Séance du 16 mai 2000







M. le président. « Art. 52. - Il est inséré, après l'article L. 1614-8 du code général des collectivités territoriales, un article L. 1614-8-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 1614-8-1 . - A compter du 1er janvier 2002, les charges transférées aux régions du fait du transfert de compétences prévu à l'article 21-1 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs sont compensées dans les conditions fixées par les articles L. 1614-1 à L. 1614-3.
« La compensation du transfert de compétences mentionnée à l'alinéa précédent, prise en compte dans la dotation générale de décentralisation attribuée aux régions, est constituée :
« - du montant de la contribution pour l'exploitation des services transférés ;
« - du montant de la dotation annuelle complémentaire nécessaire au renouvellement du parc de matériel roulant affecté aux services transférés.
« Pour l'année 2002, le montant de cette compensation est établi, pour ce qui concerne la part correspondant à la contribution pour l'exploitation des services transférés, sur la référence de l'année 2000. Le montant total de cette compensation est revalorisé en appliquant les taux de croissance de la dotation globale de fonctionnement fixés pour 2001 et 2002.
« Le montant de cette compensation est constaté pour chaque région, pour l'année 2002, par arrêté conjoint du ministre chargé de l'intérieur, du ministre chargé du budget et du ministre chargé des transports après avis de la région.
« La compensation visée à l'alinéa précédent peut faire l'objet d'une révision si des dispositions législatives ou réglementaires spécifiques au transport ont une incidence significative sur l'équilibre de la convention entre la région et la Société nationale des chemins de fer français.
« Un décret en Conseil d'Etat précise les modalités d'application du présent article. »
La parole est à M. Lefebvre.
M. Pierre Lefebvre. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'article 52 porte sur la question, assez essentielle, du financement de la politique de régionalisation ferroviaire, dont chacun s'accorde aujourd'hui à reconnaître qu'elle constitue le noeud du problème.
La pertinence du développement de liaisons ferroviaires d'intérêt régional destinées à irriguer les territoires et à faciliter la mobilité des habitants de nos régions est indiscutable.
L'expérience déjà acquise montre que les TER ont favorisé la progression de l'usage des transports ferroviaires et permis, dans un certain nombre de cas, le maintien de liaisons qui paraissaient menacées dans leur existence même.
Pour autant, si l'expérimentation a rencontré un certain succès, elle a aussi mis en évidence un certain nombre de problèmes que nous devons veiller à résoudre à l'occasion de l'examen de cet article 52.
Tel est le sens d'un certain nombre des amendements qui ont été déposés dans le cadre du débat et qui reflètent des préoccupations que nous partageons pour l'essentiel.
Pour autant, il nous semble que l'amélioration du service public de transport ferroviaire d'intérêt régional doit s'appuyer, de manière permanente, sur deux impératifs : le premier est celui de la préservation des principes de péréquation tarifaire et d'égalité de traitement des usagers ; le second est celui de la progression des concours publics permettant la mise en chantier de l'amélioration de la qualité de service, sous toutes ses formes.
Nous pouvons, par exemple, partager le principe d'une indexation de la dotation budgétaire destinée à la régionalisation.
Mais chacun sait ici qu'une généralisation de l'expérimentation aujourd'hui mise en oeuvre nécessiterait au bas mot entre 1,5 milliard de francs et 2 milliards de francs de ressources nouvelles, à structure constante.
Nous devons donc réfléchir aux moyens existants pour répondre à cette exigence budgétaire et à la sollicitation de ressources nouvelles pour la combler.
Nous formulerons plus tard dans le débat d'autres propositions.
Partageant certains des attendus des amendements de la commission, nous tenions cependant à préciser, au début de la discussion de cet article, les termes de la question.
M. le président. Par amendement n° 319, M. Althapé, au nom de la commission des affaires économiques, propose de compléter le premier alinéa du texte présenté par l'article 52 pour l'article L. 1614-8-1 du code général des collectivités territoriales par les mots : « , sous réserve des dispositions du présent article ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Althapé, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 319, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis maintenant saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 610 rectifié, MM. Raffarin, Garrec,Haenel, Humbert et de Rohan proposent :
« I. - Après le troisième alinéa du texte présenté par l'article 52 pour l'article L. 1614-8-1 du code général des collectivités territoriales, d'insérer un alinéa rédigé comme suit :
« - du montant de la dotation annuelle complémentaire nécessaire à la remise et au maintien en état ainsi qu'à la modernisation des gares et points d'arrêt affectés aux services transférés. »
« II. - La dotation générale de décentralisation est majorée à due concurrence.
« III. - Les pertes de ressources pour l'Etat résultant du II ci-dessus sont compensées, à due concurrence, par la création de taxes additionnelles aux droits visés aux articles 403, 575 et 575 A du code général des impôts.
Par amendement n° 320 rectifié, M. Althapé, au nom de la commission des affaires économiques, propose :
« I. - Après le troisième alinéa du texte présenté par l'article 52 pour l'article L. 1614-8-1 du code général des collectivités territoriales, d'insérer un alinéa ainsi rédigé :
« du montant de la dotation annuelle complémentaire nécessaire à la modernisation des gares et points d'arrêt affectés aux services transférés. »
« II. - De compléter cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« Les pertes de recettes résultant de la prise en compte du montant de la dotation annuelle complémentaire nécessaire à la modernisation des gares et points d'arrêt affectés aux services transférés dans la compensation du transfert des compétences sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
« III. - En conséquence, de faire précéder le début de cet article de la mention : "I". »
Par amendement n° 976, M. Lefebvre, Mme Terrade, M. Le Cam et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent :
I. - Après le troisième alinéa du texte présenté par l'article 52 pour l'article L. 1614-8-1 du code général des collectivités territoriales, d'insérer un alinéa ainsi rédigé :
« - du montant de la dotation annuelle nécessaire à la modernisation des gares. »
II. - De compléter, in fine , l'article 52 par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... Les charges résultant pour l'Etat de l'intégration du montant de la dotation annuelle nécessaire à la modernisation des gares dans la compensation de transfert de compétences sont compensées à due concurrence par une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
III. - En conséquence, de faire précéder le début de cet article de la mention : « I ».
La parole est à M. Raffarin, pour défendre l'amendement n° 610 rectifié.
M. Jean-Pierre Raffarin. Je crois vraiment que, dans ce débat, nous souffrons de l'urgence, car nous abordons maintenant un sujet particulièrement difficile qui aurait nécéssité une longue réflexion et des échanges vraiment approfondis : celui de la remise et du maintien en état, ainsi que de la modernisation des gares et des points d'arrêt.
Derrière ces trois problèmes majeurs se posent beaucoup d'autres problèmes, relatifs tant à la vie de nos concitoyens - en particulier leurs déplacements -, qu'à la vie urbaine et à l'aménagement du territoire.
Toutes les régions doivent engager des travaux de remise en état des gares et des points d'arrêt pour de multiples raisons, que ce soit pour assurer aux passagers leur confort ou pour garantir leur sécurité.
Le maintien en état d'un certain nombre de sites exige déjà des moyens financiers très importants. A cela s'ajoute leur nécessaire modernisation, qu'il ne faut pas oublier. Comment concevoir, en effet, que certaines gares d'intérêt national soient modernisées grâce aux moyens financiers accordés dans le cadre d'un contrat de plan, alors que, sur des lignes régionales, les voyageurs ne bénéficieront pas des conditions de confort et de sécurité pourtant indispensables ? C'est là un sujet très préoccupant.
