Séance du 2 mai 2000







M. le président. Je suis saisi de sept amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 219 est présenté par M. Althapé, au nom de la commission des affaires économiques.
L'amendement n° 76 est déposé par M. Jarlier, au nom de la commission des lois.
Tous deux tendent à rédiger comme suit le texte proposé par l'article 2 pour l'article L. 122-1 du code de l'urbanisme :
« Art. L. 122-1. - I. - Les schémas de cohérence territoriale fixent, à partir d'un projet d'aménagement et de développement durable des territoires concernés, les orientations fondamentales de l'aménagement des territoires inclus dans leur périmètre, dans le respect des équilibres résultant des principes énoncés aux articles L. 110 et L. 121-1.
« II. - Le projet d'aménagement et de développement durable s'appuie sur un diagnostic des besoins en matière de développement économique, d'aménagement de l'espace, d'environnement, d'équilibre social de l'habitat, de transports, d'équipements et de services, dans le périmètre du schéma. Il est établi en fonction des autres compétences exercées, le cas échéant, par l'établissement public chargé du schéma ou par les établissements publics de coopération intercommunale regroupés au sein d'un syndicat mixte compétent.
« III. - Au vu de ce diagnostic, le projet d'aménagement et de développement durable fixe les objectifs de nature à satisfaire les besoins qui ont été recensés. A ce titre, il définit, en particulier, les objectifs relatifs :
« 1° A l'équilibre social de l'habitat, à la mixité sociale et à la construction de logements sociaux ;
« 2° A l'équipement commercial, aux localisations préférentielles des commerces dans le périmètre du schéma de cohérence territoriale ainsi qu'aux conditions de réalisation des aires de stationnement qui les accompagnent ;
« 3° A l'équilibre entre l'urbanisation et la création de dessertes en transports collectifs ; et, en zone urbaine, à l'utilisation prioritaire de terrains desservis par des équipements ;
« 4° A la protection des paysages et à la mise en valeur des entrées de ville ;
« 5° A la prévention des risques.
« Il peut également fixer d'autres objectifs communs aux établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre inclus dans son périmètre, au titre des compétences définies aux articles L. 5214-16, L. 5214-23-1, L. 5215-20, L. 5215-20-1 et L. 5216-5 du code général des collectivités territoriales.
« IV. - Au regard du projet mentionné au III, les schémas de cohérence territoriale fixent les orientations générales d'organisation de l'espace et de restructuration des espaces urbanisés. Ils définissent les grands équilibres entre les espaces naturels, urbains, périurbains et ruraux.
« Ils déterminent les espaces et sites naturels ou urbains à progéger ; ils peuvent en définir la localisation ou la délimitation.
« V. - Les schémas de cohérence territoriale prennent en compte les programmes d'équipement de l'Etat, des collectivités locales et des établissements publics. Ils doivent être compatibles avec les chartes des parcs naturels régionaux.
« VI. - Pour leur exécution, les schémas de cohérence territoriale peuvent être complétés en certaines de leurs parties par des schémas de secteur qui en détaillent et en précisent le contenu.
« VII. - Les programmes locaux de l'habitat, les plans de déplacements urbains, les schémas de développement commercial, les plans d'occupation des sols, les cartes communales et les documents d'urbanisme en tenant lieu, les opérations foncières et les opérations d'aménagement doivent être compatibles avec les schémas de cohérence territoriale et les schémas de secteur. Il en est de même pour les autorisations prévues par les articles 29 et 36-1 de la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 d'orientation du commerce et de l'artisanat. »
L'amendement n° 219 est affecté de trois sous-amendements.
Le sous-amendement n° 912, présenté par M. Hérisson, a pour objet, au début du troisième alinéa (2°) du texte proposé par l'amendement n° 219 pour l'article L. 122-1 du code de l'urbanisme, après les mots : « à l'équipement commercial », d'insérer les mots : « et artisanal ».
Le sous-amendement n° 579 rectifié, présenté par M. Ambroise Dupont, vise à compléter la première phrase du premier alinéa du IV du texte proposé par l'amendement n° 219 pour l'article L. 122-1 du code de l'urbanisme par les mots « , notamment aux entrées de ville ».
