplesse et de liberté aux collectionneurs et aux propriétaires d'objets d'art, tout en permettant à l'Etat d'acquérir des oeuvres majeures reconnues comme trésors nationaux.
La proposition de loi des sénateurs Dinah Derycke et Serge Lagauche constitue une réponse appropriée aux difficultés rencontrées dans l'application de la loi du 31 décembre 1992.
Je ne crois pas nécessaire d'aller au-delà des excellentes explications données par votre rapporteur sur les dispositions envisagées, mais je tiens à rappeler les limites de notre dispositif législatif.
Comme le soulignait le rapporteur, la loi du 31 décembre 1992 était destinée à rendre le droit interne compatible avec la législation communautaire. Assurer la libre circulation des marchandises tout en permettant à l'Etat de maintenir, sur le territoire national, les oeuvres les plus importantes du patrimoine, tels étaient les objectifs du législateur.
Le premier, à savoir la libéralisation du contrôle de la circulation des biens culturels, a été incontestablement atteint. Le ministère de la culture et de la communication délivre désormais quelque cinq cents certificats par mois et ne refuse le certificat que pour une dizaine d'oeuvres ou objets d'art en moyenne par an.
Le second objectif n'a été que partiellement réalisé. C'est ainsi que, sur les quelque quatre-vingts « trésors nationaux » interdits de sortie, l'Etat et les collectivités territoriales ont pu acquérir trente oeuvres qui ont rejoint les bibliothèques et les musées de notre pays.
Je rappellerai, entre autres chefs-d'oeuvre, l' Autoportrait de Jean-Baptiste Greuze acquis par le musée de Tournus en 1994, le Saint Jean-Baptiste dans le désert de Georges de La Tour acquis par le département de la Moselle en 1994, le psautier de Metz acquis par la bibliothèque de Metz en 1996, un superbe nu de Rouault acquis pour le musée de Villeneuve-d'Ascq en 1997, le coffret à bijoux de Marie-Antoinette acquis pour le château de Versailles, le Portrait de Berthe Morisot de Manet acquis pour le musée d'Orsay et l'émouvant ensemble d'oeuvres, de photographies et de souvenirs de Picasso, acquis pour le musée Picasso à la vente de la succession Dora Maar.
Ces quelques exemples montrent, et je m'en réjouis, que la procédure a profité non seulement aux musées nationaux, mais aussi, largement, aux musées des collectivités territoriales dont le renforcement des collections est l'une de mes priorités.
M. Ivan Renar. Très juste !
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. A cet égard, je rappelle que j'ai eu l'occasion d'annoncer, lors de la première édition du Printemps des musées, en mars dernier, des mesures pour accroître parallèlement les dépôts d'oeuvres des musées nationaux auprès des musées des collectivités.
Malgré ces aspects incontestablement positifs, force est de constater que la loi de 1992 comporte des faiblesses de procédure, si l'on examine sa mise en oeuvre depuis son origine. Ces lacunes ont empêché l'Etat d'assumer de manière totalement satisfaisante ses missions de protection du patrimoine national.
De ce point de vue, la principale carence de la législation actuelle réside dans l'absence de procédure de négociation entre l'Etat et les propriétaires de trésors nationaux.
En effet, la protection de cette catégorie de biens culturels, souhaitée par le législateur français et communautaire, devient inopérante, au terme de la durée de trois ans du refus de certificat de circulation.
Les effets de cet inconvénient majeur sont aggravés par la difficulté à établir la valeur vénale du bien et par les conditons de fixation d'un prix par référence au marché international accepté par les deux parties.
Il est certain que cette lacune de la loi a entraîné des pertes pour notre patrimoine. Les trente trésors nationaux que nous avons pu acquérir sont à mettre en regard des quatre-vingts refus de certificat prononcés.
C'est pourquoi la proposition de loi des sénateurs Dinah Dericke et Serge Lagauche est porteuse de considérables progrès par l'instauration d'une procédure d'acquisition, précédée par une estimation contradictoire de l'oeuvre, présentant toutes les garanties possibles d'objectivité, par référence aux seuls prix du marché international de l'art.
Cette solution permet d'apporter une réponse respectueuse des droits des propriétaires aux questions jusqu'à maintenant restées pendantes depuis l'entrée en vigueur de la loi de 1992.
Comme vous l'avez constaté, la proposition de loi comporte d'autres mesures destinées à simplifier et à alléger les formalités administratives nécessaires pour exporter des biens culturels.
C'est ainsi que le certificat devient permanent pour les biens culturels de plus de cent ans d'âge et sa durée est prolongée à vingt ans pour les biens culturels d'une ancienneté inférieure.
Par ailleurs, l'importation et l'exportation à titre temporaire sur le territoire national de biens culturels seront libérées. Ces mesures, je le crois vraiment, devraient favoriser le marché de l'art.
Je constate avec satisfaction que la nouvelle procédure de négociation prévue par la proposition de loi bénéficiera non seulement à l'Etat, mais également aux collectivités territoriales.
Enfin, je souligne que la composition de la commission consultative, chargée d'émettre un avis sur les décisions de délivrance des certificats de circulation, sera désormais plus équilibrée puisqu'elle sera constituée à parité de fonctionnaires et de personnes qualifiées.
Madame la sénatrice, monsieur le sénateur, monsieur le rapporteur, la proposition de loi devrait permettre à l'Etat de faire face à ses responsabilités en favorisant l'acquisition des trésors nationaux par la puissance publique sans entraver le libre jeu du marché de l'art et, par ailleurs, simplifier les procédures pour les particuliers qui souhaitent faire sortir leurs biens culturels du territoire.
Je voulais tout particulièrement vous remercier de cette heureuse initiative qui, avec sagesse et mesure, tire la leçon de l'expérience acquise ces dernières années et permettra à notre pays de se doter d'une législation en matière de trésors nationaux à la hauteur de notre patrimoine et de sa légitime protection.
Je ne voudrais pas conclure ces propos sans saluer le travail accompli par votre commission, qui a apporté sur plusieurs points des modifications qui contribuent grandement à renforcer l'efficacité du dispositif et, d'une manière générale, à préserver l'équilibre entre les droits et intérêts de l'Etat et ceux des propriétaires de trésors nationaux.
C'est ainsi que vous avez proposé la publication des avis de la commission, la réduction du délai du refus de certificat ainsi qu'une clarification des conditions de renouvellement du refus de certificat.
Bien évidemment, le Gouvernement est favorable à ces mesures qui vont toutes dans le sens des objectifs de votre proposition de loi et c'est pourquoi je donnerai mon accord global sur ce texte, sous réserve d'un amendement gouvernemental qui concerne un point technique et que je présenterai lors de l'examen des articles de la proposition de loi.
J'ai noté avec intérêt les propositions d'amendement de M. Gaillard, rapporteur pour avis, et j'y répondrai plus longuement lors de l'examen des articles concernés.
Monsieur le rapporteur pour avis, si je partage votre souhait de maintenir le patrimoine dans notre pays, les moyens d'y parvenir méritent, me semble-t-il, une réflexion approfondie sur les plans économique, juridique et fiscal. Nous serons amenés à reprendre cette discusion sur ces sujets lors de l'examen très prochain du projet de loi portant modification du régime des objets mobiliers figurant dans la loi de 1913. C'est la raison pour laquelle je m'exprimerai dans le sens d'un approfondissement de le réflexion sur les problèmes soulevés par M. Gaillard.
J'ai également noté le souci de M. Renar de favoriser les artistes, en particulier les jeunes artistes, et de ne pas résumer le débat sur la création aux seuls échanges commerciaux et à leur montant.
Je tiens aussi à remercier M. Estier d'avoir souligné que cette proposition de loi est un gage d'équilibre entre les propriétaires et l'Etat. Je puis le rassurer, nous la prendrons en compte dans le travail que nous menons conjointement avec mon collègue M. Sautter sur la fiscalité de l'art, travail ardu que nous poursuivrons dans la négociation et la discussion avec nos partenaires communautaires.
Toutes ces réflexions et propositions, monsieur le président, sont de nature à nous aider à accroître les collections publiques sans toutefois porter atteinte à l'initiative des partenaires privés et des créateurs.
Je me réjouis que cette proposition de loi soit examinée par le Sénat et puisse, comme l'a dit le président Estier, être étudiée très rapidement par l'Assemblée nationale.
Mme Cachin, la directrice des musées de France, qui est présente parmi nous, est, elle aussi, heureuse que nous abordions la discussion de ce texte avec la perspective d'un examen du projet de loi portant réforme des musées, texte qui ne manquera pas d'appeler votre attention, mesdames, messieurs les sénateurs. (Applaudissements.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.

Article 1er



M. le président.
« Art. 1er. - L'article 5 de la loi n° 92-1477 du 31 décembre 1992 relative aux produits soumis à certaines restrictions de circulation et à la complémentarité entre les services de police, de gendarmerie et de douane est ainsi modifié :
« 1° Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« Ce certificat atteste à titre permanent que le bien n'a pas le caractère de trésor national. Toutefois, pour les biens dont l'ancienneté n'excède pas cent ans, le certificat est délivré pour une durée de vingt ans renouvelable. »
« 2° Après le deuxième alinéa, il est inséré un nouvel alinéa ainsi rédigé :
« L'exportation des biens culturels qui ont été importés à titre temporaire dans le territoire douanier n'est pas subordonnée à l'obtention du certificat prévu au premier alinéa. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er.

(L'article 1er est adopté.)

Article 2



M. le président.
« Art. 2. - L'article 7 de la loi n° 92-1477 du 31 décembre 1992 précitée est ainsi modifié :
« 1° Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« Il est accordé aux biens culturels licitement importés dans le territoire douanier depuis moins de cinquante ans. »
« 2° Dans la première phrase du quatrième alinéa, après le mot : "avis" est inséré le mot : "conforme" et après les mots : "par décret en Conseil d'Etat" sont insérés les mots "à parité" ».
Par amendement n° 5, le Gouvernement propose, au 2° de cet article, de supprimer les mots : « après le mot : "avis" est inséré le mot : "conforme" et. »
La parole est à Mme le ministre.
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. J'ai bien sûr compris les raisons qui motivent la transformation du régime actuel de consultation pour avis de la commission prévu à l'article 7 de la loi du 31 décembre 1992 en une procédure d'avis conforme. Je ne puis toutefois partager cette opinion, et je voudrais m'en expliquer devant vous.
Il s'agit, pour le Gouvernement, d'une question de principe. La formalité de l'avis conforme conduit d'une manière générale à lier la compétence de l'Etat et, en l'espèce, à restreindre son pouvoir de reconnaître le statut de trésors nationaux à des biens culturels d'une valeur patrimoniale exceptionnelle.
Il est nécessaire de rappeler que cette évolution n'a pas été demandée par l'ensemble des milieux concernés. Il n'existe, en effet, à ma connaissance, aucun désaccord à ce sujet entre le ministère de la culture et de la communication et les professionnels ou les particuliers intéressés.
A cet égard, je souligne que j'ai toujours suivi les avis de la commission présidée par M. André Chandernagor et qu'il en a d'ailleurs été de même pour mes prédécesseurs.
Vous pourriez me répondre que c'est un fait qui milite en faveur de l'avis conforme. Mais j'estime que le pouvoir de décision doit rester, en définitive, à l'Etat. En effet, je ne vois pas la nécessité de modifier aujourd'hui un régime de décision ministérielle qui a parfaitement fonctionné et qui respecte les principes traditionnels de répartition des compétences entre une commission consultative et un ministre chargé de prendre la décision finale au nom de l'Etat.
J'ajoute enfin que cette réforme ne m'apparaît pas souhaitable au moment même où est envisagée par votre proposition de loi la parité de la composition de la commission, modification que, par ailleurs, j'approuve entièrement et qui me semble de nature à améliorer l'équilibre de sa composition.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Serge Lagauche, rapporteur. Dans la logique de la modification de la composition de la commission chargée de donner un avis au ministre en cas de refus de certificat, la commission avait proposé une procédure : l'avis conforme.
Cette procédure tendait à renforcer l'autorité de cette commission et à conférer plus de portée au débat qui s'y déroulait.
Cependant, cette proposition ne faisait que prendre acte de la pratique, madame la ministre. En effet, les avis de la commission sont, à ma connaissance, toujours suivis par les ministres.
Pour cette raison, la commission a donc décidé de s'en tenir à la rédaction actuelle de la loi de 1992 et de donner un avis favorable sur cet amendement.
Je me permettrai toutefois de dire quelques mots sur les critères de choix qui doivent présider à la nomination des membres de cette commission. La parité n'aura de sens que si siègent en qualité de personnalités qualifiées des professionnels, experts, marchands ou historiens - choisis en dehors de l'administration.
Par ailleurs, pourquoi ne pas prévoir, au sein des représentants de l'administration, la représentation du ministère de l'économie et des finances ? Cela permettrait de débattre, dès le refus des certificats, des modalités budgétaires de l'éventuelle acquisition et de la nécessité ou non de faire appel à des fonds privés pour compléter les ressources dégagées par les collectivités publiques.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 5, accepté par la commission.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 2, ainsi modifié.

(L'article 2 est adopté.)

Articles 3 et 4



M. le président.
« Art. 3. - I. - Le premier alinéa de l'article 8 de la loi n° 92-1477 du 31 décembre 1992 précitée est complété par deux phrases ainsi rédigées :
« Ce décret fixe le délai à l'expiration duquel le certificat est réputé délivré. Il fixe également les conditions de publication des avis de la commission mentionnée au quatrième alinéa de l'article 7. »
« II. - Le dernier alinéa de l'article 7 est supprimé. » - (Adopté.)
Art. 4. - L'article 9 de la loi n° 92-1477 du 31 décembre 1992 précitée est ainsi modifié :
« 1° Dans le premier alinéa, les mots : "trois ans" sont remplacés par les mots : "trente mois".
« 2° Le second alinéa est ainsi rédigé :
« Après ce délai, si le bien n'est pas classé en application des lois du 31 décembre 1913 ou n° 79-18 du 3 janvier 1979 précitées ou revendiqué en application des lois du 27 septembre 1941 portant réglementation des fouilles archéologiques et n° 89-874 du 1er décembre 1989 relative aux biens culturels maritimes, le refus de délivrance du certificat ne peut être renouvelé que dans les conditions prévues au sixième alinéa de l'article 9-1. » - (Adopté.)

Articles additionnels avant l'article 5



M. le président.
Par amendement n° 1, M. Gaillard, au nom de la commission des finances, propose d'insérer, avant l'article 5, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 793 du code général des impôts est complété par un 3 ainsi rédigé :
« 3. Les objets classés à la demande et avec le consentement de leur propriétaire en application de l'article 16 de la loi du 31 décembre 1913 sur les monuments historiques, à concurrence de la moitié de leur valeur, sous réserve des dispositions de l'article 793 bis A et du paragraphe II de l'article 1716 bis. »
« II. - Il est inséré, après l'article 793 bis du même code, un article 793 bis A ainsi rédigé :
« Art. 793 bis A. - L'exonération partielle prévue au 3 de l'article 793 est subordonnée à la condition que le bien soit resté la propriété du défunt ou du donateur pendant 5 ans à la date de la transmission à titre gratuit. »
« III. - Le présent article est applicable aux objets classés à compter du 1er janvier 2000.
« IV. - La perte de recettes résultant pour l'Etat des I et II ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Yann Gaillard, rapporteur pour avis. C'est l'amendement principal de la commission des finances.
Il s'agit d'instaurer des avantages fiscaux pour les biens classés à la demande et avec le consentement de leurs propriétaires. De ce fait, l'Etat a la garantie qu'il n'y aura pas de recours contentieux susceptible de déclencher une jurisprudence « Walter ».
L'avantage fiscal résiderait dans une exemption des droits de mutation et des droits de succession à 50 % de la valeur du bien.
Il est bien clair, j'y insiste pour éviter toute ambiguïté, que la demande de classement n'entraîne pas un classement de droit. Il revient en effet à la commission compétente de donner un avis et au ministre de décider.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Serge Lagauche, rapporteur. Comme je l'ai fait observer dans mon intervention générale, les propositions de la commission des finances me semblent aller dans le bon sens, et je ne peux qu'encourager la réflexion qu'elles suscitent.
L'amendement n° 1 vise à exonérer les objets classés à compter du 1er janvier 2000, à la demande ou avec le consentement de leur propriétaire, de droits de mutation à titre gratuit à raison de 50 % de leur valeur et à la condition que le bien soit resté la propriété du défunt ou du donateur pendant cinq ans, à la date de la transmission à titre gratuit.
L'objectif louable de cet amendement est d'inciter les propriétaires à demander le classement de leurs biens grâce à l'octroi d'un avantage fiscal qui permettrait de garder sur le territoire national des oeuvres sans que l'Etat ait besoin de les acquérir.
Cet amendement me semble cependant soulever des objections. La loi de 1913 qui prévoit le classement, au demeurant comme d'autres textes régissent les dations ou les donations, accorde à l'Etat la compétence d'apprécier de manière discrétionnaire ce qui appartient ou non au patrimoine national.
Le classement entraîne, pour l'Etat, des obligations, telles que celle qui vise à assurer la restauration lorsque les propriétaires sont dans l'impossibilité d'y procéder eux-mêmes. Or c'est à l'Etat de décider s'il souhaite ou non assumer ces obligations.
Au-delà de ce principe, il existe, me semble-t-il, un inconvénient à lier de manière automatique un avantage fiscal au classement. L'administration risque en effet de se trouver confrontée à un afflux de demandes justifiées en réalité par la seule perspective de l'avantage fiscal.
Compte tenu de ces observations, la commission a décidé d'émettre un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Dans le dispositif proposé, les modifications des lois de 1913 et de 1992 apparaissent comme le corollaire de l'avantage fiscal en faveur des biens classés avec le consentement de leurs propriétaires à compter du 1er janvier 2000. C'est pourquoi je souhaite y répondre de manière globale.
Vos propositions, monsieur le rapporteur pour avis, me paraissent faire suite aux conclusions de votre riche et stimulant rapport sur le marché de l'art. Dans le cas présent, il s'agirait d'exonérer les transmissions à titre gratuit des biens concernés à concurrence de 50 % de leur montant ou de leur ouvrir droit automatiquement à la procédure de la dation en paiement.
Je comprends très bien l'intérêt de votre proposition, qui permettrait sans aucun doute a priori d'améliorer la connaissance de notre patrimoine, de rassurer les propriétaires et de les inciter à demander la protection.
Cela étant, je m'interroge sur le dispositif d'ensemble retenu, qui ne me paraît pas suffisamment encadré. Nous devons en effet veiller à respecter un équilibre entre la légitime protection du patrimoine national et l'équité fiscale. A cet égard, les mesures proposées dans ces amendements mériteraient une expertise plus approfondie qui n'a pas pu être effectuée compte tenu des délais. Mais il apparaît d'ores et déjà qu'ils pourraient avoir une portée trop large, surtout si la loi de 1913 était modifiée, comme vous le proposez par ailleurs, monsieur le rapporteur pour avis, pour prévoir un classement de droit des trésors nationaux en cas de refus du certificat d'expor-tation.
Le risque existe que tous les détenteurs de biens culturels ne demandent le classement à seule fin d'obtenir l'avantage fiscal pour leurs héritiers ou leurs donataires, alors que la cession dudit bien n'est pas réellement envisagée, pas plus que son exportation ou sa sortie du territoire.
A cet égard, la prudence dont vous avez fait preuve en prévoyant l'obligation d'une détention de cinq ans par le défunt ou le donateur à la date de la transmission à titre gratuit risque d'être insuffisante pour éviter les biens concernés en valeur refuge.
De même, votre proposition d'instituer une procédure d'agrément de droit pour les biens classés bouleverse l'économie de la dation en paiement. J'ajoute que ce dispositif repose actuellement sur une procédure qui a toujours donné des résultats consensuels entre mon département ministériel et celui du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, après avis de la commission des dations.
Vous avez compris à mes propos, monsieur le rapporteur, monsieur le président, que vos propositions innovantes doivent être expertisées et que des études d'impact doivent être préalablement réalisées sur les plans juridique, économique et fiscal. D'ailleurs, je proposerai prochainement un projet de loi réformant la loi du 31 décembre 1913 sur les monuments historiques. Cette question y trouvera sa place, bien entendu je m'y engage.
Dans ce contexte, je vous demande de retirer vos amendements, qui m'apparaissent intéressants mais prématurés. A défaut, le Gouvernement y sera défavorable.
M. le président. L'amendement est-il maintenu, monsieur le rapporteur pour avis ?
M. Yann Gaillard, rapporteur pour avis. Mme la ministre a fait masse des quatre amendements déposés par la commission des finances, qui sont en fait assez différents.
Deux d'entre eux sont essentiels, à savoir celui dont nous discutons, qui crée l'avantage fiscal, et le troisième, qui est relatif à la possibilité de doubler l'offre publique d'une offre privée : ce sont les deux amendements de principe.
En revanche, je reconnais que le deuxième amendement, qui donne le sentiment, peut-être à cause d'une rédaction trop rapide, que le classement est de droit, crée une ambiguïté, et je suis tout à fait prêt à le retirer. De même, le quatrième amendement, relatif à la dation, présente, il est vrai, l'inconvénient de bouleverser quelque peu l'économie de cette procédure et, probablement, de heurter des susceptibilités au sein de la commission que préside, avec beaucoup de talent, le professeur Changeux. Je suis également disposé à retirer cet amendement.
Cela étant précisé, je souhaite que l'amendement dont nous débattons soit maintenu, au moins à titre provisoire. A cet égard, je rappellerai à Mme la ministre la discussion si intéressante que nous avions eue au moment de l'examen du projet de loi sur les commissaires-priseurs.
Un certain nombre d'amendements fiscaux de ce type avaient été déposés par nos soins à cette occasion, réduits que nous étions à nos propres moyens au sein de la commission des finances du Sénat parce que nous n'avions pu obtenir dans les délais l'avis des services de Bercy. Vous m'aviez alors tenu le même langage, en disant que ce que nous faisions était bien mais pourrait être encore amélioré et en nous demandant de retirer nos amendements pour vous laisser élaborer un meilleur dispositif.
Nous l'avions accepté en ce qui concerne le régime de Drouot, parce que la rédaction de l'amendement du Gouvernement nous paraissait régler le problème, et c'est effectivement le cas.
En revanche, nous avions maintenu à titre conservatoire nos amendements fiscaux sur les droits de mutation en cas de transfert de propriété et de capital dans le cadre de la création des nouvelles sociétés de vente, parce que nous n'avions qu'une promesse. Nous avions eu raison puisque, éclairé par sa propre sagese peut-être, mais aussi à cause de la pression du Sénat, le Gouvernement a effectivement réglé le problème de la fiscalité des professions libérales dans leur ensemble, et pas seulement pour les commissaires-priseurs, dans le cadre de la loi de finances rectificative.
Je souhaite par conséquent - je m'adresse au Sénat et à la majorité sénatoriale - que nous maintenions la pression pour inciter le Gouvernement à donner suite à ces bonnes dispositions, tant pour cet amendement que pour celui qui viendra après l'article 5 et qui est relatif au secteur privé.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte l'amendement.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, avant l'article 5.
Par amendement n° 2, M. Gaillard, au nom de la commission des finances, propose d'insérer, avant l'article 5, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 16 de la loi du 31 décembre 1913 sur les monuments historiques est complété in fine par un alinéa ainsi rédigé :
« Le classement d'un objet mobilier pour lequel est refusé le certificat prévu à l'article 7 de la loi n° 92-1477 du 31 décembre 1992 relative aux produits soumis à certaines restrictions de circulation et à la complémentarité entre les services de police, de gendarmerie et de douane est de droit lorsqu'il est demandé par son propriétaire. »
M. le rapporteur pour avis a indiqué qu'il retirait cet amendement.