Il nous faudra du temps pour harmoniser les actions en fonction du statut des différentes gares, que ce soit les gares TER, les gares TGV ou les gares mixtes. Je vois déjà des maires s'efforçant de déterminer l'origine des voyageurs - TGV ou TER - pour savoir qui devra payer !
Il est donc très important de bien évaluer les moyens financiers nécessaires à la modernisation des gares et des points d'arrêt. C'est pourquoi l'objet de cet amendement est de prévoir une augmentation de la dotation générale de décentralisation en rapport avec les efforts financiers nécessaires tant à l'aménagement des conditions d'accès aux gares qu'à leur modernisation et à leur remise en état.
Monsieur le ministre, nous avons besoin de votre soutien. Nous connaissons votre engagement dans ce combat, et nous savons que vous êtes soucieux de faire bénéficier les voyageurs de conditions de transport satisfaisantes. Cette réforme ne sera réussie que si Bercy accepte de consacrer les moyens nécessaires à sa mise en oeuvre. Sinon, cette réforme sera fragilisée, voire remise en cause. Il est donc nécessaire d'augmenter la dotation de l'Etat.
M. Josselin de Rohan. Très bien !
M. Charles Revet. Il faut utiliser la cagnotte !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 320 rectifié.
M. Louis Althapé, rapporteur. Cet amendement s'inscrit dans le droit-fil de ceux que M. Raffarin a déposés. C'est tout le problème du financement des gares qui est en cause.
Plusieurs régions ont d'ores et déjà consenti un effort d'investissement important en vue de la remise à niveau et de la modernisation des gares ou des points d'arrêt, comme l'a brillamment rappelé notre collègue M. Raffarin. Il convient d'en tenir compte pour le calcul des futures dotations. En effet, la dotation prévue au titre des déficits d'exploitation ne prend évidemment en compte que les frais d'entretien et non le gros oeuvre.
Or il n'est pas besoin de souligner le rôle majeur que jouent les gares dans la logique du transport régional et dans son offre de service.
La modernisation consistera notamment en une remise à niveau fonctionnelle des espaces gares selon les normes actuelles de qualité, de service et d'accueil.
M. le président. La parole est à M. Lefebvre, pour défendre l'amendement n° 976.
M. Pierre Lefebvre. Le contenu de la régionalisation du transport ferroviaire pose, de manière incontestable, la question de la qualité de service dans l'ensemble de ses paramètres.
Ces questions font ici l'objet d'un assez large consensus, puisque la commission des affaires économiques et certains de nos collègues ont déposé un amendement identique au nôtre.
Le développement des liaisons TER s'est matérialisé, selon les premiers éléments d'analyse que nous avons à notre disposition, par une sensible augmentation de la fréquentation et du trafic permettant, dans de nombreux cas, le maintien en activité de liaisons qui auraient pu disparaître.
Pour autant, nombre d'investissements doivent encore être réalisés, qu'il s'agisse du matériel roulant, mais aussi des espaces d'accueil du public, en l'occurrence des gares. Permettez-moi, monsieur le ministre, après les collègues qui m'ont précédé, d'insister fortement sur cette question.
Le développement de la régionalisation doit aller de pair avec une amélioration de ces espaces, faisant des gares de véritables lieux de vie et de convivialité...
M. Josselin de Rohan. Tout à fait !
M. Pierre Lefebvre. ... en mettant à la disposition du public l'ensemble des prestations qu'il est aujourd'hui en droit d'attendre du service public et en faisant reculer le sentiment d'insécurité grâce à une présence humaine adaptée et des bâtiments appropriés.
Cette dimension doit être intégrée dans la mise en oeuvre de la régionalisation, et cet amendement prévoit donc naturellement que la dotation budgétaire dévolue à la régionalisation ferroviaire prenne en compte ces besoins.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 610 rectifié et 976 ?
M. Louis Althapé, rapporteur. Ces deux amendements se trouvent satisfaits par l'amendement n° 320 rectifié.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 610 rectifié, 320 rectifié et 976 ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Nous arrivons là effectivement à un point important de la discussion puisqu'il concerne la régionalisation.
Je dois dire tout d'abord qu'au regard de l'article 40 de la Constitution les amendements sont irrecevables.
Plusieurs sénateurs du RPR. Et voilà !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Vous remarquerez, messieurs, que jusque-là je n'ai rien dit car j'ai préféré laisser les avis s'exprimer pour que cette question soit débattue. Mais j'invoque l'article 40 car j'y suis obligé. La dotation générale de décentralisation est en effet une dépense budgétaire que vous n'avez pas la possibilité d'augmenter même en la gageant.
Au demeurant, compte tenu de l'importance du sujet, je souhaite vous apporter des éléments de réponse sur le fond.
D'abord, je note avec satisfaction que nous partageons le souhait d'engager la décentralisation des services régionaux du transport de voyageurs, qui constitue une nouvelle étape majeure de la décentralisation et qui confirme le rôle des régions.
Comme vous, mesdames, messieurs les sénateurs, comme le Gouvernement tout entier, je suis attaché à la réussite de cette réforme qui contribuera au développement du ferroviaire et qui permettra, localement, une meilleure adaptation entre l'offre et la demande. Je souhaite qu'elle se mette en oeuvre sur des bases aussi claires que possibles, dans des conditions optimales pour l'ensemble des partenaires concernés.
Les amendements qui ont été déposés ont trait à l'équilibre financier de la réforme. Je répondrai globalement sur l'ensemble des amendements qui portent sur la compensation destinée à la modernisation des gares, au rajeunissement du parc du matériel roulant, sur la compensation de l'application des tarifs sociaux directement aux régions, sur l'indexation de la compensation de l'Etat, voire sur l'exonération de la taxe professionnelle pour le matériel neuf acquis par les régions.
Dans le respect des principes généraux des lois de centralisation, qui prévoient un transfert de ressources correspondant à l'exercice de la compétence transférée, l'économie générale de la réforme a déjà pris en compte cette nécessité. L'article 52 du projet de loi prévoit que la compensation versée par l'Etat sera intégrée à la dotation générale de décentralisation et sera indexée, suivant les règles de droits communs en matière de décentralisation, sur le taux de croissance de la dotation globale de fonctionnement.
Plus précisément, mesdames, messieurs les sénateurs, l'article 52 dispose que le concours de l'Etat intégré à la DGD prendra en compte l'apurement du déficit éventuel du compte TER à la date du transfert et le nécessaire renouvellement progressif du matériel roulant.
Il faut préciser, à cet égard, que le concours de l'Etat, calculé sur la base de l'audit actualisé - le KPMG, comme on dit -, prend déjà en compte les montants nécessaires à la pérennité des gares, ainsi que la charge de taxe professionnelle sur les matériels.
Voilà qui répond donc à l'essentiel de vos demandes, mesdames, messieurs les sénateurs.
Comme cela vous a déjà été annoncé, ce mode de calcul apportera au compte TER, à compter du 1er janvier 2002, c'est-à-dire à la date à laquelle devrait intervenir la généralisation de la régionalisation, plus de un milliard de francs supplémentaires.
Les conditions susceptibles d'assurer l'équilibre financier de ce transfert me paraissent donc satisfaites.
