Séance du 11 mai 2000







M. le président. Avant de mettre aux voix les conclusions de la commission des lois, je donne la parole à M. Charasse pour explication de vote.
M. Michel Charasse. Notre groupe se réjouit, naturellement, que, sur un certain nombre de points, nous ayons avancé, soit en adoptant des dispositions qui correspondent à notre souhait, soit en progressant dans la réflexion que nous a promise le Gouvernement pour un débat ultérieur.
Certes, il reste encore un certain nombre d'autres points à étudier. Sur quelques-uns, je me suis rallié aux positions de la commission des lois, qui a beaucoup travaillé, comme d'ailleurs la commission des finances et le groupe de travail auparavant, mais il en demeure d'autres qui devront être revus.
C'est pourquoi le groupe socialiste s'abstiendra.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Nous avons mené, prendant trois heures et demie, un débat approfondi, dont la tenue même a montré le bien-fondé et à l'issue duquel je ferai trois constats.
Le premier, c'est que tout démontre que nos textes doivent être améliorés. Vous n'avez d'ailleurs pas dit autre chose, madame le secrétaire d'Etat : vous avez en effet reconnu que des lacunes existaient, rappelé qu'un groupe de travail a été mis en place avec la Cour des comptes et déclaré qu'un texte relatif à l'amélioration statutaire serait prochainement examiné.
Je regrette, dans ces conditions, que notre texte n'ait pas trouvé grâce à vos yeux et que vous vous soyez montrée d'une rigueur négative particulièrement frappante.
Par ailleurs - c'est mon deuxième constat -, chacun a pu se rendre compte que l'objectif du Sénat n'était pas de gêner, d'entraver ou d'empêcher le bon déroulement du contrôle financier, loin s'en faut. Tout ce que nous avons souhaité, c'était mettre en harmonie un certain nombre de textes et les faits avec les réalités. C'est ainsi que le Sénat a pu, me semble-t-il, faire avancer la réflexion pour un meilleur contrôle et une meilleure clarté des comptes.
J'ai, enfin - c'est mon troisième constat - un regret à formuler. J'ai pris soin, dans mon propos introductif, de rappeler l'ancienneté de nos réflexions sénatoriales. Au printemps 1997, nous avons commencé à réfléchir à ces problèmes. Cette date doit vous rappeler quelque chose, madame le secrétaire d'Etat ! Certes, vous étiez très occupée en arrivant au pouvoir, mais notre rapport a été déposé en 1998. Avouez, dans ces conditions, que la République fonctionne de façon curieuse quand certains points aussi importants font l'objet de si peu de dialogue entre le Parlement et le Gouvernement !
Même si nous souhaitons être modestes dans le jugement que nous portons sur ses qualités, ce texte aurait pu entraîner, me semble-t-il, une réflexion plus approfondie, à l'image de celle que nous avons eue avec d'autres en engageant la préparation de cette proposition de loi.
Je dois donc vous avouer que je me suis senti un peu déçu en écoutant, madame le secrétaire d'Etat, l'ensemble de vos réponses, d'autant que, vous l'avez constaté, nous avons discuté de ce texte sans aucun esprit partisan : Michel Charasse a été applaudi sur l'ensemble des travées de la droite et tout le monde a voté les mêmes textes ; même si, à l'issue de cet examen, le groupe socialiste s'abstient, on voit bien que cette démarche a fait l'objet d'une certaine unanimité.
Quoi qu'il en soit, madame le secrétaire d'Etat, vous nous avez tendu la perche, en quelque sorte, pour la suite des événements en nous disant que nous nous reverrions pour l'examen du texte sur les statuts. Le projet de loi ne portera-t-il d'ailleurs que sur les statuts ? Certainement pas ! Nous prenons donc finalement l'engagement commun de revoir la totalité du dispositif à cette occasion. Je m'en réjouis, à la fois pour les collectivités locales, pour la qualité de l'examen des comptes, pour les chambres régionales des comptes, et, finalement, pour le bon fonctionnement de la République et de la démocratie. (Applaudissements.)
M. Michel Charasse. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Machet.
M. Jacques Machet. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la proposition de loi qui nous est soumise est particulièrement significative de la qualité et de l'opportunité des travaux qui peuvent être menés dans nos différentes commissions sénatoriales, en l'occurrence la commission des lois et la commission des finances. Cette proposition est l'aboutissement d'un travail de longue halaine, marqué par le rapport d'étape du groupe de travail présidé par mon collègue de l'Union centriste Jean-Paul Amoudry.