Article 5



M. le président.
Art. 5. - Après l'article 9 de la loi n° 92-1477 du 31 décembre 1992 précitée, il est inséré quatre articles nouveaux ainsi rédigés :
« Art. 9-1. - Dans le délai prévu au premier alinéa de l'article 9, l'autorité administrative peut, dans l'intérêt des collections publiques, présenter au propriétaire du bien une offre d'achat. Cette offre tient compte des prix pratiqués pour des oeuvres comparables sur le marché international. »
« Si le propriétaire du bien n'accepte pas l'offre d'achat dans un délai de trois mois, l'autorité administrative peut faire procéder à une expertise pour fixer le prix du bien dans les conditions fixées aux troisième et quatrième alinéas.
« L'autorité administrative et le propriétaire du bien désignent respectivement un expert. En cas de carence, le tribunal compétent de l'ordre judiciaire procède à la désignation. Ces experts rendent un rapport conjoint dans un délai de trois mois à compter de leur désignation.
« En cas de divergences entre ces experts, le prix du bien est fixé par un expert désigné conjointement par l'autorité administrative et le propriétaire du bien ou, à défaut d'accord, par le tribunal compétent de l'ordre judiciaire. Cet expert rend son rapport dans les conditions prévues au quatrième alinéa.
« L'autorité administrative peut adresser au propriétaire du bien une offre d'achat au prix d'expertise dans un délai de deux mois à compter de la notification du rapport d'expertise fixant le prix du bien.
« Si, dans un délai de deux mois à compter de l'offre d'achat, le propriétaire refuse cette offre ou n'a pas fait savoir qu'il l'acceptait, le refus de délivrance du certificat peut être renouvelé. Aucune indemnité n'est due à ce titre.
« Si le propriétaire du bien accepte l'offre d'achat, le paiement du bien doit intervenir dans un délai de six mois à compter de l'accord du propriétaire à peine de résolution de la vente.
« Si un bien a fait l'objet d'une offre d'achat, son propriétaire ne peut présenter de demande de certificat avant l'expiration du délai prévu au sixième alinéa ou, s'il accepte l'offre d'achat, avant l'expiration du délai prévu à l'alinéa précédent.
« En cas de renouvellement du refus de certificat, le propriétaire du bien peut faire procéder à une expertise dans les conditions prévues aux troisième et quatrième alinéas. Si l'autorité administrative refuse d'acquérir le bien au prix d'expertise, le refus de délivrance ne peut être renouvelé.
« L'autorité administrative peut également procéder à l'acquisition des biens visés au second alinéa de l'article 9 pour le compte de toute personne publique.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application du présent article.
« Art. 9-2. - L'autorité administrative est informée de tout transfert de propriété d'un bien culturel présentant le caractère de trésor national qui n'est pas classé en application des lois du 31 décembre 1913 ou n° 79-18 du 3 janvier 1979 précitées ou revendiqué en application des lois du 27 septembre 1941 ou n° 89-874 du 1er décembre 1989 précitées par la personne à qui est transféré le bien dans un délai de trois mois à compter du transfert.
« Art. 9-3. - Tout propriétaire qui aliène un bien culturel visé à l'article 9-2 est tenu de faire connaître à l'acquéreur l'existence du refus de délivrance du certificat mentionné à l'article 7 et, le cas échéant, les offres d'achat adressées dans les conditions prévues à l'article 9-1.
« Art. 9-4. - Est nulle toute aliénation du bien consentie par le propriétaire ou ses ayants cause après avoir accepté une offre d'achat adressée par l'autorité administrative dans les conditions prévues à l'article 9-1.
« L'action en nullité se prescrit par six mois à compter du jour où l'autorité administrative a eu connaissance de la vente. Elle ne peut être exercée que par le ministre chargé de la culture. »
Par amendement n° 3, M. Gaillard, au nom de la commission des finances, propose :
I. - De rédiger comme suit la première phrase du premier alinéa du texte présenté par cet article pour l'article 9-1 de la loi n° 92-1477 du 31 décembre 1992 :
« Dans le délai prévu au premier alinéa de l'article 9, l'autorité administrative peut, dans l'intérêt des collections publiques ou de celui de la protection du patrimoine national en application du dixième alinéa du présent article, présenter une offre d'achat. »
II. - En conséquence, de compléter l'avant-dernier alinéa du même texte par les dispositions suivantes :
« , ou présenter l'offre d'une personne privée qui s'engage à demander, en cas d'acceptation de son offre, le classement du bien au titre du troisième alinéa de l'article 16 de la loi du 31 décembre 1913 précitée et à le rendre accessible au public. Les offres faites en application du présent alinéa peuvent retarder la délivrance du certificat pour leur durée de validité, qui ne peut être inférieure à un an et supérieure à deux ans. »
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Yann Gaillard, rapporteur pour avis. Cet amendement a pour objet de permettre à l'administration ou aux pouvoirs publics de susciter des offres privées, dans le cadre des procédures de retrait de certificats, à l'image du mécanisme en vigueur en Grande-Bretagne, le refus de l'offre ayant des conséquences beaucoup plus limitées, puisque la délivrance du certificat n'est suspendue que pour la durée de validité de l'offre.
Cette disposition reflète bien, selon nous, la volonté d'élargir la notion de patrimoine national au-delà du cercle des collections publiques.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Serge Lagauche, rapporteur. Cet amendement vise à diversifier les moyens dont pourrait disposer l'Etat pour conserver sur le territoire national une oeuvre majeure. A défaut de faire une offre en son nom ou au nom d'une autre personne publique, l'Etat pourrait présenter au propriétaire qui s'est vu refuser un certificat l'offre d'un acquéreur privé qui s'engagerait à demander le classement, classement qui, dans la logique des propositions de la commission des finances, ouvrirait droit à un avantage fiscal.
Cette proposition, inspirée du dispositif britannique tend, comme les précédentes, à permettre de conserver en France des trésors nationaux grâce à leur acquisition par des personnes privées qui s'engageraient à ne pas les exporter.
On peut s'interroger sur l'efficacité de ce dispositif dont l'articulation avec le texte proposé par la commission n'est pas évidente.
En effet, dans quelles conditions s'effectuera la transaction ? Faut-il considérer que, dans cette hypothèse, l'offre sera faite par référence au prix du marché international ?
On voit mal un acquéreur qui prend l'engagement de demander le classement du bien faire une offre d'achat au prix du marché international, sauf à assumer une moins-value que ne compensera que très partiellement l'avantage fiscal calculé au demeurant sur la valeur du bien après classement. Si, au contraire, l'offre d'achat et l'expertise prennent en compte la dépréciation induite par le classement, le dispositif prévoit que si le propriétaire décline l'offre de la personne privée la délivrance du certificat peut être retardée. Cette solution ne correspond pas à l'équilibre du dispositif proposé par la commission.
Par ailleurs, est-il souhaitable que l'Etat joue un rôle d'intermédiaire entre deux personnes privées ? Il est permis d'en douter.
Pour ces raisons, la commission a décidé de donner un avis défavorable à l'adoption de cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Je suis défavorable à cet amendement n° 3, j'ai déjà évoqué les raisons qui m'amènent à m'opposer à l'ensemble du dispositif présenté par M. Gaillard.
Par ailleurs, j'ai noté avec beaucoup d'intérêt que l'avis du Gouvernement rejoint celui de la commission.
M. Yann Gaillard, rapporteur pour avis. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Yann Gaillard, rapporteur pour avis. Après avoir répondu au Gouvernement, je voudrais répondre à mon collègue M. Lagauche.
C'est vrai qu'il n'y a pas de comparaison entre la dépréciation due au fait que l'on renonce aux prix plus élevés du marché international et l'avantage fiscal. Toutefois, ce dispositif est comparable au système britannique dont vous vous êtes vous-même inspiré. De plus, il s'agit d'acquéreurs privés qui ont, en quelque sorte, un esprit de mécénat, de service public. Pourquoi ne pas chercher à mobiliser des fondations ou des détenteurs de grandes fortunes qui veulent voler au secours de la collectivité nationale pour conserver une oeuvre d'art sur le territoire et qui acceptent par conséquent un certain sacrifice financier ?
Mon cher collègue, l'autre partie de votre démonstration montre que vous restez attaché, ce que je comprends d'ailleurs bien - c'est notre commune éducation et notre commun attachement à la chose publique - à un système régalien. Or il faut, à l'avenir, que le secteur privé participe à certaines tâches, à certaines missions d'intérêt général, comme la protection des trésors nationaux. C'est véritablement une question d'état d'esprit.
Vous me rétorquerez peut-être que je suis, en la matière, un libéral à l'état sauvage, mais je crois que nous allons vers un système mixte de ce genre dans la société de demain. Je maintiens par conséquent cet amendement, toujours dans le même esprit, à savoir encourager le Gouvernement à engager une réflexion qui nous permettra de progresser jusqu'au vote définitif de cette proposition de loi.
M. Serge Lagauche, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Serge Lagauche, rapporteur. Autant je vous comprends lorsque vous dites que vous maintenez deux amendements sur quatre parce que vous voulez que le Gouvernement s'engage plus rapidement et pose le problème dans sa globalité, autant je ne peux pas vous suivre lorsque vous prétendez régler le problème à travers les deux amendements.
M. Yann Gaillard, rapporteur pour avis. Je ne le prétends pas !
M. Serge Lagauche, rapporteur. Non, vous ne le prétendez pas ; votre objectif est d'exercer une pression sur le Gouvernement.
La commission - je ne le dis pas à titre personnel, mais, dans mon intervention, a priori, j'en ai tenu compte - fait confiance au Gouvernement pour accélérer la procédure et traiter effectivement le problème au fond.
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Cet amendement n° 3 a un sens très particulier. M. Yann Gaillard y voit une transformation des relations entre l'Etat et les particuliers. Mais permettez-moi de le dire, avec cet amendement, l'Etat aurait un rôle d'intermédiaire dans une transaction privée, ce qui poserait un problème de fond.
Il ne s'agit pas d'opposer une vision régalienne à une vision totalement libérale ! Il s'agit de conserver la cohérence des compétences de l'Etat en la matière, puisque c'est à lui qu'il revient de dire ce qui appartient aux trésors nationaux. Il ne faut pas que l'Etat joue un rôle qui ne paraîtrait pas totalement clair sur les plans tant juridique qu'éthique. Il faut, au contraite, être extrêmement sûr de ce que l'on fait.
Chacun le sait, il s'agit d'un marché, ce qui n'est pas rien. J'appelle donc à une certaine prudence, dont a d'ailleurs fait preuve votre commission. Certes, nous devons toujours améliorer les choses, mais là il ne s'agit pas d'une simple amélioration. Vous proposez une démarche sans précédent.
Connaissant votre enthousiasme, il s'agit d'une disposition qui est pour le moins entreprenante, mais elle n'en est pas moins problématique pour l'Etat, je vous le dis sincèrement. En effet, il ne faut pas mettre l'Etat en porte-à-faux, sur le plan juridique, dans ses relations tant avec la commission qu'avec les propriétaires, ni lui faire jouer un rôle nouveau qui fragiliserait, en quelque sorte, la pertinence et la rigueur de sa position. Nous devons garder un Etat sûr de son éthique.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 3, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte l'amendement.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 5, ainsi modifié.

(L'article 5 est adopté.)

Article additionnel après l'article 5



M. le président.
Par amendement n° 4, M. Gaillard, au nom de la commission des finances, propose d'insérer, après l'article 5, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le II de l'article 1716 bis du code général des impôts est ainsi rédigé :
« II. - L'agrément mentionné au I est de droit pour les biens classés en application du troisième alinéa de l'article 16 de la loi du 31 décembre 1913 sur les monuments historiques n'ayant donné lieu à aucune mutation postérieurement à leur classement, à la condition que la valeur libératoire proposée soit égale au prix d'expertise proposé ou non refusé par l'Etat dans le cadre de la procédure d'acquisition prévue à l'article 9-1 de la loi n° 92-1477 du 31 décembre 1992 relative aux produits soumis à certaines restrictions de circulation et à la complémentarité entre les services de police, de gendarmerie et de douane. »
M. le rapporteur pour avis a indiqué qu'il retirait cet amendement.

Articles 6 et 7



M. le président.
« Art. 6. - A l'article 215 ter du code des douanes, après les mots : "soit des documents attestant que ces marchandises peuvent quitter le territoire douanier en conformité avec les dispositions portant prohibition d'exportation", sont insérés les mots : "soit tout document prouvant que ces biens ont été importés temporairement d'un autre Etat membre de la Communauté européenne". » - (Adopté.)
« Art. 7. - Les dispositions de la présente loi sont applicables aux biens culturels auxquels a été délivré le certificat prévu par l'article 5 de la loi n° 92-1477 du 31 décembre 1992 précitée ou qui, à la date d'entrée en vigueur de la loi, font l'objet d'un refus de certificat. » - (Adopté.)

Vote sur l'ensemble



M. le président.
Avant de mettre aux voix les conclusions du rapport de la commission, je donne la parole à M. Estier pour explication de vote.
M. Claude Estier. J'ai indiqué tout à l'heure, dans la discussion générale, que nous étions totalement favorables à la proposition de loi telle qu'elle a été rapportée par M. Serge Lagauche et que nous étions naturellement opposés aux amendements présentés par M. Yann Gaillard.
Certes, j'ai pris acte que M. Gaillard a retiré deux des quatre amendements qu'il avait déposés. Mais les deux autres ayant été adoptés par la majorité sénatoriale en dépit de l'avis défavorable de la commission des affaires culturelles et du Gouvernement, le groupe socialiste, en fin de compte, s'abstiendra avec beaucoup de regrets dans le vote final, car il est favorable à la proposition de loi.
M. le président. La parole est à M. Renar.
M. Ivan Renar. Il est vrai que la nature du texte n'est plus la même. Les modifications qui ont été apportées ne sont pas anodines. Ce n'est pas insulter M. Gaillard que de dire qu'il applique - c'est son droit, il peut avoir l'opinion qui est la sienne - dans le domaine des trésors nationaux et de leur éventuelle sortie du territoire, une forme de libéralisme échevelé.
Le pire est que ce dispositif ne sera pas efficace, parce que ce ne sont pas quelques avantages fiscaux qui freineront certains propriétaires d'oeuvres, qu'ils veulent des liquidités ou qu'ils spéculent. Seul le secteur privé en profitera. Voilà qui est fort préjudiciable pour nos musées qui, comme l'a fort bien expliqué Mme le ministre, peuvent présenter au public des oeuvres d'art et des trésors retenus en douane. C'est aussi au public que je pense en m'abstenant, dans la mesure où ce texte n'est plus celui qui nous a initialement été présenté.
M. le président. La parole est à M. Hugot.
M. Jean-Paul Hugot. Actuellement, pour empêcher la fuite des biens culturels vers l'étranger, la France dispose de la loi de 1992 avec trois possibilités qui ont été rappelées.
Les propositions qui nous sont faites à travers ce texte ne sont que des aménagements juridiques limités à la loi du 31 décembre 1992.
Si la procédure d'acquisition des trésors nationaux pallie certains refus de vente portant sur des biens relativement secondaires, elle ne résout en rien le problème concernant les biens déclarés d'une importance majeure à l'échelle mondiale, notamment les grands tableaux des peintres impressionnistes, évoqués tout à l'heure en particulier par Mme la ministre.
Le nouveau dispositif ne mettra pas un terme à la menace effective de la fuite de notre patrimoine vers l'étranger.
Le processus sera seulement retardé de quelques années. Par conséquent, cela ne pourra qu'accentuer le déclin du marché de l'art dans notre pays.
Nous ne devons pas oublier que si, au début des années cinquante, la France était au centre du marché de l'art, aujourd'hui les Etats-Unis et la Grande-Bretagne occupent une place de référence sur ce maché mondial quantitativement parlant.
La seule mesure capable de changer toutes les données de ce problème, qui n'est pas des moindres, est une défiscalisation partielle.
Saisie pour avis, la commission des finances a déposé quatre amendements destinés à compléter par un volet fiscal le dispositif que je viens d'évoquer. L'objectif de ces amendements est d'encourager l'acquisition de trésors nationaux par des propriétaires privés qui s'engageraient à en demander le classement, lequel ouvrirait droit à des avantages fiscaux. Les dispositifs proposés reposent sur des mécanismes originaux mais ne vont pas sans soulever des objections techniques qui ont justifié l'attitude prudente de la commission des affaires culturelles.
Cela étant, madame la ministre, vous avez reppelé tout à l'heure que, dans la voie ouverte par M. Gaillard, vous vous proposiez sous peu d'engager des initiatives concernant notamment la loi de 1913. Inutile de vous dire que, si le Gouvernement nous laissait entrevoir une chance de surmonter quelques-uns des obstacles qui, aujourd'hui, s'opposent à la prise des mesures fiscales nécessaires pour débloquer la situation, nous soutiendrions cet effort.
Pour l'instant, outre le travail de M. Lagauche, je voudrais saluer les initiatives de notre collègue Yann Gaillard, le féliciter pour son excellente contribution, qu'il s'agisse de l'analyse à laquelle il s'est livrée dans son rapport sur le marché de l'art ou du rapport pour avis qu'il a présenté sur la proposition de loi qui nous est actuellement soumise.
Même si elle ne va pas très loin, cette proposition de loi nous fait avancer d'un pas. Notre groupe votera donc ce texte bien que nous soyons convaincus que le fond du problème ne peut être résolu que grâce à la mise en oeuvre d'une véritable volonté politique, que j'espère pouvoir déceler bientôt, dans vos initiatives, madame la ministre. Nous devons, enfin, nous donner les moyens de favoriser la protection de notre patrimoine national pour, ainsi, éviter son exode. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix, modifiées, les conclusions du rapport de la commission des affaires culturelles sur la proposition de loi n° 444 (1998-1999).

(Ces conclusions sont adoptées.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons suspendre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures quinze, est reprise à dix-sept heures vingt.)



M. le président.
La séance est reprise.

4

LIBERTÉ DE COMMUNICATION

Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi (n° 392, 1998-1999), adopté par l'Assemblée nationale, modifiant la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication. (Rapport n° 154 [1999-2000] et avis n° 161 [1999-2000]).
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus aux amendements tendant à insérer des articles additionnels avant l'article 26 bis.

Articles additionnels avant l'article 26 bis



M. le président.
Par amendement n° 160 rectifié, MM. Ralite, Renar, Mme Luc, les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, avant l'article 26 bis, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le Conseil supérieur de l'audiovisuel peut autoriser à titre expérimental et pour une durée n'excédant pas trois ans la création et le fonctionnement de télévisions locales de proximité.
« Pour être autorisée, une télévision locale de proximité doit :
« - être constituée en association conformément à la loi du 1er juillet 1901 ;
« - viser dans sa programmation l'information et l'animation locales, le développement culturel et l'éducation permanente ;
« - comprendre au sein de sa programmation propre 50 % du temps de diffusion de l'ensemble des programmes à l'exclusion des rediffusions.
« Dans des limites définies par décret, les télévisions locales de proximité peuvent recevoir une subvention des collectivités territoriales.
« Les recettes publicitaires des télévisions locales de proximité ne peuvent excéder vingt pour cent des crédits de leur budget. »
La parole est à M. Renar.
M. Ivan Renar. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, un certain nombre de nos collègues se sont efforcés d'amender le texte afin d'introduire de manière formelle l'émergence d'un nouveau secteur audiovisuel à travers le développement des télévisions locales.
Ce dossier avance d'une certaine manière et le rapport Franceix trace un certain nombre de pistes.
A travers cette question, plusieurs interrogations demeurent et l'exemple des radios « libres » doit nous conduire à la plus extrême vigilance afin que, sur ce terrain local, ne s'ouvre pas une nouvelle voie à la recherche de profits uniquement publicitaires.
A ce titre, la question du financement de l'audiovisuel local est en l'état la grande inconnue.
La presse quotidienne régionale y voit une nouvelle possibilité de rayonnement ; nous considérons, pour ce qui nous concerne, ce rayonnement assez limité.
La création des télévisions locales de proximité devrait être envisagée dans le souci de permettre l'émergence d'un nouveau type de citoyenneté audiovisuelle, si je puis dire, la production originale devrait y tenir une place importante et les ressources publicitaires constituer une part marginale des ressources de ces futures chaînes.
Ce sont, nous le pensons, des axes essentiels.
A ce titre, et très largement inspiré du modèle de nos voisins belges, l'amendement que nous vous proposons d'adopter prévoit à titre expérimental la création de télévisions locales de proximité et un certain nombre de dispositions permettant d'éviter les dérives constatées dans le domaine radiophonique.
Tel est le sens de cet amendement que nous vous demandons, mes chers collègues, de bien vouloir adopter.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur de la commission des affaires culturelles. La commission s'est prononcée défavorablement sur cet amendement suite à l'adoption de l'amendement n° 117, qui institue un système permanent d'allocation de fréquences de télévision à des associations.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 160 rectifié, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Toujours avant l'article 26 bis , je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 166, MM. Hérisson, Richert et Amoudry proposent d'insérer, avant l'article 26 bis , un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article 34-3, il est inséré dans la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée un article additionnel ainsi rédigé :
« Art... - Les collectivités territoriales peuvent conclure avec une personne morale exploitant un service local de télévision conventionné en application de l'article 34-1 un contrat d'objectifs et de moyens définissant des missions de service public et leurs conditions de mise en oeuvre, pour une durée comprise entre trois et cinq années civiles. Ce contrat est annexé à la convention prévue à l'article 34-1.
Par amendement n° 253, MM. Loridant, Ralite, Renar, Mme Luc et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, avant l'article 26 bis , un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article 34-3, il est inséré dans la loi du 30 septembre 1986, un article additionnel ainsi rédigé :
« Art... - Les collectivités territoriales peuvent conclure avec une personne morale exploitant un service de télévision conventionné en application de l'article 34-1 un contrat d'objectifs et de moyens définissant des missions de service public et leurs conditions de mise en oeuvre, pour une durée comprise entre trois et cinq années civiles. Ce contrat est annexé à la convention prévue à l'article 34-1 ci-dessus. »
Par amendement n° 251, MM. Loridant, Ralite, Renar, Mme Luc et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, avant l'article 26 bis , un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article 34-3, il est inséré dans la loi du 30 septembre 1986 un article additionnel ainsi rédigé :
« Art... - Les communes ou des groupements de communes ayant établi ou autorisé l'établissement sur le territoire d'un réseau distribuant par câble des services de radiodiffusion peuvent confier l'exploitation du canal, mentionné au 3° du 6e alinéa de l'article 34, à une personne morale.
« Les communes ou groupement de communes peuvent conclure avec cette personne morale un contrat d'objectifs et de moyens définissant des missions de service public et leurs conditions de mise en oeuvre, pour une durée comprise entre trois et cinq années civiles. Ce contrat est annexé à la convention prévue à l'article 34-1 ci-dessus.
« II. - Les personnes morales bénéficiant, à la date de promulgation de la présente loi, d'une convention prévue à l'article 34-1 pour l'exploitation d'un canal local peuvent poursuivre cette exploitation jusqu'à expiration de la convention en cours. »
La parole est à M. Hérisson, pour défendre l'amendement n° 166.
M. Pierre Hérisson. Il s'agit de clarifier les rapports entre les collectivités territoriales et les services locaux du câble.
A l'heure actuelle, une disposition introduite à l'Assemblée nationale concerne les communes et groupements de communes. Or, les télévisions locales travaillent déjà à l'échelon du département, voire de la région. De nombreuses collectivités territoriales participent directement ou indirectement au financement des chaînes locales du câble établies sur leurs territoires. Cependant, la base juridique de tels financements apparaît très fragile.
Les décisions prises à l'occasion de chacune des adoptions de budgets par les collectivités qui souhaitent s'engager sur cette démarche seront à l'avenir guidées par l'adoption des contrats pluriannuels.
Ces contrats donneront aux télévisions locales les moyens de programmer leurs actions dans le temps, leur permettant ainsi de développer des actions de fond en matière, par exemple, d'information départementale ou régionale, de soutien à la création, de débat et d'accès public, de formation à l'audiovisuel.
M. le président. La parole est à M. Renar, pour défendre les amendements n°s 253 et 251.
M. Ivan Renar. Je n'ajouterai rien aux propos de notre collègue Pierre Hérisson, auxquelles je souscris totalement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 166, 253 et 251 ?
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. La commission a estimé extrêmement intéressante l'idée développée par les amendements n°s 166 et 253 de permettre aux collectivités locales de conclure des contrats d'objectifs et de moyens avec les exploitants d'un service local de télévision.
Ces amendements posent cependant un problème de coordination avec le texte de l'article 27 bis du projet de loi. Des explications de la part de leurs auteurs seraient sans doute nécessaires sur ce point.
Quoi qu'il en soit, la commission s'en est remis à la sagesse du Sénat.
Quant à l 'amendement n° 251, il paraît satisfait par l'article 27 bis du projet de loi.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces trois amendements ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Le Gouvernement est défavorable à ces amendements. Je me suis déjà exprimée sur la nécessité d'examiner plus au fond et plus longuement les aspects du financement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 166, repoussé par le Gouvernement et pour lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 26 bis , et les amendements n°s 253 et 251 n'ont plus d'objet.
Je suis maintenant saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 167 est présenté par MM. Hérisson et Richert.
L'amendement n° 252 est présenté par MM. Loridant, Ralite, Renar, Mme Luc et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Tous deux tendent, avant l'article 26 bis , à insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans les premier et troisième alinéas de l'article 80 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, après les mots : "les services de radiodiffusion sonore par voie hertzienne" sont insérés les mots : "et les services locaux de télévision par câble conventionnés en application de l'article 34-1". »
La parole est à M. Hérisson, pour défendre l'amendement n° 167.
M. Pierre Hérisson. Il s'agit de permettre une expression locale télévisuelle diversifiée à l'instar de celle du secteur des radios, dans l'attente d'une réforme plus globale sur tous les supports.
Aujourd'hui, seul le fonds de soutien à l'expression radiophonique permet à plus d'un demi-millier de radios d'initiatives locales de vivre sans tomber dans le giron et le formatage des réseaux nationaux. Il est logique d'en étendre le bénéfice au secteur de la télévision locale non commerciale.
M. le président. La parole est à M. Renar, pour défendre l'amendement n° 252.
M. Ivan Renar. Cet amendement a pour objet de permettre une expression locale télévisuelle diversifiée sur le câble, à l'instar de ce qui se passe dans le secteur des radios, en attente d'une réforme plus globale sur tous les supports. Il s'agit d'étendre aux télévisions locales non commerciales le bénéfice du fonds de soutien à l'expression radiophonique, qui permet aujourd'hui à plus d'un demi-millier de radios d'initiatives locales de vivre sans tomber dans le giron et le formatage des réseaux nationaux.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements ?
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. En ce qui concerne l'amendement n° 167, j'attire l'attention sur le fait que l'élargissement proposé pourrait avoir assez rapidement pour effet de tarir le fonds de soutien à l'expression radiophonique. C'est la raison pour laquelle la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.
S'agissant de l'amendement n° 252, son dispositif paraît satisfait par l'amendement n° 119 de la commission des finances.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Le Gouvernement est défavorable à ces amendements.
J'ai déjà mis en garde, à propos de l'amendement présenté par Mme Pourtaud, contre le risque qu'il y aurait à étendre aux télévisions locales le champ d'intervention du fonds de soutien aux radios locales. Il ne faut pas, en effet, fragiliser les radios associatives. En tout cas, une telle suggestion mérite un examen approfondi.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 167.
M. Michel Pelchat. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Pelchat.
M. Michel Pelchat. Je demande, comme le Gouvernement, que l'on n'appauvrisse pas le fonds de soutien aux radios locales. S'il faut trouver des financements pour aider les télévisions, il y a certainement d'autres solutions. C'est pourquoi je voterai contre cet amendement et, bien entendu, contre l'amendement n° 252.
M. Louis de Broissia. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. de Broissia.
M. Louis de Broissia. De la même façon que je me suis opposé à un autre amendement qui tendait à utiliser le fonds de modernisation de la presse, je m'oppose à ces deux amendements. Ce n'est certes pas en prélevant sur le fonds de soutien aux radios locales que l'on peut régler le problème du financement des télévisions locales. (M. Chérioux applaudit.)
Mme Danièle Pourtaud. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Pourtaud.
Mme Danièle Pourtaud. Nous avions nous-mêmes déposé un amendement visant à créer un fonds de soutien à l'expression télévisuelle locale. Il nous paraît en effet essentiel que les télévisions locales associatives soient soutenues financièrement dès lors qu'on leur donne le droit à l'existence. Mais il nous paraît non moins essentiel de ne pas, du même coup, appauvrir les radios associatives. Celles-ci, on l'a dit, bénéficient d'un fonds de 100 millions à 110 millions de francs par an, ce qui, pour 400 radios, n'est pas considérable.
Par conséquent, nous ne voterons pas cet amendement. Nous avons noté que le Gouvernement était prêt à travailler avec le Parlement jusqu'à la présentation du projet de loi de finances afin de trouver les modalités adéquates pour financer les télévisions associatives.
M. Pierre Hérisson. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson. J'ai, moi aussi, relevé l'engagement de Mme la ministre d'étudier les moyens par lesquels pourraient être financées les télévisions locales.
Sous le bénéfice de cette promesse, je retire mon amendement. (Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. le président. L'amendement n° 167 est retiré.
Monsieur Renar, retirez-vous également votre amendeement ?
M. Ivan Renar. Non, monsieur le président, je le maintiens.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 252, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 26 bis



M. le président.
« Art. 26 bis. _ Le Gouvernement s'engage dans un délai d'un an à déposer devant le Parlement un rapport qui présentera les possibilités de développement de télévisions citoyennes, de proximité.
« Ce rapport fera l'objet d'un débat au Parlement. » - (Adopté.)