Je tiens également à rappeler les efforts accomplis depuis quelques années par l'Etat pour aider au développement du système ferroviaire par un assainissement financier des entreprises et par l'apport de nouveaux moyens d'investissement.
En tout cas, depuis notre arrivée au gouvernement, nous avons contribué au désendettement de la SNCF pour 28 milliards de francs. Alors qu'il était prévu 24 milliards de francs pour les dotations en capital de RFF, nous avons accordé 37 milliards de francs en trois ans ; il faudra continuer.
Nous avons fait en sorte que les subventions au fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables - FITTVN - soient plus que doublées.
Nous avons également doublé le montant des subventions accordées au transport combiné.
Nous avons - c'est le résultat des contrats de plan Etat-régions qui sont pratiquement signés partout ou presque - multiplié par dix - M. de Rohan en sait quelque chose, sa région ayant connu des avancées très importantes en ce domaine - les engagements de l'Etat par rapport à ce qui a été dépensé dans le précédent contrat de plan.
Nous avons modifié le calcul de la taxe professionnelle dans un sens favorable au matériel roulant.
Nous avons prévu, pour le matériel ferroviaire, la possibilité de recours aux GIE fiscaux mis en place en 1998 pour la construction de navires.
La priorité donnée au ferroviaire est donc maintenant une réalité. Elle va dans le sens des engagements de l'Etat comme de celui que vous avez pris chacun dans vos régions. Elle répond à un sentiment qui a grandi dans l'opinion elle-même.
Je rappelle par ailleurs que les modalités spécifiques de calcul du concours financier de l'Etat qui relèvent du domaine réglementaire devront s'appuyer sur l'audit réalisé lors du lancement de l'expérimentation. Les régions seront, bien évidemment, consultées lors de la préparation du décret qui fixera les modalités de ce concours.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est défavorable à l'adoption des différents amendements portant sur les concours financiers, à l'encontre desquels il invoque l'article 40 de la Constitution.
S'agissant par ailleurs des tarifs sociaux mis en oeuvre à la demande de l'Etat, je rappelle que c'est ce dernier qui continuera à fixer les règles en la matière et à verser un concours correspondant à la charge que ces tarifs entraînent.
Je vous informe, mesdames, messieurs les sénateurs, que le Gouvernement est prêt à examiner, dans le cadre des lectures ultérieures de ce projet de loi, les modalités de gestion et de versement de ces concours.
M. le président. Quel est l'avis de la commission des finances sur l'applicabilité de l'article 40 de la Constitution ?
M. Gérard Braun, au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. L'article 40 s'applique aux amendements n°s 610 rectifié, 320 rectifié et 976.
Monsieur le ministre, vous avez souligné, à juste titre, que ces amendements soulevaient un problème. Il est vrai qu'un problème se pose en ce qui concerne tant la sécurité que la modernisation. Cependant, les moyens que vous accordez aux régions ne suffiront pas à le résoudre. Il faudra que vous en preniez conscience car on va assister de nouveau à un transfert de charges de l'Etat vers les régions.
M. le président. L'article 40 étant applicable, les amendements n°s 610 rectifié, 320 rectifié et 976 ne sont pas recevables.
M. Jean-Pierre Raffarin. Cette réforme va prendre l'eau de bout en bout : c'est inacceptable ! Il n'y aura plus de financement des régions pour le TGV !
M. le président. Par amendement n° 609, MM. Raffarin, Garrec, Humbert et de Rohan proposent de compléter in fine le quatrième alinéa du texte présenté par l'article 52 pour l'article L. 1614-8 du code général des collectivités territoriales par une phrase rédigée comme suit : « Ce montant devra tenir compte du nécessaire rajeunissement de l'âge moyen du parc de chaque région à quinze ans. »
La parole est à M. de Rohan.
M. Josselin de Rohan. Le niveau de la compensation de l'Etat doit prendre en compte le souhait des régions d'avoir un parc de matériel plus jeune que le parc de matériel actuel, dont le renouvellement avait été délaissé par l'Etat et la SNCF.
L'objectif des régions est de disposer d'un parc d'âge moyen de quinze ans ; cet objectif est calé sur la récente position de la SNCF de porter la durée d'amortissement du matériel régional à trente ans.
Monsieur le ministre, je vous ai écouté avec beaucoup d'attention. Vous connaissant, je pense que vous avez dû souffrir de la position qu'on vous contraint de prendre. Mais le commissaire politique est là, et on ne peut pas tout faire ! Bercy veille, je le sais. La France est une entreprise qui est menée par son comptable, disait Michel Debré ; nous venons de nous en apercevoir.
Vous prenez une responsabilité qui est lourde,...
M. Jean-Pierre Raffarin. Absolument !
M. Josselin de Rohan. ... je vais vous dire pourquoi. Vous avez très justement fait remarquer l'effort qu'à consenti le Gouvernement dans le domaine ferroviaire depuis que vous êtes aux affaires et à travers les contrats de plan ; je vous en donne acte d'autant plus que, dans ma région, j'ai pu mesurer le progrès très important qui a été accompli dans ce domaine.
Mais dois-je vous rappeler que, outre les engagements auxquels nous avons souscrit dans nos régions, vous allez nous demander, si nous voulons disposer d'un matériel convenable pour desservir les cités de nos régions, de le financer ? Or, pour ma région, cela représente un effort de 1,5 milliard de francs sur vingt ans.
Vous savez à quel point les régions de l'Ouest sont attentives à leur désenclavement, notamment par la réalisation rapide du TGV-Ouest. Et, bien entendu, vous allez nous demander de participer à son financement.
Et puis, vous nous faites remarquer, à juste titre, qu'il faut relier le TGV-Ouest aux autres TGV, et on nous demande encore une participation au financement du fameux barreau sud de Massy-Valenton.
Alors, j'ai fait faire un calcul en ce qui concerne la région Bretagne et je me suis aperçu que, en une quinzaine d'années, notre endettement allait être presque sextuplé en raison des investissements que nous devons consentir dans le domaine ferroviaire. Or, dans le même temps, le Gouvernement nous prive de nos recettes de taxe d'habitation. En fin de compte, ce sont 65 % de nos recettes qui seront compensées ! Si l'on nous demande de consentir un effort exceptionnel, comment voulez-vous que nous fassions autrement qu'en ayant recours à l'emprunt ?
Si nous empruntons pour faire face aux obligations contractuelles mais aussi à celles que vous allez nous demander du fait de la réalisation du TGV - et c'est quand même un transfert de dépenses pour les régions - nous allons obérer durablement la marge d'action de nos successeurs. Je vous avoue que j'ai quelque scrupule à endetter jusqu'en 2015 ou 2020 ceux qui nous succéderont, uniquement en raison de la lourdeur des investissements ferroviaires qui nous attendent.
Monsieur le ministre, on ne peut pas vouloir une chose et son contraire. Je vous sais très sincèrement attaché au développement des infrastructures ferroviaires et je veux bien reconnaître avec vous que le retard observé à cet égard doit être comblé. Mais vous ne pouvez pas nous demander d'accomplir des efforts importants et nous refuser, sur le plan de la fiscalité et sur celui des compensations versées par l'Etat, les moyens de les réaliser.
