SEANCE DU 1ER DECEMBRE 2000


SOMMAIRE

PRÉSIDENCE DE M. GUY ALLOUCHE

1. Procès-verbal (p. 0 ).

2. Loi de finances pour 2001. - Suite de la discussion d'un projet de loi (p. 1 ).

Equipement, transports et logement

V. - TOURISME (p. 2 )

Mme Marie-Claude Beaudeau, rapporteur spécial de la commission des finances ; M. Charles Ginésy, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques ; Mme Odette Terrade, MM. Jean Besson, Paul Dubrule, André Maman, Bernard Plasait, Bernard Joly, Marcel Bony.
Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat au tourisme.
Vote des crédits réservé.

I. - SERVICES COMMUNS

II. - URBANISME ET LOGEMENT (p. 3 )

MM. Jacques Pelletier, rapporteur spécial de la commission des finances ; Jacques Bellanger, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour l'urbanisme ; Jean-Pierre Plancade, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour le logement ; Jacques Bimbenet, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, pour le logement social ; André Vezinhet, Patrick Lassourd, André Maman.

Suspension et reprise de la séance (p. 4 )

PRÉSIDENCE DE M. JACQUES VALADE

M. Charles Revet, Mme Odette Terrade, MM. Marcel-Pierre Cléach, Gérard Le Cam.
MM. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement ; Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Vote des crédits réservé.

III. - TRANSPORTS ET SÉCURITÉ ROUTIÈRE

1. Transports terrestres

2. Sécurité routière

3. Routes (p. 5 )

MM. le président, Alain Lambert, président de la commission des finances.
MM. Auguste Cazalet, rapporteur spécial de la commission des finances, pour les transports ; Gérard Miquel, rapporteur spécial de la commission des finances, pour les routes et la sécurité routière ; Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.
MM. Georges Berchet, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour les transports terrestres ; Georges Gruillot, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour les routes et les voies navigables ; le ministre.

Suspension et reprise de la séance (p. 6 )

M. Jean Bernard, le ministre.
M. André Maman, le ministre.
M. Jean Puech, le ministre.
M. Yvon Collin, le ministre.
M. Pierre Lefebvre, le ministre.
M. Jacques Bellanger, le ministre.
M. Gérard Larcher, le ministre.
M. Philippe Madrelle, le ministre.
M. Jean-François Le Grand, le ministre.
Vote des crédits réservé.

Article 60 bis. - Adoption (p. 7 )

Article additionnel après l'article 60 bis (p. 8 )

Amendement n° II-16 rectifié de M. Jean-Pierre Plancade. - MM. Jean-Pierre Plancade, Auguste Cazalet, rapporteur spécial ; le ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Suspension et reprise de la séance (p. 9 )

3. Commission mixte paritaire (p. 10 ).

4. Loi de finances pour 2001. - Suite de la discussion d'un projet de loi (p. 11 ).

Equipement, transports et logement (suite)

III. - TRANSPORTS ET SÉCURITÉ ROUTIÈRE
4. Transport aérien et météorologie.

Budget annexe de l'aviation civile (p. 12 )

MM. Yvon Collin, rapporteur spécial de la commission des finances ; Jean-François Le Grand, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour l'aviation civile et le transport aérien ; Pierre Lefebvre, Jean-Pierre Plancade, Paul Girod.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Crédits des titres III à VI. - Vote réservé (p. 13 )

Budget annexe de l'aviation civile (p. 14 )

Rejet des crédits figurant aux articles 35 et 36.

IV. - MER (p. 15 )

MM. Claude Lise, rapporteur spécial de la commission des finances, pour la marine marchande ; Marc Massion, rapporteur spécial de la commission des finances, pour les ports maritimes ; Mme Anne Heinis, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.

Suspension et reprise de la séance (p. 16 )

MM. Gérard Le Cam, André Maman.
MM. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement ; Alain Lambert, président de la commission des finances ; le président.

Crédits des titres III à VI. - Rejet (p. 17 )

Article 60 ter. - Adoption (p. 18 )

5. Retrait de textes soumis au Sénat en application de l'article 88-4 de la Constitution (p. 19 ).

6. Transmission d'un projet de loi (p. 20 ).

7. Dépôt d'un rapport (p. 21 ).

8. Ordre du jour (p. 22 ).



COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. GUY ALLOUCHE
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)1

PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

2

LOI DE FINANCES POUR 2001

Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2001 (n° 91, 2000-2001), adopté par l'Assemblée nationale. [Rapport n° 92 (2000-2001).]

Equipement, transports et logement



V. - TOURISME

M. le président. Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi concernant l'équipement, les transports et le logement : V. - Tourisme.
La parole est à Mme le rapporteur spécial.
Mme Marie-Claude Beaudeau, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Le projet de budget que vous présentez, madame la secrétaire d'Etat, commence enfin à dessiner les orientations d'une politique en matière de tourisme digne des atouts et des potentialités de notre pays.
Souvent, dans le passé, ce budget n'était ni mobilisateur ni à la hauteur des possibilités. Il était souvent voté dans l'indifférence, comme si le tourisme était un supplément d'âme pour la France ou une affaire de boutiquiers, voire d'intellectuels accrochés au patrimoine. Il était voté dans une unanimité plate sans être porteur d'un grand dessein. Ce temps semble révolu et je m'en félicite, madame la secrétaire d'Etat.
Le projet de budget qui nous est soumis présente un caractère national marqué par un intérêt pour l'exploitation de toutes les richesses de notre pays, le rayonnement de son histoire, ses monuments, la mise en valeur de ses sites et de ses paysages, l'engagement de plusieurs millions de Français travaillant pour assurer le bonheur des vacanciers, des touristes et du pays.
Certes, il comporte encore des faiblesses, que je voudrais évoquer, tout d'abord. Ainsi, 40 % de nos concitoyens ne partiront pas en vacances.
Les mesures nouvelles sont pourtant importantes. Je ne ferai que les citer car elles figurent en détail dans le rapport écrit : il s'agit de l'extension de l'accès au chèque-vacances à 7,5 millions de salariés des PME et de la mise en place d'une « bourse solidarité-vacances », qui marque un point de départ pour éviter que les plus démunis ne demeurent les oubliés, notre mauvaise conscience n'altérant en rien le bonheur de partir éprouvé par les autres.
Ces 40 % qui ne partent pas en vacances ne seront pas oubliés : un groupe de travail institué au sein du Comité national du tourisme proposera des solutions nouvelles afin que les 15 % qui ne passent pas un seul jour en dehors de leur domicile puissent enfin avoir quelques jours de vacances. Ces 15 % sont pour la plupart des personnes handicapées ou âgées ou si démunies que le changement de vie ne peut pas encore s'exprimer.
La deuxième faiblesse est l'absence de création d'emploi au sein du secrétariat d'Etat au tourisme. Votre budget est le seul qui ne prévoit aucune création d'emploi pour 2001. Je le regrette, madame la secrétaire d'Etat.
La troisième faiblesse que je voudrais noter réside non pas dans une expression budgétaire, mais dans un constat.
La France a conforté sa première place de pays le plus visité de la planète, avec 73 millions de visiteurs, nombre en accroissement de 3,7 %.
Je voudrais également citer un chiffre encore plus marquant : nous représentons 11 % des arrivées mondiales. Nous sommes le seul pays avec un pourcentage à deux chiffres. Le suivant étant l'Espagne avec 7,8 %.
Nous laissons loin derrière les Etats-Unis, avec 48 millions de touristes et 7,3 % des arrivées mondiales.
Alors, me direz-vous : « Où est la faiblesse » ? Ces chiffres sont plutôt signe de force, j'en conviens. Mais, si l'on considère les recettes induites selon l'OMT, l'Organisation mondiale du tourisme, les Etats-Unis sont premiers, avec 74 448 millions de dollars, devant l'Espagne, avec 32 913 millions de dollars. La France n'arrive qu'en troisième position, avec 31 699 millions de dollars, ce qui représente moins de la moitié des recettes des Etats-Unis. Nous n'absorbons que 7 % des recettes mondiales du tourisme, l'Espagne 7,3 % et les Etats-Unis 16,4 %.
Cette remarque conduit à une réflexion. Les touristes passent en France, la traversent, mais n'y séjournent pas assez. Cela pose la grave question du maintien des touristes, donc de leur accueil, de leur hébergement, de leur transport et de leurs loisirs.
Nous devons engager avec détermination une réflexion sur ce sujet car le tourisme est un « poids lourd » de l'emploi. Il représente 3,6 % de l'ensemble des emplois intérieurs de l'économie et 14 % des emplois intérieurs des services marchands. Depuis 1992, la croissance en emploi a été de 16 000 par année.
Nous devons être sensibles aux besoins forts en emplois saisonniers aussi bien en bord de mer qu'à la montagne. Le statut de ces employés saisonniers, qui reste à préciser, est d'autant plus important que le nombre de salariés du secteur des hôtels, cafés, restaurants est évalué à 702 700, soit une augmentation de 5,3 %. Elle avait été de 4,7 % l'année précédente. La progression continue.
Je tiens également à évoquer, non pas comme des faiblesses, mais comme des incertitudes, les perturbations climatiques renouvelées et le naufrage de l' Erika .
Les résultats sont là : les régions Bretagne, Pays de la Loire, Haute-Normandie et Basse-Normandie ont fait une moins bonne saison. En revanche, les régions Languedoc-Roussillon, Provence - Alpes - Côte d'Azur, Midi-Pyrénées ont enregistré une saison bien supérieure. Nous devons noter que les régions Bourgogne, Limousin, d'Ile-de-France, et plus particulièrement Paris, ont connu une excellente saison. Ces résultats constituent une compensation aux baisses dues aux conséquences des tempêtes de fin d'années et du naufrage de l' Erika .
L'excellente mobilisation de tous a permis de rassurer public et touristes.
Un problème est cependant posé : le réchauffement de la planète, l'effet de serre induisent des incertitudes climatiques qui doivent nous conduire à renforcer nos moyens de sauvegarde, de prévention, d'alerte et de protection.
Les orientations de votre projet de budget permettront, je l'espère, d'éviter les dérives et de les rendre maîtrisables. En effet, et ce sera l'objet de la deuxième partie de mon intervention, nous avons à nous prononcer sur un budget en hausse de 12 % par rapport à la loi de finances de l'année prédédente, soit 473,6 millions de francs contre 423,4 millions de francs, ce qui représente une augmentation de 50,2 millions de francs. L'année précédente, l'augmentation avait été de 7,4 %, soit au total une croissance de 20 % par rapport au projet de loi de finances pour 1999.
Je souhaite noter également que, durant le premier trimestre 2000, 181,77 millions de francs de crédits sont venus compléter le budget initial. Sur cette somme, 153 millions de francs constituent l'apport décidé par le Gouvernement pour remédier aux effets de la marée noire. Ils ont permis de restaurer l'image touristique du littoral et de contribuer au financement de la remise en état des installations et équipements touristiques.
Les crédits du titre III augmentent de 0,9 %, les charges de personnel de près de 4 %, avec un effort de compression de 1,97 million de francs témoignant d'une volonté de rigueur dans la gestion.
Les moyens d'intervention augmentent de 16 %. A l'article 33, les crédits destinés aux contrats de plan Etat-région doublent par rapport à l'an dernier.
Je tiens à relever maintenant un des points forts du budget qui constitue une orientation vers la décentralisation.
En effet, 80 % des touristes ne visitent que 20 % du territoire national. Chaque « coin » de France a des richesses, des sites, un patrimoine et des curiosités à faire connaître et à valoriser, madame la secretaire d'Etat.
La dotation des dépenses en capital augmente de près de 45 % et devrait permettre un meilleur aménagement de l'ensemble des régions de France en matière de tourisme.
Vous le savez, les attentes sont grandes.
Nous avons tenu à publier, dans le rapport écrit, un relevé des parcs à thème qui ont vu le jour ces dernières années et qui s'intègrent, il est vrai, dans une politique de décentralisation. Je proposerai à la commission des finances de publier une étude beaucoup plus précise sur le coût et sur le rapport de ces parcs. Dans le rapport écrit, vous pourrez prendre connaissance d'un bilan de l'exploitation de ces parcs.
On recense aujourd'hui une dizaine de parcs de dimension nationale, voire européenne - je pense à Disneyland-Paris, au Futuroscope et au parc Astérix -, une cinquantaine de parcs récréatifs régionaux, une dizaine de parcs aquatiques, environ 120 parcs botaniques, enfin, un millier d'éco-musées.
Pour démontrer ce que représentent ces parcs, je prendrai l'exemple de Disneyland-Paris, dont le chiffre d'affaires s'élève à 6,03 milliards de francs. Disneyland-Paris, reverse 201 millions de francs à la maison mère, la Walt Disney Company. Prétextant une stagnation du nombre de visiteurs à 12 500 000 en 1999, Disneyland semble décidé à ouvrir un deuxième parc, qui permettrait de drainer 17 millions de visiteurs en 2003, au voisinage d'un mégacentre commercial de 90 000 mètres carrés, ce qui représenterait un investissement de un milliard de francs.
Une question se pose donc : faut-il laisser le gigantisme s'emparer de ces parcs, les laisser se développer au détriment des équipements de loisirs dont la France, dans toutes ses profondeurs, a besoin ? Nous aimerions avoir votre avis sur cette question, madame la secrétaire d'Etat.
La demande n'est pas infinie et l'accroissement du nombre de ces parcs n'est pas sans danger financier. Ainsi, à Cergy-Pontoise le parc Mirapolis, qui avait bénéficié de l'apport de fonds publics, a dû fermer ses portes.
Enfin, dans le projet de budget, nous notons également une hausse de 4 % de crédits destinés à Maison de la France, s'ajoutant à l'augmentation de 13,4 % enregistrée en 1999. Maison de la France est présente dans 18 pays. Elle peut gagner d'autres positions. Sa modernisation, son informatisation, l'utilisation d'Internet sont autant de facteur qui permettront de mieux faire connaître la France dans le monde et de préparer la venue de nouveaux touristes étrangers.
Pour qu'un tel objectif puisse s'affirmer en faveur du plus grand nombre de nos concitoyens, notamment des plus jeunes, le tourisme doit aussi s'affirmer social et associatif.
En mai 1999, madame la secrétaire d'Etat, vous avez pris des engagements lors des états généraux du tourisme social et associatif.
J'observe, et je m'en félicite, que le premier engagement est tenu, celui d'une coordination entre tous les acteurs du tourisme social et associatif. Cette coordination est mise en place et s'articule auprès de collèges, d'associations, des comités d'entreprises, des syndicats, des élus et des personnes qualifiées. Les loisirs sont d'expression individuelle. Le caractère collectif de leur organisation est un facteur d'épanouissement.
Quant au deuxième engagement pris, il est en cours de réalisation : il s'agit d'une réforme de l'agrément des villages de vacances à but non lucratif.
Le troisième engagement d'une campagne nationale de promotion du tourisme social et familial devrait - vous vous y êtes engagée, madame le secrétaire d'Etat - être mis en place en direction du grand public au printemps 2001.
J'avais proposé l'adoption des crédits du secrétariat d'Etat au tourisme pour 2001. La commission des finances, ayant rejeté globalement les crédits du ministère de l'équipement, des transports et du logement, n'a pas adopté ces crédits. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen et sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Charles Ginésy, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, mon intervention sur le budget du tourisme s'articulera autour de trois motifs de satisfaction, mais également de trois sujets d'inquiétude.
En 1999, le solde du poste « voyages » de la balance des paiements s'est élevé à 91 milliards de francs, contre 72 milliards de francs en 1998. Proportionnellement, il a augmenté plus vite que le nombre d'arrivées touristiques, ce qui semble indiquer que le différentiel entre le nombre de touristes étrangers et les recettes de ce secteur ne s'accroît plus. C'est encourageant pour poursuivre les efforts de promotion de la « destination France » à l'étranger.
Je soulignerai également, à propos de la saison 2000, que les effets redoutés des tempêtes et du naufrage de l' Erika semblent avoir été, autant que faire se peut, combattus et maîtrisés. Permettez-moi de vous féliciter, madame la secrétaire d'Etat, de votre rôle et de celui de votre secrétariat d'Etat, ainsi que de la mobilisation des moyens financiers nécessaires.
Il convient, en 2001, de renforcer auprès de la clientèle tant nationale qu'étrangère la promotion de l'image de la France après les tempêtes. Malheureusement, le naufrage récent du chimiquier ne fait que renforcer ma conviction sur ce point.
J'ai également un troisième motif de satisfaction qui concerne la mise en oeuvre du plan « patrimoine » pour la réhabilitation des infrastructures du tourisme social. Vous avez obtenu la prolongation de ce programme au-delà des dix années initialement fixées. Qu'en sera-t-il les années suivantes et comment s'établit le chiffrage de ce qui reste encore à rénover ?
En évoquant ensuite mes trois sujets d'inquiétude, voire de mécontentement, je ne ferai que traduire, madame la secrétaire d'Etat, le sentiment général de la commission des affaires économiques et du Plan.
En ce qui concerne les crédits dont dispose Maison de la France, les moyens supplémentaires attribués vont, certes, lui permettre de réaliser des campagnes de promotion en France, mais je persiste à croire qu'ils demeurent insuffisants pour promouvoir notre pays sur les marchés étrangers.
Cette promotion doit, en effet, se faire non seulement sur les supports traditionnels, mais aussi sur Internet, ce qui nécessite des moyens importants. Elle doit se faire en renforçant le réseau des sites certifiés par les comités régionaux de tourisme. Sans doute faut-il aller au-delà et, après avoir aidé à faire connaître, aider à faire vendre. Comment mieux sensibiliser les tours-opérateurs ou les voyagistes sur la diversité et la richesse des produits touristiques de chacune de nos régions ?
Néanmoins, je note avec satisfaction que, s'agissant des pertes de change enregistrées par Maison de la France, la dotation de 1,4 million de francs inscrite dans le projet de loi de finances rectificative pour 2000 vient heureusement compléter les provisions pour pertes de change.
En ce qui concerne l'immobilier touristique, la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, grâce à « l'acharnement » des parlementaires, donne un support législatif au concept d'opération programmée de réhabilitation touristique, autorisant enfin, avec plus de deux ans de retard, la récupération, par les propriétaires, de la TVA sur les travaux effectués, ainsi que la possibilité de subventions décidées par les collectivités locales.
L'administration doit désormais tout mettre en oeuvre pour que le dispositif soit opérationnel, puisque l'outil réglementaire est créé.
S'agissant des entreprises touristiques, il est urgent d'adopter des mesures concrètes. Ce secteur aborde, dans des conditions très difficiles, les négociations sur la diminution du temps de travail, car la spécificité de son activité n'est manifestement pas prise en compte. La saison, qu'on le veuille ou non, est concentrée sur quelques mois et les périodes de fêtes ou les congés de fin de semaine connaissent une intense activité en matière touristique. Il est indispensable, en conséquence, d'introduire le maximum de souplesse dans le cadre de la modulation du temps de travail, et cela ne semble malheureusement pas avoir été compris par le Gouvernement.
Le secteur des entreprises touristiques souffre également d'un manque de main-d'oeuvre qualifiée, qui constitue un goulet d'étranglement très pénalisant pour développer une offre touristique de qualité. Quelles solutions proposez-vous, madame la secrétaire d'Etat, pour répondre rapidement à cette crise du recrutement ?
Enfin, et vous le savez, nous ne partageons pas la même opinion sur l'épineuse question de la TVA dans la restauration : vous vous félicitez de ce que ce sujet fasse débat au sein du Gouvernement depuis maintenant deux ans, mais moi je regrette vivement - et je ne suis pas le seul - qu'il n'ait pas encore abouti, alors que tout a été dit, que les discriminations pratiquées par la France entre les différents types de restauration sont condamnées à l'échelon tant national qu'européen et que nos principaux concurrents au niveau européen appliquent ce taux réduit de TVA.
Madame la secrétaire d'Etat, entendez-vous défendre l'amendement adopté par le Sénat réduisant le taux de TVA appliqué à la restauration et obtenir une dérogation sur le plan communautaire ? Cela me semble absolument indispensable.
Compte tenu de ces observations, la commission des affaires économiques et du Plan a décidé de s'en remettre à la sagesse du Sénat pour l'adoption des crédits consacrés au tourisme, inscrits dans le projet de loi de finances pour 2001 (Applaudissements.)
M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République, 14 minutes ;
Goupe socialiste, 11 minutes ;
Groupe de l'Union centriste, 7 minutes ;
Groupe des Républicains et Indépendants, 7 minutes ;
Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 5 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 5 minutes.
Je vous rappelle qu'en application des décisions de la conférence des présidents aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser 10 minutes.
Par ailleurs, le temps programmé pour le Gouvernement est prévu au maximum pour 25 minutes.
La parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, comme chaque année, l'examen des crédits consacrés au tourisme pour 2001 permet d'analyser la situation de ce secteur majeur, tant d'un point de vue économique que d'un point de vue social et environnemental.
Sans m'appesantir trop longtemps sur les chiffres, je noterai qu'avec 73 millions d'entrées de touristes étrangers, la France a maintenu sa place de première destination touristique mondiale au cours de l'année 1999 ainsi qu'au premier semestre 2000, et ce malgré les tempêtes de la fin décembre dernier et la marée noire qui a endommagé une partie de nos côtes atlantiques.
L'analyse de la place du tourisme dans l'économie française me semble particulièrement intéressante, afin de dégager les potentiels et les enjeux qui en découlent, notamment d'un point de vue économique. Dans cet esprit, il convient d'apprécier positivement la progression constante de plusieurs données. C'est le cas pour le solde positif du poste « voyages » de la balance des paiements qui enregistre une croissance moyenne de 13 % par an. C'est également vrai pour le nombre d'entrées de touristes étrangers en France, qui progresse annuellement de 4 %.
Comme l'a fait remarquer mon amie Marie-Claude Beaudeau, rapporteur spécial de la commission des finances, ces indices de la bonne santé du secteur du tourisme doivent nous conduire à faire preuve d'audace, afin d'investir dans la prospection des marchés étrangers et de renforcer notre offre sur un plan qualitatif, en valorisant notre patrimoine et l'ensemble des richesses touristiques de notre pays.
Rompant avec le passé, vous avez fait le choix, madame le secrétaire d'Etat, et je vous en félicite, d'accompagner la progression de l'économie touristique d'un accroissement continu du budget de votre ministère. Ainsi, il avait augmenté de plus de 15 % l'année dernière et de près de 11 % il y a deux ans.
Cette année encore, le budget du tourisme augmente de façon significative, puisqu'il progresse de 12 % par rapport à l'année dernière. Au total, les moyens budgétaires touristiques auront augmenté de 48,5 % entre 1998 et 2001.
Vous confirmez ainsi votre volonté de renforcer l'intervention de l'Etat dans le domaine du tourisme. Cette volonté repose sur plusieurs objectifs.
Celui que je placerai en premier est la réduction des inégalités, qu'elles soient sociales, territoriales ou même conjoncturelles, comme nous l'avons vu avec les dernières catastrophes.
S'agissant des inégalités sociales, mon groupe soutient sans réserve votre priorité à mettre en oeuvre « le droit aux vacances pour tous ». Comme vous, nous ne nous résignons pas à ce que quatre Français sur dix ne partent pas en vacances soit par manque d'argent, soit parce que leur accès aux vacances est entravé par un handicap. C'est pourquoi nous apprécions que les crédits destinés au secteur associatif augmentent de près de 40 %. Ces crédits sont en grande partie destinés aux bourses solidarité vacances. Ils vont aussi au financement des conventions signées avec les associations, ainsi qu'au financement des actions en faveur des handicapés.
Pour améliorer la situation des 40 % de nos concitoyens qui sont privés de vacances, vous avez déployé une politique diversifiée dont je ne citerai que deux exemples : les chèques-vacances et la politique d'accès des handicapés aux loisirs et aux vacances.
Le chèque-vacances contribue largement à accroître le taux de départ en vacances, notamment pour les plus modestes. C'est pourquoi la loi du 12 juillet 1999, sur votre initiative, étend cette mesure aux salariés des entreprises de moins de cinquante salariés et la rend effective sur l'ensemble du territoire européen.
Je rappelle qu'en plus de la progression du chiffre d'affaires de l'Agence nationale pour les chèques-vacances, l'ANCV, qui montre l'intérêt des salariés pour ce dispositif, la contre-valeur des chèques-vacances périmés est attribuée aux organismes sociaux ou aux associations caritatives. Ainsi, en 1999, l'ANCV leur a versé 8 millions de francs sous forme de bourses-vacances et près de 15 000 personnes en ont bénéficié.
Je fais une parenthèse pour souligner également le rôle social de la Bourse solidarité vacances créée en 1998 par la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions. Ce groupement d'intérêt public a permis le départ de plus de huit mille personnes depuis le début de l'année 2000.
J'en viens maintenant à la campagne « tourisme et handicap » que vous avez réalisée en 2000 pour la troisième année consécutive. Cette action devrait aboutir, vous l'avez annoncé, à la mise en place d'un label décliné en fonction du type de handicap. Pouvez-vous nous préciser, madame la secrétaire d'Etat, le rôle de chacun des partenaires, notamment celui de l'Etat, dans ce dispositif qui devrait voir le jour l'année prochaine ?
Je dirai quelques mots, enfin, sur les inégalités territoriales. Je note avec intérêt que les crédits du tourisme destinés aux contrats de plan Etat-régions ont triplé : ils se montent à 897 millions de francs.
Le tourisme peut en effet contribuer au développement équilibré de l'ensemble du territoire. Il convient pour cela de dégager des moyens pour valoriser les attraits touristiques de tous les départements qui composent une région, sans déséquilibrer l'un au détriment de l'autre.
Le second objectif très fort de votre action est l'emploi. A la suite du rapport que vous avait remis M. Le Pors, vous aviez lancé un programme de quinze mesures destiné à améliorer la situation sociale des saisonniers du tourisme, notamment leur accès au logement. Compte tenu des chiffres cités, le secteur du tourisme a un rôle primordial à jouer dans l'impulsion économique et dans la création d'emplois. De ce point de vue, l'Etat doit donner des signes fort s'agissant de la nécessité d'améliorer la qualité de l'emploi.
De nombreux professionnels, notamment dans l'hôtellerie et la restauration, font état de leurs difficultés à recruter. Cette pénurie s'explique en grande partie par le manque d'attractivité des métiers de ce secteur. En effet, la précarité, les mauvaises conditions de travail et de rémunérations qui y sont pratiquées, et qui sont connues de tous, ne favorisent pas l'attrait des jeunes pour ce secteur.
Pouvez-nous préciser l'action de votre secrétariat d'Etat pour rendre ces emplois plus attractifs ? Pourriez-vous également nous informer de l'avenir des nombreux emplois-jeunes de ce secteur ?
Pour conclure, madame la secrétaire d'Etat, constatant que vous partagez avec nous la volonté de faire du tourisme un secteur décisif du développement économique, en harmonie avec le contexte environnemental et valorisant l'ensemble du territoire, les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen soutiennent avec conviction votre projet de budget. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Besson.
M. Jean Besson. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le projet de budget pour 2001 qui nous est soumis aujourd'hui doit être qualifié de bon budget. En effet, pour la troisième année consécutive, il est en augmentation substantielle et traduit, de par ses choix d'orientation, la volonté forte du Gouvernement de valoriser ce secteur important de développement économique, créateur de richesses et d'emplois.
Ainsi, le projet de budget prévoit une hausse des crédits du tourisme de 5,5 % si on le compare à celui de 2000. Mais il faut considérer également qu'il y a une hausse de 12 %, toujours par rapport à 2000, si l'on raisonne sur le budget réel, c'est-à-dire en prenant en considération les réductions de chapitres et les transferts opérés en cours d'année 2000.
Ce budget est donc passé, en trois ans, de 335 millions de francs à 474 millions de francs, enregistrant ainsi une augmentation de 40 % sur cette période. Avec le groupe socialiste, je suis satisfait de cette évolution qui demeurait indispensable pour rattraper, certes, progressivement, mais de manière pugnace, le désintérêt que les pouvoirs publics avaient manifesté à l'égard de ce secteur pendant des années.
Le Gouvernement confirme ici sa volonté de redynamiser un secteur dont l'importance économique n'est plus à démontrer. Avec près de 205 000 entreprises et 624 370 salariés, on estime que le tourisme génère 2 millions d'emplois directs et indirects et représente un excédent, pour notre balance des paiements, de 91,5 milliards de francs en 1999.
La France demeure la première destination mondiale, avec une fréquentation en progression moyenne de 3,7 % par an, malgré les intempéries et les catastrophes qui ont affecté notre littoral.
Je tiens, à ce sujet, madame la secrétaire d'Etat, à saluer tout le travail accompli et les financements immédiatement déployés par votre secrétariat d'Etat. Je sais aussi que des négociations avec TotalFinaElf sont engagées pour mettre en place des campagnes de promotion spécifiques.
Bien sûr, ce budget peut sembler modeste au regard du rôle que joue le tourisme en termes d'aménagement du territoire, de potentialités économiques et de notoriété de la France dans le monde.
Je me réjouis aussi que votre secrétariat d'Etat génère une participation importante d'aides publiques complémentaires - Union européenne et collectivités locales - et un autofinancement, qu'il soit privé ou public, jouant un effet de levier.
Au-delà, quatre éléments particulièrement positifs caractérisent ce projet de budget.
En premier lieu, le développement territorial du tourisme. A ce titre, 290 millions de francs sont inscrits, ce qui représente une augmentation de 16 % par rapport à la loi de finances pour 2000 ; 40 millions de francs supplémentaires sont réservés à l'amélioration du contenu de l'offre touristique et au financement des actions contractualisées au titre des contrats de plan Etat-régions et avec les structures professionnelles. Ces procédures constituent l'outil d'une politique concertée d'aménagement du territoire. Les dotations de l'Etat ont été multipliées par deux, les crédits passant de 30 millions de francs à 60 millions de francs.
Je me félicite encore, à ce propos, que les contrats de plan Etat-régions, en cohérence avec la réforme des fonds structurels européens, intègrent le tourisme dans le développement durable de ce pays.
Madame la secrétaire d'Etat, votre projet de budget encourage la modernisation et la rénovation du parc hôtelier traditionnel et de la petite hôtellerie. J'avais accueilli avec beaucoup de satisfaction votre proposition de constituer un fonds de garantie en faveur de l'hôtellerie familiale pour aller plus loin, peut-être au travers des contrats de plan. Je souhaiterais connaître l'état de ces réflexions.
En deuxième lieu, une priorité forte est confirmée en faveur du social et de l'emploi. Ainsi, le soutien budgétaire au secteur associatif du tourisme est accru de 40 % par rapport à 2000. Nous ne pouvons que saluer cette orientation.
Je me réjouis du soutien marqué à l'emploi, notamment aux emplois-jeunes. Le secteur du tourisme a créé 5,5 % de ces emplois, soit 6 400 embauches de nouveaux salariés d'octobre 1997 à juin 2000, dans le cadre de projets des collectivités locales ou du secteur associatif.
En troisième lieu, nous apprécions l'effort marqué en faveur des actions de promotion de la France à l'étranger. Plus précisément, au-delà du soutien régulier et fort à Maison de la France pour développer des marchés extérieurs et absorber les effets de son assujettissement à la TVA, 6,5 millions de francs supplémentaires sont réservés aux actions de promotion en France, comme mission nouvelle de ce groupement d'intérêt public.
Enfin, en quatrième lieu, je souhaite insister sur la volonté affirmée du Gouvernement d'inscrire le tourisme dans le dispositif global des grandes réformes. La mise en oeuvre de la réduction du temps de travail dégage d'ores et déjà du temps libre et disponible, pour le tourisme notamment. Cette véritable mutation aura, et a déjà des répercussions sur l'évolution de notre société et révèle des besoins nouveaux, sport, nature, terroirs, bien-être, par exemple.
Je citerai également le allégements de charges sociales et le plan emploi formation pour inciter les créations d'emplois.
Pour conclure, laissant le soin à mon collègue M. Marcel Bony d'évoquer l'avenir des stations thermales et climatiques, je formulerais deux souhaits.
Tout d'abord, madame la secrétaire d'Etat, je souhaite appeler votre attention sur le problème du tourisme des jeunes, qui voit son activité s'effondrer. La diminution nette du nombre de classes de découverte, notamment, dont les causes sont nombreuses et très différentes, pose de véritables difficultés, à nous chercher des solutions.
Ensuite, je tiens à exprimer mon soutien à l'action budgétaire du Gouvernement afin qu'elle soit maintenue, en 2002, au rythme du projet de loi de finances pour 2001. La politique du tourisme renforcera ainsi le secteur de l'observation économique et prospective.
J'insiste également sur les moyens de fonctionnement des délégations régionales au tourisme, relais essentiels de l'action de l'Etat au niveau local, qui augmentent cette année de 10 %.
Madame la secrétaire d'Etat, recevez toutes mes félicitations pour ce projet de budget, véritable tour de force dû à l'augmentation massive des crédits d'intervention, à l'orientation politique que vous avez su insuffler, à votre action volontariste menée en liens étroits avec les régions et les pays, une action ambitieuse pour la démarche de qualité et d'anticipation.
C'est pourquoi, madame la secrétaire d'Etat, le groupe socialiste votera ce budget avec détermination et satisfaction. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Dubrule.
M. Paul Dubrule. Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le budget du tourisme augmente de près de 12 % dans le projet de loi de finances pour 2001.
C'est bien, mais, en valeur absolue, cela ne repésente que 473,5 millions de francs, alors que les recettes touristiques représentent, pour la France, 250 milliards de francs, chiffre important, pour ne pas dire énorme, et méconnu. Si l'on rapporte donc le budget du tourisme aux recettes du secteur, cela fait un peu moins de 2 pour 1000 C'est peu, vous en conviendrez.
Un autre chiffre est significatif, celui de la balance touristique. Le tourisme figure non pas dans la balance commerciale, mais dans la balance des paiements. Les Français voyagent aussi à l'étranger et dépensent de l'ordre de 115 milliards de francs, d'où une balance touristique positive de 91 milliards de francs. Le tourisme est donc, sur la base de ce critère, le secteur économique le plus important de notre pays.
Il est donc d'une impérieuse nécessité d'avoir pour le tourisme une vision et un projet à long terme soutenu par une action politique qui s'inscrive dans la durée avec quatre objectifs majeurs : l'investissement dans nos infrastructures touristiques ; la promotion de la destination « France » ; la formation des cadres et employés et la coordination interministérielle des actions en faveur du tourisme.
Concernant les investissements, il faut avoir en perspective les prévisions de l'Organisation mondiale du tourisme, qui font état, pour l'Europe, d'un doublement des flux touristiques en vingt ans, et celles du World Travel and Tourism Council qui, lui, est plus optimiste, puisqu'il table sur un doublement en quinze ans.
Pour accueillir ces touristes, il est évidemment nécessaire de mettre en place une politique ambitieuse favorisant les investissements dans ce secteur porteur.
Le domaine des investissements est très vaste. Il englobe, notamment, les transports, le commerce, l'artisanat, la restauration, les loisirs. Il va de l'aménagement des coeurs de villes aux rues piétonnes, des facilités d'accès aux monuments à l'amélioration de l'accueil sur les sites, des centres de conférence et du développement des gîtes ruraux à la mise en valeur des produits du terroir. La liste peut être longue, mais jamais exhaustive, tant ce qui touche à ce secteur est varié et ouvre des possibilités.
Pour ce qui est de la promotion de la destination « France », il y a les outils et le budget. Un excellent outil est Maison de la France, créée en 1987 par Jean-Jacques Descamps, alors secrétaire d'Etat au tourisme, et que les gouvernements successifs ont développée, améliorée, y compris vous-même, madame le secrétaire d'Etat.
Mais le budget de promotion reste très insuffisant face à l'enjeu. Il faut noter qu'un touriste qui paiera 500 francs pour une chambre d'hôtel, dépensera 2 000 francs à 4 000 francs, soit six à sept fois plus, en achats et dépenses divers, taxi, bus, photos, restaurants, musées, souvenirs, notamment.
Cependant, la concurrence européenne et mondiale est rude et très efficace. Si la situation présente est plutôt satisfaisante, je m'inquiète pour l'avenir, et je partage l'avis de notre rapporteur spécial, qui a dénoncé le manque d'ambition de ce budget à l'égard de Maison de la France. Tout comme lui, je regrette la stagnation de son budget pour la deuxième année consécutive, stagnation aggravée du fait de la faiblesse de l'euro, qui conduit cet organisme à réduire ses actions de promotion sur les marchés extérieurs à la zone euro.
On aurait pu espérer des moyens supplémentaires pour cette année, puisque Maison de la France a inauguré sur le net le portail officiel du tourisme français. Cela valait bien un effort !
Il faut progressivement augmenter le budget de promotion de la destination « France » ; une centaine de millions de francs supplémentaire ne serait pas exagérée.
S'agissant maintenant de la formation des cadres et du personnel, il est urgent d'investir et d'investir encore, car nous connaissons, depuis plusieurs années, un déficit de personnel qualifié. C'était vrai au moment où le chômage était à son plus haut niveau ; cela devient dramatique aujourd'hui dans l'hôtellerie et la restauration.
A ce titre, les 35 heures auront, et commencent déjà à avoir un effet très négatif sur les entreprises du secteur, particulièrement sur les hôtels et sur les restaurants indépendants. Pourquoi ?
C'est un paradoxe : la France à deux vitesses des 35 heures pénalise les petites entreprises, car les employés préfèrent les grandes entreprises, qui leur assurent tout de suite des conditions de travail plus favorables, une formation professionnelle et de meilleures perspectives de promotion. Les petites entreprises, qui n'ont pas une grande marge de manoeuvre, pensent à une fermeture hebdomadaire supplémentaire ou à une fermeture annuelle prolongée. Certains professionnels, et ils sont nombreux, songent même à se retirer, à vendre, mais ne trouvent pas preneur.
Je rappelle que 500 francs perdus pour une chambre d'hôtel, ce sont 3 000 francs à 4 000 francs perdus pour l'économie locale. Le danger est grand.
Le rapporteur de la commission des affaires économiques a détaillé les mesures qui, face à cette évolution, seront utiles, voire indispensables, mesures auxquelles je souscris pleinement.
J'en viens à la coordination interministérielle.
Le tourisme a besoin de l'ensemble des infrastructures des transports, qu'il s'agisse des aéroports, des routes et des autoroutes, des trains, des voitures, des avions et de tout ce qui fait le transport urbain. Le rattachement du secrétariat d'Etat au tourisme au ministère de l'équipement est, de ce point de vue, une bonne chose.
Cependant, le tourisme, c'est aussi, et pour beaucoup, la culture, les monuments historiques, les musées, les sites classés. Que dire, alors, madame la secrétaire d'Etat, d'une suppression sans préavis du personnel vacataire saisonnier, contraint, sur de nombreux sites gérés par la direction du patrimoine ou celle des musées de France, de fermer quelques heures de plus ? C'est le cas au château de Fontainebleau, ce qui perturbe toute la chaîne des intervenants - tour-opérateurs, offices de tourisme, transporteurs, hôtels, musées - qui pourront, à juste titre, être accusés de publicité mensongère ?
Le tourisme, c'est l'éducation et la formation professionnelle, dont je viens de parler. Le tourisme, c'est le commerce extérieur et les affaires étrangères.
Le tourisme, c'est aussi la sécurité des biens et des personnes, donc le ministère de l'intérieur. Le tourisme, c'est, bien sûr, la fiscalité, donc, le ministère des finances. J'en parlerai dans ma conclusion.
Le tourisme, c'est, enfin, l'environnement et l'aménagement du territoire. La protection de notre patrimoine et de nos sites est une évidente obligation pour le développement du tourisme.
C'est pourquoi une coordination interministérielle plus efficace me paraît être une des priorités du secrétariat d'Etat au tourisme pour que vos collègues intègrent mieux les exigences de notre secteur.
J'aimerais revenir un instant sur un sujet qui me tient personnellement à coeur et qui ne peut être ignoré dans cette assemblée, même s'il n'impose pas obligatoirement, comme vous l'avez vous-même dit, madame la secrétaire d'Etat, des moyens budgétaires complémentaires. Je veux parler du développement durable.
C'est à la France, premier pays d'une Europe elle-même première destination touristique mondiale, d'entraîner ses partenaires européens sur cette voie. La préservation de l'environnement, la lutte contre la pollution, la protection du patrimoine, la formation des hommes et des femmes sont, plus que jamais, des impératifs pour un secteur économique qui envisage d'accueillir deux fois plus de touristes d'ici quinze ans ou vingt ans.
Pour conclure, madame la secrétaire d'Etat, deux mesures peuvent être prises rapidement.
La première, c'est la baisse de la TVA sur la restauration, baisse dont le principe n'est plus contesté ; il suffit de la décider.
La seconde concerne la récupération de la TVA des frais professionnels imposée par la Cour de justice des Communautés européennes. Pourquoi le Gouvernement est-il si restrictif dans l'application ? Pourquoi ne joue-t-il pas un rôle moteur pour faire adopter par le Conseil européen, pendant la présidence française, la proposition de directive sur le sujet actuellement en discussion ?
J'ai déjà évoqué les autres mesures qui sont de plus longue haleine, à savoir des efforts vigoureux en faveur de la formation professionnelle et de la promotion de la destination France à l'étranger ainsi que l'intensification des investissements dans nos infrastructures touristiques, pour être à même de répondre à la demande.
Je dirai encore un mot, madame la secrétaire d'Etat, sur une activité qui est orpheline car elle ne sait pas quel est son ministre de tutelle : c'est celle du titre de service, tel que titre-restaurant, chèque-vacances, etc. Les émetteurs de titres-restaurant continuent de se demander pourquoi il n'existe pas de règles claires pour l'utilisation de ces titres par les agents de la fonction publique.
Quant aux chèques-vacances, ces mêmes émetteurs se demandent également, et depuis longtemps, pourquoi un émetteur à caractère public a seul le monopole des émissions de chèques-vacances.
Monopole et chasse gardée ne sont dans l'esprit ni de l'Europe, ni de ses directives. Je conclurai donc en vous demandant, pour ce secteur du tourisme, plus d'audace, de volontarisme et de moyens.
M. le président. La parole est à M. Maman.
M. André Maman. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, si le budget du tourisme augmente pour la troisième année consécutive, cette hausse doit cependant être relativisée. Avec 473,5 millions de francs, il s'agit d'un budget modeste, au regard tant du poids de l'économie touristique que de la contribution des collectivités locales au développement de l'activité touristique. Cette progression répond à l'objectif que vous avez fixé, madame la secrétaire d'Etat, visant à porter les crédits du tourisme à 700 millions de francs au terme de la présente législature.
Les chiffres précitées sont extraits du « bleu » budgétaire et reflètent fidèlement la dotation attribuée au ministère du tourisme pour 2001. Ils contredisent, et par conséquent invalident, votre présentation qui s'appuie sur une dotation totalement artificielle - et impossible à identifier dans le fascicule budgétaire - de 518 millions de francs.
Si l'on ne peut qu'accueillir favorablement le redressement des crédits du tourisme engagé depuis 1999, il convient toutefois d'en relativiser l'augmentation.
Hors moyens des services, le budget s'établit, en fait, à la somme modique de 334,8 millions de francs, répartie entre 290 millions de francs au titre du développement économique du tourisme et 44,8 millions de francs au titre du développement territorial du tourisme. En réalité, la hausse du budget est certes significative, mais les dépenses d'investissement apparaissent extrêmement faibles par rapport aux dépenses ordinaires, qui absorbent 90 % des crédits.
Par ailleurs, une partie des crédits est affectée à la compensation de l'assujettissement à la TVA, pour 3,7 millions de francs, de l'Agence française de l'ingénierie touristique, l'AFIT.
Enfin, quelques éléments de comparaison permettent de ramener le budget du tourisme à sa juste mesure, puisqu'il ne représente que 0,03 % du budget de l'Etat, 3 % du budget de la culture, et seulement 46 % du montant de la TVA encaissée par l'Etat sur les billets d'entrée à Disneyland Paris. Il est donc permis de se demander si les sommes engagées pour 2001 seront à la hauteur du poids réel de l'industrie touristique dans notre pays.
Si vos objectifs, madame la secrétaire d'Etat, peuvent apparaître satisfaisants, cette hausse des crédits doit être mesurée par rapport à l'importance du tourisme dans l'économie nationale et aux recettes fiscales qu'il génère.
Le poids économique du secteur touristique n'est plus à démontrer et les dernières statistiques disponibles, en date de 1999, l'attestent. Comme les orateurs qui m'ont précédé à cette tribune l'ont indiqué, la France est la première destination touristique mondiale. Plus de 73 millions de touristes sont venus en France l'année dernière. Le poste « fréquentation des touristes étrangers » de la balance des paiements a généré un excédent de 91,5 milliards de francs. Les activités caractéristiques du tourisme - hôtels, campings, villages de vacances, résidences de tourisme, gîtes, auberges de jeunesse - représentent à elles seules 204 700 entreprises et 624 370 salariés. Globalement, le tourisme génère 2 millions d'emplois directs et indirects. Son chiffre d'affaires annuel est de l'ordre de 700 milliards de francs, soit 7,4 % du PIB.
Ces quelques données, qui démontrent l'indéniable attractivité de notre pays, éclairent une remarque récente du Conseil national du tourisme, selon lequel ce secteur d'activité est toujours « aussi mal loti sur le plan budgétaire ».
Le soutien budgétaire à la politique du tourisme ne se limite pas aux seuls crédits du secrétariat d'Etat, et leur augmentation ne saurait masquer d'autres apports essentiels pour l'économie touristique de la France. L'effort consenti par les collectivités locales, en particulier par les régions, mérite d'être souligné. A titre d'exemple, la contribution financière des conseils régionaux est de l'ordre de 530 millions de francs par an et représente 82 % du budget total des comités régionaux du tourisme.
Enfin, l'intervention la plus significative de l'Etat est constituée par la dotation aux communes touristiques, désormais intégrée au sein de la dotation forfaitaire de la nouvelle dotation globale de fonctionnement. Le montant versé au titre de la dotation touristique s'est élevé, pour 2000, à 1 133 millions de francs. L'avenir de cette dotation devrait être arrêté au terme d'une réflexion engagée par le comité des finances locales.
Alors que la France est toujours la première destination touristique au monde avec une fréquentation en progression moyenne de 3,7 % par an, le tourisme français affiche néanmoins certaines fragilités.
Notre pays ne parvient pas, en effet, à tirer de son activité touristique des recettes aussi importantes, proportionnellement, que celles qu'obtiennent ses principaux concurrents : avec 11 % des arrivées mondiales, ses recettes sont inférieures à celles que recueille l'Espagne qui ne reçoit, pourtant, que 7,8 % des touristes.
Un autre phénomène préoccupant, relevé par l'Observatoire national du tourisme, réside dans la stagnation, voire la baisse, des départs en vacances des Français, tant en été qu'en hiver, et dans le raccourcissement de leurs séjours.
Le chiffre total de nuitées enregistré a subi une érosion quasi continuelle entre 1995 et 1999.
A l'inverse, un nombre croissant de Français, parmi ceux qui partent, choisissent de voyager à l'étranger. L'examen des destinations choisies montre, depuis 1990, une diminution des séjours en Europe et un accroissement des départs vers l'Afrique, aussi importants, depuis 1999, que les séjours en Espagne.
Cette évolution est d'autant plus préoccupante que l'arrivée sur le marché national des grands voyagistes de l'Europe du Nord, capables de proposer des forfaits très compétitifs, risque de détourner des vacances en France une bonne partie des clientèles à petit budget.
La France ne doit donc pas se satisfaire de sa position de première destination touristique ; elle doit continuer à améliorer son offre d'accueil.
En outre, si la saison 1999 a été bonne, la part du tourisme dans le PIB a faiblement régressé. Quant aux six premiers mois de l'année 2000, ils resteront marqués par un net recul de la fréquentation touristique dans les régions du littoral atlantique malheureusement touchées par le naufrage de l' Erika .
Si l'on ne dispose pas d'estimations fiables du préjudice causé par la marée noire aux professionnels du tourisme, il apparaît néanmoins que la baisse de fréquentation a pu atteindre jusqu'à 30 % pour certains équipements.
Or le Gouvernement n'a visiblement prévu aucune mesure fiscale et sociale, notamment en matière d'échelonnement des charges, pour permettre aux professionnels du tourisme de faire face aux difficultés qu'ils rencontrent.
La nécessité de valoriser au mieux les atouts de notre économie touristique et d'accroître la qualité de l'offre en ce domaine apparaît donc clairement. Cette amélioration passe nécessairement par la réhabilitation de certains équipements et par une meilleure répartition des activités.
Dans le cadre des contrats de plan Etat-région, le volet « tourisme » devrait bénéficier, pour la période 2000-2006, d'une enveloppe d'un montant global de 897 millions de francs. Il serait souhaitable que ces crédits soient utilisés dans le sens d'un rééquilibrage du territoire. L'effort budgétaire en faveur du tourisme reste en effet trop concentré sur un quart du pays, alors même que des actions de soutien ou de promotion contribueraient efficacement au désenclavement de nombreuses communes et permettraient au tourisme d'être considéré comme un élément du développement local à part entière.
Votre politique, madame la secrétaire d'Etat, doit en la matière se montrer plus volontariste, afficher un soutien plus déterminé au tourisme local et consentir un effort particulier en faveur des contrats de pays. La territorialisation de l'économie touristique, voire sa décentralisation, peut être une piste d'approche intéressante pour améliorer l'attractivité touristique de l'ensemble du territoire.
En outre, il convient de veiller à ce que l'économie touristique ne prenne pas de retard par rapport aux évolutions de la demande. La recherche d'offres adaptées aux exigences nouvelles, qui dépassent le caractère strictement saisonnier, doit aussi contribuer à l'équilibre de l'aménagement du territoire, dans la mesure où l'augmentation des courts séjours favorise le développement du tourisme régional.