Article 27



M. le président.
« Art. 27. _ Il est inséré, dans la même loi, un article 34-2 ainsi rédigé :
« Art. 34-2 . _ Tout distributeur de services qui met à disposition du public, par satellite, une offre de services de communication audiovisuelle comportant des services de radiodiffusion sonore ou de télévision doit effectuer une déclaration préalable auprès du Conseil supérieur de l'audiovisuel. Cette déclaration ne peut être présentée que par une société.
« La déclaration est accompagnée d'un dossier comportant les éléments suivants : la composition et la structure de l'offre de services, ses modalités de commercialisation, la composition du capital de la société ainsi que tout accord de commercialisation du système d'accès sous condition.
« Toute modification de ces éléments doit être préalablement notifiée au Conseil supérieur de l'audiovisuel.
« Un décret en Conseil d'Etat précise les conditions dans lesquelles chaque distributeur de services par satellite dont l'offre comporte des services ayant fait l'objet d'une convention en application de l'article 33-1 doit assurer, parmi ceux-ci, des proportions minimales de services en langue française, qui, d'une part, ne sont contrôlés directement ou indirectement ni par le distributeur, ni par l'un de ses actionnaires détenant au moins 5 % de son capital, ni par la personne physique ou morale qui contrôle directement ou indirectement au moins la moitié des services concernés et, d'autre part, ne sont pas contrôlés directement ou indirectement par un distributeur de services au sens de l'article 33-4.
« Le Conseil supérieur de l'audiovisuel veille à ce que la composition de l'offre, en ce qui concerne les services qu'il a conventionnés en application de l'article 33-1, soit conforme à l'intérêt public au regard notamment de la qualité et de la variété des services proposés, de la durée des relations contractuelles avec les éditeurs de services et, pour les services soumis aux obligations prévues au 5° de l'article 33, en fonction de l'importance de leur contribution au développement de la production cinématographique et audiovisuelle.
« Le Conseil supérieur de l'audiovisuel peut, par décision motivée et dans le mois suivant la déclaration prévue au premier alinéa ou la notification prévue au troisième alinéa, s'opposer soit à l'exploitation d'une offre de services par satellite, soit à une modification de la composition ou de la structure d'une offre, s'il estime que cette offre ne satisfait pas ou ne satisferait plus aux critères et à l'obligation prévue aux deux précédents alinéas. »
Je suis saisi de cinq amendements identiques.
L'amendement n° 113 est présenté par M. de Broissia et les membres du groupe du Rassemblement pour la République.
L'amendement n° 139 est déposé par M. Laffitte.
L'amendement n° 165 est présenté par MM. Richert et Hérisson.
L'amendement n° 173 est déposé par M. Pelchat.
L'amendement n° 231 est présenté par Mme Pourtaud, MM. Dreyfus-Schmidt, Collomb, Lagauche, Weber et les membres du groupe socialiste et apparentés.
Tous les cinq tendent, dans le deuxième alinéa du texte proposé par l'article 27 pour l'article 34-2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, après les mots : « ses modalités de commercialisation », à insérer les mots : « la contribution au développement des services proposés, en particulier celle affectée aux services en langue française ayant conclu une convention en application de l'article 33-1, ».
La parole est à M. de Broissia, pour défendre l'amendement n° 113.
M. Louis de Broissia. Quelles que soient nos « tribus » d'origine, nous souhaitons, par ces cinq amendements identiques, alors que la régulation est au coeur de nos préoccupations, permettre le contrôle par le CSA de la contribution des distributeurs de services par satellite au développement de l'industrie des programmes française et européenne. Il s'agit, à mon sens, d'un amendement de coordination.
M. le président. L'amendement n° 139 est-il soutenu ?...
La parole est à M. Hérisson, pour présenter l'amendement n° 165.
M. Pierre Hérisson. Il s'agit en effet de prévoir, à l'instar de ce qui existe pour le câble, un contrôle par le CSA de la contribution des distributeurs de services par satellite au développement de l'industrie des programmes française et européenne.
M. le président. La parole est à M. Pelchat, pour défendre l'amendement n° 173.
M. Michel Pelchat. Je fais miennes les explications de mes collègues. Je pense que ces amendements pourraient recueillir l'unanimité au sein de notre assemblée.
M. le président. La parole est à Mme Pourtaud, pour présenter l'amendement n° 231.
Mme Danièle Pourtaud. Tout en m'efforçant de ne pas abuser de la patience du Sénat, je serai un peu moins laconique que mes collègues.
Il s'agit d'assortir la déclaration faite auprès du CSA par un distributeur de services par satellite d'une obligation semblable à celle qui est prévue à l'article 26 pour l'autorisation d'exploitation d'un réseau câblé.
La réglementation actuelle concernant le satellite recèle une rupture dans la chaîne des dispositifs d'encadrement que le législateur souhaite instaurer en faveur du développement de l'industrie des programmes française et européenne.
Les distributeurs collectent et gèrent les ressources de la télévision diffusée par le satellite, mais il n'existe à leur égard aucune obligation de contribution à l'industrie de programmes semblable à celle qui pèse sur les éditeurs de services.
Afin d'éviter que des distributeurs de services ne proposent au public que des services établis hors de France, et qui ne seraient donc soumis à aucune obligation en matière de soutien à la production française, la loi a prévu de confier au Conseil supérieur de l'audiovisuel un droit de regard sur la composition de l'offre de services.
De même, les mesures de soutien à l'industrie de programmes, pour être complètes et cohérentes, doivent s'appliquer, sous le même contrôle du Conseil supérieur de l'audiovisuel, à l'ensemble des acteurs de la chaîne, qui va du producteur des oeuvres audiovisuelles au téléspectateur qui les reçoit, en passant par l'éditeur qui établit le programme et le distributeur qui le communique au public.
Les recettes provenant des abonnements représentent aujourd'hui globalement 75 % des ressources des services, le développement de la publicité étant handicapé par une série de contraintes spécifiques.
La tendance à la baisse généralisée des redevances versées par les distributeurs aux éditeurs met ces derniers dans une situation de plus en plus difficile, du fait d'une double contrainte : des obligations d'investissements, d'une part, un resserrement de leurs ressources, d'autre part.
Ces engagements de contribution à l'industrie de programmes, qui pèsent sur l'amont de la chaîne des ressources, ne pourront être supportés que s'ils pèsent également sur l'opérateur, qui, en aval, collecte ces ressources.
Le Conseil supérieur de l'audiovisuel, dont le projet de loi renforce le droit de regard sur la composition de l'offre des bouquets satellitaires, se verrait ainsi confier la faculté de veiller au respect de l'obligation de contribution des distributeurs au développement des services, cette contribution faisant partie de l'autorisation d'exploitation qu'il délivre.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 113, 165, 173 et 231 ?
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. L'avis de la commission est favorable à la puissance cinq ! (Sourires.)
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Bien que ces cinq amendements émanent de groupes différents, tout en ayant manifestement une même vigoureuse source d'inspiration, l'avis du Gouvernement est défavorable. Je note d'ailleurs qu'aucune des deux commissions saisies ne s'est jointe à ce large mouvement.
Il s'agirait d'imposer aux distributeurs de services par satellite une contribution aux chaînes thématiques. L'objectif, si je comprends bien, est de s'assurer que les distributeurs de services puissent donner suffisamment d'argent aux chaînes qui participent à la production de programmes.
Cette proposition soulève une première difficulté au regard des règles de concurrence au sein de la Communauté.
En tout état de cause, le dispositif ne serait pas opératoire, dans la mesure où il ne renvoie pas à un décret qui permettrait de l'appliquer.
D'autres questions viennent à l'esprit. S'agit-il d'une contribution financière ? Dans l'affirmative, comment est-elle calculée ? Les auteurs de ces amendements souhaitent-ils voir le CSA fixer le prix que les chaînes versent aux câblo-opérateurs pour leur reprise ? Veulent-ils qu'indirectement les opérateurs satellitaires contribuent au financement de la production ?
Bref, ces amendements soulèvent, à mon sens, plus de questions et de difficultés qu'ils n'en résolvent.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 113, 165, 173 et 231, acceptés par la commission et repoussés par le Gouvernement.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Par amendement n° 64, M. Hugot, au nom de la commission des affaires culturelles, propose, au début du quatrième alinéa du texte présenté par l'article 27 pour l'article 34-2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, de remplacer les mots : « Un décret en Conseil d'Etat » par les mots : « Une décision du Conseil supérieur de l'audiovisuel ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. De la même manière qu'un amendement à l'article 26 a restitué au CSA sa compétence sur la fixation des seuils des services indépendants dans les plans de service du câble, l'amendement n° 64 vise à attribuer la même compétence au CSA pour les bouquets du satellite.
Cette compétence s'exercera sous la forme de décision homologuée par décret en Conseil d'Etat.
La Commission des opérations de Bourse et l'autorité de régulation des télécommunications, l'ART, bénéficient actuellement de ce type de pouvoir, qui apparaît comme un élément constitutif de la notion de régulation. Il est important d'en accorder l'usage au CSA afin de conforter ce dernier dans son rôle de régulateur, dont les opérateurs admettent de plus en plus la nécessité.
Il s'agit donc d'un amendement qui tend à renforcer et à clarifier la fonction de régulation du CSA.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le rapporteur, vous suggérez ici que le CSA fixe lui-même la proportion de chaînes indépendantes. Vous suggérerez, avec l'amendement n° 66, qu'il fixe également la durée minimale des contrats passés entre distributeurs de service et éditeurs de programmes et, conscient que vous empiétez ainsi sur le domaine réglementaire, vous proposerez, par l'amendement n° 70, que ces décisions soient « homologuées » par décret en Conseil d'Etat.
Je ne peux être favorable à ces trois amendements. En effet, puisqu'il s'agit d'assurer une compétence réglementaire, il ne sert à rien de demander au CSA de prendre des mesures, puis d'attendre une éventuelle homologation par décret en Conseil d'Etat.
En la matière, je pense que le CSA doit continuer à arrêter des décisions de pure portée individuelle à partir de principes et de critères que le législateur et le Gouvernement auront édictés.
Au surplus, en matière de contrats de commercialisation passés entre opérateurs privés, je ne pense pas qu'il appartienne à l'Etat d'en fixer la durée, fût-ce la durée minimale.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 64.
M. Michel Charasse. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse. Nous sommes là presque au coeur d'un débat ancien, qui concerne la compétence des autorités indépendantes.
Lorsque le Conseil constitutionnel a accepté, voilà plusieurs années, la création d'autorités indépendantes, il l'a fait en considérant que l'exercice d'un certain nombre de prérogatives par ces autorités n'amputait pas l'essentiel des pouvoirs constitutionnels. Si le Conseil supérieur de l'audiovisuel a reçu un certain nombre d'attributions dans le domaine réglementaire, il exerce ses compétences dans le cadre strictement fixé par la loi, sans qu'à aucun moment il n'empiète sur des prérogatives qui ne peuvent être que celles du pouvoir exécutif.
Je comprends bien la démarche de la commission, mais il s'agit en réalité, au-delà d'apparences anodines, du transfert d'un pouvoir d'Etat, qui ne peut être exercé que par l'Etat ou par une autorité politique agissant au nom de l'Etat, c'est-à-dire le pouvoir exécutif qui agit par décret en Conseil d'Etat.
Je dis à nos collègues de la commission des affaires culturelles que cet amendement n° 64, à mon avis, n'est pas conforme à la Constitution et risque fort de se trouver remis en cause. En effet, la part réservée aux chaînes indépendantes relève au fond de l'utilisation du domaine public des ondes. Dans une telle matière, il n'est d'autre autorité que le pouvoir exécutif qui puisse trancher.
Voilà, monsieur le président, les raisons qui me conduiront à suivre l'avis du Gouvernement et à ne pas voter l'amendement n° 64.
Profitant de cette intervention, je voudrais faire une brève mise au point à la suite du débat de mercredi dernier sur le contrôle comptable et financier des sociétés chargées de collecter les droits.
Je n'ai rien à retirer au fond de mes propos lors des échanges que j'ai eus avec Mme le ministre, mais je reconnais que j'avais été très irrité - et je n'étais pas le seul - par les pressions que nous avions subies les uns et les autres, tout au long de la journée, jusque dans les couloirs de l'hémicycle, et que le ministre a d'ailleurs dénoncées publiquement devant nous. Aussi le ton de mes propos était-il très ferme au point que Mme Trautmann a pu croire que ma colère était dirigée contre elle et que je mettais en doute la sincérité de ses affirmations en ce qui concerne la transparence de la gestion des sociétés concernées.
On m'a dit, ici et là, qu'elle en avait été froissée, pour ne pas dire plus.
C'est pourquoi je ne veux pas attendre plus longtemps pour dire à Mme Trautmann que l'amitié et la fidélité de mes sentiments à son égard,...
M. Jean Chérioux. Que c'est beau !
M. Michel Charasse. ... comme le respect que je porte à ses fonctions, me conduisent à lui demander d'accepter mes regrets si je l'ai peinée involontairement et lui assurer que je lui garde toute ma confiance pour exercer les hautes responsabilités qui sont les siennes. (Très bien ! et applaudissements.)
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. J'ai bien entendu les arguments de Mme la ministre et de notre collègue Michel Charasse. Je dois dire toutefois que le mécanisme prévoyant l'homologation des décisions prises par le CSA que nous préconisons est calqué sur le mécanisme applicable à la COB. Il va donc dans le sens de l'harmonisation entre hautes autorités et il me paraît légitime de le présenter comme un progrès pour le CSA, organe de régulation de l'audiovisuel.
M. Louis de Broissia. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. de Broissia.
M. Louis de Broissia. Les propositions de la commission sont cohérentes avec le statut d'autorité administrative indépendante dont le législateur lui-même, monsieur Charasse, a doté le CSA. On est certes en droit de regretter l'existence de nombreuses autorités administratives indépendantes, mais, si le Conseil supérieur de l'audiovisuel a réussi à acquérir une autorité morale et technique, c'est précisément parce que ses décisions ont été prises selon le schéma même qui s'applique aux décisions d'une autorité administrative indépendante.
Si le point de vue de Mme le ministre, selon lequel on ne peut pas adopter à la fois les amendements n°s 64, 66 et 70 car ce dernier renvoie à un décret en Conseil d'Etat, est tout à fait cohérent, les propos tenus par M. Charasse, à qui je voue estime et amitié - qu'il ne voie donc pas dans mes critiques de jugement personnel - m'ont en revanche inquiété, et c'est la raison pour laquelle je suivrai la commission des affaires culturelles.
M. Michel Charasse a en effet dit qu'il appartenait à l'Etat de fixer les conditions d'exercice du CSA, mais c'est au législateur, c'est-à-dire à nous, qu'il appartient de le faire !
M. Michel Charasse. Dans les limites de la Constitution !
M. Louis de Broissia. Je le répète, c'est la loi qui doit fixer les conditions d'exercice du Conseil supérieur de l'audiovisuel. Elle définit, dans nombre de ses articles, les missions de service public, et nous confions au CSA le soin de les encadrer. Que ses décisions soient ensuite publiées au Journal officiel de la République française paraît normal, car le CSA fait partie de la République française. En revanche, en supprimant le renvoi au décret en Conseil d'Etat dans l'amendement n° 70, on établirait entre les trois amendements une cohérence conforme à l'esprit dans lequel nous concevons le Conseil supérieur de l'audiovisuel sans qu'il soit question de frapper d'indignité, comme certains avaient voulu le faire accroire, une autre haute autorité. (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants).
M. Michel Charasse. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse, J'ai bien écouté les propos de M. de Broissia. Mon cher collègue, le législateur fixe le cadre de l'intervention du CSA, mais il doit le faire sous réserve des prérogatives qui sont reconnues par la Constitution au pouvoir exécutif et au pouvoir législatif et que le législateur ordinaire, c'est-à-dire le législateur non constitutionnel, n'a pas le pouvoir de modifier. Or, vous nous proposez en réalité de donner au CSA une compétence qui n'est pas réglementaire : elle va même bien au-delà puisqu'elle touche à un choix politique qui ne peut être opéré que par le pouvoir exécutif.
C'est une simple discussion juridique et constitutionnelle, cher ami. Si vous aviez indiqué dans l'amendement - Mme le ministre s'y serait peut-être alors ralliée - que le décret en Conseil d'Etat peut être pris après avis du CSA, c'eût été un processus de consultation qui n'aurait en rien amputé les pouvoirs constitutionnels.
Si je suis votre raisonnement, vous pourriez aussi, dans la même ligne, proposer de transférer au CSA une partie des pouvoirs législatifs. Je sais bien, monsieur de Broissia, qu'il est très difficile de délimiter les attributions du CSA, organe indépendant, entre ce que je considère comme des attributions ordinaires d'exécution et ce qui constitue des attributions qui touchant à des choix politiques quasiment régaliens qui ne peuvent relever d'une autorité indépendante autre que les pouvoirs émanant de la souveraineté populaire.
C'est la raison pour laquelle je persiste à m'opposer à l'amendement n° 64 tout en regrettant qu'à cette occasion je m'oppose aussi à la position de M. de Broissia.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Afin de confirmer l'approche que j'ai défendue dans ma précédente intervention, j'indique que l'article 4-1 de l'ordonnance du 28 septembre 1967 dispose que la commission des opérations de bourse peut, « pour l'exécution de sa mission, prendre des règlements concernant le fonctionnement des marchés placés sous son contrôle ». « Les règlements sont publiés au Journal officiel de la République française, après homologation par arrêté du ministre chargé de l'économie et des finances. » La question est maintenant de savoir si les conditions de fonctionnement de la COB sont inconstitutionnelles ! M. le président. C'est une interrogation à laquelle d'autres répondront !
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 64, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 232, Mme Pourtaud, MM. Dreyfus-Schmidt, Collomb, Lagauche, Weber et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, dans le quatrième alinéa du texte présenté par l'article 27 pour l'article 34-2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, de remplacer les mots : « des services ayant fait l'objet d'une convention en application de l'article 33-1 doit assurer, parmi ceux-ci, des proportions minimales de services en langue française » par les mots : « des services en langue française ayant fait l'objet d'une convention en application de l'article 33-1 doit assurer parmi ceux-ci une proportion d'au moins 30 % de services ».
La parole est à Mme Pourtaud.
Mme Danièle Pourtaud. Notre amendement tend à préciser les modalités d'encadrement pour l'application des dispositions relatives au nombre minimal de services indépendants en langue française que devront comporter les bouquets satellitaires.
Afin que lesdits services bénéficient d'une place effective dans ce type de bouquets, nous souhaitons que les décrets qui affineront le dispositif en fonction des caractéristiques des bouquets fixent des proportions minimales de services indépendants d'au moins 30 %. Il s'agit d'un minimum, et il n'est pas excessif puisque les chaînes publiques, je vous le rappelle, peuvent être comptabilisées dans ce taux.
Une telle disposition devrait favoriser aussi l'émergence de nouveaux éditeurs indépendants.
Quant à notre calcul, nous préférons l'effectuer par rapport à l'offre de services en langue française et non par rapport à l'offre globale de service francophones et non francophones, ce qui rendra le système plus efficace. Je ne reviens pas sur la nécessité de fixer ces modalités d'application par décret, tout a été dit !
J'ajoute que, tout comme l'Assemblée nationale, nous adhérons à l'idée d'appréhender la proportion de services indépendants non seulement par rapport au bouquet concerné mais aussi par rapport à l'ensemble des distributeurs de services satellitaires.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Il s'agit encore une fois de savoir si la décision appartient au CSA ou si le législateur doit lui fixer un cadre.
En la matière, il nous apparaît que l'appréciation quantitative concernant les services indépendants relève typiquement de la sensibilité particulière du CSA. C'est pourquoi la commission a donné un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. J'étais défavorable à l'adoption de cette même disposition pour les offres de services du câble, j'y suis défavorable pour les l'offres de services par satellite.
M. le président. Madame Pourtaud, l'amendement n° 232 est-il maintenu ?
Mme Danièle Pourtaud. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 232 est retiré.
Par amendement n° 65, M. Hugot, au nom de la commission des affaires culturelles, propose :
I. - Après les mots : « concernés », de supprimer la fin du quatrième alinéa du texte présenté par l'article 27 pour l'article 34-2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986.
II. - En conséquence, dans le même alinéa, de supprimer les mots : « , d'une part, ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer, dans le dispositif fixant, pour un bouquet satellitaire donné, un seuil pour les services indépendants, le critère, ajouté par l'Assemblée nationale, de l'absence de contrôle par un autre distributeur que celui qui a la responsabilité du bouquet considéré.
L'application de ce critère ne pourrai qu'encourager la prolifération des clauses d'exclusivité et la multiplication de chaînes thématiques à marché très étroit. Il est préférable d'encourager la circulation entre les bouquets des services contrôlés, directement ou non, par les dis-tributeurs.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Je suis défavorable à cet amendement. Comme je l'expliquais à propos de l'amendement n° 60, il me semble aujourd'hui nécessaire que des dispositions soient prises afin que la forte concurrence entre opérateurs audiovisuels ne rende pas impossible l'accès aux marchés par des éditeurs indépendants.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 65, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis maintenant saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 66 est présenté par M. Hugot, au nom de la commission des affaires culturelles.
L'amendement n° 233 est déposé par Mme Pourtaud, MM. Dreyfus-Schmidt, Collomb, Lagauche, Weber, les membres du groupe socialiste et apparentés.
Tous deux tendent à insérer, après le quatrième alinéa du texte proposé par l'article 27 pour l'article 34-2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, un alinéa ainsi rédigé :
« Une décision du Conseil supérieur de l'audiovisuel fixe, en fonction des différentes catégories de services, la durée minimale des contrats passés avec les éditeurs aux fins de mise des services à disposition du public. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 66.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. L'amendement n° 66 tend à attribuer au CSA le pouvoir de fixer la durée minimale des contrats passés entre les distributeurs de bouquets satellitaires et les éditeurs de services indépendants.
M. le président. La parole est à M. Weber, pour défendre l'amendement n° 233.
M. Henri Weber. Cet amendement vise à prévoir une durée minimale des contrats liant les distributeurs de services sur le satellite aux éditeurs de services.
Comme l'indiquait à l'instant Mme Pourtaud, lors de l'examen des dispositions sur les réseaux câblés, France Télécom Câble, avec Modulo, et Lyonnaise Câble, avec les forfaits Etoiles, viennent de lancer une nouvelle formule d'abonnement à la carte. NC Numéricâble, pour sa part, démarre sur quelques sites un test de service à la carte. UPC a, à plusieurs reprises, annoncé son intention de proposer prochainement ce type de service.
La généralisation de ces formules - et tout laisse penser que l'ensemble des opérateurs du câble ainsi que ceux du satellite se convertiront progressivement à ce système - est censée apporter une plus grande liberté de choix à l'abonné : celui-ci peut modifier chaque mois l'offre de chaînes auxquelles il a accès et il est supposé ne payer que les chaînes qu'il regarde.
On peut s'interroger sur la réalité de l'avantage procuré au téléspectateur, ces différentes formules se révélant généralement plus coûteuses pour lui.
Ce système est, en revanche, inquiétant pour les chaînes thématiques, dont les ressources restent globalement dépendantes à 75 % des abonnements.
Ces formules se caractérisent par une très grande opacité pour les chaînes car elles n'établissent en fait aucune relation entre le prix payé par l'abonné et la rémunération de la chaîne : le distributeur fixant unilatéralement la valeur d'une chaîne dans un catalogue d'offres optionnelles mais groupées, sans qu'il soit possible d'en individualiser le coût dans la facture payée par l'abonné.
Mais la conséquence la plus grave pour les chaînes est l'absence totale de visibilité sur leurs ressources : le nombre d'abonnés pour une chaîne donnée est susceptible de variations d'un mois à l'autre, variations que la chaîne est incapable de prévoir et qu'elle découvrira a posteriori, chaque mois, lorsque l'opérateur le lui indiquera.
Il devient, dans ces conditions, impossible pour une chaîne d'établir un budget prévisionnel annuel en recettes, alors que ses charges - dont ses engagements dans la production - sont fixées annuellement, voire pluriannuellement.
Il conviendrait donc que les contrats passés entre les distributeurs de services et les éditeurs aient une durée minimale.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Nous avions déjà débattu à propos du câble de dispositions similaires et, comme pour le câble, j'estime qu'il n'appartient pas à l'Etat - le CSA agit en effet juridiquement au nom de l'Etat - de fixer la durée minimale des contrats de diffusion entre les chaînes et les opérateurs satellitaires. Le CSA souhaitant, lui, intervenir dans le cadre des modifications de l'offre, nous sommes là en présence de deux conceptions différentes. Pour ma part, je préfère que le projet de loi aille dans le sens de l'intervention dans le cadre des modifications de l'offre mais sans fixer de durées minimales.
Le Gouvernement est donc défavorable à ces amendements.
Mme Danièle Pourtaud. Monsieur le président, nous retirons l'amendement n° 233.
M. le président. L'amendement n° 233 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 66, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 67 est présenté par M. Hugot, au nom de la commission des affaires culturelles.
L'amendement n° 193 est présenté par le Gouvernement.
Tous deux tendent à supprimer le cinquième alinéa du texte proposé par l'article 27 pour l'article 34-2 à insérer dans la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 67.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. L'amendement n° 67 vise à supprimer un alinéa ajouté par l'Assemblée nationale dont l'effet concret est de transformer le régime de déclaration préalable des bouquets satellitaires en quasi-régimes d'autorisation par la CSA.
C'est une gestion simple et évolutive qu'il faut aux services du satellite et c'est incompatible avec le système extrêmement dirigiste mis en place par l'Assemblée nationale.
M. le président. La parole est à Mme le ministre, pour défendre l'amendement n° 193.
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Il arrive que nos esprits se croisent, monsieur le rapporteur... (Sourires.)
Cette disposition, introduite en première lecture à l'Assemblée nationale, ne me paraît pas compatible avec un régime de simple déclaration préalable pour les opérateurs satellitaires.
M. le président. Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s 67 et 193.
M. Michel Pelchat. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Pelchat.
M. Michel Pelchat. Je ne souhaite pas bien entendu rigidifier à l'extrême les réglementations et les contraintes, notamment pour les diffusions par satellites, et je suis bien d'accord avec le rapporteur sur ce point.
Je voudrais cependant attirer votre attention sur un problème. Comme le précise l'exposé des motifs de l'amendement n° 193, et ce point a retenu mon attention, le câble est en situation de monopole de fait puisque, dans un secteur d'habitation donné, il n'y a, à l'évidence, qu'un seul distributeur par câble. Mais il n'est pas le seul distributeur pour autant. Il y a aussi le distributeur par satellite. Or, il ne serait pas bon d'imposer au satellite des contraintes supérieures à celles qui sont actuellement les siennes, en l'alignant ainsi sur la situation faite au câble. Mais, dans le même temps, interdire au câble de distribuer certains programmes qui sont diffusés sur le même secteur par satellite crée une distorsion entre les deux diffuseurs. Cela explique peut-être aussi ce que nous voyons dans un certain nombre de communes, à savoir la prolifération de paraboles sur les immeubles collectifs alors que le câble est au pied de ceux-ci, car certaines chaînes sont diffusées par satellite alors que l'on interdit au câble de les distribuer. Il y a un problème.
Je ne m'opposerai pas à l'amendement n° 67 qui, comme l'a dit M. le rapporteur, vise à supprimer des dispositions contraignantes. Toutefois, à l'occasion de ce débat, je souhaite attirer l'attention du Gouvernement et de mes collègues sur ce problème de distorsion de concurrence. La deuxième lecture de ce projet de loi par l'Assemblée nationale étant repoussée à la fin du mois de mars prochain, vous aurez ainsi le temps de réfléchir à cette question.
Le câble et le satellite sont complémentaires - ils l'ont toujours été - mais aujourd'hui ils sont aussi devenus très fortement concurrents. Dans la mesure où des services sont diffusés par satellite, on ne voit pas pour quelle raison on refuserait à un câblo-opérateur de les distribuer lui aussi, dès lors qu'il le souhaiterait. Or, je le répète, il existe bien aujourd'hui une distorsion de concurrence à cet égard sur un certain nombre de secteurs. Celle-ci pourrait sans doute être corrigée par une disposition législative. En tout cas, je souhaite qu'il en soit ainsi lors de la deuxième lecture.
Cela étant dit, je voterai l'amendement de la commission, car, s'agissant du câble, il faut aller dans le sens non pas de la complication mais de la simplification. Or ce n'est pas dans ce sens que va la disposition qui a été adoptée par l'Assemblée nationale.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 67 et 193.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Par amendement n° 68, M. Hugot, au nom de la commission des affaires culturelles, propose, dans le dernier alinéa du texte présenté par l'article 27 pour l'article 34-2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, de remplacer les mots : « le mois » par les mots : « les quinze jours ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Cet amendement réduit aux quinze jours proposés par le projet de loi initial le délai dans lequel le CSA peut s'opposer à l'exploitation ou à la modification d'une offre de services diffusée par satellite.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. J'émets un avis défavorable sur cet amendement, car je continue à penser qu'un délai d'un mois est nécessaire au CSA pour se prononcer sur les modifications qui lui sont soumises.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 68, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 69, M. Hugot, au nom de la commission des affaires culturelles, propose, après les mots : « ne satisferait », de remplacer la fin du dernier alinéa du texte présenté par l'article 27 pour l'article 34-2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 par les mots : « à la déclaration préalable ou aux obligations fixées en application des quatrième et cinquième alinéas. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination avec les amendements précédents.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Défavorable, pour la raison que vient d'indiquer M. le rapporteur.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 69, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 70, M. Hugot, au nom de la commission des affaires culturelles, propose de compléter in fine le texte présenté par l'article 27 pour l'article 34-2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, par un alinéa ainsi rédigé :
« Les décisions du Conseil supérieur de l'audiovisuel mentionnées dans le présent article sont publiées au Journal officiel de la République française après avoir été homologuées par décret en Conseil d'Etat. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination, qui prévoit l'homologation par l'exécutif des décisions du CSA visées aux amendements n°s 64 et 66.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 70, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 27, modifié.

