Séance du 8 février 2000







M. le président. La parole est à M. Jean Faure, auteur de la question n° 669, adressée à Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.
M. Jean Faure. Au moment où nous examinons les projets du Gouvernement en matière de financement de la filière bois à la suite des dégâts consécutifs à la tempête de décembre dernier, je souhaite attirer votre attention, madame la ministre, sur la situation dans laquelle se trouvent certaines communes en raison de l'inadéquation qui perdure entre les objectifs du Gouvernement dans le domaine de la diversification énergétique et les outils financiers mis en oeuvre pour la réalisation de ces objectifs.
Chacun s'accorde à reconnaître l'intérêt de la production décentralisée d'énergie en termes d'aménagement du territoire, notamment pour ce qui est de la filière bois, très développée dans mon département de l'Isère. Or les communes rurales, qui sont pourtant les mieux placées pour mettre en oeuvre d'ambitieux projets de diversification, se trouvent dans une situation extrêmement difficile. En effet, les projets énergétiques qu'elles ont mis à l'étude sont jugés excellents sur les plans technique et économique, mais elles ne peuvent les mettre en oeuvre. Par exemple, la mise en place de chaufferies à plaquettes leur permettrait d'économiser des sommes importantes sur leur budget de fonctionnement, les temps de retour de ces investissements étant très courts puisqu'ils sont de l'ordre de quelques années.
Ces communes rurales obtiennent des subventions diverses au titre des politiques énergétiques menées par l'Etat, l'Europe ou les collectivités régionales et départementales, mais elles ne trouvent aucune structure financière pour assurer l'autofinancement restant à leur charge, qu'elles ne sont pas en mesure d'avancer car elles sont confrontées à des besoins urgents en matière de voirie, de sauvegarde du patrimoine, ou à des dépenses obligatoires qui leur interdisent tout investissement autre, si rationnel et porteur d'avenir soit-il.
Or ces communes rurales sont mises en demeure de résorber leur déficit structurel et d'abonder leur capacité d'autofinancement.
Aussi, à l'heure de la préparation du prochain budget de l'ADEME, l'agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, avez-vous, madame la ministre, l'intention de doter cette agence d'une structure financière capable soit de financer directement les projets n'ayant pu être pris en charge dans le cadre de financements traditionnels, soit de se porter caution auprès des prêteurs traditionnels ?
C'est à ce prix que la politique de diversification énergétique et de valorisation de la forêt française - à laquelle vous et moi sommes également attachés - pourra aboutir à des résultats significatifs.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Monsieur le sénateur, mon département, le Jura, est, comme le vôtre, en pointe pour ce qui est du développment de l'usage du « bois énergie », par les collectivités locales comme par les particuliers.
Je partage tout à fait votre analyse sur les difficultés auxquelles restent exposées les collectivités locales qui désirent mettre en oeuvre des projets techniques et économiques intervenant dans le domaine énergétique, et plus particulièrement pour la réalisation de chaufferies au bois, souvent accompagnées de petits réseaux de chaleur.
L'autofinancement est, en effet, un problème important, auquel se heurtent les élus locaux du fait, en particulier, des contraintes légales qui existent en matière de taux d'endettement des collectivités. Il prend une particulière acuité aujourd'hui à cause des tempêtes qui ont ravagé les forêts de notre pays.
Le développement de la valorisation énergétique du bois permettrait d'élargir les débouchés pour le volume considérable des arbres abattus. Il s'intégrerait, en outre, dans le programme de lutte contre l'effet de serre que le Gouvernement vient d'arrêter.
L'ADEME n'est pas, vous le savez, une structure financière. Elle ne peut donc ni se porter elle-même caution auprès des prêteurs traditionnels des collectivités locales ni se substituer à ces organismes.
En revanche, dans le domaine du développement des énergies nouvelles et renouvelables, tout particulièrement dans celui des chaufferies au bois, elle peut apporter des aides significatives, grâce aux 500 millions de francs annuels destinés au développement des énergies renouvelables dont elle dispose depuis 1999.
Ces aides peuvent atteindre 90 % de subvention pour les prédiagnostics et 50 % pour les études. Dans le domaine des investissements, les subventions peuvent atteindre 30 %, tant pour la chaufferie que pour le réseau de chaleur qui lui est généralement associé.
Pour le développement de ces réseaux, le Gouvernement vient de décider de demander à la Commission européenne l'autorisation de baisser à 5,5 % le taux de TVA qui les concerne.
Plus généralement, au travers des contrats de plan, un effort tout particulier devrait être mis en place pour des opérations exemplaires et démonstratives dans le domaine de la mise en valeur des énergies nouvelles et renouvelables. L'élaboration des schémas de service collectif de l'énergie, réalisée au plan régional, a permis de mieux apprécier le gisement des énergies nouvelles et renouvelables. Ce travail devrait servir à élaborer des contrats spécifiques entre les régions, l'Etat et l'ADEME.
Avant de conclure, je rappellerai pour mémoire la convention de partenariat qui a été passée entre mon ministère et le groupe Caisse des dépôts - Dexia. Il s'agit de mettre en place au service des collectivités locales des produits leur permettant de mieux développer leurs activités dans le domaine de la protection de l'environnement. Je vous invite donc, monsieur le sénateur, à examiner de façon concrète avec ce groupe les modalités qui pourraient permettre de donner un coup de fouet à la filière bois au-delà de la dimension expérimentale, qui ne suffit plus : le moment est venu de constituer concrètement une filière économiquement performante.
Je crois beaucoup au développement de cette filière, et c'est d'ailleurs l'une des opportunités que nous offre la tempête de décembre, qui aura eu paradoxalement quelques effets bénéfiques.
En conclusion, la mise en valeur des énergies nouvelles et renouvelables, en particulier de la valorisation énergétique du bois, est un sujet auquel le Gouvernement est très attaché en ce qu'il participe tout à la fois : de la nécessaire diversification énergétique, de la lutte contre l'effet de serre et du développement local, tant au travers de la valorisation des ressources locales que de la création d'emplois qui y est associée dans une filière bois dramatiquement frappée par les récentes tempêtes.
M. Jean Faure. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Faure.
M. Jean Faure. Madame la ministre, vos propos sont certes très intéressants, mais il y manque quand même un élément de réponse : comment faire face à l'autofinancement des investissements envisagés par les communes ?
A ceux qui connaissent l'étendue des dégâts et le volume de bois qui va pourrir dans les deux ou trois ans qui viennent dans les forêts, parce que nous n'aurons pas les moyens de le dégager et parce que nous n'en avons pas l'utilisation, la filière bois doit apparaître - ainsi que vous l'avez dit, madame la ministre, et je vous rends hommage sur ce point - comme un atout. Il faut profiter de l'opportunité offerte par la destruction de la forêt pour trouver d'autres débouchés à la filière bois, notamment en matière d'énergie.
J'espère, madame la ministre, que les responsables du groupe Caisse des dépôts - Dexia, auquel vous avez fait allusion, seront bien disposés lorsqu'ils nous recevront.

CONTRIBUTION DE L'ÉTAT
À LA RÉALISATION DU PLAN DE PRÉVENTION
DES RISQUES NATURELS DE LA VILLE D'AUXERRE