Etabli à l'issue d'un programme d'audition particulièrement complet, ce rapport, il faut le rappeler, a été adopté à l'unanimité par nos deux commissions, au-delà des clivages politiques.
Par ailleurs, les différentes mesures proposées correspondent aux attentes réelles d'élus locaux dont le Sénat est le représentant et le défenseur. Il s'agit non pas, chacun l'a compris, de remettre en cause les principes même du contrôle financier des collectivités locales par les chambres régionales des comptes, mais de les rendre conformes aux principes fondamentaux de notre droit.
Les différentes mesures proposées partent, en effet, d'un constat : les élus locaux, confrontés aux difficultés et aux contraintes constantes de la gestion locale, vivent mal les modalités du contrôle financier.
Il faut mettre fin à certaines dérives : je crois, à cet égard, que beaucoup de magistrats réticents à l'origine vis-à-vis de ce texte ont compris la nécessité de renforcer les garanties offertes aux collectivités contrôlées. Je pense, en particulier, à la confidentialité des documents préparatoires des chambres régionales des comptes, à la prise en compte expresse de la réponse écrite de l'ordonnateur, aux observations définitives des chambres ainsi qu'à la reconnaissance du caractère d'actes faisant grief aux observations des chambres, et donc à la possibilité d'un recours pour excès de pouvoir.
De telles mesures sont indispensables, et il faut espérer que l'Assemblée nationale s'y ralliera, ce qui prouvera que les propositions du Sénat, par leur pertinence et leur sérieux, peuvent contribuer à améliorer l'état de droit, ce à quoi chaque Français, élu ou non, aspire légitimement.
Il me reste à féliciter à nouveau mes collègues MM. Amoudry et Oudin pour la très grande qualité de leur travail, ainsi que les commissions du Sénat et leurs fonctionnaires, qui y ont contribué.
Le groupe de l'Union centriste votera donc la proposition de loi qui nous est présentée dans la version proposée par les commissions concernées. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. Del Picchia.
M. Robert Del Picchia. Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, c'est un texte équilibré que nous allons adopter aujourd'hui.
Un texte équilibré, car sans complaisance, certes, mais également sans outrance.
Si ce texte est sans complaisance, c'est que notre assemblée prend ses responsabilités aujourd'hui en adoptant des mesures de première importance qui répondent aux attentes de bon nombre des élus locaux, qui vivent souvent très mal la procédure d'examen de la gestion de leur collectivité, alors même, ainsi que le rappelait notre rapporteur pour avis, Jacques Oudin, que les finances locales sont souvent les seules dans ce pays à être équilibrées. Les collectivités locales sont en effet bien souvent des exemples à suivre plus qu'à blâmer !
Empêcher les appréciations des chambres régionales des comptes sur l'opportunité des politiques publiques semble, à ce titre, l'un des points essentiels, puisque ces contrôles pouvaient s'apparenter à un déni de légitimité politique. En effet, seuls les décideurs politiques sont élus, et donc seuls eux ont la légitimité politique.
Cette légitimité est le tenant d'une responsabilité qu'ils assument par le suffrage et par le risque qu'ils courent de voir leur mandat non reconduit.
C'est aux citoyens, par leur vote, qu'il appartient de porter un jugement sur l'opportunité des politiques publiques et non pas à des magistrats, qui accaparent ainsi un pouvoir dont ils ne détiennent aucune légitimité.
Le texte que nous nous apprêtons donc à voter est non pas un recul du contrôle des chambres régionales des comptes sur les finances publiques, mais bien au contraire un moyen de légitimer ces contrôles en les limitant aux strictes missions qui sont les leurs.
Préciser et renforcer leur pouvoir de contrôle sera de nature à améliorer leur efficacité, en légitimant plus encore leur existence.
Telles sont les raisons pour lesquelles le groupe du Rassemblement pour la République adoptera ce texte, amendé comme il se doit par notre assemblée. (Applaudissements.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les conclusions modifiées du rapport de la commission des lois sur la proposition de loi n° 84 (1999-2000).
Mme Nicole Borvo. Le groupe communiste républicain et citoyen vote contre.

(La proposition de loi est adoptée.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quanrante-cinq.
La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante-cinq, est reprise à vingt et une heures quarante-cinq.)