(L'article 27 est adopté.)

Article 27 bis



M. le président.
« Art. 27 bis. - Après l'article 34-3 de la même loi, sont insérés deux articles 34-4 et 34-5 ainsi rédigés :
« Art. 34-4 . - Les communes ou groupements de communes ayant établi ou autorisé l'établissement sur leur territoire d'un réseau distribuant par câble des services de radiodiffusion peuvent confier l'exploitation du canal mentionné au 3° de l'article 34 à une personne morale.
« Les communes ou groupements de communes peuvent conclure avec cette personne morale un contrat d'objectifs et de moyens définissant des missions de service public et leurs conditions de mise en oeuvre, pour une durée comprise entre trois et cinq années civiles. Ce contrat est annexé à la convention prévue à l'article 33-1.
« Art. 34-5 . - Les personnes morales bénéficiant à la date de promulgation de la loi n° du modifiant la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication d'une convention prévue à l'article 33-1 pour l'exploitation d'un canal local peuvent poursuivre cette exploitation jusqu'à expiration de la convention en cours. »
Par amendement n° 194, le Gouvernement propose, dans la première phrase du second alinéa du texte présenté par cet article pour l'article 34-4 à insérer dans la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, après les mots : « peuvent conclure », d'insérer les mots : « , le cas échéant après avis du Conseil supérieur de l'audiovisuel, ».
La parole est à Mme le ministre.
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Il s'agit de permettre aux communes de recueillir l'avis du CSA avant de conclure avec le canal local du câble le contrat d'objectifs et de moyens.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 194, accepté par la commission.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 27 bis , ainsi modifié.

(L'article 27 bis est adopté.)

Article additionnel avant l'article 28



M. le président.
Par amendement n° 71, M. Hugot, au nom de la commission des affaires culturelles, propose d'insérer, avant l'article 28, un article additionnel ainsi rédigé :

« I. - Il est inséré, après l'article 41 de la même loi, un article 41-1 A ainsi rédigé :
« Art. 41-1 A . - Nul ne peut être titulaire de deux autorisations relatives chacune à une offre nationale de services comportant des services de télévision diffusée par voie hertzienne terrestre, ni être simultanément titulaire d'une autorisation relative à une offre comportant des services de télévision diffusée par voie hertzienne terrestre et d'une autorisation relative à une offre de services de même nature autre que nationale.
« Une personne titulaire d'une ou de plusieurs autorisations relatives chacune à une offre de services comportant des services de télévision diffusée par voie hertzienne terrestre autre que nationale ne peut devenir titulaire d'une nouvelle autorisation relative à une offre de services de même nature autre que nationale si cette autorisation devait avoir pour effet de porter à plus de six millions d'habitants la population recensée des zones desservies par l'ensemble des offres de services de même nature pour lesquelles elle serait titulaire d'autorisations.
« Une personne titulaire d'une autorisation relative à une offre de services comportant des services de télévision diffusée par voie hertzienne terrestre dans une zone déterminée ne peut devenir titulaire d'une nouvelle autorisation relative à une offre de services de même nature diffusée en tout ou en partie dans la même zone.
« II. - Il est inséré, après l'article 41-2 de la même loi, un article 41-3 A ainsi rédigé :
« Art. 41-3 A. - Pour l'application des articles 39, 41-1, 41-2 le titulaire d'une autorisation relative à une offre de services comportant des services de télévision diffusée par voie hertzienne terrestre est assimilé au titulaire d'une autorisation relative à un service de télévision diffusé par voie hertzienne terrestre.
« III. - L'article 41-3 de la même loi est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour l'application du présent article, les offres de services comportant des services de télévision diffusées par voie hertzienne terrestre sont assimilées aux services de télévision diffusés par voie hertzienne terrestre. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Il s'agit d'étendre aux offres de services diffusées en numérique de terre le régime anticoncentration de la loi de 1986.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. M. le rapporteur a repris à l'identique le dispositif anticoncentration de la loi de 1986 pour l'appliquer tel quel au numérique de terre. Les règles actuelles devront bien sûr être adaptées, mais je crains que le dispositif que nous devrons retenir ne soit in fine plus complexe que celui-ci. Aussi, j'émets un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 71, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 28.

Article 28



M. le président.
« Art. 28. _ I. _ Au premier alinéa de l'article 42 de la même loi, les mots : "peut mettre" sont remplacés par le mot : "met" et les mots : "les titulaires d'autorisation pour l'exploitation d'un service de communication audiovisuelle" sont remplacés par les mots : "les éditeurs et distributeurs de services de radiodiffusion sonore ou de télévision".
« I bis. _ Après les mots : "les associations familiales", la fin du troisième alinéa du même article 42 est ainsi rédigée : "ainsi que les associations ayant dans leur objet social la défense des intérêts des téléspectateurs peuvent demander au Conseil supérieur de l'audiovisuel d'engager la procédure de mise en demeure prévue au premier alinéa du présent article".
« II. _ 1. Au premier alinéa de l'article 42-1 de la même loi, les mots : "Si le titulaire d'une autorisation pour l'exploitation d'un service de communication audiovisuelle ne respecte pas les obligations ci-dessus mentionnées ou" sont remplacés par les mots : "Si un éditeur ou un distributeur de services de radiodiffusion sonore ou de télévision".
« 2. Dans le 1° du même article, les mots : ", après mise en demeure," sont supprimés.
« 3. Le même article est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le Conseil supérieur de l'audiovisuel peut, en outre, prescrire, à un moment de son choix, la suspension de la diffusion du programme pendant une durée comprise entre une à dix minutes, assortie de l'insertion d'un communiqué dans les formes prévues à l'article 42-4. »
« III. _ Au premier alinéa de l'article 42-2 de la même loi, les mots : "par le service autorisé" sont supprimés.
« IV. _ L'article 42-4 de la même loi est ainsi rédigé :
« Art. 42-4 . _ Dans tous les cas de manquement aux obligations incombant aux éditeurs de services de radiodiffusion sonore ou de télévision, le Conseil supérieur de l'audiovisuel peut ordonner l'insertion dans les programmes d'un communiqué dont il fixe les termes et les conditions de diffusion. Cette décision est prononcée après que l'intéressé a été mis en mesure de présenter ses observations dans le délai de deux jours francs et sans que soit mise en oeuvre la procédure prévue à l'article 42-7. Le refus de se conformer à cette décision est passible d'une sanction pécuniaire. »
« V. _ L'article 42-7 de la même loi est ainsi modifié :
« 1° Le deuxième alinéa est supprimé ;
« 2° Dans la première phrase de l'avant-dernier alinéa, les mots : "et le rapport" sont supprimés. »
Par amendement n° 72, M. Hugot, au nom de la commission des affaires culturelles, propose, dans le paragraphe I de cet article, de supprimer les mots : « les mots : "peut mettre" sont remplacés par le mot : "met" et ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Cet amendement revient sur un amendement de l'Assemblée nationale dont l'objet était d'obliger le CSA à lancer la procédure de sanction par une mise en demeure des opérateurs pour tout manquement constaté à leur obligations. Le CSA doit conserver la liberté d'apprécier le degré de gravité d'un manquement justifiant éventuellement le lancement formel de la procédure de sanction.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Le Gourvernement émet un avis favorable. Cet amendement, qui peut paraître rédactionnel, correspond de fait à la suppression de l'automaticité de la mise en demeure par le CSA des chaînes susceptibles d'être sanctionnées, dispositif impossible à mettre en oeuvre par exemple pour des faits continus ou quotidiens et dont la conformité à nos principes généraux du droit n'est pas assurée.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 72, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 73, M. Hugot, au nom de la commission des affaires culturelles, propose de compléter in fine le paragraphe I bis de l'article 28 par un alinéa ainsi rédigé :
« En conséquence, dans le même alinéa, les mots : "ainsi que le Conseil national" sont remplacés par les mots : ", le Conseil national". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 73, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 74, M. Hugot, au nom de la commission des affaires culturelles, propose de supprimer les deux derniers alinéas du II de l'article 28.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Les deux derniers alinéas du II de l'article 28 mettent en place le système improprement dit de « l'écran noir ». L'article 42-4 de la loi de 1986 permet déjà au CSA d'ordonner l'insertion de communiqués dans les programmes. Ils est préférable de préciser sa rédaction plutôt que de créer de nouvelles sanctions.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Favorable, pour les raisons évoquées par M. le rapporteur.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 74, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 133, M. Pelchat propose d'insérer, après le III de l'article 28, un paragraphe ainsi rédigé :
« ... Il est insérer, après le premier alinéa de l'article 42-2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée, un alinéa ainsi rédigé :
« Pour l'application du présent article sont agrégées au montant du chiffre d'affaires l'ensemble des recettes publicitaires provenant de l'activité du service. »
La parole est M. Pelchat.
M. Michel Pelchat. Il s'agit de compléter le dispositif dont dispose jusqu'à présent le CSA pour santionner les radios en cas de non-respect des quotas de diffusion radiophonique. A l'heure actuelle, les seules sanctions que peut appliquer le CSA sont la suspension de la fréquence, ou sa suppression, avec tous les problèmes que cela pose et toute la mobilisation que cela peut provoquer. Par conséquent, je crois nécessaire de prévoir ces sanctions financières.
Nous reparlerons plus tard des radios régionales commerciales et des radios associatives, sachant que les dispositions contenues dans le texte pour les télévisions étaient tout à fait convenables. Nous examinerons donc ultérieurement ce point.
Mais, pour les radios de réseau, les choses sont différentes, parce qu'elles sont souvent financées par des régies qui créent le chiffre d'affaires, les radios couvrant uniquement les dépenses de fonctionnement de leurs émissions et de leur diffusion, ce qui fait que leur chiffre d'affaires est relativement faible par rapport au chiffre d'affaires global.
Il s'agissait donc de déterminer si l'article 42-2 s'applique aux radios et si les dispositions de celui-ci englobent également les régies. J'ai interrogé un certain nombre de conseils juridiques, notamment ceux qui travaillent auprès du CSA, afin de savoir si ces dispositions étaient applicables. On m'a assuré que la rédaction actuelle englobait les régies des radios de réseau dans la sanction financière, qui peut atteindre de 3 % à 5 % de leur chiffre d'affaires en cas de manquements graves, ce qui est convenable. Je pense qu'il y a là une véritable arme dans les mains du CSA pour qu'il puisse faire respecter avec beaucoup de rigueur les quotas que nous avons décidés et que les radios doivent donc appliquer.
Cet amendement va dans le bon sens, je pense, et la question qui était posée est réglée par la rédaction ici proposée, à savoir que l'on peut agglomérer les régies aux diffuseurs.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Notre collègue a fait un travail important, mais la commission n'a pas eu le temps de s'assurer d'avoir une vue précise de la portée pratique de cette proposition. Elle a donc émis un avis défavorable sur cet amendement, qui pourrait tendre à augmenter dans des proportions difficiles à préciser l'assiette à partir de laquelle peut être fixé le montant des sanctions pécuniaires infligées aux opérateurs privés de la communication audiovisuelle.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Pour le coup, je ne rejoins pas l'avis de M. le rapporteur. En effet, au nom du Gouvernement, je suis favorable à cet amendement, car je considère que cette disposition permettra effectivement de rendre plus efficace la sanction pécuniaire.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Je vois dans les propos du Gouvernement une partie des assurances que nous attendions. Je peux donc changer de point de vue : je suis maintenant favorable à cet amendement.
MM. Jacques Machet et Michel Pelchat. Très bien !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 133, accepté par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 75, M. Hugot, au nom de la commission des affaires culturelles, propose, dans la première phrase du texte présenté par le IV de l'article 28 pour l'article 42-4 de loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, après les mots : « les termes », d'insérer les mots : « , la durée ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Cet amendement vise à préciser la rédaction actuelle de l'article 42-4 de la loi de 1986, afin d'étendre sa portée et de rendre inutile la mise en place du dispositif de l'écran noir.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 75, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 76 rectifié, M. Hugot, au nom de la commission des affaires culturelles, propose de remplacer la deuxième phrase du texte présenté par le IV de l'article 28 pour l'article 42-4 de la loi du 30 décembre 1986 par deux phrases ainsi rédigées :
« Le Conseil supérieur de l'audiovisuel invite la société à lui présenter ses observations en lui indiquant qu'elle bénéficie d'un délai de deux jours francs pour ce faire, à compter de la réception de cette invitation. La décision est alors prononcée sans que soit mise en oeuvre la procédure prévue à l'article 42-7. »
Par amendement n° 234, Mme Pourtaud, MM. Dreyfus-Schmidt, Collomb, Lagauche, Weber et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de remplacer la deuxième phrase du texte présenté par le IV de l'article 28 pour l'article 42-4 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 par deux phrases ainsi rédigées :
« Le Conseil supérieur de l'audiovisuel invite l'intéressé à lui présenter ses observations en lui indiquant qu'il bénéficie d'un délai de deux jours francs pour ce faire, à compter de la réception de cette invitation. La décision est alors prononcée sans que soit mise en oeuvre la procédure prévue à l'article 42-7. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 76 rectifié.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Cet amendement a été rectifié pour tenir compte de l'avis favorable donné par la commission sur l'amendement n° 234. Nous proposons cependant une rédaction plus précise de l'article 42-4, qui permet au CSA d'ordonner l'insertion de communiqués dans les programmes.
M. le président. La parole est à Mme Pourtaud, pour défendre l'amendement n° 234. Celui-ci et l'amendement de la commission sont presque identiques. En effet, le vôtre, madame Pourtaud, prévoit que « l'intéressé » présente ses observations, alors que celui de la commission dispose qu'il s'agit de « la société ».
Mme Danièle Pourtaud. L'importance de cet amendement n° 234 tient au fait qu'il permet de rendre opérationnelle une disposition visant effectivement à donner au CSA un pouvoir de sanction. La rédaction actuelle prévoit que la société qui serait victime de la sanction peut faire connaître ses observations au CSA, mais elle ne précise pas le point de départ du délai qui lui est accordé pour ce faire. Afin de rendre le dispositif opérationnel, il nous a paru nécessaire de préciser le point de départ du délai.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Compte tenu de la rectification de l'amendement n° 76, je demande à Mme Pourtaud de bien vouloir retirer l'amendement n° 234.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 76 rectifié et 234 ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Il n'est à mon avis pas indifférent d'employer les termes « la société » ou « l'intéressé ». En effet, la Haute Assemblée s'est prononcée favorablement sur la possibilité pour les associations de créer des télévisions locales. S'il y a de nouvelles formes, il s'agit bien d'« intéressés », ce qui permet d'ouvrir une possibilité à la fois aux sociétés et aux associations. C'est la raison pour laquelle l'amendement n° 234 me paraît plus cohérent que l'amendement n° 76 rectifié avec l'existence des deux cadres dans lesquels peuvent se développer les télévisions locales.
Le Gouvernement émet donc un avis favorable sur l'amendement n° 234 et demande le retrait de l'amendement n° 76 rectifié.
M. le président. Monsieur le rapporteur, l'amendement n° 76 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. La commission, considérant que l'on peut effectivement, en la matière, retenir le texte dont la portée est la plus large, retire l'amendement n° 76 rectifié.
M. le président. L'amendement n° 76 rectifié est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 234, accepté par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 77, M. Hugot, au nom de la commission des affaires culturelles, propose de compléter in fine le V de l'article 28 par deux alinéas ainsi rédigés :
« 3° Dans la première phrase de l'avant-dernier alinéa, les mots : "au titulaire de l'autorisation" sont remplacés par les mots : "à l'éditeur ou au distributeur du service de radiodiffusion sonore ou de télévision".
« 4° Dans le dernier alinéa de cet article, remplacer les mots : "le titulaire de l'autorisation" par les mots : "l'éditeur ou le distributeur de services". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. C'est un amendement de coordination qui tend à réparer ce qui nous semble un oubli du projet de loi.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 77, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 78, M. Hugot, au nom de la commission des affaires culturelles, propose de compléter in fine l'article 28 par un paragraphe ainsi rédigé :
« VI. - Au début de l'article 42-8 de la même loi, les mots : "le titulaire de l'autorisation pour l'exploitation d'un service de communication audiovisuelle" sont remplacés par les mots : "l'éditeur ou le distributeur de services de radiodiffusion sonore ou de télévision". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Il s'agit là encore d'un amendement de coordination visant à réparer un oubli du projet de loi.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 78, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 28, modifié.

(L'article 28 est adopté.)

Article 28 bis



M. le président.
« Art. 28 bis . _ I. _ Le début de l'article 48-2 de la même loi est ainsi rédigé : "Si une société nationale de programme ou la société mentionnée à l'article 45, pour l'exercice de la mission prévue au a de cet article, ne se conforme pas aux mises en demeure qui lui ont été adressées, le Conseil supérieur de l'audiovisuel peut prononcer à son encontre la suspension d'une partie du programme... (le reste sans changement)."
« II. _ Après la première phrase de l'article 48-3 de la même loi, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
« Cette décision est prononcée après que la société a été mise en mesure de présenter ses observations dans le délai de deux jours francs et sans que soit mise en oeuvre la procédure prévue à l'article 48-6. »
« III. _ Le deuxième alinéa de l'article 48-6 de la même loi ainsi que, dans le troisième alinéa, les mots : "et le rapport" sont supprimés. »
Par amendement n° 79, M. Hugot, au nom de la commission des affaires culturelles, propose de rédiger ainsi le II de l'article 28 bis :
« II. - Dans l'article 48-3 de la même loi, après les mots : "les termes", sont insérés les mots : ", la durée". »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 235 rectifié, présenté par Mme Pourtaud, MM. Dreyfus-Schmidt, Collomb, Lagauche, Weber et les membres du groupe socialiste et apparentés, et tendant à compléter le texte proposé par l'amendement n° 79 pour le II de l'article 28 bis par deux alinéas ainsi rédigés :
« Après la première phrase du même article, sont insérées trois phrases ainsi rédigées :
« Le Conseil supérieur de l'audiovisuel invite la société à lui présenter ses observations en lui indiquant qu'elle bénéficie d'un délai de deux jours francs pour ce faire, à compter de la réception de cette invitation. La décision est alors prononcée sans que soit mise en oeuvre la procédure prévue à l'article 48-6. Le refus de se conformer à cette décision est passible d'une sanction pécuniaire dans les limites définies à l'article 42-2. »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 79.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Cet amendement vise à appliquer aux télévisions et radios publiques la précision rédactionnelle prévue par un amendement précédent pour la procédure qui permet au CSA de faire insérer des communiqués dans les programmes de service privé.
M. le président. La parole est à Mme Pourtaud, pour défendre le sous-amendement n° 235 rectifié.
Mme Danièle Pourtaud. Ce sous-amendement tend à reprendre exactement les dispositions dont nous venons de parler ; il me semble donc inutile de le développer plus avant.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 235 rectifié ?
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 79 et sur le sous-amendement n° 235 rectifié ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 235 rectifié, accepté par la commission et par le Gouvernement.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, l'amendement n° 79, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 28 bis, ainsi modifié.

(L'article 28 bis est adopté.)

Article 29



M. le président.
« Art. 29. _ I. _ Il est inséré, après le troisième alinéa de l'article 78 de la même loi, un 3° ainsi rédigé :
« 3° Sans avoir conclu avec le Conseil supérieur de l'audiovisuel la convention prévue à l'article 33-1. »
« II. _ Il est inséré, dans la même loi, un article 78-2 ainsi rédigé :
« Art. 78-2 . _ Le fait, pour un dirigeant de droit ou de fait d'une entreprise distribuant par satellite une offre comportant des services de radiodiffusion sonore ou de télévision d'exercer cette activité sans avoir procédé à la déclaration prévue à l'article 34-2 ou de s'abstenir de porter à la connaissance du Conseil supérieur de l'audiovisuel les modifications prévues au troisième alinéa du même article est puni d'une amende de 500 000 francs ; en cas de récidive, cette peine est portée à un million de francs. »
Par amendement n° 80, M. Hugot, au nom de la commission des affaires culturelles, propose d'ajouter, avant le I de cet article, un paragraphe I A ainsi rédigé :
« I A. - Dans le premier alinéa de l'article 78 de la même loi, après les mots : "service de communication audiovisuelle" sont insérés les mots : "ou d'un organisme distribuant une offre de services de communication audiovisuelle". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination avec la mise en place d'un régime juridique de la diffusion numérique de terre.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Défavorable.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 80.
Mme Danièle Pourtaud. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Pourtaud.
Mme Danièle Pourtaud. Monsieur le président, nous avons dit, au début de la discussion des amendements concernant le régime numérique terrestre, que nous nous abstiendrions, puisque nous souhaitons pouvoir examiner l'ensemble d'un dispositif cohérent lorsque le Gouvernement aura présenté son texte.
M. Louis de Broissia. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. de Broissia. M. Louis de Broissia. Contrairement à la position exprimée par Mme Pourtaud, nous soutenons dès à présent la mise en place du réseau numérique hertzien terrestre, considérant qu'il ne faut pas attendre pour ce faire la deuxième ou la troisième lecture. Nous disposons d'ores et déjà d'un rapport, celui de M. Hadas-Lebel, que j'ai enfin pu obtenir : je vais passer une nuit sympathique en le lisant. (Sourires.)
Je voterai donc les dispositions proposées par la commission, que je soutiens jusqu'au bout.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 80, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 81, M. Hugot, au nom de la commission des affaires culturelles, propose, dans le second alinéa (3°) du paragraphe I de l'article 29, après les mots : « la convention prévue », d'insérer les mots : « au II de l'article 28 ou ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. C'est également un amendement de coordination avec la création du régime juridique de la diffusion numérique de terre.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Défavorable, par coordination.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 81, repoussé par le Gouvernement.
Mme Danièle Pourtaud. Le groupe socialiste s'abstient.
M. Jack Ralite. Le groupe communiste républicain et citoyen s'abstient également.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 82, M. Hugot, au nom de la commission des affaires culturelles, propose de compléter le texte présenté par le paragraphe II de l'article 29 pour l'article 78-2 de la même loi par un alinéa ainsi rédigé :
« Le fait, pour le dirigeant de droit ou de fait d'un organisme distribuant par voie hertzienne terrestre une offre de services de communication audiovisuelle, de s'abstenir de porter à la connaissance du Conseil supérieur de l'audiovisuel les modifications mentionnées au paragraphe IV de l'article 30-1 ou de procéder à ces modifications en dépit de l'opposition du Conseil, est puni d'une amende de 500 000 francs ; en cas de récidive, cette peine est portée à un million de francs. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Cet amendement vise à étendre aux distributeurs de services en numérique de terre les dispositions pénales instituées par le projet de loi pour sanctionner les modifications de l'offre qui seraient effectuées sans informer le CSA ou malgré son opposition.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Défavorable, par coordination.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 82, repoussé par le Gouvernement.
Mme Danièle Pourtaud. Le groupe socialiste s'abstient.
M. Jack Ralite. Le groupe communiste républicain et citoyen s'abstient également.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 29, modifié.