Le sous-amendement n° 622 rectifié, déposé par MM. César, Doublet et Lassourd, tend, après la première phrase du V du texte proposé par l'amendement n° 219 pour l'article L. 122-1 du code de l'urbanisme, à insérer une nouvelle phrase rédigée comme suit : « Ils veillent, en outre, à permettre le développement des réseaux de communication ouverts au public. »
Par amendement n° 727 rectifié, Mme MichauxChevry, MM. Gournac, Lanier et Vial proposent, dans le troisième alinéa du texte présenté par l'article 2 pour l'article L. 122-1 du code de l'urbanisme, après les mots : « à protéger », d'insérer les mots : « , notamment au regard des risques naturels prévisibles ».
Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 728 rectifié est présenté par Mme Michaux-Chevry, MM. Gournac, Lanier et Vial.
L'amendement n° 948 est déposé par M. Autexier, Mme Terrade, M. Lefebvre et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Tous deux tendent, dans le troisième alinéa du texte proposé par l'article 2 pour l'article L. 122-1 du code de l'urbanisme, à remplacer le mot : « peuvent » par le mot : « doivent ».
Par amendement n° 946, MM. Le Cam, Lefebvre, Mme Terrade et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de compléter la deuxième phrase du quatrième alinéa du texte présenté par l'article 2 pour l'article L. 122-1 du code de l'urbanisme par les mots : « en prévoyant les conditions de leur insertion dans les espaces urbains ou naturels. »
Par amendement n° 729 rectifié, Mme MichauxChevry, MM. Gournac, Lanier et Vial proposent, après le septième alinéa (3°) du texte présenté par l'article 2 pour l'article L. 122-1 du code de l'urbanisme, d'insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Ils comprennent les dispositions visant à requalifier les centres des aires urbaines dévitalisées. »
En accord avec M. le rapporteur, je donne la parole à M. Jarlier, rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° 76, identique à l'amendement n° 219.
M. Pierre Jarlier, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles de législation, du suffrage universel, du règlement et l'administration générale. Nous avons souhaité conserver le nom de schéma de cohérence territoriale au détriment du schéma directeur parce qu'il s'agit effectivement, aujourd'hui, de répondre à une autre logique d'aménagement : les collectivités territoriales ou leurs établissements seront enfin dotés d'outils d'aménagement, comme la loi Chevènement a doté ces établissements d'outils institutionnels. C'est une nouvelle logique à laquelle nous souscrivons.
En revanche, par cet amendement, la commission des lois propose une nouvelle rédaction du texte présenté pour l'article L. 122-1 du code de l'urbanisme. Il y est précisé que le schéma de cohérence territoriale devra comporter un projet d'aménagement et de développement durable, qui sera établi au vu d'un diagnostic préalable des besoins et définira des objectifs.
C'est en fonction de ce projet que le schéma de cohérence territoriale fixera les grandes orientations générales d'organisation de l'espace.
Le contenu de ce projet devra, le cas échéant, être relié aux compétences des établissements publics de coopération intercommunale existants. Il pourra définir les objectifs communs aux établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre inclus dans le périmètre du schéma de cohérence territoriale au titre des compétences que ces établissements peuvent exercer en vertu du code général des collectivités territoriales.
Ces objectifs devront, en particulier, concerner l'équilibre social de l'habitat, l'équipement commercial, les transports collectifs, la protection des paysages, la mise en valeur des entrées de ville, la prévention des risques, toutes questions qui ne peuvent être réglées au simple échelon communal.
La formulation retenue en ce qui concerne l'urbanisation en priorité des secteurs desservis par les transports collectifs atténue le texte de l'Assemblée nationale.
Les règles de compatibilité prévues par cette dernière sont reprises par l'amendement, notamment pour ce qui est de la compatibilité entre le schéma de développement commercial et le schéma de cohérence territoriale.
La mention des arrondissements de Paris, Marseille et Lyon pour l'élaboration des schémas de secteur est, en revanche, supprimée.
