Séance du 8 février 2000







M. le président. La parole est à Mme Borvo, auteur de la question n° 702, adressée à Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité.
Mme Nicole Borvo. Mme la secrétaire d'Etat, je souhaite attirer l'attention de Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité sur la dégradation des conditions de travail des personnels et du service rendu aux assurés sociaux des caisses d'assurance maladie, dégradation aggravée par l'afflux des demandes de CMU.
Comme vous le savez, les caisses d'assurance maladie sont chargées, depuis le 1er janvier 2000, d'accueillir les bénéficiaires de la CMU, qui doit permettre à 6 millions de personnes percevant de faibles revenus d'être soignées gratuitement.
Autant j'ai soutenu, comme les autres parlementaires communistes, la mise en place de la CMU, même si nous pensons qu'elle pourrait être améliorée, autant il me semble que les 1 400 emplois prévus par la loi de financement de la sécurité sociale ne sont pas suffisants pour faire face à la demande. Les différents acteurs avaient d'ailleurs prévu, dès l'année dernière, qu'il faudrait créer un minimum de 3 000 emplois, et j'avais personnellement attiré l'attention du Gouvernement sur ce sujet.
La caisse primaire d'assurance maladie de Paris est le seul organisme en France à n'avoir demandé aucun effectif supplémentaire, alors que la capitale est un des départements les plus concernés, du fait de la dégradation de la situation, par l'afflux de demandes de CMU. Or, vous le savez, les organisations syndicales demandent que 140 personnes au minimum soient embauchées pour faire face à l'instauration de la CMU, mais aussi afin de résorber les 750 000 dossiers en souffrance à Paris. Cette revendication ne paraît pas abusive.
Jeudi dernier, les salariés des caisses d'Ile-de-France - où il y aurait 3,8 millions de feuilles de soins en souffrance - ont manifesté en vue d'obtenir de nouveaux moyens, et Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité a elle-même reconnu qu'il fallait débloquer des moyens supplémentaires.
Ne vous paraît-il pas, dans ces conditions, nécessaire et urgent d'embaucher au niveau national et en contrat à durée indéterminée les 3 000 personnes que la direction de l'assurance maladie avait jugées indispensables pour mettre en place la CMU ?
Au-delà, que compte faire le Gouvernement pour engager les moyens nécessaires afin d'assurer un service de qualité aux assurés et de meilleures conditions de travail aux personnels ? A cette fin, ne serait-il pas nécessaire de remplacer les départs en retraite et d'embaucher du personnel supplémentaire pour compenser la mise en place de la réduction du temps de travail, ce contre quoi le patronat se bat farouchement, comme vous le savez ?
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat aux droits des femmes et à la formation professionnelle. Comme vous le soulignez, madame la sénatrice, il existe actuellement des retards importants dans le traitement des dossiers par les caisses primaires d'assurance maladie. Le Gouvernement a tout à fait conscience des perturbations subies par les assurés sociaux du fait de ces retards. D'un traitement moyen de trois à quatre jours pour les feuilles de soins, nous en sommes aujourd'hui à sept jours.
Ces difficultés ont plusieurs origines.
La couverture maladie universelle n'explique pas, à elle seule, l'ensemble des difficultés des caisses primaires d'assurance maladie. Le fonctionnement des caisses a aussi été perturbé par les épidémies de grippe et de gastro-entérite, ainsi que par la mise en place d'un nouveau système informatique.
Bien entendu, nous ne voulons pas que la mise en place de la CMU se traduise par une surcharge de travail pour les agents qui travaillent dans les caisses primaires. Comme nous le savons, ces agents sont heureux de remplir une mission qu'ils considèrent comme une mission de service public et qui va permettre à 6 millions de Français de disposer d'une couverture gratuite des soins.
Comme vous l'avez rappelé, madame la sénatrice, les caisses primaires ont bénéficié dans un premier temps, au mois de novembre, de 1 400 nouveaux emplois.
Après avoir fait, avec la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés, un point précis des difficultés rencontrées, le Gouvernement a dégagé de nouveaux moyens, et, le 1er février dernier, la commission de gestion administrative de la Caisse nationale d'assurance maladie a donné un avis favorable à l'attribution de moyens supplémentaires aux caisses.
Nous avons ainsi décidé d'employer 500 personnes en contrat de quatre mois pour résorber les retards, et 500 emplois-jeunes vont venir aider à un meilleur accueil et aux aides administratives. Nous avons également créé 150 nouveaux emplois à durée indéterminée. Je précise qu'une partie de ces nouveaux emplois seront affectés à la caisse primaire de Paris.
Le Gouvernement, tout comme vous, madame la sénatrice, est attentif à la négociation sur la réduction du temps de travail à la sécurité sociale. Il souhaite que le dialogue au sein de l'Union des caisses nationales de sécurité sociale - organisme qui est en charge de la vie conventionnelle dans les organismes de sécurité sociale - soit fructueux et aboutisse rapidement. La récente définition d'un calendrier de négociation est, à ce titre, un élément positif.
Mme Nicole Borvo. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo. Madame la secrétaire d'Etat, je vous remercie des indications que vous m'avez données sur les postes qui vont être créés. Mais il me semble que les besoins ne seront pas satisfaits, ce qui pose, à mon avis, le problème du financement de la CMU et, plus largement, de la sécurité sociale.
Je profite de l'occasion qui m'est donnée aujourd'hui pour dire que l'Etat doit immédiatement répartir équitablement les fruits de la croissance, qui sont plus importants que prévus. Je pense, par exemple, à l'utilisation des 2 milliards de francs de bénéfices supplémentaires prévus cette année à la CNAM.
Au-delà, vous savez que nous sommes les fervents partisans d'une contribution accrue des entreprises au financement de la sécurité sociale. Nous avons d'ailleurs fait des propositions sur la modulation des contributions patronales.
Concernant la CMU, j'ai également formulé la proposition d'instaurer une cotisation sociale sur les revenus financiers des entreprises. Cela permettrait de dégager des moyens pour ces salariés précaires qui sont à peine mieux lotis que les personnes vivant avec moins de 3 500 francs. Là aussi, il est de la responsabilité de l'Etat de mieux répartir les fruits de la croissance.
Toutes ces mesures vont dans le sens d'un nécessaire rééquilibrage entre les revenus du travail et ceux du capital pour financer notre système de protection sociale. Cela va à l'encontre de l'action du patronat, qui, vous l'avez évoqué, fait feu de tout bois aussi bien contre les 35 heures que pour réduire les prestations de l'assurance maladie à une peau de chagrin, ouvrant par là même la porte aux AGF et autres AXA.

REMBOURSEMENT DES TRAITEMENTS
DES MALADIES ORPHELINES