(L'article 29 est adopté.)

Article 29 bis



M. le président.
« Art. 29 bis . _ Dans la même loi, il est inséré un article 31 ainsi rédigé :
« Art. 31 . _ Le Conseil supérieur de l'audiovisuel autorise, après appels à candidatures, l'usage de fréquences afférentes à la diffusion par voie hertzienne terrestre en mode numérique.
« Les conditions d'application du présent article sont fixées par décret. »
Par amendement n° 83, M. Hugot, au nom de la commission des affaires culturelles, propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. C'est là encore un amendement de coordination avec la création d'un régime juridique de la diffusion numérique de terre.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Les députés, désireux que les modalités de passage à la télévision numérique de terre figurent dans la loi, ont introduit cet article.
La commission des affaires culturelles du Sénat a présenté un dispositif d'encadrement de ce passage. Il est donc logique qu'elle souhaite la suppression de l'article 29.
Pour ma part, je réaffirme que j'entends présenter, en deuxième lecture, un dispositif nouveau sur le numérique hertzien terrestre. Je m'en remets donc à la sagesse du Sénat sur l'amendement n° 83.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 83, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 29 bis est supprimé.

Article 29 ter



M. le président.
« Art. 29 ter . _ L'article 79 de la même loi est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Seront punis d'une amende de 120 000 francs les personnes physiques et les dirigeants de droit ou de fait des personnes morales qui auront fourni des informations inexactes dans le cadre des obligations prévues aux articles 27 et 33 de la présente loi. »
Par amendement n° 84, M. Hugot, au nom de la commission des affaires culturelles, propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Les articles 27 et 33 ne prévoient pas d'obligation d'information mais fixent la liste des obligations qui seront imposées par décret aux services diffusés par voie hertzienne ou distribués par le câble. Il serait inopportun, voire inconstitutionnel, de sanctionner pénalement une obligation d'information non expressément définie par la loi.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Sur cet amendement tendant à supprimer l'infraction de fourniture d'informations inexactes au CSA par l'ensemble des éditeurs, infraction qui est redondante avec le droit pénal, le Gouvernement s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 84, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 29 ter est supprimé.

Article additionnel après l'article 29 ter



M. le président.
Par amendement n° 134, M. Pelchat propose d'insérer, après l'article 29 ter , un article additionnel ainsi rédigé :
« Au deuxième alinéa (1°) de l'article 79 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, les mots : "aux articles 27" sont remplacés par les mots "à l'article 27, au 2° bis de l'article 28 et aux articles". »
La parole est à M. Pelchat.
M. Michel Pelchat. Je me suis expliqué tout à l'heure à propos des radios de réseau. Je précise donc simplement que l'amendement n° 34 tend à compléter les sanctions financières pour les radios associatives et les radios commerciales régionales. Ces sanctions, comme pour les télévisions, pourront s'échelonner de 6 000 francs à 500 000 francs, la décision du CSA dépendant des moyens des radios devant être sanctionnées et de la gravité du non-respect des dispositions législatives. Cet amendement vise donc à compléter celui que nous avons adopté tout à l'heure pour deux autres catégories de radios.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement. Il est en effet opposé à la criminalisation du non-respect des quotas radiophoniques. Vous connaissez, en la matière, l'inévitable complexité du dispositif, qui tient à la diversité du format des radios elles-mêmes, et que l'on ne retrouve pas pour les quotas télévisuels. Ces quotas et leurs modulations, qui sont intégrés dans les conventions passées entre le CSA et les radios, appellent logiquement une sanction conventionnelle. C'est la raison pour laquelle le dispositif de sanction administrative, confié au CSA, me semble nettement plus justifié qu'une sanction pénale.
En outre, la rédaction de cet amendement n'est pas satisfaisante ; si ce texte était adopté, le début du deuxième alinéa de l'article 79 se lirait ainsi : « quiconque aura méconnu des dispositions des décrets prévues à l'article 27, au 2° bis de l'article 28... » alors qu'il s'agit en l'espèce non pas d'un décret mais d'une simple obligation conventionnelle.
Tels sont les motifs pour lesquels j'émets, au nom du Gouvernement, un avis défavorable sur l'amendement n° 134.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 134.
M. Michel Pelchat. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Pelchat.
M. Michel Pelchat. Madame la ministre, je veux bien admettre le bien-fondé de votre observation relative au fait qu'il s'agit non pas d'un décret, mais d'une convention signée entre les radios et le CSA. Je pense néanmoins que la deuxième lecture devrait permettre de rectifier ce point.
Actuellement, le CSA est complètement démuni ; il ne dispose, comme je le faisais remarquer tout à l'heure, que de la possibilité de suspendre la fréquence, avec les conséquences qu'une telle décision engendre. Je ne ferai qu'évoquer, à cet égard, les cas de certaines radios associatives au cours des deux dernières années et la disproportion entre les dérives constatées et les sanctions de suspension de la fréquence. Le CSA reconnaît d'ailleurs lui-même le caractère inadapté de ces sanctions et souhaite que des sanctions pécuniaires plus adéquates que la simple suspension de fréquence soient prévues à l'encontre des radios.
Ce principe de sanction financière - 6 000 francs à 50 000 francs - s'adapte parfaitement bien, à mon avis, à l'ensemble des diffuseurs concernés, des radios associatives aux radios régionales commerciales, et complète les dispositions visant les radios de réseaux qui, elles, subiront les sanctions financières que nous avons décidées tout à l'heure avec, d'ailleurs, votre avis favorable, madame la ministre.
Je souhaite donc que le Sénat adopte cet amendement.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 134, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 29 ter .

TITRE IV

Dispositions diverses et transitoires

Articles additionnels avant l'article 30



M. le président.
Par amendement n° 170 rectifié, MM. Diligent, Richert, Hérisson et Branger proposent d'insérer, avant l'article 30, un article additionnel ainsi rédigé :
« Tout produit audiovisuel, quels qu'en soient la nature, le support, la durée et la dénomination, donne lieu pour sa réalisation, de la part de tout employeur, à l'établissement exclusif d'un contrat de travail de réalisateur à objet et à durée déterminés ou à durée indéterminée ; elle est rémunérée intégralement par un salaire. »
La parole est à M. Diligent.
M. André Diligent. Cet amendement, ainsi que le suivant, vise à attirer l'attention sur la profession de réalisateur.
La réalisation est en effet, actuellement, l'un des fondements de l'industrie cinématographique et télévisuelle. Or, le métier de réalisateur est véritablement dans le brouillard : soixante procès ont eu lieu récemment pour essayer de trouver une jurisprudence.
L'un des problèmes, notamment, est celui des salaires : nombre de réalisateurs sont rémunérés sous forme de droits d'auteur et perdent ainsi le bénéfice social qu'ils avaient auparavant. L'amendement n° 170 rectifié vise donc à ce qu'ils soient rémunérés par le versement d'un salaire.
Le Gouvernement s'honorerait par ailleurs en engageant une concertation avec les représentants de la profession, en déposant un rapport dans les prochains mois en vue d'éclairer les esprits sur des difficultés qui n'avaient pas été prévues voilà un certain nombre d'années, et en déposant un projet de loi instaurant une convention collective nationale de cette profession. Tel est l'objet de l'amendement n° 171 rectifié qui viendra ensuite en discussion.
Il nous faut, à mon avis, profiter de la discussion de ce projet de loi pour éclairer une profession qui est en plein désarroi, malgré tous les mérites qu'elle a et les services qu'elle rend.
MM. Michel Pelchat et Louis de Broissia. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. La commisson s'en remet à la sagesse du Sénat sur cet amendement, qui n'a manifestement pas l'ambition de créer un statut législatif du réalisateur ni d'aboutir à l'inscription de dispositions nouvelles dans la loi de 1986, mais qui a le grand mérite de poser devant le Parlement les problèmes que connaît la profession de réalisateur.
Madame la ministre, il serait utile que le Gouvernement éclaire le Sénat sur la façon dont il envisage l'avenir d'un métier qui semble confronté à de graves problèmes, provoqués notamment par l'évolution des techniques.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Je suis sensible aux motifs du dépôt de cet amendement, qui vise à assurer aux réalisateurs une situation juridiquement et économiquement plus favorable qu'elle ne l'est actuellement.
Certains producteurs, jouant sur la double qualité d'auteur au sens du code de la propriété intellectuelle et de technicien, au sens du code du travail, ont tendance, semble-t-il, à ne pas verser le salaire que le réalisateur est en droit d'attendre de cette seconde qualité. Ils qualifient l'ensemble de la rémunération de « droits d'auteur », lesquels droits étant, chacun le sait, liés aux aléas du succès.
Toutefois, il me semble que la réponse se trouve dans l'application du code du travail, sans qu'il soit besoin d'inclure dans la loi de 1986 une nouvelle disposition. De surcroît, la rédaction proposée me paraît contraire aux intérêts des auteurs. En effet, il est fait mention de l'établissement exclusif d'un contrat de travail et d'une rémunération intégrale sous forme de salaire, ce qui pourrait être interprété comme la possibilité de ne plus faire référence, dans les relations entre le producteur et le réalisateur, aux règles prévues par le code de la propriété intellectuelle, qui prévoit une rémunération liée aux recettes de l'oeuvre et à laquelle nombre de réalisateurs ne sauraient, à juste titre, renoncer.
Je ne peux donc qu'être défavorable à cet amendement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 170 rectifié.
M. André Diligent. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Diligent.
M. André Diligent. Madame le ministre, vos explications sont sans doute justes, et le rapport dont je souhaite l'élaboration permettra précisément de le démontrer : toute la lumière sera faite.
Par conséquent, nous ne risquons rien en votant cet amendement !
M. Michel Pelchat. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Pelchat.
M. Michel Pelchat. Je remercie notre collègue André Diligent d'avoir déposé cet amendement car, effectivement, la profession de réalisateur souffre d'un vrai malaise.
Certes, je ne méconnais pas le risque que Mme le ministre vient de nous exposer : les donneurs d'ordre auront tendance à tout inclure dans la rémunaration forfaitaire et à supprimer les droits d'auteur, ce qui, en cas de succès, engendrera effectivement un préjudice important pour les intéressés.
Dans ces conditions, une rédaction précise devrait permettre d'éviter ce risque tout en prévoyant une rémunération salariale au réalisateur quel que soit le succès, quels que soient les éventuels droits ultérieurs, qu'il faut préserver.
Je voterai donc l'amendement de M. Diligent, afin qu'une solution convenable soit trouvée face au malaise de la profession, les réalisateurs devant pouvoir continuer d'exercer leur travail dans notre pays.
M. Jacques Machet. Très bien !
M. Louis de Broissia. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est M. de Broissia.
M. Louis de Broissia. Comme M. Pelchat, je remercie notre collègue M. Diligent d'avoir déposé cet amendement. J'avais d'ailleurs envisagé de proposer moi-même un tel dispositif, mais je ne l'ai pas fait lorsque l'amendement de M. Diligent m'a été transmis.
Dans la mesure où nous examinons un projet de loi sur la communication audiovisuelle, il est tout à fait légitime que nous nous penchions sur le malaise que connaissent les réalisateurs en France, mais aussi en Europe.
L'explication de Mme le ministre est effectivement tout à fait justifiée : le code du travail répond en large partie à ce problème. Néanmoins, je reste un peu sur ma faim et le rapport souhaité par M. Diligent pourrait nous éclairer non seulement sur la question délicate des droits des auteurs, des interprètes, des artistes, des solistes, mais aussi sur la situation exacte des réalisateurs.
Nous avons été très largement sollicités depuis au moins une dizaine d'années sur ce sujet. J'aimerais donc que ce rapport soit établi, tant sur le plan français que sur le plan européen.
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. La rédaction de cet amendement n'est pas claire. En effet, dans la quatrième et dernière ligne, il est indiqué : « elle est rémunérée intégralement par un salaire ». Je vois pas bien à quoi ce pronom féminin se rapporte !
M. André Diligent. C'est la parité ! (Sourires.)
M. Michel Pelchat. A la réalisation !
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Si la réalisation est rémunérée intégralement par un salaire, cela supprime les droits d'auteur !
M. Henri Weber. Absolument !
M. André Diligent. Dans ces conditions, supprimons le mot : « intégralement » !
M. Michel Pelchat. Et écrivons : « notamment » !
M. André Diligent. Oui ! Je rectifie mon amendement dans ce sens, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 170 rectifié bis, présenté par MM. Diligent, Richert, Hérisson et Branger, et tendant à insérer, avant l'article 30, un article additionnel ainsi rédigé :
« Tous produit audiovisuel, quels qu'en soient la nature, le support, la durée et la dénomination, donne lieu, pour sa réalisation, de la part de tout employeur, à l'établissement exclusif d'un contrat de travail de réalisateur à objet et à durée déterminés ou à durée indéterminée ; cette réalisation est rémunérée notamment par un salaire. »
Quel est l'avis de la commission après cette rectification ?
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. La commission ne modifie pas son avis : elle s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Le Gouvernement demeure défavorable à cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 170 rectifié bis , repoussé par le Gouvernement et pour lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 30.
Par amendement n° 171 rectifié, MM. Diligent, Richert, Hérisson et Branger proposent d'insérer, avant l'article 30, un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans un délai de trois mois à compter de la publication de la présente loi, le Gouvernement remettra au Parlement un rapport sur la situation des réalisateurs et présentera un projet de loi relatif au statut du réalisateur et instaurant une convention collective nationale de cette profession. »
M. Diligent a déjà défendu cet amendement précédemment.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement. L'injonction qui est faite au Gouvernement de déposer un projet de loi n'apparaît pas conforme à la Constitution.
Cela étant, la commission pourrait reconsidérer sa position si M. Diligent se contentait de demander un rapport et non le dépôt d'un projet de loi.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Je n'ignore pas que la revendication d'un statut législatif pour la profession de réalisateur est récurrente. J'ai déjà eu l'occasion, d'ailleurs, de me prononcer à plusieurs reprises sur ce sujet, notamment en réponse à une question écrite en juin 1999.
Je rappelle toutefois que l'édiction d'un statut législatif au bénéfice d'une catégorie de professionnels déterminée doit rester une procédure exceptionnelle, motivée par la nature particulière du travail ou par des considérations d'intérêt général.
Par ailleurs, comme je l'ai précédemment expliqué, diverses dispositions législatives prennent déjà en compte la situation du réalisateur audiovisuel.
S'agissant du problème de la convention collective, je rappelle que, s'il appartient à la loi de déterminer les règles de la négociation collective et le régime juridique des conventions qui en sont issues, la loi ne saurait aller au-delà et instaurer une telle convention.
J'ajoute que des négociations ont été engagées entre les partenaires concernés pour l'élaboration d'une convention nationale des techniciens de la production audiovisuelle, qui intéresse directement les réalisateurs.
Enfin, M. le rapporteur a lui-même indiqué que cet amendement comportait une injonction du législateur au Gouvernement, et je ne peux donc qu'y être défavorable, ne serait-ce que pour cette dernière raison.
M. le président. Monsieur Diligent, Mme le ministre n'a pas invoqué l'article 41 de la Constitution, mais, si elle le faisait, je serais obligé de consulter M. le président du Sénat, et donc de suspendre la séance dans l'attente de sa réponse.
Dans ces conditions, acceptez-vous de rectifier votre amendement ?
M. André Diligent. Je ne voudrais pas prolonger ce débat et mettre mes collègues dans l'embarras !
Par conséquent, j'accepte de rectifier mon amendement.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 171 rectifié bis, présenté par MM. Diligent, Richert, Hérisson et Branger, et tendant à insérer, avant l'article 30, un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans un délai de trois mois à compter de la publication de la présente loi, le Gouvernement remettra au Parlement un rapport sur la situation des réalisateurs. »
Quel est l'avis de la commission compte tenu de cette rectification ?
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 171 rectifié bis, accepté par la commission et pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. Michel Pelchat. Très bien !
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 30.
(M. Guy Allouche remplace M. Paul Girod au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. GUY ALLOUCHE,
vice-président

Article 30



M. le président.
« Art. 30. _ I. _ Au 1° de l'article 10 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée, les mots : "aux articles 25 et 31" sont remplacés par les mots : "aux articles 25 et 33-2".
« II. _ Au dernier alinéa de l'article 12 de la même loi, les mots : "mentionnés aux articles 24, 25 et 31" sont remplacés par les mots : "diffusés par voie hertzienne terrestre ou par satellite".
« III. _ L'article 24 de la même loi est abrogé.
« III bis. _ Dans le premier alinéa de l'article 27 de la même loi, après les mots : "voie hertzienne terrestre", sont insérés les mots : "en mode analogique".
« III ter. _ Dans le premier alinéa de l'article 28 de la même loi, après les mots : "voie hertzienne terrestre", sont insérés les mots : "en mode analogique".
« III quater . _ Dans le premier alinéa de l'article 29 de la même loi, après les mots : "voie hertzienne terrestre", sont insérés les mots : "en mode analogique".
« III quinquies . _ Dans le premier alinéa de l'article 30 de la même loi, après les mots : "voie hertzienne terrestre", sont insérés les mots : "en mode analogique".
« IV. _ Au premier alinéa de l'article 33-1 de la même loi, les mots : "en application des articles 29, 30, 31 et 65" sont remplacés par les mots : "en application des articles 29 et 30".
« V. _ A l'article 33-3 de la même loi, les mots : "à l'article 34-1" sont remplacés par les mots : "à l'article 33-1".
« VI. _ Dans le troisième alinéa (2° ) de l'article 43 de la même loi, les mots : "aux articles 34 et 34-1" sont remplacés par les mots : "aux articles 33-1 et 34".
« VII. _ Au premier alinéa de l'article 70 de la même loi, les mots : "en application des articles 30, 31 et 65" sont remplacés par les mots : "en application de l'article 30".
« VIII. _ Au deuxième alinéa de l'article 78-1 de la même loi, les mots : "quatrième alinéa de l'article 34" sont remplacés par les mots : "sixième alinéa de l'article 34".
« IX. _ A l'article 4 de la loi n° 96-299 du 10 avril 1996 relative aux expérimentations dans le domaine des technologies et services de l'information, les mots : "à l'article 34-1" sont remplacés par les mots : "à l'article 33-1".
« X. _ Au premier alinéa de l'article 5 de la loi n° 96-299 du 10 avril 1996 précitée, les mots : "aux articles 28 et 34-1" sont remplacés par les mots : "aux articles 28 et 33-1".
« XI. _ Les articles 26 et 27 de la loi n° 89-25 du 17 janvier 1989 modifiant la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication sont abrogés. »
Par amendement n° 85, M. Hugot, au nom de la commission des affaires culturelles, propose de supprimer le III bis de cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination avec la création d'un régime juridique de la diffusion hertzienne de terre.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Défavorable, par coordination.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 85, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 86, M. Hugot, au nom de la commission des affaires culturelles, propose de supprimer le III ter de l'article 30.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Il s'agit encore d'un amendement de coordination avec la création d'un régime juridique de la diffusion hertzienne de terre.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Défavorable, par coordination.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 86, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 87, M. Hugot, au nom de la commission des affaires culturelles, propose de supprimer le III quater de l'article 30.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Même objet, monsieur le président.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 87, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 88, M. Hugot, au nom de la commission des affaires culturelles, propose de supprimer le III quinquies de l'article 30.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Il s'agit également d'un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 88, repoussé par le gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 89, M. Hugot, au nom de la commission des affaires culturelles, propose de rédiger ainsi le IV de l'article 30 :
« IV. - Au premier alinéa de l'article 33-1 de la même loi, les mots : "en application des articles 29, 30, 31 et 65" sont remplacés par les mots : "en application des articles 29, 30 et 33-2". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Il s'agit encore d'un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Cette fois-ci, le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 89, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 259, MM. Valade, Gouteyron, Huriet, Hugot, Collin, Gerbaud, Nachbar et Richert proposent d'insérer, après le paragraphe VI de l'article 30, un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... La première phrase de l'article 45-3 de la même loi est ainsi rédigée : "Sauf opposition des organes dirigeants des sociétés de programme mentionnées à l'article 45-2, tout distributeur de services est tenu de diffuser, à ses frais, les programmes de La Chaîne Parlementaire.". »
La parole est à M. Gouteyron.
M. Adrien Gouteyron. Je suis cosignataire de cet amendement avec un certain nombre de nos collègues, dont le président Valade.
Il s'agit d'opérer une coordination entre la loi du 30 décembre 1999, qui crée La Chaîne Parlementaire, et le présent projet de loi : l'article 25 comportant une définition de la notion de distributeur de services, il n'est plus nécessaire de faire figurer cette définition dans la loi de 1986.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 259, accepté par la commission et pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 90, M. Hugot, au nom de la commission des affaires culturelles, propose de rédiger ainsi le VII de l'article 30 :
« VII. - Au premier alinéa de l'article 70 de la loi du 30 septembre 1986 précitée, les mots : "en application des articles 30, 31 et 65" sont remplacés par les mots : "en application des articles 30 et 33-2". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 90, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 91, M. Hugot, au nom de la commission des affaires culturelles, propose de rédiger ainsi le VIII de l'article 30 :
« VIII. - Au deuxième alinéa de l'article 78-1 de la loi du 30 septembre 1986 précitée, les mots : "quatrième alinéa de l'article 34" sont remplacés par les mots : "cinquième alinéa de l'article 34". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 91, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 30, modifié.

(L'article 30 est adopté.)