M. le président. La parole est à M. Hérisson, pour défendre le sous-amendement n° 912.
M. Pierre Hérisson. Il est nécessaire d'intégrer dans le SCT, outre la dimension commerciale, des éléments relatifs à l'implantation artisanale. Le développement artisanal est, en effet, étroitement lié à l'implantation des commerces.
Je rappelle que les responsables des deux chambres consulaires siègent au sein de la commission départementale d'équipement commercial, grâce à l'initiative que nous devons à notre collègue M. Raffarin, à l'époque où celui-ci était au Gouvernement. Il est important que l'on retrouve cet équilibre dans le présent texte.
M. le président. La parole est à M. Ambroise Dupont, pour défendre le sous-amendement n° 579 rectifié.
M. Ambroise Dupont. Il s'agit, par cet amendement, d'attirer l'attention du législateur sur la restructuration des entrées de ville.
L'article L. 111-1-4 du code de l'urbanisme a bien provoqué dans les esprits la rupture que nous désirions, faisant en sorte qu'on réfléchisse avant d'urbaniser. Cependant, cet article L. 111-1-4 ne permet pas de résoudre les problèmes liés aux entrées de ville. Il n'avait d'ailleurs pas cet objet.
Je crois donc utile d'insister sur la restructuration des entrées de ville, et je remercie à cet égard les rapporteurs des deux commissions, en particulier notre collègue Pierre Jarlier, qui a nourri ce débat avec compétence depuis quelques années.
M. le président. La parole est à M. César, pour présenter le sous-amendement n° 622 rectifié. M. Gérard César. Il s'agit d'ajouter une courte phrase à l'amendement n° 219 de la commission. La précision est d'importance, car il s'agit du développement des réseaux de télécommunications.
Je ne développerai pas l'exposé des motifs, qui est bien long pour une phrase si courte, mais je souhaite que le Sénat adopte cet amendement, qui permettrait d'y voir beaucoup plus clair encore.
M. le président. La parole est à M. Gournac, pour présenter les amendements n°s 727 rectifié et 728 rectifié.
M. Alain Gournac. La notion de risque naturel prévisible doit faire partie intégrante de toute réflexion conduisant à l'élaboration d'un document d'urbanisme. Tel est l'objet de l'amendement n° 727 rectifié.
Les secteurs exposés à ces risques doivent être clairement délimités afin d'informer les habitants et d'anticiper sur d'éventuelles mesures de prévention. Tel est l'objet de l'amendement n° 728 rectifié.
M. le président. La parole est à M. Le Cam, pour défendre les amendements n°s 948 et 946.
M. Gérard Le Cam. L'amendement n° 948 vise non pas à faire du SCT un document de zonage systématique, mais simplement à renforcer le caractère prescriptible des schémas de cohérence territoriale, pour en faire véritablement des documents de planification stratégique, à l'échelon des agglomérations.
L'articulation proposée ici entre les futurs plans locaux d'urbanisme et les schémas de cohérence territoriale vise ainsi à rendre impérative la prise en compte de certaines dispositions des seconds par les premiers.
Ainsi, la notion de conformité se substitue ici à celle de compatibilité, les préconisations des schémas de cohérence territoriale ayant dès lors une valeur impérative, obligatoire, et non plus seulement indicative.
Il en est ainsi, notamment, de la détermination des espaces et sites naturels ou urbains à protéger, dont la localisation ou la délimitation devront obligatoirement être définies dans le schéma de cohérence territoriale, de la prise en compte des programmes d'équipements de l'Etat, des collectivités locales et des établissements et des services publics. La majorité sénatoriale ayant validé la réécriture proposée pour cet article, l'amendement n° 946 n'a plus d'objet. Je tiens toutefois à l'évoquer rapidement.
Initialement, le quatrième alinéa du texte proposé pour l'article L. 122-1 du code de l'urbanisme prévoyait que les SCT devaient fixer les politiques publiques d'aménagement urbain et pouvaient définir, à ce titre, les grands projets d'équipements et de services, en particulier de transport.