L'amélioration de l'attractivité de l'ensemble du territoire français passe aussi par un redressement rapide de l'image des régions touchées à la fois par la marée noire et par les tempêtes de décembre dernier.
Enfin, le travail saisonnier et, partant, la précarité constituent un problème récurrent dans la politique du tourisme : sur le million d'emplois qui existent dans ce secteur, 420 000 ont un caractère saisonnier. Alors que cette question a fait l'objet d'un rapport en 1999, le Gouvernement n'envisage toujours pas d'actions concrètes pour améliorer la situation des travailleurs saisonniers et pour réfléchir à leur statut ainsi qu'à leur formation.
Compte tenu de ces observations, mes collègues et moi-même considérons que, si ce projet de budget comporte d'indéniables atouts, il ne répond pas aux fragilités du secteur. Le groupe de l'Union centriste partage donc l'appréciation de notre excellent rapporteur pour avis, qui, je le rappelle, s'en est remis à la sagesse du Sénat.
M. le président. La parole est à M. Plasait.
M. Bernard Plasait. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les années se suivent et les records se succèdent ! L'an dernier, la France a enregistré 73 millions d'arrivées touristiques, confirmant encore sa position de première destination touristique internationale.
Dans ces bons résultats nationaux Paris n'est pas en reste, puisque, avec plus de 31 millions de nuitées en 1999, dont 22 millions de nuitées étrangères, la capitale demeure une toute première destination mondiale du tourisme de loisirs et d'affaires.
Nous ne pouvons que nous réjouir de cette situation, mais je ne voudrais pas en conclure que le rôle de la puissance publique a été déterminant en la matière. D'ailleurs, je m'en félicite, car je sais d'expérience que ce qui est essentiel dans le domaine du tourisme, c'est de laisser les acteurs répondre librement, et donc efficacement, aux attentes du client.
A cet égard, je ne vous cacherai pas, madame la secrétaire d'Etat, mon inquiétude quand je lis que « le renforcement du rôle de l'Etat dans le domaine touristique » constitue l'un des trois axes prioritaires de la politique du Gouvernement. Je ne veux pas y voir le retour d'une intention d'administration ou d'étatisation de notre économie touristique. Ce serait évidemment faire fausse route. Si l'industrie touristique française est, depuis longtemps, en pointe, c'est justement parce que l'Etat s'y est moins investi que dans d'autres secteurs.
Je ne récuse pas l'idée de toute intervention, bien au contraire. Il est en effet des interventions très utiles. Vous souhaitez conforter le tourisme comme vecteur de l'aménagement du territoire et du développement local. Vous voulez également développer l'accès aux vacances pour tous. Très bien !
Le présent projet de budget affiche une progression de 12 % par rapport à la loi de finances initiale de 2000, avec une dotation de 473,5 millions de francs en moyens de paiement, permettra d'oeuvrer dans le sens que vous jugez prioritaire.
A ce stade, peut-on dire qu'il s'agit d'une vraie politique du tourisme, à la hauteur des enjeux d'aujourd'hui et de demain ?
J'adhère pleinement aux propos du rapporteur pour avis, notre éminent collègue Charles Ginésy, qui a fort judicieusement souligné les fragilités de l'économie du tourisme.
Nous somme à l'ère du village mondial, et la concurrence est particulièrement rude. Paris est directement concurrencé par le Grand Londres, Tokyo et New York.
Dans cette compétition mondiale, il est plus que jamais indispensable de promouvoir la destination France. C'est d'ailleurs la vocation du GIE « Maison de la France », fort de ses trente-deux bureaux, dans vingt-cinq pays, couvrant trente-huit marchés.
Cependant, je regrette vivement, madame la secrétaire d'Etat, la faiblesse des dotations financières à cette structure prévues pour 2001, qui ne progressent que de 4 %.
Il me paraît indispensable de faire un effort significatif en matière de promotion, notamment en accentuant la stratégie Internet de Maison de la France.
Notre pays ne figure qu'en sixième position pour les moyens qu'il consacre à la promotion, derrière l'Espagne, la Thaïlande, Singapour, l'Autriche. Cela n'est pas satisfaisant.
Je regrette l'effet un peu anesthésiant des lauriers que nous recueillons chaque année. Notre première place en nombre de touristes accueillis nous endort un peu. Beaucoup de ces touristes ne font que passer sur notre territoire, et la recette touristique n'est pas à la hauteur de la fréquentation. C'est pourquoi nous devons faire un plus grand effort en matière de promotion de la destination, de politique d'image et de valorisation de notre patrimoine, pour retenir plus longtemps nos visiteurs.
Comme chaque année, j'insisterai sur l'urgence qu'il y a à mettre un terme aux distorsions des taux de TVA pénalisant la restauration classique, taxée à 19,6 %, par rapport aux autres formes de restauration, taxées à 5,5 %. Rien, pas même le coût budgétaire pour l'Etat, n'explique plus l'obstination du Gouvernement à refuser la création de 40 000 emplois que permettra cette mesure, dès sa première année d'application.
Je le répète, il s'agit de 40 000 vrais emplois n'ayant rien à voir avec les emplois-jeunes, qui, le jour de leur évaluation venu, nous réserveront de belles déconvenues.
Alors, je vous le demande, madame la secrétaire d'Etat, que comptez-vous faire en la matière et quelles démarches allez-vous entreprendre pour convaincre le ministre des finances et le Premier ministre du bien-fondé de cette disposition ? Les 9 313 entreprises parisiennes de restauration, qui représentent 66 563 emplois salariés, sont impatientes de connaître votre réponse.
Le tourisme est plus que jamais une industrie qui, pour se développer, a besoin d'un environnement légal, réglementaire et fiscal favorable. La puissance publique a un rôle primordial à jouer à cet égard : elle doit justement, par tous les moyens, enlever les entraves et inciter les acteurs privés à aller de l'avant, à investir pour moderniser et adapter l'offre touristique.
Qu'on le veuille ou non, madame la secrétaire d'Etat, le monde évolue, il bouge. Les frontières n'existent plus dans le secteur du tourisme. Et il nous appartient de préparer les évolutions de demain, voire d'en prévenir certaines, qui n'ont rien d'inéluctable.
Il est une évolution que je constate : c'est le rachat progressif de toute une série d'acteurs par les groupes étrangers.
Bon nombre de salons parisiens ont été créés à l'origine par des organisations professionnelles françaises, mais sont progressivement rachetés par des sociétés à capitaux étrangers.
Il en va de même dans le secteur de l'hôtellerie. Je ne prendrai qu'un exemple : cinq des six palaces parisiens - le Ritz, le Bristol, le Plaza, le George-V et le Meurice - sont aujourd'hui l'entière propriété de personnes ou de groupes étrangers.
Dans le secteur des voyagistes, la même concentration de capitaux s'opère, avec, notamment, le rachat de Nouvelles Frontières.
Voilà les nouvelles tendances qui sont aujourd'hui à l'oeuvre. Vous voudriez les interdire que vous ne le pourriez pas, et c'est heureux.
Mais il faut en prendre conscience et tout faire pour que des acteurs nationaux s'insèrent et prennent toute leur place dans ce mouvement.
Il faut dès à présent encourager les groupes français à investir dans notre pays. Aussi serais-je très heureux de savoir quelles dispositions particulières vous entendez prendre pour éviter cette situation qui consiste, lorsqu'on est Français, à quitter son pays pour investir sous des latitudes fiscalement plus favorables.
En la matière, tout laisse à penser que c'est la loi qui opprime et la liberté qui affranchit. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Joly.
M. Bernard Joly. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le tourisme contribue à hauteur de 91,5 millions de francs à l'excédent de notre balance commerciale, soit près du double du secteur agro-alimentaire. Or, les crédits consacrés à votre secrétariat d'Etat, madame, ne représentent que 0,3 % du budget national.
Comme l'a souligné M. Bernard Plasait, la France, par rapport à ses concurrents étrangers, figure à la sixième place pour les moyens consacrés à la promotion. Mais si l'on rapporte le volume d'investissement au nombre de touristes, la chute est vertigineuse, et c'est alors le soixante-quatorzième rang que notre pays occupe, avec moins d'un dollar en moyenne. Pour donner un ordre de grandeur, disons que l'Autriche et la Suisse multiplient ce rapport par trois et demi.
Si la France reste une destination favorite des visiteurs, il faut constater que la durée de séjour de ces derniers est très courte. Nous accueillons 11 % du flux mondial, soit 4 % de plus que l'Espagne, alors que, les recettes de nos voisins d'outre-Pyrénées sont pourtant supérieures aux nôtres. Il est aisé de comprendre que la France est plus un pays de transit que l'Espagne.
Les moyens dont dispose le GIE « Maison de la France » restent encore insuffisants. Le temps est venu, me semble-t-il, de revoir les conditions de fonctionnement de cet outil qui est le fer de lance de notre promotion à l'extérieur. Compte tenu des données actuelles, le travail fourni est excellent, mais il est nécessaire d'améliorer les conditions mises à sa disposition.
Depuis l'année dernière, l'intégralité de ses activités est assujettie à la TVA. On sait qu'elle réalise de nombreuses prestations pour le secteur privé. Si les crédits du GIE « Maison de la France » augmentent, l'Etat les reprend cependant partiellement, par le biais de prélèvements.
Il faut également signaler que l'accès aux services de Maison de la France n'est pas égal pour tous. Le partenariat entre le secteur public et le secteur privé conduit à privilégier ceux qui ont les moyens d'y avoir recours. Force est de constater que 80 % des petits hôteliers ne les possèdent pas. Seules les entreprises importantes sont à même de bénéficier de ce relais. Une réflexion devrait être engagée pour trouver une voie qui ne laisse pas sur le bord de la route un nombre aussi important de demandeurs.
Depuis cinq ans que je siège à la Haute Assemblée, il n'est pas d'occasion que je saisisse pour souligner le taux trop élevé de TVA appliqué aux secteurs de l'hôtellerie et de la restauration. C'est là, non pas un combat corporatiste, mais l'observation de la réalité qui montre qu'on pénalise sciemment un secteur d'activité dynamique. Comment voulez-vous être compétitif par rapport à nos voisins européens quand la récupération de la taxe se fait à 5,5 %, alors même que le prélèvement s'établit à 20,6 %.
La pirouette habituelle consiste à sortir l'argument de l'« euro-incompatibilité ». Pourtant, le Portugal a récemment obtenu l'adoption d'une directive dérogatoire qui valide rétroactivement sa pratique du taux réduit de TVA depuis 1996. Nos représentants seraient-ils moins convaincants que les leurs ? La France assure la présidence de l'Europe, je vous le rappelle.
L'application du taux réduit fait l'unanimité sur tous les bancs. Néanmoins Bercy, après l'avoir annoncé, résiste. C'est privilégier délibérément la rentrée immédiate de recettes au détriment du développement d'un secteur auquel le budget de l'Etat trouverait bénéfice.
A ce handicap fiscal s'ajoute celui de la mise en place de la réduction du temps de travail. Or je n'ai pas entendu les propositions du Gouvernement pour faciliter l'application de ces nouvelles dispositions là où la modulation du temps de travail est indispensable pour répondre à la demande touristique.
Alors qu'on a affaire à une activité à forte utilisation de main-d'oeuvre - et de main-d'oeuvre qualifiée - il faut prévoir non seulement des aménagements, mais également des incitations portant sur des allégements touchant les charges sociales patronales. J'aimerais savoir, madame la secrétaire d'Etat, ce que le Gouvernement à l'intention de proposer à cet égard.
Les professionnels du tourisme ont un sentiment mitigé à l'égard de la direction du tourisme. Ils estiment que son image ne les reflète plus vraiment et qu'elle perd en efficacité. Depuis vingt ans, cette direction conserve l'intégralité des actions dont elle avait la charge, alors que les moyens budgétaires et les moyens en personnel ne sont plus les mêmes. Plutôt que l'essaimage, pourquoi ne pas choisir des axes prioritaires soutenus par une concentration des actifs ?
J'aborderai à présent des questions de fond, dont le nombre, compte tenu de mon temps de parole, sera forcément limité.
La présidence française de l'Union européenne va bientôt toucher à son terme, madame la secrétaire d'Etat, et je me demande si, en matière de tourisme, elle a été bien utilisée.
L'harmonisation et la modernisation auraient dû être les objectifs.
Les règles de classement hôtelier, par exemple, datent de trente ans ; elles sont largement obsolètes. Une remise à jour de la classification, en accord avec les pays de l'Union européenne, aurait bien auguré de l'avenir, tout comme des accords auraient pu intervenir en matière d'alignement des heures d'ouverture des lieux fréquentés par les touristes d'un pays à l'autre. L'abolition des frontières appelle des réponses évolutives mais, surtout, accordées.
C'était aussi l'occasion d'engager une concertation sur le nouveau fonctionnement de l'observatoire du tourisme. Quel bilan pouvez-vous nous fournir madame la secrétaire d'Etat ?
Mais revenons-en à un cadre plus hexagonal : un vent de modernisation doit souffler sur la loi de 1992 portant sur la commercialisation. Les professionnels la trouve dépassée. La constitution, notamment en Allemagne, de gros pôles de tour-opérateurs rend cette refonte urgente.
Dans le domaine législatif, l'inscription à l'ordre du jour d'une proposition de loi déposée voilà quelques années par le député Joël Sarlot en vue d'éliminer les locations non déclarées est également attendue. Pouvons-nous l'espérer pour bientôt ou, si cette proposition de loi est caduque, la voir reprise, sous forme d'un projet de loi par le Gouvernement, qui doit veiller à l'application des règles de compétitivité ?
L'Etat a un rôle d'animateur et de conseiller à jouer - je l'ai dit voilà un instant - sur le plan européen, en normalisant les relations et les réglementations avec les autres Etats, d'abord en Europe, puis dans le monde. Mais, pour cela, il est impératif d'être à l'écoute des professionnels, au risque de ne pas répondre aux besoins de ceux-ci. C'est, par exemple, le cas pour les agents de voyages. Où est l'efficacité s'il y a décalage ?
L'importance du tourisme dans l'activité économique du pays mérite que ce département ministériel soit directement rattaché à Matignon avec une réforme des structures à la clé. Maison de la France est son Quai d'Orsay tout trouvé dans ses représentations à l'étranger. Voyez, madame la secrétaire d'Etat, que je nourris beaucoup d'ambition à votre égard. (Applaudissements sur les travées du RDSE, du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Bony, dont je crois savoir qu'il intervient pour la dernière fois, à cette tribune, à l'occasion d'un débat budgétaire.
M. Marcel Bony. Madame la secrétaire d'Etat, comme mon ami Jean Besson, qui s'est plus particulièrement chargé de la partie chiffrée, je me réjouis de l'augmentation importante du budget du secrétariat d'Etat au tourisme.
De même, je ne peux qu'approuver le choix de vos objectifs principaux : l'aménagement durable du territoire, pour lequel vous avez obtenu le quadruplement des crédits du tourisme au sein des contrats de plan, l'accès aux vacances pour tous, avec une augmentation, de près de 40 % des crédits inscrits à ce titre, et, enfin, le renforcement du rôle de l'Etat. Voilà qui convient tout à fait à l'élu de moyenne montagne que je suis. C'est d'ailleurs plus particulièrement ce sujet que je souhaite aborder aujourd'hui.
Madame la secrétaire d'Etat, le tourisme de moyenne montagne est un véritable enjeu pour le pays, et le rapport qui vous a été remis récemment sur ce sujet en fait le constat. Je ne doute pas que vous veillerez à ce que cela se traduise par des mesures concrètes.
A mon avis, le rapport pose bien les problématiques : « des espaces vastes, divers et interdépendants où le tourisme prend une part grandissante mais n'est pas la panacée ; des atouts sous-exploités ; des handicaps quant à l'organisation, l'offre, l'image, le professionnalisme ». Tout cela me paraît d'autant plus pertinent que le développement durable est toujours mis en perspective.
Je parlerai tout d'abord des stations de moyenne montagne et des trois saisons touristiques qu'elles connaissent, à savoir la saison d'hiver, la saison d'été et la saison thermale.
Depuis une quinzaine d'années, la saison d'hiver est aléatoire, même à 1 800 mètres d'altitude, à cause du manque d'enneigement qui nécessite des investissements de plus en plus lourds pour les petites communes.
J'ai souvent eu l'occasion d'intervenir en faveur de ces stations villages qui correspondent à une vraie demande touristique familiale. Or le fonds neige, dont on parle depuis plusieurs années, demeure toujours une question sans réponse.
La saison d'été est pratiquement limitée aux mois de juillet et d'août et trop rarement étendue au mois de septembre. La multisaisonnalité a du mal à voir le jour, même si une meilleure dissémination de la demande touristique sur l'ensemble de l'année est d'ores et déjà perceptible grâce à la réduction du temps de travail. Mais plus de coordination des acteurs et des partenaires publics est nécessaire.
A cet égard, l'incitation à la coopération intercommunale intégrée doit être forte. L'idée de mettre en place des sociétés locales de développement touristique durable est à creuser, car cela permettrait de regrouper acteurs publics et socioprofessionnels dans une structure à vocation commerciale.
L'hébergement est une composante essentielle de l'offre d'accueil. L'effort consenti par le Gouvernement en faveur des villages résidentiels de tourisme est louable et sera prolongé par les dispositions de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains concernant les opérations de rénovation de l'immobilier de loisir. Tant mieux !
Cependant, il conviendrait d'accentuer l'aide à la petite hôtellerie, dont l'activité à caractère saisonnier ajoute aux difficultés rencontrées par le tourisme en moyenne montagne. L'amortissement des investissements sur quelques mois a un coût élevé, comme vous le savez, alors que certaines charges fixes sont plus importantes qu'ailleurs. En outre, une mesure fiscale facilitant la transmission du patrimoine hôtelier en zone de revitalisation rurale serait la bienvenue.
La saison thermale et climatique est une autre caractéristique de la moyenne montagne. Cette activité, qui n'est pas délocalisable, correspond à une clientèle malade, plutôt âgée, souvent constituée de personnes seules, ce qui induit une image de marque négative. Mais, même si leurs activités sont peu diversifiées, ces stations thermales constituent un volet indispensable et très complémentaire de l'économie locale.
Si certains contrats de plan prévoient heureusement des actions destinées à revaloriser cette activité, il apparaît que le développement du thermalisme thérapeutique se heurte toujours à une conception qui privilégie la remise en forme. Or la crise de fréquentation qui affecte depuis longtemps les cures aurait dû inciter les professionnels du secteur à concilier le médical et le ludique, plutôt que de les opposer.
Il importe donc de moderniser l'offre des stations, qui n'est plus du tout adaptée à la demande, surtout celle des jeunes, tout en préservant l'aspect sanitaire du thermalisme.
Dans le « sillage » des stations, on trouve des espaces ruraux qui tentent de lier leur sort à celui d'un pôle ou d'un point fort touristique. Toutefois, les bénéfices tirés de ce pouvoir d'attraction sont loin d'être évidents, faute probablement d'une organisation commune. De plus, le secteur rural isolé continue de perdre des habitants, des services publics, bref de la vie. Il existe certes une demande pour l'« agritourisme » et l'accueil à la ferme, mais cela ne concerne encore que 2,3 % des exploitations agricoles. Le dispostif des contrats territoriaux d'exploitation diversifiés reste donc à améliorer, plus particulièrement dans les zones agricoles difficiles où toutes facilités doivent être accordées aux pluriactifs et où des actions de formation spécifiques doivent être engagées.
Madame la secrétaire d'Etat, il y a du travail en perspective pour qui veut, comme les collectivités locales et leurs établissements publics, se placer dans l'optique de l'aménagement et du développement du territoire. A cet égard, le contrat de plan est un excellent outil, mais il existe d'autres procédures publiques à améliorer, s'agissant notamment des conventions interrégionales de massif.
A l'échelon local, la dotation touristique, bloquée au sein de la DGF, est à revoir. Quant à la taxe de séjour, son rendement pourrait être meilleur si son recouvrement était assuré par les services fiscaux.
Enfin, madame la secrétaire d'Etat, je vous exprime mes félicitations pour la revalorisation du statut des saisonniers du tourisme et pour les dispositions prises en vue de faciliter leur logement. La moyenne montagne a besoin de développement et d'orientations spécifiques. C'est pourquoi je vous remercie de bien vouloir plaider auprès du Premier ministre en faveur de la mise en place d'une mission interministérielle du tourisme en moyenne montagne.
Madame la secrétaire d'Etat, je conclus en vous assurant de la confiance des citoyens et des élus que je représente. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Michelle Demessine. secrétaire d'Etat au tourisme. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais tout d'abord remercier Mme le rapporteur spécial de la commission des finances et M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan de la densité et la qualité de leurs rapports et l'intérêt de leurs suggestions. Je remercie également tous les orateurs de leurs contributions et leurs questions, auxquelles je vais tenter de répondre tout au long de mon propos.
Vous avez, madame et monsieur les rapporteurs, rappelé les chiffres du tourisme et souligné l'importance des enjeux économiques qui y sont liés. Je n'y reviendrai pas, car cela est connu de tous.
Toutefois, je rappellerai quelques prévisions de croissance de la fréquentation touristique avancées par l'Organisation mondiale du tourisme : dans les dix ans, on attend un triplement des flux à l'échelle mondiale, soit deux milliards de touristes par an, un doublement à l'échelon de l'Europe, soit huit cents millions de visiteurs par an, et 300 millions de visiteurs par an à l'horizon 2025 pour les seules zones côtières du pourtour méditerranéen.
Ces prévisions et les exigences d'anticipation qu'elles impliquent pour les Etats et les professionnels ont été au coeur des débats du forum sur le développement durable du tourisme, que j'ai organisé à Lille le 22 novembre dernier. Une plus grande volonté de coopération entre les quinze Etats membres de l'Union européenne ne s'est ainsi manifestée, à l'occasion de la réunion informelle des ministres européens du tourisme que j'ai présidée ce même jour à Lille dans l'optique de la présidence française de l'Union.
A cet égard, monsieur Joly, les sujets que vous avez abordés ont fait l'objet de résolutions très concrètes, qui sont au nombre de douze, parmi lesquelles figure notamment le classement hôtelier. Je puis d'ailleurs ajouter que, voilà un an, pour la première fois depuis la création de l'Union européenne, quatre groupes de travail réunissant des experts ont été mis en place par la Commission européenne afin de réfléchir sur un certain nombre de sujets, dont ceux de la qualité de l'offre touristique - je crois que le classement hôtelier en fait partie - du développement durable, de l'emploi et des systèmes d'information développés grâce aux nouvelles technologies.
Par conséquent, puisque vous vous inquiétiez de l'énergie et du dynamisme de la présidence française sur ce sujet, je peux vous affirmer qu'ils se sont manifestés tout au long des cinq mois écoulés, mais aussi bien avant, car pour obtenir un tel résultat il faut avoir travaillé en amont.
J'ai présenté hier matin à Bruxelles les résultats de ces travaux devant le Conseil « marché intérieur ». Dans le strict respect du principe de subsidiarité, une volonté commune s'y est dégagée de promouvoir une approche intégrée du tourisme, notamment en développant les échanges de bonnes pratiques, les réseaux d'information sur les expériences menées en matière de qualité et de promotion du tourisme durable et l'élaboration des comptes économiques.
Cette volonté démontre la montée en puissance d'une certaine stratégie européenne du tourisme, nécessaire pour relever les défis que révèlent les chiffres exponentiels de croissance de ce secteur.
Première destination touristique mondiale cette année encore, la France se doit de jouer, en matière de politique du tourisme, un rôle naturellement pilote et reconnu comme tel, de par ses orientations et les instruments qu'elle a mis en place. C'est pourquoi le Gouvernement a accompagné le développement constant de l'économie touristique d'une progression non moins continue des crédits du budget du département ministériel chargé d'animer ce secteur.
Cette croissance se poursuit en effet depuis trois ans : elle a atteint 15,5 % l'année dernière et 10,7 % voilà deux ans. Je rappellerai que, à mon arrivée, j'ai trouvé un budget de 355 millions de francs. Il est satisfaisant de constater que l'année 2001 marquera le passage du cap symbolique du demi-milliard de francs.
Ainsi, le budget qui vous est présenté dépasse 518 millions de francs, soit une croissance de 16 %, auxquels il faut ajouter 105 millions de francs qui viennent d'être inscrits dans la loi de finances rectificative pour 2000 au titre des avenants « tempêtes » et « marée noire », sur les 420 millions de francs de crédits accordés par le comité interministériel pour la période 2000-2003 pour l'aménagement et le développement du territoire. Le budget total de mon département ministériel pour 2001 sera donc, en réalité, supérieur à 620 millions de francs, soit une croissance consolidée de près de 40 % en un an ! En outre, l'étalement de ces moyens supplémentaires sur trois ans leur assure une certaine pérennité.
Il convient d'ajouter à ce montant les engagements des autres ministères en faveur du tourisme, qui, en première estimation, atteindraient plus de trois milliards de francs. C'est d'ailleurs pour souligner le caractère transversal et interministériel du tourisme et de l'action que je mène que j'ai décidé, monsieur Dubrule, de réaliser un « jaune budgétaire » que je vous présenterai l'an prochain. Y sera inscrite, monsieur Maman, la part de l'investissement touristique, charge supportée essentiellement, comme vous le savez, par le Fonds national d'aménagement et de développement du territoire, le FNADT, et qui ne figure donc pas dans mon budget, ainsi que par les crédits européens.
Enfin, le bilan des engagements publics en faveur du tourisme ne serait pas complet, puisque ce secteur est décentralisé, si l'on ne prenait pas en compte les engagements des régions, des départements et des communes, engagements qui représentent plusieurs milliards de francs et auxquels il convient encore d'ajouter, s'agissant des zones de revitalisation rurale, les mesures fiscales prises pour inciter à l'investissement dans l'immobilier touristique. Je vous informe que, à l'heure actuelle, la réalisation de 4 500 lits touristiques bénéficie déjà de ces dispositions fiscales.
Comme ceux qui l'ont précédé, ce budget a pour objet d'aider notre industrie touristique à poursuivre et à accroître ses efforts d'adaptation structurelle.
Cette adaptation est en effet indispensable pour conserver notre place sur le plan international, en termes tant de fréquentation que de recettes, car le secteur du tourisme présente, comme vous l'avez souligné à juste titre, mesdames, messieurs les sénateurs, des signes de fragilité.
C'est d'ailleurs peut-être l'enseignement principal que je tire du bilan de notre saison touristique 2000. En effet, si la situation d'ensemble s'est révélée satisfaisante, elle a marqué un certain nombre d'évolutions : une forte sensibilité aux événements conjoncturels, en l'occurrence les tempêtes et la marée noire, qui peuvent se reproduire comme on le voit avec le Ievoli Sun ; de nouveaux rythmes de vie et de travail amenant un fractionnement des vacances et impliquant une adaption de l'offre ; une concurrence de plus en plus vive de la part des pays émergents ; enfin, une demande plus différenciée et plus personnalisée des Français et des autres Européens.
Par ailleurs, vous avez pertinemment indiqué, madame Beaudeau, que les recettes que nous retirons de cette fréquentation record sont inférieures à celles de nos principaux concurrents, à savoir l'Espagne et les Etats-Unis. Cela est vrai, mais la situation est en train de changer.
En ce qui concerne l'Espagne, il faut noter une baisse récente de ses recettes, alors même que la fréquentation est en hausse. Cette évolution résulte en fait d'une réorientation de la politique espagnole du tourisme, eu égard aux conséquences environnementales de celui-ci, l'effort portant désormais sur un tourisme plus diversifié et plus équilibré.
Pour les Etats-Unis, la situation est différente. On y constate un fort pourcentage de touristes d'affaires, des durées de séjour très longues et des activités qui entraînent un niveau de dépenses par visiteur très élevé, dû à une clientèle disposant de hauts revenus.
Par comparaison avec ceux de ces deux pays, les indicateurs économiques de la France enregistrent, pour leur part, des évolutions significatives. La consommation touristique a ainsi augmenté en moyenne, entre le premier semestre de 1998 et le premier semestre de 2000, de plus de 23 %, alors que la fréquentation a augmenté de 4,8 %.
Par conséquent, la dépense moyenne de nos visiteurs étrangers augmente sensiblement. C'est le résultat d'une politique de diversification de nos produits et activités touristiques, fondée notamment sur la qualité. Cela est évidemment à mettre au compte des professionnels du tourisme - j'en suis bien d'accord avec vous, monsieur Plasait - mais aussi d'une volonté politique, d'une animation et d'une réorientation des moyens de l'Etat.
Une adaptation structurelle est tout aussi nécessaire, à l'intérieur de notre pays, pour développer nos territoires et l'emploi local et pour faire profiter le plus grand nombre possible de nos concitoyens de leurs droits aux vacances et aux loisirs.
C'est pourquoi mon projet de budget est orienté selon trois directions principales : l'aménagement durable du territoire et le développement local, l'impulsion économique et la création d'emplois, l'accès aux vacances pour tous.
Le projet de budget pour 2001, cela a été souligné, marque, en faveur de l'aménagement durable de notre territoire et de nos régions, un effort sans précédent, qui se poursuivra jusqu'en 2006. En effet, j'ai obtenu un quadruplement des crédits du tourisme au sein des contrats de plan Etat-région, soit 788 millions de francs auxquels s'ajoutent 109 millions de francs pour les massifs, soit au total 897 millions de francs, dont 125 millions de francs au titre de 2001.
Cinq thèmes principaux ont été proposés : l'amélioration de l'hébergement, l'observation économique, l'adaptation des entreprises aux évolutions du marché, le droit aux vacances pour tous et le renforcement de la capacité d'attraction des territoires.
Afin d'accentuer le rééquilibrage territorial, ce qui est, monsieur Besson, l'une de vos préoccupations, et de favoriser le développement touristique de l'espace rural, trois initiatives nouvelles sont programmées en 2001 dans l'optique de ce projet de budget.
Tout d'abord, une campagne de promotion des régions touchées par les tempêtes a été lancée pour créer une véritable image de la « destination France » en termes de tourisme de pays, de tourisme vert et de tourisme de nature. On peut la suivre actuellement dans un certain nombre de nos hebdomadaires.
M. Jean Besson. Très bien !
Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat. Elle comportera, dès ce mois-ci, un volet hivernal, plutôt tourné vers les régions Lorraine et Midi-Pyrénées, et, au printemps et à l'été prochains, un volet « campagne verte ». Cette campagne concernera à la fois le marché français et les principaux marchés européens.
Par ailleurs, la conférence permanente du tourisme rural, dont j'ai annoncé la création à Manosque en septembre dernier, sera mise en place, dès parution de son décret constitutif, au début de 2001. Elle associera l'ensemble des acteurs du milieu rural afin de mettre en cohérence politiques et partenaires sur ce thème essentiel pour l'avenir de nos territoires ruraux.
Enfin, monsieur Bony, le rapport sur la moyenne montagne, réalisé à la demande du Premier ministre, pour élaborer un plan de développement touristique durable des espaces montagnards situés hors des grandes stations a été rendu public voilà quelques semaines, il est actuellement sur Internet. Il fait actuellement l'objet d'une analyse entre les ministères concernés et je proposerai une série de mesures lors du prochain conseil national de la montagne.
Monsieur Besson, je vous confirme que le fonds de garantie pour l'hôtellerie est actuellement à l'étude.
De même, concernant le souhait que vous exprimez, comme M. Bony d'ailleurs, que soit poursuivi le travail engagé pour moderniser et développer les stations thermales, je rappellerai le programme national actuellement suivi par mes services et par ceux de la DATAR pour aider les stations existantes à mieux définir leurs stratégies de développement. A ce jour, onze stations ont fait l'objet d'un diagnostic et onze stations supplémentaires sont candidates à ce programme 2000. Ce programme rencontre un vif succès et il sera poursuivi dans le prochain exercice.
Monsieur Ginésy, vous avez évoqué la nécessaire réhabilitation du mobilier de loisirs touristiques. Comme vous le savez, la loi SRU a été adoptée par l'Assemblée nationale voilà quelques jours. Je vous confirme que, dès sa promulgation, les décrets sur les dispositifs, qui sont prêts depuis plus d'un an, sortiront après l'avis définitif du Conseil d'Etat, avec lequel nous travaillons en étroite concertation.
Afin d'accélérer leur mise en oeuvre, je compte promouvoir ces nouveaux dispositifs, en concertation avec les associations d'élus, les professionnels et les opérateurs locaux. Je vous annonce que j'ai réservé des moyens financiers à cette fin.
Vous m'avez, madame Beaudeau, interrogé sur le cas particulier des parcs à thèmes. A condition qu'ils soient bien étudiés, de dimension raisonnable et qu'ils répartissent bien la charge et les risques entre secteur public et secteur privé, ces parcs, petits et moyens, peuvent structurer les territoires, y compris des territoires ruraux, et y faciliter la diffusion des flux touristiques. Mais je partage votre point de vue sur la prudence qui doit inspirer ces démarches.
Je crois à cet égard que les difficultés qui ont marqué l'époque de démarrage reposaient sur des erreurs de conception graves, et ont rendu les experts, les banquiers, les entreprises et les collectivités locales plus circonspects.
Vous avez été plusieurs, et c'est bien normal, à revenir sur les catastrophes qui ont marqué l'année 2000 : les intempéries et le naufrage de l' Erika.
Ainsi que vous l'avez souligné, madame le rapporteur spécial, l'événement douloureux qu'a été la marée noire a entraîné une formidable mobilisation, qui a permis que la saison touristique se déroule dans les meilleures conditions.
Vous m'interrogez également sur ce point, M. Ginésy : le Gouvernement a dégagé des moyens d'urgence, mis en oeuvre des mesures d'accompagnement et, dans le cadre des avenants aux contrats de plan, ce sont 117 millions de francs qui ont été décidés pour les régions concernées sur la période 2000-2006, afin de leur permettre de requalifier leur offre touristique.
Je suis très attentive à la mise en oeuvre des mesures d'indemnisation par le FIPOL. J'ai ainsi obtenu qu'il élabore un formulaire simplifié pour les PME et qu'il organise au plus près du terrain des réunions d'information pour les responsables d'entreprises et les organismes consulaires. Je veillerai aussi, conformément à l'engagement du Premier ministre, à ce que les victimes du naufrage de l' Erika soient totalement indemnisées des dommages qu'elles ont subis.
Dans le domaine économique, le dynamisme des créations d'emplois, qui sont passés de 12 000 en 1997 à 30 000 en 1999, ne doivent pas occulter les difficultés - vous les avez rappelées, madame Terrade, ainsi que d'autres parlementaires - auxquelles est confronté ce secteur. En effet, l'emploi touristique ne peut se développer dans la durée si l'on ne répond pas, par exemple, au problème posé par la professionnalisation des acteurs ou par la situation précaire de trop nombreux travailleurs.
J'entends poursuivre en 2001 mon action dans ce domaine qui est, vous le savez, l'un des axes prioritaires du Gouvernement. C'est ainsi que je serai particulièrement attentive aux moyens d'aider les petites et moyennes entreprises du secteur hôtels, cafés et restaurants et de répondre à leur besoin de recrutement et de modernisation. En effet, l'enjeu est d'importance s'agissant d'un secteur qui emploie un million de personnes et génère un million d'emplois indirects.
Le maintien et le développement de la qualité des prestations touristiques passent bien évidemment par la qualité de l'emploi. Cela suppose de rendre ce secteur attractif en termes de salaires et de conditions de travail. C'est ainsi que des négociations paritaires ont lieu dans la branche des hôtels, cafés et restaurants sur la réduction du temps de travail. Plusieurs réunions se sont déjà tenues et d'autres sont programmées dans les jours à venir.
Ainsi que je l'ai fait depuis trois ans et demi, j'entends accompagner la modernisation sociale dans ce secteur. C'est ainsi que j'ai lancé une réflexion permettant de les aider dans leur démarche de modernisation, d'amélioration des conditions de travail de leurs salariés, et dans le maintien des équilibres économiques fragiles qui sont les leurs.
Un travail en commun avec le ministère de l'emploi et de la solidarité est mené, dont l'aboutissement devrait être un plan emploi-formation, répondant à la fois aux difficultés de recrutement, aux besoins de formation et à l'accompagnement de la réduction du temps de travail.
Pour les professionnels de la restauration, la question de la baisse de TVA est un moyen, selon eux, d'accélérer le mouvement en cours vers la normalisation et l'amélioration de l'attractivité de leur secteur.
Vous avez été plusieurs, sinon tous, à me poser des questions sur ce sujet.
Chacun connaît ma position. Ce dossier a sérieusement progressé : il a fait l'objet d'un véritable débat au sein du Gouvernement mais il n'a pu aboutir pour 2001 dans la mesure où il fallait faire des choix budgétaires et, dans le même temps, obtenir l'approbation de la Commission européenne.
Vous avez été plusieurs à m'interpeller sur les difficultés de recrutement dans ce secteur ; elles sont fortement liées au problème des saisonniers. Vous le savez, à la suite du rapport Le Pors, j'ai annoncé au mois de février dernier quinze mesures en conseil des ministres, qui se concentrent sur deux problèmes : le logement et les droits sociaux.
Ainsi, des dispositions réglementaires ont été prises pour élargir l'accès aux aides personnelles au logement. Par ailleurs, un dispositif d'aide à la programmation de 6 000 logements en trois ans est prévu ; des collectivités locales sont d'ores et déjà engagées dans ce dispositif.
Concernant les droits sociaux, des initiatives visant à renforcer les contrôles de l'inspection du travail et à développer la formation hors saison ont été prises. Le projet de loi de modernisation sociale, qui sera débattu au mois de janvier 2001, permettra la validation des acquis pour ces salariés. En outre, d'autres initiatives se concrétisent, telles que des maisons des saisonniers à Villars-Pont-d'Arc, à Serre-Chevalier, à Ax-les-Thermes et à Belle-Ile-en-Mer.
Afin de poursuivre la mise en oeuvre des mesures annoncées l'année dernière et de faire, si nécessaire, de nouvelles propositions, j'ai proposé à ma collègue Elisabeth Guigou de confier une mission conjointe à l'inspection générale du tourisme et à l'inspection générale des affaires sociales.
Vous savez que le Gouvernement travaille aussi à la sortie du dispositif emploi-jeunes. Il s'agit d'aider les employeurs à maintenir et à développer ces nouveaux services. Les mesures correspondantes seront présentées par la ministre de l'emploi et de la solidarité.
Madame Beaudeau, madame Terrade, vous m'avez interrogée sur cette question. Je l'ai prise « à bras-le-corps », puisque, dans mon domaine, 6 500 jeunes ont rejoint le secteur du tourisme. Aussi, mon objectif est d'élaborer, avec les représentants des organismes et les collectivités concernés, 6 500 projets individuels de pérennisation.
Il s'agit de faire le point, à partir de chaque emploi, sur ce qui relève, par exemple, du service public ou d'une activité solvable, d'inclure dans les prix des prestations touristiques le salaire et l'apport de ces jeunes en termes de développement de l'activité, enfin, d'examiner ensemble par quelles voies et quels moyens la pérennisation pourra se faire.
Enfin, pour soutenir différentes initiatives des professionnels, une augmentation de 36,2 % de mon budget est consacrée à des actions de promotion, d'amélioration de la qualité de l'offre et de formation.
J'essaierai maintenant de répondre à votre question, monsieur Plasait, sur les concentrations économiques dans le domaine du tourisme. La confirmation par le groupe Preussag de son entrée dans le capital de Nouvelles Frontières a, en effet, fortement ému l'ensemble des acteurs du tourisme.
Pour ma part, comme vous le savez, j'ai appelé les opérateurs français à se concerter, et les premières réflexions ont commencé.
Ce phénomène, s'il accélère en Europe, notamment en France, risque d'aller à l'encontre des aspirations des consommateurs recherchant des produits individualisés et à forte identité. Il pourrait aussi avoir, à terme, des conséquences sur notre environnement et aggraver nos déséquilibres territoriaux. De plus, il inquiète beaucoup les petites entreprises réceptrices, dont la présence est essentielle pour la vie de nos territoires.
Je puis vous dire que mes collègues européens du tourisme, que j'ai rencontrés lors de réunions bilatérales organisées sous la présidence française, partagent ces inquiétudes. Nous en avons également parlé au forum de Lille.
D'autres évolutions, liées à l'essor des nouvelles technologies de l'information et de la communication, auront aussi des conséquences sur l'organisation de l'offre, en provoquant de nouveaux modes de distribution.
L'Etat ne peut être absent de cette évolution. En effet, depuis ma prise de fonctions, outre un rapport réalisé par le Conseil supérieur du tourisme, en 1998, sur ce sujet, un travail a été lancé pour définir un format commun d'échanges de données : il s'agit du projet TOURINFRANCE et du serveur RESINFRANCE, dont l'objectif est de regrouper et de faciliter la mise en marché de l'offre française très diversifiée, et qui sont en phase de développement.
La promotion touristique de la France joue aussi un rôle essentiel pour augmenter la fréquentation touristique qui contribue fortement à la croissance et à l'emploi. MM. Dubrule, Joly et Plasait l'ont notamment souligné.
S'agissant de la promotion, en particulier du budget de Maison de la France, sur lequel j'ai été interpellé par plusieurs intervenants, je tiens à rappeler ici que l'efficacité de l'outil Maison de la France se mesure non seulement aux évolutions budgétaires, mais aussi à sa modernité et à ses performances qui sont à cet égard reconnues.
Elles sont tout d'abord reconnues, en France, par ses partenaires qui n'ont jamais été si nombreux, passant de 750 à près de 1 100 cette année. Cette augmentation, monsieur Joly, est constituée, pour l'essentiel, d'une grande majorité de petites entreprises indépendantes auxquelles j'ai d'ailleurs décidé de donner un siège au conseil d'administration de Maison de la France. Ce siège est occupé par une personnalité éminente, ce qui n'a pas dû vous échapper.
Mais ces qualités sont aussi reconnues à l'étranger où le nombre de pays avec lesquels la France entretient des programmes de coopération et qui sollicite un transfert de savoir-faire en matière de promotion est sans cesse croissant.
D'un strict point de vue budgétaire, permettez-moi de vous rappeler que le budget pour 2000 de cet organisme a augmenté de 20,5 millions de francs dont 18,5 millions de francs seulement correspondent à l'assujettissement à la TVA. Même modeste - 2 millions de francs, soit 1,5 % - l'augmentation des moyens pour 2000 de Maison de la France n'en était pas moins réelle. Pour 2001, l'augmentation des crédits s'élève à 6,5 millions de francs, portant ainsi la subvention de l'Etat au groupement d'intérêt économique à 180 millions de francs. Il ne vous échappe pas que la part principale de mon projet de budget est consacrée à ce poste.
Ainsi, le budget de Maison de la France a progressé de plus de 20 % à périmètre constant, j'y insiste, hors assujettissement à la TVA, depuis trois ans.
En ce qui concerne l'AFIT, l'Agence française de l'ingénierie touristique, le renforcement de ses moyens financiers de 3,7 millions de francs a pour objet de compenser le coût net de l'assujettissement du groupement d'intérêt public à la TVA. Ces moyens permettront aussi à l'agence de maintenir sa capacité d'études.
Enfin, cet essor continu de la fréquentation doit s'accompagner d'un effort en matière d'observation économique, comme l'a souligné M. Besson. Des moyens importants, en augmentation de 16,4 millions de francs ont ainsi été mobilisés en deux ans. En effet, au-delà de l'indispensable enquête aux frontières qui n'avait pas été réalisée depuis six ans, il nous faut inventer de nouveaux outils d'observation intracommunautaires, liés à l'apparition de l'euro.
L'effort budgétaire dégagé pour les organismes associés à mon ministère se retrouve aussi naturellement au niveau de mon administration, et vise cette année particulièrement les services sur le terrain.
L'augmentation de 3,6 % de la dotation affectée au personnel est notamment liée au traitement des carrières des agents de l'administration du tourisme et à la revalorisation de l'indemnité de fonction des délégués régionaux au tourisme. Les effectifs budgétaires, vous l'avez souligné, madame Beaudeau, sont maintenus au niveau du budget 2000.
Une augmentation de 10 % des moyens de fonctionnement ira aux délégations régionales.
A M. Joly qui m'a interpellé sur ce point, je précise que j'ai mis en oeuvre un important travail de modernisation et de réorganisation de mon administration : l'AFIT, Maison de la France, ONT ont vu leur statut profondément remanié et, en ce moment même, s'achèvent les travaux de réorganisation de la direction du tourisme. Un nouvel organigramme, dont les arrêtés sont en cours de signature, mettra cette direction en ordre de marche pour répondre aux grands enjeux de développement de l'économie touristique à venir. Cette démarche répond à l'inquiétude que vous exprimiez, monsieur le sénateur, de l'essaimage puisqu'elle s'oriente plutôt vers le recentrage de mon administration sur les objectifs principaux.
Troisième direction de mon budget : le droit aux vacances. Les crédits inscrits à ce titre augmentent cette année de 39,8 %.
Ainsi, la Bourse Solidarité Vacances verra ses moyens passer de 2,8 millions de francs à 4 millions de francs. Cela a été dit, il y eu plus de 10 000 bénéficiaires en un an et mon objectif, pour l'an prochain, est de doubler ce nombre. Fait significatif : pour 44 % de ces bénéficiaires, il s'agissait d'un premier départ en vacances.
L'augmentation des crédits concernera aussi les associations de tourisme social et associatif. Vous l'avez souligné, elles sont réunies depuis fin 1999 au sein d'une « coordination nationale du tourisme social et associatif », destinée à réfléchir sur les évolutions techniques et politiques de ce secteur. Elle travaille ardemment pour trouver des solutions aux problèmes auxquels ce secteur est confronté.
La réalisation d'une campagne institutionnelle de grande ampleur est prévue d'ici à quelques semaines, pour valoriser la qualité et l'importance du tourisme social et surtout associatif. Elle fera mieux connaître la mission essentielle qu'il remplit pour un égal accès de tous aux vacances, pour assurer la diversification de l'offre touristique et pour diffuser ses valeurs. Elle sera suivie d'une campagne à destination du grand public.
En outre, j'ai décidé que le plan patrimoine de réhabilitation des villages de vacances serait prolongé en 2001.
Vous le savez, l'Agence nationale pour les chèques-vacances est confrontée à de nouveaux défis : l'extension du chèque-vacance, la création de l'euro, l'ouverture européenne.
En ce qui concerne le chèque-vacances, la loi votée voilà plus d'un an est progressivement mise en oeuvre.
Réduire les inégalités, c'est aussi agir pour favoriser l'accès aux vacances des personnes handicapées.
Depuis maintenant deux ans, j'ai engagé en faveur des handicapés toute une série d'actions de sensibilisation et de rencontres, avec le concours des associations, des professionnels et des collectivités locales. Elles commencent à porter leurs fruits, vous le savez.
L'année 2001 sera l'année de la mise en place d'un label et, puisque vous m'avez posé la question, ce label qui concerne les handicaps sensoriel, physique, visuel et mental sera attribué, sur le plan régional, aux établissements adaptés.
Le dispositif qui permettra la mise en place du label national est en cours d'élaboration. Il s'agit d'évidence d'un dispositif qui associera l'ensemble des partenaires, l'Etat y tenant un rôle d'impulsion et étant garant de la solidarité nationale.
Concernant le tourisme des jeunes et le problème des classes de découverte qui vous préoccupe, monsieur Besson, j'y suis d'autant plus sensible que j'ai engagé, avec ma collègue Marie-George Buffet, ministre de la jeunesse et des sports, un travail de réflexion sur les centres de vacances.
Une campagne de communication de ce ministère est actuellement en préparation. Dans le cadre de ce travail en commun, la question du transport des jeunes sur les lieux de vacances a été posée et une charte sera bientôt établie avec la SNCF et les associations de tourisme.
Concernant les classes de découverte, vous avez fait état du rapport du conseil national du tourisme, rendu public en février dernier. D'ores et déjà, des mesures ont été prises par le secrétariat d'Etat au tourisme. Ainsi, dans le cadre des avenants intempéries et marée noire, des crédits ont été consacrés à la mise en conformité de villages de vacances pour l'accueil de classes de mer.
Mais le développement des classes de découverte nécessite un travail interministériel avec mes collègues de la jeunesse et des sports et de l'éducation nationale que je m'emploie à développer. Enfin, je vous informe qu'en partenariat avec l'Union nationale des associations de tourisme et de plein air un dispositif d'observation spécifique aux vacances et aux loisirs des jeunes a été intégré à notre Observatoire national du tourisme. Il permettra ainsi de mieux orienter l'action publique.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je ne saurai terminer cette intervention sans parler d'éthique. Dans le secteur du tourisme, comme dans bien d'autres qui sont actuellement au coeur du débat, les valeurs et le sens que nous donnons à nos activités économiques et sociales prennent de plus en plus d'importance.
Ainsi, le code mondial d'éthique, adopté par l'Organisation mondiale du tourisme en 1999, marque la volonté de promouvoir, partout dans le monde, un tourisme responsable et durable, au bénéfice de tous : Etats, opérateurs touristiques, touristes, mais aussi et surtout populations locales.
La France s'est beaucoup investie dans l'élaboration de ce code mondial, et j'ai naturellement souhaité le faire vivre sur notre territoire en signant, en septembre dernier, la déclinaison de ce code avec les quinze principales fédérations professionnelles et les opérateurs privés représentant près de 60 % de l'activité économique de ce secteur en France.
Je crois qu'il est bien du rôle de la France, dont la notoriété touristique est en grande partie due à son patrimoine et à sa culture, d'être ainsi à la pointe de la promotion de ces valeurs, dignes de son histoire et de son humanisme. (Applaudissements.)
M. le président. Je rappelle au Sénat que les crédits concernant le tourisme inscrits à la ligne « Equipement, transports et logement » seront mis aux voix aujourd'hui même à la suite de l'examen des crédits affectés à la mer.