Ce que, modestement, nous souhaitons, c'est la prise en compte de ce qui est nécessaire en termes de compensation. Là, c'est le renouvellement de notre parc matériel qui est en cause : il ne s'agit donc pas de calculer la compensation sur des wagons très anciens et quelque peu bringuebalants. Donnez-nous, monsieur le ministre, les moyens de faire la politique à laquelle vous nous appelez. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Althapé, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Pour les mêmes raisons que celles que j'ai exposées précédemment, j'invoque l'article 40 de la Constitution à l'encontre de l'amendement n° 609.
M. Patrick Lassourd. C'est trop facile !
M. Hubert Haenel. Et dangereux au regard des négociations qui devront être menées avec les régions ! Cela va complètement envenimer le débat !
M. le président. Monsieur Braun, l'article 40 de la Constitution est-il applicable ?
M. Gérard Braun, au nom de la commission des finances. Il l'est, monsieur le président.
M. le président. L'article 40 étant applicable, l'amendement n° 609 n'est pas recevable.
Je suis maintenant saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 611, MM. Raffarin, Garrec, Haenel, Humbert et de Rohan proposent :
I. - Après le quatrième alinéa du texte présenté par l'article 52 pour l'article L. 1614-8-1 du code général des collectivités territoriales, d'insérer un alinéa rédigé comme suit :
« - du montant de la dotation annuelle déterminée pour la compensation des tarifs sociaux qu'il souhaite mettre en oeuvre. En conséquence, toute modification des tarifs sociaux décidée par l'Etat, et entraînant une charge nouvelle pour les régions, donne lieu à une correction, à due proportion, du montant de cette contribution. »
II. - De compenser, à due concurrence, les pertes de ressources pour l'Etat résultant du I ci-dessus, par la création de taxes additionnelles aux droits visés aux articles 403, 575 et 575 A du code général des impôts.
Par amendement n° 321, M. Althapé, au nom de la commission des affaires économiques, propose, après le quatrième alinéa du texte présenté par l'article 52 pour l'article L. 1614-8-1 du code général des collectivités territoriales, d'insérer un alinéa ainsi rédigé :
« - du montant de la dotation annuelle déterminée pour la compensation des tarifs sociaux que l'Etat souhaite mettre en oeuvre ; ».
La parole est à M. Raffarin, pour défendre l'amendement n° 611.
M. Jean-Pierre Raffarin. Je voudrais vous dire très solennellement, monsieur le ministre, que le pacte de confiance entre les régions et le Gouvernement sur ce sujet est rompu.
Quand on est, comme vous, issu du milieu ferroviaire, quand on connaît les dossiers comme vous les connaissez, comment peut-on invoquer l'article 40 sur un pareil sujet ? Comment peut-on se comporter comme un agent de Bercy et limiter ainsi la régionalisation des transports ferroviaires ? Si vous nous refusez les moyens nécessaires, il n'est pas concevable que la confiance puisse se maintenir entre nous dans ce domaine !
Sachez-le, monsieur le ministre, plusieurs régions envisagent aujourd'hui de se retirer du financement des TGV. Il est hors de question que la SNCF garde les bénéfices des TGV et décentralise les déficits des TER. Ce n'est pas juste ! C'est engager une recentralisation, et la plus perverse qui soit : celle qui consiste à assécher les territoires, à appauvrir les finances locales. Car, dès lors que nous n'avons plus la taxe d'habitation, que nous n'avons plus la part salariale de la taxe professionnelle, que nous n'avons plus les droits de mutation, nous dépendons des dotations de l'Etat, nous devenons des quasi-préfets devant exécuter des dotations de l'Etat et des circulaires.
Et là, on ne cesse de nous dire que la SNCF nous imposera ceci, que les trains devront faire cela, et que c'est nous qui devrons assumer les responsabilités face aux citoyens !
Mais, lorsqu'il est question de prévoir des moyens financiers : article 40 ! Sur ce plan, l'Etat annonce la couleur : moi, j'organise, vous, vous assumerez les dépenses.
Comment pourrions-nous, avec une pareille logique, accepter d'aller plus avant dans cette réforme ?
Cela signifie vraiment qu'on ne veut pas donner aux collectivités territoriales les moyens d'assumer cette belle responsabilité qu'est le transport régional !
Comment voulez-vous que, dans ces conditions sur les tarifs sociaux, nous soyons au plus près des demandeurs d'emploi, des personnes en difficulté ? Or c'est cela, la mission d'une collectivité territoriale : être au plus près des demandes.
Voilà pourquoi, par cet amendement, nous demandons des dotations supplémentaires.
Non seulement vous n'avez pas attendu la fin de l'expérimentation, non seulement vous avez utilisé la procédure d'urgence, mais vous n'avez pas voulu avoir un débat financier approfondi. Et vous voudriez qu'on vous suive dans cette voie ? Non, trois fois non ! Cette régionalisation est très mal partie. (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, de l'Union centriste et du RPR.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 321 et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 611.
M. Louis Althapé, rapporteur. Cet amendement n° 321 est très proche de l'amendement de M. Raffarin. Je précise que, joint à l'amendement n° 321, notre amendement n° 324 devrait répondre totalement au souci de M. Raffarin.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 611 et 321 ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. J'ai écouté attentivement M. Raffarin, qui s'est exprimé avec une certaine véhémence...
MM. Josselin de Rohan, Gérard Braun et Charles Revet. Avec passion !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Après tout, la passion, si elle ne dérape pas, peut être utile dans ce type de débat. Je dirai, pour ma part, et sans passion, que ce n'est pas moi qui ai inventé l'article 40 de la Constitution...
M. Hubert Haenel. Vous n'êtes pas obligé de l'invoquer.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Peut-être, mais le représentant de la commission des finances a bien indiqué qu'il était applicable. Je n'enfreins donc aucune règle.
Je me doute, mesdames, messieurs les sénateurs, que vous n'êtes pas satisfait de cette invocation de l'article 40, mais, vous l'aurez remarqué, je ne l'ai pas invoqué avant que les amendements aient été défendus.
M. Ladislas Poniatowski. Seuls ceux qui ont présenté des amendements ont pu s'exprimer !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Il reste que des opinions différentes ont pu s'exprimer. Cela nous permet de voir où nous en sommes les uns et les autres sur ces questions, et c'est profitable à tout le monde. Sinon, il ne s'agirait que d'une démarche essentiellement politicienne.
Le Gouvernement doit avoir une position responsable. Vous le savez, un collectif budgétaire est en préparation, et l'on ne peut négliger les problèmes que posent la suppression de la part régionale de la taxe d'habitation et sa compensation.
Au-delà de ce que j'ai indiqué tout à l'heure en ce qui concerne la compensation tarifaire, vous devez comprendre que la démarche du Gouvernement consiste, non à transférer des charges, mais à créer les conditions d'un partenariat en vue d'assurer le développement et la réussite de cette réforme.
M. Josselin de Rohan. C'est mal parti !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je m'engage, au nom du Gouvernement, à ce que des moyens adaptés soient étudiés et définis pour répondre à cette ambition du développement du trafic ferroviaire et des TER, une ambition que je partage avec vous.
M. Charles Revet. On n'en prend pas le chemin !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Ainsi, le Gouvernement est défavorable aux amendements n°s 611 et 321, mais il est prêt à examiner les modalités de versement de ses concours aux régions.
M. Louis Althapé, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Althapé, rapporteur. Je retire l'amendement n° 321 au profit de l'amendement n° 611.
M. Charles Revet. Très bien !
M. le président. L'amendement n° 321 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 611, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. Charles Revet. Personne n'a voté contre, il faut le noter !