Si le SCT peut définir, notamment, la localisation des infrastructures, le travail d'aménagement des espaces traversés ou desservis par ces dernières ne peut être uniquement du ressort des communes concernées.
Notre amendement visait à faire en sorte que les SCT portent un intérêt particulier à l'insertion de ces grands projets dans la ville, l'établissement public de coopération intercommunale devant être partie prenante des opérations indispensables à l'intégration de ces équipements dans le tissu urbain.
M. le président. La parole est à M. Gournac, pour défendre l'amendement n° 729 rectifié.
M. Alain Gournac. A aucun moment il n'est fait état du principe de revitalisation des centres-bourgs et des centres-villes, alors que l'enjeu est d'importance. De plus en plus, l'urbanisation des villes se fait sur les tranches péri-urbaines ou dans les zones rurales, notamment au détriment des zones agricoles et de l'activité en découlant. D'où l'adjonction que nous préconisons.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les sous-amendements n°s 912, 579 rectifié et 622 rectifié, ainsi que sur les amendements n°s 727 rectifié, 728 rectifié, 948, 946 et 729 rectifié ?
M. Louis Althapé, rapporteur. La commission est favorable au sous-amendement n° 912, qui vise utilement la dimension artisanale dans les SCT.
La commission a également émis un avis favorable au sous-amendement n° 622 rectifié de M. César, qui tend à faire en sorte que les schémas de cohérence territoriale permettent de développer les réseaux de communications et de télécommunications. La précision est tout aussi utile.
Le sous-amendement n° 579 rectifié est satisfait, et son auteur pourrait donc le retirer.
La commission a émis un avis défavorable sur l'amendement n° 727 rectifié, qui est satisfait par l'amendement n° 219, tout comme l'amendement n° 728 rectifié. Leurs auteurs pourraient les retirer.
L'amendement n° 948, qui est incompatible avec l'amendement de la commission, avec lequel il est en concurrence, a suscité un avis défavorable, de même que l'amendement n° 946, pour les mêmes raisons.
La commission, très sensible à l'intention de ses auteurs, est cependant défavorable à l'amendement n° 729 rectifié, qui est incompatible avec son amendement n° 219 et qui pourrait utilement être transformé en sous-amendement.
M. le président. Monsieur Ambroise Dupont, le sous-amendement n° 579 rectifié est-il maintenu ?
M. Ambroise Dupont. Je le retire, monsieur le président, non sans saluer une nouvelle fois le travail effectué par les commissions.
M. le président. Le sous-amendement n° 579 rectifié est retiré.
Monsieur Gournac, maintenez-vous les amendements n°s 727 rectifié et 728 rectifié, et accédez-vous à la demande de M. le rapporteur concernant l'amendement n° 729 rectifié ?
M. Alain Gournac. Les amendements n°s 727 rectifié et 728 rectifié étant satisfaits, je les retire.
M. le président. Les amendements n°s 727 rectifié et 728 rectifié sont retirés.
Veuillez poursuivre, monsieur Gournac.
M. Alain Gournac. Quant à l'amendement n° 729 rectifié, j'accède à la proposition de M. le rapporteur, et je le transforme donc en sous-amendement à l'amendement n° 219.
M. le président. Je suis donc saisi d'un sous-amendement n° 729 rectifié bis , présenté par Mme Michaux-Chevry, MM. Gournac, Lanier et Vial, et tendant à compléter le IV de l'amendement n° 219 par un alinéa ainsi rédigé :
« Ils comprennent les dispositions visant à requalifier les centres des aires urbaines dévitalisées. »
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 219, sur les sous-amendements n° 912, 729 rectifié bis et 622 rectifié, ainsi que sur les amendements n°s 76, 948 et 946 ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Mes propos vaudront pour tous les amendements déposés aux articles 2 et 3.
Comme je l'ai indiqué lors de la discussion générale, nous avons eu le souci d'alléger les procédures et de supprimer un certain nombre de pages du code de l'urbanisme source de contentieux qui n'avaient pas grand intérêt. En effet, les recours formés concernaient non le fond mais toujours la forme, et, en tout cas, faisaient perdre du temps à beaucoup d'acteurs de l'aménagement et majoraient quelquefois le coût des opérations.
