Séance du 17 mai 2000







M. le président. Par amendement n° 989, Mme Terrade, MM. Ralite, Lefebvre, Le Cam et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 76, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article L. 30 du code de la santé publique, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Les frais engagés par le maire ou le préfet en application de l'arrêté de prescription de travaux sont mis à la charge du propriétaire comme en matière de contributions directes. Toutefois, dans les cas où le propriétaire bailleur ou occupant aurait été éligible à des subventions de l'ANAH, de l'Etat, ou d'une autre collectivité, ces subventions sont versées au maire ou au préfet par l'organisme concerné, au taux maximal prévu, et viennent en déduction des créances exigibles du propriétaire à hauteur de 50 % de leur somme. Ces sommes sont entièrement déduites de la créance lorsque, à l'issue des travaux, le propriétaire s'engage à conventionner les loyers comme selon les termes prévus par l'agence. »
La parole est à M. Ralite.
M. Jack Ralite. Il s'agit là de clore un vieux débat. En effet, si une collectivité est amenée à se substituer à un propriétaire ou copropriétaire défaillant, elle « paye les travaux au prix fort ». Je veux dire par là qu'elle n'est pas éligible aux subventions - souvent importantes en matière de sortie d'insalubrité - que verse l'ANAH aux propriétaires privés.
Ainsi, d'une certaine manière, la ville qui souhaite intervenir en substitution de propriétaires de mauvaise foi est pénalisée deux fois : d'abord, parce qu'elle actionne ses services, ce qui a un coût ; ensuite, parce qu'elle ne bénéficie pas des aides apportées au propriétaire privé.
Le dispositif proposé vise à corriger cette curieuse injustice, en tenant compte de deux difficultés : d'une part, le versement des aides de l'ANAH est conditionné, de façon générale, par le conventionnement de loyers ; d'autre part, la ville ne peut exiger et le montant total des travaux en créance et le versement de subvention par l'ANAH.
Prévoir une déductibilité automatique de la subvention de la créance reviendrait à faciliter le désengagement du propriétaire. Le propriétaire de mauvaise fois se trouverait en effet bénéficier d'un patrimoine réhabilité avec une créance diminuée, sans pour autant être lié par les critères de l'ANAH.
Je propose donc un système qui autorise un repentir au propriétaire qui est l'objet d'une créance et qui pénalise celui qui s'obstine à ne pas vouloir respecter les règles du droit.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Althapé, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable. Mais elle souhaiterait connaître la position de la commission des affaires sociales.
M. le président. La parole est donc à M. Bimbenet, rapporteur pour avis.
M. Jacques Bimbenet, rapporteur pour avis. Le rapporteur pour avis que je suis, sensible aux arguments qui ont été développés, a toutefois considéré que l'application des dispositions prévues par cet amendement serait difficile. Les modalités de la recherche de l'éligibilité aux aides ne sont pas précisées. Plus généralement, la rédaction devrait être encore approfondie. Comme tel ne pourra pas être le cas au cours d'une navette, il appartiendra peut-être à la commission mixte paritaire de revoir cette question.
Quoi qu'il en soit, en l'état, la commission des affaires sociales a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est d'accord sur le fond. Simplement, c'est, en principe, une mesure d'ordre réglementaire.
Ce dispositif, il faut le dire, existe déjà pour les propriétaires occupants, qui perçoivent la subvention pour sortie d'insalubrité lorsque ce sont les communes qui effectuent les travaux. L'extension d'un tel dispositif est donc envisageable.
Mais, encore une fois, il s'agit d'une disposition d'ordre réglementaire si le Sénat considérait qu'il faut en faire une disposition législative, celle-ci trouverait mieux sa place à l'article 84, dans lequel sont abordées les missions de l'ANAH.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 989.
M. Jack Ralite Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Ralite.
M. Jack Ralite. Si nous pouvons faire de cet amendement un amendement à l'article 84, là où, selon les dires de M. le secrétaire d'Etat, il trouvera toute son efficacité, j'en suis d'accord.
M. le président. L'amendement n° 989 est donc retiré. Par amendement n° 990, MM. Lefebvre, Ralite, Mme Terrade, M. Le Cam et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 76, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'agence peut faire des avances aux communes pour leur permettre d'engager des travaux d'office de sortie d'insalubrité ou de péril, en application respective des articles L. 30 du code de la santé publique, L. 511-2 et L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation ; la créance de l'agence est garantie par le transfert à son profit, et à concurrence de son montant, de l'hypothèque légale inscrite sur l'immeuble ou le lot concerné en application respective des articles L. 31 du code de la santé publique et L. 511-4 du code de la construction et de l'habitation.