M. le président. Je suis maintenant saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 322, M. Althapé, au nom de la commission des affaires économiques, propose :
I. - De remplacer le cinquième alinéa du texte présenté par l'article 52 pour l'article L. 1614-8-1 du code général des collectivités territoriales par deux alinéas ainsi rédigés :
« Par dérogation aux dispositions de l'article L. 1614-1, la part de la dotation générale de décentralisation correspondant au transfert de compétence prévu au présent article évolue chaque année en fonction d'un indice égal à la somme du taux prévisionnel d'évolution de la moyenne annuelle du prix de la consommation des ménages (hors tabac) de l'année de versement et du taux d'évolution du produit intérieur brut en volume de l'année en cours, sous réserve que celui-ci soit positif.
« Pour l'année 2002, le montant de cette compensation est établi, pour ce qui concerne la part correspondant à la contribution pour l'exploitation des services transférés, sur la référence de l'année 2000. Le montant total de cette contribution est revalorisé en appliquant le taux de croissance prévu à l'alinéa précédent pour 2001 et 2002. »
II. - De compléter in fine ce même article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - Les pertes de recettes résultant pour les collectivités des modalités de calcul de l'évolution de la part de la dotation général e de décentralisation correspondant au transfert de compétence prévu à l'article 21-1 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 sont compensées par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts, et le reversement par l'Etat aux collectivités concernées des montants correspondants. »
III. - En conséquence, de faire précéder le début de l'article 52 de la mention : « I. - ».
Par amendement n° 612 rectifié, MM. Raffarin, Garrec, Haenel, Humbert et de Rohan proposent :
I. - De rédiger comme suit le cinquième alinéa du texte présenté par l'article 52 pour l'article L. 1614-8-1 du code général des collectivités territoriales :
« La part de la dotation générale de décentralisation correspondant au transfert de compétence susvisé évolue chaque année en fonction d'un indice égal à la somme du taux prévisionnel d'évolution de la moyenne annuelle du prix de la consommation des ménages (hors tabac) de l'année de versement et du taux d'évolution du produit intérieur brut en volume de l'année en cours, sous réserve que celui-ci soit positif. Pour l'année 2002, le montant de cette compensation est établi, pour ce qui concerne la part correspondant à la contribution pour l'exploitation des services transférés, sur la référence de l'année 2000. Le montant total de cette contribution est revalorisé en appliquant le taux de croissance prévu pour l'année 2001 et 2002. »
II. - Afin de compenser les pertes de recettes résultant du I ci-dessus, de compléter in fine ce même article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - Les pertes de recettes résultant pour l'Etat du mode de calcul de la compensation prévue à l'article L. 1614-8-1 du code général des collectivités territoriales sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
III. - En conséquence, de faire précéder l'article 52 de la mention : « I. - ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 322.
M. Louis Althapé, rapporteur. La DGD, la dotation générale de décentralisation, avec son mode de fixation de droit commun, c'est-à-dire l'inflation plus la moitié de la croissance du PIB en volume, est adaptée au financement d'un transfert de compétence lorsque celui-ci porte sur un domaine d'intervention dont la collectivité peut maîtriser l'évolution. Elle n'est, en revanche, pas adaptée à un transfert de compétence portant sur le fonctionnement d'un service public comme le transport collectif, dans un contexte de croissance de celui-ci.
C'est pourquoi il est proposé que la dotation initiale soit indexée sur la croissance nominale du PIB.
Afin de ne pas créer une nouvelle dotation spécifique, il est proposé que la dotation de transfert de compétence s'intègre à la dotation générale de décentralisation, mais que cette part de la DGD évolue à un rythme différent de celui qui est prévu à l'article L. 1614-1 du code général des collectivités territoriales.
Le II de l'amendement compense la perte de recettes pour les collectivités qui résultera de cette augmentation d'une part de DGD plus forte que la norme puisque l'ensemble des recettes des collectivités provenant de dotations d'Etat sont globalement encadrées par le pacte de stabilité, comme le prévoit l'article 57 de la loi de finances de 1999.
En effet, il n'y a pas création de charge supplémentaire pour l'Etat dans la mesure où la dotation générale de décentralisation s'intègre dans le pacte de stabilité encadrant l'évolution globale de l'ensemble des dotations de l'Etat aux collectivités.
Toutefois, dès lors que cette dotation entre dans l'enveloppe normée des concours de l'Etat aux collectivités, l'évolution plus rapide de cette part de la DGD par rapport au droit commun se traduira par une perte de ressources pour l'ensemble des collectivités. Il y a donc lieu de compenser cette perte par une recette complémentaire.
M. le président. La parole est à M. Raffarin, pour défendre l'amendement n° 612 rectifié.
M. Jean-Pierre Raffarin. Voulons-nous, oui ou non, que le ferroviaire se développe dans l'avenir ? (Oui ! sur les travées du RPR.) Mais l'indexation sur la DGD se traduira précisément par la stabilité des moyens et, compte tenu de la croissance extérieure, la part du ferroviaire n'augmentera pas. Donc, si l'on maintient cette indexation telle qu'elle est prévue aujourd'hui, globalement, les moyens mis au service du ferroviaire ne croîtront pas. Or, si l'on veut vraiment que le ferroviaire se développe, il faut augmenter les moyens qui lui sont destinés.
C'est pourquoi il est proposé par cet amendement que la dotation initiale soit indexée sur la croissance nominale de la PIB - c'est-à-dire sur l'inflation à laquelle s'ajoute la croissance de la PIB en volume - afin de placer véritablement le ferroviaire au coeur d'une stratégie nationale, d'une part, et régionale, d'autre part. Monsieur le ministre, c'est très important.
Quand on voit l'ensemble des activités concurrentes, on ne peut espérer développer le ferroviaire sans lui donner les moyens nécessaires.
Parce que cet amendement prévoit une indexation plus favorable, nous comptons que vous le soutiendrez, monsieur le ministre, montrant ainsi votre volonté de donner au ferroviaire des moyens supplémentaires.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 612 rectifié ?
M. Louis Althapé, rapporteur. Cet amendement est satisfait par l'amendement de la commission.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 322 et 612 rectifié ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Pour l'ensemble des arguments que j'ai déjà exposés, le Gouvernement invoque l'article 40 de la Constitution à l'encontre de ces deux amendements.
M. le président. L'article 40 de la Constitution est-il applicable ?
M. Gérard Braun, au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Il l'est, monsieur le président.
M. Hubert Haenel. C'est la guillotine !
M. Josselin de Rohan. La Kalachnikov !
M. le président. L'article 40 étant applicable, les amendements n°s 322 et 612 rectifié ne sont pas recevables.
Je suis maintenant saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 323, M. Althapé, au nom de la commission des affaires économiques, propose de rédiger comme suit l'avant-dernier alinéa du texte présenté par l'article 52 pour l'article L. 1614-8-1 du code général des collectivités territoriales :
« Toute disposition législative ou réglementaire ayant une incidence financière sur les charges transférées en application de l'article 21-1 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs donne lieu à révision dans les conditions prévues aux articles L. 1614-1 à L. 1614-3 du présent code. »
Par amendement n° 613, MM. Raffarin, Garrec, Haenel, Humbert et de Rohan proposent de rédiger comme suit l'avant-dernier alinéa du texte présenté par l'article 52 pour l'article L. 1614-8-1 du code général des collectivités territoriales :
« La compensation visée à l'alinéa précédent fait l'objet d'une révision si des dispositions législatives ou réglementaires spécifiques au transport ont une incidence sur l'équilibre de la convention entre la région et la Société nationale des chemins de fer français. »
Par amendement n° 614, MM. Raffarin, Garrec, Haenel, Humbert et de Rohan proposent de compléter in fine l'avant-dernier alinéa du texte présenté par l'article 52 pour l'article L. 1614-8-1 du code général des collectivités territoriales par la phrase suivante : « Cette révision a pour objet de compenser intégralement la charge supplémentaire pour la région résultant de ces dispositions. »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 323.