Notre souci d'alléger les procédures marque donc fortement ce texte, puisque plus de trente pages de l'actuel code de l'urbanisme disparaissent dans la rédaction nouvelle.
J'appelle votre attention, par exemple, sur le fait que, voilà quelques années, une dimension législative avait été donnée aux modalités du dialogue qui s'instaure entre les collectivités élaborant des documents et les personnes morales publiques, notamment les administrations ou les grandes sociétés nationales. Fallait-il donner une telle dimension législative à une procédure qui allait - ce n'était sûrement pas l'intention du législateur - donner naissance à quantité de contentieux ? Il nous a semblé qu'il valait mieux développer l'enquête publique, c'est-à-dire la concertation, qui présente tout de même l'intérêt d'éviter bien souvent les malentendus et les contentieux ultérieurs, plutôt que de donner matière à des recours pour de simples questions de procédure.
Le Gouvernement est sensible au fait que le Sénat, devant ces dispositions, a voulu apporter une contribution assez forte à la rédaction des articles 2 et 3, notamment en précisant le contenu du diagnostic qui doit nécessairement être établi avant toute définition d'une politique de développement et de renouvellement urbains, et en enrichissant la notion de projet urbain.
Sur ces points, vous comprendrez l'adhésion du Gouvernement, qui remercie la commission de son travail. Ce sont des éléments qui peuvent favoriser, dans la suite de la discussion parlementaire, un rapprochement des points de vue entre les deux assemblées, ce dont, bien sûr, le Gouvernement ne pourrait que se réjouir par avance. Cependant, en l'état actuel des amendements qui ont été adoptés par les commissions, il reste difficile au Gouvernement de donner son accord.
On peut craindre, en effet, que certains de ces amendements n'induisent, dans le détail de leur rédaction, des risques juridiques, notamment en donnant le sentiment que les procédures pourraient être alourdies et, surtout, que l'élaboration du document d'urbanisme en cause relèverait d'une succession d'étapes dont chacune pourrait être l'occasion de multiples contentieux.
Nous redoutons en quelque sorte qu'un excès de précision ne nous ramène dans les ornières dont nous souhaitions sortir.
Mais nous savons que telle n'était pas l'intention de la commission et encore moins des rapporteurs. Nous portons donc à leur crédit cette bonne intention et nous attendons avec confiance de la suite de la discussion que le Parlement tout entier retienne d'une manière claire les améliorations les plus substantielles proposées par le Sénat, sans susciter ultérieurement de contestations inutiles.
Dans la mesure où nous connaissons le risque, mais où nous créditons aussi d'une intention positive les auteurs de la démarche, nous nous en remettons donc à la sagesse du Sénat, ce qui signifie que nous n'approuvons pas le texte dans sa rédaction, mais que nous ne le rejetons pas non plus, en espérant que la suite de la discussion permettra d'en retenir la substance la plus positive.
Tel est donc l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 219.
En ce qui concerne le sous-amendement n° 912, sur lequel la commission a donné un avis favorable, je suis plus réservé ; j'y suis même défavorable ; mais peut-être M. Raffarin pourra-t-il me convaincre ? Il me semble que, s'il est question, notamment dans les textes qui sont dus à son initiative, du développement commercial, c'est parce que, dans ce domaine-là, il existe plusieurs formes de distribution. La recherche d'un équilibre entre elles étant l'une des prérogatives de la collectivité publique, il est normal que la loi s'en préoccupe. En ce qui concerne le développement artisanal, il n'y a pas une confrontation entre plusieurs formes d'artisanat. Je suis donc sceptique quant à la pertinence de vouloir assimiler la dimension commerciale à la dimension artisanale, car ces notions recouvrent deux réalités très différentes et difficilement assimilables.
Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur le sous-amendement n° 622 rectifié. En effet, si le schéma doit assurer la cohérence des politiques d'urbanisme, d'habitat et de déplacements, mais aussi de commerce, à l'échelle de territoires assez vastes, son degré de précision n'est pas suffisant pour qu'il soit chargé d'assurer le développement des réseaux de communication, qui sont tout de même peu assimilables aux démarches urbaines d'habitat, de déplacements ou de développement commercial.