« Pour répondre à des urgences ou à des besoins spécifiques locaux, l'agence peut déroger à ses règles d'intervention, notamment pour améliorer les conditions d'habitabilité de logements loués en meublé, d'établissements d'hébergement ou de garnis, dans le cadre de conventions particulières. »
La parole est à M. Ralite.
M. Jack Ralite. Cet amendement procède du même esprit que le précédent.
Actuellement, l'ANAH reste extérieure au financement des travaux de substitution, alors qu'elle les financerait dans le cadre de travaux de droit commun. Je propose donc de faire « d'une pierre deux coups », avec le dispositif évoqué ici.
D'une part, nous levons l'hypothèque financière qui pèse sur les collectivités locales : l'ANAH leur avance les sommes nécessaires aux travaux de sortie d'insalubrité et/ou de levée de périls. Ainsi, on peut penser que les collectivités locales susceptibles d'intervenir énergiquement contre les taudis auront moins de barrières financières pour le faire. Le budget mobilisé sera le budget que le Parlement a affecté à l'amélioration de l'habitat à travers les fonds gérés par l'ANAH, au lieu de continuer à être le budget propre des communes.
D'autre part, et au-delà des enjeux financiers, nous réintégrons, ce faisant, l'ANAH dans la mise en oeuvre de la lutte contre les « points durs » d'insalubrité. Il s'agit bien là d'un maillage complet du dispositif. Il va sans dire - mais il est dit dans l'amendement - que la mobilisation des fonds de l'ANAH pour financer les travaux de substitution emporte le transfert au bénéfice de l'agence de la ou des créances résultat de cette substitution.
Le même amendement prévoit également de « décorseter » l'intervention de l'agence, en permettant qu'elle finance des travaux dans des logements actuellement hors de son champ d'intervention, le tout dans des circonstances bien précises.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Althapé, rapporteur. La commission émet un avis défavorable. Mais elle aimerait connaître la position de la commission des affaires sociales.
M. le président. La parole est donc à M. Bimbenet, rapporteur pour avis.
M. Jacques Bimbenet, rapporteur pour avis. Comme pour l'amendement précédent, la rédaction ne semble pas suffisamment claire. Les critères d'intervention de l'ANAH mériteraient d'être davantage précisés.
Dans ces conditions, je me demande s'il ne serait pas bon de renvoyer également la discussion de cet amendement à l'article 84.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ? M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. L'amendement n° 989 est intéressant, puisqu'il s'agit de verser des subventions...
M. Jean Delaneau. ... aux maires et aux préfets !
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Oui. Mais les sommes qui sont dues aux propriétaires, le maire ou le préfet en a fait l'avance.
M. Jean Delaneau. Comment peut-on verser des subventions aux maires ou aux préfets ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Je vous concède qu'il faudra trouver une formule plus précise.
S'il s'agit d'une subvention, c'est un peu délicat, mais c'est intéressant en revanche, s'il ne s'agit que d'une avance, les inconvénients l'emportent sur les avantages.
Si donc le Gouvernement était favorable à l'amendement n° 989 - et il le sera toujours à l'article 84 - il demande le retrait de l'amendement n° 990, source de trop de complexité sans contrepartie vraiment intéressante.
M. le président. L'amendement est-il maintenu, monsieur Ralite ?
M. Jack Ralite. Compte tenu de l'argumentaire de M. le secrétaire d'Etat, je veux bien le retirer.
Cela étant, il faut vraiment étudier en profondeur les modes d'intervention de l'ANAH. Dans ma ville, si le privé intervient, il est aidé ; si le public intervient, il n'est pas aidé. La DDE nous dit qu'il y a d'autres mesures. Mais voilà deux ans qu'elle nous dit cela, sans nous dire précisément lesquelles ! Cela freine la lutte contre l'insalubrité.
J'ai bien entendu M. le rapporteur de la commission. En vérité, il flirte avec mon amendement, mais il ne va pas plus loin. (Sourires.) Je trouve que c'est dommage !
M. le président. M. Bimbenet est un homme bien élevé ! (Nouveaux sourires.)
L'amendement n° 990 est retiré.

Article 77