Article additionnel après l'article 30



M. le président.
Par amendement n° 236, Mme Pourtaud, MM. Dreyfus-Schmidt, Collomb, Lagauche, Weber et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, d'insérer après l'article 30, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 22 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée est complété in fine par un alinéa ainsi rédigé :
« Jusqu'au 30 juin 2001, le Conseil supérieur de l'audiovisuel n'est pas tenu de lancer des appels à candidatures pour les fréquences disponibles lorsque, conformément aux dispositions du deuxième alinéa de l'article 1er, leur attribution risquerait d'entraver les expérimentations ou la mise en place de la diffusion numérique hertzienne terrestre. »
La parole est à M. Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je ne voudrais pas que la rédaction de l'objet de notre amendement puisse introduire un doute dans l'esprit de certains.
En effet, nous avons écrit : « Il convient de permettre au CSA de procéder à un gel des fréquences disponibles afin de ne pas créer des situations acquises interdisant l'arrivée de nouveaux entrants lors de la mise en place de la télévision numérique hertzienne terrestre. »
Nous savons tous de quoi il s'agit : si une fréquence analogique est libérée, le CSA se trouve dans l'obligation de faire appel à candidatures en application d'une jurisprudence du Conseil d'Etat, mais nullement en application de la loi. Or il est évident que le CSA doit recouvrer sa liberté et ne pas faire appel, éventuellement, à candidatures, non pas peut-être pour une télévision locale et associative qui ne gênerait personne en diffusant quelques heures pour une durée de six mois, mais, par exemple, pour certains qui voudraient s'installer dans le paysage audiovisuel sachant que le Conseil supérieur de la magistrature... (Exclamations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Louis de Broissia. Le Conseil supérieur de l'audiovisuel !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Pardonnez-moi ce lapsus, mes chers collègues, mais j'ai du mal à « digérer » la manière dont le Congrès a été décommandé lundi dernier ! (Sourires.)
Le Conseil supérieur de l'audiovisuel donc devrait définir une politique d'ensemble en attendant le numérique. En effet, à l'évidence, celui qui détiendrait une fréquence analogique prétendrait ensuite avoir une priorité pour obtenir une fréquence numérique. Il faut rendre au CSA la liberté qui était la sienne et qu'est venue restreindre la décision du Conseil d'Etat que vous connaissez.
Sachant que vous êtes de fervents partisans de la liberté d'appréciation du Conseil supérieur de l'audiovisuel, je ne doute pas que vous réserviez à notre amendement le succès qu'il mérite.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. L'objectif de cet amendement est de renverser la jurisprudence du Conseil d'Etat « SARL JL Electronic » du 29 juillet 1998. Elaborée à l'occasion des contestations touchant le gel des fréquences affectables à la télévision analogique locale de terre, cette jurisprudence oblige le CSA à lancer des appels à candidatures pour les fréquences vacantes en dehors de tout plan d'ensemble.
La liberté d'action n'est cependant rendue au CSA par cet amendement que dans l'intention de lui permettre de procéder à un gel des fréquences disponibles afin de ne pas gêner l'arrivée de nouveaux entrants lors de la mise en place de la télévision numérique hertzienne de terre, comme l'explique l'objet de l'amendement n° 236.
Du fait de cet objectif restreint, cet amendement apparaît susceptible de justifier le gel des fréquences analogiques nécessaires au lancement du projet de déploiement d'une quinzaine de télévisions d'agglomération soutenu par la presse quotidienne régionale, et auquel la commission des affaires culturelles a apporté son soutien.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Le Gouvernement était défavorable à cet amendement, mais la défense qui vient d'en être faite apporte un éclairage différent.
Cela étant, même si je comprends le souci de Mme Pourtaud, qui craint que le CSA ne soit juridiquement contraint, conformément à la jurisprudence du Conseil d'Etat, de lancer des appels à candidatures pour des fréquences analogiques - même dans le cas où ce serait au détriment des nécessités futures du déploiement du numérique - tant que la planification des fréquences ne sera pas plus avancée nous ne saurons pas si ce risque est avéré. En conséquence, cette disposition, de nature temporaire, pourrait n'avoir aucun objet.
En outre, il paraît de mauvaise technique juridique qu'un article particulier de la loi vienne modifier l'article 1er de cette même loi, qui a un caractère fondamental puisqu'il détermine les limites légitimes pouvant être apportées par le CSA à la liberté de communication. L'objectif visé devrait être atteint par une modification directe de l'article 1er.
Le Gouvernement est donc défavorable à l'amendement n° 236 tel qu'il est actuellement rédigé.
M. le président. Madame Pourtaud, votre amendement est-il rectifié ainsi que vous le suggère Mme le ministre ? Mme Danièle Pourtaud. Monsieur le président, après avoir entendu les remarques de Mme la ministre, je rectifie l'amendement n° 236 afin de remplacer les mots « L'article 22 » par les mots « Le deuxième alinéa de l'article 1er ».
Par ailleurs, je supprime les mots : « , conformément aux dispositions du deuxième alinéa de l'article premier,... »
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 236 rectifié, présenté par Mme Pourtaud, MM. Dreyfus-Schmidt, Collomb, Lagauche, Weber et les membres du groupe socialiste et apparentés, et tendant à insérer, après l'article 30, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le deuxième alinéa de l'article 1er de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée est complété in fine par un alinéa ainsi rédigé :
« Jusqu'au 30 juin 2001, le Conseil supérieur de l'audiovisuel n'est pas tenu de lancer des appels à candidatures pour les fréquences disponibles lorsque leur attribution risquerait d'entraver les expérimentations ou la mise en place de la diffusion numérique hertzienne terrestre. »
Quel est l'avis de la commission sur cet amendement ainsi rectifié ?
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Je loue l'effort d'imagination de notre collègue, mais je crains que la réponse apportée au problème ne soit vraiment disproportionnée. L'article 1er de la loi de 1986 pose les principes de la liberté de communication. Je demanderai du temps pour étudier de façon approfondie toutes les implications d'une telle évolution.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Sur la forme, je comprends que l'objection que j'ai formulée pose des difficultés de procédure.
Sur le fond, il me paraîtrait plus raisonnable de revoir ce problème en deuxième lecture. A défaut, je m'en remettrai à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 236 rectifié.
M. Michel Pelchat. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Pelchat.
M. Michel Pelchat. Je suis contre cet amendement car celui-ci n'apporte rien au texte, et je m'en explique.
Certes, j'ai bien compris la problématique soulevée. Effectivement, le CSA est amené aujourd'hui à lancer des appels à candidatures pour les fréquences analogiques disponibles, ce qui obérerait d'autant les possibilités futures d'attribution de fréquences numériques hertziennes.
Mais le problème est que, si cet amendement est adopté, c'est la loi actuellement en vigueur qui continuera de s'appliquer jusqu'à la publication de la loi que nous sommes en train de discuter. Le jour où cette dernière sera publiée, nous aurons légiféré sur le numérique et le CSA saura comment attribuer les fréquences numériques. En conséquence, ce problème réel que vous soulevez aujourd'hui n'existera plus, car le CSA disposera alors d'un cadre juridique pour procéder aux attributions de fréquences numériques.
Si je comprends la préoccupation des auteurs de l'amendement, je ne voudrais pas laisser croire à l'opinion - vous le savez, nos débats sont parfois mal interprétés, malheureusement - que le Sénat s'est prononcé contre l'attribution de fréquences aux télévisions locales.
Effectivement, dans certains lieux, peut-être que plusieurs fréquences disponibles pourraient permettre d'attribuer dès aujourd'hui une fréquence analogique à une télévision locale sans perturber pour autant demain une distribution des fréquences hertziennes numériques. Mais l'adoption de cet amendement pourrait être interprétée, je le répète, comme une volonté du Sénat de s'opposer à l'attribution de fréquences analogiques à des télévisions locales.
C'est pourquoi je ne suis pas favorable à cet amendement. D'une part, il n'apporte rien dans l'immédiat et, d'autre part, il n'empêchera pas les pétitionnaires de former des recours pour demander au CSA de lancer un appel à candidatures pour les fréquences analogiques hertziennes disponibles.
La seule réponse que nous puissions apporter à ce problème - je m'adresse à Mme le ministre - est d'arriver rapidement au terme de la procédure et à la publication de la loi. Mais j'ai cru comprendre que ce n'était pas la voie dans laquelle s'engageait le Gouvernement, même si cela n'est pas de votre fait, madame le ministre, au vu de toute une série d'événements qui surgissent, et notamment le problème d'Arte.
Personnellement, il ne me paraît pas raisonnable de reporter à la fin du mois de mars la discussion de ce texte en deuxième lecture par l'Assemblée nationale, et au mois d'avril l'examen par le Sénat. Et je ne parle pas de toutes les incertitudes qui pèsent encore sur ce texte, quant à la cinquième chaîne, au numérique hertzien qu'il faudra entièrement revoir, à la réglementation relative à Internet, autant de questions que nous n'avons fait qu'ébaucher et que nous devrons approfondir en deuxième lecture.
Je le répète, je comprends la préoccupation nos collègues, mais la meilleure façon d'y répondre est d'adopter définitivement cette loi et de la publier très rapidement.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je voudrais répondre aux objections qui nous ont été faites.
Tout d'abord, sur la forme, l'arbre ne doit pas cacher la forêt. Ce qui importe, c'est que ce texte fasse l'objet de la navette afin que l'Assemblée nationale en soit saisie. Qu'il soit rattaché à l'article 1er, comme vous l'avez souhaité, madame la ministre, peu importe, l'essentiel est qu'il figure dans le projet de loi.
Je voudrais maintenant réagir aux propos de notre collègue M. Pelchat. Nous avons dit très clairement que cela ne doit pas empêcher d'accorder une fréquence à une association, cela va de soi. Nous ne demandons pas le gel des attributions, nous demandons la possibilité pour le CSA de ne pas accorder.
Le rapporteur a pris un exemple sur lequel je vais le suivre. Il nous a dit que la commission avait pris position en faveur des projets du syndicat de la presse quotidienne régionale. Je crois avoir suivi les travaux du Sénat avec assiduité, je n'ai pas eu le sentiment que l'on ait pris cette position. Si tel est le cas, c'est grave parce que, en tout état de cause, il faudrait éviter - et rien dans le texte ne le permet - qu'il puisse y avoir un monopole double, et dans la presse écrite et dans la télévision régionale. Personne ne le souhaite, j'imagine.
Or, en certains endroits, la presse régionale jouit, en effet, d'un monopole total. Il faut donc bien en discuter ; il faut bien qu'éventuellement des dispositions soient prises à cet égard ; il faut que le CSA puisse en discuter et savoir quelle politique il arrêtera. De même, je crois bien avoir reçu une lettre assez comminatoire où il était question de « syndication de la publicité ». Cela m'effraie beaucoup car personne ne doit avoir le monopole de la publicité, et surtout pas des groupes qui, souvent, appartiennent à des personnes qui ont fait fortune dans l'industrie du ciment ou dans la distribution de l'eau plutôt que dans les métiers de la presse proprement dits. Telle est la réalité.
Le moins que l'on puisse dire, c'est que cette question mérite un débat non seulement ici, mais aussi au CSA. La question n'est pas de savoir si vous avez pris position, monsieur le rapporteur, mais ce qu'en pense le CSA. Il est donc souhaitable de lui laisser la liberté d'apprécier.
M. Michel Pelchat nous dit : de toute façon, lorsque cette loi sera votée, on aura déjà légiféré sur le numérique, des décrets d'application seront peut-être même prévus pour le numérique avant que tous les décrets ne soient pris sur la liberté de communication, vous prenez donc des précautions.
Vous êtes d'accord avec nous, mais vous avez peur que les décisions ne soient prises trop tard. Vous êtes d'accord avec nous, admettez donc l'hypothèse que nous arrivions moins tard que vous ne le craigniez !
Je suis certain de vous avoir convaincu avec cet argument, qui me paraît fort, et je demande au Sénat de voter l'amendement n° 236 rectifié.
M. Alain Joyandet. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Joyandet.
M. Alain Joyandet. Je ne peux pas soutenir cet amendement, mais sans doute pas exactement pour les mêmes raisons que notre collègue M. Michel Pelchat.
Sur le fond, il me semble en effet que la quantité de fréquences disponibles étant relativement limitée, s'il y a des possibilités de diffusion nouvelles, il faut les encourager et non pas geler des fréquences.
Actuellement, notamment dans les régions, la demande est de plus en plus forte. Si nous avons des fréquences à proposer, il me semble tout à fait opportun de les attribuer, y compris si cela doit constituer un précédent pour le numérique hertzien terrestre.
Quant à la forme, ensuite, je suis assez inquiet en ce qui concerne les délais. L'échéance est certes fixée au mois de mars, mais elle ne sera pas nécessairement respectée.
Ce projet de loi a déjà connu bien des soubressauts et il peut en subir encore ! Il ne faudrait pas que cette situation de gel, même partiel, se prolonge. Les associations ont en effet besoin d'espaces de liberté supplémentaires.
Mme Danièle Pourtaud. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Pourtaud.
Mme Danièle Pourtaud. Je suis quelque peu surprise de l'ampleur que prend le débat. N'est-ce pas accorder un excès d'honneur à cet amendement que de penser qu'il prévoit le dispositif qui permettrait à la presse d'accéder ou de ne pas accéder à la télévision locale et de trouver les recettes lui permettant de le faire ? Revenons-en au texte proprement dit !
Il s'agit de rendre au CSA sa liberté, étant donné la jurisprudence actuelle du Conseil d'Etat, pour lui permettre de rendre possible l'installation du numérique hertzien sur l'ensemble du territoire.
En effet, vous le savez très bien, mes chers collègues, il existe des endroits où les fréquences disponibles sont abondantes, mais il en existe aussi d'autres où ce n'est pas le cas. Il s'agit donc non pas, comme l'a dit M. Pelchat, d'interdire au CSA, quand il y a plusieurs fréquences, d'en attribuer et de lancer les appels d'offres correspondants, mais de lui permettre de ne pas le faire lorsque les fréquences ne sont pas suffisamment nombreuses, afin que, lorsque nous ouvrirons le numérique hertzien - et je souhaite autant que vous, mon cher collègue, que cela arrive prochainement - il reste suffisamment de fréquences pour que les opérateurs, auxquels on demandera d'utiliser le numérique hertzien tout en continuant à diffuser par la voie analogique - ce qui ne libérera donc pas de fréquence - puissent diffuser en numérique hertzien.
Je voudrais dire à notre collègue Michel Pelchat que je souhaite bien entendu, tout comme lui, que cette loi, lorsqu'elle aura été votée, ouvre la possibilité de commencer la diffusion par voie numérique hertzienne. Cependant, j'ai tendance à penser que cela ne sera pas, à défaut du grand soir, le grand matin, c'est-à-dire que cela ne se fera pas du jour au lendemain. En attendant, nous nous trouvons donc toujours dans la même situation.
Par ailleurs, si cet amendement était voté aujourd'hui, les dispositions qu'il prévoit ne seraient pas opérationnelles demain, mais le CSA pourrait peut-être quand même s'appuyer sur elles parce que les débats parlementaires ne sont pas secrets et qu'il n'est pas inhabituel que l'on prenne appui sur ces derniers pour créer ou inverser une jurisprudence.
Je tenais à recadrer le débat parce que ce texte répond à l'attente d'un certain nombre de parlementaires présents dans cet hémicycle. J'espère donc qu'ils le voteront.
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Après Mme Pourtaud, je réaffirme qu'il s'agit de permettre au CSA de disposer des fréquences nécessaires lors du passage au numérique hertzien terrestre.
Je voudrais aussi rassurer M. Pelchat. En effet, dans la communication que j'ai présentée en conseil des ministres sur la diffusion numérique hertzienne terrestre, j'ai indiqué qu'il était nécessaire que le CSA se fonde sur un plan précis pour attribuer les nouvelles fréquences disponibles sur le réseau numérique hertzien. Voilà pourquoi il convient que le CSA puisse aujourd'hui bloquer l'attribution des fréquences.
Le CSA peut d'ores et déjà agir conformément aux souhaits exprimés par Mme Pourtaud.
Par ailleurs, la seule discussion devant le Sénat de cet amendement permet au CSA de justifier ses décisions.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 236 rectifié, repoussé par la commission et pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 31



M. le président.
« Art. 31. _ I. _ Les éditeurs de services diffusés par satellite n'ayant pas encore conclu une convention avec le Conseil supérieur de l'audiovisuel au titre de la distribution par câble disposent d'un délai de trois mois à compter de la publication du décret prévu à l'article 33 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée dans la rédaction résultant de l'article 24 de la présente loi pour conclure la convention prévue à l'article 33-1 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée.
« II. _ Les distributeurs de services diffusés par satellite disposent d'un délai de trois mois à compter de la publication du décret prévu à l'article 34-2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée pour effectuer la déclaration prévue à ce même article. »
Par amendement n° 92, M. Hugot, au nom de la commission des affaires culturelles, propose, dans le II de cet article, de remplacer les mots : « du décret prévu » par les mots : « des décisions du Conseil supérieur de l'audiovisuel prévues ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 92, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 31, ainsi modifié.

(L'article 31 est adopté.)

Article 31 bis



M. le président.
« Art. 31 bis . _ Après le troisième alinéa de l'article L. 421-3 du code de l'urbanisme, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les immeubles collectifs à usage d'habitation dont la demande de permis de construire est déposée à compter de la date d'entrée en vigueur de la loi n° du modifiant la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, ce permis ne peut être délivré que si le pétitionnaire s'engage à poser sur la toiture de l'immeuble projeté une antenne collective de réception des programmes diffusés par satellite ou à raccorder l'immeuble à un réseau distribuant par câble des services de radiodiffusion sonore ou de télévision. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 93, M. Hugot, au nom de la commission des affaires culturelles, propose, après le mot : « délivré », de rédiger comme suit la fin du texte présenté par l'article 31 bis pour être inséré après le troisième alinéa de l'article L. 421-3 du code de l'urbanisme : « que si la demande prévoit les installations techniques permettant d'assurer dans chaque logement la réception des services de radiodiffusion sonore et de télévision diffusés par voie hertzienne terrestre, par câble et par satellite. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 237, présenté par Mme Pourtaud, MM. Dreyfus-Schmidt, Collomb, Lagauche, Weber et les membres du groupe socialiste et apparentés, et tendant, à la fin du texte proposé par l'amendement n° 93, à remplacer les mots : « par câble et satellite » par les mots : « par câble ou par satellite ».
Par amendement n° 135, M. Pelchat propose, après les mots : « relative à la liberté de communication », de rédiger ainsi la fin du texte présenté par l'article 31 bis pour compléter l'article L. 421-3 du code de l'urbanisme : « , le permis ne peut être délivré que si le pétitionnaire a prévu les installations techniques propres à assurer pour chaque logement la possibilité de recevoir les services de radiodiffusion sonore ou de télévision diffusés par voie hertzienne terrestre, par câble ou par satellite. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 93.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. L'Assemblée nationale a inséré dans le projet de loi une disposition dont l'objet est de lutter contre la prolifération des paraboles individuelles sur les immeubles collectifs d'habitation. Ce dispositif impose l'établissement d'antennes paraboliques collectives dans les zones non câblées, ce qui fera obstacle à la création de nouveaux réseaux et au déploiement de la diffusion hertzienne terrestre numérique dont la réception ne nécessite pas la mise en place de paraboles.
Il est donc préférable d'adopter une rédaction imposant, dans les immeubles neufs, un système de réception collective raccordable indifféremment à une parabole, à une antenne pour le réseau hertzien terrestre ou au réseau câblé. Ce dispositif permet en effet de ne pas préjuger les choix des occupants des immeubles collectifs entre les systèmes de réception des services de communication audiovisuelle.
M. le président. La parole est à M. Dreyfus-Schmidt, pour défendre le sous-amendement n° 237.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Nos collègues députés ont eu, comme toujours, une excellente idée !... mais il semble tout de même que le mieux soit l'ennemi du bien.
Pour essayer d'empêcher la floraison des antennes, des paraboles, ils ont en effet prévu que, dans la demande de permis de construire des immeubles collectifs à usage d'habitation, le demandeur s'engage à poser sur la toiture de l'immeuble projeté une antenne collective de réception des programmes diffusés par satellite ou à raccorder l'immeuble à un réseau distribuant par câble des services de radiodiffusion sonore ou de télévision.
La commission des affaires culturelles, quant à elle, est allée encore beaucoup plus loin puisqu'elle demande que, dans chaque logement, soit assurée la réception de services de radiodiffusion sonore et de télévision diffusés par voie hertzienne terrestre par câble et par satellite.
Tout d'abord, il faut penser qu'il existe des zones d'ombre et nous sommes un certain nombre à nous en préoccuper. Dans ces zones d'ombre, ce n'est peut-être pas la peine d'engager des frais supplémentaires qui ne serviront à rien.
Il faut ensuite penser aux autres zones où il n'est sans doute pas nécesaire d'engager des frais aussi importants.
Dans ces conditions, il paraît normal de prévoir la possibilité d'un choix, et tel est exactement le sens du sous-amendement n° 237 du groupe socialiste.
C'est d'autant plus justifié que les installations qui existent actuellement pour capter le satellite ne seront pas suffisantes pour recevoir de nouvelles chaînes par satellite, et qu'il faudra faire appel à de nouvelles installations, ce qui reviendra extrêmement cher.
Si l'idée est bonne, elle mérite d'être appronfondie. Il nous semble en tout cas que notre proposition constitue un progrès par rapport aux suggestions de la commission, qui en a rajouté dans la recherche du toujours plus par rapport à une Assemblée nationale qui était déjà allée bien loin, nous semble-t-il.
M. le président. La parole est à M. Pelchat, pour présenter l'amendement n° 135.
M. Michel Pelchat. Il faut que, parmi les contraintes imposées aux constructeurs d'immeuble, figure la possibilité de recevoir tous les systèmes de réception collective.
Il est cependant exact que nous pouvons éviter d'installer certains équipements dans les zones d'ombre.
Je note cependant, mes chers collègues, que si l'hertzien numérique ne doit être reçu que par moins de 70 % de nos concitoyens, un effort exceptionnel doit être réalisé, notamment en faveur du secteur public. Il faut dégager les moyens pour répondre aux besoins de l'intégralité de la population. Mais je reconnais que cela représente un effort considérable.
Quant aux opérateurs privés, ils iront, comme ils le font toujours, là où la population est la plus importante, car ils ne vont pas investir des milliards pour une diffusion limitée à quelques habitations, à moins qu'ils n'y trouvent un intérêt économique. Mais c'est un autre problème !
Je le rappelais tout à l'heure à l'occasion de l'examen d'autres amendements, il faut établir des conditions d'équité, parce qu'ils sont concurrents, entre la diffusion par câble et la diffusion par satellite, et les moyens collectifs de réception doivent par conséquent être intégrés tant pour l'un que pour l'autre. Ces deux points me paraissent importants.
Tel est l'objet de l'amendement que je vous propose d'adopter.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 237 et sur l'amendement n° 135 ?
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. La commission est favorable au sous-amendement n° 237.
Bien que l'amendement n° 135 est un objet identique, la commission ne peut y être favorable, car il porte sur un alinéa du projet de loi que l'amendement n° 93 de la commission des affaires culturelles modifié.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 93, sur le sous-amendement n° 237 et sur l'amendement n° 135 ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. L'amendement n° 93 tend à favoriser la mise en place d'installations techniques collectives dans les immeubles neufs lors de la délivrance des permis de construire.
Le sous-amendement n° 237 et l'amendement n° 135 en tendant à remplacer la conjonction « et » par « ou », engagent moins le choix définitif de l'installation collective.
Une mise au point est nécessaire, car plusieurs amendements comparables ont été déposés devant l'Assemblée nationale.
Cet article 31 bis me paraît inutile pour plusieurs raisons.
D'abord, vous savez que l'installation des antennes collectives doit, selon l'article 34 de la loi de 1986, être autorisée par les communes. Comment concilier cette obligation avec celle que vous voulez aujourd'hui imposer dès la construction de l'immeuble ?
Ensuite, nous ne pouvons envisager d'imposer une solution quelconque de réception des programmes lors de la construction d'un immeuble neuf. Le constructeur ne peut se substituer au choix que les occupants seront ultérieurement et légitimement amenés à faire quant aux programmes qu'ils souhaitent recevoir. Vous savez que ce libre choix répond à un impératif de libre réception des programmes garanti par l'article 10 de la Déclaration européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
J'ajoute que ce qui vaut pour le choix collectif des copropriétaires ou des locataires vaut également à titre indididuel. Je sais que nombre d'élus locaux, au rangs desquels je suis, souhaitent limiter la prolifération des paraboles individuelles pour des motifs esthétiques...
M. Michel Pelchat. C'est vrai !
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. ... surtout lorsque des investissements ont été faits pour le câble.
M. Michel Pelchat. Absolument.
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Je partage entièrement cet avis. Mais nous ne devons pas perdre de vue que le juge judiciaire garantit à tout particulier la possibilité d'installer une antenne individuelle de réception, même lorsqu'une antenne collective est installée, si cette solution collective ne lui offre pas les programmes qu'il souhaite recevoir. C'est bien là que le problème se pose, en particulier lorsqu'il y a un réseau câblé.
Ainsi, un mode collectif de réception des programmes - satellite ou câble et, demain, numérique terrestre - n'empêchera jamais nos concitoyens de recevoir d'autres programmes par le biais d'une antenne individuelle.
Enfin, je souhaite vous rappeler que le code de la construction et de l'habitation, en son article R. 111-14, prévoit déjà que les immeubles « doivent être munis des dispositifs collectifs nécessaires à la distribution des services de radiodiffusion sonore et de télévision dans les logements et des gaines ou passages pour l'installation des câbles correspondants. Ces dispositifs collectifs doivent permettre la fourniture des services diffusés par voie hertzienne terrestre reçus normalement sur le site, être raccordables à un réseau câblé et conformes aux spécifications techniques d'ensemble (...) ».
Ce dispositif me paraît suffisant et conforme, dans son objet, à ce que vous souhaitez, à savoir que des dispositifs techniques soient prévus lors de la construction de l'immeuble pour qu'ensuite les habitants puissent collectivement et librement choisir un mode de réception.
Pour ces raisons, je suis défavorable à l'adoption des amendements n°s 93 et 135 ainsi qu'à celle du sous-amendement n° 237.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. Madame la ministre, faut-il prendre votre propos introductif comme étant l'amorce, qui n'a pas abouti, d'une demande de suppression de l'article 31 bis du projet de loi ?
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Exactement !
M. Michel Pelchat. Si vous supprimez cet article, nous retirons nos amendements.
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Il serait en effet souhaitable de supprimer l'article 31 bis .
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Déposez un amendement tendant à cette suppression !
M. le président. Madame la ministre, soit vous déposez au nom du Gouvernement un amendement de suppression, soit le Sénat modifie cet article 31 bis .
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le président, si vous m'y autorisez, je préfère déposer oralement un amendement de suppression de l'article 31 bis .
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 264, présenté par le Gouvernement, et tendant à supprimer l'article 31 bis .
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. La commission est favorable à cet amendement et elle retire l'amendement n° 93.
M. le président. L'amendement n° 93 est retiré.
En conséquence, le sous-amendement n° 237 n'a plus d'objet.
M. Michel Pelchat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Pelchat.
M. Michel Pelchat. L'amendement n° 135 n'ayant pour seul objet que de contrer la disposition qui privilégie, à l'article 31 bis , la réception par satellite, je le retire bien volontiers au profit du vôtre, madame la ministre, puisque vous rétablissez l'équité que nous demandions.
M. le président. L'amendement n° 135 est retiré.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 264.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Mme la ministre a clairement démontré que le mieux était en effet l'ennemi du bien. L'Assemblée nationale voulait qu'il y ait obligatoirement ou le satellite ou le câble. C'est ce à quoi nous revenons avec notre sous-amendement n° 237 à l'amendement n° 93, lequel précise en plus « ou la voie hertzienne terrestre ».
Notre collègue M. Pelchat a raison, il n'y a pas lieu de favoriser les uns par rapport aux autres, car imposer tous les systèmes de réception nuit à une liberté première à laquelle nous tenons tous.
Espérons pour l'environnement que la technique fera des progrès et que les paraboles seront plus petites et les antennes moins multiples. Mais nous sommes tout à fait reconnaissants au Gouvernement de déposer un amendement tendant à supprimer l'article 31 bis introduit par l'Assemblée nationale et nous espérons que l'unanimité qui se dessine au Sénat pour voter cet amendement impressionnera suffisamment les députés pour les convaincre à leur tour.
M. Louis de Broissia. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. de Broissia.
M. Louis de Broissia. Madame la ministre, je voterai votre amendement de suppression.
Je fais observer à notre collègue M. Dreyfus-Schmidt que je n'ai pas très bien compris son argumentation sur les zones d'ombre. Le quart-monde audiovisuel mérite de recevoir les mêmes services. Il n'est pas question d'imposer la réception par satellite dans les zones d'ombre et d'autres systèmes dans les zones plus peuplées, plus urbaines. Nous votons un texte sur la liberté de communication accessible à tous, liberté fondamentale inscrite dans la Constitution !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Bien sûr !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 264, accepté par la commission.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 31 bis est supprimé.

Article 32



M. le président.
« Art. 32. _ La présente loi est applicable en Nouvelle-Calédonie, dans les territoires d'outre-mer et dans la collectivité territoriale de Mayotte. »
Par amendement n° 105, M. Flosse propose de compléter in fine cet article par les mots : « , à l'exception de l'article 19 pour la Polynésie française. »
Cet amendement est-il soutenu ?...
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 32.

(L'article 32 est adopté.)