S'agissant du sous-amendement n° 729 rectifié, le Gouvernement est défavorable non pas à la notion de revitalisation des zones urbaines, mais au fait que cette disposition, là où il est proposé de l'insérer, ne viserait que la dimension commerciale, alors que cette revitalisation passe par une politique d'habitat dynamique et de requalification des services publics. Il ne peut donc pas s'agir du seul commerce. Si cette disposition s'insérait dans une partie du texte visant l'ensemble des démarches urbaines, le Gouvernement y serait favorable ; mais là, elle ne vise que le commerce. Cet amendement est donc trop réducteur pour que le Gouvernement puisse y souscrire.
Le Gouvernement n'est pas non plus favorable à l'amendement n° 948. En effet, tous les espaces concernés par les schémas de cohérence territoriale ne comprennent pas des sites présentant nécessairement des risques. Il ne voit donc pas comment on peut tous les obliger à prévoir ces risques.
Le Gouvernement est également défavorable à l'amendement n° 946. M. Le Cam l'a d'ailleurs défendu tout en estimant que la nouvelle rédaction le rendait sans objet. Je m'en tiens donc à cette conclusion.
M. le président. Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 912.
M. Jean-Pierre Raffarin. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Raffarin.
M. Jean-Pierre Raffarin. Monsieur le secrétaire d'Etat, le sujet est en effet très difficile. Ce que vous avez dit est tout à fait exact. Il y a toujours eu, dans la vision commerciale, le souci d'être particulièrement vigilant, afin de ne pas entraîner un certain nombre d'activités artisanales qui ne sont pas directement exposées à la concurrence commerciale. Cela peut être vrai dans le bâtiment et pour un certain nombre de métiers.
Cependant, la loi du 5 juillet 1996 avait principalement pour objet la concurrence dans les métiers de bouche. Or, dans ce domaine, un grand nombre d'activités qui relèvent du répertoire des métiers sont artisanales et pas forcément commerciales. De ce point de vue, le sous-amendement présenté par M. Hérisson est judicieux.
Cependant, il ne faudrait pas retenir un concept trop large en matière d'artisanat, car un certain nombre de petites entreprises du bâtiment, toutes les PME qui relèvent du secteur des métiers se verraient imposer des contraintes dont elles n'ont pas besoin. En effet, il faut plutôt alléger les contraintes.
D'un point de vue stratégique, le mot « artisanal » est utile. Aussi, je voterai ce sous-amendement tout en précisant clairement qu'il s'agit de l'artisanat relevant principalement des métiers de bouche.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Je comprends parfaitement M. Raffarin, mais je vois mal comment faire apparaître les métiers de bouche dans la rédaction qui nous est proposée. (Sourires.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 912, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 729 rectifié bis, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 622 rectifié, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 219.
M. Gérard Le Cam. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Cette explication de vote porte sur les amendements n°s 219 et 76.
Comme l'indique l'intitulé du titre Ier, le projet de loi que nous examinons entend mettre en cohérence les politiques urbaines.
A ce titre, les schémas de cohérence territoriale, dont l'objet est de fixer à une échelle territoriale pertinente - l'agglomération - les orientations stratégiques d'aménagement et d'urbanisme, en prenant en compte les politiques sectorielles de l'habitat, des déplacements, d'équipements commerciaux, ont un rôle clé.
Les parlementaires communistes, comme l'ensemble des élus d'ailleurs, ont apprécié très positivement le fait que soit posée la nécessité d'une communauté de projet.
Cette exigence, traduite dans l'article 2, nous a toutefois semblé devoir être valorisée davantage. Pour ce faire, à l'Assemblée nationale, les députés communistes ont défendu des amendements visant à formaliser l'analyse préalable : le diagnostic urbain, qui précède évidemment toute proposition d'aménagement.