M. Louis Althapé, rapporteur. La rédaction adoptée par l'Assemblée nationale nous a paru restrictive. Toute modification législative ou réglementaire entraînant une augmentation des charges transférées aux régions doit évidemment être compensée dans les conditions prévues par le code général des collectivités territoriales.
M. le président. La parole est à M. de Rohan, pour présenter les amendements n°s 613 et 614.
M. Josselin de Rohan. L'amendement n° 613 a le même objet que celui de la commission. Il vise à obtenir, en cas de modification du périmètre des charges, qu'elle soit compensée. A défaut de nous donner des ressources supplémentaires, au moins, lorsque vous nous en ajoutez, donnez-nous une compensation, monsieur le ministre !
Quant à l'amendement n° 614, l'adjonction de l'alinéa explicite de façon très claire la compensation financière intégrale, ce que ne garantit pas le projet de loi dans sa rédaction actuelle.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 613 et 614 ?
M. Louis Althapé, rapporteur. L'amendement n° 613 est satisfait par l'amendement n° 323. Par ailleurs, la commission est favorable à l'amendement n° 614.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 323, 613 et 614 ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Le Gouvernement étant favorable à l'amendement n° 323, il est défavorable aux amendements n°s 613 et 614.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 323, accepté par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 613 n'a plus d'objet.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 614, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 324, M. Althapé, au nom de la commission des affaires économiques, propose, après l'avant-dernier alinéa du texte présenté par l'article 52 pour l'article L. 1614-8-1 du code général des collectivités territoriales, d'insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Toute modification des tarifs sociaux décidée par l'Etat, entraînant une charge nouvelle pour les régions, donne lieu à une révision, à due proportion, du montant de la contribution visée au deuxième alinéa. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Althapé, rapporteur. Il s'agit, là encore, d'appliquer la règle générale posée à l'article L. 1614-2 du code général des collectivités territoriales aux termes de laquelle toute augmentation de charges résultant de décisions réglementaires de l'Etat doit être compensée.
M. Charles Revet. Cela paraît logique !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Il est défavorable : cette question a été réglée par l'amendement n° 323.
M. Ladislas Poniatowski. Absolument !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 324, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'article 52.
M. Hubert Haenel. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Haenel.
M. Hubert Haenel. En cet instant du débat, et dans le prolongement de ce que j'ai eu l'occasion de dire dans la discussion générale, je tiens à attirer votre attention, monsieur le ministre.
Vous savez combien je suis attaché à l'expérimentation, qui s'est déroulée jusqu'à présent dans un bon climat. Vous savez aussi combien je suis attaché, comme vous, au développement du transport ferroviaire et, comme M. de Rohan l'a dit tout à l'heure, nous pouvons vous donner acte de votre action en ce domaine, depuis votre entrée en fonctions. Mais ce climat de confiance, qui a jusqu'ici présidé aux négociations qui se sont déroulées dans le cadre de l'expérimentation, risque très fortement de se dégrader du fait de l'invocation de l'article 40.
Je sais que vous n'êtes pas tout à fait libre de vos mouvements. Reste que, je l'imagine, lorsque la loi sera votée et les décrets en Conseil d'Etat publiés, dans les régions, et non pas seulement dans des régions dites de droite ou du centre mais aussi dans des régions de gauche, déjà très réticentes à l'égard de l'expérimentation et du transport ferroviaire régional - je parle sous le contrôle du président de l'ARF -, je vous assure que cette invocation de l'article 40 ne manquera pas d'influer sur le climat ! (M. le ministre proteste.)
Mais si, monsieur le ministre, et je suis certain que les cheminots, que je fréquente comme vous tous les jours, ne comprendront pas ce mécanisme de guillotine. Notre société a changé : il faut en finir avec ces réflexes étriqués et étroits qui rabaissent le débat à des questions strictement comptables.
Si l'extension de la régionalisation ne se déroule pas dans de bonnes conditions, pensez-vous que nos collègues du Sénat et de l'Assemblée nationale, élus locaux, proposeront un jour, quelle que soit leur appartenance politique, d'aller un peu plus loin dans la décentralisation ? Chat échaudé craint l'eau froide !
Quand j'ai essayé de convaincre un certain nombre de mes collègues, pendant des années prenant mon bâton de pèlerin, ils me rétorquaient : « On va nous refaire le coup des lycées ! » Je crains la même réaction.
Je sais bien que l'on ne tient pas grand compte des votes du Sénat et que la commission mixte paritaire va tout faire rentrer dans l'orthodoxie gouvernementale, mais je me permets de vous dire solennellement aujourd'hui, monsieur le ministre, que vous devriez reconsidérer vos positions. A défaut, au 1er janvier 2002, date fatidique, nous assisterons sans doute à des rébellions ; les usagers et les cheminots ne comprendront pas.
Revoyez vos positions, sinon je ne réponds pas de l'avenir dans ce domaine, monsieur le ministre !
M. Pierre Hérisson. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson. Je voudrais m'associer aux remarques qui viennent d'être formulées par notre collègue Hubert Haenel et manifester ici non seulement mon inquiétude mais aussi mon désarroi.
Voilà quelques jours, la presse s'est fait l'écho d'un mouvement de grève des cheminots de la région Rhône-Alpes à qui l'on vient d'attribuer des motrices d'une telle vétusté - elles datent des années cinquante ou soixante - qu'ils refusent de circuler avec.
M. Hubert Haenel. C'est pour le musée de Mulhouse !
M. Pierre Hérisson. Comme mon collègue Jean-Pierre Raffarin, je m'interroge sur l'attitude qu'aura la SNCF et sur l'avenir du climat de confiance qui s'était instauré depuis un certain nombre d'années.
Que se passe-t-il en Rhône-Alpes ? Nous avons le droit de nous interroger sur l'honnêteté de la manoeuvre. Cela me rappelle étrangement la mission qui était la mienne pendant mon service militaire, à l'école du matériel de Bourges : nous étions chargés de reconstituer tant bien que mal des pièces usées avec du matériel vétuste pour pouvoir les échanger contre du matériel neuf ! A cette différence près que, en l'occurrence, le matériel neuf destiné à remplacer le matériel vétuste, lorsque nous aurons voté ce texte, sera payé par les conseils régionaux sur leur propre budget ! Quant au soutien financier du Gouvernement, on voit ce qu'il en est.
Alors, monsieur le ministre, n'êtes-vous pas en train de transférer aux régions le matériel vétuste de la SNCF,...
M. Hubert Haenel. Voilà !
M. Josselin de Rohan. Très bien !
M. Pierre Hérisson. ... avant d'exiger des conseils régionaux, qui seront désormais organisateurs des transports régionaux, qu'ils tiennent, eux, l'engagement d'avoir un matériel de moins de quinze ans ?