ÉTAT B

M. le président. « Titre III : 1 213 286 420 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre III est réservé.
« Titre IV : 214 404 732 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre IV est réservé.

ÉTAT C

M. le président. « Titre V. - Autorisations de programme : 11 119 112 000 francs. »
« Crédits de paiement : 5 346 588 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre V est réservé.
« Titre VI. - Autorisations de programme : 18 352 298 000 francs. »
« Crédits de paiement : 7 243 682 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre VI est réservé.
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances concernant le tourisme.

I. - SERVICES COMMUNS

II. - URBANISME ET LOGEMENT

M. le président. Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi concernant l'équipement, les transports et le logement : I. - Services communs, II. - Urbanisme et logement.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jacques Pelletier, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, il me revient de présenter deux rapports.
Le premier intéresse les crédits des services communs du ministère de l'équipement, des transports et du logement. En introduction, je veux souligner que, comme l'an dernier, le projet de budget des services communs est assez difficile à lire.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Oh !
M. Jacques Pelletier, rapporteur spécial. Ce projet de budget fait en effet chaque année l'objet de modifications de structures très substantielles puis de transferts en cours d'année qui rendent sa signification limitée. Il est par ailleurs difficile d'obtenir des données essentielles, comme la présentation du budget à structure constante.
A priori, le budget des services communs augmente de 9,8 % en 2001 pour s'établir à 26,9 milliards de francs.
Toutefois, hors prise en compte des modifications de périmètre, ce budget est pratiquement stable.
Pourtant, quelques augmentations d'effectifs sont annoncées : onze emplois supplémentaires, pour arriver à un chiffre total approchant 100 000 emplois. Il faut noter que ce dernier chiffre est une estimation puisque les chiffres du bleu budgétaire ne correspondent pas à ceux qui sont donnés par le contrôleur financier et que les effectifs budgétaires sont encore différents des effectifs réels.
Malgré l'augmentation annoncée des effectifs, la rémunération des personnels, qui concerne à 96 % les services déconcentrés du ministère, progressera seulement de 0,2 %, pour s'établir à 11,9 milliards de francs.
Cette modération résulte seulement d'une donnée conjoncturelle, à savoir l'absence de mesures de revalorisation des rémunérations dans la fonction publique. C'est la modération salariale qui explique donc, pour l'essentiel, la stabilisation du budget des services communs pour 2001.
Concernant les dépenses de fonctionnement, le projet de budget pour 2001 procède à une révision d'ensemble résultant notamment des gains de productivité réalisés par les services et d'une réduction des moyens de fonctionnement de Météo-France. Ces mouvements sont en partie compensés par des moyens nouveaux, notamment une dotation pour le développement de projets informatiques et télématiques.
Je me féliciterais donc de la stabilité du budget de personnel et de fonctionnement des services communs pour 2001, si elle n'était excessivement fragile, en raison des effets des accords salariaux qui, en l'absence d'efforts sur le niveau des effectifs, ne manqueront pas d'augmenter les dépenses de personnel en 2001.
Par ailleurs, je pense que le ministère de l'équipement, des transports et du logement gagnerait beaucoup à présenter son budget de personnel avec une comptabilité analytique.
La nomenclature budgétaire ne permet pas actuellement de savoir, par exemple, combien d'agents sont affectés à tel ou tel domaine ministériel, qui sont pourtant nombreux, notamment l'entretien des routes et les services de l'urbanisme. Les indicateurs de performance qui commencent à être mis en place portent essentiellement sur des données physiques générales et sont donc très insuffisants.
D'une manière générale, il me semble urgent que le ministère se dote des outils d'évaluation de sa politique, afin de mieux définir les secteurs qui lui semblent prioritaires. Cette évaluation, qui serait hautement profitable tant pour l'administration centrale que pour les services déconcentrés, devrait s'étendre aux établissements publics auxquels des missions particulières sont assignées, notamment l'Institut géographique national et l'Ecole nationale des ponts et chaussées.
Ainsi, le dernier contrat de plan entre l'Etat et l'Institut géographique national s'est achevé en 1997, et depuis rien n'a été signé. Notre collègue député, Guy Lengagne, a réalisé une importante mission sur cet institut, et il a rendu ses conclusions le 30 septembre 1999.
Il serait temps de déboucher sur des résultats, et peut-être M. le ministre pourra-t-il nous en dire un peu plus.
Enfin, je souhaite aborder la question de la politique d'investissement du ministère. Le budget des services communs est, dans sa quasi-intégralité, un budget de personnel et de fonctionnement, ce qui laisse très peu de place à l'investissement.
Les réponses que j'ai obtenues du ministère de l'équipement sur les investissements immobiliers sont une sorte de cri d'alarme.
Le patrimoine immobilier des 172 services déconcentrés du ministère de l'équipement est considérable.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Il est beau !
M. Jacques Pelletier, rapporteur spécial. Il est constitué de 8 500 bâtiments représentant une surface de 4 millions de mètres carrés. Mais aucune opération lourde n'a été engagée depuis 1995 et le ministère indique lui-même que « aucune véritable politique de maintenance préventive n'a pu être mise en oeuvre depuis plusieurs années » et craint « un risque réel de dégradation du patrimoine dans les prochaines années ». Dans ces conditions, il me semble qu'il serait nécessaire de connaître les intentions du Gouvernement sur ce sujet.
En conclusion, je vous indique, mes chers collègues, que la commission des finances a demandé le rejet des crédits de l'équipement, des transports et du logement.
J'en arrive au projet de budget du logement.
Le budget de l'urbanisme et du logement est, cette année encore, élaboré dans un contexte très favorable...
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Très bon !
M. Jacques Pelletier, rapporteur spécial. ... de reprise du marché immobilier et de croissance du secteur de la construction.
L'année 1999 a en effet pleinement confirmé le retour à la croissance du secteur du bâtiment, dont l'activité de construction et d'entretien a augmenté de 7,1 %.
Cette croissance a été portée par le dynamisme de la construction neuve.
L'année 2000 devrait encore être soutenue, mais cette fois-ci par le secteur de l'entretien.
Les mesures d'incitation fiscale, comme la baisse des droits de mutation, et surtout l'abaissement de la TVA sur les travaux réalisés dans les logements à usage d'habitation, ont contribué à l'euphorie du secteur de la rénovation.
Le contexte dans lequel nous est présenté le budget du logement est donc une nouvelle fois favorable, même si la progression du budget est modeste en 2001, 1,2 %, soit 48,7 milliards de francs.
Notre collègue M. Jacques Bellanger vous présentera ses observations sur le budget de l'urbanisme, thème sur lequel il a mené une importante réflexion ces derniers mois ; je me concentrerai donc plus spécifiquement sur les crédits consacrés au logement.
En premier lieu, je veux tout d'abord exprimer ma satisfaction.
L'an dernier, nous regrettions vivement qu'une réforme importante des aides personnelles ne soit pas engagée dans cette période de croissance économique.
Cette réforme devrait voir enfin le jour à compter du 1er janvier 2001.
Le Premier ministre a en effet présenté une réforme des aides personnelles lors de la conférence sur la famille du 15 juin 2000.
Cette réforme a deux objectifs auxquels je souscris : harmoniser et simplifier les barèmes des aides, regroupés dans un barème unique ; améliorer l'équité des aides en prenant en compte tous les revenus de la même manière.
Elle permet donc un traitement équitable et cohérent de l'aide aux ménages ayant de très faibles revenus, qu'ils soient issus du travail ou de transferts sociaux.
La réforme aura un coût important - 6,5 milliards de francs au total - dont une partie sera prise en charge sur les crédits du secrétariat d'Etat au logement.
Pour 2001, 2 milliards de francs sont prévus sur le budget de l'urbanisme et du logement à ce titre.
Je regrette que la réforme ne concerne pas tout le monde : 4,3 millions d'allocataires sur 6 millions sont concernés, c'est-à-dire que les bénéficiaires d'aides à l'accession, les habitants de logements-foyers et les étudiants ne sont pas concernés.
Je conçois qu'il n'est pas possible de tout faire en même temps...
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Tout à fait !
M. Jacques Pelletier, rapporteur spécial. ... mais il est regrettable que certaines personnes, qui sont également des personnes modestes, ne bénéficient pas de la réforme.
On peut par ailleurs déplorer, une nouvelle fois, que l'aide à l'accession ne bénéficie pas du même intérêt que l'aide à la location, alors qu'il s'agit souvent de personnes de conditions comparables.
Pour 2001, je regrette vivement que le financement de la réforme des aides personnelles soit réalisé au détriment des aides à la pierre.
En effet, l'effort budgétaire sur les aides personnelles se traduit par une plus faible ambition sur les autres lignes du budget.
Quant aux moyens dévolus à l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat, l'ANAH, et à la prime à l'amélioration de l'habitat, la PAH, ils sont fusionnés, conformément à la réforme introduite dans la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains. Cette fusion s'accompagne d'une forte réduction des crédits de paiement ouverts pour 2001 : 2,7 milliards de francs contre 3 milliards de francs en 2000.
Pour la première année de réforme de l'ANAH, la réduction de ses moyens d'intervention est un signal qui me semble négatif. Certes, l'ANAH dispose d'une trésorerie importante - environ 700 millions de francs - et elle pourra s'en servir, mais cette solution ne peut être que temporaire.
Par ailleurs, compte tenu des besoins en réhabilitation des propriétaires occupants, une réforme de l'ANAH à moyens constants risque de se traduire par une baisse de l'aide aux propriétaires bailleurs.
Vous savez, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, que notre commission est attachée à la rénovation du parc locatif privé, qui est un moyen essentiel de remettre des logements vacants sur le marché. Vous savez également que les bailleurs payent une taxe additionnelle au droit de bail très élevée, à hauteur de 3,5 milliards de francs, et qu'il serait dès lors paradoxal de réduire leurs subventions.
Pourriez-vous nous rassurer, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, sur le maintien de ces subventions ?
J'en viens maintenant au prêt à taux zéro.
Les crédits du prêt à taux zéro s'élèveront, selon le projet de loi de finances, à 5,85 milliards de francs en 2001, soit en légère diminution par rapport au budget de 2000. Compte tenu de la croissance de la demande et de l'augmentation des taux d'intérêt, cette légère diminution de la dotation traduit en réalité une baisse sensible de l'efficacité du dispositif.
Depuis plusieurs années, de nombreuses mesures ont réduit l'efficacité sociale des aides à l'accession à la propriété. En octobre 1997, les prêts à taux zéro ont été restreints aux primo-accédants. Un arrêté du 29 décembre 1999 a plafonné la subvention de l'Etat et un arrêté du 29 septembre 2000 a réduit la période de remboursement des prêts.
Ainsi, les moyens inscrits en faveur de l'accession à la propriété des ménages modestes ne cessent de diminuer en temps réel.
Depuis la réintégration des crédits du prêt à taux zéro dans le budget du logement, force est de constater un écart croissant entre les ressources tirées du 1 % logement versées au budget général et les dotations de crédits nécessaires au prêt à taux zéro. Vous aviez estimé, monsieur le ministre, qu'il fallait dégager 15 milliards de francs sur la période de la convention conclue avec le 1 % logement pour maintenir son efficacité. Je crains que ces sommes ne soient de plus en plus difficiles à trouver.
Or je pense qu'il est important de maintenir un niveau d'aide suffisant à l'accession à la propriété des ménages modestes.
Dans ces conditions, je souhaiterais, monsieur le ministre, que vous nous donniez des assurances sur le fait que le Gouvernement ne recourra pas à de nouveaux arrêtés en 2001 afin de réduire l'efficacité des prêts à taux zéro.
J'en viens au dernier point : la construction sociale.
Je ne rappellerai pas les débats qui ont eu lieu, notamment dans cette assemblée, sur les dispositions de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Très bonne loi !
M. Jacques Pelletier, rapporteur spécial. Les crédits inscrits au projet de budget pour 2001 devraient permettre le financement de 70 000 prêts locatifs à usage social - appelés désormais PLUS - pour la construction de logements neufs et de 120 000 PALULOS - prime à l'amélioration des logements à usage locatif et à occupation sociale - soit une reconduction du programme prévu pour l'an 2000.
Malheureusement, le PLUS n'a pas encore permis un redémarrage de la construction sociale et l'objectif de 70 000 PLUS ne sera probablement pas atteint, comme ces dernières années.
Lors du tout récent congrès des HLM, vous avez demandé aux organismes, monsieur le ministre, de prendre leurs responsabilités et de construire davantage.
Je partage votre appréciation sur la responsabilité du mouvement HLM. Toutefois, vous savez que la question de la construction sociale n'est pas simple.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Eh oui !
M. Jacques Pelletier, rapporteur spécial. Des mesures de compensation ont été prises, comme l'abattement de taxe foncière sur les propriétés bâties, mais d'autres sont à venir, notamment pour neutraliser les conséquences de la hausse du livret A en 2001.
Les organismes de HLM se plaignent également de l'inadaptation des aides à la pierre à l'évolution du coût de la construction. L'idéal serait donc de lier la subvention à l'évolution du coût de la construction. Pourriez-vous, monsieur le ministre, nous rappeler vos intentions sur ce sujet ?
D'une manière générale, je rappellerai que tous les chiffres montrent que la part de la construction sociale dans la construction neuve tend à diminuer dans les pays de l'Union européenne.
Je pense donc qu'un débat sur la seule construction sociale n'est pas suffisant. Il faut reconnaître que la qualité du logement des personnes à faible revenu dépend non pas uniquement du nombre de logements sociaux construits, mais également des mesures en faveur de leur accès au parc privé.
A cet égard, je rappelle que la commission des finances a approuvé sans réserve votre souhait de créer un parc de logements locatifs conventionnés. Elle souhaite simplement que, comme il s'attache au logement social, le Gouvernement développe tous les efforts nécessaires à la consolidation d'un secteur locatif privé intermédiaire.
C'est pourquoi la commission des finances a présenté, en première partie de la loi de finances, un amendement tendant à améliorer encore le dispositif fiscal d'aide à l'investissement locatif. Il s'agit de permettre aux investisseurs de louer leur bien à un ascendant ou à un descendant. La secrétaire d'Etat au budget, Mme Parly, nous a promis que le Gouvernement déposerait un amendement sur ce sujet en deuxième partie de la loi de finances. Nous attendons ces propositions avec intérêt.
En conclusion, j'ai donné, à titre personnel, un avis favorable sur l'adoption du budget de l'urbanisme et du logement, mais je rappelle que la commission des finances a demandé au Sénat le rejet des crédits de l'équipement, des transports et du logement en regrettant, une fois encore, que le Gouvernement nous demande un vote unique sur l'ensemble des crédits. (Applaudissements.)
M. Alain Lambert, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Exactement !
M. le président. La parole est à M. Bellanger, rapporteur pour avis.
Je rappelle que chaque rapporteur pour avis dispose de cinq minutes pour présenter son rapport.
M. Jacques Bellanger, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan, pour l'urbanisme. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, permettez-moi de centrer mon propos sur diverses questions d'actualité intéressant le droit de l'urbanisme et la gestion des crédits qu'a présentés M. Pelletier, rapporteur spécial de la commission des finances.
Ma première question concerne les conséquences de la suppression du Fonds pour l'aménagement de la région d'Ile-de-France, le FARIF.
La commission des affaires économiques se félicite du fait que le Gouvernement ait, conformément aux engagements pris lors de l'examen du budget pour 2000, reconduit le montant figurant antérieurement à ce fonds dans le budget général. Elle s'interroge, cependant, sur le sort des produits de cession des terrains anciennement achetés par son intermédiaire. Elle souhaite que, nonobstant le principe de non-affectation des ressources publiques aux charges, l'intégralité du fruit de ces cessions soit consacrée à des investissements, faute de quoi, le gain réalisé par l'Etat au titre de la vente d'actifs immobiliers serait affecté à des dépenses de fonctionnement, au détriment de la bonne gestion du patrimoine de la collectivité.
Ma deuxième question portera sur le volet urbanisme de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, que le Parlement vient d'adopter dans une grande inflation de textes législatifs, dont l'origine est aussi bien gouvernementale que parlementaire.
Les réformes du droit du sol adoptées sont d'une grande importance pour les citoyens et pour les équipes municipales qui seront mises en place dès le mois de mars prochain. En tenant compte des réserves possibles dues aux saisines dont la loi fait l'objet, dans quels délais, monsieur le ministre, pensez-vous pouvoir assurer une mise en application réelle ?
Une troisième question préoccupe la commission des affaires économiques ; il concerne l'évolution des dotations que l'Etat verse aux collectivités locales au titre de l'élaboration des documents d'urbanisme.
Comme la mise en oeuvre des dispositions de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains nécessitera la confection d'un certain nombre de documents de planification intercommunale, de schémas de cohérence territoriale, de plans locaux d'urbanisme et de cartes communales, il nous semble utile que le Gouvernement précise, dès à présent, les conditions dans lesquelles sera quantifié et compensé aux collectivités locales l'accroissement de charges résultant de leur élaboration.
Les trente-huit agences d'urbanisme de métropole et des DOM, qui ont accumulé en ces domaines une réelle capacité d'expertise, seront des auxiliaires précieux pour les communes. Nous constatons d'ailleurs un très fort taux de consommation des crédits destinés à ces agences ; 57,3 millions de francs en 1999 ont été consommés sur les 60,6 millions de francs disponibles avec les reports cumulés, soit plus de 94 %. Il est donc nécessaire d'accroître les crédits qui leur sont destinés si nous souhaitons une application rapide des mesures incluses dans la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains en matière d'urbanisme.
S'agissant de l'état d'application des lois que nous avons votées, il me semble nécessaire d'achever de publier les décrets d'application de la loi du 30 décembre 1996 relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur de la zone dite des cinquante pas géométriques dans les départements d'outre-mer. Certes, une avancée a eu lieu depuis l'année dernière, mais il reste encore à déterminer les conditions qui doivent être réunies pour que des cessions de terrains fassent l'objet d'une aide exceptionnelle de l'Etat et il faut procéder à la nomination des directeurs des agences pour la mise en valeur des espaces urbains de la zone dite des cinquante pas géométriques.
Vous constaterez, monsieur le ministre, que nous n'évoquons plus les difficultés rencontrées par les élus auprès des architectes des Bâtiments de France. Nous souhaitons tous, je crois, que le texte adopté dans la loi SRU règle définitivement ce débat.
Il reste cependant une interrogation sur la place des architectes dans le cadre de la réforme du droit de l'urbanisme. Je sais bien que cela relève maintenant de votre collègue en charge de la culture. Permettez-moi cependant d'insister à nouveau, au nom de nombre de mes collègues, pour que l'action des CAUE - conseils d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement - puisse être renforcée dans l'application de ce nouveau texte.
M. Jacques Pelletier, rapporteur spécial. Très bien !
M. Jacques Bellanger, rapporteur pour avis. Enfin, je suis obligé de constater la lenteur et la lourdeur de la mise en oeuvre des directives territoriales d'aménagement. Nous nous félicitons donc que la nouvelle législation rende possible des prescriptions de massif pour les zones de montagne, beaucoup plus rapides à mettre en place que ces directives, et je souhaite que vous puissiez nous le confirmer.
Enfin, respectant une coutume parlementaire bien établie, je me propose de saisir l'occasion qu'offre l'examen du budget de l'équipement pour évoquer un problème d'application du droit de l'urbanisme portant sur une difficile conciliation entre les activités agricoles et les dispositions de la loi « littoral ».
Des éleveurs d'agneaux de pré salé ont demandé la création d'une appellation d'origine contrôlée. Malheureusement, une interprétation stricte, sans doute même excessive, menace d'empêcher la réalisation de ce projet, allant ainsi à l'encontre de l'esprit même qui a conduit à l'élaboration de la loi « littoral ».
Vous trouverez les détails dans le rapport ; ils confirment certaines approches ou comportements qui, s'ils ne sont pas la règle, nous avaient amenés à donner aux seuls élus locaux la charge des nouvelles cartes communales.
Dans ce cas précis, la partie réglementaire du code de l'urbanisme ne pourrait-elle pas indiquer que l'avis de la commission des sites est requis par les services instructeurs au même titre que les accords et avis à recueillir auprès des personnes publiques, services et commissions intéressés tels que le prévoient les lois ou règlements en vigueur et que cet avis est rendu dans un délai d'un mois à compter de la réception de la demande afin que les dispositions introduites par l'article 109 de la loi d'orientation agricole pour assouplir une règle d'application délicate ne soient utilisées pour alourdir un peu plus une législation très complexe ?
La commission des affaires économiques juge souhaitable de mettre un terme à de tels blocages.
Je conclurai mon propos en indiquant au Sénat que, contrairement à l'avis favorable que je lui proposai d'émettre, la commission des affaires économiques s'en est remise à la sagesse du Sénat quant à l'adoption des crédits sur l'urbanisme inscrits dans le projet de loi de finances pour 2001. (Applaudissements sur les travées socialistes, sur celles du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Charles Revet. C'est le bon sens !
M. le président. La parole est à M. Plancade, rapporteur pour avis.
M. Jean-Pierre Plancade, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan, pour le logement. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, pour 2001, le budget de l'urbanisme et du logement s'établit à 48,7 milliards de francs en moyens de paiement, ce qui confirme, une nouvelle fois, la priorité qui est donnée au logement par le Gouvernement : les mesures qu'il contient viennent à la suite de l'application du taux réduit de TVA au secteur du logement décidé en 2000 et des efforts consentis en matière d'aide à la pierre en 1998 et 1999, avec, bien sûr, la rebudgétisation du prêt à taux zéro et la mise en place du statut du bailleur privé.
Tout d'abord, 2001 consacre une réforme ambitieuse s'agissant des aides à la personne, très attendue par tous et qu'il convient ici de saluer.
Les deux objectifs que l'on cherche à atteindre sont la simplification des barèmes des aides, regroupés dans un barème unique, et la prise en compte équitable, pour le calcul des aides, de tous les revenus, qu'ils soient issus du travail ou de transferts sociaux.
Votre rapporteur pour avis se félicite de cette réforme qui constitue une véritable mesure de justice sociale pour plus de deux tiers des bénéficiaires des aides au logement. Mais il conviendra de poursuivre cette réforme, notamment pour les aides versées en accession.
De plus, l'unification totale des aides est souhaitable afin d'améliorer la fluidité entre le parc privé et le parc social. Mais cela ne pourra se faire qu'avec la réforme de la procédure du conventionnement.
Le second volet important du budget du logement concerne les aides à la pierre pour le parc social, dont les crédits sont reconduits à un niveau identique en 2001.
Le programme physique affiché reste ambitieux, puisqu'il prévoit le financement de soixante-dix mille prêts locatifs à usage social, pour le neuf, et cent vingt mille PALULOS pour l'aide à la réhabilitation.
M. Patrick Lassourd. Affichage !
M. Jean-Pierre Plancade, rapporteur pour avis. Mais on ne peut que constater, année après année, que cet affichage, monsieur Lassourd, est démenti par les chiffres, la mise en place du PLUS en 2000 n'ayant d'ailleurs pas permis d'inverser la tendance : comme en 1999, il y aura seulement quarante mille constructions neuves.
M. Charles Revet. Eh oui !
M. Jean-Pierre Plancade, rapporteur pour avis. Certes, les explications données sont multiples et complémentaires ; d'ailleurs, elles se conjuguent.
En milieu rural ou dans les petites villes, le PLUS est structurellement déséquilibré, car il est parfois difficile d'avoir 10 % de locataires dépassant le plafond de ressources fixé pour l'attribution d'un logement social.
Dans d'autres zones, les tensions sur le marché du foncier renchérissent les coûts.
Le coût du crédit et, tout récemment, la revalorisation de la rémunération du livret A pèsent évidemment sur les charges financières des organismes et les compensations promises ne sont sans doute pas suffisantes.
M. Charles Revet. Ce point n'est pas réglé !
M. Jean-Pierre Plancade, rapporteur pour avis. Par ailleurs, la forte croissance de l'activité du bâtiment - les entreprises tournent à plein régime, mais souffrent d'une pénurie de main-d'oeuvre - entraîne une hausse des prix, d'autant que les prix des matières premières ont également remonté. Plusieurs appels d'offres restent ainsi infructueux.
Enfin, dans certains cas, il faut évoquer aussi les réticences des collectivités territoriales à accueillir des logements sociaux. A l'inverse - et je profite de la présence de M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement pour attirer son attention sur ce point - ce sont parfois les directions départementales de l'équipement qui montrent beaucoup de réticences à implanter des logements collectifs en zone semi-urbaine ou en zone rurale.
M. Patrick Lassourd. Eh oui !
M. Charles Revet. Tout à fait ! Je peux vous en donner de multiples exemples !
M. Jean-Pierre Plancade, rapporteur pour avis. En tout état de cause, et il faut s'en féliciter car il y a urgence, vous avez pris l'engagement, monsieur le secrétaire d'Etat, de réfléchir à une modification des règles de calcul de l'aide à la pierre pour les concentrer sur un nombre moins important d'opérations, notamment au travers d'une meilleure prise en compte de l'évolution effective des coûts de construction.
Il convient aussi de se tourner vers les collecteurs du 1 % logement. Ceux-ci ont signé en décembre 1999, avec l'Union des HLM, un protocole d'accord sur l'investissement et le renouvellement du parc social. Il ne faudrait pas que ce protocole reste lettre morte.
Le troisième volet de ce projet de budget concerne les encouragements au parc privé, et je veux à ce sujet faire trois remarques.
En application de la disposition du projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains sur ce que l'on appelle maintenant la « grande ANAH », les dotations budgétaires pour la prime à l'amélioration de l'habitat et les subventions de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat sont fusionnées en 2001.
La légère diminution des crédits d'intervention serait compensée par l'utilisation de la trésorerie abondante de l'ANAH. Tout en prenant acte de cette solution, il convient de souligner qu'elle ne saurait être pérenne et, dès 2002, le montant des crédits de paiement devra être revalorisé pour ne pas pénaliser l'ANAH et lui permettre d'exercer ses nouvelles compétences, notamment dans les copropriétés en difficulté.
Ma deuxième remarque porte sur les moyens en faveur de l'accession sociale à la propriété.
La faible diminution des moyens de paiement, compte tenu de la croissance de la demande et de l'augmentation du coût moyen des prêts, semble induire une baisse de l'efficacité du dispositif.
D'ailleurs, le récent arrêt du 29 septembre 2000 réduit la période de remboursement du prêt pour les tranches de revenus les plus élevées, ce qui accroît le taux d'effort des catégories à moyen revenu.
Certes, l'effet de cette nouvelle mesure sur la solvabilité des ménages est faible, mais il s'inscrit dans un contexte général de hausse de taux d'intérêts des prêts et de remontée des prix de l'immobilier, ce qui pourrait avoir des conséquences regrettables.
Enfin, je fonde beaucoup d'espoir sur l'achèvement de la discussion du projet de loi de finances, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, pour obtenir une modification de la définition du champ d'application du statut du bailleur privé et faire cesser ainsi une inégalité criante, comme l'a déjà excellemment souligné Jacques Pelletier, rapporteur spécial.
S'agissant de la possibilité de louer les logements acquis sous le bénéfice de ce régime aux ascendants et aux descendants, nous sommes tous d'accord - sur l'ensemble des travées de cette assemblée - pour éviter qu'une combinaison « astucieuse » de tous les mécanismes fiscaux et budgétaires légalement autorisés ne favorise un enrichissement patrimonial indu et sans réelle contrepartie sur le plan social.
La solution que je propose tend à autoriser la location aux ascendants et aux descendants, mais les périodes de location correspondantes sont neutralisées du point de vue de l'avantage fiscal.
Votre collègue Mme la secrétaire d'Etat au budget s'est engagée à nous proposer un dispositif lors de l'examen des articles de la deuxième partie du projet de loi de finances. Peut-être pourrez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, nous en dire un peu plus, sachant que vous êtes également très soucieux que cet obstacle soit levé dans de bonnes conditions.
Cela dit, monsieur le secrétaire d'Etat, je vous confirme que je déposerai de nouveau l'amendement que j'avais présenté voilà quelques jours, ce qui nous permettra de comparer les deux amendements. Si celui de Mme Parly ne nous satisfaisait pas, je maintiendrai le mien, contrairement à l'attitude du groupe socialiste, qui avait d'ailleurs fait l'objet d'un consensus au sein de notre assemblée.
J'avais également déposé un deuxième amendement en ce qui concerne les bailleurs privés qui n'entrent pas dans le cadre du statut du bailleur social. La réponse de Mme le secrétaire d'Etat à cet égard ne m'a pas convaincu. Mais elle nous a annoncé son intention de nous présenter des propositions. Je présenterai cependant de nouveau cet amendement, car il faut élargir, précisément, l'offre en matière de logement social.
En conclusion, j'indique qu'alors que je lui proposais de donner un avis très favorable, la commission des affaires économiques a émis un avis défavorable à l'adoption des crédits consacrés au logement dans le projet de loi de finances pour 2001. C'était, il est vrai, le lendemain du vote de la loi SRU par l'Assemblée nationale !
M. Patrick Lassourd. Il n'y avait pas que cela !
M. Jean-Pierre Plancade, rapporteur pour avis. Peut-être ceci expliquerait-il cela ! (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur certaines travées du RDSE.) M. le président. La parole est à M. Bimbenet, rapporteur pour avis.
M. Jacques Bimbenet, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, pour le logement social. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le projet de budget pour 2001 du logement est en augmentation de 1,2 % en moyens de paiement par rapport à la loi de finances initiale pour 2000, soit 48,8 milliards de francs. Compte tenu d'un taux d'inflation qui pourrait atteindre 1,3 % en 2001, on observe donc une stagnation des crédits alloués au logement, en termes réels.
L'analyse de ce budget se doit d'être nuancée. D'un côté, il y a des réformes, comme celle des aides à la personne, qui doivent être saluées. De l'autre, il y a des insuffisances qui doivent être pointées, comme en matière d'accession sociale à la propriété ou de construction de logements sociaux.
Une critique importante, que votre rapporteur pour avis a fait sienne les années passées, avait consisté à remarquer que les aides à la personne constituaient un élément « désincitatif à la reprise d'un emploi », notamment pour les personnes dont le revenu se limitait au RMI.
Le Gouvernement a entendu ce message puisqu'il propose cette année une réforme des aides au logement consistant à simplifier et à harmoniser les barèmes d'aides personnelles. En supprimant l'écart d'aide qui existe pour un même niveau de revenu selon qu'il résulte de transferts sociaux ou d'une activité professionnelle, la réforme a pour objet de réduire le phénomène de « désincitation » au travail sensible au niveau du RMI, ce qui doit être remarqué.
Cette réforme se traduit pour 4,8 millions de ménages par une aide supplémentaire de 1 300 francs par an en moyenne. Elle sera mise en oeuvre en deux étapes : au 1er janvier 2001 et au 1er janvier 2002. Elle représente une augmentation des prestations versées de 6,5 milliards de francs en régime de croisière et de 3,3 milliards de francs en 2001, dont 2 milliards de francs pour le budget de l'Etat, année de transition.
Compte tenu d'un ajustement à la baisse, consécutif à l'amélioration de la conjoncture économique, pour un montant de 1,345 milliard de francs, de la contribution de l'Etat au Fonds national de l'habitation et au Fonds national d'aide au logement, on peut estimer que la contribution de l'Etat au financement des aides à la personne augmentera de 655 milions de francs en 2001.
On peut néanmoins regretter que le Gouvernement se soit employé à réaliser cette réforme « par le haut », c'est-à-dire par une augmentation de l'enveloppe globale. Cela n'a été rendu possible que par la croissance économique.
Il en résulte que le coût de la réforme à terme est loin d'être maîtrisé. Un retournement de la conjoncture pourrait en effet faire « s'envoler » le besoin de financement des aides personnelles au logement.
En ce qui concerne la réforme proprement dite, on peut regretter qu'elle se limite au seul secteur locatif, alors que le régime des aides à l'accession à la propriété nécessite également une simplification.
Pour ce qui est du secteur locatif, cette réforme laisse insatisfaites des demandes importantes des organismes d'HLM et des associations familiales. Les nouveaux loyers plafonds sont ceux de l'aide personnalisée au logement, l'APL, ce qui signifie que le problème de l'écart entre le loyer effectif et le loyer pris en compte reste entier. Ce problème concerne principalement les ménages modestes dans le secteur conventionné et toutes les catégories de famille dans le secteur libre.
Je souhaite évoquer maintenant la construction de logements sociaux. On continue d'observer un profond marasme dans ce secteur. Alors que le ministère a annoncé 60 000 logements sociaux pour l'année 2000, seuls 11 376 agréments avaient été signés au cours du premier semestre. Le Gouvernement ne semble pas tenir compte de ce décalage entre les crédits inscrits et le montant des crédits effectivement consommés puisque les crédits en faveur du locatif social figurant sur la ligne fongible augmentent de 0,5 % en autorisations de programme.
Cette situation n'est pas satisfaisante puisqu'elle nous amène à douter, sinon de l'honnêteté du projet de budget présenté, en tout cas de son caractère réalisable.
Les crédits inscrits au projet de budget pour 2001 sont en effet associés à des objectifs physiques inchangés : cent vingt mille PALULOS, dix mille prêts locatifs aidés d'intégration, dix mille prêts locatifs à usage social construction-logement et cinquante mille prêts locatifs à usage social. Cette programmation suppose que le prix des opérations n'augmente que de 0,5 %, ce qui paraît faible, à moins de considérer que, de toute façon, les objectifs physiques ne seront pas atteints.
Votre rapporteur pour avis insiste depuis plusieurs années sur le décalage qui existe entre les objectifs de logements budgétés et la proportion de prêts locatifs aidés effectivement mis en chantier. Ce rapport est passé de 73 % en 1994 à 55 % en 1998 et probablement moins en 1999 et en 2000. Il traduit une crise profonde de la politique du logement social.
Par ailleurs, depuis deux ans, une partie des crédits non consommés est transférée et affectée au financement des primes d'épargne-logement, soit 650 millions de francs en 1998, 780 millions de francs en 1999. Compte tenu du rythme de consommation actuel, on peut s'attendre à une nouvelle ponction en 2000. Il est regrettable que des crédits initialement votés en faveur du logement social soient ainsi détournés de leur objet initial, d'autant plus que la sous-consommation de la ligne fongible est largement imputable au déséquilibre des opérations de construction.
En outre, le projet de budget prévoit une augmentation des crédits consacrés au financement des opérations de démolition-reconstruction de logements sociaux. Ces crédits, qui ont permis la démolition de 5 000 logements en 1999 et de plus de 6 000 logements en 2000, devraient être portés de 140 millions de francs à 170 millions de francs.
On peut remarquer que ce montant de 170 millions de francs correspondant à un objectif de 10 000 démolitions de logements représente une aide de 17 000 francs par logement démoli. Or le coût global d'une démolition, y compris le déficit d'exploitation prévisionnel, est de l'ordre de 100 000 francs à 150 000 francs, ce qui laisse deviner l'effort demandé aux collectivités locales.
M. Patrick Lassourd. Une fois de plus !
M. Jacques Bimbenet, rapporteur pour avis. La politique de démolition-reconstruction ne constitue certes pas la panacée, mais il arrive qu'elle représente la seule solution dans le cas de certains ensembles très dégradés. Il faut remarquer que, même dans ce cas, ce sont des logements qui restent souvent rentables pour les organismes d'HLM, compte tenu du fait qu'ils ont fini d'être remboursés. Dans ces conditions, il serait souhaitable que le Gouvernement prenne la pleine mesure de l'effort financier que représente cette politique de démolition-reconstruction, afin de ne pas aboutir à un effet paradoxal consistant à favoriser le renouvellement du parc au détriment de la santé financière des organismes d'HLM.
Je formulerai maintenant quelques brèves observations sur l'ANAH.
A compter du 1er janvier 2001, aux termes de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains dite loi « SRU », l'ANAH devrait avoir désormais vocation à intervenir sur l'ensemble du parc privé, qu'il appartienne à des propriétaires bailleurs ou à des propriétaires occupants. A ce titre, l'ANAH devrait prendre en charge l'attribution des primes à l'amélioration de l'habitat.
Les crédits budgétaires relatifs à la prime à l'amélioration de l'habitat seront intégrés dans la subvention d'investissement de l'ANAH en 2001. Compte tenu de cette fusion des crédits, la subvention globale d'investissement de l'ANAH inscrite en projet de loi de finances initiale sera de 3 milliards de francs en autorisations de programme et de 2,26 milliards de francs en crédits de paiement consacrés à l'amélioration de l'ensemble du parc privé.
En définitive, le projet de budget qui nous est présenté n'est pas en lui-même un mauvais budget. Seulement, il comprend de nombreuses faiblesses dues, notamment, à l'absence de renforcement des aides à l'accession sociale à la propriété, aux incertitudes qui entourent la place réservée au prêt à taux zéro et à l'insuffisance des aides en faveur du logement intermédiaire. Il s'inscrit surtout dans un cadre politique plus général qui ne peut pas nous satisfaire. La réforme des aides à la personne aurait pu se faire à crédits constants. Il est à craindre que le Gouvernement n'ait mis en place une nouvelle « machine à créer des déficits » qu'auront à gérer ses successeurs en cas de ralentissement de la croissance.
Par ailleurs, la solution retenue dans la loi SRU pour inciter les collectivités locales à construire des logements sociaux, à savoir une taxation pouvant déboucher sur un pouvoir de substitution du préfet, ne peut pas non plus nous satisfaire. Il s'agit là d'une marque de défiance à l'égard des collectivités locales à laquelle le Sénat s'est opposé fermement à chaque stade de la discussion du projet de loi.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement. C'est vrai, mais à tort ! (Sourires.)
M. Jacques Bimbenet, rapporteur pour avis. C'est pourquoi la commission des affaires sociales a émis un avis défavorable à l'adoption des crédits du logement social en 2001. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République, 14 minutes ;
Groupe socialiste, 17 minutes ;
Groupe de l'Union centriste, 15 minutes ;
Groupe des Républicains et Indépendants, 20 minutes ;
Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 12 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 12 minutes.
Mes chers collègues, je vous rappelle qu'en application des décisions de la conférence des présidents aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.
Par ailleurs, le temps de parole du Gouvernement est prévu au maximum pour quarante-cinq minutes.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Vezinhet.
M. André Vezinhet. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, avec des moyens de paiement de 48,8 milliards de francs, soit une augmentation de 1,2 %, et des moyens d'engagement de 49,6 milliards de francs, en hausse de 1,6 %, le projet de budget pour 2001 témoigne d'une réalité : l'effort public en direction du logement ne se dément pas.
Le projet de budget pour 2001 sera celui de la mise en oeuvre d'une réforme en profondeur des aides personnelles au logement, décidée le 15 juin 2000 lors de la conférence de la famille et présentée par le Premier ministre, M. Lionel Jospin.
La création d'un barème unique des aides au logement dans le secteur locatif, avec un alignement vers le haut des grilles actuelles, constitue une mesure de cohérence et de justice, qui tend à supprimer l'écart d'aide existant, pour un même niveau de revenu, selon qu'il résulte de transferts sociaux ou d'une activité professionnelle.
Simplification, équité, incitation au retour à l'emploi pour les allocataires au voisinage du RMI : ainsi peut-on résumer à gros traits cette réforme ambitieuse qui sera mise en place en deux étapes et qui représente une hausse des prestations versées de 6,5 milliards de francs.
M. Jean-Pierre Plancade, rapporteur pour avis. Très bien !
M. André Vezinhet. Aucun ménage ne verra son aide baisser et 4,8 millions d'entre eux percevront 1 300 francs par an, en moyenne, d'aide supplémentaire.
En outre, cette amélioration, sans précédent pour les ménages modestes, des allocations logement ne remet pas en cause l'actualisation des barèmes, au 1er juillet, comme convenu depuis 1997.
Monsieur le secrétaire d'Etat, votre budget est l'une des pièces d'un vaste puzzle que vous avez, avec constance et détermination, mis en place, qu'il s'agisse de mesures réglementaires ou législatives que vous nous avez soumises.
Comment, en effet, appréhender le projet de budget pour 2001 sans examiner son articulation avec deux grandes lois, la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions et la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, qui vient d'être définitivement adoptée par le Parlement ?
Ainsi que le rappelle mon collègue M. Plancade, rapporteur pour avis, la loi de 1998, c'est, au total, 1,7 milliard de francs supplémentaire, avec des enveloppes destinées au fonds de solidarité pour le logement, le FSL, à l'aide à la médiation locative, l'AML, et à l'aide au logement temporaire, l'ALT, qui ont doublé depuis 1997 et qui, maintenues à niveau, atteignent 718 millions de francs.
L'application de la loi de 1998 sur le terrain, plus spécialement dans le département de l'Hérault, qui m'est cher, a favorisé un partenariat riche et efficace dans le cadre de l'élaboration du troisième plan départemental d'action pour le logement des personnes défavorisées ainsi que l'adaptation du FSL.
Le plan départemental a su concilier les préconisations de la loi et les particularismes locaux. L'ensemble de tous les partenaires locaux, qu'ils soient institutionnels, tels que la direction départementale de l'équipement, la direction déparementale des affaires sanitaires et sociale, la Caisse d'allocations familiales, les associations pour l'emploi dans l'industrie et le commerce, les bailleurs, publics et privés, et les centres communaux d'action sociale, les associatifs ou acteurs de terrain tels que les travailleurs sociaux, tous seront très fortement mobilisés en modifiant des pratiques traditionnelles du travail social ; permettez-moi d'ailleurs de saluer ici le rôle majeur du milieu associatif dans l'action sociale liée au logement, la gestion locative ou la médiation sociale.
M. Jean-Pierre Plancade, rapporteur pour avis. Très bien !
M. André Vezinhet. Pourtant, les crédits budgétaires affectés à cet objet, d'un montant de 35 millions de francs, sont en baisse de 28 %. On peut s'en étonner.
Par ailleurs, le Haut comité pour le logement des personnes défavorisées regrette le retard pris dans la mise en oeuvre de l'aide à la médiation locative, bien que tout ait été fait pour que le dispositif soit opérationnel au plus vite ; le décret d'application a été publié dès le mois de novembre 1998, les lignes de crédit ont été abondées peu après l'adoption de la loi. Malgré cette diligence, le rapport indique que seuls 37 % des financements ont été dépensés. Selon le Haut comité, le problème s'expliquerait probablement par un contrôle financier tatillon des services déconcentrés de l'Etat.
Pouvez-vous, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, nous apporter des éclaircissements sur ces points ?
Enfin, et toujours en liaison avec la loi de 1998, je tiens à saluer ici la parution des textes relatifs au numéro unique départemental d'enregistrement des demandes de logements locatifs sociaux. Cette procédure garantira mieux les droits des demandeurs et sera un outil permettant de connaître les besoins par zone géographique.
Le projet de budget pour 2001, ce sont aussi des moyens au service d'une double priorité : le développement du logement social et le renouvellement urbain.
La loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains va pouvoir s'appuyer sur des moyens budgétaires, maintenus au niveau élevé qui était prévu pour l'année 2000, nécessaires à sa mise en oeuvre ; ainsi 120 000 PALULOS pour poursuivre les réhabilitations et 70 000 PLUS pour faciliter la construction de logements neufs seront accordés.
J'entends ici et là fuser les objections. A quoi bon reconduire le même volume d'aides à la pierre alors même qu'à peine plus de la moitié aura été consommée dans l'année qui s'achève ? La réponse est contenue dans la loi précitée qui, désormais, s'impose à tous : dans les agglomérations de plus de 50 000 habitants, il manque 450 000 logements sociaux. Efforçons-nous solidairement de les réaliser.
Pour combler ce déficit, tout en mettant fin au mécanisme de concentration et en favorisant la mixité sociale, il faut que les communes jusqu'alors récalcitrantes et j'oserai dire « inhospitalières » construisent plus de 22 000 logements par an pendant vingt ans.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Il a raison !
M. Jean-Pierre Plancade, rapporteur pour avis. Bravo !
M. Patrick Lassourd. C'est une compétence de l'Etat !
M. André Vezinhet. Mais un constat s'impose : la production de logements sociaux est notoirement insuffisante et ne correspond pas à la réalité des besoins de nos concitoyens. Vous-même, monsieur le secrétaire d'Etat, avez mesuré l'ampleur du problème qui se pose à nous tous, collectivités locales, bailleurs sociaux, Etat.
Vous l'avez très clairement indiqué au congrès HLM de Bordeaux, « ni le Gouvernement ni le corps social ne pourront durablement comprendre une telle situation au regard des efforts importants qui ont été consentis ».
En effet, le Gouvernement ne s'est pas borné, contrairement à ce que laisse supposer le rapporteur spécial, M. Jacques Pelletier, « à tenir un discours volontariste en faveur de la construction sociale, qui se heurterait à la réalité ».
Faut-il rappeler que les conditions du financement du logement social n'ont jamais été aussi favorables depuis au moins vingt ans ? Qu'on en juge : baisse du taux du livret A en 1999 ; baisse de 0,75 % du coût de la dette HLM ; durée d'amortissement des prêts locatifs relatifs au foncier portée à cinquante ans ; taux réduit de TVA sur les travaux d'entretien ; création du PLUS.
Comment expliquer, alors, que la relance attendue ne soit pas au rendez-vous ?
M. Jean-Pierre Plancade, rapporteur pour avis. Quel bilan. (Sourires.)
Mme Odette Terrade. Ça oui !
M. André Vezinhet. On peut avancer plusieurs raisons : réticences de certaines communes à accueillir des logements sociaux ; coût du foncier ; hausse des prix à la construction ; frilosité de certains maîtres d'ouvrage, qui privilégient la gestion du patrimoine plutôt que son développement ; difficultés pour les organismes constructeurs d'équilibrer financièrement leurs opérations ; difficultés aussi pour des petites communes de trouver un opérateur qui accepte de construire cinq ou dix logements, opération jugée peu rentable. Sur ce dernier point, j'en profite pour rappeler que, depuis le décret du 8 février 2000, les collectivités locales peuvent elles-mêmes être opératrices et bénéficier du PLUS pour financer des opérations d'acquisition-amélioration. Je les encourage à se saisir de cette faculté.
M. Jean-Pierre Plancade, rapporteur pour avis. Nous aussi !
M. André Vezinhet. Cependant, pour inverser la tendance, faut-il, monsieur le secrétaire d'Etat, envisager d'améliorer le financement par l'Etat, en augmentant le taux des subventions ?
Une simplification et une réorganisation du secteur de la construction sociale - offices d'HLM, OPAC, sociétés anonymes, coopératives - ne s'imposent-elles pas, tant est rendue complexe et difficilement lisible l'organisation actuelle, marquée qu'elle est par la multiplicité des statuts des organismes, la diversité de leur taille, de leurs compétences ou de leurs champs d'intervention ?
Une restructuration en cohérence avec l'intercommunalité, les agglomérations, les pays, les bassins d'habitat me paraît inéluctable pour éviter au mouvement HLM de s'autoscléroser.
La priorité accordée au renouvellement urbain se traduit, quant à elle, par une hausse de 21 % des crédits affectés aux démolitions, qui passent de 140 millions de francs à 170 millions de francs.
Les crédits pour qualité de service, qui doublent pour atteindre 100 millions de francs, répondent à une très forte demande des locataires en HLM et contribuent à une requalification des quartiers sensibles.
La loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, en confiant à l'ANAH l'ensemble des interventions financières de l'Etat sur le parc privé, ancre plus profondément l'action de cet organisme au coeur de la politique de renouvellement urbain. Sur des objectifs à la fois sociaux et urbains, la simple reconduction d'un crédit de l'ANAH de 3 milliards de francs sera-t-elle suffisante pour cette noble ambition ?
Dans le même esprit, est également prévu le renforcement des opérations de résorption de l'habitat insalubre. Globalement, donc, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, votre budget assure le maintien des dotations au parc privé.
L'accession sociale à la propriété suscite quelques inquiétudes. Le 22 novembre 2000, sous le titre « Alerte sur le prêt à taux zéro », le journal Les Echos consacrait un long article qui débutait ainsi : « Symbole de l'aide à l'accession sociale à la propriété, le prêt à taux zéro est menacé. Le soutien aux ménages désireux de devenir propriétaires ne semble plus faire partie des priorités du Gouvernement à l'heure où, pourtant, se confirme un infléchissement des mises en chantier de logements. »
Je ne partage pas cette approche particulièrement alarmiste ; cependant, des craintes se font jour d'aboutir, sinon à sa disparition, du moins à une sorte d'asphyxie...
M. Jean-Pierre Plancade, rapporteur pour avis. Il ne faut pas exagérer !
M. André Vezinhet. ... et de voir se reproduire le scénario qu'a subi le PAP en son temps.
Après ces interrogations, je terminerai sur les nombreux motifs de satisfaction.
Le premier concerne la politique que vous avez menée à l'égard des locataires : avec la suppression du droit de bail qui représente un montant d'allégements fiscaux de 7 milliards de francs sur deux ans et la réforme des aides personnelles qui représente 6,5 milliards de francs, ce sont, au total, 13,5 milliards de francs qui bénéficient aux locataires, dont les loyers auront, en outre, été gelés pendant deux années, pour ceux qui relèvent du parc social.
Je me félicite également que soit maintenu l'encadrement des loyers du secteur privé à Paris et en Ile-de-France au moment de la reprise économique et des dérapages qu'elle pourrait susciter.
Je me félicite aussi de la reconnaissance du rôle des ADIL, les associations départementales d'information sur le logement, en faveur du grand public.
Autre motif de satisfaction : pour la deuxième année de suite, le seuil des 300 000 logements construits et des 600 000 logements réhabilités a été atteint ; on compte aussi 600 000 transactions dans l'ancien. Bref, l'immobilier et, avec lui, le bâtiment sont redevenus des moteurs de la croissance.
En deux ans, 120 000 emplois directs ou indirects ont été créés.
Dans l'Hérault, et j'y suis particulièrement sensible, la croissance du parc de logement - 2 % contre 1 % à l'échelon national - et l'activité liée au bâtiment représentent près de la moitié de l'activité économique.
Voilà peu, à Montpellier, lors de son assemblée générale, la Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment, la CAPEB, s'est réjouie du fait que jamais la conjoncture n'a été aussi bonne pour le secteur, sachant que 58 % du chiffre d'affaires est assuré par les artisans et les petites entreprises.
Je vois là des raisons d'être optimiste pour l'avenir, tout en appelant à une nécessaire vigilance.
Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, ces très bons résultats ne sont pas le fruit du hasard : ils découlent d'une conjoncture économique certes favorable, mais aussi de mesures fiscales et législatives adaptées, portées par une politique budgétaire à la hauteur des ambitions. Le groupe socialiste, bien entendu, votera avec enthousiasme le projet de budget pour 2001, auquel il apporte son total soutien. (Bravo ! et applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. Lassourd.
M. Patrick Lassourd. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous allons changer de ton.
En préambule, je dirai à notre collègue M. Plancade, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, que je m'étonne qu'il soit surpris que la commission des affaires économiques n'ait pas voulu adopter ce projet de budget : il a fait un rapport parfait, qui, à l'évidence, a démontré les insuffisances du projet de budget du logement. Aussi, je ne comprends pas pourquoi, sur ce rapport, il a proposé de voter ledit projet de budget.
M. Jean-Pierre Plancade, rapporteur pour avis. C'est trop facile !
M. Patrick Lassourd. Pour commenter les lacunes de ce projet de budget décevant, j'axerai mon propos sur trois points.
Le premier, c'est le logement social. La sous-consommation des crédits qui lui sont affectés est toujours plus manifeste. Les causes de cette sous-consommation sont pourtant clairement identifiées. Je les cite brièvement.
Première cause : le déséquilibre intrinsèque du dispositif des PLUS, les prêts locatifs à usage social, censés permettre une plus grande mixité sociale. Or, c'est l'inverse qui se produit. La tranche des 10 % de locataires dont les revenus dépassaient le plafond de ressources autorisé a été progressivement exclue du système, faute de loyers suffisamment attractifs. Cette population, qui garantissait précisément la mixité mais bénéficiait peu de l'APL, confrontée à un arbitrage réel entre locatif social et locatif privé, se tourne vers ce dernier. Outre la tension qu'elle engendre sur le marché en tirant à la hausse les loyers privés, cette situation contraint les offices d'HLM, pour retenir ces locataires, à ne pas majorer les loyers, d'où le déséquilibre intrinsèque du dispositif des PLUS.
Deuxième cause : l'insuffisance de l'aide à la pierre, qui a chuté de 10,77 % à 7 % de l'ensemble de l'effort public, entre 1995 et 2000. Les collectivités se voient obligées de prendre le relais, face au désengagement de l'Etat à l'égard d'une compétence qui lui est pourtant dévolue. Ainsi, en Bretagne, l'aide à la pierre émanant de la région, des départements, des communautés de communes et des communes est bien supérieure à celle qui est accordée par l'Etat, lequel, de surcroît, jalonne le parcours des subventions locales à la pierre de difficultés administratives ! Triste et paradoxale ironie...
Troisième obstacle : l'augmentation des taux du PLUS consécutive à celle du taux du livret A et la hausse de 15 % des coûts de la construction, ce qui rend de nombreux appels d'offres infructueux.
Enfin, le prix élevé du foncier, qui freine le développement du logement social. Il serait temps, monsieur le secrétaire d'Etat, de réaliser à quel point le zonage, notamment 2 et 3, est obsolète. Le prix du foncier exige que certaines communes soient reclassées en zone 2. De plus, ce zonage est en parfaite incohérence avec la loi Chevènement. Ainsi, sur les trente-six communes de l'agglomération de Rennes, huit sont classées en zone 2 et vingt-huit en zone 3, alors même que la politique globale de logement social de cette communauté d'agglomération se révèle particulièrement dynamique. Comment voulez-vous, dans ces conditions, que les organismes d'HLM puissent respecter leur engagement de geler les loyers pendant l'année 2001 ?
Au vu de ces constats objectifs, tout se passe comme si le Gouvernement refusait de tenir compte des réalités pour programmer, encore et toujours, la construction de logements sociaux, qui, on le sait, ne seront, pour la plupart, jamais réalisés. Chaque année, les chiffres laissent tomber des verdicts de plus en plus sévères : 70 000 logements budgétés en 1999 pour 43 000 réalisés, 70 000 annoncés pour l'année 2000, avec seulement 11 376 agréments au premier trimestre. Tel est mon premier point.
Le deuxième point que je souhaite évoquer concerne le prêt à taux zéro.
Son évolution inquiétante confirme la volonté du Gouvernement d'ignorer l'accession à la propriété, aspiration pourtant profondément ancrée dans la population. Cet excellent outil d'accession sociale à la propriété - je souligne le mot « sociale » - et de promotion du logement avait pour principale qualité de toucher une large cible : 75 % des ménages français pouvaient, à l'origine, y prétendre, le montant du prêt étant fonction de la composition de la famille et la durée de remboursement fonction des revenus. Par ces critères, fondés plus sur les besoins du ménage que sur ses revenus, il s'agissait donc d'un prêt éminemment social, qui permettait enfin aux familles modestes d'acquérir un logement.
Vos gouvernements n'ont eu de cesse de réduire l'efficacité du prêt à taux zéro et d'en limiter l'accès. Premier coup porté en octobre 1997 : la restriction du prêt aux seuls primo-accédants, puis l'augmentation des quotas de travaux obligatoires. En novembre 1999 : réduction de la durée des remboursements pour les plus aisés des ayants droit. Enfin, en octobre dernier, on a encore diminué les durées des prêts, mais cette fois-ci pour les ménages à ressources intermédiaires. Cette dérive, qui s'apparente à ce que l'on pourrait appeler une « papisation » du prêt à taux zéro, représente, sur une durée de quatre ans, une baisse de 16 % des crédits.
Ce prêt à taux zéro mériterait d'être amplifié, et non pas « grignoté » et sacrifié, pour élargir le nombre de candidats à l'accession. Mais le Gouvernement préfère brandir la carte du tout-locatif. La loi SRU confirme, d'ailleurs, cette volonté délibérée d'écarter l'accession, exclue du quota de 20 % de logements sociaux...
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. C'est un peu gros tout de même !
M. Jean-Pierre Plancade, rapporteur pour avis. Nous avons créé le prêt à taux zéro !
M. Patrick Lassourd. Le troisième point que j'aborderai concerne la réduction des crédits de l'ANAH, notamment au détriment du logement en milieu rural. Cette mesure s'avérerait particulièrement inadaptée, lorsqu'on sait combien les communes rurales comptent sur l'habitat social privé pour maintenir et développer leur population. Cette réduction frapperait également les zones suburbaines défavorisées. Globalement, la dotation budgétaire de l'ANAH stagne par rapport aux crédits inscrits pour 1999 et 2000 : 2,2 milliards de francs en crédits de paiement, soit un recul sensible. Ces tendances confirment le désengagement de l'Etat à l'égard de l'amélioration du parc privé observé depuis 1996. Or le parc privé, qui représente 55 % du parc locatif, joue un rôle social incontestable, dont il convient de tenir compte.
Enfin, lors de la dernière réunion du conseil d'administration de l'ANAH, le 5 octobre 2000, il a été procédé à des modifications des règles de calcul des subventions pour augmenter celles-ci dans les secteurs urbains denses et stabiliser, voire diminuer, les crédits affectés aux villes moyennes et aux secteurs ruraux.
En conclusion, je dirai que ce budget est, une fois encore, un budget d'affichage, aux objectifs largement invalidés par les faits. Le logement, monsieur le secrétaire d'Etat, est non pas une projection virtuelle, mais une réalité concrète, qui touche les familles dans leurs attentes et dans leurs besoins. La politique d'affichage est d'autant plus dangereuse qu'au bout du compte elle n'est plus crédible.
Quel espoir donnez-vous à ceux qui sont pénalisés par ce décalage entre un discours et une réalité, je veux parler des ménages et des élus des collectivités locales ? Ces derniers ne disposent pas, en effet, des moyens nécessaires pour équilibrer les opérations de logement social dont le Gouvernement se défausse sur eux. Nous l'avons vu lors des débats sur le projet de loi SRU : le Gouvernement tente de réaliser par la contrainte ce qu'il ne parvient pas à faire lui-même.
Il fallait mettre en oeuvre un véritable redéploiement de crédits en direction des problèmes que je viens d'évoquer, et non poursuivre cette stratégie doctrinaire qui consiste à augmenter quantitativement des programmes irréalisables de construction de logements sociaux, et qui, finalement, ne profitent pas aux plus démunis.
Ce projet de budget ne contribue pas à préparer l'application de la loi SRU, si peu adaptée aux réalités du terrain. Il ne sort pas le logement social de son marasme. Vous affichez en permanence le souci d'aider nos concitoyens qui ont les revenus les plus modestes. Mais que constate-t-on ? Tout d'abord, vous ignorez les vraies conditions économiques de construction de logements sociaux, et seulement un logement sur deux programmés est réalisé. Ensuite, vous rendez l'accession sociale à la propriété plus difficile pour les bas revenus. Enfin, par le biais de l'ANAH, vous diminuez les crédits pour les zones rurales, territoires traditionnellement pauvres.
Il serait temps de reconnaître à la propriété privée un rôle d'utilité publique. Elle constitue une réalité économique qui a son poids et sa place dans une politique de logement ambitieuse. Huit Français sur dix sont ou désirent être propriétaires.
Prisonnier d'une idéologie, ce projet de budget mésestime le véritable rôle d'intégration sociale joué par le logement dans toutes ses variétés et toute sa richesse : locatif social public, accession à la propriété, locatif privé. C'est pourquoi le groupe du RPR ne votera pas ce projet de budget. (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Jacques Bellanger, rapporteur pour avis. Ce n'est pas possible. (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Maman.
M. André Maman. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, ce budget pour 2001 prend largement la forme d'un budget de reconduction. Il reflète la crise permanente du logement social. La sous-consommation des crédits conduit même à s'interroger sur le rôle du parc public et sur sa capacité à répondre à ses missions. Les moyens consacrés au logement des personnes les plus défavorisées sont, pour leur part, en baisse, alors que le nombre de mal-logés est toujours aussi préoccupant. Par ailleurs, la politique en faveur du parc privé manque d'envergure, comme l'illustrent les mesures fiscales, qui ne favorisent pas toujours les propriétaires.
Alors que les aides publiques au logement atteignent traditionnellement plus de 190 milliards de francs, le projet de budget du logement et de l'urbanisme pour 2001 s'élève à 48,75 milliards de francs. Il ne constitue que la partie émergée de l'effort de la nation en faveur du logement.
Il s'agit donc d'un budget d'une certaine stabilité, alors même que le contexte juridique dans lequel il s'inscrit est particulièrement fluctuant, puisque le Parlement devrait adopter définitivement, à la fin de l'année, le projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains.
Cette loi dite « loi SRU » tend à réviser les outils de la planification urbaine et à imposer des objectifs contraignants de mixité sociale dans l'habitat, et il n'est pas certain que la simple reconduction des crédits à la hauteur de ceux qui ont été votés en 2000 suffise à assurer l'efficience des mesures de développement du logement social et de renouvellement urbain.
M. Gayssot et vous-même, monsieur le secrétaire d'Etat, avez décidé une réforme des aides personnelles, tendant à simplifier les barèmes et à les aligner vers le haut. Cette réforme doit se traduire pour 4,8 millions de ménages par un montant d'aides supplémentaires de 1 300 francs par an, en moyenne. Elle représente une augmentation des prestations de 3,3 milliards de francs dès 2001, dont 2 milliards de francs pour le budget de l'Etat.
Si le versement d'aides personnelles au logement permet de solvabiliser des locataires souvent modestes, de leur garantir un accès effectif au logement et de sécuriser les bailleurs, le nombre croissant des bénéficiaires n'en est pas moins un phénomène extrêmement préoccupant. En 1999, environ 49 % des ménages locataires et 18 % des ménages propriétaires ont bénéficié d'une aide personnelle au logement.
Cette augmentation du nombre de bénéficiaires s'est accompagnée d'une augmentation d'autant plus rapide du montant total des prestations versées que celles-ci ont fait l'objet de revalorisations. Ainsi, les aides personnelles au logement représentaient un coût budgétaire total de 50,6 milliards de francs en 1990 et plus de 80 milliards de francs en 1999, dont 34,6 milliards de francs pour l'Etat.
Sans remettre en cause la vocation fondamentale des aides au logement, pouvez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, nous assurer que la réforme permettra d'amorcer une maîtrise des dépenses publiques dans ce secteur ? Ce système, marqué par une extrême complexité, est-il à même de faire preuve de son efficacité sociale et d'éviter notamment l'attribution d'aides à des logements qui ne remplissent pas les critères minimum de salubrité ?
Depuis plusieurs années, le secteur locatif social est marqué par une diminution continue et significative du nombre de logements sociaux financés et mis en chantier. Cette situation est d'autant plus préoccupante que les derniers éléments disponibles pour 2000 ne mettent pas en évidence une reprise de la construction. Pour un programme budgétaire de 70 000 logements en 2000, le rythme d'exécution au 30 juin 2000 était seulement de 8 707, soit un recul de 5,7 % par rapport au rythme constaté à la même date, l'année précédente.
Si le rythme d'exécution est plus satisfaisant en matière de réhabilitation et de consommation de primes PALULOS, avec 134 075 logements réhabilités en 1999, il n'est toutefois pas exagéré, au vu de ces résultats, de parler de crise du logement locatif social. La tentative du Gouvernement d'y remédier par la création, en 1999, du PLUS, destiné à remplacer le PLA ordinaire et le PLA à loyer minoré, n'a pas eu les effets escomptés. La mise en route du PLUS est extrêmement lente et les difficultés d'exécution bien réelles.
Cette situation illustre une sous-consommation effective des crédits destinés à l'amélioration et à la réhabilitation de l'habitat locatif social, crédits qui s'élèveront, pour 2001, à 2,6 milliards de francs contre 2,5 milliards de francs en 2000.
L'INSEE estime qu'il faudra plus de 300 000 logements neufs, hors renouvellement du parc, pour faire face aux besoins entre 2000 et 2005. Pouvez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, nous fournir des explications sur cette crise de la construction du logement social, ainsi que sur la sous-consommation des PLA ?
C'est toute la politique du Gouvernement en faveur de la mixité sociale, imposée par la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, qui est ici en jeu.
Les débats sur la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains ont été l'occasion de mettre en lumière le rôle économique et social incontestable que joue le parc privé en France. Ce dernier représente, aujourd'hui, 55 % du parc locatif. D'après les comptes du logement pour 2000, le parc privé accueille deux fois plus de locataires dont le revenu annuel est inférieur à 30 000 francs que le parc public. Un ménage pauvre sur trois est aujourd'hui logé dans le parc locatif privé, contre un sur cinq au début des années quatre-vingt.
Ces quelques données statistiques montrent, à l'évidence, que le parc public ne suffit plus à répondre aux besoins et aux attentes des ménages les plus modestes ni, en conséquence, à assumer seul sa mission de service public.
Sans doute convient-il alors de réorienter la politique du logement social vers une meilleure prise en compte du rôle social des propriétaires bailleurs. A titre d'exemple, la mobilisation de l'épargne privée, pour financer une nouvelle filière de logements locatifs à vocation sociale, qui viendrait compléter l'offre locative sociale des HLM, pourrait trouver sa place dans ce nouveau contexte, marqué à la fois par le recul de la construction des HLM et par les futurs besoins de construction qui naîtront de l'application de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains dans les communes.
Un autre domaine est préoccupant : il s'agit du logement des personnes les plus démunies. Pour 2001, les moyens sont en baisse et illustrent la fragilité de l'action publique en ce domaine.
Cette diminution, à laquelle il convient d'ajouter l'évolution négative des programmes de réalisation de logements sociaux, est d'autant plus préoccupante que les « mal-logés » sont toujours aussi nombreux.
L'application de la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions, dont l'un des objets, à travers la mise en oeuvre d'un droit au logement, était de faire en sorte que le logement devienne une réalité pour la partie la plus vulnérable de la population, se traduit - il faut le dire - par un bilan mitigé.
S'il n'existe pas d'évaluation nationale exhaustive du nombre de personnes privées de domicile, le Haut Comité pour le logement des personnes défavorisées estime néanmoins qu'une population de 730 000 personnes se trouve sans perspective d'accès à court terme à un habitat autonome. A celles-là s'ajoutent les quelque 300 000 ménages en situation d'impayé de loyer, soit un million de personnes, dont 350 000 enfants, dont les perspectives de maintien dans le logement apparaissent alors précaires. Cette situation est extrêmement préoccupante.
Depuis le début des années quatre-vingt-dix, les politiques successives menées en faveur des populations défavorisées ont permis l'émergence d'un parc d'hébergement d'urgence et de logements d'insertion. Il n'en reste pas moins que cette offre est actuellement bien inférieure à la demande.
Augmenter l'offre de logements sociaux notoirement insuffisants dans certains bassins d'habitat, tel était l'un des objectifs prioritaires du budget pour 2000 et de la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions. Malheureusement, tous les ans, et maintenant depuis trois ans, nous constatons que la construction locative est en panne.
Vous nous expliquez, monsieur le secrétaire d'Etat, que les collectivités locales sont réticentes à s'investir dans le financement de telles opérations et que le mouvement HLM est démobilisé. Mais le gel des loyers, la pression sur les prix et l'augmentation des taux d'intérêt ne facilitent pas le bouclage des plans de financement.
Vous nous expliquez le bien-fondé des dispositions de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains. Mais, chacun le sait, elles ne concernent que les zones urbaines, et nous ne sommes pas convaincus de leur efficacité pour accroître le parc de logements sociaux.
Comme en 2000, le projet de budget pour 2001 n'apporte pas les correctifs nécessaires pour relancer le logement social. Le redémarrage de la construction locative sociale ne pourra intervenir que si l'incitation est jugée suffisante par les bailleurs sociaux, et à condition également que le Gouvernement réoriente la politique du logement social vers une meilleure prise en compte du rôle social des propriétaires bailleurs.
Compte tenu de ces observations, mes collègues du groupe de l'Union centriste et moi-même ne pourrons pas voter le budget du logement pour 2001. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures quarante, est reprise à quinze heures cinq, sous la présidence de M. Jacques Valade.)