L'objectif est d'élaborer à la source, avec les élus et les populations concernées, au regard des besoins recensés, un projet, des orientations d'aménagement et de développement. Le texte actuel répond, en partie, à cette préoccupation. La possibilité de faire précéder l'élaboration du projet de schéma de cohérence territoriale d'un diagnostic urbain a été introduite à l'article L. 122-4.
Les amendements de réécriture de l'article déterminant le régime juridique des schémas de cohérence territoriale, présentés tant par la commission des affaires économiques que par la commission des lois, tendant à faire prévaloir la logique de projet, sont, a priori , séduisants, dans la mesure où apparaissent clairement les phases de diagnostic, d'analyse et de proposition.
Pour autant, en regardant dans le détail la rédaction proposée qui se révèle être moins complète, plus souple que celle qui a été retenue par l'Assemblée nationale, on constate que le projet perd de son contenu.
S'agissant, par exemple, de la politique locale de transports, la dimension de son lien avec le développement urbain est réduite.
Il est, en effet, dommageable que les dispositions visant à favoriser le développement de l'urbanisation, prioritairement dans les secteurs desservis par les transports en commun, aient une portée moindre.
Les schémas de cohérence territoriale se contentent de fixer les objectifs relatifs à l'équilibre entre l'urbanisation et la desserte en transports collectifs et en zone urbaine, à l'utilisation prioritaire de terrains desservis par des équipements, au lieu de pouvoir subordonner l'ouverture à l'urbanisation des zones naturelles ou agricoles et les extensions urbaines à la création de dessertes en transports collectifs.
Pour cette raison, notamment, nous ne pouvons voter ces amendements.
M. Jacques Bellanger. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Bellanger.
M. Jacques Bellanger. L'amendement n° 219 est important, car il opère une réécriture complète de l'article L. 122-1 du code de l'urbanisme, qui définit le contenu des SCT et leur objet. Il apporte plusieurs modifications au fond.
Tout d'abord, en amont de l'approbation du SCT, l'amendement distingue deux phases : l'élaboration d'un diagnostic et la préparation d'un projet d'aménagement et de développement durable. Cette proposition est intéressante. Nous soutenons tous l'idée selon laquelle un SCT doit correspondre à un projet d'aménagement du territoire pour le territoire concerné. Faut-il pour autant formaliser cette démarche ? N'y a-t-il pas là - je rejoins M. le secrétaire d'Etat sur ce point - un risque de voir s'élargir les champs possibles des recours ? N'est-il pas préférable de s'en tenir à la rédaction de l'Assemblée nationale proposée à l'article 122-4, qui fait de l'établissement d'un diagnostic une simple faculté ?
Ensuite, cet amendement assouplit la portée des principes généraux du droit de l'urbanisme qui, désormais, sont contenus dans les articles L. 121-1 et L. 110. Les orientations des schémas seront fixés non plus « dans le respect des principes », mais simplement dans le « respect des équilibres résultant de ces principes ». Cette rédaction affaiblit, selon moi, la portée de ces principes qui, désormais, acquièrent une valeur relative.
Cet amendement prévoit aussi que le SCT soit établi « en fonction des compétences exercées par les EPCI regroupés en un syndicat mixte ». Il me paraît limiter le champ de compétences SCT. J'aimerais, sur ce point, avoir des éclaircissements de MM. les rapporteurs.
Par ailleurs, cet amendement vise à supprimer, dans les arrondissements de Paris, Marseille et Lyon, la possibilité d'élaborer des schémas de secteur. Je ne comprends pas ce qui motive ce choix, dès lors que ces schémas sont cohérents avec le SCT, à savoir que leur objet n'est que de préciser et de détailler le contenu du SCT.