Cette démarche mérite une explication, car nous risquons de détériorer complètement le climat de confiance qui s'était établi. Pour avoir été vice-président du conseil régional de Rhône-Alpes jusqu'en 1998, je sais que la région s'était engagée d'une manière volontariste à être l'une des régions organisatrices des transports régionaux. Monsieur le ministre, je crois que vous êtes en train de « rouler dans la farine » les conseils régionaux ! (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste.)
M. Josselin de Rohan. Très bien !
M. Ladislas Poniatowski. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Poniatowski.
M. Ladislas Poniatowski. L'invocation de l'article 40 nous a malheureusement privés de plusieurs réponses de votre part, monsieur le ministre. En effet, M. Raffarin ainsi que notre rapporteur, M. Althapé, et M. Lefebvre ont tous trois évoqué, à l'occasion d'amendements qui n'ont pas été soumis au vote du fait de l'article 40, le problème de la sécurité. Or, si vous avez lu la presse, vous savez, mes chers collègues, qu'actuellement se déroule un procès intenté notamment contre la SNCF par une femme qui a été violée dans le train de nuit effectuant la liaison Strasbourg-Nice. Ce n'est d'ailleurs pas la première agression de ce type, et l'on constate de vrais problèmes, la nuit, en ce moment, sur toute une série de liaisons et, malheureusement, il se trouve qu'elles aboutissent toutes dans le Sud-Est, vers Nice.
La victime a porté plainte non seulement contre ses agresseurs, mais aussi contre la SNCF. Le jugement n'a pas encore été prononcé. Mais la SNCF prend cela très au sérieux et réfléchit à la manière d'améliorer la sécurité au cours des trajets de nuit. Sa réflexion l'a même conduite à envisager la suppression pure et simple de nombreux arrêts de nuit dans des villes, grandes, moyennes ou petites.
Il en résulte une conséquence très grave en termes d'aménagement du territoire. En effet, cela signifie que de nombreuses régions ne seront plus desservies par ces trains de nuit. Or il existe une alternative, car je pense qu'il n'est pas acceptable que, dans de nombreuses régions, on supprime purement et simplement tous les arrêts de nuit. L'alternative est d'ordre technique et matériel - c'est pour cela que certains amendements étaient excellents - et réside notamment dans la modernisation des gares, afin de mieux empêcher les cas de figure comme celui que nous évoquons.
En l'occurrence, il s'agit de trois jeunes qui sont montés dans une gare où il n'y avait aucun contrôle et qui, après s'être livrés à des attaques contre les personnes, sont redescendus dans une autre gare où il n'y avait aucun contrôle non plus.
Nous n'avons donc pas pu évoquer le problème de la sécurité, qui est très grave. Si nous voulons garder nos gares ouvertes et accessibles - j'ai entendu tout à l'heure que la SNCF devait rester un service pour tous, de jour et de nuit - si nous ne voulons pas que, demain, toutes les gares soient fermées la nuit, il faut absolument trouver des solutions. Si on ne donne pas aux régions les moyens pour moderniser leurs gares afin de pouvoir les maintenir ouvertes la nuit et si on ne prend pas des mesures - c'était une deuxième série d'amendements - concernant le matériel, car il faut aussi que les wagons soient bien équipés pour que le contrôle soit possible, nous aurons de plus en plus de problèmes d'agressions à la SNCF.
Je regrette, mes chers collègues, que l'invocation et l'application de l'article 40 de la Constitution ne nous aient permis ni de débattre sur ce sujet ni de trouver une solution aux problèmes d'insécurité que rencontre la SNCF.
M. Jean-Pierre Raffarin. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Raffarin.
M. Jean-Pierre Raffarin. S'agissant de l'article 40, on pourrait dire beaucoup de choses. D'ailleurs, je voudrais bien que l'on m'explique un point. Lorsque l'Etat donne une dotation d'équilibre à la SNCF et que nous, les régions, en demandons une part, ne pourrait-on pas considérer qu'elle s'impute sur la part de la SNCF, et non sur celle de l'Etat ? Dans ce cas, il n'y a pas d'augmentation des dépenses de l'Etat, c'est un simple transfert entre l'Etat et les régions. Nous examinerons ce point sur le plan juridique. La réponse qui nous est faite n'est pas aussi évidente qu'il y paraît. Mais, dans cette assemblée, il est des personnes, beaucoup plus compétentes que moi, pour se prononcer sur ce point.
L'Etat donne bien de l'argent à la SNCF, notamment pour les gares. Nous demandons que cet argent-là ne reste pas à la SNCF et qu'il aille bien sur le terrain, là où se posent des problèmes.
Il est tout à fait regrettable, monsieur le ministre, que, à l'occasion de l'examen de cet article 52, la stratégie du Gouvernement, c'est-à-dire le passage en force, soit clairement apparue. Vous nous aviez quasiment convaincu en nous expliquant que la procédure d'urgence devait vous permettre de préparer la présidence française de l'Union européenne. S'agissant du logement, nous avions bien vu que l'échéance des élections municipales semblait peser. Pour le ferroviaire, nous pensions que vous étiez tout de même un peu « coincé » par le calendrier. Or, nous constatons que vous recourez au passage en force, quitte à avoir des difficultés d'application monstrueuses. Vous vous lancez dans cette voie avec une détermination et, je crois, une approximation qui fragiliseront fortement cette réforme.
Aujourd'hui, monsieur le ministre, vous avez créé l'impôt Gayssot, qui financera les dépenses que vous venez de créer. Dans nos régions, comment allons-nous faire, où allons-nous aller chercher l'argent ? Ce sera l'impôt Gayssot ! Il faut lui trouver un nom, il faut lui trouver une communication ! Eh bien ! on va lui trouver et le nom et la communication et on va dire : il faut développer le ferroviaire et, le ferroviaire, on le financera avec un impôt Gayssot. On n'a pas d'autre solution ! C'est la lecture de l'article 46, sa conséquence ! Je serai l'un des militants de l'impôt Gayssot. On aurait aimé l'appeler « impôt Fabius », ce qui aurait sans doute été plus juste. Mais, s'agissant du ferroviaire, nos concitoyens comprendront mieux si l'on parle d'« impôt Gayssot ». (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste. - M. Bernard Joly applaudit également.)
M. Josselin de Rohan. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. de Rohan.
M. Josselin de Rohan. Je voudrais dire à mon ami Jean-Pierre Raffarin que ce sera plutôt l'« emprunt Gayssot ». L'ennui, c'est que ceux qui seront amenés à le rembourser verront peser les charges très longtemps après que notre excellent ministre de l'équipement, des transports et du logement ne sera plus ministre. On pourra lui élever une statue. C'est à lui que nous devrons toutes ces charges.
M. Charles Revet. Eh oui !
M. Josselin de Rohan. Monsieur le ministre, je regrette que vous passiez une fin d'après-midi un peu mouvementée, mais, enfin, c'est la loi du genre, et on sait que vous avez l'habitude d'affronter ces tempêtes.
Je souhaite vous dire beaucoup plus sereinement que je suis vraiment désolé de voir que ce qui aurait pu être une réforme intéressante et importante est manifestement voué à l'échec. En effet, vous ne pouvez pas nous demander d'assumer des charges aussi élevées que celles auxquelles nous sommes conviés, que celles pour lesquelles nous avons su convaincre nos mandants, et nous refuser systématiquement les moyens de faire face à ces charges nouvelles.