présidence de m. jacques valade
vice-président

M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons l'examen des dispositions du projet de loi de finances pour 2001 relatives à l'urbanisme et au logement.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Revet.
M. Charles Revet. Monsieur le secrétaire d'Etat, dans la présente discussion, je partirai d'un constat paradoxal : plusieurs orateurs ont souligné ce matin le faible degré de consommation, depuis plusieurs années, des crédits - déjà insuffisants à notre gré - réservés au logement social. Or, dans le même temps, on constate une attente forte de nos concitoyens en matière de logement, car ils veulent vivre autrement.
Vous pouvez par ailleurs mesurer comme nous - je suis président, vous le savez, de l'office public d'aménagement et de construction de Seine-Maritime - que le nombre de logements vacants s'accroît dans les banlieues alors que, dans le même temps, les listes d'attente s'allongent dans nos villes moyennes, dans nos bourgs et dans nos communes rurales. Cette situation mérite que nous y apportions réponse.
A mon sens, la finalité de notre action, c'est de faire vivre des hommes - ou plutôt des humains : je ne veux pas oublier les femmes -...
Mme Odette Terrade. Ah !
M. Charles Revet. ... et je vise donc, bien entendu, l'ensemble des familles - la finalité de notre action, dis-je, c'est de faire vivre les humains dans le logement qui constitue leur cadre de vie et qui est le lieu où ils se retrouvent et s'épanouissent.
A cet égard, monsieur le secrétaire d'Etat, permettez-moi de vous soumettre quelques suggestions. Bien sûr, une politique a été mise en route, mais elle est, à notre gré, totalement insuffisante. Il faut mener, à mon avis, une politique beaucoup plus dynamique, en matière de restructuration des banlieues, que ce qui a été fait jusqu'à présent. Si les constructions qui datent d'une quarantaine d'années répondaient à une urgence, et satisfaisaient même parfois leurs habitants grâce à un relatif confort, aujourd'hui, l'attente est autre et doit être prise en compte.
Ces restructurations doivent donc être relancées sur un mode beaucoup plus dynamique. En effet, on se contente de détruire un ou deux immeubles ici ou là, mais on garde l'ensemble. Il faut avoir le courage d'aller beaucoup plus loin, dépasser les hésitations que l'on constate encore trop souvent.
Ensuite, il faut établir une bonne complémentarité, en matière d'aménagement du territoire, entre les grandes villes, les villes moyennes, les bourgs et les communes rurales. Le postulat maintes fois répété selon lequel, aujourd'hui, 80 % de la population vivent sur 20 % du territoire ne saurait nous satisfaire. Aménager le territoire, c'est faire en sorte que la population se répartisse d'une manière beaucoup plus équilibrée entre ses différents ensembles !
Une autre complémentarité à réaliser, monsieur le secrétaire d'Etat, c'est la mise en oeuvre de la mixité. Il existe un réel besoin de logements locatifs, que ce soit en milieu urbain ou en milieu rural, et l'attente des jeunes est forte en la matière ; mais il faut aussi développer d'autres types d'habitat, comme la location-accession - à cet égard, monsieur le secrétaire d'Etat, nous avons fait preuve d'esprit d'innovation en Seine-Maritime -, ou l'accession à la propriété classique. En effet, on l'a rappelé ce matin, beaucoup de nos concitoyens souhaitent devenir propriétaires de leur logement, et cela me paraît être un souhait légitime auquel nous devons répondre.
Mon sentiment, monsieur le secrétaire d'Etat, c'est que cette dernière aspiration est très insuffisamment prise en compte aujourd'hui. Je ne dis pas que ce n'est pas votre souhait - nous avons déjà eu l'occasion d'en discuter -, mais je ne suis pas sûr que tout le monde, au sein de votre administration, soit dans le même état d'esprit.
Pour diversifier la construction, il va falloir faciliter l'urbanisation, et donc l'attribution de permis de construire. Or, avec plusieurs de nos collègues, qui sont présents dans cet hémicycle cet après-midi, nous sommes allés, dans le cadre d'une mission spéciale, nous rendre compte sur place. Nous avons alors pu constater que partout les maires des communes rurales, saisis de trois ou quatre demandes de logement par an, refusaient presque systématiquement d'accorder les permis de construire nécessaires au prétexte que ce serait du mitage.
Monsieur le secrétaire d'Etat, le logement est un élément essentiel de la vie de nos concitoyens et il nous faut aujourd'hui comprendre qu'il nous appartient de répondre, et de répondre rapidement, à cette aspiration profonde. Or le projet de budget que vous nous proposez ne permet pas, nous semble-t-il, de prendre en compte tous ces éléments, même si la volonté d'agir existe.
Je souhaite donc que vous agissiez fortement auprès des services de l'Etat pour qu'ils apportent la réponse - elle est attendue par nos maires, par l'ensemble des élus de la nation - qui nous permettra d'atteindre cet objectif.
Me permettrez-vous enfin de rappeler que, ce matin, vous avez demandé aux présidents d'office public d'aménagement et de construction qui siègent parmi nous de bloquer les loyers ? Pourquoi pas ? Mais cela est soumis à une condition qui aujourd'hui n'est pas remplie : le président de l'Union nationale des fédérations d'organismes HLM vous a écrit récemment, monsieur le secrétaire d'Etat, pour attirer votre attention sur le fait que si le Gouvernement ne respectait pas ses engagements, il n'aurait pas le droit de demander aux organismes d'HLM, qui ont un devoir de gestion, d'appliquer le taux zéro, parce qu'ils seraient dans l'incapacité de le faire.
Monsieur le secrétaire d'Etat, j'ai donc formulé tout à la fois des affirmations et des questions. Nous attendons vos réponses, mais vous comprendrez qu'en l'état actuel des choses il n'est pas possible que nous approuvions la politique que vous nous proposez. C'est pourquoi le groupe des Républicains et Indépendants émettra un vote défavorable sur votre projet de budget. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je consacrerai mon temps de parole aux crédits du logement, tandis que mon collègue Gérard Le Cam interviendra sur ceux de l'urbanisme.
Comme vous le savez, monsieur le secrétaire d'Etat, l'effort de l'Etat pour le logement intéresse nos concitoyens, tant la situation qu'ils vivent est parfois semée d'embûches, voire empreinte d'une grande détresse.
J'ai déjà eu l'occasion de saluer votre action à propos de la mise en place de divers dispositifs liés à la politique du logement, qu'il s'agisse des efforts consentis pour les aides à la pierre en 1998 et en 1999, de la philosophie générale du volet consacré au logement dans la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions, de l'application du taux réduit de TVA aux travaux effectués dans les logements, de la nouvelle réduction des droits de mutation ou de la suppression du droit de bail.
Enfin, les débats sur le projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains ont été l'occasion, pour mon groupe, de s'associer à votre volonté de revaloriser l'image du logement social. En effet, faut-il le rappeler, trois Français sur quatre remplissent les conditions d'accès au parc social.
Nous avons donc soutenu sans réserve l'économie de l'article 25 de ce projet de loi, et, convaincus du bien-fondé de cette mesure, nous serons particulièrement attentifs à la réalisation annuelle de 20 000 logements sociaux dans les communes en comptant moins de 20 %.
Les crédits inscrits au projet de budget pour 2001 au titre du logement augmentent de 1,6 %, ce qui, compte tenu d'un taux d'inflation de 1,2 %, représente plutôt une reconduction des moyens prévus pour l'année 2000 qu'une réelle progression.
Les objectifs en termes de construction et de rénovation restent inchangés pour 2001. Malgré les efforts réalisés en 1998 et en 1999, le déficit de logements reste le problème majeur. En effet, depuis plusieurs années, nous assistons à une sous-consommation des crédits destinés à la construction. Cette situation est très préoccupante ; elle découle principalement de difficultés croissantes à procéder à des montages financiers équilibrés, de la hausse importante des coûts de la construction et du foncier, mais aussi, certainement, de la réticence de certains élus vis-à-vis du logement social et de ses habitants, qu'ils n'hésitent pas à stigmatiser.
Pour 2000, alors que l'objectif était déjà de construire 70 000 logements neufs, le nombre de réalisations ne devrait pas dépasser 40 000 ! C'est bien trop peu au regard des besoins qui s'expriment. Si, de plus, on considère que 10 000 logements du parc social ont été détruits et que 10 000 autres ont été vendus, on aboutit finalement à une extension du parc social qui n'est que de 20 000 logements par an !
M. Charles Revet. Cela ne fait pas beaucoup !
Mme Odette Terrade. M. Plancade fait état, dans son rapport, du souhait de l'Union nationale des fédérations d'organismes HLM, l'UNFOHLM, de conserver le même niveau d'aide pour réaliser moins de logements ! En résumé, l'UNFOHLM proposerait de placer moins haut la barre du nombre des constructions et de financer moins de programmes ! Nous ne partageons pas ce point de vue !
Je pense, au contraire, que nous devons tendre vers un nombre de constructions bien plus élevé, tant les listes d'attente de demandeurs de logement sont longues dans de nombreuses communes.
M. André Vezinhet. Très juste !
Mme Odette Terrade. Il est urgent d'améliorer significativement l'efficacité économique et sociale de l'aide à la pierre. Dans cet esprit, une autre politique de financement du logement est à privilégier, incluant une révision du rôle et des missions du secteur bancaire, en particulier de la Caisse des dépôts et consignations. Les taux des prêts à la construction et à la réhabilitation du logement social doivent baisser, et les durées de remboursement s'allonger. Il faut également réfléchir au rôle du « 1 % » dans ce domaine de la construction et de la réhabilitation. Cette réforme est nécessaire non seulement pour permettre une augmentation significative du nombre de logements construits, mais également pour obtenir une baisse des loyers de sortie. Ces derniers restent, pour de nombreuses familles, une charge importante, d'autant que la hausse des prix de l'eau, du fioul et du gaz pèse sur leurs budgets.
Dans cette optique de limitation du montant des loyers, mais également dans le souci de promouvoir la mixité sociale, nous demandons à nouveau l'abrogation du surloyer. Nous avons salué la suppression de la part acquittée par les organismes d'HLM, mais il nous faut maintenant aller plus loin, d'autant que certains bailleurs nous signalent que le recouvrement du surloyer coûte plus cher qu'il ne rapporte.
M. Charles Revet. C'est vrai !
Mme Odette Terrade. S'agissant des réhabilitations, 120 000 PALULOS sont inscrites au projet de budget. De nombreux maires nous indiquent que, là encore, les sommes destinées au remboursement des emprunts pèsent lourdement dans le financement de ces opérations, ce qui entraîne une augmentation des loyers ou contraint à se contenter d'une qualité moindre.
En tout état de cause, nous pensons que le nombre de PALULOS prévu pour 2001 reste inférieur aux besoins en matière de requalification des quartiers et de revalorisation de l'habitat social.
Nous nous réjouissons que l'Assemblée nationale ait adopté un amendement du groupe communiste prévoyant un allégement de 30 % de la taxe foncière sur les propriétés bâties, la TFPB, pour les organismes comptant des logements situés en zones urbaines sensibles, les ZUS. Nous regrettons toutefois que cette mesure ne trouve sa pleine application qu'en 2002, le Gouvernement ayant choisi d'en faire une contrepartie au gel des loyers pour 2001. Nous aurions, pour notre part, préféré que le gel des loyers, légitimement attendu par les locataires et leurs associations, soit financé par affectation de moyens supplémentaires.
C'est également, je crois, ce qu'auraient préféré les offices d'HLM, qui attendent par ailleurs toujours la compensation de l'augmentation du taux de rémunération du livret A. Pouvez-vous nous indiquer les intentions du Gouvernement à cet égard, monsieur le secrétaire d'Etat ?
L'un des axes majeurs du projet de budget pour 2001 est la réforme des aides à la personne. La dotation budgétaire prévue pour le financement des aides personnelles au logement s'élève à 35 milliards de francs, soit une hausse de 1,74 % par rapport à 2000. Elle se décompose en une subvention au logement social, sous la forme de l'APL, l'aide personnalisée au logement, d'un montant de 15 milliards de francs, et d'une contribution de 20 milliards de francs au financement de l'allocation logement pour le secteur privé.
Respectueux de l'annonce qu'il avait faite lors de la conférence de la famille du 7 juillet 1999, le Gouvernement procède à la réforme des aides au logement. Il souhaite ainsi, et c'est une bonne chose, rendre plus cohérente la prise en compte des ressources pour le calcul des aides et tendre vers un barème mieux harmonisé des différentes aides. Nous apprécions que tous les revenus soient pris en considération de la même manière, qu'il s'agisse des revenus du travail, du RMI ou des minima sociaux. Cela nous semble plus juste.
Comme je l'avais fait l'année dernière, j'attire une nouvelle fois votre attention, monsieur le secrétaire d'Etat, sur les APL d'un montant inférieur à cent francs mensuels qui ne sont pas versées et qui représentent souvent un manque à gagner substantiel pour les familles concernées.
Ce chapitre des aides à la personne représente 70 % des crédits du logement. En effet, faute de privilégier l'aide à la pierre, seul dispositif permettant de garantir des loyers de sortie bas et donc de peu solliciter les aides publiques, l'Etat doit dégager dans ce domaine des moyens qui soient à la hauteur des difficultés que connaissent nos concitoyens.
J'ai pris bonne note de la revalorisation de l'APL, intervenue le 1er juillet dernier. Celle-ci comprenait notamment une majoration de 1 % des forfaits de charges, ce qui est dérisoire lorsque l'on observe la part des charges dans les loyers facturés aux locataires. Par conséquent, la revalorisation du forfait de charges doit être beaucoup plus significative.
Si, comme je vous l'ai déjà dit, monsieur le secrétaire d'Etat, je n'ignore pas que vous avez pris des dispositions afin d'atténuer le déséquilibre qui prévalait, avant votre arrivée, au profit du logement privé, je regrette toutefois que l'action publique en faveur du logement social ne soit pas plus clairement affirmée.
Sans entrer dans le détail des contreparties qui s'imposent au logement social et non au logement privé, bien que celui-ci bénéficie des aides publiques de l'Etat, je prendrai un exemple, celui de l'amélioration de l'habitat : le montant moyen de la PALULOS par logement est estimé à environ 8 000 francs, cette subvention étant doublée lorsque c'est l'ANAH qui intervient.
Enfin, je ne peux parler du logement sans noter avec satisfaction la récente décision du tribunal de Paris, qui invoque l'« état de nécessité » pour motiver sa décision de relaxer un père de famillle contraint de forcer la porte d'un logement vacant afin de ne pas soumettre son nouveau-né à l'insalubrité d'un studio de huit mètres carrés qu'il occupait avec son épouse.
Malheureusement, ces conditions de logement indignes de notre époque subsistent encore, en dépit de la loi d'orientation de lutte contre les exclusions. De nombreuses associations nous alertent sur les difficultés de la mise en oeuvre de celle-ci. Elles attirent également notre attention sur les expulsions auxquelles il est procédé, bien que la preuve de la bonne foi des locataires soit apportée. Ne conviendrait-il pas, monsieur le secrétaire d'Etat, de mettre en place une nouvelle communication en direction des bailleurs sociaux, afin de les sensibiliser aux nouveautés introduites par la loi et de ne plus donner aux locataires aux prises avec de grosses difficultés financières l'impression qu'ils mènent le combat du pot de terre contre le pot de fer ?
Vous l'aurez compris, monsieur le secrétaire d'Etat, j'ai tenté de procéder à un examen objectif du projet de budget que vous nous présentez, à la lumière des exigences du groupe communiste républicain et citoyen. Cette analyse aboutit parfois à des différences d'appréciation. Toutefois, considérant votre volonté d'apporter des solutions durables aux problèmes du logement, nous voterons vos crédits pour 2001. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen et sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Cléach.
M. Marcel-Pierre Cléach. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, vous me pardonnerez, je l'espère, de reprendre certains propos qui ont déjà été tenus ce matin. Cela étant, vous n'ignorez pas, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous avez affaire à des sénateurs souvent spécialistes, souvent présidents d'OPAC ou d'office d'HLM, et il n'est donc pas anormal que nous vous livrions des réflexions voisines ou identiques.
L'année 1999 a été une année exceptionnelle, sans précédent, pour l'ensemble des marchés immobiliers, tous les secteurs d'activité ayant profité de la croissance, qu'il s'agisse de l'accession à la propriété et de l'investissement locatif privé, des travaux d'amélioration ou des crédits immobiliers à l'habitat.
Pour l'année 2000, la conjoncture devrait, pour les mêmes branches, être quasiment aussi bonne, sauf, peut-être, pour l'investissement locatif privé, qui supporte une charge fiscale significative et les risques inhérents à la location, que les derniers textes et une jurisprudence constante ont encore aggravés.
Il s'agit donc d'années exceptionnelles, monsieur le secrétaire d'Etat, pour le secteur économique dont vous avez la responsabilité, exception faite, mais dans des proportions alarmantes, du logement social.
En effet, la construction locative sociale est en panne : 78 000 logements neufs ont été construits à ce titre en 1994, 39 000 l'ont été en 1999, 36 000, 37 000 voire 40 000, selon vos dires, seront sortis de terre en l'an 2000, alors que votre programmation en prévoyait 70 000.
A la lumière des besoins identifiés, on peut mesurer l'étendue de l'échec. Vous avez dit, monsieur le secrétaire d'Etat, que le Gouvernement ne peut supporter une telle situation, et vous avez laissé percer votre déception à l'égard des constructeurs sociaux.
Nous savons également que vous comptez sur les effets de l'entrée en vigueur de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains pour développer la construction de logements aidés.
Plutôt que de compter sur les effets d'une contrainte, mal ressentie tant par le mouvement HLM que par de très nombreux élus, ne devriez-vous pas vous interroger sur l'échec persistant, car il s'agit, hélas ! d'un échec, d'une politique qui se traduit par une non-consommation des crédits affectés à la construction sociale, et rechercher, en toute bonne foi et avec nous, les causes objectives de cette situation ?
Ces causes ne me semblent pas devoir être restreintes à une quelconque incapacité ou mauvaise volonté des acteurs principaux et essentiels de la construction sociale, même s'il est vrai que le mouvement HLM n'a pas toujours consenti les efforts de productivité et de créativité nécessaires.
En effet, ces causes sont multiples : en ville, nombre d'intervenants l'ont souligné ce matin, le coût du foncier constitue le premier obstacle à la recherche de l'équilibre d'une opération ; en zone rurale, où des progrès considérables ont été enregistrés, les petites communes ne veulent plus ou ne peuvent plus supporter la charge de la participation que représente l'apport au constructeur du terrain viabilisé, en raison du coût non pas du foncier, mais de la réalisation des voies et réseaux divers.
J'ajouterai à cette énumération une sorte de réserve psychologique des élus locaux, notamment dans les petites communes, devant la longueur et la complexité du processus réglementaire de production, une incompréhension face aux modifications souvent annuelles de la législation financière, qu'il s'agisse des PLA, des PLAI, des PLA-LM ou des PLUS, et une frilosité accrue à l'égard des procédures d'évaluation et d'attribution, qu'ils qualifient de plus en plus d'« usines à gaz ».
S'ajoutent à ces réactions des prescripteurs les difficultés objectives rencontrées par les constructeurs, telles que le niveau atteint par les prix de la construction, qui rendent les appels d'offres très souvent infructueux, et la position rigide des préfectures, qui recommandent et tentent d'imposer une ou plusieurs procédures successives d'appels d'offres, tout aussi infructueuses d'ailleurs, à la suite de l'échec de la première procédure, plutôt que d'aider à la recherche de l'efficacité par le biais de marchés négociés, dès lors que le premier appel d'offres aura été négatif.
Dans le même ordre d'idées, il est clair que le plan de charge des entreprises du bâtiment les autorise aujourd'hui à être plus sélectives dans le choix de leurs clients et que les prix au mètre carré auxquels sont tenus les constructeurs sociaux ne leur permettent pas d'espérer dégager les marges confortables qu'ils peuvent négocier dans d'autres secteurs.
Toutes ces contraintes s'additionnent et constituent autant de raisons, me semble-t-il, de l'échec persistant de la construction sociale.
Hormis les causes tenant à la lourdeur du processus administratif, qu'il soit d'origine gouvernementale, législative ou réglementaire, nous voyons bien, monsieur le secrétaire d'Etat, que nous sommes surtout confrontés à un problème de coût : pour équilibrer les opérations, les constructeurs sont obligés de solliciter les communes, les départements et, maintenant, les régions.
C'est dire que le financement d'Etat est insuffisant : tous les opérateurs ont rapidement souligné l'inadaptation du PLUS et l'insuffisance de la subvention d'accompagnement. La situation financière des organismes d'HLM étant ce qu'elle est, ils ne peuvent - mais le devraient-ils ? - suppléer par fonds propres l'insuffisance des produits de financement de l'Etat.
Il en est de même en matière de réhabilitation : croyez-vous raisonnable, monsieur le secrétaire d'Etat, de maintenir le plafond des travaux subventionnables en PALULOS à son niveau actuel ? Croyez-vous que ce plafond corresponde encore à une quelconque réalité économique quant il s'agit de rénover un logement de vingt ans d'âge ? Qu'en est-il si le logement a trente-cinq ans ?
Je crois, monsieur le secrétaire d'Etat, que le moment est venu de s'interroger, de vous interroger sur la pertinence d'un système mis en place voilà plus de vingt ans, et sur son adéquation à la situation actuelle.
A quoi sert, en effet, d'annoncer une programmation de 70 000 logements quand tous les professionnels savent, au moment même où elle est annoncée, qu'elle est gravement surestimée ?
Acceptez, s'il le faut, monsieur le secrétaire d'Etat, que soient construits moins de logements aidés pendant quelques années, mais au moins qu'ils soient construits et bien construits, et que chaque opération trouve, dans le quantum de l'intervention de l'Etat, dont c'est la compétence et la responsabilité, son équilibre.
Vous nous avez indiqué y réfléchir, et je sais votre compétence et votre bonne foi. Je crains seulement que la revalorisation de l'aide de l'Etat, si elle se limite à un réajustement qui serait fonction de la seule augmentation du coût de la construction, ne soit totalement insuffisante pour assurer l'équilibre de chaque opération et que la situation actuelle ne perdure.
Je crois, monsieur le secrétaire d'Etat, que la construction sociale est purement et simplement confrontée à un problème d'argent. C'est cela qu'il vous faut résoudre pour éviter la persistance de l'échec - immérité - de votre politique. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, ma collègue Odette Terrade a abordé, tout à l'heure, la question cruciale du logement. Je voudrais, pour ma part, m'arrêter brièvement sur deux points particuliers.
Il y a deux ans, nous nous étions félicités du judicieux regroupement des crédits de l'urbanisme au sein de ceux du logement. Cela a aidé en lisibilité et permis d'apprécier plus facilement les moyens du budget de l'Etat consacrés à l'urbanisme et à l'aménagement du foncier.
Ces crédits s'élèvent à 500 millions de francs alors qu'ils étaient de 370 millions de francs l'an dernier. Cette petite enveloppe s'explique uniquement parce que la compétence de l'Etat en matière d'urbanisme est très limitée. L'augmentation des crédits est, quant à elle, due, en partie, à l'adoption de la loi sur la solidarité et le renouvellement urbains.
Elle consacre une simplification et une mise en cohérence des documents d'urbanisme. La démarche d'approche globale de la réalité urbaine est profondément innovante. C'est la clé de voûte d'un développement et d'un aménagement du territoire équilibrés et harmonieux. La réforme des documents d'urbanisme lie la cohérence à la lisibilité et à la démocratie. Nous nous en félicitons.
Les crédits de l'urbanisme sont essentiellement consacrés à l'information, l'animation, la formalisation, la réflexion, la recherche, la concertation et les subventions aux agences d'urbanisme.
L'autre part est attribuée à l'aménagement foncier. Cette mission s'exerce dans le cadre de la politique foncière de l'Etat, au titre des politiques d'aménagement de sites stratégiques d'intervention prioritaire.
A ce titre, nous souhaitons attirer votre attention, monsieur le secrétaire d'Etat, sur le devenir des terrains de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris, ancien hôpital Laennec et de leur probable vente à un promoteur immobilier, la COGEDIM.
M. Guy Hascoët, secrétaire d'Etat à l'économie solidaire, interrogé par ma collègue Nicole Borvo, a déclaré : « Sans remettre en cause la démarche de l'établissement, les autorités de tutelle souhaitent que l'on se donne le temps nécessaire à une décision réfléchie... permettant la réalisation d'un programme équilibré qui réponde aux besoins des Parisiens », ce qui n'est pas du tout le cas.
Pour le moment, sont prévus 100 logements pour étudiants et 30 logements pour les familles modestes, alors que le VIIe arrondissement ne compte que 0,28 % de logements sociaux.
Quelles démarches sont engagées, monsieur le secrétaire d'Etat, pour que ces terrains ne soient pas objet de spéculation, mais outil de mixité sociale ?
Je souhaitais également aborder, pour ne pas dire survoler, les crédits consacrés aux personnels des services d'administrations centrales et des services déconcentrés.
Depuis de nombreuses années, nous n'avons de cesse de dénoncer l'évolution des effectifs, en constante régression.
Depuis 1983, ce sont près de 1 000 postes par an qui ont été supprimés. Nous avons noté, ces deux dernières années, un ralentissement des suppressions de postes et nous ne doutons pas qu'il est essentiellement dû à votre volonté politique, monsieur le secrétaire d'Etat, d'inverser la vapeur.
C'est chose faite cette année. Même si ce n'est que faiblement, le solde est positif et nous nous en félicitons.
En effet, les directions de l'équipement, qu'elles soient régionales ou départementales, assurent un service public fondamental, qu'il s'agisse d'assurer la sécurité des routes et des voies navigables ou d'améliorer la fluidité du trafic, notamment pour atteindre les objectifs gouvernementaux en matière de sécurité routière.
Lors de la tempête du 26 décembre dernier, les DDE ont, à nouveau, démontré leur compétence technique, leur connaissance du territoire et leur disponibilité.
Cependant, cette catastrophe a mis en lumière un allongement des délais d'intervention qui n'est pas imputable uniquement à l'accroissement soudain des demandes, mais également, pour une grosse part, aux réductions successives de personnels enregistrées depuis quelques années.
La multiplication à prévoir de ce genre de catastrophe naturelle, sans être alarmiste, n'est-elle pas d'ailleurs à prendre en compte pour les futures évolutions des effectifs des DDE ?
Pour l'heure, monsieur le secrétaire d'Etat, le groupe communiste républicain et citoyen soutient votre budget. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement. Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi tout d'abord de remercier chaleureusement vos rapporteurs, notamment votre rapporteur spécial, M. Jacques Pelletier, mais aussi MM. Bellanger, Plancade et Bimbenet, qui vous ont présenté les principales données du projet de budget du logement et de l'urbanisme pour 2001. Comme chaque année, la qualité de leurs rapports et de leurs exposés me facilite la tâche et me permettra de limiter mon propos, en m'efforçant d'apporter des réponses aux principales questions qui m'ont été posées par les intervenants.
Pour la deuxième année consécutive, nous devrions, d'après les derniers chiffres en notre possession, dépasser les 300 000 logements commencés et atteindre, je l'indique à M. le rapporteur spécial, les 301 000 logements en 2001. Nous franchirons donc le cap des 300 000 ! Avec 600 000 logements réhabilités grâce aux aides publiques, avec également 600 000 transactions dans l'ancien, le secteur de l'immobilier et, donc, le bâtiment, sont redevenus des moteurs de croissance.
Avec 60 000 emplois directs créés, 120 000 si l'on y ajoute les 60 000 emplois des industries se situant en amont du bâtiment, il m'a semblé que les lunettes de M. Lassourd devaient être vraiment très noires pour qu'il qualifie de « virtuel » le budget qui soutient ce succès.
Vous avez été plusieurs à nous rappeler l'inévitable décalage entre les décisions et leurs effets en raison des délais de construction et de travaux. Nous devons, bien sûr, tous rester vigilants, monsieur le rapporteur spécial, et faire en sorte que cette reprise soit durable. Soyez assuré que les pouvoirs publics s'y emploient.
Pour l'instant, la conjoncture nous paraît rester favorable à l'investissement des ménages. Les taux d'intérêt sont stabilisés depuis le printemps 2000 et, dans sa dernière publication, l'ANIL observe même un retour à la baisse des taux des prêts immobiliers de certains établissements de crédit.
J'ai noté l'accueil très favorable réservé sur toutes les travées de cet hémicycle à la grande réforme des aides personnelles au logement, qui représente 6,5 milliards de francs de prestations supplémentaires. Cette réforme, vous le savez, est mise en oeuvre en deux étapes, 1er janvier 2001 et 1er janvier 2002. Elle bénéficie du contexte économique général favorable, avec la baisse du chômage et la hausse de la masse des salaires - je n'ai pas parlé de la hausse des salaires, je parle bien de la hausse de la masse des salaires distribués - qui allègent l'évolution naturelle des dépenses avant réforme, ce qui contribue au financement de celle-ci. C'est aussi une réponse aux préoccupations de maîtrise de la dépense publique évoquées sur telle ou telle travée. Nous en attendons bien sûr une réelle amélioration de la solvabilité des ménages modestes.
Si cette réforme concerne, pour 2001 et 2002, le secteur locatif hors foyers, cela ne signifie pas que les logements foyers et les accédants à la propriété soient exclus de nos travaux.
Je veux rassurer vos rapporteurs, MM. Pelletier, Plancade et Bimbenet : il n'y a pas de volonté, de la part du Gouvernement, de privilégier le locatif. Il s'agit simplement, compte tenu de l'ampleur de la réforme, de procéder en plusieurs étapes. Le secteur locatif hors foyers, auquel nous nous sommes attachés, était le secteur le plus lourd en termes de financement et le plus délicat puisque, à lui seul, vous le savez, il représente les deux tiers des bénéficiaires : nous avons donc commencé non pas par la catégorie qui aurait coûté le moins cher mais, au contraire, par celle qui était la plus lourde pour les finances publiques. Pour les aides personnelles à l'accession à la propriété, le Conseil national de l'habitat, le CNH, a engagé des travaux techniques sur l'application des mêmes principes de réforme à ce secteur. Bien sûr, nous suivons ces travaux.
S'agissant des sources d'économie évoquées par M. Jacques Pelletier, le ministère du logement est ouvert à une révision des mécanismes de l'épargne-logement qui permettrait de mieux lier la prime d'épargne à la réalisation effective d'un projet immobilier.
Par ailleurs, nous avons introduit depuis deux ans - M. Bimbenet l'a noté dans son rapport - une distinction, dans les aides personnelles versées aux étudiants, entre boursiers et non-boursiers. D'une certaine façon, c'est une prise en considération des revenus familiaux de l'étudiant, et j'insiste sur le fait que c'est la première tentative en ce sens depuis de longues années qui ait, apparemment, réussi, alors que nombre d'autres, vous le savez, avaient été mises en échec par tel ou tel refus vivement exprimé.
Enfin, la mise en oeuvre de la réforme ne conduira pas à faire l'économie de la révision annuelle du barème des aides, à laquelle, madame Terrade, vous êtes très attachée : l'actualisation annuelle que nous avons reprise depuis le 1er juillet 1997 a été constamment respectée et elle le sera encore en 2001.
Nous avons entendu vos préoccupations sur ce point, préoccupations qui ont également été exprimées par MM. les rapporteurs, notamment à travers la question de l'évolution récente des charges, en particulier des charges de chauffage.
Nous ne pouvons cependant pas rejoindre M. le rapporteur spécial quand il estime que la réforme des aides à la personne risque de se faire au détriment des aides à la pierre.
Le parallèle qu'il établit dans son rapport, en ce qui concerne l'évolution des crédits pour 2001, entre plus 2 % d'un côté et moins 1 % de l'autre ne nous paraît pas juste car, d'une part, les crédits qui augmentent représentent plus de 70 % du total et ceux qui diminuent représentant donc moins de 30 % ; de plus, l'évolution concernant les aides à la pierre est, certes, de moins 1,3 % en crédits de paiement mais de plus 0,5 % en autorisation de programme, ce qui paraît plus porteur d'avenir pour des aides à l'investissement. J'y reviendrai sur plusieurs points particuliers.
Concernant le secteur locatif social, nous avons bien entendu l'impatience légitime de vos rapporteurs, relayés par MM. Cléach et Lassourd, pour parvenir à se doter des moyens d'une relance de la production dans le logement social, que ce soit en construction neuve ou en acquisition dans l'ancien.
M. Revet a parlé sur ce point d'un paradoxe, je souscris à ce propos. Mais j'en vois un autre dans le fait que nous avons atteint l'objectif global, « mythique », de la barre des 300 000 logements mis en chantier dans l'année alors que la production de logement locatif social est si faible. La plupart du temps, lorsqu'on atteignait les 300 000 logements - et il faut remonter assez loin dans le temps -, c'était en raison d'une contribution beaucoup plus importante du logement locatif social.
Nous sommes donc en présence d'un paradoxe : globalement, on n'a jamais autant construit, mais jamais aussi peu construit dans le secteur locatif social où une baisse s'est amorcée en 1995 pour, hélas ! se poursuivre, année après année.
Ma rencontre avec quelques préfets au cours des derniers jours m'a permis d'apprendre que dans deux départements de la région d'Ile-de-France, les résultats seraient meilleurs que les années précédentes. Avant-hier, le préfet du Pas-de-Calais m'a dit la même chose pour ce département. Qui plus est, nous savons que, dans la région PACA, qui avait connu une vraie dépression, là aussi, deux départements feraient mieux que les années précédentes.
Je reste très prudent en disant cela : ce sont quelques signaux. Mais je veux surtout vous assurer, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, que le Gouvernement partage la préoccupation que vous avez exprimée.
Je peux vous indiquer les pistes sur lesquelles nous travaillons. Elles concernent tant les crédits budgétaires de l'Etat que les financements complémentaires du 1 % logement, dont les capacités financières ont été reconstituées et doivent être mieux mobilisées.
Je tiens à le réaffirmer du haut de cette tribune, les témoignages de Mme Terrade et de M. Revet nous confirment la réalité des besoins.
Nous sommes bien conscients que le niveau relativement élevé des prix de la construction n'a pas favorisé, au cours des derniers mois, la production d'un plus grand nombre de logements, et il y a des appels d'offres infructueux pour les organismes d'HLM.
C'est pourquoi nous avons engagé la réflexion sur ces problèmes.
Il importe, tout d'abord, de mobiliser effectivement l'ensemble des moyens financiers disponibles.
Cela vaut pour l'apport du 1 % logement, dont l'implication dans les opérations, encore sans doute trop attachée à la pratique ancienne des réservations, est insuffisante.
Alors que la convention que nous avons signée le 3 août 1998 prévoyait un investissement annuel pour le 1 % logement d'au moins 4,5 milliards de francs, la réalité, en 1998 et en 1999, a été inférieure de plus d'un milliard de francs. Cette insuffisance n'est pas uniquement due à la faible consommation des PLA ou des PLUS.
Comme l'a souhaité M. Plancade, ce milliard de francs, qui est un minimum, doit être réinjecté, à des conditions financières améliorées, dans la production de logement social. Les discussions sont en cours avec l'Union d'économie sociale du logement à ce sujet. Nous espérons aboutir d'ici à la fin de l'année.
La nécessité de mobiliser les crédits disponibles vaut aussi, bien sûr, pour les crédits budgétaires de l'Etat. Une des pistes sur lesquelles nous travaillons consiste à adapter les paramètres de calcul des aides à la pierre à l'évolution des coûts de construction réellement constatée.
Car il y a un décalage qui se crée...
M. Charles Revet. C'est vrai !
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. ... et nous souhaitons le corriger.
Vous voyez donc que l'Etat ne se contente pas d'interpeller les autres intervenants, mais qu'il entend bien améliorer l'efficacité de ses propres financements.
Enfin, nous souhaitons assouplir la condition de travaux après acquisition dans l'ancien, afin de permettre la réalisation d'opérations plus nombreuses, pour lesquelles il n'est pas indispensable de faire toujours au moins 20 % de travaux.
S'agissant de la production de logements et la restructuration des banlieues, monsieur Revet, vous savez que c'est ce gouvernement qui a créé ce qu'on a appelé le PLA construction-démolition au 1er janvier 1998. Le démarrage est trop lent à nos yeux. Il est néanmoins réel et, si le rythme moyen des démolitions, voilà trois ans, était d'environ 2 500 logements, nous avons passé le cap des 6 500 et, dans le projet de budget que nous vous proposons, nous pourrons en financer 20 % de plus en 2001, si bien que nous devrions atteindre la barre des 10 000, en 2002 au plus tard.
MM. Jean-Pierre Plancade, rapporteur pour avis, et André Vezinhet. Oui !
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Il y a donc là un vrai mouvement de renouvellement de l'offre d'HLM. Indépendamment de l'amélioration de la qualité de vie qui en résultera pour les habitants qui profiteront de ces logements, c'est l'image même du patrimoine des HLM qui s'en trouvera revalorisée.
Je sais que vous, mesdames, messieurs les sénateurs qui détenez des responsabilités dans des organismes d'HLM, et qui les assumez avec conviction et avec détermination, vous y trouverez des satisfactions.
Je rappelle que la hausse du taux du livret A de juillet dernier n'a en rien dégradé l'équilibre des opérations PLUS et PLAI nouvelles. En effet, l'allongement immédiat de trois ans de la durée de remboursement du prêt de la Caisse des dépôts et consignations, consenti depuis la hausse du taux du livret A, compense entièrement la hausse du taux de 0,75 % pour le PLUS et de 0,65 % pour le PLAI.
Concernant la compensation de l'augmentation du taux du livret A sur les charges des organismes, sur le stock de l'endettement, c'est-à-dire sur le remboursement des prêts anciens, madame Terrade, je vous confirme l'engagement pris par MM. Jean-Claude Gayssot, Laurent Fabius et moi-même d'en neutraliser l'effet en 2001.
Cette décision a été annoncée par M. Jean-Claude Gayssot lors du congrès de l'Union des fédérations d'organismes HLM à Bordeaux, et les modalités d'application de cette neutralisation ont été récemment précisées à l'Union des fédérations des organismes HLM et à la Caisse des dépôts et consignations de manière que celles-ci puissent, sur 2001, procéder à des remises qui, tous logements et financements HLM additionnés, OPAC, offices, SA ou SEM, représenteront bien des allégements d'un montant de 870 millions en 2001.
Le Gouvernement a également, je le rappelle, ouvert la possibilité d'allonger de trois ans le remboursement des prêts accordés depuis juillet 1997, ainsi qu'il a accepté la mesure d'allégement de la taxe foncière sur les propriétés bâties proposée par le groupe communiste de l'Assemblée nationale. Ces mesures ne sont que les plus récentes d'un grand nombre de décisions d'allégement des charges des organismes d'HLM prises depuis 1997.
Je ne les rappellerai pas, car M. Vezinhet s'y est employé avec autant d'enthousiasme que d'exactitude. Je reprends donc à mon compte son propos sur ce point.
Si l'on ajoute cet allégement de la taxe foncière sur les propriétés bâties aux remises que consentira la Caisse des dépôts et consignations, nous arriverons à la somme de 1 670 millions de francs pour 2001.
L'Union des fédérations d'organismes d'HLM nous avait indiqué que, pour confirmer le gel des loyers en 2001, il en coûterait à l'ensemble des organismes qu'elle représente entre 1,2 et 1,3 milliard de francs. Avec la mesure annoncée par M. Jean-Claude Gayssot et celle que je viens de confirmer, c'est 1,670 milliard de francs, qui sera dégagé.
Mais, il y a eu le communiqué du comité exécutif de l'Union des fédérations d'organismes HLM...
M. Charles Revet. Ces jours derniers, monsieur le secrétaire d'Etat !
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. ... très récemment, en effet.
L'allégement de la taxe foncière sur les propriétés bâties est prévu pour le patrimoine situé en zones urbaines sensibles. Cela signifie que certains organismes seraient plus avantagés que d'autres. Mais les organismes qui ont de gros patrimoines dans les zones sensibles supportent plus de charges que les autres. Cette distinction est conforme à l'équité.
L'Union des fédérations d'organismes d'HLM, du fait de l'incertitude résultant d'une modulation, a estimé que les situations seraient étudiées par chaque organisme, à moins que le Gouvernement ne trouve une autre mine à explorer.
Mais je suis aujourd'hui au regret de vous dire que le Gouvernement a bien entendu ce que lui rappelle l'opposition, qu'il convient de limiter la dépense publique.
En tout état de cause, les mesures dont je viens de vous parler ne seront appliquées qu'aux organismes qui auront bien confirmé ce gel, de manière que, comme l'an dernier, quelques organismes ne s'affranchissent pas de la règle du gel des loyers. Il furent un peu trop nombreux quand même à y déroger, puisque, si 90 % des offices ont respecté la consigne de l'Union, 10 % ne l'ont pas fait, les sociétés anonymes étant les plus disciplinées, puisque moins de 5 % d'entre elles n'ont pas respecté la règle du gel.
Cependant, au-delà des considérations financières, et comme nous avons eu l'occasion de le dire souvent, par exemple lors de l'examen, par le Parlement, du projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains, c'est par une mobilisation de l'ensemble des acteurs, les organismes d'HLM, les élus, les pouvoirs publics, que nous parviendrons à répondre aux besoins dans ce secteur et à relancer la production de logement social.
S'agissant des réhabilitations, monsieur Cléach, le plafond de la PALULOS est, dans les faits, rarement contraignant car, le plus souvent, le coût des travaux reste inférieur à ce plafond. C'est encore plus vrai depuis que ces travaux bénéficient de la TVA au taux réduit de 5,5 %, le montant du plafond TTC n'ayant pas été ajusté à la baisse, cela correspond à une hausse de fait du plafond.
Dans le cadre d'une fongibilité des crédits, la PALULOS, madame Terrade, a bénéficié de la sous-consommation du PLA puis du PLUS, même si ce n'était pas forcément, je vous le concède, l'objectif visé. Mais, depuis trois ans, le nombre de logements sociaux réhabilités chaque année dépasse en réalité les 130 000 alors qu'il en est toujours annoncé moins au moment du budget. Il y a donc moins de constructions et plus de logements réhabilités.
S'agissant du prêt à taux zéro, je veux, si c'est possible, rassurer M. Lassourd. Nous nous attachons, contrairement à ce qu'il a cru percevoir et comme l'a rappelé M. Vézinhet, à conduire une politique équilibrée visant à reprendre de manière pérenne les outils des politiques de l'habitat dans tous les maillons qui en constituent la chaîne, qu'il s'agisse du parc privé ou du parc locatif social, de construction neuve ou du parc ancien, du secteur locatif ou de l'accession à la propriété et de l'investissement locatif.
C'est pourquoi nous nous sommes attachés, en 1998, à sauver le prêt à taux zéro. Nous aurions pu nous dire qu'il s'agissait d'un héritage, que le 1 % le finançait et que l'engagement avait été pris que tel ne serait pas toujours le cas.
Nous avons donc trouvé un prêt à taux zéro très fragilisé. Dans la loi de finances de l'année visée, nous avons rebudgétisé ce prêt, en application des dispositions de la convention du 3 août 1998.
M. Revet a rappelé tout à l'heure le coût de cette convention. Il est vrai que prendre le relais du 1 % sur la durée de la convention revient à mettre à contribution le budget de l'Etat à hauteur de 15 milliards de francs. Nous sommes effectivement aujourd'hui confrontés à cette épure. Pour 2001, en tout cas, comme pour 2000 et 1999, nous maintenons le prêt à taux zéro.
Après les 117 000 prêts de 1999, année qui a bénéficié du plus bas niveau des taux d'intérêt depuis plusieurs décennies, nous atteindrons, en 2000, les 112 000 à 115 000 prêts. Pour 2001, l'hypothèse retenue dans le projet de budget est de 112 000, dont le coût budgétaire s'établirait pour l'Etat, en légère hausse, à 5,9 milliards de francs.
Ce dernier chiffre tient compte de la hausse des taux. Il tient compte également d'une mesure destinée à favoriser l'accession à la propriété dans les quartiers sensibles des villes, où la quotité du PTZ sera portée de 20 % à 30 %. Il tient compte enfin des légères réductions des durées de différé ou de remboursement annoncées au début du mois d'octobre.
Ces dernières mesures ne concernent quasiment pas les trois tranches de revenus les plus bas du barème, qui bénéficient d'un différé total ou partiel et qui constituent environ 80 % des prêts.
Elles sont un peu plus sensibles pour les quatre tranches supérieures, mais même pour celles-là, leur incidence représente de l'ordre de 100 francs à 200 francs au maximum de hausse des mensualités, ce qui paraît acceptable pour des revenus moyens.
Enfin, je rappelle que le prêt à taux zéro reste, bien sûr, non contingenté, c'est-à-dire que toutes les demandes seront honorées et que la menace de « papisation » évoquée dans la discussion générale ne me paraît pas réelle, du moins dans le budget pour 2001 puisque nous ne parlons que de lui.
Je voudrais dire à M. Lassourd que je revendique le fait d'avoir stoppé la « papisation » en 1989. Les plafonds de ressources pour accéder au PAP avaient été augmentés en 1985, mais ils n'avaient pas été augmentés en 1986, 1987, 1988. En 1989, il fallait les réévaluer. Cela a été fait. Le procès n'est donc pas très juste.
Je vous confirme, monsieur Vézinhet, que les textes permettant la modernisation du prêt d'accession sociale, le PAS, souvent associé au PTZ dans le financement des mêmes opérations, devraient paraître dans les prochaines semaines.
M. Vezinhet a posé le problème de la consommation des crédits consacrés à l'aide à la médiation locative. Nous avons connu, il est vrai, des difficultés d'ordre comptable pour engager tous les crédits disponibles. Un décret sera prochainement publié, qui permettra de remédier aux difficultés constatées à ce sujet. Soyez donc rassuré, monsieur le sénateur, l'ensemble des crédits prévus au projet de loi de finances et les reports de l'exercice 2000 pourront être mis en oeuvre en 2001.
Notre attachement à des outils efficaces sur tous les segments de la politique du logement nous conduit à partager l'avis de votre rapporteur spécial, Jacques Pelletier, concernant les instruments de réhabilitation du parc privé ancien que sont les aides de l'ANAH et la prime à l'amélioration de l'habitat. Désormais, ces deux aides seront, vous l'avez rappelé, distribuées par l'ANAH, dont la loi SRU a élargi la mission et renforcé l'assise.
Le projet de budget pour 2001 reconduit les crédits pour cette « grande ANAH », avec 3 milliards de francs en autorisations de programme - il est à noter que, malgré la baisse de la TVA, elles ne diminuent pas, ce qui n'a pas toujours été le cas ! - et 2,7 milliards de francs de crédits de paiement. Mais, comme vous l'avez dit vous-même, la trésorerie de l'ANAH étant de 700 millions de francs, les moyens d'action de cette agence en 2001 ne sont donc pas susceptibles d'être affaiblis. C'est d'autant plus vrai depuis que le taux réduit de TVA à 5,5 % s'applique aux travaux effectués dans les logements.
Plusieurs de vos rapporteurs ainsi que M. Maman ont noté une réduction des crédits de certaines lignes concernant les actions en faveur des plus démunis, telles que la lutte contre le saturnisme ou l'aide à la médiation locative créée par la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions. Je leur répondrai - je le dis également à M. Vezinhet - que c'est tout simplement en raison de l'existence de reports, mais que l'effort réel est bien continu, je peux vous l'assurer.
A votre rapporteur spécial, qui s'est préoccupé du logement intermédiaire, j'indique que nous allons, dans les prochaines semaines, mettre en place un système rénové pour le prêt locatif social - anciennement le prêt locatif aidé du Crédit foncier de France - et le prêt locatif intermédiaire, en l'adaptant aux zones où le marché immobilier est le plus tendu. On aura ainsi un produit attractif, cela d'autant plus que sa ressource sera, pour une part, prélevée sur les disponibilités des fonds d'épargne, c'est-à-dire de la collecte centralisée par la Caisse des dépôts et consignations, dont le taux passera de quelque 6,5 % aujourd'hui à 5 %. Le privé et le secteur locatif social pourront refaire du logement intermédiaire.
Toujours pour le logement intermédiaire, et pour favoriser le développement de l'investissement dans la pierre, nous avons mis en place le statut du bailleur privé, avec des aides fiscales incitatives pour ces investisseurs.
Vous avez débattu, en première partie de la loi de finances, de plusieurs amendements permettant de lever l'incompatibilité actuelle entre l'option pour ce régime fiscal et la location à un ascendant ou à un descendant, notamment l'amendement déposé par M. Plancade, qui l'a rappelé tout à l'heure à cette tribune.
Ma collègue secrétaire d'Etat au budget s'y est opposée, la complexité de la gestion par les services fiscaux pouvant être source de contentieux. Mais elle s'est engagée à présenter une proposition affinée allant dans le même sens. Dans quelques jours, j'ose espérer que vos points de vue parviendront à converger. Soyez assurés que j'y serai attentif et que nous sommes très proches de nos homologues de Bercy pour travailler à une solution satisfaisante sur ce point.
Concernant l'urbanisme, monsieur Bellanger, en tant que rapporteur pour avis, vous avez rappelé les outils mis en place par la loi SRU pour rénover le droit de l'urbanisme, qui vivait encore largement sur les fondements de la loi d'orientation foncière de 1967, bâtis dans un contexte qui a radicalement changé. Votre rapporteur a souhaité savoir quand nous pourrions effectivement mettre en oeuvre la loi nouvelle. Les décrets d'application concernant le volet Urbanisme de cette nouvelle loi sont en chantier dans nos services et notre ambition est de les publier à la fin du premier trimestre 2001 - le délai est court, car il y a l'étape du Conseil d'Etat - car nous voulons qu'ils soient disponibles pour les équipes municipales qui seront nouvellement élues en mars prochain.
S'agissant des prescriptions de massifs, la balle est dans le camp des comités de massif. Je peux d'ores et déjà vous indiquer que le travail est bien engagé pour le Massif central. Ce cas fera peut-être école et d'autres massifs opteront pour cet outil technique, qui est beaucoup moins lourd que la directive territoriale d'aménagement.
Toujours concernant la loi SRU, la compensation pour les collectivités locales des charges résultant de l'élaboration des documents d'urbanisme se fera, comme c'est actuellement le cas pour les POS et les schémas directeurs, dans le cadre de la dotation générale de décentralisation. Le décret sera modifié pour y inclure un financement au titre des cartes communales.
Je peux enfin rassurer M. Bellanger sur le sort des produits de cession des terrains anciennement acquis avec les fonds du FARIF, compte d'affectation spéciale aujourd'hui supprimé. Conformément à l'engagement qui a été pris l'an dernier et qui figure à l'article 44 du projet de loi de finances pour 2000, ces produits de cession sont affectés aux chapitres budgétaires qui ont remplacé les anciens chapitres du FARIF.
Le projet de loi de finances rectificative pour 2000, dont l'examen débute la semaine prochaine à l'Assemblée nationale, comporte les ouvertures de crédit correspondantes.
Monsieur Bellanger, les CAUE relèvent du ministère de la culture. Toutefois, la loi SRU a réaffirmé leur rôle au service des communes pour aider celles-ci, si elles le souhaitent, à élaborer leurs documents d'urbanisme.
Quant aux cinquante pas géométriques, ils sont de la compétence de mon collègue chargé de l'outre-mer. Permettez-moi de rappeler qu'il existe un partage de compétences en matière de responsabilités gouvernementales !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Vous êtes solidaires !
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Assurément !
La nomination des directeurs des agences chargées de la gestion de ces zones est en cours.
M. Bellanger a aussi posé le problème des agneaux de pré-salé. (Rires.)
M. Charles Revet. Mais c'est très important !
M. Jean-François Le Grand. Merci, monsieur Bellanger, pour le Mont-Saint-Michel !
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Nous y avons travaillé très attentivement, vous le savez, Jean-Claude Gayssot et moi-même. C'est une question qui méritait d'être posée.
La réglementation européenne impose que les bergeries soient à proximité des lieux de pacage.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Et voilà !
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Cela peut poser un problème de compatibilité avec la loi « littoral », qui, en principe, interdit les constructions sur les sites sensibles.
M. Charles Revet. Si c'était en Corse, ce serait possible !
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Cependant, dès lors que l'activité d'élevage des agneaux de pré-salé nécessite l'installation d'une bergerie, la loi permet une dérogation, sauf sur les sites classés comme remarquables.
Mais je ne vois pas comment il pourrait en être autrement pour la baie du Mont-Saint-Michel !
M. Jean-François Le Grand. Voilà une compétence affirmée !
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. C'est une façon de promouvoir sur ces sites non pas les bergeries, mais les atouts touristiques du Mont-Saint-Michel !
M. Jean-François Le Grand. Et ses atouts gastronomiques !
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Je vous confirme en outre que, sauf s'il s'agit d'une construction dont le volume est important - ce qui ne devrait pas être le cas pour des bergeries - le passage en commission des sites n'est pas requis.
Ces éléments devraient, par conséquent, être de nature à vous rassurer quant à l'esprit dans lequel nous concevons l'application de la loi « littoral » et la prise en compte des exigences du développement économique, et nous réglons les problèmes de délai dont vous avez parlé.
Monsieur Le Cam, vous avez évoqué, parmi tous les thèmes que vous avez abordés, un problème d'actualité, celui des terrains de l'hôpital Laennec. M. Gayssot aurait pu comme moi le dire, le Gouvernement tout entier souhaite que les décisions qui seront prises par le conseil d'administration de l'Assistance publique pour la réalisation de cette opération concilient deux préoccupations essentielles.
La libération de ces terrains appartenant à un opérateur public doit être l'occasion non seulement de réaliser un programme équilibré qui réponde aux besoins des Parisiens, en particulier en termes d'accueil, grâce à une proportion significative de logements sociaux et d'équipements publics, mais aussi de valoriser au mieux la cession des actifs désaffectés.
Compte tenu des informations disponibles sur l'opération, ces préoccupations paraissent conciliables. C'est pourquoi les ministères de tutelle ont demandé à l'AP-HP de veiller à la prise en compte de ces différents aspects et d'apporter tous les éléments d'analyse complémentaires. Le conseil d'administration a décidé, le 21 novembre dernier, de surseoir à la désignation de l'acquéreur, justement pour approfondir ces questions.
Pour ce qui est des logements sociaux, il me semble qu'à partir des préconisations de la loi SRU, la présence de 20 % de logements sociaux sur l'ensemble des logements prévus sur le site de l'hôpital Laennec constitue, à mon sens, un objectif minimal.
Voilà ce que je suis en mesure de vous indiquer en l'état actuel du dossier en réponse à vos très légitimes interrogations.
Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, nous avons, je crois, beaucoup travaillé ensemble et M. Gayssot a entendu vos témoignages sur ce point dans plusieurs de vos interventions depuis 1997.
Ce budget 2001 n'est pas un exercice d'affichage, comme l'a dit M. Lassourd. Il permet une consolidation des acquis et assure de nouvelles avancées, notamment par cette réforme des aides personnelles qui permettra une hausse moyenne de 1 300 francs par an des prestations versées à de nombreux ménages aux ressources modestes.
Les ménages les plus modestes qui étaient locataires du privé pourront, dans un certain nombre de cas, compter sur une amélioration mensuelle de 400 francs, soit l'équivalent bien souvent d'un mois supplémentaire de ressources, ce qui, bien évidemment, ne sera pas négligeable sur une année.
Ces acquis et ces avancées, nous les assurons au service du droit au logement mais, à l'occasion de la loi SRU, le Gouvernement a souhaité que l'on entende aussi par là : droit à un logement décent et choisi, que nous nous attachons à assurer pour tous. C'est pourquoi je vous demande, mesdames, messieurs les sénateurs, de bien vouloir approuver ce budget. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, je veux à mon tour, tout d'abord, remercier M. Pelletier, votre rapporteur de la qualité de son rapport spécial et de son intervention, même si je ne partage pas, vous le comprenez, toutes ses options.
Je remercie également MM. Bellanger, Plancade et Bimbenet pour leurs rapports pour avis qui concernent plus particulièrement le logement et l'urbanisme.
M. Louis Besson ayant répondu de manière pertinente, intelligente et précise à chacune de vos interrogations, je serai bref sur la question des services communs.
Je veux toutefois dire à M. Pelletier, qui a rappelé qu'un certain nombre de vos collègues se sont émus des dispositions de la loi SRU, que nous sommes déterminés à tout faire pour que le droit au logement soit respecté partout et que le logement social ne soit exclu nulle part. Les crédits que nous voulons affecter au logement en 2001 constituent un premier levier décisif.
Selon M. le rapporteur spécial, le projet de budget de l'équipement est compliqué, difficile à lire et comporte des transferts en cours d'année. C'est vrai, mais n'est-il pas normal que la modernisation de l'Etat - qui doit se traduire par plus de responsabilisation de l'administration et de ses gestionnaires - s'accompagne de plus de souplesse ? La proposition de réforme de l'ordonnance de 1959 par M. Didier Migaud devrait vous apporter des réponses puisqu'il y est prévu des programmes globaux auxquels correspondraient des crédits globalisés, plus souples d'utilisation. En même temps, le Parlement pourrait être mieux informé des transferts en cours d'année.
J'en viens aux services communs.
L'enjeu, vous le connaissez, c'est le contenu même des missions de service public. Ce sont les agents de l'équipement qui assurent l'entretien du réseau routier national et départemental, qui assurent notamment pendant l'hiver les travaux de salage et de déneigement des routes. Ce sont eux qui interviennent en cas d'accidents de la route ou de catastrophes naturelles. M. Le Cam en a parlé dans son intervention. J'y reviendrai tout à l'heure à propos des effectifs. Je tiens à saluer leur disponibilité, qui a été reconnue par tous localement, par élus, les responsables et les populations, lors des tempêtes survenues à la fin de l'année 1999.
Les agents de l'équipement assurent également l'exploitation des voies navigables, prenant en charge les manoeuvres et l'entretien de certaines écluses et barrages. Ils sont présents sur le littoral maritime, notamment pour l'entretien des infrastructures portuaires et la signalisation maritime.
Parmi les missions relevant du ministère de l'équipement figurent aussi la planification, l'amélioration de notre environnement quotidien avec les plans d'exposition aux risques, les documents d'urbanisme ou les plans de déplacements urbains.
Les services de l'équipement sont aussi en charge d'autres grands domaines, tels que la politique du logement, l'inspection du travail dans les entreprises de transport, l'examen du permis de conduire automobile, etc.
Enfin, vous connaissez l'appui que ces services apportent au quotidien aux collectivités locales, particulièrement aux petites et moyennes communes, qui, même si elles sont regroupées, ne peuvent pas toujours assumer de manière satisfaisante le traitement de ces dossiers techniques.
Ils jouent ainsi un rôle important dans la correction des inégalités territoriales.
Nous avons reçu hier, avec Louis Besson, les responsables de l'ensemble des directions départementales de l'équipement, DDE, et nous leur avons rappelé leurs responsabilités dans tous ces domaines.
Comme l'a souligné M. Le Cam, durant dix-huit ans, les emplois consacrés à toutes ces politiques ont été régulièrement « rognés » de mille postes environ chaque année. Bien sûr, pendant le même temps, le ministère a réalisé des gains de performance importants, mais il s'agissait bien d'une véritable hémorragie.
Or, mesdames, messieurs les sénateurs, pour la première fois depuis longtemps, en 2001, les effectifs ne baisseront pas. Il y aura même quelques créations d'emplois. Ainsi, monsieur le rapporteur, pour la première fois depuis dix-huit ans, nous allons créer 75 postes. Ce n'est pas assez, me direz-vous ; d'autres le diront également et je le pense aussi. Mais c'est un début et c'est même un grand pas parce que nous avons complètement inversé la tendance qui a prévalu ces dix-huit dernières années.
Monsieur Pelletier, 75 emplois et non pas 11 sont effectivement inscrits sur le budget des services communs et 66 le sont sur le budget des affaires maritimes. Ces 75 emplois nouveaux iront à la sécurité maritime dans les CROSS, les centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage, les centres de sécurité des navires, les ports maritimes, l'inspection du travail maritime, les centres de formation et les unités de contrôle et de surveillance.
Je n'ai pas besoin de rappeler combien la question de la sécurité maritime est essentielle et ce qu'il en coûte, bien au-delà du coût des emplois publics, mesdames, messieurs les sénateurs, de ne pas la respecter.
La sécurité maritime mise à part, les effectifs des services de l'équipement restent en 2001 globalement stables. Mais, pour faire face aux nouvelles missions avec les compétences nécessaires, il est prévu différentes créations d'emplois par transformations.
Ainsi, 77 emplois sont créés dans le domaine de la sécurité routière et du permis de conduire ; 30 emplois sont créés pour le contrôle et l'inspection du travail des transports, toujours pour améliorer la sécurité dans les transports routiers ; 30 emplois supplémentaires d'agents d'exploitation viendront renforcer les équipes chargées de l'exploitation des infrastructures, notamment dans les départements les plus sensibles confrontés au problème de viabilité hivernale du réseau routier ; 418 emplois, dont 153 en catégorie A et 265 en catégorie B, sont créés par redéploiement pour renforcer les compétences des services de l'équipement dans les domaines à très forts enjeux, comme la politique urbaine, celle du logement, de l'aménagement et des transports.
Cette adaptation de la structure des emplois aux nouveaux emplois participe de la modernisation du service public. Il faudra sûrement poursuivre dans les années à venir.
J'ai demandé à mes services de conduire des réflexions approfondies sur l'évolution permanente des compétences en tenant compte de l'augmentation prochaine et inéluctable des départs à la retraite.
Les métiers de l'équipement évoluent avec une politique des transports plus intermodale, plus soucieuse de l'environnement, avec une meilleure prise en compte de la sécurité des infrastructures de transport et une plus grande compréhension des phénomènes sociaux et économiques dans les milieux urbains, la redécouverte de la santé publique à travers la lutte contre l'amiante, le radon, le saturnisme et même les termites.
L'exploitation des voies rapides urbaines et des autoroutes non concédées suscite également des exigences croissantes pour la sécurité et l'information de l'usager. Ces enjeux forts pour le service public de l'équipement impliquent un renforcement des équipes et des compétences.
Je sais bien que, dans cet hémicycle, plusieurs sénateurs - M. le rapporteur l'a laissé entendre - regrettent l'absence de réduction d'effectifs. Je ne peux pas partager cet a priori, selon lequel les effectifs de la fonction publique devraient être toujours réduits quelles que soient les exigences du service public et les attentes des usagers, notamment, comme vous semblez le dire, en contrepartie d'augmentations salariales.
Pour ne prendre que l'exemple du maintien de la viabilité du réseau routier en hiver, les conseils généraux savent ce que représente le respect des durées maximales du travail pour les personnels.
Là aussi, des emplois supplémentaires doivent être créés dans un certain nombre de départements.
Ayant rappelé les grandes lignes du budget, je répondrai plus précisément à quelques questions que m'a posées M. le rapporteur spécial.
Je ne comprends pas - ou peut-être les ai-je trop bien compris - les observations concernant les différences entre emplois budgétaires et effectifs réels selon le rapport du contrôleur financier.
Ce rapport pour 1999 conclut que le ministère de l'équipement respecte les emplois autorisés, les effectifs réels se situant en permanence à 98 % de l'effectif autorisé par la loi de finances.
Je ne peux être d'accord, en revanche, avec M. Pelletier quand il souhaite plus de clarté dans l'utilisation des moyens ; il me semble qu'il n'apprécie pas à leur juste valeur les progrès réalisés cette année dans l'information du Parlement.
Certains regrettent, M. le rapporteur spécial notamment, que le ministère ne dispose pas d'une comptabilité analytique pour son budget du personnel. Je ne vois pas comment ce ministère pourrait être le seul à disposer d'un tel outil de gestion, encore que nous pourrions donner l'exemple : peut-être, d'ailleurs, avons-nous développé des outils qui s'en rapprochent et qui permettent, notamment, de répartir les effectifs entre les différents domaines d'activité du ministère, qui sont effectivement nombreux ?
Je vous invite à vous reporter au tableau figurant à la page 63 du fascicule bleu de la section « services communs » : vous y verrez que 41 866 agents ont été mobilisés en 1999 pour l'entretien et l'exploitation du réseau routier.
En ce qui concerne l'IGN, M. Lengagne m'a effectivement remis, voilà un an, un rapport qui éclaire les enjeux concernant l'établissement et prévoit des évolutions importantes. Quatre groupes de travail ont été mis en place afin de préciser les suites à donner. A ces groupes s'est ajouté un groupe transversal assurant la concertation avec les représentants du personnel. Les conclusions d'ensemble figurent dans un document de synthèse qui vient d'être approuvé en comité interministériel et qui doit servir de base au prochain contrat pluriannuel d'objectifs. Il doit être immédiatement suivi par une convention qui fait l'objet d'une mise au point et qui doit être signée entre l'IGN et le cadastre, ce qui permettra d'expérimenter une nouvelle collaboration entre les deux établissements.
M. le rapporteur spécial et M. Bellanger ont évoqué les équipements immobiliers.
Certes, nos locaux sont souvent dans un état qui nécessite un effort important en matière d'investissements.
J'ai obtenu cette année une première augmentation significative des crédits d'investissements immobiliers. Les autorisations de programme passent en effet de 60 millions de francs à 80 millions de francs en 2001. Les crédits de maintenance lourde sont portés à 50 millions de francs en 2001 contre 37 millions de francs cette année. Cet effort devra toutefois être prolongé, j'en suis convaincu. Parallèlement, nous poursuivons la gestion dynamique du parc immobilier afin que les produits dégagés par les cessions de locaux devenus inutiles permettent d'augmenter les moyens disponibles pour les opérations nouvelles.
Messieurs les rapporteurs, j'ai esquissé un certain nombre de pistes de modernisation et souligné la nouvelle croissance des effectifs. Loin d'être contradictoire, tout cela participe de la bonne gestion du service public et va dans le sens souhaité par tous, à savoir la modernisation de l'Etat.
Certains, dans cette enceinte, regrettent que les effectifs soient trop importants alors que d'autres, dans les départements, m'écrivent des lettres pour me demander des augmentations d'effectifs ! Cela fait partie des contradictions de la vie. Je les relève au passage.
Ce projet de budget reflète notre politique pour le développement du service public et la modernisation des transports. C'est la raison pour laquelle je comprends mal que la commission des finances en propose le rejet. Pour ma part, je ne peux que vous inviter, mesdames, messieurs les sénateurs, à l'approuver. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président. Je rappelle au Sénat que les crédits concernant les services communs, l'urbanisme et le logement inscrits à la ligne « Equipement, transports et logement » seront mis aux voix aujourd'hui même à la suite de l'examen des crédits affectés à la mer.