Article additionnel après l'article 32



M. le président.
Par amendement n° 161, MM. Ralite, Renar, Mme Luc, les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 32, un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans un délai de deux ans après la promulgation de la présente loi, le Gouvernement présentera un rapport au Parlement sur l'état des négociations permettant :
« - la mise en oeuvre d'une politique industrielle européenne d'investissements pour la production de programmes audiovisuels et de logiciels.
« - la création d'un fonds de soutien à l'exportation et à la distribution de programmes audiovisuels européens en Europe et dans le monde.
« - la mise en place d'un fonds de garantie européen pour la création audiovisuelle. »
La parole est à M. Ralite.
M. Jack Ralite. Traditionnellement, en matière de politique européenne, nous sommes appelés, au Sénat comme à l'Assemblée nationale, à ratifier un texte qui est à prendre ou à laisser.
S'agissant d'une question aussi importante que l'audiovisuel, et à quelques mois de la présidence française, nous devrions pouvoir donner une indication, bien que nous ne légiférions pas, ici, au niveau européen. C'est pourquoi, avec mes collègues, j'ai rédigé un amendement tendant à insérer un article additionnel qui a pour objet de demander au Gouvernement, dans un délai de deux ans après la promulgation de la présente loi, de présenter un rapport au Parlement sur l'état des négociations permettant la mise en oeuvre d'une politique industrielle européenne d'investissements pour la production de programmes audiovisuels et de logiciels ; la création d'un fonds de soutien à l'exportation et à la distribution de programmes audiovisuels européens en Europe et dans le monde ; la mise en place d'un fonds de garantie européen pour la création audiovisuelle.
Je suis, comme mes collègues, très attachés à ce texte, et l'audition, hier, par la commission des affaires culturelles de Mme Viviane Reding, commissaire européen, a renforcé encore ce sentiment. En effet, si elle nous a fait un exposé tout à fait intéressant qui semblait, de prime abord, aller dans le sens de nos préoccupations, sur des problèmes concrets, certains mots ont ébréché le sens des mots de départ.
S'agissant, par exemple, des quotas, elle nous a dit non pas qu'elle y était favorable, mais que nous devrions faire du lobbying pour défendre la position française présentée comme une position quasi exclusive. Elle a même eu cette expression : « Ce n'est vraiment pas facile, vous devez le savoir, c'est une question de foi ». Disons que cela ne me satisfait pas.
S'agissant des financements du programme MEDIA, elle a fait valoir une augmentation de 30 %. Mais quand on regarde les chiffres, on constate que l'on passe de 320 millions à 400 millions d'euros. Ce n'est vraiment pas la mer à boire, notamment pour la réalisation des programmes, d'autant que la DG IV est en train de mener une bataille acharnée contre les aides nationales au cinéma par rapport aux textes européens en la matière.
S'agissant de Time Warner, qui a d'abord passé un accord avec AOL, puis qui fait maintenant de la grosse couture avec Warner Music et EMI, je m'attendais à ce qu'elle dise que l'Europe ferait savoir à EMI qu'elle ne trouvait pas normal ce dernier accord. Mais non ! Mme Reding nous a demandé de réfléchir, car, puisque ces très grands s'entendent, il fallait que les petits de chez nous en fassent autant. Mais deux petits, cela ne fera jamais un grand, alors que trois grands, cela fera un plus grand encore ! Or cela marche comme cela depuis des années, et là est la vraie question !
Selon le commissaire européen, l'accord AOL - Time Warner représente 350 milliards de dollars ; l'éventuel accord Canal Plus - Lagardère ne pèsera que 12 milliards de dollars !
M. Michel Pelchat. Tout à fait !
M. Jack Ralite. Enfin - et cela nous ramène à la proposition de notre collègue M. Diligent sur les réalisateurs, sous la dernière forme que l'on en a retenue, quoique le statut ne soit pas vraiment la solution même si certains le défendent, ce que l'on peut respecter - elle a parlé des réalisateurs en disant qu'aux USA les oeuvres étaient commerciales, qu'en Europe c'étaient des oeuvres d'art et qu'il faudrait bien que les réalisateurs comprennent qu'une oeuvre d'art doit être diffusée. Cela me chiffonne profondément, pour ne pas dire plus !
Je lui ai rappelé le texte de M. Prodi, dont je donne lecture pour sa première partie : « La force de la culture américaine est symboliquement exprimée par les mass media. Elle est en effet considérée par certains comme capable de constituer la référence unitaire pour l'Europe à la recherche de son âme. Il n'y a rien de scandaleux dans cette hypothèse. »
J'aime la culture américaine, mais j'aime le bouquet total de toutes les cultures du monde, y compris les plus minoritaires. Un tel ralliement n'est pas conforme à la tradition pluraliste du continent auquel nous appartenons.
En tout cas, il me semble intéressant de demander que soit présenté au Parlement un rapport sur l'état d'avancement de propositions qui ne seront que l'épanouissement de la démarche nationale, dont on discute déjà souvent d'ailleurs, et dont Mme le ministre dans des instances internationales a défendu le contenu avec force dans la dernière période.
Le présent amendement me semble donc mériter non seulement une écouteattentive mais un vote positif.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur. La commission partage les conclusions de M. Ralite et a donné un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. J'ai attentivement écouté le propos de M. Ralite, en particulier sur la manière dont il interprétait les propos de la commissaire européenne, Mme Reding.
Je pense que, dans cet amendement, monsieur le sénateur, vous faites allusion aux programmes MEDIA, qui, de fait, couvrent l'ensemble des trois points sur lesquels vous souhaitez avoir un rapport.
C'est, en effet, le programme MEDIA sous ses formes successives qui est l'outil financier de la politique européenne d'aide à la production de programmes audiovisuels, programmes institués depuis 1991, mais c'est l'année 2000 qui doit voir aboutir les négociations pour fixer le programme d'action des années 2001 à 2006, le programme MEDIA Plus, qui a déjà été évoqué dans notre débat, mais aussi le montant de la contribution financière prévue aujoud'hui à 400 millions d'euros.
Les négociations portent actuellement sur les trois volets suivants.
Elles portent, premièrement, sur les aides aux formations et au développement, qui sont des mesures en amont de la réalisation et qui ne sont pas toujours prises en compte par les régimes d'aides nationaux.
Elles portent, deuxièmement, sur les aides à la distribution, lesquelles doivent assurer une réelle circulation des oeuvres ; l'accent sera mis sur cet aspect dans MEDIA Plus car, sans circulation, le dispositif d'aides serait incomplet et inopérant.
Enfin, troisièmement, elles portent sur l'aide à l'exportation, que plusieurs de mes collègues et moi-même avons défendue pour qu'elle soit vraiment prise en compte dans le programme MEDIA Plus. Cette aide à l'exportation doit faciliter la présence sur les marchés internationaux et faciliter la tâche des mandataires commerciaux.
Pour chacun de ces volets, un effort particulier sera consenti en faveur du développement des nouvelles technologies.
Il va de soi, évidemment, et surtout en raison de la présidence française, que ces mesures feront l'objet d'un suivi attentif des autorités françaises. Le Parlement sera informé en tout état de cause, et cela même avant deux ans. En effet, le problème se posera avec le plus d'acuité au moment de l'adoption du programme MEDIA.
J'étais plutôt défavorable à cet amendement, parce que je pensais, en tout état de cause, être entendue par la commission des affaires culturelles du Sénat et par celle de l'Assemblée nationale quand il s'agirait de faire état de notre action sous la présidence française de l'Union européenne.
Cela étant, un tel compte rendu peut être fait sous une autre forme, et même si une dizaine, voire plus, de rapports sont déjà prévus par la Haute Assemblée, je m'en remets sur ce point à sa sagesse !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 161.
M. Michel Pelchat. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Pelchat.
M. Michel Pelchat. Je voudrais revenir sur deux ou trois éléments qui m'amènent à soutenir la proposition de notre collègue Jack Ralite.
Certes, nous sommes un peu isolés en Europe dans notre défense de l'exception culturelle, mais je me dois de rappeler, madame la ministre, que nous nous trouvons dans une situation relativement difficile à défendre face à nos partenaires européens. En effet, l'exception culturelle est en quelque sorte notre rempart défensif, mais l'on sait bien que, dans les batailles de cette nature, il faut aussi développer des offensives pour opérer des percées chez l'adversaire. Or comment cela serait-il possible, sinon en produisant des programmes ? C'est bien la tactique qu'ont adoptée nos principaux partenaires européens. L'Allemagne produit près de 2 000 heures d'emissions audiovisuelles par an, l'Angleterre 1 400 heures ; quant à nous, nous n'en sommes qu'à 550 heures !
Sur leurs ondes, que reçoivent-ils en prime time ? 90 % de production nationale pour l'Angleterre, 70 % pour l'Allemagne, contre 47 % pour la France !
Evidemment, quand nous leur disons que, au nom de l'exception culturelle, il nous faut lutter contre l'invasion de nos écrans par les Américains, ils nous répondent : mais faites comme nous ! Consacrez le même effort financier que nous ! Vous le savez bien, mes chers collègues, les chiffres que j'ai rappelés tout à l'heure ne concernent que le secteur public : je ne parlais pas de l'ensemble du paysage audiovisuel anglais ou allemand, je ne parlais que des médias publics anglais et allemands.
Là, on ne peut que rappeler la faiblesse des ressources publiques que nous attribuons au secteur de la télévision française. Or cette faiblesse est la cause de la fragilité de notre défense de l'exception culturelle, exception culturelle que je soutiens également, madame la ministre, et que je vous remercie d'avoir soutenue, comme l'a rappelé notre collègue Jack Ralite, avec beaucoup de vigueur, de force et de conviction. Mais, vous le voyez, voilà le défaut de notre cuirasse.
Nous ne tiendrons pas longtemps dans cette situation : nous ne parviendrons pas à entraîner nos partenaires européens à se solidariser avec nous si, de notre côté, nous ne faisons pas un effort dans le domaine de la production audiovisuelle.
Cela étant, madame la ministre, si vous avez la possibilité de déposer ce rapport en moins de deux ans, nous ne pourrons que nous en réjouir. En effet, s'il est écrit « deux ans » dans l'amendement, j'ai bien compris que dans l'esprit de son auteur cela signifiait : « au plus tard dans deux ans ».
En tout cas, n'oublions pas l'effort à consentir en faveur de la production. Il interviendra encore bien des événements dans le secteur privé. Cela doit, certes, nous préoccuper, mais surtout renforçons le pôle public, car c'est autour d'un pôle public fort que nous pourrons résister à l'invasion de nos écrans et faire émerger la production nationale.
Il n'y a pas d'autre solution pour que perdure une vraie télévision française, avec de vrais auteurs français, de vraies fictions nationales, expressions de notre culture. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 161, accepté par la commission et pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 32.