Notre collègue Pierre Hérisson a fort bien analysé le fait que nous allions « bénéficier », si j'ose dire, de vieux matériels...
M. Hubert Haenel. Des rogatons !
M. Josselin de Rohan. ... dont nous devrons assumer d'abord la responsabilité, puis la charge du renouvellement.
M. Charles Revet. Nous l'avons déjà fait pour les lycées et les collèges !
M. Josselin de Rohan. Tout à l'heure, nous évoquerons vraisemblablement le problème de la taxe professionnelle. Je ne sais pas quel article vous invoquerez, ni ce que vous nous répondrez.
Nous ne pouvons pas continuer à assumer de telles charges sans avoir l'assurance d'un minimum de compensations. C'est très simple : ou bien vous voulez le succès de votre réforme et vous changez d'attitude, ou bien ce sera non pas la réforme Gayssot, mais l'échec Gayssot ! (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, vous me prêtez beaucoup d'honneur et de responsabilité.
M. Pierre Hérisson. De mauvaises intentions !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. On ne prête qu'aux riches ! (Sourires.) Parfois, on me souhaite bon courage dans mon activité ministérielle. Je réponds : si j'avais autant de moyens que de courage, vous verriez ce que je ferais !
M. Charles Revet. Où sont les moyens ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Pour rester dans l'esprit de l'intervention de M. de Rohan, plus sérieusement mais c'est peut-être une boutade, quand il s'agit de financements routiers, je n'ai jamais entendu de telles critiques à l'égard de la participation des collectivités locales. Cela étant, la vie change et le fait que les collectivités s'engagent maintenant en matière de transport ferroviaire est plutôt positif, et je me réjouis donc de cette démarche.
M. Hubert Haenel. Nous nous y sommes engagés depuis longtemps !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Depuis longtemps pour certains, je le reconnais bien volontiers, et vous êtes de ceux-là, monsieur Haenel.
Pour ramener les choses à leurs justes proportions, j'ai dit tout à l'heure que je comprenais votre réaction eu égard à l'invocation de l'article 40. En effet, vous aviez déposé des amendements qui visaient notamment à favoriser le développement du trafic et du transport ferroviaire des voyageurs. Comment donc ne pas comprendre cette démarche ? Si j'invoque l'article 40, c'est parce que cela fait partie des règles de procédure. Mais restons-en là : ne donnez pas à cette invocation de l'article 40 une autre dimension.
Par ailleurs, vous pouvez parler de l'emprunt Gayssot ou de l'impôt Gayssot, on m'en a attribué d'autres ! Je ne crains pas ce genre d'accusations ou de diversions, qui d'ailleurs permettent de masquer d'autres responsabilités. Cela ne préjuge pas les discussions que nous conduirons ensuite, y compris dans le cadre du collectif budgétaire,...
M. Michel Mercier. Voilà !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. ... jusqu'au projet de loi de finances pour 2001, et avec les régions. L'objectif est - et c'est un engagement que j'ai pris devant vous - de transférer aux régions des compétences, et non des charges. A mes yeux, ce transfert de compétences doit être vécu non pas comme le maintien du statut quo mais comme un moyen de développement. C'est ma démarche !
C'est pourquoi, monsieur Raffarin, je n'ai pas invoqué l'article 40 sur la question tarifaire et les compensations de tarifs sociaux, que vous avez évoquée voilà quelques instants. Si je n'ai pas invoqué alors l'article 40, c'est parce que je ne suis pas défavorable à cette proposition. Je l'ai dit et vous l'avez entendu.
Vous ne devez pas simplement retenir les seuls aspects qui vous permettent de dire que nous allons à l'échec. Si vous entendez aussi le reste, vous constaterez que l'on peut continuer à travailler en faveur du développement du transport ferroviaire, national et régional.
La dotation sera effectivement prise sur ce qui est actuellement versé à la SNCF. Je réponds ainsi précisément à votre question, monsieur Raffarin. Vous bénéficierez de l'indexation.
J'en viens à la sécurité.
D'abord, on constate indiscutablement, depuis plusieurs années, un développement des moyens de surveillance, humains et matériels, à la SNCF. Je suis conscient des problèmes que vous avez évoqués, monsieur Poniatowski. Je suis de ceux qui considèrent qu'il faut créer les conditions pour y porter remède. Nous sommes en train de mettre en place des moyens pour créer ces conditions. Il s'agit notamment de la présence d'agents dans les gares, jusqu'au dernier train. Pardonnez-moi de vous le dire, monsieur Poniatowski, mais il n'en allait pas ainsi, par exemple, en région parisienne, lorsque j'ai pris mes fonctions. En effet, on pouvait entrer dans la gare, prendre un billet ; le train s'arrêtait, les portes s'ouvraient, pas un agent de la SNCF n'était présent ! C'était en 1997, monsieur Poniatowski !
M. Ladislas Poniatowski. Cela arrive encore aujourd'hui !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Aujourd'hui, il a été prévu, précisément dans les gares parisiennes, celles qui connaissaient le plus de problèmes, de prévoir la présence d'un agent de la SNCF. Je ne dis pas que les choses sont réglées. Je tiens toutefois à souligner ce point.
Voyons ensemble tout ce qu'il faut faire, y compris pour combler les retards qui ont été pris quelquefois au nom de la lutte contre les dépenses de fonctionnement. Vous savez de quoi je parle !
Je vois, lors de la discussion budgétaire, la position des uns et des autres sur ces questions. Lorsque je dis qu'il faut enrayer la chute des effectifs, je ne reçois pas toujours le soutien de tout le monde.
Pourtant, nous sommes parvenus à enrayer la chute des effectifs. Non seulement nous l'avons enrayée, mais nous créons et allons créer des emplois, y compris pour la sécurité et pour le développement.
M. Hérisson a posé le problème des locomotives. C'est une vraie question. Aujourd'hui, il y a de nouveaux besoins de locomotives et de matériels car nous assistons actuellement à un développement important du trafic de voyageurs aux plans national et régional, ainsi qu'à un développement du transport de fret. Vous savez que la SNCF réfléchit actuellement à l'achat de quatre cents locomotives, notamment pour le fret. Nous en sommes là, avec ce que cela implique en termes de dépenses, d'anticipation et d'investissements. N'ayez donc pas une vision étriquée des choses en disant : « Etant donné ce qui est décidé, tout va rester en l'état » !
Que croyez-vous que ce Gouvernement a fait ? Prenons l'exemple des transports collectifs, notamment en province, dont on a discuté à l'occasion de ce projet de loi. C'est à vous que j'ai annoncé en premier le doublement de l'aide de l'Etat pour les transports collectifs urbains. Croyez-vous que le Gouvernement veut, après avoir transféré les compétences aux régions, laisser le soin à ces dernières de se débrouiller avec le vieux matériel ? Ce serait non seulement inconcevable, mais, de plus, irresponsable !
Vraiment, je souhaite que vous perceviez dans l'attitude du Gouvernement non seulement une volonté démocratique de favoriser la régionalisation, mais aussi une volonté de développement, visible dans ce projet de loi, de l'activité ferroviaire dans notre pays. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen. - M. Carrère applaudit également.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article 52, modifié.

(L'article 52 est adopté.)

Articles additionnels après l'article 52