ÉTAT B

M. le président. « Titre III : 1 213 286 420 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre III est réservé.
« Titre IV : 214 404 732 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre IV est réservé.

ÉTAT C

M. le président. « Titre V. - Autorisations de programme : 11 119 112 000 francs ;
« Crédits de paiement : 5 346 588 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre V est réservé.
« Titre VI. - Autorisations de programme : 18 352 298 000 francs ;
« Crédits de paiement : 7 243 682 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre VI est réservé.
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances concernant les services communs, l'urbanisme et le logement.

III. - TRANSPORTS
1. Transports terrestres
2. Sécurité routière
3. Routes

M. le président. Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi concernant les transports, la sécurité routière et les routes.
J'indique au Sénat que, pour cette discussion, la conférence des présidents a décidé l'expérimentation d'une nouvelle procédure destinée, pour reprendre les termes mêmes du président de la commission des finances, à rendre notre débat plus interactif, plus vivant et plus animé.
Ainsi, M. le ministre répondra immédiatement et successivement, d'abord, aux deux rapporteurs spéciaux, puis aux deux rapporteurs pour avis, enfin à chaque orateur des groupes.
Ces réponses successives se substitueront à la réponse unique en fin de discussion.
De même, lorsque les orateurs des groupes seront appelés à intervenir, pour cinq minutes maximum, et j'y veillerai, le ministre répondra immédiatement à chacun d'entre eux dans la limite de trois minutes avec la possibilité d'une brève répartie de deux minutes pour chaque auteur de question.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Le ministre est désavantagé !
M. le président. Vous y gagnerez puisque vous répondrez à chaque groupe.
Cette règle étant rappelée, je souhaite, monsieur le ministre, que nous essayons de tenir les débats dans des limites raisonnables.
Je me permets en effet de rappeler que, demain matin, le Sénat doit examiner les crédits du ministère de la jeunesse et des sports, ce qui exigera deux heures et demie de débat. La séance de demain matin doit donc commencer à dix heures au plus tard, ce qui implique que nous en terminions cette nuit à une heure.
L'exercice que nous allons inaugurer aujourd'hui est particulièrement difficile. Je le répète, c'est une démarche expérimentale que nous devons à l'initiative de la commission des finances, de son président et de son rapporteur général.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Monsieur le président, si j'ai souhaité prendre la parole, c'est pour apporter mon soutien à la présidence dans l'application de la règle à laquelle nous avons, monsieur le ministre, vous et nous, souscrite.
L'accord du Gouvernement sur ces modalités modernisées de discussion budgétaire a, en effet, été solennellement donné par le ministre chargé des relations avec le Parlement lors de la conférence des présidents, et votre cabinet a été informé de ces modalités. Chaque groupe, mes chers collègues, a été également informé, et les rapporteurs spéciaux l'ont été par mes soins.
Il s'agit d'une démarche expérimentale, qui va montrer combien le Sénat est à la pointe de la modernisation de la discussion budgétaire.
M. Jean-François Le Grand. Très bien !
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. A vous, mes chers collègues, d'apporter la preuve qu'une telle modernisation est tout à fait possible, qu'un budget débattu sous cette forme devient beaucoup plus intéressant à la fois pour les parlementaires et pour nos concitoyens.
Monsieur le ministre, permettez-moi de vous préciser que, non seulement, vous n'y perdez pas une once de temps de parole, mais vous en gagnez puisque vous pourrez répondre à tous les orateurs.
M. Jean-François Le Grand. C'est ça qui le gêne ! (Sourires.)
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Nous attendons de vous beaucoup de concision. Nous sommes confiants mais, je vous en supplie, monsieur le ministre, mes chers collègues, faisons en sorte que cette modernisation soit une réussite. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Les règles étant rappelées, je vais m'efforcer de les faire respecter !
Je donne donc d'abord la parole à M. Cazalet, rapporteur spécial.
M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial de la commission des finances du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation, pour les transports. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en introduction de cette présentation, je souhaite vous préciser que l'analyse du budget des transports terrestres est rendue cette année délicate en raison de trois éléments.
Tout d'abord, les crédits du fonds pour l'investissement des transports terrestres et des voies navigables, le FITTVN, sont réintégrés dans le budget.
Ensuite, les crédits destinés aux routes, aux transports terrestres, aux voies navigables et au transport aérien sont fusionnés au sein d'un même fascicule « transports ».
Enfin, les agrégats sont définis non plus en fonction du mode de transport, mais du « service rendu », dans l'esprit des schémas de service.
Globalement, les moyens de paiement demandés pour les transports terrestres en 2001 atteignent 48,4 milliards de francs. Ce budget diminue donc de 4,6 % par rapport aux crédits votés en 2000. En revanche, les autorisations de programme progressent de 25 %.
Ces montants n'ont qu'une signification limitée, car il faudra tenir compte des modalités de clôture du FITTVN.
En effet, ce fonds sera supprimé en 2001. Créé, sur l'initiative du Sénat, par la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire de 1995, il devait assurer le développement de nouvelles infrastructures dans notre pays.
L'an dernier, je regrettais qu'il ait été détourné de son objet pour compenser les défaillances du budget des transports terrestres et je souhaitais que son fonctionnement soit amélioré. Le choix a été fait de le supprimer, ce qui permet d'affecter au budget général des taxes dynamiques, particulièrement la taxe d'aménagement du territoire.
A l'Assemblée nationale, malgré les vives inquiétudes des députés, particulièrement dans la majorité, M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie, n'a pas donné de garanties quant à un report intégral des crédits de paiements.
Vous nous avez dit en commission, monsieur le ministre, que vous aviez l'assurance que les crédits de paiement du FITTVN seraient reportés sur le budget en 2001. Pourriez-vous nous le confirmer aujourd'hui et préciser si la répartition de ces crédits, entre les transports terrestres et les routes, correspondra à ce qu'elle était précédemment ?
Quoi qu'il en soit, je tiens à exprimer de vifs regrets sur deux points.
Tout d'abord, je déplore l'opacité des conditions de suppression du fonds : le Parlement est invité à adopter une loi de finances dont on lui dit qu'elle ne correspondra pas à la réalité.
Ensuite, force m'est de dénoncer une perte de ressources définitive pour les investissements en matière de transport. Chaque année, le FITTVN enregistrait des recettes et des reports de crédits. L'an prochain, les transports bénéficieront des crédits du budget général et, si vous nous le confirmez, des reports de crédits, mais ils ne bénéficieront plus de recettes affectées.
Par ailleurs, je note que, cette année, les anciens agrégats sectoriels sont remplacés par des agrégats transversaux dont la signification est limitée.
Par exemple, l'agrégat « modernisation et développement des réseaux d'infrastructures » est presque exclusivement constitué de la contribution aux charges d'infrastructures ferroviaires et au désendettement de la SNCF : il s'agit donc, en fait, d'un agrégat ferroviaire.
L'intermodalité est plus qu'une question de présentation. Au-delà de cet effet d'affichage, pourriez-vous nous préciser, monsieur le ministre, le montant des investissements que vous comptez réaliser en 2001 en faveur de l'intermodalité et nous indiquer leur part dans l'ensemble des investissements ferroviaires ?
M. Jean-François Le Grand. C'est une bonne question !
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Les autres aussi !
M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial. En outre, les contrats de plan signés entre l'Etat et les régions pour la période 2000-2006 prévoient la mise en oeuvre d'un important programme de modernisation du réseau ferroviaire. Au total, les projets ferroviaires représentent un programme d'investissements de près de 25 milliards de francs, avec une participation de l'Etat de 7,6 milliards de francs.
Pourriez-vous nous donner des précisions sur les investissements en cause et nous dire quel sera le taux d'exécution des contrats de plan en matière ferroviaire et fluviale à la fin de 2001 ?
J'en viens à la situation du secteur ferroviaire.
Les résultats du groupe SNCF ont progressé en 1999, ce dont je me réjouis. Cependant, la contribution de la SNCF au résultat d'exploitation se dégrade, en raison de l'augmentation des redevances d'infrastructures et de celle des charges de personnel. J'avais déjà regretté l'an dernier cet accroissement des dépenses de fonctionnement.
Concernant les redevances, la SNCF estime qu'elles sont trop élevées, et RFF, Réseau ferré de France, en a besoin pour assurer son financement. Je souhaite, monsieur le ministre, que vous nous indiquiez précisément comment vous envisagez l'évolution des redevances d'infrastructures à moyen terme.
S'agissant du fret, le transport ferroviaire continue de stagner en tonnage transporté, et le chiffre d'affaires du fret a diminué de 2,3 % en 1999. La part relative du fret ferroviaire continue donc de baisser au profit de la route.
En commission, je vous ai déjà posé une question sur le fret. Vous avez alors fait part de votre optimisme, notamment en raison de l'équipement de la SNCF en locomotives. Toutefois, seule la réalisation d'infrastructures importantes, comme l'a souligné la commission d'enquête du Sénat, permettrait de répondre à cet objectif ambitieux de doublement du fret ferroviaire.
Pouvez-vous nous indiquer le montant des crédits qui seront affectés en 2001 aux investissements de désaturation des noeuds ferroviaires ?
Par ailleurs, je remarque que, selon le programme prévisionnel d'investissements de RFF, les investissements en infrastructures ferroviaires diminueront, passant de 11,2 à 10,3 milliards de francs en 2001. Pourriez-vous nous expliquer pourquoi ?
A titre personnel, je pense que la réduction des investissements ferroviaires trouve son origine dans le poids de l'endettement du secteur ferroviaire.
Au 31 décembre 1999, l'endettement à long terme de la SNCF s'élevait à 44 milliards de francs, la dette du service annexe d'amortissement de la dette à 59 milliards de francs et la dette de RFF à 150 milliards de francs, soit au total 253 milliards de francs.
Pour le moment, l'Etat se contente de « stabiliser » la dette. Toutefois, à l'Assemblée nationale, vous avez parlé de l'affectation d'une partie du produit des licences UMTS. Devant notre commission, vous avez indiqué qu'un groupe de travail avait été mis en place au sein du comité des investissements économiques et sociaux. Pourriez-vous nous préciser vos intentions en ce domaine ? Quand le groupe de travail doit-il remettre ses conclusions ?
Je souhaite aborder maintenant la régionalisation des services de transports de voyageurs.
La loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains prévoit la généralisation de la régionalisation au 1er janvier 2002, toutes les régions devenant des autorités organisatrices pour les transports ferroviaires régionaux. Cependant, cette réforme présente deux insuffisances majeures : le peu de fiabilité des comptes de la SNCF, malgré les efforts qu'elle fournit, et votre choix de limiter la compensation aux régions, en refusant de nombreux amendements de nos collègues sur le fondement de leur irrecevabilité financière.
Dans ces conditions, pouvez-vous, monsieur le ministre, nous préciser vos intentions concernant la négociation de cette compensation ?
J'évoquerai, pour finir, la réforme du financement des transports en Ile-de-France et les voies navigables.
La loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains prévoit l'entrée de la région d'Ile-de-France au conseil d'administration du syndicat des transports parisiens ; cela a été confirmé hier soir.
Par ailleurs, la région contribuera au financement de l'exploitation, pour environ 1,5 milliard de francs en 2000. En contrepartie, la contribution de l'Etat est diminuée du même montant.
Le décret du 6 juillet 2000 prévoit des conventions pluriannuelles entre la RATP, la SNCF et le syndicat des transports parisiens. Il s'agit de responsabiliser les deux entreprises publiques sur des objectifs de service, de trafic et de maîtrise des charges.
Je pense que cette réforme va dans le bon sens. Nous en attendons toutefois, monsieur le ministre, des résultats concrets, notamment en termes de qualité de service.
Concernant les voies navigables, je ne vous poserai qu'une question : avez-vous l'intention, notamment dans le cadre des schémas de service, de donner à ce mode de transport les moyens de son développement ?
M. Jean-François Le Grand. Bonne question !
M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial. En conclusion, j'indique que la commission des finances a émis un avis défavorable quant à l'adoption des crédits de l'équipement, des transports et du logement pour 2001. (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants. - M. le président de la commission des finances applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Miquel, rapporteur spécial.
M. Gérard Miquel, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation, pour les routes et la sécurité routière. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cette année, l'analyse du budget des routes est rendue très délicate en raison de deux éléments : tout d'abord, le budget des routes n'existe plus formellement en raison de la fusion des crédits destinés aux routes, aux transports terrestres, aux voies navigables et au transport aérien au sein d'un même fascicule intitulé « transports » ; ensuite, la réintégration partielle des crédits du Fonds pour l'investissement des transports terrestres et des voies navigables, le FITTVN, brouille la lisibilité du budget.
Hors prise en compte des reports de crédits qui devraient intervenir en fin d'année, les moyens de paiement demandés pour les routes en 2001 atteignent 6,5 milliards de francs, soit une baisse par rapport aux crédits votés en 2000 de 17,7 %. Le mouvement est contrasté entre les crédits à l'entretien du réseau qui sont en progression pour 2001 et la diminution des moyens destinés au développement du réseau routier. En revanche, les autorisations de programme sont en progrès par rapport à 2000.
Je sais, monsieur le ministre, puisque vous l'avez dit devant la commission, que l'intégralité des crédits de paiement en compte au FITTVN devrait être reportée, dont 2,5 milliards de francs pour les routes, ce qui remettra à niveau les dotations. Mais la présentation d'un projet de budget en baisse, même en tenant compte des reports de crédits sur chacun des chapitres budgétaires, a pu créer une certaine inquiétude.
La raison de cette inquiétude est née de la suppression du FITTVN, après la suppression, l'an dernier, du Fonds pour l'aménagement de la région d'Ile-de-France, le FARIF.
Cette rebudgétisation fait notamment suite aux critiques de la Cour des comptes et de la mission d'évaluation et de contrôle menée par l'Assemblée nationale.
Le FITTVN jouait un rôle non négligeable dans le financement routier et autoroutier. Les programmes spécifiques d'aménagement du Massif central et la mise aux normes autoroutières de la route nationale 10 dans les Landes ont, par exemple, été financés sur le FITTVN depuis 1996.
La suppression du FITTVN permettra d'affecter au budget général des taxes dynamiques, particulièrement la taxe d'aménagement du territoire, qui alimentaient jusqu'à présent les investissements de transports.
Vous nous avez dit, monsieur le ministre, avoir obtenu que les dotations aux investissements de votre budget progressent comme la taxe anciennement affectée au FITTVN. Il sera nécessaire de contrôler le respect de cet engagement sur la durée.
Mais revenons-en aux grands sujets de cette année, qui connaît la première mise en oeuvre des nouveaux contrats de plan Etat-régions 2000-2006.
Les engagements du volet routier des contrats de plan Etat-régions du XIe Plan représentaient, en part Etat, un montant de 27,5 milliards de francs. Ces engagements ont été exécutés à 81,5 %. Le Gouvernement a décidé d'affecter 33,5 milliards de francs aux volets routiers contractualisés sur la période du XIIe Plan. Vous nous dites qu'une enveloppe de 4,43 milliards de francs financera la part de l'Etat dans le budget pour 2001.
Pourriez-vous nous préciser exactement, monsieur le ministre, les priorités de ces nouveux contrats de Plan ?
Pouvez-vous également nous préciser la coordination entre ces investissements sur la période 2000-2006 et les projets de schémas de services qui commencent à être publiés ?
S'agissant du programme routier et autoroutier, les mises en service progresseront en 2001 du fait de l'achèvement d'opérations en cours. Toutefois, les mises en chantier sont extrêmement faibles depuis deux ans en raison d'une sorte d'attente d'un nouveau modèle autoroutier.
L'an dernier, je soulignais combien l'année 2000 était une période de transition, avec la préparation des nouveaux contrats de plan et l'attente des résultats de la négociation menée par le gouvernement français avec la Commission européenne pour obtenir un allongement de la durée des concessions. Les résultats sont désormais connus, mais ils laissent beaucoup de questions en suspens pour l'avenir du financement autoroutier.
Pour 2001, une nouvelle ligne est apparue dans le budget des transports intitulée « Subvention pour la construction d'autoroutes concédées ». Elle n'est pas dotée, mais devrait être abondée en cours d'année. Elle est, en quelque sorte, le symbole de la réforme du financement autoroutier. Vous vous êtes, en effet, engagé dans la voie d'une modification profonde du financement de notre système autoroutier, en mettant un terme à la procédure de l'adossement. Votre décision a été confortée par un avis du Conseil d'Etat le 16 septembre 1999.
Par ailleurs, le Gouvernement a déposé un projet de loi qui vise, dans son article 4, à l'habiliter à prendre des ordonnances pour réformer notre système autoroutier sur les points suivants : suppression de la garantie de reprise de passif accordée par l'Etat aux sociétés concessionnaires, réforme des comptes des sociétés et prorogation des durées des conventions de concessions.
Votre objectif est de prendre appui sur la réforme des sociétés d'autoroutes pour obtenir de ces sociétés des résultats d'exploitation bénéficiaires constituant de nouvelles ressources pour l'Etat et permettre, notamment, mais pas essentiellement, de financer le développement du réseau autoroutier.
Pourtant, les contours de cette réforme sont encore flous.
Pourriez-vous, monsieur le ministre, nous donner des précisions sur les conséquences de la réforme en cours ? Nous souhaiterions notamment connaître, d'une part, le montant approximatif des dividendes attendus des sociétés d'autoroutes pour 2001 et 2002 et, d'autre part, le montant prévisible des subventions à verser pour les nouvelles concessions, c'est-à-dire la dotation de la ligne budgétaire laissée en blanc.
Je remarque, monsieur le ministre, que les sociétés d'autoroutes se portent de mieux en mieux. L'an dernier, votre ministère indiquait que l'endettement progresserait jusqu'en 2004. Désormais, l'endettement des six principales sociétés devrait atteindre 143 milliards de francs en 2002, pour diminuer ensuite régulièrement.
De surcroît, la Commission européenne a fait savoir, par un communiqué de presse le 4 octobre dernier, qu'elle avait décidé d'autoriser l'allongement de douze à quinze ans des durées de six concessions. Pourriez-vous, à ce sujet, nous indiquer les conséquences précises de la prolongation de la durée des concessions autoroutières sur leur redressement ?
J'en viens maintenant aux dotations à l'entretien du réseau routier national, qui sont revalorisées pour 2001. Je m'en réjouis, mais, globalement, l'effort reste faible. La revalorisation porte essentiellement sur les tunnels routiers alors que de nombreux ouvrages d'art nécessitent des interventions d'urgence.
Je sais, monsieur le ministre, que vous envisagez un programme pluriannuel d'entretien, doté des moyens nécessaires à la préservation de notre patrimoine. Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur ce point ?
J'en viens maintenant à mes observations sur la sécurité routière. Les crédits consacrés à la sécurité routière progresseront de 10,3 % en 2001, pour s'établir à près de 600 millions de francs.
Les moyens affectés à la communication nationale - presse, relations publiques, campagnes publicitaires - sont une nouvelle fois renforcés afin de pouvoir lancer des campagnes nationales importantes.
Comme l'an dernier, je me félicite de l'accent mis, en 2001, sur la sécurité routière. Je l'estime d'autant plus nécessaire que le retard pris par la France en la matière est important.
Toutefois, toute politique doit être évaluée. C'est pourquoi je me suis rendu à la Direction de la sécurité et de la circulation routières afin de me rendre compte de la politique menée en ce domaine. Les informations obtenues m'amènent à faire les remarques suivantes.
Tout d'abord, il est indéniable, monsieur le ministre, que vous avez réalisé d'importants efforts budgétaires en matière de sécurité routière. Ce budget est devenu prioritaire. Les dotations n'atteignent pas encore les points hauts de 1991-1993, mais elles s'en rapprochent et témoignent donc d'une véritable priorité gouvernementale.
Votre mobilisation s'explique par le fait que les résultats de la France en matière de sécurité routière ont été catastrophiques en 1998 : c'est le pays qui a connu la plus forte hausse du nombre de tués - 6 % - alors même que la plupart des autres pays européens enregistraient des diminutions.
L'année 1999 a donc été l'occasion d'une prise de conscience des efforts a accomplir. Le bilan de 1999 est un peu meilleur que celui de 1998, mais il s'établit tout de même à plus de huit mille tués, trente mille blessés graves et cent trente-cinq mille blessés légers.
Il m'apparaît donc urgent de procéder à une évaluation de notre politique de sécurité routière. Or je note que le budget de la sécurité routière souffre de dysfonctionnements dans l'utilisation de ses crédits.
Ainsi, en 1999, les crédits du chapitre affecté aux dépenses du délégué interministériel à la sécurité routière n'ont été consommés qu'à hauteur de 60 %. De même, 56 % seulement des dotations du chapitre consacré aux actions d'incitation ont été consommés. Enfin, 63 % des crédits de paiement des chapitres de dépenses en capital ont été consommés. Ces difficultés sont dues à la complexité des actions engagées et aux contraintes administratives qui en résultent.
Il conviendrait donc que les contraintes administratives soient allégées et que l'exécution des projets de la sécurité routière fasse l'objet d'un suivi attentif tout au long de l'année, afin d'éviter des retards très regrettables dans la mise en oeuvre des campagnes de prévention routière.
Par ailleurs, il est surprenant que votre ministère ne soit pas en mesure de donner des précisions sur les moyens en personnel et en fonctionnement du service de la sécurité routière. Celui-ci ne dispose pas de moyens propres et il n'existe aucun document de synthèse sur ce sujet. En coordination avec les propositions du dernier comité interministériel de la sécurité routière, je proposerai donc, en deuxième partie de la loi de finances, qu'un « jaune » budgétaire retrace l'effort de la nation en faveur de la sécurité routière.
Enfin, je regrette qu'aucune étude d'impact ne soit réalisée sur les actions menées par la Direction de la sécurité et de la circulation routières. Une évaluation des campagnes de communication serait pourtant très profitable. D'une manière générale, le suivi dans le temps de la politique de sécurité routière semble faible, celle-ci ayant davantage le souci de réagir à l'actualité.
La politique de sécurité routière ne doit pas être une politique expérimentale. Elle doit faire l'objet d'un suivi plus attentif, d'une évaluation de son action et, sans doute, d'une meilleure organisation, tant sur le plan interne au ministère de l'équipement, des transports et du logement que sur le plan interministériel.
Le dernier comité interministériel de la sécurité routière du 25 octobre 2000 a proposé une série de dispositions, qui semblent toutefois, pour l'essentiel, reprendre des dispositifs existants. Par ailleurs, on observe que certains de nos voisins européens - je pense à la Grande-Bretagne - connaissent de très bons résultats.
Pourriez-vous nous dire, monsieur le ministre, s'il existe une coopération avec nos voisins européens pour la politique de sécurité routière et ce qu'il a pu être retiré des exemples de réussite en matière de prévention routière comme en Grande-Bretagne.
En conclusion, j'aurais souhaité, à titre personnel, l'adoption du budget des routes et de la sécurité routière, mais je précise que la commission des finances a demandé au Sénat de rejeter les crédits du budget de l'équipement, des transports et du logement. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, le budget des transports atteindra, l'an prochain, 51,9 milliards de francs en moyens d'engagement, contre 50,7 milliards de francs l'an dernier. Les 48,4 milliards de francs que citait M. Cazalet ne concernent que les moyens de paiement. A cela, il convient d'ajouter les dotations de 12 milliards de francs à Réseau ferré de France.
Ce budget répond bien aux priorités que s'est données le Gouvernement. Pour 2001, il s'agit précisément de mettre en oeuvre les engagements de l'Etat dans le cadre des contrats de plan, notamment. A cet égard, monsieur Cazalet, je vous précise que, compte tenu de la forte relance de l'investissement ferroviaire, les crédits pour 2001 préparent la montée en puissance des opérations.
Ce budget tout entier, vous l'avez senti, est tourné vers le rééquilibrage modal.
A la politique du « tout routier » d'hier, nous opposons un développement durable, raisonné et complémentaire des différents modes de transport, donc de l'intermodalité.
Concernant le FITTVN, créé ici même, au Sénat, au cours de la discussion de la loi d'orientation de 1995 pour l'aménagement et le développement du territoire, son objectif était, en fait, de protéger une ressource qui avait tendance, il est vrai, à se raréfier. Ce dispositif présentait certains avantages, je ne les ai jamais niés. Il avait cependant aussi ses limites et peut-être même certains défauts sur lesquels je ne reviendrai pas ; ils ont été notamment soulignés par la Cour des comptes et par la mission d'évaluation et de contrôle de l'Assemblée nationale, qui regroupait d'ailleurs des députés de tous les groupes politiques.
Chacun peut, bien entendu, avoir sa propre opinion sur les avantages et les inconvénients de ce genre de fonds ou sur ceux de la budgétisation. Nous avons eu un vrai débat, nourri d'échanges, en commission des finances comme en commission des affaires économiques. Je pense qu'il convient de regarder vers l'avenir et de bien intégrer la réelle volonté de l'Etat de tenir les engagements contractualisés avec les régions.
J'ai obtenu pour cela des engagements interministériels qui, je crois, doivent être soulignés, ce qui devrait rassurer M. Miquel.
Les dotations pour les investissements dans les transports terrestres augmenteront au même rythme que tous les produits des taxes autoroutières, jusqu'à présent affectés au FITTVN. Il s'agit bien d'un engagement et d'un engagement de progression, sauf à considérer que, demain, il y aura de moins en moins de monde à circuler sur les autoroutes de France.
Tel est l'engagement pris. Il ne s'agit pas de réduire les moyens qui, évidemment, vont augmenter, et ce au même rythme que les produits des taxes autoroutières.
Vous évoquez, monsieur Cazalet, l'opacité des conditions de suppression de ce fonds. Non ! Ce terme est excessif ; je n'ai pas le sentiment que ce soit le cas, mais il est vrai que c'est toujours un peu déroutant de changer des habitudes, d'autant plus que la budgétisation du fonds s'accompagne, cette année, du remplacement des agrégats sectoriels par des agrégats transversaux, correspondant d'ailleurs mieux à l'esprit des schémas de services qui ont été proposés récemment.
Cette présentation devrait permettre de mieux appréhender la priorité donnée à l'intermodalité dans la politique des transports. J'ai d'ailleurs demandé qu'un bilan de l'intermodalité et de son financement soit présenté au Parlement à la mi-2002.
Le projet de budget pour 2001 traduit une augmentation de 10 % des crédits d'investissement pour les transports ferroviaires et les voies navigables ; 4,482 milliards de francs sont également prévus au titre du désendettement de la SNCF.
On assiste aujourd'hui à un véritable renouveau du transport ferroviaire. Il faut le consolider et le renforcer par un programme d'investissements ambitieux et équilibré. Je pourrais citer des exemples mais, pour respecter les consignes de M. le président, je me dois de raccourcir mon propos. (Sourires.)
Concernant la circulation du fret, le Gouvernement a fixé l'objectif d'un doublement en dix ans. Je peux vous confier que, si son développement se poursuit au rythme qui est le sien depuis le début de l'année, ce n'est pas en dix ans qu'il doublera, ce sera en six ans ! Mais il faut lever les obstacles, notamment faire disparaître les goulets d'étranglement. (M. Gérard Larcher sourit.) Je ne développe pas, vous voyez ce que je veux dire !
L'Etat apportera une contribution de 1,7 milliard de francs d'autorisations de programme aux investissements ferroviaires en 2001, ce qui représente un doublement de l'enveloppe par rapport à 1997. Cette dotation sera répartie de manière équilibrée entre les dépenses pour la grande vitesse et les dépenses pour la modernisation du réseau classique, dont l'essentiel est désormais prévu et financé dans le cadre des contrats de plan Etat-régions.
En ce qui concerne le pourcentage d'exécution des contrats de plan ferroviaires, les études nécessaires aux opérations contractualisées seront réalisées pour près de 60 % à la fin 2001.
La baisse des investissements de RFF que vous avez observée est due, monsieur le rapporteur spécial, à un « creux » entre l'achèvement du TGV Méditerranée et la montée en puissance du TGV Est-européen. Cette baisse est donc normale et passagère : les investissements augmenteront au fur et à mesure pour réaliser le TGV Est, et les autres ! La fixation du niveau des redevances d'usage des infrastructures ferroviaires est un sujet très complexe, comme vous le relevez, monsieur Cazalet. Certes, elles constituent simultanément une charge pour la SNCF et une recette pour RFF. Il convient de se fonder sur un juste équilibre.
Monsieur Cazalet, lors de la conciliation sur le « paquet ferroviaire », la semaine dernière, à Bruxelles, nous avons réussi à faire admettre le principe d'une tarification au coût marginal.
Mais il faut éviter que la question des redevances ne masque le vrai problème que constitue l'endettement du système ferroviaire. Cette question reste à régler et nous devons la résoudre le plus vite possible.
J'ai effectivement parlé d'UMTS, monsieur Cazalet. Pourquoi pas ? Mais, franchement, je prendrai toute solution pourvu qu'elle soit bonne. J'espère que le groupe de travail constitué au sein du comité d'investissement à caractère économique et social, le CIES, pourra nous faire des propositions le plus tôt possible, c'est-à-dire avant la fin de l'année.
Comme vous l'avez rappelé, monsieur Cazalet, la loi SRU prévoit le transfert, à compter du 1er janvier 2002, de l'organisation et du financement des services régionaux de voyageurs aux régions.
La contribution aux services régionaux de voyageurs prévue dans le projet de budget pour 2001 s'élève à 6,341 milliards de francs et augmente de 300 millions de francs. Cette progression a pour objet de préparer le transfert en 2002 dans des conditions de neutralité financière pour les régions. En effet, au titre de ce transfert de compétences, la compensation tiendra compte de l'exploitation des services ferrés, d'un renouvellement plus rapide du matériel roulant ainsi que d'une compensation pour l'application des tarifs sociaux. La négociation sur son montant interviendra à l'occasion du projet de loi de finances pour 2002, sur la base des comptes 2000 qui seront produits par la SNCF. Si nécessaire - je m'y suis engagé - la loi SRU a prévu de réviser cette référence. Une participation de l'Etat à un programme d'investissement est également prévue pour aider les régions à moderniser les gares à vocation régionale.
A l'instar de la priorité donnée à la modernisation du réseau ferroviaire, la réhabilitation de la voie d'eau constitue, monsieur Cazalet, un des leviers de la politique intermodale du transport. Les crédits consacrés à la remise à niveau et à l'amélioration du réseau des voies navigables, soit 548 millions de francs, progresseront de 10 % en 2001, soit 60 % de plus par rapport à 1997.
Monsieur Miquel, vous avez insisté sur la route et la sécurité routière. Les engagements contractualisés et la sécurité des usagers constituent les deux priorités du budget dans le domaine routier. Ainsi, les programmes contractualisés, qui portent sur une enveloppe de 87 milliards de francs, dont 33,4 milliards de francs de part de l'Etat, bénéficieront d'une enveloppe de 4,43 milliards de francs, en augmentation de 11,9 % sur celle du budget 2000. Le taux d'avancement de ces contrats atteindra ainsi 25,1 % fin 2001, ce qui montre que on est bien dans la phase de réalisation.
Ces crédits permettront de poursuivre l'adaptation du réseau aux besoins de la politique d'aménagement du territoire.
En réponse à votre question, monsieur Miquel, les volets routiers des nouveaux contrats de plan comportent trois priorités. Il s'agit, tout d'abord, de la sécurité routière, dont l'enveloppe passera de 1 milliard de francs à 2 milliards de francs. La sécurité a été l'un des critères de choix des projets neufs.
Ensuite, des efforts seront faits pour investir dans les agglomérations. Il m'est apparu nécessaire de réduire les inégalités entre les régions en termes de service : la répartition adoptée pour le XIIe plan va dans ce sens. La mise à jour des contrats de plan prévue en 2003, ce qu'on appelle la « clause de revoyure », sera l'occasion d'apporter les ajustements nécessaires.
Concernant le secteur autoroutier, la réforme du financement des autoroutes concédées conduit à externaliser les subventions généralement nécessaires pour assurer la viabilité des nouvelles concesions d'autoroutes. A cet effet, la nomenclature budgétaire 2001, prévoit, au chapitre 64-44, un nouvel article 90 intitulé : « Subventions pour la construction d'autoroutes concédées ». Cet article n'est pas doté dans le projet de loi de finances, parce qu'aucune concession de ce nouveau type n'est encore prête à être financée.
La réforme du secteur autoroutier a été accueillie favorablement à Bruxelles, après deux ans de négociations. La durée des concessions sera allongée de douze à quinze ans.
Par ailleurs, les sociétés d'économie mixte concessionnaires d'autoroute, les SEMCA, seront désormais dotées d'un régime comptable et fiscal de droit commun qui leur permettra de répondre aux appels d'offres. Le montant des subventions à verser dans les sept prochaines années pour les projets autoroutiers concédés devrait être, en moyenne, de 1,9 milliard de francs par an, valeur 1999. Sur la période 2001-2006, le résultat avant impôt de ces sociétés devrait représenter 2,4 milliards de francs par an.
J'en viens à la sécurité routière. Aujourd'hui, à l'inverse de ce qui prévalait en 1997 et en 1998, on constate une réduction du nombre des tués sur la route. A ceux qui me disaient qu'on ne pouvait pas réduire le nombre des tués, que c'était une fatalité, nous sommes en train d'apporter la démonstration du contraire.
Les baisses observées en 1999 et en 2000, certes insuffisantes, je suis le premier à l'admettre, sont toutefois parmi les plus importantes enregistrées dans tous les pays d'Europe. C'est un élément important à relever.
Les crédits pour la sécurité routière augmentent de 10,3 %. Qu'il faille faire plus et mieux, j'en suis d'accord avec vous. Il faut prendre toutes les mesures utiles pour améliorer la sécurité routière.
Enfin, monsieur Miquel, concernant l'Europe, nous sommes intervenus et nous continuons dans ce sens auprès des instances européennes, afin que nous parvenions à une meilleure coopération en faveur de la sécurité routière, notamment en proposant un limiteur de vitesse modulable et en demandant le lancement d'une campagne contre la conduite en état alcoolique à l'échelle européenne. (M. le président de la commission des finances et MM. les rapporteurs spéciaux applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. Berchet, rapporteur pour avis.
M. Georges Berchet, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan, pour les transports terrestres. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en qualité de rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, j'aborderai, ici, uniquement les problèmes d'actualité et les points significatifs, vous renvoyant, pour les données chiffrées, au rapport écrit.
Le budget des transports terrestres pour 2001 s'inscrit dans une perspective de rééquilibrage des modes de transport et de développement de l'acheminement du fret par rail, avec priorité donnée à la sécurité, objectifs dont on ne peut que se féliciter.
Cependant, ce budget est également caractérisé par la disparition du fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables, le FITTVN, beaucoup plus préoccupante.
La budgétisation de ce compte d'affectation spéciale laisse planer des incertitudes sur la pérennité de l'effort public en faveur des grandes infrastructures. Pouvez-vous nous assurer encore, monsieur le ministre, que le crédits affectés auparavant à ce fonds seront intégralement transférés dans le budget avec des destinations analogues et que l'aménagement du territoire ne s'en trouvera pas pénalisé ?
Le FITTVN, créé en 1995, avait déjà été considérablement détourné de ses objectifs initiaux, mais sa suppression impose une extrême vigilance quant à l'effort consenti par l'Etat pour la réalisation et l'amélioration des grandes infrastructures.
Vous avez fixé comme objectif le doublement du fret d'ici à 2010 et l'on ne peut que vous féliciter d'une telle orientation, monsieur le ministre. Mais quels moyens concrets mettrez-vous en oeuvre ?
Actuellement, le rail achemine seulement 20 % du fret, et des investissements très importants s'imposent pour aller au-delà.
Il convient de noter que, paradoxalement, GEODIS, filiale de la SNCF, est l'un des plus gros transporteurs routiers d'Europe.
La question du fret amène tout naturellement à évoquer l'existence des corridors de fret européens, dont deux passent par la France. Leur développement s'inscrit dans le cadre du futur réseau transeuropéen, qui nécessite effectivement, monsieur le ministre, une amélioration de l'interopérabilité.
En ce qui concerne la libéralisation du rail, des exemples étrangers ont mis en évidence les graves conséquences d'une privatisation trop rapide et mal contrôlée. D'ailleurs, selon un sondage récent, une majorité de Britanniques - 56 % - sont favorables à une renationalisation de leurs chemins de fer.
Quelles mesures entendez-vous prendre, monsieur le ministre, afin que des accidents semblables à ceux qui viennent de se produire en Grande-Bretagne ne surviennent pas en France ?
Durant l'année 2000, le réseau à grande vitesse a vu la poursuite des programmes d'études et de réalisation des différents TGV, le TGV Méditerranée, la branche sud du TGV Rhin-Rhône, le projet franco-espagnol Perpignan-Figueras, la section internationale du projet Lyon-Turin, le TGV Aquitaine et le TGV Bretagne - Pays de la Loire.
En ce qui concerne le TGV-Est européen, sa première phase vient d'être engagée. Sa réalisation procurera une nette amélioration de la desserte de l'est de la France avec des gains de temps importants entre Paris et Reims, Strasbourg, Metz, Nancy, et par la desserte de Saint-Dizier par rames TGV.
Le conseil régional de Champagne-Ardenne a subordonné sa contribution financière pour la réalisation du TGV-Est à l'électrification de la ligne Paris-Bâle, et l'Etat s'est engagé à participer à hauteur de 25 % du coût d'une électrification phasée.
Le contrat de plan 2000-2006, qui vient d'être signé, consacre une première tranche de financement de 300 millions de francs à l'électrification de la section Paris-Troyes. La poursuite de l'électrification jusqu'à Chalindrey et Vesoul s'impose pour éviter des ruptures de charges et la consommation de fuel sous ligne électrifiée.
Il convient d'ailleurs d'électrifier la totalité du réseau SNCF. Actuellement, la moitié du réseau ne l'est toujours pas, ce qui nécessite l'utilisation de motrices diesel entraînant des nuisances en matière tant de bruit que de pollution, comme l'illustre le dépôt de la Villette.
De surcroît, la France dispose d'un excédent d'énergie électrique d'origine nucléaire, actuellement vendue à l'étranger.
Ne pensez-vous pas, monsieur le ministre, qu'il vaudrait mieux, dans l'intérêt des générations futures, préserver le pétrole, carburant fossile non renouvelable, pour les recherches et l'exploitation de la pétrochimie ? Nous lutterions ainsi contre l'effet de serre, auquel la conférence de La Haye a consacré ses travaux, sans obtenir l'unanimité des participants.
Pour en terminer avec l'électrification, j'évoquerai l'itinéraire Dijon-Calais, qui permet le transit du fret Transmanche-Méditerranée et traverse le département de la Haute-Marne. Il s'agit d'un vecteur économique essentiel irriguant les sites industriels de la vallée de la Marne et la plate-forme multimodale de Chalindrey.
Cette liaison figure parmi les lignes retenues, monsieur le ministre, dans votre projet d'amélioration des axes ferroviaires. Toutefois, ne pensez-vous pas que seule l'électrification de cette liaison apporterait une véritable modernisation ?
Cela concourrait efficacement au développement du transport de fret par rail, en parfaite complémentarité, d'ailleurs, avec l'électrification de la ligne Paris-Bâle, et dans l'esprit même des orientations ministérielles, car diminuer le volume de fret acheminé par la route, c'est réduire le risque d'accidents.
J'aborderai en quelques mots le problème préoccupant de l'endettement de la SNCF et de RFF.
Au 31 décembre 1999, l'endettement de RFF s'élevait à 170 milliards de francs. Actuellement, l'endettement global du secteur ferroviaire avoisine donc 253 milliards de francs.
La vente des actifs immobiliers transférés en 1997 à RFF était censée compenser la dette héritée de la SNCF - chacun le sait - mais le rythme annuel des ventes est lent - on se demande d'ailleurs pourquoi - et les ressources dégagées ne sont donc pas de nature à réduire de façon substantielle l'endettement de RFF.
Dans ce contexte, il est légitime de s'interroger, comme le fait d'ailleurs le Conseil supérieur du service public ferroviaire, sur sa capacité d'investissement, qui a d'ailleurs nettement baissé en cinq ans.
Le Conseil supérieur du service public ferroviaire recommande la résorption de la dette de la SNCF et de RFF afin qu'ils disposent d'une capacité d'autofinancement suffisante. Il préconise la mise en place, par l'Etat, d'un programme d'aide exceptionnel et pluriannuel.
Monsieur le ministre, quelle suite entendez-vous donner à cette recommandation et à cette suggestion ?
J'en viens à la RATP.
L'évolution du trafic est globalement positive. Il convient de préciser que l'exercice 1999 présente un solde positif de 26,6 millions de francs et que les charges ont baissé de 64,9 millions de francs du fait d'une diminution des dépenses de fonctionnement.
Le métro, avec ses cent ans, se porte bien. Sans doute mérite-t-il encore quelques améliorations. Le programme d'investissement prévoit essentiellement la poursuite ou l'achèvement d'opérations entamées, notamment Météor.
En ce qui concerne les conflits collectifs, la procédure d'alarme sociale qui anticipe l'événement est désormais bien inscrite dans la politique de dialogue de l'entreprise avec les syndicats et paraît donner de bons résultats.
Le rapport précise l'évolution, hélas ! positive, du vandalisme et de la fraude. Les transports collectifs en province sont également traités dans le rapport.
La commission des affaires économiques et du Plan, dans sa réunion du 15 novembre dernier, a décidé de s'en remettre à la sagesse du Sénat pour l'adoption des crédits des transports terrestres dans le projet de loi de finances pour 2001. (Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Gruillot, rapporteur pour avis.
M. Georges Gruillot, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan, pour les routes et les voies navigables. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission des affaires économiques s'intéresse de très près à toutes les politiques de transport car elles conditionnent très largement les performances économiques de notre pays, donc l'emploi et le niveau de vie de nos concitoyens. Elles sont également le moyen privilégié pour orienter l'organisation de notre territoire national.
Selon les choix opérés dans le domaine des transports, il est possible, sans beaucoup de risques d'erreur, de connaître par avance le devenir de telle ou telle partie de notre pays et le devenir du pays tout entier. Monsieur le ministre, la commission des affaires économiques du Sénat sait que vous partagez cette analyse et reconnaît toute votre bonne volonté dans ce domaine.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Vous le voyez, monsieur le ministre, c'est pas mal !
M. Georges Gruillot, rapporteur pour avis. C'est particulièrement vrai, parmi les avis que j'ai à rapporter ici, pour la sécurité routière.
Dès votre arrivée à la tête de ce grand ministère, constatant que la France était, en ce domaine, pratiquement la plus mauvaise élève de la classe européenne, vous avez voulu vous attaquer à ce fléau, et je crois que vous vous en êtes fait donner les moyens.
Vos budgets ont progressé d'année en année et vous ont permis de mettre en place une politique qui commence à donner des résultats. Certes, le cheminement reste difficile et il vous faudra, à ce rythme, un certain nombre d'années pour rejoindre, en matière de sécurité routière, les meilleurs pays européens.
Pour 2001, les crédits progressent de 10,2 % en moyens de paiement ; on l'a déjà indiqué.
L'insécurité routière, dans la grande majorité des cas, est due aux mauvais comportements des conducteurs et à leur incivisme ; c'est ainsi que, dans les causes reconnues des accidents de la route, viennent en tête la conduite en état d'ébriété et les excès de vitesse. Mais, monsieur le ministre, la qualité des infrastructures routières est également pointée parmi les causes d'accident pour 34 % des cas en ce qui concerne leur conception et pour 24 % des cas s'agissant de leur entretien. Et là, en matière de routes, votre bonne volonté et votre bonne humeur ne suffisent plus. Il faut également des crédits, beaucoup de crédits.
M. Jean-François Le Grand. C'est vrai !
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. C'est moins bien !
M. Georges Gruillot, rapporteur pour avis. Paradoxalement d'ailleurs, plus la situation économique de la France s'améliore et donc plus les rentrées fiscales s'amplifient, plus les crédits d'équipements routiers diminuent.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Tout passe en fonctionnement !
M. Georges Gruillot, rapporteur pour avis. Bercy est tout-puissant contre le bon sens et la bonne volonté.
En 1998, on assistait à une stabilisation des dotations en dépenses et en crédits de paiement - 0,4 % - mais les crédits inscrits au chapitre routier du FITTVN progressaient, eux, de 14,1 %.
En 1999, les crédits des routes étaient apparus comme « sacrifiés ». Les investissements sur la voirie nationale étaient réduits de 13 % alors que les crédits dévolus aux routes dans le FITTVN subissaient une baisse de 13,3 %.
En 2000, la dotation globale aux routes - dépenses ordinaires et crédits de paiement - diminue de 9,65 %, les dépenses en capital de 13 % et les crédits en provenance du FITTVN de 4 %.
Pour 2001, dans le projet de budget qui nous intéresse aujourd'hui, les moyens de paiement que le Gouvernement se propose de consacrer aux routes atteignent 6,5 milliards de francs, soit une réduction de 17 % par rapport aux crédits pour 200.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Ce n'est pas bien !
M. Georges Gruillot, rapporteur pour avis. La part des routes dans l'ensemble des crédits affectés aux transports passera de 13 % en 2000 à 11,4 % en 2001.
M. Jean-François Le Grand. Eh oui !
M. Georges Gruillot, rapporteur pour avis. Le Gouvernement pourra, bien sûr, faire valoir que les autorisations de programme s'élèvent à 7,9 milliards de francs, en progression de 6,8 %. Cependant, elles représentent, en tout état de cause, une part décroissante du budget des transports : 56,4 % en 2000 contre 53,8 % en 2001.
Plus grave, sur un montant de crédits de paiement de 6,5 milliards de francs, seulement 2,8 milliards iront au développement du réseau routier, somme en diminution de 38,1 % par rapport à 2000.
Rappelons que le développement du réseau autoroutier est financé sur des ressources extrabudgétaires : financement privé pour les autoroutes concédées et FITTVN, jusqu'à présent, pour les autoroutes publiques.
Les chiffres que je viens d'évoquer devant vous, monsieur le ministre, mes chers collègues, concrétisent le bien-fondé des inquiétudes si souvent exprimées par notre commission des affaires économiques. Ils résument, d'une certaine manière, la philosophie du Gouvernement sur le sujet.
Je dirai quelques mots sur les crédits affectés aux voies navigables. Ainsi qu'on le sait et comme d'habitude, ils sont extrêmement modestes.
Jusqu'à présent, les dotations budgétaires étaient anecdotiques et figuraient au chapitre 35-41, relatif à l'entretien des voies navigables non confiées à Voies navigables de France, et au chapitre 44-20, relatif aux interventions sociales en faveur de la batellerie. Pour 2001, ces chapitres seront dotés respectivement de 1 million et de 7 millions de francs.
L'essentiel de l'effort en faveur du transport fluvial relevait du FITTVN qui avait inscrit, par exemple, pour 2000 une dotation de 500 millions de francs.
En 2001, les crédits du FITTVN seront vraisemblablement réintégrés au budget général. Ainsi, seront inscrits 550 millions de francs en autorisations de programme et 165 millions de francs en crédits de paiement.
Je rappellerai, pour mémoire et afin de fixer un peu les idées, que l'établissement public Voies navigables de France estime le coût annuel de maintenance du réseau à environ 500 millions de francs et le coût d'une véritable remise en état de l'existant qui lui est confié, soit quelque 7 000 kilomètres de voies, à une somme comprise entre 7 milliards et 17 milliards de francs.
Avec si peu de possibilités financières et compte tenu de ce qui apparaît comme un manque de volonté du Gouvernement de s'intéresser à la voie d'eau, alors que les besoins augmentent, comment peut-on encore valablement parler d'une mise en place d'un réseau fluvial à grand gabarit ? Après la disparition politique de la liaison Rhin-Rhône, au moins pouvait-on espérer voir se réaliser l'indispensable liaison Seine-Nord, dans un délai correct, et la liaison Seine-Est. Par défaut, dans ce domaine capital pour l'avenir économique du pays et son intégration dans l'Europe, nous accumulons des retards dramatiques.
Monsieur le ministre, s'agissant de la SNCF, vous avez, nous semble-t-il, les yeux de Rodrigue pour Chimène (Sourires), vous mettez en place, à ce titre, ce qui pourrait s'appeler une politique du chemin de fer. Nous l'approuvons et nous la soutenons. Cependant, le Gouvernement n'a plus, me semble-t-il, de politique de la route,...
M. Jean-François Le Grand. Eh oui !
M. Georges Gruillot, rapporteur pour avis. ... et n'a pas de politique de la voie d'eau.
M. Jean-François Le Grand. Hélas !
M. Georges Gruillot, rapporteur pour avis. Comment pouvez-vous alors parler de multimodalité ? La multimodalité, c'est l'utilisation la meilleure possible de tous les moyens de transports pour servir au mieux les usagers dans le souci permanent des délais, des coûts, des consommations énergétiques, de notre environnement bien sûr - et sur ce point, arrêtons d'opposer bêtement développement et respect de notre environnement - de la sécurité des personnes et des biens, etc.
Il faut non pas jouer un moyen contre l'autre ou inversement, mais conjuguer intelligemment l'ensemble des moyens de transport.
M. Jean Puech. Très bien !
M. Georges Gruillot, rapporteur pour avis. A ce stade de mon exposé, monsieur le ministre, je voudrais vous dire que vous ne pourrez longtemps encore - et la commission des affaires économiques partage cette analyse - éviter de conduire un vaste débat national sur les transports et sur les moyens à mettre en oeuvre.
M. Jean Puech. Très bien !
M. Georges Gruillot, rapporteur pour avis. Dans ce domaine, nous travaillons pour le siècle qui s'ouvre devant nous. Arrêtons de raisonner au jour le jour pour faire face aux urgences. Préparons l'avenir à vingt ans, à trente ans ou à cinquante ans.
M. Jean-François Le Grand. Très bien !
M. Georges Gruillot, rapporteur pour avis. Prenons réellement en compte la « donne » européenne. Par exemple, nos grands ports de la façade atlantique et de la Manche ont absolument besoin du grand gabarit de Seine-Nord pour être correctement reliés au reste de l'Europe. Marseille, dont on veut faire, à juste titre, l'ouverture de l'Europe occidentale sur les pays méditerranéens doit être irrigué et l'axe Rhin-Rhône est là tout à fait essentiel.
La France a besoin de ce grand débat prospectif, en dehors des clans et des chapelles. Le Sénat, quant à lui, est prêt à y prendre toute sa place.
Encore faudra-t-il, après la réflexion, conduire l'action et mettre en place des politiques adaptées et les crédits nécessaires.
Les politiques, nous en avons déjà une expérience, et je veux parler là du schéma directeur routier national de 1992 : il était très ambitieux et il prévoyait la mise en place de quelque 3 500 kilomètres d'autoroutes concédées et de 2 500 kilomètres d'autoroutes hors péage. A ce jour, il est réalisé à plus de 80 %, et nous portons à votre crédit la volonté de le terminer.
Mais alors, monsieur le ministre, pourquoi refusez-vous aujourd'hui de mettre en chantier un nouveau schéma directeur qui pourrait prendre le relais de celui de 1992 ?
Pour les finances, c'est encore plus difficile - vous le savez mieux que quiconque -, mais des solutions sont possibles. C'est bien pour faire face à ce type de difficulté et par souci d'efficacité que, après une longue réflexion, la commission des affaires économiques, à la demande de son président, M. Jean François-Poncet, et le Sénat tout entier ont créé par voie législative, en 1995, le FITTVN.
Aujourd'hui, le Gouvernement supprime ce fonds - nous venons d'en parler, mais il faut y insister - pour le noyer dans le budget général. Nous savons que c'est contre votre volonté puisque, l'année dernière encore - et vous l'avez réaffirmé tout à l'heure - vous nous disiez tout le bien que vous en pensiez. C'est donc un changement récent.
La commission des affaires économiques déplore très fortement la disparition du FITTVN, pour une raison de fond - l'argent va vraisemblablement manquer - mais aussi pour une raison de forme : quel affront, monsieur le ministre, est fait là au Sénat et à l'ensemble de la représentation parlementaire avec la suppression, par une manoeuvre purement technique, de ce qu'une législation d'origine parlementaire avait créé ! (M. Le Grand applaudit.)
M. le président. Il vous faut conclure, mon cher collègue.
M. Georges Gruillot, rapporteur pour avis. Je termine, monsieur le président !
Enfin, je voudrais que vous nous indiquiez ce que deviendront les quatre milliards de francs qui resteront en solde positif dans le FITTVN à la fin de cette année, quand ce fonds sera définitivement mort. Que va-t-on en faire ? Et pourquoi sont-ils encore là, alors qu'ils ont déjà été programmés en dépenses ?
Je souhaite, monsieur le ministre, que vous puissiez répondre clairement à toutes nos interrogations et lever les incertitudes qui demeurent. Vous pourriez ainsi calmer certaines de nos appréhensions et, peut-être, laisser entrevoir cette mise en place d'une grande politique dont la France a besoin et que nous appelons de tous nos voeux. Nous sommes prêts à y travailler avec vous.
Mais, aujourd'hui, la commission des affaires économiques ne peut qu'émettre un avis défavorable à l'adoption des crédits des routes et voies navigables que vous nous proposez. (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. Mes chers collègues, avant de donner la parole à M. le ministre pour répondre à MM. les rapporteurs pour avis, permettez-moi de faire une observation : il est évident que si les rapporteurs pour avis posent beaucoup de questions - je serais tenté de dire « trop de questions » -,...
Mme Hélène Luc. Il faudra donner le temps au ministre de répondre !
M. le président. ... M. le ministre se trouve alors, compte tenu du fait que son temps de réponse est limité, dans une position délicate.
Mme Hélène Luc. Eh oui !
M. le président. Mais je suis sûr que M. le ministre va s'efforcer de rester dans les limites raisonnables de son temps de réponse !
Mme Hélène Luc. Il faut quand même lui donner le temps de répondre !
M. le président. C'est ce que je fais, madame la présidente !
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. MM. les rapporteurs pour avis ont évoqué à leur tour les conséquences de la budgétisation du FITTVN. Ayant déjà répondu sur ce point, je me contenterai de rappeler les assurances que j'ai reçues de Bercy quant à l'intégralité des reports sur le budget général, et ce dès 2001.
Vous avez raison, monsieur Berchet, de dire que l'objectif de doublement du fret ferroviaire ne pourra être atteint à moyens constants. Il y aurait, sinon, une dégradation du service et des tensions sur l'appareil de production, situation dont se plaignent d'ailleurs déjà les cheminots et les chargeurs. Il faut donc augmenter ces moyens, ce dont je suis parfaitement conscient.
Les moyens ne se limitent bien sûr pas aux effectifs. Le manque ou l'obsolescence du matériel roulant constituent un obstacle au développement. C'est pourquoi, dans le cadre du CIES, dont j'ai parlé tout à l'heure, nous avons autorisé, avec M. Laurent Fabius, la SNCF a programmer l'acquisition de 620 locomotives, ce qui est énorme.
M. Jean-François Le Grand. Il faut aussi des rails ! (Sourires.)
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Une première tranche de ce programme a été lancée à hauteur de 120 locomotives, qui seront livrées à partir de l'an prochain.
Le développement du fret, comme des autres trafics ferroviaires, nécessite l'amélioration des infrastructures pour accroître leur capacité, notamment dans les goulets d'étranglement.
Il est probable qu'un premier service de route roulante - dite « autoroute ferroviaire » - pourra être expérimenté de manière progressive dès 2002 sur la ligne existante passant à Modane. Limité tout d'abord à la Maurienne, ce service pourra être étendu ensuite à l'ouest du massif de la Chartreuse grâce à la réalisation d'un nouveau franchissement en tunnel de ce massif. Cet ouvrage, qui constituera une amorce d'un nouvel accès au futur tunnel transalpin, permettra en outre à moyen terme de délester Chambéry d'une partie du trafic de fret.
Je pense qu'il faut rappeler que nous avons obtenu tout à fait récemment de l'Europe qu'elle contribue au financement de ces opérations de désaturation du réseau. J'en profite pour dire qu'il faut se féliciter de l'accord intervenu sur la réforme des trois directives communautaires du « paquet ferroviaire » qui constituent, à mon avis, une avancée. Le droit d'accès sera garanti pour les entreprises ferroviaires titulaires d'une licence et accessible dans les conditions d'harmonisation tarifaire et de sécurité pour le trafic de fret international. Je partage la préoccupation exprimée de ne pas voir le libéralisme devenir la réalité du secteur ferroviaire dans notre pays. Ce qui se passe en Grande-Bretagne suscite beaucoup d'inquiétudes de ce point de vue.
« Comment la France entend-elle maintenir le niveau de sécurité ferroviaire ? », a demandé M. Berchet.
Je répondrai aussi à M. Gruillot, qui m'a interrogé sur la sécurité des tunnels. A la suite de la catastrophe du tunnel du Mont-Blanc, un diagnostic a été effectué pour trente-neuf tunnels de plus d'un kilomètre de longueur du réseau routier français, ainsi que pour des tunnels ferroviaires. Un programme d'actions, qui peut être chiffré à 2 milliards de francs sur le réseau de l'Etat, concédé et non concédé, a été décidé. Il devrait s'étaler sur une période de cinq ans. Le projet de loi de finances pour 2001 prévoit ainsi 175 millions de francs pour les tunnels non concédés.
Enfin, une instruction technique détaillée définissant les dispositions de sécurité auxquelles les nouveaux tunnels devront répondre a été diffusée le 25 août dernier. Elle tient compte des recommandations du rapport de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques sur les moyens nécessaires à mettre en oeuvre pour améliorer la sécurité des tunnels routiers et ferroviaires.
En ce qui concerne l'électrification de la ligne Paris-Bâle, monsieur Berchet, j'ai soutenu la réalisation de cette opération dès 1999, avec un engagement sur une participation financière de l'Etat à hauteur de 25 %. L'importance de l'investissement conduit toutefois à prévoir une réalisation par étapes de cette électrification, avec une première phase, entre Gretz et Troyes, qui représente un coût d'environ 1,2 milliard de francs. Les études d'avant-projet de cette opération sont sur le point d'être lancées.
La maîtrise de l'endettement du système ferroviaire est une question essentielle pour l'avenir du secteur dans son ensemble. C'est pourquoi le Gouvernement s'est attaqué, dès 1997, à cette question. S'agissant de RFF, le Gouvernement a décidé, je le rappelle, un apport de 37 milliards de francs de dotations sur la période 1999-2001, afin de consolider la situation financière de l'établissement.
Bien entendu, il s'agit d'une première étape, et il faut maintenant penser à l'avenir. Afin de préparer les décisions à prendre, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et moi-même avons demandé à un groupe de travail d'examiner les perspectives financières de RFF et de faire des propositions pour la pérennité financière de la réforme ferroviaire. Ces travaux sont en cours. Le Conseil supérieur de service public ferroviaire, qui est chargé par décret d'établir l'an prochain un bilan de la réforme, aura également l'occasion de s'exprimer sur la question.
M. Gruillot m'a interrogé sur les ouvertures d'autoroutes concédées au-delà de 2001 : 563 kilomètres d'autoroutes étaient en chantier au 30 juin 2000, 305 kilomètres seront ouverts en 2001 et 148 kilomètres devraient être ouverts en 2002 : ce sont les liaisons Toulouse-Pamiers, Angers-Mortagne et Tulle-Ussel. Les prévisions pour 2003 sont aujourd'hui de 172 kilomètres.
Je souhaite apporter maintenant une réponse concernant les routes : j'ai entendu M. Gruillot parler de la baisse de 17 % des investissements routiers. Lorsque vous citez ce chiffre - j'y insiste - vous ne vous référez qu'aux seuls moyens de paiement, c'est-à-dire aux crédits de paiement.
Pourtant, les moyens d'engagement - autorisations de programme et dépenses ordinaires - c'est-à-dire les travaux qui seront réalisés ou lancés, affichent une augmentation de 6 % en 2001, soit plus que la moyenne de l'ensemble du budget.
Quant aux moyens de paiement - je l'ai déjà dit et je le redis devant vous pour que vous en teniez compte - ils seront abondés par le report des crédits du FITTVN et progresseront de 2,6 %. Par conséquent, ne répétez plus qu'il y a une baisse sur ce secteur !
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Mais les gens ne roulent pas sur les autorisations de programme ! Ils roulent sur des routes ! En tout cas, c'est ainsi que cela se passe dans mon département ! (Sourires.)
M. Jean-François Le Grand. Très bien !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Bien entendu ! C'est pour cela qu'il importe de les réaliser ! Ce sont les autorisations de programme et les dépenses ordinaires qui permettent de réaliser les travaux, pour que les usagers roulent sur des routes, monsieur le président de la commission des finances !
S'agissant du programme pour les voies navigables, les 500 millions de francs du FITTVN inscrits dans le projet de loi de finances en 2000 passeront à 550 millions de francs en 2001, soit une augmentation de 10 %. On ne peut pas dire, là non plus, qu'il y a régression ou abandon, bien au contraire ! Cela permet de mettre en oeuvre les engagements du contrat de plan.
Quant au projet Seine-Nord, il est retenu dans la perspective des schémas de service. Il s'agit non pas d'abandonner les choses, mais de les réaliser dans de bonnes conditions. Je précise que nous disposons sur ce projet des études nécessaires qui ont permis au Gouvernement d'inscrire l'objectif d'un aménagement progressif de la liaison Seine-Nord à grand gabarit dans le projet de schéma de services de transport de marchandises, qui va être soumis à consultation régionale.
Mais sans attendre - et c'est ainsi que l'on a réussi à concrétiser notamment cet objectif -, l'aménagement des extrémités Nord et Sud de la liaison - Dunkerque Escault et Oise aval - a été programmé de façon à développer le transport fluvial dans les bassins concernés et à améliorer la desserte fluviale des ports de Dunkerque, Paris, Rouen et Le Havre. Le projet concerne donc non pas simplement la liaisonSeine-Nord.
Le choix du fuseau de tracé de la partie centrale sera précisé après la consultation des régions sur le projet de schéma de services de transport de marchandises.
A ce propos, monsieur Gruillot, vous dites qu'il faudrait un débat. Mais des débats, il y en a ! On nous reproche même parfois d'en faire trop dans certains domaines et de ne pas prendre de décisions assez rapidement. Vous avez cependant raison : il faut un débat.
Justement, les schémas de services vont être soumis à la Commission nationale du débat public, et les régions sont d'ores et déjà saisies pour donner leur avis sur les schémas de services qui traitent des problèmes de tous les transports, de l'intermodalité, du transport des voyageurs, du transport des marchandises, d'ici au mois d'avril.
Je crois donc avoir levé tous les problèmes, ce qui devrait vous permettre, sur toutes les travées de cet hémicycle, de voter tranquillement ce projet de budget.
M. le président. Mes chers collègues, à la demande du Gouvernement, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures quarante-cinq, est reprise à dix-sept heures cinquante-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.
Nous allons passer aux questions.
Je vous rappelle que les orateurs interviendront pour une durée limitée à cinq minutes.
La réponse de M. le ministre est limitée à trois minutes.
Chaque orateur disposera d'un droit de réplique de deux minutes au maximum.
Mes chers collègues, afin de respecter cette règle du jeu dans sa lettre, mais aussi dans son esprit, je vous demande de ne pas poser pendant cinq minutes une batterie de questions à M. le ministre, alors qu'il ne dispose lui-même que de trois minutes pour y répondre ! Adaptez vos interventions à sa capacité de réponse, non pas en termes qualitatifs - elle est entière ! - mais en termes quantitatifs !
La parole est à M. Bernard, au nom du groupe du RPR.
M. Jean Bernard. Conformément à votre souhait, monsieur le président, je résumerai les questions que je souhaitais poser, d'autant que certaines réponses y ont déjà été apportées. Cela étant, dire qu'elles me satisfont serait sans doute un bien grand mot...
Les Français connaissent leur géographie. Ils savent que la France est au carrefour de l'Europe et qu'elle comporte une façade maritime. Notre politique, en matière de transports, devrait donc être visionnaire, audacieuse et coordonnée, notamment au regard de l'accélération de la mobilité des hommes et des marchandises. Or, monsieur le ministre, au vu des chiffres qui ont été cités par les différents rapporteurs pour avis, la politique des routes menée en France ne s'inscrit pas dans la démarche prospective que nous souhaiterions, et nous ne pouvons que le déplorer.
Nous allons cependant essayer, au travers de ces quelques questions, de vous aider, pour que vous obteniez de la part de Bercy les aides que nous souhaitons.
Je ne reviendrai pas sur les chiffres qu'a cités mon collègue et confrère M. Gruillot, sinon pour constater que les crédits de paiement affectés aux routes nationales ne sont pas en progression, bien au contraire, alors que, au cours des cinq dernières années, la circulation routière a augmenté d'environ 15 % et que, si l'on projette cette courbe dans le futur, on prévoit que les débits moyens sur les routes et les autoroutes devraient encore augmenter, d'ici une vingtaine d'années, de 40 % environ. C'est dire l'effort que nous devrions réaliser ! Le réseau routier et autoroutier est-il adapté à ces nouvelles données ? On peut se poser la question !
Monsieur le ministre, mes chers collègues, le physiologiste que je suis sait que, pour qu'un organe fonctionne normalement, il doit être irrigué convenablement, et dans les deux sens. Or nous allons vers l'infarctus et vers l'embolie ! Autour des villes, notamment à certaines heures, la circulation devient ainsi un véritable problème, au point qu'il faut alors plutôt parler de non-circulation.
Monsieur le ministre, je souhaiterais savoir si le Gouvernement a pris la mesure des moyens à mettre en oeuvre - en collaboration avec les collectivités locales, qui sont ses partenaires en la matière - pour adapter ce réseau routier et autoroutier. Il ne faut pas oublier, en effet, la participation des départements et des régions au développement des routes nationales, notamment, qui restent les itinéraires structurants par excellence !
Depuis 1995, les départements ont consacré chaque année à la route un montant de 21 milliards de francs. Ces dépenses ont représenté, en 1999, dans les budgets départementaux, environ 12 % des dépenses totales. C'est dire si les collectivités locales ont pris en compte l'importance des infrastructures routières dans leur économie et leur développement ! Pour autant, l'Etat adapte-t-il son effort à celui des collectivités locales ?
Permettez-moi, à ce sujet, d'aborder un problème ancien que nous avons déjà évoqué ensemble, monsieur le ministre : le financement des routes nationales est assuré à 50 % par les collectivités locales et à 50 % par l'Etat, mais ce dernier, en contrepartie, récupère l'ensemble de la TVA. Dans ces conditions, peut-être conviendrait-il de ne plus appeler ces routes « nationales » !
Ne serait-il pas opportun d'en confier la maîtrise d'oeuvre aux départements et aux régions, qui aménageraient au mieux le réseau des routes nationales en tenant compte du contexte local et régional ?
Ne m'en veuillez pas, monsieur le ministre, de faire mienne la formule de Churchill selon laquelle « quand tu ne réussis pas une première fois, essaie une deuxième, une troisième peut s'avérer nécessaire, une quatrième non superflue », et de revenir sur le problème de la route nationale 4 Paris-Strasbourg, déjà maintes fois évoqué.
Sur cet axe, on enregistre un trafic international et national de plus en plus dense, s'agissant notamment des poids lourds, et de nombreux accidents. Mais, dans le département de la Marne, monsieur le ministre, il reste quatre-vingt-dix kilomètres à aménager sur cette route saturée. En 2001, seuls trois kilomètres aménagés seront mis en service, et je ne vous infligerai pas le calcul du délai de réalisation de l'ensemble des quatre-vingt-dix kilomètres ! A cet égard, le prochain contrat de plan nous laisse peu d'espoir de voir les choses s'améliorer notablement. J'ajoute, et ce n'est pas pour l'anecdote, que pour aménager trois kilomètres il a fallu plus de deux ans. Tout à l'heure, M. le président de la commission des finances disait qu'on ne roule pas sur des autorisations de programme ou sur des ouvertures de crédits...
Que penser enfin de l'allongement supplémentaire de ces délais lorsque le hasard ou la nature placent sur l'itinéraire projeté des espèces rares, animales ou végétales, qu'il convient certes de protéger, mais dont la sauvegarde entraîne, comme cela a été le cas pour l'autoroute A 28 Alençon-Tours, l'arrêt d'un chantier pour de long mois ? Ne pensez-vous pas, monsieur le ministre, qu'il conviendrait de dresser un inventaire aussi exhaustif que possible de ces espèces protégées et de leurs sites d'implantation, et, si elles prospèrent et vivent en d'autres lieux, de continuer les travaux dont le caractère urgent est incontestable ?
M. le président. Mon cher collègue, je vous prie de conclure.
M. Jean Bernard. Je termine, monsieur le président.
Adopter cette façon de faire serait, à mon avis, un excellent moyen de mobiliser utilement les associations de protection de la nature et le ministère de l'environnement et contribuerait à donner à une image positive de leur action, trop souvent perçue comme négative à l'heure actuelle.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le sénateur, j'ai déjà répondu tout à l'heure sur les crédits, et je n'y reviendrai donc pas, sauf pour souligner une fois encore qu'ils sont en progression, de plus de 6 % s'agissant des autorisations de programme et des dépenses ordinaires, mais aussi de 2,6 % s'agissant des crédits de paiement, après intégration du FITTVN. Je vous demande donc instamment de partir de cette réalité avant de la commenter si vous jugez que cela n'est pas suffisant, mais, de grâce, n'affirmez pas que les crédits sont en baisse, car cela n'est pas juste !
Par ailleurs, la réalisation du TGV Est permettra de libérer des « sillons », si je puis dire, pour le trafic des marchandises. La démarche multimodale associant le rail et la route devra donc être prise en compte dans notre réflexion d'ensemble sur les déplacements.
Pour répondre plus précisément à l'une de vos questions, monsieur le sénateur, j'indique que certaines routes sont qualifiées de « nationales » parce qu'elles permettent d'assurer la continuité territoriale, à la différence des routes départementales. Les ressources consacrées au réseau routier national sont de beaucoup supérieures, c'est vrai, grâce notamment aux concessions autoroutières, à celles qui sont allouées aux réseaux départementaux, pourtant dix fois plus étendus. Cela est particulièrement vrai en matière d'investissement et tient à la croissance des trafics, plus importante sur les grands axes nationaux.