Vote sur l'ensemble



M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Machet, pour explication de vote. M. Jacques Machet. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ce long débat aura été salutaire. Tout le monde en est ici, je crois, convaincu.
La semaine dernière, le texte que vous nous présentiez, madame la ministre, était loin de prendre en compte les bouleversements qui déjà secouent le secteur de l'audiovisuel. Aujourd'hui, après l'examen de 260 amendements, il intègre une réalité technologique que tous les acteurs de l'audiovisuel attendaient.
Nous avons au départ, madame la ministre, regretté la timidité de votre projet de loi, l'absence de dispositions concernant la télévision numérique hertzienne terrestre, ainsi que le développement des télévisions locales et de proximité.
Aujourd'hui, nous estimons que le texte a été considérablement enrichi. La navette permettra, sur un grand nombre de nouveaux articles, d'approfondir la réflexion.
Les travaux du Sénat auront permis de moderniser ce texte, de redonner une identité au service public, de porter une attention particulière aux programmes et à la production, mais aussi d'engager l'indispensable transition vers la télévision numérique hertzienne.
Je tiens ici à saluer le travail accompli par le rapporteur de la commission des affaires culturelles, notre collègue Jean-Paul Hugot, par son président, par le rapporteur de la commission des finances, Claude Belot, l'orfèvre financier, et par vous, madame la ministre, qui avez été très ferme dans la défense de la position gouvernementale, mais cela sans perdre le sourire.
J'exprime le voeu que la deuxième lecture permette d'affiner nos positions, d'enrichir encore le texte, afin que l'audiovisuel français puisse exister dans un contexte mondial en pleine évolution. Il nous faut encourager le développement de nos entreprises audiovisuelles en créant un cadre législatif lisible et stable. Le Sénat y a largement contribué au cours de cette discussion.
La convergence de la télévision, de l'ordinateur et du téléphone est déjà une réalité. Elle est porteuse de formidables perspectives de croissance, auxquelles les entreprises françaises doivent participer. Conscient de cette situation, le Sénat vient d'y apporter un éclairage et une réflexion indispensables.
C'est pourquoi mes collègues du groupe de l'Union centriste et moi-même voterons le texte tel qu'amendé par le Sénat. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Joyandet.
M. Alain Joyandet. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, avant que mon ami Louis de Broissia explique le vote de notre groupe, je voudrais faire quelques réflexions personnelles à propos de la contribution, modeste, que j'ai pu apporter à ce débat et me livrer à quelques explications.
Tout d'abord, il me semble que nous devons absolument tenter de clarifier la situation de notre audiovisuel public ; nous devons aussi combattre les monopoles, qu'ils soient liés aux textes ou qu'il s'agisse de monopoles de fait, monopoles publics ou privés.
Nous devons favoriser l'accès à tous les Français, si possible sans exception, à la culture et tout particulièrement à la culture française et européenne.
Ensuite, nous devons toujours donner la priorité à l'innovation, à la création plutôt qu'au conservatisme ou à l'immobilisme. En tout cas, c'est dans cet esprit que j'ai apporté personnellement une contribution à nos réflexions.
L'expérience montre que, chaque fois que des espaces de liberté et de communication supplémentaires ont été ouverts, très vite, les vertus du pluralisme et le développement économique conséquent ont fait oublier les craintes qu'avaient exprimées les tenants du statu quo.
Je tiens à remercier la commission pour le travail qu'elle a accompli, tout particulièrement son rapporteur, notre ami Jean-Paul Hugot et son président, Adrien Gouteyron.
Le texte qui nous est proposé me semble aller dans le sens des priorités qui doivent être les nôtres et dont j'ai constaté qu'elles étaient souvent partagées sur toutes les travées de notre assemblée.
Je serai particulièrement attentif sur deux points, madame la ministre.
Il s'agit, d'abord, du financement de notre audiovisuel public. Au début de nos travaux, je n'ai absolument pas voulu dire qu'il fallait à tout prix privatiser une partie de notre service public, et j'espère m'être bien fait comprendre à cet égard, mais vous devez impérativement vous battre - nous vous aiderons ! - pour qu'il obtienne plus de moyens.
Comme notre collègue M. Pelchat le disait tout à l'heure, à propos de la création et de la production, si nous voulons que notre audiovisuel public résiste aux grandes concentrations internationales, il faut qu'il ait des moyens. Or je crains fort - et mes inquiétudes ont été renforcées depuis le début de ce débat - que, dans un avenir très proche, notre audiovisuel public n'ait pas assez d'argent.
Je prends date aujourd'hui. Si on ne lui accorde pas des moyens supplémentaires, nous serons, dans la contrainte et la douleur, obligés de réexaminer son périmètre.
S'agissant de cet espace de liberté nouveau qu'offre le numérique, nous devrons être aussi attentifs, lors de la navette, à son système de distribution.
J'ai été un peu en retrait par rapport aux dispositions que nous avons votées sur le système de mise à disposition par bouquet et non par canal, par thème ou par service. Mais nous devons faire preuve d'une certaine souplesse afin que le système d'attribution de ce nouvel espace ne se contente pas de préserver des situations acquises. Cet espace de liberté supplémentaire doit donner toute sa chance aux nouveaux créateurs et aux nouveaux diffuseurs, sans qu'ils soient obligés de passer par de grands groupes monopolistiques, qu'ils soient publics ou privés.
Enfin, je remercie Mme la ministre de son attention, même si elle a pu parfois avoir le sentiment que nous bousculions quelque peu son texte, que nous avons, sur certains points, avec une certaine sévérité, jugé insuffisant. Je souhaite qu'elle puisse, à l'occasion de la navette, faire en sorte que soit conservée une grande partie de la contribution du Sénat, qui s'est toujours voulu constructif par rapport à l'ouverture de ces nouveaux espaces de liberté. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées de RDSE.)
M. le président. La parole est à M. de Broissia.
M. Louis de Broissia. Les interventions de mes collègues MM. Machet et Joyandet me faciliteront la tâche.
J'essaierai de vous exposer brièvement, madame le ministre, mes chers collègues, l'opinion du RPR sur le texte tel qu'il ressort de cette discussion, longue, fructueuse et sympathique, au cours de laquelle le Sénat a pleinement joué son rôle.
A l'origine, nous en sommes tous conscients, ce texte a eu un parcours législatif paradoxal : plus il fallait qu'il aille vite, plus il traînait ! Il y avait là une application curieuse des lois cinétiques !
En fait, madame le ministre, ce texte, soit revient de très loin, soit revient de « trop peu ».
Je me souviens - ce n'est pas le premier texte législatif relatif à l'audiovisuel que j'aborde - que l'on avait d'abord imaginé des mesures anti-concentrations. A l'heure où AOL, Time Warner et EMI fusionnent, la majorité de l'Assemblée nationale a heureusement abandonné ces billevesées.
Il y a également eu une volonté très « anti-TPS ». On est revenu à des considérations plus raisonnables.
Votre projet de loi a aussi été décrit par les journalistes - mais c'était réducteur, j'en conviens - comme un texte simplement anti-publicité. Lors du débat, certains ont évoqué des sondages prouvant que les Français n'aiment pas la publicité à la télévision. Si l'on demande aux Français : « Pensez-vous que vos hommes politiques sont honnêtes ? », ils vont répondre non. Si on leur demande : « Payez-vous trop d'impôts ? », ils diront oui. De même, si on leur pose la question : « Est-ce qu'il y a trop de publicité à la télévision ? », ils répondent évidemment oui. Tous ces sondages sont un peu « bidon ».
Nous avons abordé cette question de la publicité de façon réaliste.
Vous aviez méprisé la réalité franco-allemande d'ARTE. Au dernier moment, nous avons réagi.
Ce texte revient donc de loin.
Ce texte revient également du « trop peu » dans lequel l'Assemblée nationale avait voulu le cantonner. J'ai entendu un admirateur de l'Assemblée nationale, M. Dreyfus-Schmidt, soutenir que celle-ci faisait toujours du bon travail. Moi qui en viens, je serai simplement réaliste : nous avons tendance à considérer qu'elle fait du bon travail quand la majorité est conforme à nos convictions.
De toute façon, le Sénat a un travail spécifique à accomplir. C'est, je crois, pour moi l'illustration parfaite de son rôle propre.
Ce texte revient donc de « trop peu », en particulier sur le numérique hertzien terrestre.
Je l'ai déjà dit, on ne peut pas rédiger un code de conduite hippomobile quand il s'agit de réglementer la conduite sur un circuit de Formule 1. Or c'est un peu ce que l'on s'apprêtait à faire.
S'agissant de la régulation, nous tenions, au groupe du Rassemblement pour la République, à son renforcement, à l'attribution de pouvoirs clairs au CSA, à l'élargissement de ses missions et de ses compétences. Nous avons été amenés à aborder le rôle d'une autorité administrative indépendante au regard de la Constitution, et ce fut un débat utile.
Nous avons également fait revenir ce texte de loin en ce qui concerne la convergence des médias. Nous l'avons enrichi. Les propositions faites par M. Laffitte ont permis de bien montrer comment nous voulions lier ce texte à celui qui traitera de la société de l'information.
Nous avons conforté largement, et là de façon très unanime, les missions de service public, en les précisant, en les encadrant et, pour ma part, je suis satisfait de la rédaction que nous avons adoptée sur ce point.
Nous avons encore renforcé la transposition de la directive « télévision sans frontières », et le Sénat a apporté à cet égard une pierre intéressante.
Je me souviens du rapport demandé à mon collègue et ami Michel Françaix sur les télévisions locales. Nous avons même abordé cette question quasi interdite, dont on ne parlait plus !
La galanterie et les égards dus à votre personne, madame le ministre, veulent que ce projet de loi soit appelé à devenir la « loi Trautmann ». Vous en avez donc la maternité. Mais je crois que le Sénat en exercera dorénavant la paternité ! (Sourires.)
J'ai entendu des propos quelque peu étranges au cours de cette discussion. Chaque fois que l'on était embarrassé - en particulier au sein de l'opposition sénatoriale - on évoquait la deuxième lecture. Moi, j'ai appris que, dès la première lecture, une chambre votait un texte. Aujourd'hui, le Sénat va voter pour ou contre un texte. C'est ce texte qui arrivera en discussion à l'Assemblée nationale. Le groupe du RPR apportera son soutien à ce texte largement enrichi par le Sénat. Donc, il y aura parité, maternité et paternité.
Je voudrais, à mon tour, rendre hommage à la commission des affaires culturelles, à son président, à son rapporteur, qui s'est beaucoup investi dans ce dossier délicat, mais aussi à tous mes collègues grâce à qui ce débat nous a permis d'indiquer clairement que le Sénat voulait un service public fort, une autorité administrative indépendante exerçant une mission de service public, des technologies maîtrisées, mises au service de la liberté de communication et, enfin, une loi d'ouverture et non de fermeture.
C'est ce texte d'ouverture que votera le groupe du RPR. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Pelchat.
M. Michel Pelchat. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je pourrais parler une demi-heure sur ce texte de loi... (Sourires et exclamations.) Nous avons évoqué tant de questions au cours de ces derniers jours !
M. le président. Monsieur Pelchat, je vous rappelle qu'une explication de vote ne doit pas excéder cinq minutes. (Nouveaux sourires.)
M. Michel Pelchat. Rassurez-vous, monsieur le président, mon intervention sera plus courte que celles de mes deux prédécesseurs, alors même que je suis le seul orateur du groupe des Républicains et Indépendants.
Au moment de nous prononcer sur le texte que nous venons d'élaborer, l'actualité nous montre que la plupart des dispositions retenues par notre assemblée étaient indispensables pour l'avenir de notre paysage culturel français.
En effet, si l'on considère le domaine musical, auquel je suis très attaché, ces jours-ci, tous les médias ont insité sur le fait que l'année 1999 avait vu une baisse de 4 millions d'unités des ventes d'enregistrements en France, par rapport à 1998. Cette baisse importante est due, pour l'essentiel, nous le savons tous, au piratage des productions sur Internet.
L'adoption de deux amendements responsabilisant les fournisseurs d'accès et prévoyant de les sanctionner s'ils ne font pas toute diligence pour reconnaître les mesures techniques mises en place par les utilisateurs de droits et pour faire signer à leurs clients une charte contractuelle prévoyant la résiliation de leur contrat en cas d'infractions répétées permettra, je l'espère, de protéger efficacement la propriété culturelle face au développement des nouvelles technologies. Je pense que l'actualité nous donne raison d'avoir adopté ces deux amendements.
D'autre part, le renforcement de la présence sur nos radios musicales de titres d'expression francophone de tous genres, depuis nos classiques jusqu'aux jeunes talents en passant par les nouvelles productions, permettra de résister à la concurrence de titres d'origine américaine diffusés sur Internet et autres bouquets satellites, tout en renforçant la culture musicale et le goût des jeunes générations pour nos créateurs et interprètes, qui sont souvent de très grand talent.
En ce qui concerne le secteur public de l'audiovisuel, je tiens, madame la ministre, à dire une nouvelle fois combien je suis satisfait qu'ARTE voie sa liberté assurée et son indépendance éditoriale confirmée, garantissant ainsi la lettre et l'esprit de la convention franco-allemande. Je souhaite à nouveau bonne chance à ses dirigeants : qu'ils continuent de nous réjouir, nous et tous ceux qui sont avides de culture !
En revanche, permettez-moi, madame la ministre, de continuer de m'interroger sur vos propositions concernant La Cinquième. A ce jour, nous restons dans l'ignorance et attendons donc avec impatience la deuxième lecture du projet de loi.
Sachez cependant que nous ferons tout pour préserver la qualité des programmes de cette chaîne ainsi que le montant de son financement.
La Cinquième, voulue par le Sénat - puisque ce sont nos collègues MM. Laffitte et Trégouët qui sont à l'origine de cette chaîne - est aujourd'hui une des fiertés du paysage audiovisuel français, et je tiens à faire savoir à l'ensemble de son personnel combien, ici, nous sommes attentifs à son devenir et prêts à nous battre afin qu'ils puissent continuer d'accomplir leur mission.
Malgré tous les points positifs qui m'incitent à voter en faveur de cette loi, je tiens à émettre ici une réserve concernant le mode de nomination du président de France Télévision, tel qu'il a été adopté.
En effet, la modification retenue par notre assemblée, qui tend à partager le pouvoir de nomination entre l'exécutif et le CSA - ce dernier ne détenant d'ailleurs plus qu'un simple pouvoir de proposition - entraîne, selon moi, une dilution de la responsabilité des différents acteurs et ne manquera pas de soulever de nombreuses difficultés, notamment en cas d'application d'éventuelles sanctions à l'encontre d'un président ainsi nommé.
Je souhaite donc que notre assemblée réfléchisse de nouveau à cette disposition.
M. Claude Estier. Très bien !
M. Michel Pelchat. Je dirai en conclusion, madame la ministre, que le groupe des Républicains et Indépendants et moi-même, espérant que l'essentiel des améliorations adoptées par notre assemblée sera conservé en deuxième lecture, pensons que, comme votre projet de loi initial, le texte issu des travaux de notre assemblée va dans la bonne direction. C'est pourquoi nous le voterons sans hésitation. ( Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme Pourtaud.
Mme Danièle Pourtaud. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous achevons l'examen de ce projet de loi après de longs débats, qui ont transformé en profondeur le texte issu de l'Assemblée nationale.
Comme j'ai eu l'occasion de le dire dans la discussion générale, adapter notre secteur audiovisuel aux grands bouleversements mondiaux qui se produisent sous nos yeux suppose de concilier deux objectifs tout aussi fondamentaux l'un que l'autre : d'une part, assurer aux groupes français de l'audiovisuel, publics et privés, les moyens de défendre leur place dans la compétition internationale ; d'autre part, garantir la liberté de choix au citoyen-téléspectateur, c'est-à-dire préserver notre identité culturelle et assurer le pluralisme.
Il me semble, madame la ministre, que votre projet de loi s'inscrivait pleinement dans la réalisation de cette ambition. Malheureusement, nous ne pouvons pas en dire autant du texte tel qu'il a été modifié par la majorité sénatoriale.
Si ce texte n'a pas été transformé autant que certains l'auraient souhaité, il ne constitue plus, à mes yeux, un ensemble cohérent de mesures visant à réformer en profondeur la législation s'appliquant à l'audiovisuel français.
Je tiens à redire que nous soutenons la réforme présentée par le Gouvernement, texte dont vous avez été, madame la ministre, le principal artisan, et ce en dépit de l'incident allemand qui vous a conduit à retirer ARTE de la holding lors du débat devant notre assemblée.
Cette réforme était fondée sur des principes simples : d'une part, pour garantir l'équilibre entre le secteur privé et le secteur public dans un univers très concurrentiel, une réforme des structures et du mode de financement de l'audiovisuel public concrétisée par la mise en place de la holding et des contrats d'objectifs, ainsi que par la réduction de la publicité sur les chaînes publiques, compensée par le remboursement intégral des exonérations de redevance ; d'autre part, pour garantir le pluralisme, une meilleure régulation du secteur privé concrétisée par un pouvoir d'investigation élargi du CSA et des dispositions garantissant plus de transparence et moins de concentration chez les opérateurs, et par une plus grande cohérence entre les régimes du câble et du satellite.
De tout cela, il ne reste plus grand-chose après le passage du projet de loi devant le Sénat.
Si la majorité sénatoriale, faute de combattants et de réelles convictions, n'a pas réussi à supprimer la disposition majeure que constitue la diminution des écrans publicitaires sur les chaînes publiques, elle a néanmoins amendé le texte dans un sens que nous ne pouvons cautionner.
Elle l'a fait d'abord en prévoyant - sans oser pourtant le présenter comme tel - le retour à la nomination des présidents des chaînes et des radios publiques par l'Etat.
Faut-il encore préciser que le renforcement du secteur public et sa crédibilité sont fondés sur son indépendance par rapport au pouvoir politique ? La rupture du cordon ombilical est consacrée depuis 1982. Je ne perçois pas très bien l'intérêt de la remise en cause d'un tel acquis !
Nous tenons par ailleurs à la suppression de l'exclusivité des chaînes publiques sur TPS et à son obligation symétrique, le must carry, sur toutes les plates-formes satellitaires.
Par ailleurs, il est évident que la majorité sénatoriale n'aime pas la transparence. Les pouvoirs du CSA ont été, de manière générale, bien entamés par le Sénat, notamment le pouvoir d'investigation qu'il s'était vu confier pour surveiller les opérateurs privés. Ont ainsi été supprimées les dispositions permettant au régulateur d'appréhender les marchés publics sur lesquels les opérateurs sont partie prenante.
Par ailleurs, en procédant à la suppression des critères d'attribution des fréquences radio, le Sénat renvoie à l'autorité administrative le soin de reprendre les catégories déterminées dans son communiqué 34, sans plus de cadrage pour la guider. Nous pensons au contraire que le législateur est parfaitement dans son rôle quand il indique que, au nom de l'intérêt qu'elles présentent pour le fonctionnement de notre démocratie, les radios associatives et les radios généralistes doivent bénéficier de priorités.
Je ne m'attarderai pas sur d'autres dispositions surprenantes ajoutées par notre assemblée, notamment celles qui assouplissent de façon déraisonnable le régime d'incompatibilité des membre du CSA.
Enfin, nous ne pouvons nous satisfaire de la volonté de M. le rapporteur de légiférer, de manière prématurée, sur le sujet du numérique hertzien terreste, à propos duquel le Gouvernement s'était engagé à faire des propositions dès qu'il serait en possession du rapport de M. Hadas-Lebel. A vouloir prendre le Gouvernement de vitesse à tout prix et sans disposer de toutes les données du problème, on en arrive à une solution mal ficelée calquant le régime juridique applicable au satellite numérique hertzien de terre, qui ne présente évidemment pas les mêmes caractéristiques.
Voilà pour les principaux amendements qui sont venus, à nos yeux, dénaturer le projet de loi.
Certes, on relève quelques points positifs dans l'apport du Sénat.
S'agissant tout d'abord des télévisions associatives, même si c'est l'amendement du rapporteur pour avis de la commission des finances, M. Belot, qui a été retenu, je me réjouis que les associations puissent dorénavant être autorisées à émettre selon la procédure de droit commun. Je constate néanmoins que cet amendement, en légalisant la diffusion à la fois pour les associations et les sociétés d'économie mixte, mélange deux types de projets sensiblement différents. Permettez-moi de douter de la sincérité des motivations de son auteur en ce qui concerne l'expansion des télévisions associatives à l'échelle locale.
Il est certain que l'adoption de l'amendement du groupe socialiste visant à accroître la durée des autorisations provisoires d'émettre sans procéder à un appel à candidatures constitue une avancée pour les associations faisant de la télévision scolaire ou universitaire,.
Il faudra maintenant assurer un financement pérenne à ces télévisions associatives. Sur cette question, la balle est dans votre camp, madame la ministre.
Par ailleurs, je suis satisfaite que, parmi les amendements significatifs que le groupe socialiste a présentés, le Sénat en ait accepté quelques-uns - trop rares à notre avis - comme ceux qui visent à limiter la durée de détention des droits d'une oeuvre cinématographique ou audiovisuelle à trois ans, ou à permettre à un éditeur de services dûment conventionné par le CSA d'être repris dans l'offre d'un distributeur, ou encore à mieux équilibrer les rapports entre les distributeurs de services et les chaînes thématiques qu'ils distribuent.
M. Michel Pelchat. Monsieur le président, le temps de parole n'est-il pas de cinq minutes pour une explication de vote ?
M. Alain Joyandet. Si !
M. le président. Madame Pourtaud, pourriez-vous vous rapprocher de votre conclusion, je vous prie ?
Mme Danièle Pourtaud. Je m'en rapproche, monsieur le président, mais je comprends l'impatience de mes collègues, car je leur dis quelques petites vérités désagréables à entendre ! (Exclamations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Michel Pelchat. Nous avons eu la correction de respecter notre temps de parole, faites-en donc autant !
Mme Danièle Pourtaud. Je ne pourrai me contenter de ces quelques mesures éparses, surtout au regard du grand nombre de dispositions négatives ajoutées par la majorité sénatoriale.
Je ne crois pas que ce texte, curieusement - mais est-ce vraiment une surprise ? - plus dirigiste à l'égard du secteur public et plus libéral pour le secteur privé, permette mieux à notre secteur audiovisuel de relever les défis essentiels de la concurrence désormais mondiale auxquels il est confronté. Je pense en particulier à la nécessité de produire considérablement plus d'oeuvres ou d'émissions françaises pour relever le défi de l'« explosion des tuyaux ».
C'est pourquoi le groupe socialiste, vous l'aurez compris, votera contre le texte tel qu'il est issu des travaux du Sénat. (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. Ralite.
M. Jack Ralite. Au cours de la discussion du présent projet de loi, nous avons connu des moments d'intense confrontation, qui n'ont d'ailleurs pas été inutiles.
L'introduction du numérique, par exemple, a donné lieu à un vrai débat : rien n'était écrit, nous nous trouvions confrontés à un problème commun que nous avons essayé, passez-moi l'expression, de nous « coltiner ». Que nous ayons eu ce débat constitue un petit atout qui, s'ajoutant au rapport que le Gouvernement nous a transmis, facilitera l'approfondissement de la question et donc le choix des mesures adéquates au moment de la deuxième lecture.
L'idée qui constamment m'anime, c'est celle de la responsabilité publique. Incontestablement, cette notion progresse dans le monde. Par exemple, j'étais samedi et dimanche derniers - j'en ai d'ailleurs averti Mme la ministre - à la réunion qui s'est tenue à Rome et au cours de laquelle a été décidée la création d'un espace consacré au cinéma latin. Outre de nombreux pays d'Amérique latine s'y trouvaient représentés les pays de culture latine que sont la France, l'Espagne, le Portugal et l'Italie. La nécessité d'une coopération internationale ouverte et multipolaire a fait l'unanimité et le texte voté à l'issue de cette réunion y insiste ; sa régulation devrait être proposée à l'OMC après avoir été élaborée dans une autre entité internationale pour qui marchandise et culture ne sont pas une seule et même chose.
J'ai déjà eu l'occasion d'évoquer devant notre assemblée l'appel de Nouméa pour la diversité culturelle, appel signé de Mme Tjibaou et de M. Vergès.
On peut y lire que la diversité, qui fait la richesse de la culture humaine au-delà des frontières et à travers les siècles est menacée ; à l'heure, en effet, de la mondialisation du marché et des échanges, l'uniformisation d'une production de masse et des modes de vie de plus en plus soumis aux contraintes du marché menacent les expressions multiples de la créativité humaine.
Puis, à l'issue de la table ronde des ministres de la culture à laquelle, madame la ministre, vous avez non seulement participé, mais dont vous avez été l'initiatrice, le texte, qui a été voté par cinquante-trois pays, reconnaît que la culture ne saurait avoir la deuxième place par rapport à l'économie.
J'évoque enfin la coalition pour la diversité culturelle au Canada, dont les conclusions sont de même nature et revêtent même une verdeur dont les trois premiers textes que j'ai cités sont dépourvus. J'ai par ailleurs relevé, dans Le Monde d'hier, dans un dossier sur le libéralisme, la phrase suivante : « philosophie de liberté, la théorie libérale souffre d'avoir oublié son éthique et d'imposer un modèle unique au mépris des cultures et des Etats ». Dans Les Echos , Oskar Lafontaine, l'un des leaders du socialisme allemand, soutenait cette même thèse.
Tout cela m'amène à penser qu'un espace public est en train de se créer dans le monde, espace qui devrait devenir une référence.
Je n'emploie pas ici le mot « libéralisme » avec agressivité. Seulement, le libéralisme a une histoire et, en ce moment, il se caricature lui-même. Ce qui m'a gêné dans notre débat - qui, par ailleurs, je l'ai dit, a été riche, et a donné lieu à l'examen d'amendements intéressants venant de différents groupes - c'est précisément que cette caricature domine et qu'elle imprègne le texte issu de nos travaux.
Par exemple, s'agissant des missions de service public, on fait du rapport entre l'Etat et le secteur public un rapport d'argent. Or, lorsqu'on parle de « mission », on vise un rapport d'éthique et nous sommes dans des sociétés de conscience.
A l'article 2, il n'est plus question de la constitution d'un pôle industriel permettant d'intégrer les nouvelles techniques de diffusion et de production. Cela me gêne beaucoup aussi ! Cet apport de l'Assemblée nationale m'intéressait en effet. Dans le même temps, le rattachement de la SFP - c'est le dernier outil qui nous reste - n'est pas acquis.
A l'article 5, les missions de recherche et de production de l'INA sont supprimées.
A l'article 7, c'est le monopole de TDF qui disparaît.
Par un article additionnel avant l'article 20, il est prévu que seulement deux des six multiplex envisagés pour le numérique hertzien soient attribués au service public.
Sur l'article 26, je cite un commentaire de notre rapporteur : « dans la rédaction résultant des amendements adoptés par l'Assemblée nationale, l'article 26 du projet de loi soumet l'exploitation des réseaux câblés à un régime d'économie administrée incompatible avec le contexte fortement concurrentiel de l'économie du câble ».
En vérité, c'est ce mot « concurrence » qui ne peut gouverner le monde ! L'exception culturelle est un principe supérieur à la concurrence. La concurrence tue toujours et, en général, elle tue le petit. Or la création est toujours petite quand elle émerge.
Enfin, à l'article 28, il est prévu que le CSA a la liberté d'apprécier le degré de gravité d'un manquement justifiant le lancement de la procédure de sanction. Quand il « prend » cette liberté, le CSA, bien évidemment, apprécie la loi, mais l'expérience récente nous montre qu'il faut être ferme : il faut dire le droit.
Ce sont là des questions qui me travaillent l'esprit et des principes sur lesquels il faut fonder le débat dans ce domaine si capital.
Ainsi, le 15 février, à Genève, les négociations de l'OMC vont reprendre, et, bien évidemment, j'espère que la voix de la France, qui a tant porté à Seattle, où Mme la ministre a défendu notre dignité nationale et notre vocation internationale, aura le même écho. C'est possible si l'on en juge par le dernier amendement que nous avons examiné.
M. le président. Veuillez conclure, monsieur Ralite !
M. Jack Ralite. Cependant, ce soir, sa voix n'a pas beaucoup d'écho (Sourires) et je ne peux approuver le projet de loi qui nous est soumis dans sa forme actuelle.
A l'extérieur de notre assemblée, je vais, avec d'autres, me battre pour qu'il s'améliore, qu'il épouse la nouvelle technologie, mais sans se laisser maîtriser par les forces de l'argent, en oubliant les hommes et les femmes.
Un sénateur du RPR. Les forces du mal !
M. le président. La parole est à M. Diligent.
M. André Diligent. Mon propos sera plutôt un propos incident qu'un propos véritablement lié aux intéressants problèmes dont nous venons d'être saisis.
Permettez-moi de le dire, je suis un adversaire acharné de la censure. Je déteste l'ordre moral : c'est, généralement, le règne des « faux-culs » - excusez-moi, je retire le terme ! - le règne des hypocrites sur les béni-oui-oui. Par conséquent, je ne serai jamais partisan de certaines méthodes.
Néanmoins j'ai été épouvanté par la recrudescence ces jours-ci de certaines scènes. Ainsi, la télévision nous a appris que trois enfants en avaient torturé, pendant trois mois, un autre. La veille, deux enfants ont voulu assassiner un de leur camarade en le faisant basculer du haut d'un escalier. L'âge de la délinquance ne cesse de baisser ! Il s'agit non plus de jeunes de quinze ou seize ans, mais d'enfants de six, de huit, de neuf ou de dix ans, âge auquel ils sont encore plus malléables qu'à l'adolescence.
Lorsque j'ai interrogé la direction de la chaîne dont je suis membre du conseil d'administration, il m'a été répondu textuellement, avec, à l'appui, un rapport savant d'un grand institut de sondage, que l'influence de la représentation de la violence sur les comportements n'a jamais pu être démontrée. Il ne faut pas avoir eu d'enfants ! Autant j'approuve totalement les propos de M. Ralite, autant je suis étonné de la nullité des instituts de sondage qui peuvent livrer de tels rapports. Je vous communiquerai, madame la ministre, ce rapport qui date de trois ans, mais depuis l'ignorance s'est encore accentuée.
Je ne suis pas en mesure de vous proposer des dispositions précises. Je demande simplement que, d'ici à la deuxième lecture, on se rapproche du CSA et qu'on lui demande de prendre davantage ses responsabilités. Il s'agit non pas de créer de nouveaux textes ou d'instaurer une censure, mais de faire prendre conscience de ces faits et de chercher les moyens pour y parvenir car il en va du sort d'un certain nombre de jeunes. Sur les cinq chaînes que je regarde, j'ai compté à quatre reprises des échanges de tirs de mitraillettes et de coups dans des parkings. Comment voulez-vous que les enfants ne soient pas tentés par ce genre d'actions et que ces images fascinantes n'exercent pas une influence sur leur comportement ?
Madame la ministre, voilà ce que je souhaitais vous dire, en vous demandant de mettre à profit le temps dont vous disposez encore pour améliorer ce texte. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Laffitte.
M. Pierre Laffitte. Nous avons bien travaillé sur un texte qui était déjà bien préparé. Je noterai, en particulier, le renforcement du financement public de la télévision publique grâce au reversement intégral du produit de la redevance, qui est une grande avancée.
Nous avons essayé de montrer l'attachement du Sénat à cette télévision publique, d'affirmer l'importance de la La Cinquième, notamment de la banque des programmes et des services, ainsi que la qualité, désormais reconnue, d'ARTE et son indépendance.
Les débats que nous avons menés au sujet de la numérisation et de la libération des fréquences étaient utiles. Je sais, madame la ministre, qu'ils vous ont paru prématurés. En tout cas, il n'est pas prématuré d'évoquer ce problème de façon que l'on puisse se faire une opinion sur cette question. Selon moi, il est important que nous ayons pu inscrire dans ce texte que, à partir du moment où des fréquences, bien extrêmement rare, sont libérées, il appartient au Gouvernement de définir la part de ces fréquences qui doit revenir à l'audiovisuel et celle qui, éventuellement, doit revenir à d'autres services très importants tels que la télémédecine, l'éducation à distance, les télécommunications ou la sécurité. Cela n'est que la transposition au phénomène nouveau de la numérisation de ce qui existe dans la législation.
En revanche, il faut effectivement veiller à ne pas tuer, par une affectation trop rapide, potentielle, l'industrie du câble et des bouquets satellitaires. Cela pose en effet un problème car la durée du retour sur investissement est considérable.
Par ailleurs, il est évident que nous ne savons pas ce que sera dans cinq ans la demande nationale publique, notamment en matière de télévision de proximité ou de télévision thématique par rapport aux différents services de télévision ou de radio généralistes qui seront nécessaires.
Sur ce plan, vous avez raison de dire qu'il faut être prudent. Toutefois, nous avons eu raison de lancer le débat, afin qu'il puisse être enrichi. En effet, si nous ne l'avions pas lancé il n'aurait pas eu lieu et nous n'aurions probablement pas une connaissance aussi claire à cet égard.
Ce texte qui, comme tous les textes, n'est pas parfait constitue une avancée. Aussi, la majorité de mon groupe le votera avec plaisir, car les débats ont été longs, instructifs et intéressants, comme cela a été souligné par un certain nombre d'orateurs, qu'ils siègent à droite ou à gauche. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et du RPR.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le président, je vous remercie de me donner la parole. Je serai concise afin de ne pas surcharger le travail des uns et des autres et l'emploi du temps.
Je voudrais d'abord remercier le Sénat de l'accueil qu'il m'a réservé pour l'examen de ce texte. Je vous remercie du profit que j'ai pu tirer moi-même de nos échanges, qui ont été au-delà d'un débat formel ou d'un débat de positionnement par rapport à l'Assemblée nationale, laquelle avait examiné ce texte préalablement. Ce contexte est particulièrement favorable à une évolution positive du projet.
Je voudrais remercier tout particulièrement l'ensemble du Sénat d'avoir voté à l'unanimité la solution que j'ai proposée au Premier ministre pour ARTE. En effet, s'agissant de cette difficulté sur laquelle nous aurions pu discuter certainement encore longtemps, il convenait, vous l'avez compris, de régler cette question rapidement. Je voudrais très sincèrement vous exprimer ma reconnaissance.
Je tiens à souligner aussi - et cela concerne quelques sujets comme le numérique et La Cinquième - la nécessité de bien rendre cohérent l'ensemble du dispositif qui concerne l'évolution de l'autorité de régulation qu'est le CSA. Je crois qu'avec le temps l'évolution se poursuivra, dans un contexte qui devient plus serein.
Je voudrais rassurer d'emblée votre assemblée, en particulier M. de Broissia qui est très inquiet sur ce point : le fait que la deuxième lecture à l'Assemblée nationale ait lieu seulement au mois de mars ne change en rien le calendrier général et la mise en oeuvre des dispositions que prévoient ce texte. Celles-ci seront, je l'espère, appliquées le plus rapidement possible.
Notre pays a besoin de dispositions claires. Ce texte est en quelque sorte le socle permettant de travailler sur les dispositions financières, réglementaires, économiques qui peuvent favoriser le développement de notre activité de création et de diffusion en France et en Europe. Je suis en effet sensible aux propos de chacun de ceux qui ont bien voulu s'exprimer dans les explications de vote. Nous ne pouvons affirmer notre place ni être présents sur le plan européen et international que si nous savons allier une position politique claire - non pas un protectionnisme, mais une position offensive - à une performance et une créativité qui nous placent au premier rang. Il s'agit là d'un vrai défi, car nous devrons mener cette évolution pour le service public, pour les entreprises privées, pour les producteurs, pour les radios comme pour les télévisions. Révolution technologique, révolution ou évolution culturelle : c'est l'histoire qui tranchera sur ce que nous vivons aujourd'hui.
Je voudrais remercier le Sénat d'avoir permis, par ses débats, de progresser, d'écrire une page nouvelle. Je me réjouis de revenir vers vous avec les assurances que vous avez souhaitées et que je me suis engagée à vous apporter lors de la deuxième lecture, qui sera positive, je le crois, tant à l'Assemblée nationale que dans cette enceinte. (Applaudissements.)

5

DÉPÔT D'UN PROJET DE LOI

M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre un projet de loi autorisant l'approbation de l'instrument d'amendement à la Constitution de l'Organisation internationale du travail.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 191, distribué et renvoyé à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

6

TRANSMISSION D'UN PROJET
DE LOI ORGANIQUE

M. le président. J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi organique, adopté par l'Assemblée nationale, tendant à favoriser l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats de membre des assemblées de province et du congrès de la Nouvelle-Calédonie, de l'assemblée de la Polynésie française et de l'assemblée territoriale des îles Wallis et Futuna.
Le projet de loi organique sera imprimé sous le n° 193, distribué et renvoyé à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

7

TRANSMISSION D'UN PROJET DE LOI

M. le président. J'ai reçu, transmis par le Premier ministre, un projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, tendant à favoriser l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 192, distribué et renvoyé à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

8

DÉPÔT DE RAPPORTS

M. le président. J'ai reçu de M. Robert Del Picchia un rapport fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur :
- le projet de loi autorisant la ratification du protocole établi sur la base de l'article K. 3 du traité sur l'Union européenne, relatif au champ d'application du blanchiment de revenus dans la convention sur l'emploi de l'informatique dans le domaine des douanes et à l'inclusion du numéro d'immatriculation du moyen de transport dans la convention (n° 48, 1999-2000) ;
- le projet de loi autorisant la ratification de la convention établie sur la base de l'article K. 3 du traité sur l'Union européenne, sur l'emploi de l'informatique dans le domaine des douanes (n° 49, 1999-2000) ;
- le projet de loi autorisant la ratification du protocole, établi sur la base de l'article K. 3 du traité sur l'Union européenne, concernant l'interprétation, à titre préjudiciel, par la Cour de justice des Communautés européennes de la convention sur l'emploi de l'informatique dans le domaine des douanes (n° 50, 1999-2000) ;
- le projet de loi autorisant la ratification de l'accord relatif à l'application provisoire entre certains Etats membres de l'Union européenne de la convention établie sur la base de l'article K. 3 du traité sur l'Union européenne sur l'emploi de l'informatique dans le domaine des douanes (n° 51, 1999-2000) ;
- le projet autorisant la ratification de la convention établie sur la base de l'article K. 3 du traité sur l'Union européenne, relative à l'assistance mutuelle et à la coopération entre les administrations douanières (ensemble une annexe) (n° 138, 1999-2000).
Le rapport sera imprimé sous le n° 185 et distribué.
J'ai reçu de M. André Rouvière un rapport fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi autorisant l'adhésion de la République française à la convention internationale d'assistance mutuelle administrative en vue de prévenir, de rechecher et de réprimer les infractions douanières (ensemble 11 annexes) (n° 137, 1999-2000).
Le rapport sera imprimé sous le n° 186 et distribué.
J'ai reçu de M. Christian Bonnet un rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur la proposition de loi adoptée avec modifications par l'Assemblée nationale, en deuxième lecture, instituant un défenseur des enfants (n° 97, 1999-2000).
Le rapport sera imprimé sous le n° 187 et distribué.
J'ai reçu de M. Jean-Paul Delevoye un rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur :
- le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, relatif à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage (n° 460, 1998-1999)
- et la proposition de loi de M. Nicolas About visant à renforcer les moyens d'expulsion du préfet et du maire, en cas d'occupation illégale de locaux industriels, commerciaux ou professionnels par les gens du voyage (n° 78, 1998-1999).
Le rapport sera imprimé sous le n° 188 et distribué.
J'ai reçu de M. Francis Grignon un rapport fait au nom de la commission des affaires économiques et du Plan sur la proposition de loi de MM. Jean-Pierre Raffarin, Francis Grignon, Louis Althapé, Pierre André, Philippe Arnaud, Mme Janine Bardou, MM. Bernard Barraux, Michel Bécot, Georges Berchet, Jean Bizet, Jean Boyer, Marcel Deneux, Jean-Paul Emin, André Ferrand, Hilaire Flandre, Jean François-Poncet, Alain Gérard, François Gerbaud, Mme Anne Heinis, MM. Pierre Hérisson, Rémi Herment, Jean Huchon, Patrick Lassourd, Jean-François Le Grand, Guy Lemaire, Paul Natali, Louis Moinard, Jean Pépin, Charles Revet et Raymond Soucaret, tendant à favoriser la création et le développement des entreprises sur les territoires (n° 254, 1998-1999).
Le rapport sera imprimé sous le n° 189 et distribué. J'ai reçu de M. Jean-François Le Grand un rapport fait au nom de la commission des affaires économiques et du Plan sur le projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine des transports (n° 484, 1998-1999).
Le rapport sera imprimé sous le n° 190 et distribué.

9

ORDRE DU JOUR

M. le président. Voici quel sera l'orde du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au jeudi 27 janvier 2000, à neuf heures trente et à quinze heures :
Discussion des conclusions du rapport (n° 177, 1999-2000) de M. Pierre Fauchon, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur sa proposition de loi (n° 9 rectifié, 1999-2000) tendant à préciser la définition des délits non intentionnels.
Le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte est expiré.

Délais limite pour les inscriptions de parole
et pour le dépôt des amendements

Projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine des transports (n° 484, 1998-1999) :
- Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 31 janvier 2000, à dix-sept heures ;
- Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 31 janvier 2000, à dix-sept heures.
Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, relatif à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage (n° 460, 1998-1999) :
- Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mardi 1er février 2000, à dix-sept heures ;
- Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 1er février 2000, à dix-sept heures.
Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant création d'une Commission nationale de déontologie de la sécurité (n° 480, 1997-1998) :
- Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mardi 1er février 2000, à dix-sept heures ;
- Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 1er février 2000, à dix-sept heures.
Personne de deamnde la parole ?...
La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures vingt-cinq.)

Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON





QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)


Fermeture de services du Trésor public dans les zones rurales

706. - 26 janvier 2000. - M. Xavier Darcos attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur le projet de réforme envisagé par son département ministériel, à la suite des conclusions de la mission 2003 présidée par MM. Bert et Champsaur, et dont l'objet tend à la fermeture des services du Trésor public dans les cantons ruraux. De nombreuses communes rurales de Dordogne étant particulièrement préoccupées par la suppression de ces services de proximité qui sont indispensables en termes d'aménagement du territoire, il souhaite recueillir des précisions sur sa politique mise en oeuvre pour les services déconcentrés du Trésor.