Enfin, je note avec satisfaction que les commissions proposent globalement de reprendre l'ensemble des objectifs retenus par l'Assemblée nationale, dans une rédaction, il est vrai, différente. Je constate néanmoins qu'elles suppriment la possibilité, pour le SCT, de subordonner l'ouverture à l'urbanisation des zones naturelles ou agricoles et les extensions urbaines à la création de dessertes en transport collectif. Je regrette cette suppression, cette disposition n'étant qu'une faculté offerte aux élus locaux. Je crois qu'elle constituait un bon moyen de maîtriser les problèmes de déplacements. Pour toutes ces raisons, nous hésitons sur la position à prendre : certaines choses étaient intéressantes, d'autres sujettes à caution. Malheureusement, un certain nombre de sous-amendements qui viennent d'être adoptés risquent de faire basculer l'avis favorable que nous envisagions d'émettre en un avis défavorable. Je pense en particulier au sous-amendement présenté par notre collègue M. César, non pas que, sur le fond du problème qu'il pose, il n'ait point raison, mais tout simplement parce que je vois dans ce sous-amendement tout autre chose que cette affirmation de fond, qui est beaucoup plus liée au problème général du régime des télécommunications. Il risque ou bien d'affaiblir un service public national, ou bien - et nous connaissons bien le débat - d'entraîner parfois les collectivités dans une voie quelque peu dangereuse. Nous voterons donc vraisemblablement contre l'amendement tel qu'il a été modifié.
M. Jean-Pierre Raffarin. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Raffarin.
M. Jean-Pierre Raffarin. C'est justement cette idée de diagnostic que j'apprécie beaucoup dans l'amendement n° 219. Au fond, le schéma de cohérence territoriale, c'est un chantier immense, c'est une difficulté majeure qu'il nous faudra surmonter sur le plan territorial.
La loi de juillet 1996 avait mis en place, grâce à notre excellent rapporteur M. Hérisson, les schémas d'urbanisme commercial. Un certain nombre de villes et d'agglomérations se sont lancées dans ce travail, qui est très complexe.
Aujourd'hui, la donne de la taxe professionnelle a changé, et les positions des uns et des autres ont varié suivant qu'ils sont soumis au régime de la taxe professionnelle ou à celui de la taxe professionnelle unique. Ainsi, il y a quelques mois, on voulait absolument avoir un établissement sur son territoire. Maintenant que la taxe professionnelle peut être partagée, les velléités se sont quelque peu affaiblies.
Tout cela pour dire qu'il y a, derrière ces sujets, beaucoup de travail. Plus on investit en amont dans le diagnostic, plus les schémas sont clairs en aval. N'allons pas trop vite !
Je vous dis cela, monsieur le secrétaire d'Etat, parce que j'assiste aujourd'hui, dans ma région, à une compétition entre les différents préfets : c'est à celui qui publiera le plus vite, comme s'il était noté sur l'accélération du calendrier, le périmètre des différentes agglomérations.
M. Alain Gournac. C'est vrai !
M. Jean-Pierre Raffarin. Prenons l'exemple de l'agglomération de Niort, difficile parce qu'en forte expansion, qui se trouve à l'intérieur d'un parc régional comprenant le Marais poitevin en son coeur. Les réglementations y sont complexes, et la commission départementale de l'intercommunalité a préféré prendre son temps, les élections municipales ayant lieu dans un an.
Pourquoi vouloir tout faire à la va-vite s'agissant de sujets que les uns et les autres ont beaucoup de mal à maîtriser tant est grande leur complexité ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR).
Pour ma part, je suis pour les schémas, car je pense que le schéma c'est le « vivre ensemble », le « construire ensemble ». Mais tout cela ne réussit que si l'on prend le temps de l'élaboration !
Nous avons établi un schéma régional pour les contrats de plan dans la région Poitou-Charentes et nous avons réussi à faire voter ce schéma par 53 voix sur 55. Mais après dix-huit mois d'élaboration ! Quand on bouscule le temps, le temps se venge !
Je crois vraiment qu'il faut investir en amont pour avoir la plus grande lisibilité et la plus grande efficacité possible en aval. Demandez, monsieur le secrétaire d'Etat, aux différents préfets de prendre le temps de la réflexion et le temps de la cohérence sur tous ces sujets ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées socialistes.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 219, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, le texte proposé pour l'article L. 121-1 du code de l'urbanisme est ainsi rédigé, et les amendements n°s 76, 948 et 946 n'ont plus d'objet.

ARTICLE L. 122-2 DU CODE DE L'URBANISME