S'agissant de la coordination des investissements, elle est facilitée par l'annonce des intentions de l'Etat par le biais des schémas de service. Conformément à la nouvelle règle, les collectivités territoriales, ainsi d'ailleurs que les entreprises, peuvent alors prendre leurs propres décisions d'aménagement complémentaire ou de localisation de nouvelles activités.
Entre Paris et Phalsbourg, la RN 4 - puisque vous avez évoqué cet axe, et je connais votre ténacité et votre détermination - joue un rôle important pour la desserte de trois régions de l'Est : la Champagne-Ardenne, la Lorraine et l'Alsace. Le projet de schémas de services collectifs de transport confirme le caractère prioritaire de l'aménagement de cet axe structurant en route express à deux fois deux voies. Dans le département de la Marne, la route nationale 4 s'étend sur cent quatre kilomètres, dont trente-deux kilomètres déjà aménagés à deux fois deux voies.
Dans l'optique du nouveau contrat de plan Etat-région, 340 millions de francs - c'est ce chiffre qu'il faut retenir - ont été inscrits au titre de l'aménagement de la RN 4 dans le département de la Marne. Cela permettra de réaliser le doublement à deux fois deux voies de la déviation de Fère-Champenoise et celui de la déviation de Sommesous, ainsi que l'aménagement d'un créneau à deux fois deux voies à Haussimont. Cela permettra aussi de poursuivre les études et de procéder aux acquisitions foncières liées aux différentes opérations déclarées d'utilité publique, notamment la déviation ouest de Vitry-le-François et la section Sézanne-Fère-Champenoise. Vous voyez que nous ne nous en tenons pas à l'aménagement de trois kilomètres !
La RN 4 sera équipée progressivement d'aires de services et de repos au fur et à mesure de sa transformation en route express à deux fois deux voies. Ainsi, des aires de repos seront créées tous les vingt kilomètres, et des aires de services tous les cinquante kilomètres, comme sur le réseau autoroutier.
M. le président. La parole est à M. Maman, au nom du groupe de l'Union centriste.
M. André Maman. A franchement parler, je suis un peu gêné par ce nouveau processus. En effet, nous avons entendu quatre rapporteurs très consciencieux, très minutieux, qui ont analysé les dossiers dans le plus grand détail, et il ne nous reste que très peu de questions originales à poser !
En revanche, cela aidera peut-être M. le ministre, qui disposera de davantage de temps pour répondre à ces questions ! Tout à l'heure, il s'est en effet exprimé à la vitesse de certains de nos automobilistes sur les routes nationales ; peut-être pourra-t-il être un peu plus calme !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. C'était à la vitesse des TGV ! (Sourires.)
M. André Maman. Oui, mais il s'agit ici des routes ! (Nouveaux sourires.)
La France se classe parmi les mauvais élèves de l'Union européenne en matière de sécurité routière, même si l'on nous a déjà dit que cela ne serait pas tout à fait exact. Les résultats sont catastrophiques : nous sommes le pays qui connaît la plus forte hausse du nombre de tués sur les routes, alors même que la plupart des autres pays européens enregistrent un recul des statistiques dans ce domaine. C'est pourquoi vous avez fait de la sécurité routière l'une de vos priorités, comme l'indique l'évolution des dotations budgétaires depuis 1997.
Toutefois, le budget de la sécurité routière souffre toujours de graves dysfonctionnements dans l'utilisation de ses crédits, puisque certains d'entre eux ne sont pas totalement consommés. Il en est ainsi des crédits alloués au délégué interministériel à la sécurité routière, des dotations consacrées aux actions d'incitation et des crédits de paiement des chapitres de dépenses en capital. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous donner des explications sur ces points ?
Par ailleurs, pouvez-vous également nous donner des précisions sur les moyens en personnels et en crédits de fonctionnement des services de la sécurité routière ? Cela permettrait au Parlement de retracer concrètement l'effort de la nation dans ce domaine.
En outre, n'y a-t-il pas urgence à mettre en place une politique d'évaluation de la sécurité routière, une sorte d'audit exhaustif de celle-ci ? Ne faudrait-il pas également mener une large réflexion visant à une meilleure organisation au sein du ministère de l'équipement, des transports et du logement, mais également sur le plan interministériel ?
Enfin, nos mauvais résultats en matière de sécurité routière s'expliquent par la structure du réseau routier français. En effet, la proportion d'accidents mortels est bien plus importante, d'après les statistiques, sur le réseau routier secondaire que sur le réseau principal, surtout autoroutier. L'Etat ne peut-il envisager de lancer un vrai programme de rénovation de la voirie routière, en relation avec les collectivités locales ?
Je vous remercie des réponses que vous voudrez bien nous donner sur ces divers points, monsieur le ministre.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le sénateur, à l'instar de M. Miquel, rapporteur spécial, vous vous inquiétez de la consommation des crédits de la sécurité routière. Le taux moyen d'exécution s'élevait, à la fin de l'exercice 1999, à 73 %. La priorité donnée aux opérations menées localement avec les collectivités territoriales et les associations explique parfois la longueur de certaines procédures. Une action systématique a été entreprise pour réduire ces délais.
Par ailleurs, les comités interministériels de sécurité routière déterminent les grandes orientations de la politique menée dans ce domaine. Il s'en est tenu trois depuis novembre 1997, alors qu'aucun n'avait été organisé, permettez-moi de le rappeler au passage, entre 1994 et 1997. Le dernier de ces comités s'est réuni le 25 octobre 2000. Il a conforté les grandes orientations qui ont permis une baisse du nombre de décès sur la route en 1999 et en 2000.
Je reste prudent, car ce résultat demeure fragile, mais on peut penser que plusieurs centaines de vies, environ sept cents peut-être, auront été épargnées cette année du fait d'un engagement et d'une mobilisation générale qui ont concerné tant l'Etat que les collectivités locales, les élus et les associations. Ce n'est pas rien, vous en conviendrez !
En outre, la décision a été prise cette année de créer un conseil national de la sécurité routière, qui disposera de la marge d'indépendance nécessaire pour accomplir ses missions, parmi lesquelles figurent la réalisation d'un audit, pour reprendre l'expression que vous avez employée, monsieur le sénateur, et la formulation de propositions au Gouvernement.
Un jaune budgétaire permettra par ailleurs de répertorier l'ensemble des actions des différents ministères sur ce point. En effet, quand le ministère de l'intérieur et le ministère de la défense renforcent les effectifs qu'ils consacrent à la surveillance du trafic routier, cet effort ne figure pas dans mon budget, mais il concerne bien la sécurité routière.
S'agissant de l'amélioration de la formation routière, nous avons décidé la création d'une attestation de première éducation à la route. A ce propos, nous travaillons en liaison étroite avec le ministre de l'éducation nationale, M. Jack Lang, car une volonté commune nous anime de faire évoluer les comportements dès l'école maternelle et primaire. Toujours dans le domaine de la sécurité routière, deux cent trente postes d'inspecteur du permis de conduire seront créés en trois ans, dont soixante dix-sept le seront dès l'année prochaine.
S'ajoute à ces mesures un renforcement des contrôles et des sanctions, avec notamment le pouvoir de rétention du permis de conduire accordé aux forces de l'ordre en cas d'excès de vitesse de plus de quarante kilomètres à l'heure.
En ce qui concerne enfin les infrastructures, les rapporteurs ont insisté très justement tout à l'heure sur leur amélioration, ainsi que celle des véhicules. Nous avons ainsi engagé, au titre du présent contrat de plan, un programme de traitement des obstacles latéraux pour un montant de 400 millions de francs, 150 millions de francs étant alloués à la suppression des glissières présentant un danger pour les motards, lesquelles ont provoqué, l'an dernier, soixante et onze décès. J'évoquerai brièvement, en outre, mon engagement en faveur du limiteur de vitesse modulable par le conducteur.
En conclusion, je souligne que nous avons la volonté de faire partager cet effort en faveur de la sécurité routière par nos voisins européens.
M. André Maman. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Maman.
M. André Maman. Je vous remercie de vos réponses, monsieur le ministre, qui prouvent que mes questions étaient importantes et méritaient d'être posées, bien que MM. les rapporteurs les aient largement évoquées.
Cela étant, monsieur le ministre, ne serait-il pas possible de centraliser tous les renseignements que vous nous avez donnés ? En effet, lors de nos discussions sur ce thème, on nous objecte régulièrement que tel ou tel aspect relève d'un autre ministère que le vôtre, de sorte que l'on ne parvient pas à acquérir une vue d'ensemble des problèmes. Le regroupement des informations me paraît donc capital.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le sénateur, je vous adresserai prochainement un document regroupant l'ensemble de ces renseignements, y compris ceux qui émanent d'autres ministères.
M. André Maman. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Puech, au nom du groupe des Républicains et Indépendants.
M. Jean Puech. Monsieur le ministre, parmi les grands projets autoroutiers en cours de réalisation figure l'autoroute A 75 reliant Clermont-Ferrand à Béziers par le Massif central.
La création de cette infrastructure a été décidée en 1987, et les gouvernements qui se sont succédé jusqu'à votre prise de fonctions ont tenu leurs engagements. Cette décision fut confirmée en juillet 1996, à l'issue du choix de la construction d'un viaduc à haubans enjambant le Tarn et conçu par l'architecte Norman Foster. Cet ouvrage, long de deux kilomètres et demi, comporte notamment deux piles de plus de 300 mètres de hauteur et devrait, selon le ministère de l'équipement, des transports et du logement, être livré en 2001.
Imaginez ces piles, plus hautes que la tour Eiffel, avec une autoroute passant à leur sommet !
Le 20 mai 1998, un an après votre arrivée au Gouvernement, vous décidez de mettre en concession la réalisation du viaduc. Je vous cite : « Avec cette décision, la totalité de l'itinéraire pourra être mise en service en 2003. Une enquête d'utilité publique sera ouverte avant la fin de l'été 1998. Conformément aux dispositions européennes, un appel d'offres aux niveaux communautaire et national sera lancé dans les prochaines semaines afin de pouvoir désigner le futur concessionnaire. Cette procédure se réalisera en parallèle et n'introduira donc pas de délais supplémentaires. « Le décret modificatif de la déclaration d'utilité publique et la désignation du concessionnaire pourront être concomitants. »
La déclaration d'utilité publique a été prise depuis déjà plus d'un an et nous attendons toujours la désignation du concessionnaire !
Vous avez ajouté que vous aviez pris cette décision parce que vous ne disposiez pas des crédits nécessaires.
Concernant les crédits, lorsque vous avez rendu visite à votre ami politique, le maire de Tarbes, vous aviez déclaré dans le journal La Nouvelle République que la liaison Tarbes-Lourdes serait une route à deux fois deux voies, gratuite plutôt que concédée, non seulement parce que c'était la solution la moins chère mais aussi parce qu'elle permettait de mieux irriguer le tissu local.
Quelques semaines plus tard, vous vous êtes rendu dans le département des Landes et vous avez décidé et annoncé que l'ex-RN 10, passée au réseau autoroutier déjà concédé, se voyait retirer la concession pour en faire une voie rapide sans péage, financée par l'Etat.
Le coût de ces deux opérations est au moins égal, voire supérieur à celui de la réalisation du viaduc.
Aujourd'hui, l'affaire est réglée, la réalisation du viaduc sera concédée. Depuis que vous avez pris ce dossier en mains, nous avons enregistré toute une série de fausses informations. Cela prêterait à sourire si elles ne venaient d'un représentant du Gouvernement et si elles n'avaient pas les incidences économiques que l'on peut aujourd'hui mieux mesurer. A chaque grande migration, départ ou retour, Millau devient la capitale des bouchons, triste réputation pour un département qui commençait à réussir son ouverture.
Face à cette situation, je vous demande depuis plusieurs mois, par questions écrites, auxquelles vous ne daignez pas répondre, de nous donner le calendrier qui reste à courir concernant l'examen par la commission consultative des offres des trois groupements d'entreprises qui viennent de remettre leurs propositions, la prise de décision du ministre, la mise au point des documents de concession, la consultation et l'avis du Conseil d'Etat, l'étude d'exécution de l'ouvrage, le démarrage des travaux et, enfin, la durée de ceux-ci.
Je souhaite connaître les informations que vous pouvez nous livrer concernant les tarifs de péage proposés par le cahier des charges de la concession et savoir si ce dernier laisse la possibilité aux candidats à la concession de faire une offre de projet touristique pour laquelle celui-ci serait maître d'ouvrage et gestionnaire de l'équipement.
Je souhaite également connaître les mesures que vous comptez prendre pour ne pas isoler la région de Millau du flux migratoire, en l'évitant comme le préconise l'initéraire conseillé par Bison futé mais, au contraire, pour rechercher un tracé empruntant les routes départementales puisqu'il ne reste plus qu'elles en dehors de l'autoroute permettant de passer à proximité de la ville de Millau.
A mon humble avis, il apparaît qu'aujourd'hui la date d'ouverture probable du viaduc de Millau, annoncée en 2001, puis en 2003, sera difficilement respectée. Aussi, je vous demande, monsieur le ministre, de m'indiquer les mesures que vous comptez prendre pour assurer, dans des conditions de sécurité optimale, la traversée de Millau par les véhicules légers et les poids lourds.
En 2002, l'autoroute arrivera au Nord à Saint-Germain, et au Sud, à La Cavalerie sur les bords des falaises. Je vous laisse imaginer le spectacle à Millau !
Par ailleurs, aujourd'hui, les candidats à la concession sont connus. Pouvez-vous nous dire quelle est la durée des travaux qu'ils prévoient et s'ils sollicitent une subvention d'équilibre de l'Etat ? Si tel était le cas, en effet, tout porterait à croire que l'Etat dans cette affaire ferait une fausse économie.
Voilà beaucoup de questions, mais autour d'un seul sujet. Tout cela, monsieur le ministre, nécessite un dialogue ouvert, un partenariat, et c'est cette démarche à laquelle nous vous invitons. Je vous ai envoyé des questions écrites, des lettres, nous souhaitons travailler ensemble parce que vous ne pouvez pas ignorer les collectivités locales.
J'en profite pour remercier la commission des finances et son président d'avoir proposé cette procédure. Je la trouve intéressante ; elle le sera encore plus si les réponses de M. le ministre à mes questions sont positives pour le département que je représente. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le sénateur, je précise d'abord que je n'ignore pas les collectivités territoriales.
A l'Assemblée nationale, comme au Sénat, lors des questions d'actualité, les députés ou les sénateurs de l'opposition précisent de plus en plus souvent qu'ils s'expriment au nom de tous les groupes de l'opposition. Pour votre part, vous ne pourriez le faire sur ce sujet tant ma décision prise au nom du Gouvernement s'agissant de la réalisation du viaduc de Millau est soutenuede toutes parts.
Tout à l'heure, je parlais de ténacité à propos de M. Bernard ; vous, vous faites preuve non pas de ténacité mais d'entêtement. Je vous répète que si je n'avais pas pris cette décision-là, comme aucun financement, aucun moyen n'a été prévu, le viaduc de Millau n'aurait pu être réalisé. J'ai voulu faire avancer les choses. Toutes les conditions posées seront respectées. Ainsi, les habitants de Millau, eux, ne paieront pas quand ils emprunteront le viaduc pour rejoindre au nord ou au sud l'autoroute !
Vous faites des comparaisons en évoquant la route de Tarbes à Lourdes. Pourquoi cette solution a-t-elle été retenue ?
Nous avons comparé le coût de la mise à deux fois deux voies de la nationale à celui de la construction d'une autoroute concédée, et nous nous sommes aperçus qu'il fallait plus de subventions publiques pour réaliser l'autoroute mise en concession que pour mettre à deux fois deux voies la route nationale. C'est tout simplement de la bonne gestion de l'argent public.
D'abord, permettez-moi de vous dire que je reçois 20 000 courriers d'élus ou questions écrites parlementaires par an je réponds et je répondrai au vôtre.
S'agissant de la RN 10, vous avez fait le tour de France de mes propos. Or, aujourd'hui, la presse fait état de mes réponses aux questions que vous posez. J'espère que vous les avez lues, tout au moins celles qui concernent votre région !
Je pense que c'est peut-être à cause d'un certain entêtement, qui a conduit à refuser pendant très longtemps la mise en concession du viaduc, que des retards ont été pris dans la réalisation de ce programme.
Le recours à la procédure de l'adossement est maintenant clairement et légalement exclu.
Le 20 mai 1998, le Gouvernement a décidé la mise en concession du viaduc de Millau, avec un tarif de péage qui pourrait avoisiner 40 francs, et le lancement de la nouvelle procédure d'enquête publique qui s'avérait nécessaire. La mise en concession du viaduc de Millau a été déclarée d'utilité publique, le 23 novembre 1999. La procédure de désignation du concessionnaire a été immédiatement lancée, en décembre 1999.
Le 24 janvier 2000, date limite de remise des offres, quatre groupements se sont déclarés candidats. Ils ont été admis à présenter une offre en juin, après une période d'analyse indispensable. La date limite de remise des offres a été fixée au 22 novembre 2000 et trois candidats ont remis une offre : le groupement Société du viaduc de Millau, la société EIFFAGE, le groupement des entreprises Générale routière et Ferrovial Agroman. L'analyse des offres a immédiatement débuté et l'audition des candidats se déroulera au cours de l'hiver 2000-2001.
Au vu du rapport de la commission d'analyses des offres, je retiendrai le concessionnaire à la fin du mois de février 2001. J'ai donné publiquement ces informations mais je reconnais ne vous les avoir jamais communiquées dans cet hémicycle puisque vous ne m'avez jamais posé la question ici.
Le décret d'approbation du contrat de concession sera soumis au Conseil d'Etat au début de l'été 2001, après mise au point, et les études d'exécution seront immédiatement engagées.
Je suis conscient que le fait de respecter les textes en vigueur pour assurer aux Aveyronnais et à l'ensemble du pays la mise en service rapide, avec l'objectif que je maintiens de fin 2003, d'une infrastructure indispensable, et de les tenir régulièrement informés est tout à fait nécessaire, mais je m'y tiendrai, au bénéfice de ce fantastique projet, qui illustre d'ailleurs le changement de millénaire.
Vous avez soulevé le problème plus général du développement touristique et de l'aménagement local de cette région. Je suis favorable à la constitution d'un groupe de travail animé par Mme le préfet. Mon objectif est que Millau et sa région profitent au maximum du chantier, dans un premier temps, et du viaduc, dansun second temps.
Soyez assuré de la détermination du Gouvernement pour faire en sorte que ce projet soit réalisé dans les délais et qu'il soit un plus pour l'axe tout entier. Il faut procéder au raccordement jusqu'à l'autoroute A 9 et il faut construire ce viaduc de Millau.
Je sais de quoi je parle car je passe souvent à Millau et connais bien les trente kilomètres de bouchon qui se forment l'été. L'autoroute qui est coupée l'aurait été encore pendant sept ans ou huit ans si l'on s'en était tenu à votre position initiale, à savoir le refus de la mise en concession de ce projet.
M. Jean Puech. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Puech.
M. Jean Puech. Monsieur le ministre, le sujet est trop important pour ouvrir une polémique, et je ne reviendrai donc pas sur l'entêtement que vous me prêtez. Je représente les Aveyronnais dans cet hémicycle et je tiens à m'exprimer en leur nom.
Ce que vous ne savez peut-être pas, même si vous lisez les revues de presse, c'est qu'aujourd'hui la presse locale titre, et ce sont les élus de Millau qui s'expriment : « Grand pont autoroutier : nous allons être les cocus du péage. » Ce n'est pas moi qui le dis ; je n'ai d'ailleurs pas assisté à cette réunion. Ne laissez donc pas entendre que, dans l'Aveyron, il y aurait un entêté qui refuserait vos propositions !
Je souhaite que nous tenions une réunion de travail. Vous avez proposé des dates, vous les affirmez, vous les confirmez. Le décret sera publié au cours du second semestre de 2001, si j'ai bien compris, et vous dites qu'on pourra rouler sur le viaduc le plus haut du monde en 2003, qu'il va être construit sur deux kilomètres et demi avec des dizaines de piles dont deux supérieures à 300 mètres de haut. Les élus aveyronnais ont besoin d'informations pour gérer cette période-là. Mais tout le monde sait très bien que ce ne sera pas possible. Vous avez prévu vous-même, dans le cahier des charges que vous avez transmis aux groupements soumissionnaires, dont nous n'avons pas pu avoir communication,nous élus,...
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. On n'a pas le droit !
M. Jean Puech. ... quatre ans pour la réalisation de l'ouvrage. Cela signifie que le viaduc sera achevé en 2005-2006 seulement ; c'est un problème d'une autre dimension.
Monsieur le ministre, je vous le répète sans entêtement, je souhaite qu'ait lieu une réunion de travail, que vous nous receviez, que vous répondiez aux questions écrites, qui paraissent au Journal officiel ! Quel dédain pour la représentation nationale ! J'ai réitéré mes questions, sans obtenir de réponse. J'ai écris au Premier ministre, sans obtenir non plus de réponse. On n'a jamais vu cela !
Monsieur le ministre, je suis ouvert à la discussion avec un représentant du Gouvernement sur ce sujet, essentiel pour le département que je représente.
M. le président. La parole est à M. Collin, au nom du groupe du Rassemblement démocratique et social européen.
M. Yvon Collin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je m'associe, bien entendu, à l'hommage qui a été rendu à M. Lambert, président de la commission des finances, d'avoir proposé ce débat interactif, sans doute plus vif, plus intéressant que le débat traditionnel.
Monsieur le ministre, parmi les fascicules budgétaires que nous examinons aujourd'hui, je souhaiterais concentrer mon propos sur le problème de la sécurité routière, car c'est un sujet qui préoccupe les pouvoirs publics et l'ensemble de nos concitoyens en raison, bien sûr, des drames, hélas ! de la circulation.
En effet, tout le monde connaît ce chiffre terrible de 8 000 morts par an sur les routes françaises, dont un quart sont âgées de dix-huit à vingt-quatre ans. Ce bilan très lourd est difficile à supporter et nous sommes tous conscients qu'il ne s'agit pas là d'une fatalité.
Dans les années soixante-dix, il faut le rappeler, car on l'a un peu oublié, la route tuait près de 14 000 personnes. Aujourd'hui, alors que le parc automobile et la circulation se sont considérablement accrus, le nombre d'accidents a diminué. Les politiques publiques en la matière ne sont donc pas vaines. On peut s'en réjouir, mais il faut aller plus loin.
L'idéal du zéro victime est malheureusement inconcevable. Mais le Gouvernement doit inlassablement chercher à atteindre l'objectif fixé en 1997 et qui consiste à réduire le nombre de victimes par deux. C'est pourquoi la politique de sécurité routière mérite un effort budgétaire important.
En ce qui concerne le projet de loi de finances pour 2001, on peut se réjouir de l'augmentation des crédits qui y sont consacrés, puisque, par rapport à l'année 2000, ils progressent de 12,4 % en crédits de paiement et de 11,55 % en autorisations de programme. Depuis quatre ans, le sécurité routière est redevenue une priorité nationale, on peut s'en féliciter.
On peut également se féliciter des moyens croissants accordés à l'entretien des routes et à l'amélioration des conditions de sécurité des tunnels alpins. Si la sécurité routière est une affaire de comportement, la qualité des infrastructures est tout aussi essentielle.
S'agissant du volet répressif, bien qu'il ne concerne pas directement le budget des transports, mais plutôt les budgets des ministères de l'intérieur et de la défense, je signale que l'augmentation des unités de gendarmerie affectées à la sécurité routière s'inscrit dans la ligne d'une détermination forte en faveur de la lutte contre les accidents de la route.
Les moyens affectés à la communication et à la formation doivent eux aussi continuer à jouer leur rôle en faveur de la présention et de l'infléchissement des comportements. Les accidents relèvent essentiellement de la responsabilité individuelle ; la pédagogie est, par conséquent, un outil important de la sécurité routière.
En tant qu'élu local, je me réjouis également des crédits accordés aux collectivités territoriales. Les accidents de la route représentent, en effet, pour les maires de petites communes, des drames de proximité auxquels ils doivent faire face ; ils doivent surtout anticiper, avec des moyens adaptés aux problématiques locales.
Conformément à la nouvelle procédure budgétaire, je souhaiterais connaître votre avis, monsieur le ministre, sur deux axes, dont l'un est envisagé dans le cadre de la grande cause nationale que je viens d'évoquer, l'autre est déjà engagé au niveau européen.
Le premier risque de susciter des grincements de dents bien qu'il s'agisse d'une pratique qui a cours chez certains de nos voisins européens et qu'il soit donc normal d'en parler. Au Danemark, en Espagne, en Grande-Bretagne, en Italie et aux Pays-Bas, la durée du permis de conduite est limitée et, selon différents dispositifs, le renouvellement est soumis à un contrôle de l'aptitude physique et intellectuelle des conducteurs.
Dans notre pays, ce procédé peut sembler attentatoire aux libertés : le permis est devenu un droit banal, puisque 77 % de la population en âge de conduire l'a obtenu.
Toutefois, parce que ce permis implique des obligations aussi fondamentales que le respect de la sécurité d'autrui, il est opportun d'imaginer, dans le prolongement du permis à point, un système prévoyant des contrôles tout au long de la vie.
Le second axe, vous l'avez évoqué, monsieur le ministre, à l'occasion de la présentation des priorités de la présidence française de l'Union européenne dans le domaine des transports : il s'agit de la prévention des accidents de la route.
En Europe, les accidents de la route, c'est 100 000 morts par an. Le sujet est donc également crucial pour l'ensemble de la Communauté européenne.
Vous avez à ce titre parlé d'un texte législatif pour adapter des limiteurs de vitesse pour les véhicules de 3,5 tonnes et d'études préalables pour l'installation prochaine de limiteurs-avertisseurs de vitesse sur lesvéhicules légers.
Nous avons adopté, l'année dernière, une loi sur la sécurité routière. L'une de ses principales mesures a consisté à créer un délit en cas de récidive de dépassement de grande vitesse. Et lorsque l'on sait que la vitesse est en cause dans 48 % des accidents mortels, il est naturel de songer à une solution technique dans le cadre d'une politique de sécurité routière.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le sénateur, je partage tout à fait votre analyse quant à la nécessité de poursuivre la lutte contre l'insécurité routière.
S'agissant de votre première suggestion, j'attire votre attention sur l'expérience personnelle de chacun d'entre nous : si des altérations physiques peuvent parfois intervenir avec l'âge - la baisse de la vue, par exemple - elles sont souvent compensées par l'adaptation des comportements des conducteurs.
Je relève d'ailleurs que les assureurs appliquent les surprimes en fonction du nombre d'accidents et de l'inexpérience des conducteurs novices, et non de l'âge. Il faut bien étudier les faits. Ce sont le plus souvent les jeunes qui sont impliqués dans les accidents de la circulation.
Sachez cependant que je ne nie pas le problème que vous avez évoqué.
Dans plusieurs pays de l'Union européenne, la réglementation des permis de conduire de la catégorie B prévoit un contrôle médical pouvant déboucher sur des restrictions sur les trajets autorisés ou la conduite de nuit.
En France, lorsque le préfet a connaissance d'une incompatibilité possible entre l'état physique d'un conducteur et le maintien du permis de conduire, il peut prescrire un examen médical dont il tirera les conséquences.
La France participe d'ailleurs aux réflexions communautaires sur ce sujet, qui doivent s'appuyer, vous en conviendrez, sur des études approfondies.
Je confirme que la France a obtenu, lors du Conseil des ministres des transports de l'Union européenne le 26 juin 2000, que sa demande relative aux limiteurs de vitesse modulables par le conducteur soit prise en compte. Une étude sera réalisée sur les effets et les moyens de rendre obligatoire l'installation de ces limiteurs de vitesse sur tous les véhicules, en plus de l'obligation d'un limiteur de vitesse pour tous les véhicules de plus de 3,5 tonnes. Je souhaite que le Parlement européen, qui se prononcera prochainement, retienneces deux mesures.
Le comité interministériel du 25 octobre dernier a par ailleurs décidé qu'à partir de 2002 l'administration achètera des véhicules équipés de ce dispositif. Il sera procédé à une évaluation de l'usage qu'en font les conducteurs et des répercussions sur leur comportement.
M. le président. La parole est à M. Lefebvre, au nom du groupe communiste républicain et citoyen.
M. Pierre Lefebvre. Monsieur le ministre, intermodalité, développement durable du territoire, paquet ferroviaire européen, extension des garanties sociales des travailleurs des transports, engagements de l'Etat font partie des questions que l'on peut naturellement poser à l'occasion de ce débat budgétaire.
Par ailleurs, l'année 2000 est marquée par les conflits des transporteurs routiers dénonçant leurs conditions de travail et l'action des cheminots, qui manifestent leur inquiétude face à la négociation européenne.
Monsieur le ministre, je vous sais attentif aux craintes en même temps qu'aux aspirations portées par ces mouvements, qui expriment, à n'en pas douter, un certain malaise et mettent en évidence les énormes besoins sociaux de ce secteur.
Pour cette raison, on ne peut que regretter que le Gouvernement ait programmé une réduction du budget des transports terrestres de 1,4 %, même si ce budget demeure important avec 48,4 milliards de francs.
A contrario , on ne peut que se féliciter de l'ordre des priorités : développement des transports collectifs, ferroviaires et urbains.
L'augmentation non négligeable des autorisations de programme, qui atteignent 4,4 milliards de francs, rend compte de cette préoccupation. Cela favorisera la décongestion des villes et de certains axes routiers aujourd'hui saturés.
Ainsi, en Ile-de-France, le trafic de la SNCF et de la RATP, avec la démarche qualité et le tramway, est en nette progression.
En province, l'effort en matière de nouvelles infrastructures n'est pas négligeable. Les nouvelles autorisations de programme confirment la poursuite du plan de modernisation des équipements et de développement de l'intermodalité, par l'extension heureuse du versement transport.
A fortiori, comment ne pas se féliciter du développement du fret ferroviaire ? On ne peut que souhaiter qu'il se développe encore davantage, car chacun est conscient qu'il contribue à la protection de l'environnement et au renforcement de la sécurité routière, en particulier lorsqu'il s'appuie sur l'intermodalité.
Sans nier l'importance du transport routier pour le développement économique, le transport ferroviaire de marchandises constitue une solution pour réduire la pollution atmosphérique et le bruit et économiser sur le coût des infrastructures et de l'énergie.
Au-delà de la qualité de nos réseaux autoroutiers, il devenait urgent de redoubler d'effort en matière de fret ferroviaire.
C'est la tâche que vous vous êtes assignée, monsieur le ministre. Nous vous soutenons pleinement.
Le rail a regagné des parts de marché par rapport à la route : le trafic ferroviaire a augmenté de 9 % en un an.
Cette amélioration n'en demeure pas moins fragile, car l'avantage concurrentiel du transport routier réside dans la faiblesse des coûts supportée en dernière instance par la collectivité quant à la pollution, aux infrastructrures et à l'insécurité routière.
Elle s'explique aussi par l'accroissement de l'intensité du travail, par des salaires trop bas, autrement dit par une détérioration des conditions de travail dans le transport routier que des conflits répétés mettent en évidence.
La négociation européenne menée ces derniers temps sous la présidence française du Conseil des ministres et l'adoption ces jours derniers d'un très important « paquet » social suffiront-elles à modifier les mauvaises habitudes prises dans ce secteur, qui sont dans le droit-fil des directives européennes et de la déréglementation ?
Ces questions essentielles appellent débat et réponse de votre part, monsieur le ministre.
J'ajoute que, selon nous, la programmation d'investissements lourds pour développer les infrastructures trans-européennes et l'intermodalité s'impose. Dans un contexte d'orthodoxie budgétaire où l'essentiel de l'accroissement des recettes est consacré à la réduction du déficit budgétaire et à la baisse des impôts, le financement de tels travaux relève de la quadrature du cercle.
Devons-nous y consacrer une part des excédents du budget de l'Union européenne ?
Pour en revenir à la France, alors que, pendant vingt ans, 1 000 milliards de francs ont été investis dans le développement des infrastructures routières, ce ne sont que 300 milliards de francs qui ont été consacrés aux infrastructures ferroviaires. Autant dire que le retard accumulé est énorme, le vieillissement du parc des locomotives en témoigne.
Nous approuvons le plan de modernisation du matériel de la SNCF, qui va se traduire par la commande de 300 nouvelles locomotives électriques et de 120 locomotives Diesel.
Nous pensons qu'il faut aussi, parallèlement, investir dans les hommes et dans leur formation.
Ce plan de modernisation est la condition sine qua non du maintien des parts de marché au niveau actuel pour le fret ferroviaire. Il est aussi porteur de développement et d'emplois pour toute la filière, ce qui ne peut que consolider et conforter la croissance.
Permettez-moi, monsieur le ministre, de vous interroger également sur les conditions de financement de ce plan, qui, à la lecture du projet de budget, n'apparaissent pas clairement.
Pouvez-vous nous apporter quelques précisions sur les moyens financiers prévus à cet effet pour cette année et tracer quelques perspectives pour les années qui viennent ?
Ajoutons encore que, pour indispensables qu'elles soient, ces ambitions ne suffiront pas à elles seules à assurer le rétablissement d'un équilibre entre le fer et la route, s'il n'est pas relayé par un plan d'envergure à l'échelon européen.
La France a fait preuve de nombreuses et originales initiatives dans ce domaine.
Des accords de coopération entre plusieurs compagnies européennes de chemins de fer ont pu être conclus.
La mise en place des « corridors de fret européen » comme le corridor BELIFRET, résultat d'un premier accord, en novembre 1997, entre les chemins de fer belges, luxembourgeois et italiens, a été étendu en vertu d'un second accord, en février 1998, concernant, au sud-ouest, l'axe Marseille, Barcelone et Valence, et, au sud-est, Milan.
Au vu du développement du trafic, qui est estimé à plus de un million de tonnes en 2000, soit plus de 40 % en un an, les accords de coopération de ce type méritent d'être développés.
On ne peut que se féliciter de ces initiatives françaises, qui préservent et dynamisent les chemins de fer français. D'autres projets sont-ils à l'ordre du jour, monsieur le ministre ?
Je ne saurais finir mon intervention sans parler des transports fluviaux.
De par leurs coûts, les transports fluviaux participent à la régulation intermodale des réseaux de communication. Des efforts importants méritent d'y être consacrés.
Quelles sont les perspectives de développement de ce mode de transport ? Où en est-on, par exemple, en ce qui concerne le tracé et la réalisation de la liaison Seine-Nord, à laquelle les responsables de la région Nord - Pas-de-Calais sont tellement attachés ?
Monsieur le ministre, je vous remercie de bien vouloir répondre aux interrogations dont je viens de vous faire part. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe communiste républicains et citoyen.)
M. le président. Mon cher collègue, il y avait beaucoup de questions dans votre intervention ! (Sourires.)
J'ai cru entendre tout à l'heure qu'il fallait laisser au ministre le plus de temps possible pour répondre. (Nouveaux sourires.)
M. Pierre Lefebvre. C'est peut-être le système qui n'est pas bon !
M. le président. Je ne le crois pas !
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le sénateur, il faut reconnaître que vous avez à la fois posé de nombreuses questions sur le budget des transports terrestres et exprimé votre sentiment sur les perspectives.
Je comprends d'autant mieux votre démarche que la politique du Gouvernement en faveur des transports terrestres s'inscrit non seulement dans le présent, mais aussi dans le court, le moyen et le long terme.
Il faut changer la donne en ce qui concerne les différents modes de transports, sinon nous allons à l'asphyxie. C'est pourquoi le développement du réseau et du trafic ferroviaires est une nécessité.
Lorsque j'ai proposé de doubler le trafic ferroviaire en dix ans, cela en a fait sourire quelques-uns. Pourtant, depuis le début de l'année, le trafic a augmenté de 8 % dans notre pays.
On voit bien que le besoin est en train de croître ; il faut maintenant que les conditions matérielles et personnelles correspondent, et que les investissements nécessaires soient réalisés pour supprimer les goulets d'étranglement. S'agissant de la création d'un réseau ferré de fret européen, la décision, qui est maintenant pratiquement actée, notamment grâce à des financements européens, permettra de réduire les goulets d'étrangement. On sait qu'il y en a plusieurs. Je pourrais vous parler de Lyon, de Nîmes, de Montpellier, de Bordeaux, etc. On trouve des exemples dans chaque région !
Telle est notre démarche. Il nous faut maintenant améliorer la qualité du service, notamment pour le transport de marchandises.
L'achat de 420 locomotives est en deçà de l'objectif visé de 600, et je rappelle qu'il s'agit de locomotives pour le transport de marchandises. Aujourd'hui, on ne les a pas. Il faut donc en commander tout de suite 120 pour aller vers cet objectif de 420 locomotives.
Vous avez évidemment repris les propos de MM. les rapporteurs en ce qui concerne le budget. Je vous répète, monsieur le sénateur, que le budget des transports terrestres s'élèvera à 51,9 milliards de francs au lieu de 50,7 milliards de francs en 2000.
En ce qui concerne les crédits consacrés au fluvial, que vous avez évoqués - je crois aussi au fluvial - ils auront augmenté depuis 1997 de près de 60 %. J'ai répondu tout à l'heure sur la nécessité de réaliser cette liaison Seine-Nord, qui va de Dunkerque-Escaut à Paris en passant par l'Oise-aval, Rouen et Le Havre. Il faut que tout le territoire profite des crédits. Des investissements sont déjà prévus et même engagés dans le cadre des contrats de plan pour l'Oise-aval et pour Dunkerque-Escaut. Dans les prochains mois, à l'occasion des discussions relatives aux schémas de services collectifs - les préfets, qui organisent la concertation, donneront leur avis d'ici au mois d'avril 2001 - la question du tracé sera bien entendu évoquée pour la partie centrale.
Je ne sais pas si j'ai répondu à toutes vos questions, mais voilà l'état d'esprit dans lequel nous travaillons.
Alors que j'étais député depuis déjà une quinzaine d'années, j'ai assisté comme vous au déclin du service ferroviaire, qu'il s'agisse du transport marchandises ou du transport voyageurs hors TGV - car le TGV se développait et c'était une bonne chose - au profit de la route ! Si le développement du trafic routier continuait au même rythme qu'alors, ce serait aujourd'hui l'asphyxie !
Vous avez dit qu'il existait des projets importants prouvant qu'il était possible de trouver des solutions, et vous avez cité des exemples. Il y a bien sûr l'Eurostar, le Thalys, mais il y en aura d'autres. Sur toute la côte méditerranéenne, par exemple, nous allons faire en sorte que l'écartement des voies soit le même, que ce soit en Italie, en France, en Espagne, ce qui sera très intéressant tant pour les déplacements des voyageurs que pour l'acheminement des marchandises.
Il faut également absolument faire le Lyon-Turin. Tout cela représente des investissements considérables, mais il faut les réaliser car, comme je l'ai dit tout à l'heure, chaque fois que ce sera possible, mieux vaut mettre les camions sur des trains que les laisser circuler sur la route, surtout quand cette dernière est déjà trop engorgée !
M. le président. La parole est à M. Bellanger, au nom du groupe socialiste.
M. Jacques Bellanger. Nous nous félicitons de la volonté du Gouvernement de promouvoir le service du transport ferré de marchandises. Monsieur le ministre, vous venez encore de le réaffirmer.
La création de corridors européens devra s'inscrire dans cette perspective. Les principaux flux d'échanges s'organisent aujourd'hui bien au-delà des différents territoires nationaux. A des trafics nouveaux dans une économie moderne doivent correspondre des normes nouvelles communes à toute l'Europe, dans le domaine tant du matériel que de la sécurité, ainsi que de nouvelles infrastructures adaptées à ces règles, à ces nouveaux corridors, à ces besoins nouveaux de tous ordres : flux tendus, ferroutage, et j'en oublie. L'Europe, la France notamment, ont, de surcroît, choisi le développement durable, impliquant des contraintes supplémentaires. Ces nouvelles obligations, ces nouveaux choix, monsieur le ministre, nous imposeront des investissements lourds, rapides et importants. Vous venez de le rappeler, ilsseront considérables.
L'histoire des chemins de fer nous démontre déjà que les amortissements de ces investissements sont à très longs termes et aléatoires pour des capitaux purement privés. En ce domaine, le libéralisme est donc une voiesans issue.
Le développement durable accentue cette caractéristique. L'expérience récente du tunnel sous la Manche est un exemple concret de cette réalité. Dans ces conditions, il nous faut trouver un compromis entre l'investissement privé, l'investissement public à très long terme, les subventions d'Etat et/ou européennes et les interventions économiques des collectivités locales, parmi lesquelles seules, sans doute, les régions auront la taille suffisante.
Quels sont, monsieur le ministre, les outils appropriés dont dispose le Gouvernement ou qu'il envisage de créer pour ce type d'investissement, dont le meilleur exemple me semble sans doute aujourd'hui la liaison Lyon-Turin et quelles en sont les traductions budgétaires ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Votre question, monsieur le sénateur, participe de l'idée qu'il faut changer la donne dans le domaine des transports en général, des transports terrestre et ferroviaire en particulier, ainsi que du transport combiné. Ce dernier ne recouvre pas simplement les transports ferroviaire et routier. Il regroupe tous les modes.
Ce problème du transport combiné est particulièrement important en termes de compétitivité dans l'hinterland de nos ports. Certains d'entre vous le savent très bien, le Gouvernement s'efforce de trouver un équilibre entre les exigences économiques, sociales et environnementales.
S'agissant du transport de marchandises - j'en ai parlé longuement en répondant tout à l'heure aux rapporteurs - nos concitoyens veulent une répartition nouvelle en faveur de modes plus respectueux de l'environnement et de la sécurité, y compris plus économes du point de vue de la consommation d'énergie, car cette dimension doit également être prise en compte. C'est bien dans cette direction que s'inscrit la politique que, depuis 1997, je m'efforce de mener au sein du gouvernement de Lionel Jospin. Elle exige d'importants efforts financiers non seulement pour le ferroviaire, mais aussi pour les voies navigables, si l'on veut qu'elles soient compétitives par rapport au transport routier.
Le transport combiné rail-route a connu des difficultés l'an dernier dues au fait que nos voisins allemands avaient augmenté leurs tarifs. Or le transport de marchandises est, par essence, si j'ose dire, international. Mais, depuis les dix premiers mois de l'année, il a augmenté de 5 %. Ce sont 14 milliards de tonnes par kilomètres qui ont été transportées, soit pratiquement le quart du transport ferroviaire de fret, proportion qui est très importante..
Il faut l'accroître encore et améliorer la qualité des services offerts aux chargeurs, je pense par exemple à la vitesse moyenne du transport de marchandises.
Il est bien évident qu'il faut gagner du temps, en supprimant, j'en parlais, les goulets d'étranglement et, surtout, en favorisant l'interopérabilité à l'échelle européenne. Car vouloir faire un réseau européen, c'est bien, à condition de ne pas avoir six courants électriques différents ou différents écartements de rails !
On a réalisé un tunnel sous la Manche. Les camions, qui sont placés sur le train avant l'entrée du tunnel, reprennent la route à sa sortie. Mais, beaucoup d'entre eux allant au même endroit - je pense à la région parisienne - pourquoi ne pas les laisser sur le train ? La réflexion que nous devons avoir sur la « route roulante » est intelligente et particulièrement intéressante pour les endroits sensibles. C'est évident pour les traversées pyrénéennes ou alpines, mais ce système peut être développé sur d'autres. Certes, cela nécessite des efforts.
Des engagements sont proposés pour le transport combiné rail-route : 620 millions de francs pour compenser le différentiel de coûts externes entre le rail et la route et 120 millions de francs pour financer des infrastructures.
Monsieur le sénateur, je crois comme vous qu'il faut trouver des moyens et s'engager dans des projets si nous voulons éviter les difficultés que nous connaissons aujourd'hui en matière de circulation. Le temps presse !
M. le président. La parole est à M. Gérard Larcher, au nom du groupe du RPR.
M. Gérard Larcher. Monsieur le ministre, je veux vous poser trois questions.
La première concerne un problème qui a déjà été évoqué cet après-midi. Depuis les conclusions que nous avons rendues sur le fret ferroviaire avec le président François-Poncet voilà maintenant près de trois ans, où en sommes-nous ?
Pour 1999, le fret, quoi qu'on en dise ici, a continué à stagner à 134 millions de tonnes exactement. En nombre de tonne-kilomètre, nous avons régressé. Alors que vous nous aviez annoncé un doublement en dix ans, voilà déjà deux ans de perdu ! Vous nous annoncez maintenant un doublement en six ans. Très concrètement, où en sommes-nous s'agissant des 620 locomotives ? Quelles sont, pour le fret, les perspectives en tonnes pour 2001 et 2002 ? Nous voulons le savoir pour que vos paroles ne s'envolent pas avant que vous n'arriviez à Béziers !
Ma deuxième question porte sur les transports en Ile-de-France, où des centaines de milliers de voyageurs galèrent au quotidien !
Hier soir, vous avez pu mesurer, en visitant la gare de la Bibliothèque nationale de France avec M. Huchon, que la situation ne cesse de se dégrader depuis deux mois. Je prendrai l'exemple des transports ferrés dans mon département, les Yvelines.
Depuis la rentrée, la situation est la plus mauvaise connue depuis des années : chute de caténaires, patinage de trains sur les feuilles, pannes de systèmes de communication et de motrices, et je ne parle pas des rames sans chauffage, des jours de grève, des drames personnels sur la voie et de l'insécurité !
La semaine passée - la SNCF vient d'ailleurs de présenter ses excuses - sur la ligne Paris-Montparnasse - Rambouillet, 40 % des voyageurs ne savaient pas quand ils partiraient ni quand ils arriveraient ! Une même journée, sur la même ligne et pour trois trains, les voyageurs ont changé quatre fois de train pour faire 51 kilomètres !
Alors le doute s'empare de tous. Les questions pleuvent sur la sécurité des infrastructures et des matériels. Ce n'est plus supportable. La SNCF parle de « transilien » mais elle met quatre mois pour faire réparer des trous et des fissures dans le quai principal d'une gare comme la mienne, malgré deux rappels !
Voilà des questions concrètes, monsieur le ministre !
Le milliard de francs supplémentaire annoncé pour les transports publics en Ile-de-France, c'est en fait une dotation de l'Etat qui baisse de 3,7 %. Comment, dans ces conditions, crédibiliser le plan de déplacement urbain si cher à Mme Voynet et à vous-même, plan qui prévoit que 2 % des conducteurs d'automobile abandonnent leur auto pour les transports collectifs ? C'est pourtant bien l'objectif que vous vous êtes fixé.
On chuchote d'ailleurs de source interne à la SNCF qu'une partie des motrices manquantes sont parties au fret.
A quand, concrètement, la solution pour lever les étranglements de Versailles Chantiers-Viroflay entre Mantes-la-Jolie et Paris ?
A quand les investissements en matériel et la fameuse liaison d'information train-bus qui n'en est qu'au stade expérimental à Saint-Quentin-en-Yvelines ?
Ma troisième question quittera l'Ile-de-France pour aller dans la banlieue de Londres. Qu'en est-il de la prise de risques financière que la SNCF a souscrite avec votre autorisation pour 10 milliards de francs d'investissement en réponse à l'offre Go Ahead en Grande-Bretagne ?
Alors que vous prônez le monopole en France, nous voici libéraux chez nos voisins ! Ne vont-ils pas demander le légitime principe de réciprocité ? Est-ce que nous pouvons subventionner, nous, des dizaines de milliards pour la SNCF et RFF et nous en aller risquer ainsi de l'argent à l'étranger,...
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Cela, ce sont les Anglais qui le demandent !
M. Gérard Larcher. ... alors qu'il nous faut améliorer notre réseau en Ile-de-France, adapter nos tunnels au fret, engager les fameuses voies dédiées au fret que nous proposions, avec M. François-Poncet ?
Voilà, monsieur le ministre, des questions concrètes car telle est la vie quotidienne de ceux que nous représentons. Ce sont des réponses à ces questions que nous attendons et non le rappel des grands principes.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le sénateur, il était assez plaisant d'entendre votre dernière suggestion car je croyais entendre certains de mes collègues qui, en Angleterre ou ailleurs, tiennent le même raisonnement. Ils me demandent comment j'accepte qu'une entreprise comme la SNCF puisse répondre à leur appel d'offres et venir chez eux alors qu'ils ne peuvent venir en France.
Mais pourquoi voulez-vous que nous refusions à une entreprise publique de se rendre dans des pays qui prônent le libéralisme, notamment pour le secteur ferroviaire, si elle est retenue après avoir répondu à un appel d'offres ? Au nom de quoi le lui refuserions-nous ?
Ne pensez-vous pas que, moi aussi, j'ai peut-être intérêt à ce que les choses se passent bien pour les voyageurs qui partent de Paris et passent sous la Manche ? Ne croyez-vous pas qu'il est aussi de mon intérêt que tout se passe bien pour eux, ensuite, jusqu'à Londres ? Pourquoi voulez-vous refuser cela à la SNCF ? Il est certain qu'il faut mettre chaque fois en balance les risques et les intérêts. Mais ne restez pas recroquevillé ! L'entreprise doit avoir aussi une dynamique ! Je suis pour l'autonomie de gestion.
Au demeurant, il s'agit d'une prise de risques non pas par la SNCF, mais par sa filiale Go Ahead, dont l'essentiel de l'apport est en compétences et non en capital.
M. Gérard Larcher. Eh oui !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Mais vous avez raison de vouloir vous faire préciser le caractère de cette filiale !
En ce qui concerne la région parisienne, le problème des irrégularités est un problème réel. Si vous aviez été présent, hier soir, à l'inauguration à laquelle j'ai fait allusion, vous auriez entendu le président Gallois lui-même tenir les mêmes propos que vous, rappeler toutes les mesures que l'on est en train de mettre en oeuvre pour essayer de rétablir la situation. Sur la question de la sécurité, il a fallu réhumaniser les gares. Je rappelle qu'en région parisienne les politiques précédentes consistaient plutôt à tailler dans le vif, à supprimer des emplois, à laisser les gares ouvertes certes, mais sans personnel ! Je rappelle qu'il y a eu 87 000 cheminots en moins de 1984 à 1997. C'était cela les politiques précédentes, et c'est ce que nous sommes en train de corriger.
Vous ne pouvez pas faire porter à ce gouvernement-ci la responsabilité des situations qui ont été créées avant et qui se sont traduites par un affaiblissement à la fois humain, en matériels et en qualité, faute d'investissements suffisants.
Ces deux dernières décennies, on peut le dire, le réseau voyageurs, notamment, mais aussi le réseau marchandises ont connu un sous-investissement.
Or, dans le XIIe plan sont inscrits 6,47 milliards de francs. C'est environ 50 % de plus que dans le plan précédent. Je vous le dis parce que je ne voudrais pas que vous restiez avec des idées fausses. Certes, vous pouvez considérer qu'une augmentation de 50 % est insuffisante et qu'il faudrait 500 % de plus ! Mais moi, je vous dis que 50 % de plus, c'est une rupture, c'est une inversion de tendance ! Au travers de cette augmentation, c'est notre détermination que nous exprimons !
Qu'il soit prévu, dans les contrats de plan Etat-région actuels, de dépenser dix fois plus en faveur du réseau ferroviaire que dans les précédents contrats, c'est, je vous le dis, une rupture, et cette rupture correspond à un besoin de la société et des élus.
Je vous assure, monsieur le sénateur, que chaque fois que vous contribuerez, en tant que représentant de la nation, à la promotion de cette politique en faveur du développement du transport collectif, en particulier du transport ferroviaire, vous me trouverez à vos côtés !
M. Gérard Larcher. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Gérard Larcher.
M. Gérard Larcher. Monsieur le ministre, je vous remercie de cette réponse extrêmement générale. Les usagers quotidiens des lignes qui relient Mantes et Rambouillet à Paris n'ont donc qu'à attendre le XIIe plan ! (Sourires.)
Je dois vous dire, pour prendre un exemple dans ce budget en très forte croissance, que, lorsqu'il manque 100 000 francs pour boucher des trous sur le quai principal d'une gare qui accueille 6 000 voyageurs, on n'a pas le sentiment qu'il y a véritablement eu une rupture, si ce n'est une rupture d'essieu ou une rupture des voies !
Ce que nous voulons, nous, c'est du concret : du concret sur le terrain, du concret dans la réalité du transport des Franciliens. Tout le reste n'est que paroles !
Pour avoir dialogué avec les consommateurs au sein d'un comité d'usagers qui existe depuis cinq ans, je peux vous assurer qu'ils ne ressentent absolument pas les effets bénéfiques de votre politique dans leur vie quotidienne !
En ce qui concerne la Grande-Bretagne, je dirai que, sans être contre les engagements à l'étranger - j'ai pu les trouver bons en d'autres secteurs d'activité - je pense qu'il y a d'autres priorités aujourd'hui face à l'urgence de la situation.
M. le président. La parole est à M. Madrelle, au nom du groupe socialiste.
M. Philippe Madrelle. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les opérations les plus urgentes du XIIe plan ont fait l'objet, en Gironde, de conventions de financement particulières pour assurer, sans aucune interruption, la continuité des travaux engagés au plan précédent. Au premier rang de ces opérations figure la RN 10 au nord du département de la Gironde.
Les médias se font désormais quotidiennement l'écho de l'insécurité effrayante régnant sur cet « itinéraire européen » qui voit défiler des murs de camions internationaux énormes alors que ses caractéristiques sont celles d'une route paisible de l'entre-deux guerres. Les chaînes de télévision nationales se sont elles-mêmes récemment emparées de ce sujet, dont le caractère dramatiquement mortel occulte le côté ridicule que toute la France connaît désormais.
Ainsi, voilà quinze jours, sur TF 1, dans l'émission 7 à 8 du dimanche, à l'heure de la plus grande écoute, a été diffusé un reportage fort bien fait sur cette situation dramatique.
Mises en place par les services de l'Etat dans le cadre d'une opération de sensibilisation que je soutiens, les silhouettes noires, figurant sur les bas-côtés les victimes de l'insécurité de cette route, nous renvoient en pleine figure la cruauté d'une situation insensée dont, visiblement, vos services n'ont pas pris la pleine mesure.
A la fin du XIe Plan, nous avons été abasourdis d'apprendre que les acquisitions foncières nécessaires à la réalisation d'un projet qui était censé être établi depuis plus de six ans n'étaient pas encore réalisées.
Malgré les dispositions dont j'avais obtenues la mise en oeuvre, grâce à l'action conjuguée de M. le préfet de la Gironde et de M. le président du conseil régional d'Aquitaine, visant à garantir à la direction départementale de l'équipement la disponibilité des crédits nécessaires à l'achèvement des acquisitions foncières pour permettre enfin, selon les termes mêmes de vos services locaux, « le traitement simultané des deux déviations de Marsas et de Cavignac », malgré la volonté politique la plus déterminée de tous les acteurs locaux, malgré la révolte chaque jour croissante des populations riveraines, qui se demandent quel voisin, quel enfant, quel parent va mourir demain sur cette route, malgré la volonté apparente du préfet, malgré cette mobilisation générale, rien n'avance !
Ces carences désespérantes ne sont pas tolérables. J'avais déjà appelé votre attention sur cet état de fait en juin dernier. Je constate que la situation reste bloquée.
C'est pourquoi je vous demande, monsieur le ministre, de prendre sans délai les mesures qui s'imposent, désormais, avec la plus grande urgence.
Parmi celles-ci, je demande à nouveau l'interdiction totale de cet axe aux poids lourds en transit, auxquels il faut imposer l'usage de l'autoroute A 10.
Les populations n'admettent pas - et elles ont raison - que ne soient pas réglées les modalités d'application d'une telle disposition dont la prétendue difficulté, souvent mise en avant, révèle avant tout le défaut de coordination nécessaire à l'action cohérente des deux préfets de région concernés.
Il apparaît en effet désormais clairement que l'aménagement d'ensemble à deux fois deux voies de cet itinéraire ne sera pas achevé avant de longues années. Nous n'endurerons pas un tel calvaire ! Sitôt cet axe débarrassé des trafics de fret au long cours, qui n'ont rien à y faire, une deuxième mesure immédiate doit être mise en oeuvre : la mise en sécurité de la route actuelle aux points les plus dangereux.
Vous avez, monsieur le ministre, maintes fois affirmé votre volonté de lutter contre l'insécurité routière, et je sais que vous vous y employez. Vous en avez ici une représentation dramatiquement caricaturale et je vous invite à rétablir, auprès de nos populations nord-girondines la confiance qu'elles ont perdue à l'égard des services de l'Etat, qui écrivent froidement que « l'appel d'offres - fructueux - a été une première fois déclaré sans suite en avril 1998 en raison des acquisitions foncières inachevées et de la découverte d'un site paléolithique, puis deux fois infructueux en 1999 ».
Il vous revient de nous en donner les garanties en prenant les mesures d'urgence qui s'imposent aux yeux de tous et en ordonnant à vos services locaux, toutes administrations confondues, une évaluation humaine de la situation : comment faire comprendre aux riverains qui tremblent jour et nuit, aux parents qui pleurent, aux voisins qui se révoltent, aux chauffeurs des bus scolaires qui, en traversant la RN 10 au niveau de Laruscade, jouent leur vie et celle des enfants à la roulette russe, tous les jours, comment leur faire comprendre que les travaux n'avancent pas parce qu'il faut procéder à de longues fouilles archéologiques, parce que les services chargés de l'adaptation du droit des sols sont surchargés, parce que les bureaux d'études sont encombrés, que sais-je encore ?
Je vous demande, monsieur le ministre, de nous faire connaître les dispositions concrètes que vous allez prendre. Nous attendons un calendrier de réalisation, un échéancier précis de mise en service de la voie nouvelle et la description des aménagements d'urgence que vous allez prescrire sur la route existante, ainsi que les mesures de police que vous déciderez pour rétablir la sécurité. Il s'agit vraiment d'une question de vie ou de mort !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le sénateur, vous avez raison de mettre en avant toute ma détermination, qui ne s'exerce pas seulement par des mots, en ce qui concerne l'insécurité routière.
J'ai eu l'occasion de la manifester assez fortement sur cette RN 10 quelques semaines après mon arrivée au Gouvernement, mais aussi par les choix qui ont été opérés dans la partie située dans les Landes, vous le savez d'ailleurs, monsieur le sénateur.
Je suis conscient comme vous, même si mon propos reste responsable, sur ce qu'on peut faire et sur ce qu'on doit faire. Je suis conscient de l'insécurité qui règne sur cette RN 10, surtout au nord de la Gironde, même si tout n'est pas imputable à l'infrastructure.
Parfois, et j'attire votre attention sur ce point, à vouloir tout imputer à l'infrastructure, on n'arrive plus à expliquer que l'essentiel des accidents mortels se passent à quinze ou vingt kilomètres du domicile, que l'essentiel des accidents mortels, notamment en ce qui concerne les jeunes, se passent souvent dans la nuit du vendredi, du samedi ou du dimanche.
Parler de l'insécurité routière comme vous le faites, notamment à propos des infrastructures, même si vous avez raison, ne doit pas nous faire oublier notre responsabilité, à quelque niveau que nous soyons, sur la mobilisation de tous les autres éléments pour faire reculer l'insécurité routière.
Par ailleurs, l'existence d'une route nationale gratuite mise progressivement à deux fois deux voies parallèlement à une autoroute payante plus longue est sûrement à l'origine des difficultés que nous connaissons. Bien des camions préfèrent emprunter la route à deux fois deux voies gratuite plutôt que l'autoroute payante, qui leur fait faire un détour.
Une question se pose alors : peut-on ou non instituer une obligation ?
Des mesures ont été prises au niveau de la région Poitou-Charentes. Pour ma part, j'ai pris un certain nombre de décisions, que je me permets de vous rappeler puisque vous avez dit que, à l'échelon des services de l'Etat, il ne se passait rien.
En plus de la mise en sécurité de la RN 10 dans les Landes, financée à 100 % par l'Etat, pour un montant de 1 320 millions de francs, les aménagements de la RN 10 sont prévus dans les contrats de plan Etat-régions : 2,6 milliards de francs ont ainsi été inscrits pour la sécurisation de cet axe avec, en particulier, 1,3 milliard de francs pour la poursuite de la mise à deux fois deux voies dénivelée dans la région Poitou-Charentes et 191 millions de francs pour son achèvement dans la Gironde, au nord de Marsas.
Sur cette dernière section, concernant la déviation de Cavignac, la décision a été prise de faire en même temps la déviation de Laruscade, les déblais de l'une servant aux remblais de l'autre, ce qui réduit le coût des deux opérations. Des acquisitions foncières étant encore nécessaires sur la déviation de Laruscade, la déclaration d'utilité publique de l'opération sera prorogée en début d'année pour permettre l'acquisition de l'ensemble des terrains d'ici à la fin de l'été 2001. Les remembrements sont en cours ; le nouvel appel d'offres sera lancé dans le courant du printemps 2001 et les travaux pourront démarrer dès l'automne 2001, en vue d'un achèvement total en 2004. Les 190 millions de francs nécessaires à l'achèvement de l'opération seront mis en place en complément des 122 millions de francs déjà mobilisés pour achever cette opération dans les meilleurs délais.
Concernant l'interdiction de circulation des poids lourds de plus de 7,5 tonnes, il convient de souligner que la liberté de circuler sur les routes nationales est un principe fondamental et que sa restriction ne peut être envisagée que pour des motifs majeurs, au premier rang desquels figure la sécurité, mais sur des sections réduites. Le préfet d'Aquitaine a limité les conditions de circulation des poids lourds dans une section reconnue comme « accidentogène », ce qui était moins le cas en Poitou-Charentes, comme je l'ai dit tout à l'heure.
Soyez assuré que, conjointement avec les ministres de l'intérieur et de la défense, je demanderai aux préfets une présence accrue des forces de l'ordre sur cet axe dans le cadre des plans de contrôles routiers de 2001.
M. Philippe Madrelle. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Madrelle.
M. Philippe Madrelle. Monsieur le ministre, je vous demande de mettre vraiment la « pression » sur vos services, parce que c'est une course de lenteur.
J'aurais pu vous parler également de la situation des aménagements de la RN 137, qui figuraient aussi au contrat de plan précédent et qui se trouvent aujourd'hui dans une situation d'enlisement identique à celle que j'ai stigmatisée à propos de la RN 10.
Cette route nationale, d'une dangerosité quasi égale, n'a reçu pour tout traitement que la réfection de la couche de chaussée sur une courte section, réfection qui a évidemment pour premier effet d'inciter les usagers à accroître leur vitesse !
Comme pour la RN 10, je vous demande, monsieur le ministre, de donner à vos services instruction de privilégier l'efficacité et la mise en oeuvre rapide des aménagements indispensables au rétablissement de la sécurité sur cette route nationale.
Sans négliger les nécessaires précautions à prendre à l'égard de l'environnement, je souhaite vous sensibiliser au fait que, pour des travaux d'aménagement de routes existantes comme la RN 137, dont personne ne comprend qu'ils puissent être à l'origine de bouleversements écologiques, d'autant que l'emprise reste la même, on devrait pouvoir faire l'économie de procédures interminables pour privilégier ce qui nous paraît fondamental : la protection des vies humaines. Le retard pris est tel que l'incompréhension de la population est totale.
M. le président. La parole est à M. Le Grand, au nom du groupe du RPR.
M. Jean-François Le Grand. Monsieur le ministre, j'aborderai trois problèmes.
Premièrement, le b.a.-ba de la sécurité routière, c'est l'apprentissage de la conduite et la connaissance du code de la route. Or vous n'êtes pas sans savoir que, dans toute la France, les exploitants d'auto-école et les inspecteurs manifestent ou sont en grève. Les premiers demandent plus d'inspecteurs et, tout comme les candidats, une amélioration des conditions d'accueil sur les lieux de déroulement des épreuves du permis de conduire. De leur côté, les inspecteurs souhaitent pouvoir bénéficier soit d'une voiture de service, soit d'indemnités leur permettant de se rendre sur les lieux d'examen. Que comptez-vous leur répondre ?
Deuxièmement, il faut, à l'évidence, permettre au transport routier de mieux répercuter ses coûts sur ses tarifs et lui assurer un meilleur équilibre dans les relations contractuelles. C'est à ce prix qu'il assainira les conditions économiques de son activité, qu'il sera respectueux de la sécurité et de l'environnement et que les chauffeurs jouiront de conditions de travail moins pénibles. C'est aussi à ce prix qu'on fera cesser le dépavillonnement des transporteurs.
Il s'agit d'une profession très éprouvée : quatre conflits en trois ans et demi. Le dernier en date a permis d'apporter quelques solutions : ainsi, la TIPP sera récupérée à raison de 35 centimes par litres en 2000 et de 25 centimes en 2001.
Or la Commission européenne vient de sonner le glas du carburant professionnel.
Cette profession, déjà touchée par un dumping social et économique, va se voir de plus ébranlée par un différentiel de fiscalité. Que pouvez-vous répondre, monsieur le ministre, aux transporteurs routiers ?
S'agissant, troisièmement, du ferroutage et du transport ferroviaire des marchandises, on peut faire les plus beaux discours, les plus enflammés, les mieux documentés. Vous avez parlé tout à l'heure de six cent cinquante locomotives. Dont acte ! Mais les rails continuent de faire défaut ! Vous nous affirmez que vous allez les doubler en dix ans, voire en six ans. De toute façon, ce sera encore insuffisant pour « définistériser » la France par rapport à l'Europe en matière de fret.
Monsieur le ministre, je vous ai entendu, répondant à mon collègue M. Puech, vanter les mérites de la concession du viaduc de Millau. Vous avez aussi vanté les avantages des concessions autoroutières, qui nous ont permis, voilà une trentaine d'années, de construire un réseau autoroutier tout à fait convenable. Ne pourriez-vous, suivant la même logique, aller jusqu'à la concession de corridors ferroviaires de fret, ce qui nous permettrait de relier au moins les ports entre eux, tout particulièrement ceux qui me sont le plus chers, Cherbourg et Le Havre, en développant un hinterland et en permettant à ces deux ports, situés plus à l'ouest que d'autres sur la Manche, qui voient passer 20 % du trafic mondial, de tirer leur épingle du jeu parce qu'ils seraient ainsi parfaitement reliés au reste de l'Europe ?
Monsieur le ministre, le bon geste que vous faites pour les autoroutes et que vous allez faire pour Millau, faites-le aussi pour le rail !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le sénateur, même si je brûle de vous répondre tout de suite sur votre troisième point (Sourires) , je reprendrai chacun des thèmes de votre intervention dans l'ordre que vous avez suivi.
Après l'augmentation du nombre des inspecteurs du permis de conduire dans le budget de 2000 - trente postes supplémentaires -, le Gouvernement a retenu, lors du comité interministériel de sécurité routière, la création de 230 postes entre 2001 et 2003. Au budget de 2001, ce sont soixante-dix-sept nouveaux postes qui sont inscrits. Cette augmentation de 30 % de leur nombre permet d'améliorer les conditions de passage du permis de conduire et de renforcer le contrôle des auto-écoles, avec l'accord de la profession.
Enfin, des mesures ont été prises pour favoriser l'amélioration des conditions d'accès au permis de conduire des jeunes en difficulté, mesures qui revêtent pour moi une importance particulière.
Quant aux auto-écoles, elles bénéficient du plan fiscal présenté par le Gouvernement, en ce qui concerne tant les mesures spécifiques aux PME que l'ajustement de la fiscalité pétrolière, qui profite à tout le monde.
J'ajoute que le décret sur la moralisation de la profession, qui a fait l'objet d'un accord avec ses représentants, sera promulgué avant la fin de l'année ; il était attendu depuis plus de quinze ans ! Les contrôles vont donc s'intensifier.
S'agissant du transport routier de marchandises, la loi de février 1998 - certains l'appellent la « loi Gayssot », mais c'est à tort puisque c'est une loi de l'Assemblée nationale et du Sénat - révèle son efficacité en matière d'assainissement des conditions d'exercice. Le « paquet social routier », qui fait actuellement l'objet de discussions devant les instances communautaires, viendra, je l'espère, ajouter d'autres effets positifs. J'espère, par exemple, pouvoir obtenir l'interdiction de l'utilisation, par des entreprises européennes et sur les routes européennes, d'une main-d'oeuvre venue de pays tiers, et payée aux tarifs qui ont cours dans ces pays tiers. En ce qui concerne la TIPP, qui est, vous le savez, déductible en 2000 et 2001, la Commission a effectivement évoqué son intention de la supprimer. Mais nous allons discuter. Il ne faut pas partir battu a priori ! Je ne prétends pas que je n'ai pas, moi-même, été un peu alerté, mais nous allons faire en sorte que les conditions économiques et sociales de la profession soient défendues.
Pour ce qui est des infrastructures ferroviaires, il appartient à Réseau ferré de France de mettre en oeuvre les projets de modernisation et de développement.
Plus fondamentalement, s'il peut être tentant de déroger aux attributions fixées par la loi à RFF, dans l'objectif louable d'accélérer la réalisation de nouvelles infrastructures qui mobilisent de lourds investissements, je crois utile de vous apporter un certain nombre de précisions qui illustrent les difficultés de la démarche.
Compte tenu des conditions de concurrence intermodale, le fret ferroviaire n'est pas en mesure de rémunérer, il s'en faut, le coût des infrastructures. Cela est vrai partout en Europe.
En Grande-Bretagne, on a privatisé, mais les travaux d'infrastructures sont financièrement si lourds qu'il est impossible d'obtenir un retour sur investissements ! L'ordre de grandeur de la capacité contributive du fret ferroviaire est, en moyenne, de 10 %. C'est là une des explications majeures de la mixité des lignes ferroviaires, situation très répandue. Dès lors, que le mode de réalisation de lignes nouvelles pour le fret soit public ou privé, l'essentiel du financement devra, à l'évidence, être public.
Pourquoi introduire un autre gestionnaire que RFF si 90 % des financements doivent être publics ? D'autant que, comme l'ont montré, il y a quelques jours, les débats de la première conférence européenne sur les infrastructures ferroviaires, organisée par RFF, une partie des difficultés rencontrées en Europe pour l'écoulement du trafic ferroviaire de fret réside justement dans l'existence d'une multitude de gestionnaires d'infrastructures, qui ont du mal à se coordonner, chacun ayant sa stratégie propre en matière de redevance d'infrastructures.
Est-il souhaitable, dans ce contexte, d'ajouter encore d'autres gestionnaires d'infrastructures, au risque de balkaniser le réseau ? Nous ne le pensons pas. Mais cela ne veut pas dire qu'il ne faut pas dédier des lignes ferroviaires au fret, qu'il ne faut pas faire des corridors. Le corridor BELIFRET, qui réunit la Belgique, le Luxembourg, la France et l'Italie, bientôt rejoints par l'Espagne, est quelque chose qui marche ! Or il s'agit d'entreprises publiques faisant rouler des trains sur des infrastructures également publiques. En tout cas, ce sont autant de tonnes de marchandises en moins sur la route !

Bien entendu, certains projets particuliers peuvent faire l'objet de montages spécifiques. Je pense notamment aux projets internationaux comme la liaison Perpignan-Figueras, entre la France et l'Espagne, ou le futur tunnel ferroviaire transalpin Lyon-Turin, entre la France et l'Italie. Pour ces projets transfrontaliers, les modalités de réalisation doivent être examinées au cas par cas, dans le cadre d'accords internationaux entre la France etles pays voisins.
M. Jean-François Le Grand. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Le Grand.
M. Jean-François Le Grand. Monsieur le ministre, je ne pars jamais battu mais permettez-moi d'arriver un peu déçu ! (Sourires.)
En ce qui concerne les inspecteurs, sachez que, dans le département de la Manche, le délai atteint près de quatre mois entre deux examens, faute d'inspecteurs. Alors, 77 de plus, c'est bien, mais c'est insuffisant pour permettre le délai normal entre deux examens, soit quinze jours.
Sur le fret, monsieur le ministre, je suis un peu inquiet pour vous, car j'ai l'impression que vous ne croyez plus en votre propre discours. (M. le ministre fait un signe de dénégation.)
Si vraiment le ferroutage est rentable, alors il y aura un retour sur investissements, notamment sur les axes les plus importants.
Vous parliez tout à l'heure de BELIFRET. C'est l'un de ces axes que l'on pourrait qualifier de milliardaire, comme on le disait des lignes aériennes transportant des milliards de passagers. Cela prouve que des actions peuvent être menées sous des formes diverses et variées grâce à l'investissement privé.
Cela ferait autant d'investissements publics disponibles pour d'autres secteurs et d'autres lignes qui, eux, ne sont pas a priori bénéficiaires. Vous auriez là l'occasion d'une péréquation intelligente qui vous permettrait de doter l'ensemble de la France d'un réseau tout à fait performant !
Mais, un jour, vous verrez, vous croirez à votre propre discours ! (Sourires.)
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le sénateur, je suis d'accord avec vous : 77 inspecteurs, ce n'est pas suffisant. C'est pour cela que nous avons prévu la création de 210 postes en trois ans, chiffre que je rapproche du zéro enregistré, en termes de création de postes d'inspecteur, de 1993 à 1997 !
M. le président. Monsieur le ministre, je tiens à vous remercier de vous être prêté à ce nouveau mode de discussion d'un budget. Naturellement, nous aurons, avec M. le président de la commission des finances, à affiner le dispositif, mais je crois que notre débat budgétaire a gagné en échanges ; il est plus interactif, comme on dit aujourd'hui.
Je rappelle au Sénat que les crédits concernant les transports terrestres, les routes et la sécurité routière inscrits à la ligne « Equipement, transports et logement » seront mis aux voix aujourd'hui même, à la suite de l'examen des crédits affectés à la mer.

ÉTAT B

M. le président. « Titre III : 1 213 286 420 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre III est réservé.
« Titre IV : 214 404 732 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre IV est réservé.

ÉTAT C

M. le président. « Titre V. - Autorisations de programme : 11 119 112 000 francs ;
« Crédits de paiement : 5 346 588 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre V est réservé.
« Titre VI. - Autorisations de programme : 18 352 298 000 francs ;
« Crédits de paiement : 7 243 682 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre VI est réservé.
J'appelle en discussion l'article 60 bis, qui est rattaché pour son examen aux crédits affectés aux transports et à la sécurité routière, ainsi que, en accord avec la commission des finances, l'amendement n° II-16 tendant à insérer un article additionnel après l'article 60 bis.

Equipement, transports et logement

Article 60 bis



M. le président.
« Art. 60 bis. - L'avant-dernier alinéa de l'article L. 2531-6 du code général des collectivités territoriales est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Ce remboursement est maintenu aux employeurs concernés, pour la période restant à courir après abrogation du périmètre d'urbanisation dans les conditions de l'article L. 5341-2. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 60 bis.

(L'article 60 bis est adopté.)

Article additionnel après l'article 60 bis



M. le président.
Par amendement n° II-16 rectifié, MM. Plancade et Picheral proposent d'insérer, après l'article 60 bis, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article 74 de la loi n° 99-586 du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :

« Art... - La communauté d'agglomération est substituée dans les délibérations des communes membres, établissements publics de coopération intercommunale et/ou syndicats mixtes comprenant des communes membres, instituant un versement destiné aux transports en commun en application des dispositions de l'article L. 2333-66 du code général des collectivités territoriales.
« Jusqu'à la date à laquelle le conseil de la communauté d'agglomération aura délibéré sur l'institution d'un versement destiné aux transports en commun et dans un délai ne pouvant excéder six mois à compter de l'arrêté de création ou de transformation, la communauté d'agglomération perçoit le produit du versement sur le territoire des communes où un tel versement avait été antérieurement institué. Le taux applicable sur le territoire de chacune des communes est celui qui avait été adopté par le conseil municipal ou l'organe délibérant de l'établissement public compétent. »
La parole est à M. Plancade.
M. Jean-Pierre Plancade. Cet amendement purement technique a pour objet de permettre la continuité dans la perception du versement destiné aux transports en commun dans les communautés d'agglomération jusqu'à la date à laquelle le conseil de la communauté aura institué un tel versement applicable sur l'ensemble de son territoire, c'est-à-dire sur ce qui s'appellera le périmètre de transports urbains.
L'article 74 de la loi du 12 juillet 1999 prévoit que l'arrêté de création ou de transformation vaut établissement d'un tel périmètre. Il en résulte que les communes, établissements publics de coopération intercommunale et syndicats mixtes comprenant des communes membres ne peuvent plus percevoir le « versement transports ».
Il appartient dès lors au conseil de la communauté d'agglomération de se prononcer sur l'institution et le taux du « versement transports » communautaire. Son taux sera donc fixé en fonction des services de transports urbains que la communauté envisage de mettre en oeuvre. Il est difficilement concevable que le conseil de la communauté se prononce sur un taux de versement avant d'avoir procédé aux études nécessaires en vue de déterminer la nature du service qui sera offert à la population.
Enfin, il est prévu que la période transitoire ne pourra excéder dix mois.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial. La commission souhaiterait, avant de se prononcer, entendre d'abord l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. C'est une très bonne idée et le Gouvernement y est très favorable.
M. le président. Quel est maintenant l'avis de la commission ?
M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial. Favorable !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-16 rectifié, accepté par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement est adopé.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 60 bis.
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances concernant les transports terrestres, la sécurité et les routes.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante-cinq.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures trente-cinq, est reprise à vingt et une heures quarante-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

3

COMMISSION MIXTE PARITAIRE

M. le président. M. le président a reçu de M. le Premier minsitre, la lettre suivante :
Monsieur le président,
« Conformément à l'article 45, alinéa 2, de la Constitution, j'ai l'honneur de vous faire connaître que j'ai décidé de provoquer la réunion d'une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la résorption de l'emploi précaire et à la modernisation du recrutement dans la fonction publique ainsi qu'au temps de travail dans la fonction publique territoriale.
« Je vous serais obligé de bien vouloir, en conséquence, inviter le Sénat à désigner ses représentants au sein de cette commission.
« J'adresse, ce jour, à M. le président de l'Assemblée nationale, une demande tendant aux mêmes fins.
« Veuillez agréer, monsieur le président, l'assurance de ma haute considération.

« Signé : Lionel Jospin »

Il sera procédé à la nomination des représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire selon les modalités prévues par l'article 12 du règlement.

4

LOI DE FINANCES POUR 2001

Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2001, adopté par l'Assemblée nationale.

Equipement, transport et logement (suite)



III. - TRANSPORTS ET SÉCURITÉ ROUTIÈRE
4. Transport aérien et météorologie
Budget annexe de l'aviation civile

M. le président. Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi concernant l'équipement, les transports et le logement : III. - Transports et sécurité routière : 4. Transport aérien et météorologie, et budget annexe de l'aviation civile.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Yvon Collin, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes réunis, sans doute pour l'une des dernières fois, pour examiner le projet de budget annexe de l'aviation civile et les crédits concernant le transport aérien et la météorologie.
Pour l'une des dernières fois, puisque la proposition de loi organique réformant l'ordonnance du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances qui a été adoptée par la commission des finances de l'Assemblée nationale entend supprimer la catégorie des budgets annexes.
Monsieur le ministre, cela m'amène à vous poser ma première question. Approuvez-vous la suppression du budget annexe de l'aviation civile ?
Pour ma part, je ne suis pas favorable à la suppression des budgets annexes. Ils me paraissent être une formule utile, sous réserve de respecter certains principes. Vous connaissez - nous nous connaissons bien maintenant - mes exigences de ce point de vue, et j'en rappellerai quelques-unes ce soir.
Monsieur le ministre, ne vous méprenez pas. Mon désaccord avec la suppression des budgets annexes ne vient pas du fait que le budget annexe de l'aviation civile que vous nous présentez ce soir est un parangon de vertus. Je devine que je vous déçois, monsieur le ministre. Vous vous attendiez sans doute à ce que je me félicite d'une progression des crédits de 2,8 %,...
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Eh oui !
M. Yvon Collin, rapporteur spécial. ... que vous jugez modérée. Vous deviez aussi espérer que je saluerai la baisse du taux unitaire des redevances de navigation aérienne (M. le ministre opine) que vous avez annoncée.
Hélas, trois fois hélas ! je ne le peux pas. Je n'ai pas pour rôle d'ouvrir le bleu budgétaire et de tenir pour argent comptant ce qu'il contient. Je le regrette, car cela serait plus simple et traduirait une révolution : la capacité du Gouvernement à nous présenter des données budgétaires claires et sincères. Nous en sommes loin !
D'abord, si les crédits augmentent de 2,8 %, les prélèvements obligatoires spécifiques du transport aérien croissent, eux, à structure constante, de 7,5 %, ce qui, vous en conviendrez, n'est pas tout à fait la même chose.
S'il faut, pour en apprécier la variation, tenir compte des recettes du budget annexe de l'aviation civile, il faut aussi tenir compte d'autres recettes : celles qui résultent du fonds d'intervention pour les aéroports et le transport aérien, le FIATA, et celles qui proviennent de la funeste taxe d'aéroport, directement affectée aux aéroports.
Je souligne ensuite, monsieur le ministre, que vous faites l'impasse sur un certain nombre de dépenses inéluctables. Les crédits d'exploitation du budget annexe augmentent déjà très vivement. Avec un accroissement de 3,8 %, on est assez loin de mettre en évidence les gains de productivité du secteur, auxquels vous aimez vous référer. Mais votre goût pour le productivisme, monsieur le ministre, ne doit pas vous pousser à user d'artifices pour le satisfaire.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. C'était à une certaine époque ! (Sourires.)
M. Yvon Collin, rapporteur spécial. Je vous pose ainsi, avec humour, ma deuxième question, monsieur le ministre : où sont les crédits nécessaires au financement des mesures générales de la fonction publique ? Où sont les provisions budgétaires nécessaires au financement du nouveau protocole triennal 2001-2003 ? Je n'en trouve pas trace dans votre projet de budget.
Et pourtant ! Je vous ai interrogé sur les perspectives de la négociation du nouveau protocole. « Trop tôt », m'avez-vous répondu. J'avais demandé la transmission des procès-verbaux de négociation. Aucune suite n'a été donnée à cette demande. Très heureusement, les organisations syndicales sont plus claires. Elles demandent, pêle-mêle, plus de personnels, plus de rémunérations, plus de 35 heures, plus de pensions, etc. Cela doit avoir un coût, ou alors, monsieur le ministre, vous êtes non seulement le meilleur élève du Gouvernement, comme certains le prétendent à juste titre, je partage cet avis, mais aussi un vrai magicien. Moi, j'aime la magie,...
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Moi aussi !
M. Yvon Collin rapporteur spécial. ... mais je m'applique à découvrir les trucages budgétaires. Je m'avoue vaincu et je vous demande quel est votre « truc », monsieur le ministre, pour que ces coûts disparaissent devotre budget.
Troisième question : comment allez-vous faire pour baisser dans les proportions que vous avez indiquées les taux unitaires des redevances de navigation aérienne alors que les perspectives de trafic, qui restent bonnes, j'en conviens, ne sont plus suffisantes pour vous le permettre ? Allez-vous constater des reprises de provision au-delà de ce que vous prévoyez et qui est déjà très élevé ? Allez-vous recourir plus que prévu à l'emprunt ? Ou alors allez-vous arrêter des taux supérieurs à ceux que vousaviez annoncés ?
J'en arrive à ma quatrième question, monsieur le ministre. Ne vous paraît-il pas quelque peu anormal que ceux qui financent le budget annexe et qui sont aussi ses usagers soient totalement écartés des négociations sociales qui se déroulent au sein de la direction générale de l'aviation civile, la DGAC ? Vous me répondrez sans doute qu'ils ne sont juridiquement pas l'employeur des personnels. Mais admettez qu'ils financent leurs recrutements, leurs rémunérations et leurs pensions.
Je pense qu'il s'agit d'une question qui fait partie d'un problème plus vaste : la représentation des usagers du transport aérien dans notre pays. Je suis sûr que, de ce point de vue, vous êtes d'accord avec moi. Je voudrais en dire deux mots puisque le transport aérien est le seul mode de transport entièrement financé par les usagers et par les collectivités territoriales, le budget général de l'Etat s'étant totalement désengagé de ce secteur.
Ce problème est d'abord celui de la surveillance des coûts des infrastructures du transport aérien. Ces coûts sont in fine supportés par les clients des compagnies, une faible partie d'entre eux étant absorbés par elles. L'on pourrait s'attendre, dans ces conditions, à ce que les compagnies soient particulièrement vigilantes dans ce domaine, soit pour faire des économies, soit pour défendre les intérêts commerciaux de leur clientèle. Certaines le font, mais notre excellente compagnie Air France est bien inerte sur ce sujet. On l'entend rarement contester les augmentations de redevances ou de taxes et sa position sur les charges du budget annexe est des plus discrètes. Je m'interroge sur la concomitance de cette situation avec l'appartenance de la compagnie au secteur public. Elle me met mal à l'aise puisque j'ai le sentiment d'être un peu isolé en défendant des intérêts consuméristes sur lesquels cette grande entreprise devrait particulièrement veiller.
Il est vrai qu'une grève des contrôleurs aériens coûterait 200 millions de francs par jour à la compagnie et que la progression continue des charges salariales du budget annexe de l'aviation civile est répercutée sur ses clients ou absorbée par des économies que favorisent d'importants gisements. Mais Air France n'est pas seule ! Il y a les autres compagnies et il y a aussi les clients ! Je m'en ferai, monsieur le ministre, l'inlassable défenseur !
A ce propos, permettez-moi d'insister sur un problème que j'avais exposé au Premier ministre dès le 22 juin 1997, le problème des surréservations. Comment comptez-vous mettre à profit - c'est une autre question, monsieur le ministre - la présidence par la France de l'Union européenne pour que le Conseil « transport » prohibe une fois pour toutes une pratique commerciale aussi abusive qu'insupportable ?
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Eh oui !
M. Yvon Collin, rapporteur spécial. Je terminerai mon propos sur le budget annexe de l'aviation civile en recommandant que la France n'écarte pas toute proposition d'intégration du ciel unique européen.
Je partage votre sentiment : ce sujet est plus complexe que ce qui semble transparaître des réflexions de la Commission. Nous devons aussi défendre les intérêts français. Mais nous ne pourrons les défendre si nous ne jouons pas le jeu de la transparence sur nos coûts, sur notre efficience et sur nos performances.
A ce sujet, monsieur le ministre, la France a raison lorsqu'elle fait valoir que les retards sont parfois le prix de la sécurité du transport aérien. Nous devons, en cette année de deuil, et j'ai une pensée émue pour les victimes du transport aérien, affirmer notre attachement à la sécurité du transport aérien à laquelle les contrôleurs sont très sensibilisés, j'en témoigne.
Mais nous ne devons pas opposer ponctualité et sécurité. Les deux vont de pair. C'est bien notre faculté à répondre aux problèmes de capacité des infrastructures de transport aérien qui permettra de satisfaire ces deux exigences.
C'est le point central de la mission de contrôle de la navigation aérienne que je mène actuellement. Je n'en dévoilerai pas, ce soir, les conclusions. Ce serait prématuré. Mais je crois qu'il existe, dans ce domaine, un réel problème de gestion des personnels. Pouvez-vous à ce propos, monsieur le ministre, nous indiquer quels sont les temps moyens d'ancienneté dans chacun des cinq centres de contrôle aérien et quelle est la durée moyenne de formation d'un contrôleur comparée à la durée pendant laquelle, au cours de sa carrière, il est opérationnel.
Avant d'en venir aux crédits du transport aérien, je souhaiterais évoquer d'un mot la question du troisième aéroport. Elle est évidemment liée à celle de Roissy-Charles-de-Gaulle.
A ce propos, vous avez décidé de plafonner les capacités de Charles-de-Gaulle à 55 millions de passagers. Je saisis vos motivations, mais je ne comprends pas comment cette décision peut suivre celle qui concerne la construction des deux nouvelles pistes à Roissy, laquelle, semble-t-il, a été prise sur la base d'une prévision de 70 millions de passagers. Merci, monsieur le ministre, de nous expliquer la cohérence de ces deux décisions.
Du coup, vous annoncez un troisième aéroport dans le Bassin parisien. Des appétits s'aiguisent, des réticences se font jour. Parmi celles-ci, il en est une qui a un certain poids, je veux parler de la réticence d'Air France. La compagnie ne paraît pas enthousiasmée par la perspective d'ouvrir une seconde plate-forme de correspondance.
Convenez que c'est un léger problème et que la question se pose de savoir quel type de trafic accueillera ce nouvel aéroport ! Merci, là aussi, monsieur le ministre, d'apporter une réponse précise car elle concerne l'utilisation d'un investissement de plusieurs dizaines de milliards de francs.
Plusieurs dizaines de milliards de francs, c'est aussi le coût du développement de l'A3XX. Je me félicite du lancement de cet appareil annoncé par EADS. Je l'ai depuis longtemps appelé de mes voeux...
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Moi aussi !
M. Yvon Collin, rapporteur spécial. Je vous en donne acte !
J'avais souhaité également une meilleure intégration de l'industrie aéronautique européenne. C'est fait, ou presque, et je vous félicite, monsieur le ministre, d'avoir contribué à la privatisation d'Aérospatiale, sans laquelle cette intégration n'aurait pas été possible. (M. le ministre sourit. - M. le rapporteur pour avis applaudit.)
Il est toutefois dommage que le siège de la holding EADS soit localisé aux Pays-Bas. On en devine tous les avantages fiscaux, mais, monsieur le ministre, il serait utile que vous nous indiquiez précisément leur montant par rapport à des localisations alternatives, en France ou en Allemagne.
Je suis certain que des simulations ont été faites sur ce sujet. Je me félicite aussi que vous inscriviez dans les crédits de transport aérien une avance remboursable qui marque l'intérêt du Gouvernement et de son Premier ministre à ce projet d'A3XX.
Je vous poserai trois questions précises à ce propos. Que font, de leur côté, le Royaume-Uni, l'Espagne et l'Allemagne ? Où en est le projet, que vous aviez évoqué, tendant à rééquilibrer notre système de soutien public de sorte qu'il soit aussi favorable que celui qui est en vigueur aux Etats-unis ? Quel est le taux de consommation de l'avance remboursable ouverte dans le budget de 2000 pour l'A3XX ?
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'en aurai fini lorsque je vous aurai indiqué que la commission des finances, à la sagesse de laquelle je m'en étais remis, a décidé de rejeter les crédits du budget annexe de l'aviation civile pour 2001.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Oh !
M. Yvon Collin, rapporteur spécial. Le vote des crédits du transport aérien aurait sans doute connu un meilleur sort, mais il n'est pas individualisé et interviendra après l'examen des crédits de la mer. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jean-François Le Grand, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan, pour l'aviation civile et le transport aérien. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi tout d'abord de dire combien la commission des affaires économiques partage l'analyse excellement exposée par notre collègue Yvon Collin sur le devenir des budgets annexes d'une manière générale, et sur celui de l'aviation civile en particulier.
Permettez-moi également de vous livrer en préambule un sentiment et deux réflexions que m'inspire la catastrophe du Concorde survenue le 25 juillet dernier.
Le sentiment, tout d'abord, c'est que nous ne pouvons pas, ce soir, nous dispenser d'avoir une pensée pour les victimes et leurs familles, après cet accident terrible qui a coûté la vie à 113 personnes. Ce dramatique accident a cloué au sol un des plus beaux fleurons de notre technologie : cet avion volant deux fois plus vite que le son, capable de survoler l'océan Atlantique en moins de quatre heures. Je forme des voeux pour que les causes de cette catastrophe soient le plus rapidement possible élucidées.
Ma première réflexion, après ce sentiment qui sera, j'en suis sûr, partagé par tous, consiste à donner un « coup de chapeau » au bureau enquêtes accidents, qui effectue un travail difficile, avec sérieux et compétence. Le système que nous avons institué en votant la loi du 29 mars 1999 sur les incidents et accidents aériens semble avoir, dans ces circonstances dramatiques, bien fonctionné, et nous ne pouvons que nous réjouir des amendements qui avaient alors été retenus par le Sénat.
Ma deuxième réflexion vise à souligner la pertinence d'une recommandation constante que nous faisons, en matière de politique aéroportuaire, depuis de longues années : celle, monsieur le ministre, de la maîtrise de l'urbanisation au voisinage des aéroports.
Je rappelle que, en 1999, nous avions introduit dans le texte portant création de l'autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires des dispositions issues d'une proposition de loi que j'avais déposée, tendant à l'information préalable des riverains des aéroports.
Le Sénat avait aussi modéré les tentations de certains députés d'adoucir les dispositifs de contrôle de l'urbanisation au voisinage des aéroports, au nom de la revitalisation des vieux bourgs riverains.
La solution que nous avions proposée, et qui avait été retenue ici comme à l'Assemblée nationale, conditionnait toute opération de restructuration urbaine au respect d'une enveloppe constante de capacité d'accueil d'habitants. Or, lors de la discussion du projet de loi sur la solidarité et le renouvellement urbains, nos collègues députés sont revenus, moins d'un an après sa conclusion, sur ce sage compromis.
Pis encore, le rapporteur du texte de 1999, qui avait adopté en nouvelle lecture, sans les modifier, nos propositions, a lui-même déposé l'amendement qui a levé les garde-fous du code de l'urbanisme. Bien sûr, nous nous y sommes opposés au Sénat. Mais, ironie du sort, c'est dans la ville dont il est le premier magistrat que le Concorde s'est écrasé, vingt-sept jours seulement après la discussion en nouvelle lecture de son amendement, ce qui a conduit - je le dis avec beaucoup de gravité - ce député à s'exprimer sur toutes les ondes et à déclarer au journal Le Monde du 27 juillet que « la loi sur l'urbanisation est trop laxiste ». Je le dis avec beaucoup de solennité, mais avec beaucoup de tristesse en même temps.
Je considère, quant à moi, qu'être élu c'est être responsable. Je continue donc de m'opposer aux dispositions adoptées à l'article 36 du projet de loi sur la solidarité et le renouvellement urbains, que nous avons d'ailleurs déférée au Conseil constitutionnel.
Je déplore que le Gouvernement et l'Assemblée nationale aient si brutalement changé d'avis, entre 1999 et 2000. La catastrophe du Concorde a malheureusement montré toute la pertinence de notre position !
En ce qui concerne les crédits du transport aérien et de l'aviation civile, je ne reviendrai pas sur l'analyse du budget annexe, que vient de développer de façon très argumentée notre collègue Yvon Collin. Comme lui, je regretterai simplement que la subvention de l'Etat baisse de 43 %, puisqu'elle passe de 210 millions de francs à 120 millions de francs, et que les taxes et redevances payées par les compagnies assurent, symétriquement, une proportion croissante du financement. Je partage totalement, sur ce point, l'analyse de M. Collin. Qu'il soit remercié de son excellent rapport !
C'est surtout le Fonds d'intervention pour les aéroports et le transport aérien, le FIATA, qui préoccupe la commission des affaires économiques : aucun crédit supplémentaire n'est prévu cette année pour le soutien des dessertes aériennes d'aménagement du territoire, qui devrait être financé, à hauteur d'environ 94 millions de francs, par des reports d'excédents des années passées.
J'aimerais réaffirmer ici l'attachement de la commission à ce système mis en place par la loi Pasqua du 4 février 1995, qui permet de subventionner vingt et une liaisons d'aménagement du territoire.
Progressivement, le FIATA se déforme : d'un outil d'aménagement du territoire, il ne faudrait pas qu'il devienne pour l'Etat un simple prétexte à la perception d'une taxe !
En même temps, la restructuration du pôle régional d'Air France entraîne des supressions de lignes parfois préjudiciables à l'équilibre du territoire.
Dans ces conditions, monsieur le ministre, pourquoi conserver la majorité du capital de cette compagnie si l'Etat ne s'en sert pas pour assurer l'aménagement aérien du territoire ?
Sur l'initiative de son président, Jean François-Poncet, la commission des affaires économiques a mis en place un groupe de travail pour contrôler l'action du Gouvernement en la matière.
S'agissant du troisième aéroport dans le Bassin parisien, permettez-moi de rappeler les conclusions de la mission conduite en 1996 sur ce sujet par Jacques Douffiagues, à laquelle j'ai eu l'honneur d'appartenir. L'optimatisation des plates-formes existantes, à Roissy et en province, était considérée comme un préalable à toute construction de nouvelle structure. Je considère, quant à moi, que la limite des 55 millions de passagers à Roissy est artificielle : c'est le niveau global de bruit qui est le critère pertinent, c'est lui qui est le facteur générateur des difficultés. En outre, que fera-t-on quand Roissy aura atteint le plafond et que le nouvel aéroport ne sera pas encore construit ?
Je regrette que les considérations économiques, environnementales et d'aménagement du territoire qui nous avaient conduits à préconiser, en 1996, le site de Beauvilliers, en Eure-et-Loire, ne semblent plus être les déterminants actuels du Gouvernement pour le choix de l'implantation d'un troisième aéroport. Rassurez-nous, monsieur le ministre ! Dites-nous que le choix final ne sera pas déterminé par des guérillas de majorité plurielle, même si une députée verte a été élue en Eure-et-Loire contre le projet d'aéroport !
Vous le voyez, nos interrogations sont à la fois multiples et simples. Toutefois, nous prenons acte du soutien, à la section « équipement et transports » du budget général, du projet d'A3XX. La décision, annoncée voilà deux jours, de la compagnie Qantas d'acheter Airbus ouvre les portes de l'Asie à cet appareil. Nous nous en réjouissons tous !
M. Jean-Pierre Plancade. Bien sûr !
M. Jean-François Le Grand, rapporteur pour avis. Compte tenu de ce dernier aspect plutôt positif, la commission des affaires économiques s'en est remise à la sagesse du Sénat pour l'adoption des crédits, alors que, sur les autres points, elle aurait plutôt eu tendance à en proposer le rejet.
M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe socialiste, 10 minutes ;
Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 5 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 5 minutes.
Je vous rappelle que, en application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.
Par ailleurs, le temps programmé pour le Gouvernement est prévu au maximum pour vingt-cinq minutes.
La parole est à M. Lefebvre.
M. Pierre Lefebvre. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le débat sur le projet de budget que nous allons avoir ce soir est un exercice relativement virtuel, le Sénat ayant rejeté l'article 19 de la première partie du projet de loi de finances qui modifiait, au profit du budget annexe de l'aviation civile, la répartition du produit de la taxe d'aviation civile.
On rappellera, à ce propos, que, depuis la création du Fonds d'investissement des transports aériens, se pose le problème de son alimentation et de la validité de son intervention.
Notre position de principe est connue : nous ne sommes pas partisans de la multiplication des comptes d'affectation spéciale, qui, le plus souvent, ne font que masquer l'absence d'une véritable volonté politique en matière d'investissement public.
Nous sommes opposés à la position prise par la commission des finances, que rien ne vient réellement justifier, notamment la réalité des engagements finalement supportés par le FIATA.
Cette remarque initiale formulée, le budget annexe de l'aviation civile connaîtra cependant en 2001, selon toute vraisemblance, une progression résultant directement de la poursuite de la progression du trafic aérien.
On ne peut évidemment manquer de parler ici de la tragique catastrophe qu'a connue notre pays au mois de juillet et qui a affecté le fleuron de la compagnie nationale, le Concorde.
D'une certaine manière, cette catastrophe témoigne d'une part des enjeux du débat sur le transport aérien dans notre pays : sécurité aérienne, occupation des couloirs, développement de la capacité d'accueil des plates-formes existantes ou à venir.
Ce sont là les points sur lesquels je veux insister dans le cadre de cette intervention.
S'agissant de la sécurité aérienne, on notera qu'en cette matière, comme nous aurons encore l'occasion d'en faire état lors de la discussion des crédits de la mer, notre pays dispose d'un ensemble de procédures, de moyens humains et matériels susceptibles de faire face de la manière la plus satisfaisante possible aux enjeux du développement du trafic.
Cela n'empêche cependant pas que se pose, en ce domaine comme en bien d'autres, la question de l'harmonisation des législations européennes, certains de nos partenaires étant largement partisans d'une libéralisation et d'une privatisation du contrôle aérien.
Nous vous saurions gré, monsieur le ministre, de bien vouloir nous informer de l'action menée sur ce point et des résultats qui ont été enregistrés à ce jour.
Le développement du trafic aérien est une réalité, notamment à l'examen de l'évolution du nombre de mouvements et, dans une moindre mesure, du nombre de voyageurs transportés.
La position centrale de la France au coeur de l'Europe en fait naturellement un point de passage obligé que le renforcement des moyens d'accueil à Roissy-Charles-de-Gaulle est encore susceptible de favoriser, notamment par le biais de l'intermodalité des moyens de transport.
Pour autant, les stratégies commerciales des compagnies, en matière de surréservation en particulier, ont comme conséquence tangible une tension supplémentaire sur l'environnement immédiat des plates-formes et continuent d'alimenter le débat sur la desserte de nuit.
Sur ce point, pourriez-vous, monsieur le ministre, nous éclairer sur les orientations que vous avez définies, dans l'optique de la négociation internationale, au regard de ces contraintes environnementales et de développement du transport aérien ?
Une plus large ouverture au transport civil des couloirs réservés jusqu'alors aux avions militaires fait sans doute partie des solutions que nous devons mettre en oeuvre, ne serait-ce que pour pallier le risque de l'allongement des délais d'attente des avions avant atterrissage. Monsieur le ministre, nous vous saurions gré de bien vouloir nous indiquer les résultats des négociations que vous avez menées avec votre collègue ministre de la défense.
Dans le même contexte, se pose évidemment la question de la réalisation du troisième aéroport parisien, rendue nécessaire par le risque d'engorgement des plates-formes internationales d'Orly et de Roissy. Toutefois, la localisation précise de cet équipement fortement structurant n'a pas encore été définie.
Sans doute convient-il de relever que les avantages et les inconvénients des sites proposés doivent être soigneusement mesurés avant toute décision. Pour autant, se pose également la question de savoir qui assurera la gestion de la plate-forme une fois qu'elle aura été ouverte. Il nous semble, à ce sujet, que le rôle d'Aéroports de Paris doit être validé et étendu à la gestion du nouveau site.
Enfin, le devenir de la compagnie nationale Air France soulève de nouveau quelques interrogations.
Certes, la situation financière de la compagnie nationale s'est nettement améliorée, même s'il convient de ne pas oublier les efforts qui ont été demandés aux salariés et de vérifier plus précisément, dans les comptes de l'entreprise publique, si le redressement financier ne s'opère pas, parfois, au détriment de la qualité du service rendu. Le dialogue social doit se poursuivre au sein de l'entreprise, et conduire notamment à inverser clairement la tendance à la baisse des effectifs, à renforcer la capacité d'intervention des salariés et à définir un projet industriel et social permettant notamment de donner corps à la notion de service public du transport aérien. Sur ce sujet, monsieur le ministre, pouvez-vous nous assurer de la qualité de la démarche suivie par le conseil d'administration d'Air France ?
Telles sont les quelques observations que, au nom de mon groupe, je comptais produire à la suite de l'examen des crédits du transport aérien et du bubget annexe de l'aviation civile, crédits que, contrairement aux recommandations de la commission des finances et de la commission des affaires économiques, nous approuverons. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen et sur les travées socialistes.)
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Plancade.
M. Jean-Pierre Plancade. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la croissance du trafic aérien, au plan tant mondial qu'européen, se poursuit de façon régulière. L'Organisation de l'aviation civile internationale prévoit ainsi que cette croissance va perdurer dans les années à venir, annonçant qu'elle sera en 2002 de 7 % pour la région Asie-Pacifique, de 5,4 % pour l'Europe et de 5,2 % pour l'Amérique.
Dans ce contexte, le projet de loi de finances pour 2001 alloue au budget annexe de l'aviation civile des crédits qui s'élèvent à 8,95 milliards de francs, soit une hausse de 2,8 %. Ces dotations devraient donc permettre d'accompagner la croissance du trafic, de répondre aux impératifs de sécurité et d'assurer une meilleure fluidité des mouvements, sans pour autant peser sur les compagnies aériennes et les passagers.
Je note en effet avec satisfaction que, pour la seconde année consécutive, le Gouvernement a fait le choix de la modération fiscale, même s'il est vrai que l'augmentation des recettes engendrée par la croissance du trafic permet cette modération.
Ces crédits permettront la création de 419 emplois dans le secteur de la navigation aérienne, qui seront tout à fait utiles pour faire face à l'augmentation du trafic. J'espère que cela contribuera aussi à limiter les retards. Sur ce point, il apparaît que nous sommes sur la bonne voie, mais la grogne, monsieur le ministre, est encore forte chez les usagers, bien souvent à juste titre.
A ce propos, je ne crois pas que les propositions de la Commission européenne, qui visent à séparer les fonctions de régulateur et d'opérateur dans le domaine du contrôle aérien et à ouvrir celui-ci à la concurrence, soient de nature à régler les problèmes de retard. Il nous semble d'ailleurs que la libéralisation des services de navigation aérienne, outre les questions sociales qu'elle peut poser, est difficilement compatible avec l'objectif de sécurité. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous indiquer où en sont actuellement les discussions à l'échelon communautaire et quelle sera votre position lors du Conseil « transports » du 21 décembre prochain, et nous préciser quelles nouvelles mesures peuvent être envisagées, à l'échelon tant européen que national, pour assurer la ponctualité du transport aérien, sans bien entendu remettre en cause l'impératif de sécurité ?
Il existe un autre revers à la bonne santé du secteur aérien qui suscite lui aussi le mécontentement des usagers, à savoir le recours systématique, par les compagnies aériennes, au système de la surréservation. A cet égard, le Gouvernement, au cours de la présidence française de l'Union européenne, a fait du renforcement des droits des passagers une priorité. Cela nous semble être une très bonne chose. Le Conseil « transports » d'octobre dernier a d'ailleurs adopté une résolution visant à accorder de nouveaux droits aux passagers : un droit de recours en cas de litige, une meilleure information, une meilleure prise en compte des passagers handicapés. Ces questions devraient donc être inscrites à l'ordre du jour du Conseil « transports » de décembre, et nous nous en réjouissons. Nous aimerions cependant savoir quelles mesures concrètes sont envisagées, s'agissant du problème de la surréservation.
Je souhaiterais maintenant, d'une part, étudier le secteur du transport aérien sous l'angle de l'aménagement durable du territoire, et, d'autre part, évoquer la question des nuisances environnementales.
Je voudrais tout d'abord attirer votre attention, monsieur le ministre, sur les stratégies d'alliances et de fusions-acquisitions qui se sont développées ces dernières années dans le domaine du transport aérien, et sur leurs conséquences pour le développement des aéroports de province.
Je prendrai notamment l'exemple de l'aéroport de Clermont-Ferrand, qui m'a été signalé par notre collègue Serge Godard. Plus de 200 millions de francs de fonds publics ont été investis en dix ans pour cette plate-forme. Or la crainte exprimée par M. Godard et les responsables économiques de la région Auvergne est que ces 200 millions de francs aient été dépensés en pure perte.
En effet, ils viennent d'apprendre que la compagnie régionale Airlines, filiale du groupe Air France, a, depuis la fin du mois d'octobre dernier, procédé à la suppression de six liaisons directes quotidiennes. Toutes ces liaisons connaissaient pourtant une croissance très forte de leur fréquentation. Une très vive inquiétude est apparue à la suite de cette décision, qui paraît en effet incompréhensible au regard du succès rencontré. Nos craintes portent notamment sur la stratégie du groupe Air France quant aux dessertes régionales, et nous savons par ailleurs que les responsables politiques et économiques des aéroports de province - je pense en particulier à ceux de Pau et de Caen - les partagent.
Je demande donc à l'Etat d'intervenir auprès du groupe Air France, dont il est encore l'actionnaire majoritaire, pour que la compagnie nationale prenne en compte, dans sa stratégie commerciale, la performance et la réussite d'un « hub » comme celui de Clermont-Ferrand. Je voudrais également savoir, monsieur le ministre, quelles actions l'Etat compte engager pour garantir une politique d'aménagement du territoire cohérente dans le domaine aéroportuaire. M. Godard m'a d'ailleurs indiqué qu'il vous transmettrait une note sur ce problème particulier à la fin de cette séance.
L'activité de l'ensemble des grandes plates-formes aéroportuaires est donc en augmentation. Si l'on s'intéresse aux aéroports parisiens, on constate que cette plate-forme a connu, en 1999, une hausse d'activité du trafic passagers de 8,4 %. S'agissant des six principaux aéroports de province, cette augmentation est de 7 %, ce chiffre restant valide pour la seule plate-forme aéroportuaire de Toulouse, où le trafic a crû de 10 % pour le fret.
Cependant, l'accroissement du nombre de mouvements est à l'origine de nouvelles nuisances sonores et environnementales : c'est un peu l'effet pervers du succès. L'an dernier, l'Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires a été créée par la loi du 12 juillet 1999, sur votre initiative, monsieur le ministre. La mise en place de cette autorité constitue une avancée essentielle dans la lutte contre le bruit aux abords des aéroports. Elle dispose de réels pouvoirs de contrôle, de recommandation, d'information et de prescription, mais aussi et surtout de sanction. Le projet de loi de finances pour 2001 permet de doter cette autorité de quatre agents supplémentaires, ce qui est une bonne chose.
S'agissant maintenant des nuisances environnementales, j'étais intervenu, lors de l'examen du projet de loi de ratification du protocole de Kyoto visant à lutter contre l'effet de serre, pour regretter que ce protocole ne prenne pas en compte l'ensemble des sources d'émission de gaz à effet de serre, notamment le transport aérien, qui représente à lui seul 12 % des émissions de gaz carbonique du secteur des transports. C'est là, je crois, une question dont il faut se préoccuper, d'autant que le trafic aérien est en pleine croissance. On ne peut donc que déplorer l'échec de la conférence de La Haye, en espérant qu'il ne s'agit que d'un retard qui devrait permettre de déboucher sur un bon accord.
En effet, nous avons su apporter des réponses au problème des nuisances sonores aux abords des aéroports, et je crois que nous pouvons aussi trouver des solutions pour lutter contre la pollution atmosphérique provoquée par les avions. C'est un chantier auquel l'Union européenne doit s'attaquer et la réponse, bien évidemment, ne pourra qu'être internationale, et sera sans doute élaborée au sein de l'OACI, l'Organisation de l'aviation civile internationale.
Pour revenir au projet de budget, monsieur le ministre, je note que les dotations en faveur du fonds d'intervention pour les aéroports et le transport aérien diminuent. Aucun crédit n'est notamment prévu pour financer les lignes d'aménagement du territoire, cela a été dit excellemment par M. Jean-François Le Grand,...
M. Jean-François Le Grand, rapporteur pour avis. Merci !
M. Jean-Pierre Plancade. ... en raison des reports de crédits de l'exercice 2000. Cette sous-consommation des crédits doit nous amener à nous interroger sur la pertinence des critères retenus. Ne faudrait-il pas les revoir ?
Enfin, avant de conclure, je souhaiterais dire un mot sur la construction aéronautique. C'est, là encore, un sujet qui me tient à coeur, tant il est lui aussi important en termes d'aménagement du territoire, ainsi que l'a très bien rappelé M. Yvon Collin.
Je souhaiterais d'abord que vous fassiez le point, monsieur le ministre, sur le projet de création d'une autorité européenne de plein exercice chargée de la certification des aéronefs. Où en est ce projet ? Quel sera le statut de cette autorité ?
Ensuite, je rappellerai que 1999 a été une année phare pour la construction aéronautique européenne. Cette année a vu, en effet, la création d'un grand pôle européen de l'aéronautique, la société EADS, capable de rivaliser et de faire jeu égal avec les grands groupes américains.
L'année 2000 l'est tout autant : le 10 juillet a eu lieu la première cotation en bourse des actions d'EADS sur les marchés de Paris, de Francfort et de Madrid, et, le 23 juin, les membres du GIE Airbus, EADS et BAE Systems ont annoncé leur accord de principe pour la transformation du GIE en une société anonyme par actions simplifiée dénommée AIC, qui devrait voir le jour le 1er janvier 2001.
Ces évolutions donnent désormais à l'industrie aéronautique européenne les moyens humains, financiers et techniques pour lancer de grands projets industriels. Elles donnent aussi à Airbus tous les moyens de son développement.
Pour ma part, en ma qualité de sénateur de la Haute-Garonne, je ne peux que me féliciter de ces évolutions positives en termes d'emploi, de développement de richesse et d'aménagement du territoire. En accueillant le siège opérationnel d'Airbus, Toulouse et son agglomération confirment leur place de capitale de l'aéronautique européenne.
Cependant, monsieur le ministre, je ne peux pas ne pas évoquer le sort de l'ATR. Nous savons que cette réalisation franco-italienne est très largement concurrencée par les produits d'entreprises américaines, canadiennes ou brésiliennes qui construisent des avions à réaction recueillant la préférence des compagnies aériennes, au détriment, peut-être, de l'avion à hélice que nous continuons à produire. Ne serait-il pas temps de montrer la voie pour lancer un programme de modernisation de l'ATR, afin de ne pas abandonner le créneau de la construction des avions de transport régional à l'Amérique ? Il s'agit de défendre quelques milliers d'emplois. Nous serons très attentifs à votre réponse, monsieur le ministre.
Au total, le projet de loi de finances témoigne de la volonté du Gouvernement de soutenir la construction aéronautique ; ainsi, les crédits de paiement finançant les avances remboursables augmentent de plus de 34 %, pour atteindre 1,2 milliard de francs. Ces dotations sont notamment destinées au lancement de l'A3XX et au développement de nouveaux moteurs par la SNECMA.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Par Dassault aussi !
M. Jean-Pierre Plancade. En effet !
Monsieur le ministre, sur tous les grands dossiers aéronautiques et aériens, le Gouvernement a su faire prévaloir l'intérêt général, ainsi que définir et mettre en oeuvre une stratégie industrielle et une politique des transports aériens qui soit au service de l'emploi et du développement durable. Les moyens mobilisés par ce projet de loi de finances permettent de soutenir cette politique, et le groupe socialiste votera donc les crédits des transports aériens et du budget annexe de l'aviation civile. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. Paul Girod.
M. Paul Girod. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon propos sera relativement bref, et portera sur trois points.
Premier point, nous constatons un développement important du trafic aérien, s'agissant aussi bien du fret que des passagers. En ce qui concerne le fret, un certain nombre de nouveautés sont d'ailleurs apparues, notamment la montée en puissance très nette dans notre pays, et observée depuis longtemps aux Etats-Unis, des grands routeurs, à l'instar de DHL, de Federal Express ou même d'Air France-Cargo, qui, de plus en plus, envahissent le marché du transport tout court et concurrencent même le transport maritime, dès lors qu'il s'agit de marchandises ayant une certaine valeur au kilogramme, et surtout pour lesquelles la livraison doit être rapide et régulière.
A cet égard, monsieur le ministre, les perspectives sont floues, c'est le moins que l'on puisse dire. Quelle est la part de ce fret dont le transport sera assuré, dans l'avenir, par les avions spécialisés, dits avions cargo ? Quelle part de ce fret continuera, comme aujourd'hui, à emprunter les soutes des avions de ligne ?
De la réponse à cette question découle bien entendu toute une série de déclinaisons. Notre collègue Albert Vecten, promoteur de l'aéroport de Vatry, a-t-il eu raison trop tôt, a-t-il eu raison à temps ou s'est-il trompé ? Nous n'en savons rien pour l'instant, mais le moins que l'on puisse dire, c'est que l'évolution des choses, telles qu'elles se dessinent, va plutôt, me semble-t-il, dans le sens de l'augmentation du fret dans les grandes plates-formes aéroportuaires classiques. D'ailleurs, si j'étais un routeur, ayant à envoyer des colis du continent nord-américain en Europe, j'utiliserais plutôt des avions de ligne qui décolent toutes les dix minutes, tous les quarts d'heure ou toutes les demi-heures que des avions-cargos dont la fréquence est forcément moins régulière.
C'est un premier point sur lequel je n'ai pas le sentiment que les doctrines de votre ministère soient parfaitement arrêtées.
Deuxième point que je voudrais évoquer, le mécontentement qui monte chez les passagers, spécialement en France. Les excellents rapports préparés au bénéfice du Sénat font en effet apparaître, en France plus que dans d'autres pays européens, des retards permanents, des vols annulés, et autres difficultés.
Certains y voient les conséquences d'un système européen insuffisamment intégré. C'est probablement l'une des explications.
D'autres ont tendance à penser que le rythme de travail, les contraintes statutaires et autres spécificités inhérentes au corps des contrôleurs aériens français ne font qu'aggraver la situation. Là encore, j'aimerais savoir si votre ministère a quelques idées, doctrines et perspectives en la matière pour faire en sorte que les chirurgiens soient à l'heure dans leurs hôpitaux, que les hommes d'affaires soient à l'heure à leurs rendez-vous, que les vacanciers ne tournent plus comme des bêtes en cage dans les aéroports en attendant un hypothétique avion, ce qui gâche plus ou moins le début de leurs vacances !
Nous savons tous que ces retards ne sont pas tous imputables aux compagnies aériennes et qu'il y a des responsabilités à chercher ailleurs. Nous aimerions savoir, monsieur le ministre, quelles sont vos perspectives en ce domaine.
Je vous ai déjà interrogé voilà quelques jours, par le biais d'une question orale, sur le troisième point qui me préoccupe. Il s'agissait du fameux troisième aéroport de la région parisienne. J'avais déposé ma question orale avant que vous n'en annonciez la création, mais elle n'est venue en séance publique qu'après. Vous me l'aviez fait remarquer, et je l'avais admis.
Vous m'aviez répondu alors que l'on y verrait plus clair au mois d'avril prochain, et vous aviez accepté de discuter du problème que je soulevais, à savoir la limitation de l'aéroport de Roissy à 55 millions de passagers. Au demeurant, c'est là une notion sans valeur en soi, parce que tout dépend de la capacité des avions et que, en réalité, les nuisances d'un aéroport se mesurent plutôt aux quantités de bruit émises. Or, que je sache, sur l'aéroport de Roissy, actuellement, plus de 60 % des nuisances sonores sont émises par moins de 5 % des vols. On sait aussi les compagnies qui sont en cause, mais une pudeur antiraciste interdit de les rappeler à l'ordre.
Mais je crains que cette décision unilatérale n'aboutisse, d'une part, à ce que l'on rende moins performant qu'il ne pourrait l'être dans l'avenir un outil qui s'est avéré au fil des ans avoir été un trait de génie anticipateur des gouvernements et même des présidents de la République d'il y a déjà une trentaine d'années, et, d'autre part, que l'on ne crée un désordre inextricable dans tout l'est du Bassin parisien. Je m'explique.
Actuellement, autant que je sache, l'aéroport d'Atlanta, qui est le frère jumeau de l'aéroport de Roissy, tourne sur une base de 85 à 90 millions de passagers par an, avec des perspectives à 110 ou 115 millions, sans que cela gêne en quoi que ce soit l'exploitation de la plate-forme.
En revanche, il est vrai que chez nous, nous éprouvons un certain nombre de difficultés qui, à ma connaissance, résultent de deux faits.
Premièrement, on s'est fort peu soucié - pour ne pas dire qu'on s'est assis dessus - de l'ancien SDAURIF, le schéma directeur d'aménagement et d'urbanisme de la région Ile-de-France, en laissant se développer, et ce à coup de dérogations, des constructions au voisinage, voire dans l'antériorité d'un certain nombre de cônes de bruit.
M. Jean-Philippe Lachenaud. Mais non !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Ce n'est pas moi !
M. Paul Girod. Monsieur le ministre, je n'accuse personne, je constate.
M. Jean-Philippe Lachenaud. Venez habiter dans le Val-d'Oise !
M. Paul Girod. Par ailleurs, si j'analyse bien les cônes de bruit, tels qu'ils ont été définis voilà quelques années, ceux des pistes nord sont infiniment plus longs que ceux de la piste sud.
M. Jean-Philippe Lachenaud. Venez dans le Val-d'Oise et vous verrez ! Vous pourrez alors parler en connaissance de cause !
M. Paul Girod. Mon cher ami, puis-je me permettre de vous répondre que 60 % des gens qui se plaignent aujourd'hui de ces nuisances se sont installés après la construction de l'aéroport !
M. Jean-Philippe Lachenaud. Ce n'est pas vrai !
M. Paul Girod. Ceux qui se plaignent sont à l'image de ceux qui achètent une résidence secondaire dans ma région et qui, le dimanche, protestent parce que, au petit matin, un coq chante dans la cour de la ferme d'à côté !
M. Jean-Philippe Lachenaud. C'est ridicule, on ne peut pas comparer le bruit d'un avion au chant d'un coq !
M. Paul Girod. Devant de tels excès, nous avons tous des examens de conscience à faire, mais ce n'est pas en s'affrontant que l'on résoudra le problème.
Deuxièmement, monsieur le ministre, le fameux cône de bruit des pistes sud a été calculé très court vers l'ouest pour des raisons qui restent mystérieuses pour tous ceux qui sont aujourd'hui confrontés à l'affolement généralisé des populations. Je ne parle même pas de l'action d'un certain nombre de pêcheurs en eaux troubles dont je commence à me demander, dans le sud de l'Aisne en particulier, s'ils ne sont pas en train d'essayer d'affoler l'ensemble des propriétaires locaux de maisons ou de terrains pour obtenir des baisses immédiates, susceptibles de procurer à des intervenants bien avisés quelques plus-values futures sur lesquelles il faudra un jour s'interroger.
Alors, monsieur le ministre, il faut sortir de l'ambiguïté ! Il faut maintenant que l'on sache très vite quels sont les sites retenus.
Vous avez dit qu'on y verrait plus clair au mois d'avril. Pour être franc, on ne peut plus attendre jusqu'au printemps. Nous devons savoir très vite au moins quelle est la liste des sites à l'étude. Je ne peux pas continuer à voir dans mon propre département circuler des documents dont on me dit qu'ils sortent de Matignon - je suis persuadé que c'est faux - dans lesquels on voit des périmètres d'aéroport qui ne sont même pas est-ouest, mais sud-ouest - nord-est, dans lesquels on nous explique que tout est déjà pratiquement arrêté.
Il faut, monsieur le ministre, que votre ministère mette de l'ordre dans les informations qui circulent et qu'un certain nombre de démentis ou tout au moins de mises au point soient faites le plus vite possible. Nous sommes actuellement en face d'une dégradation de la situation psychologique sur au moins deux arrondissements du département de l'Aisne dans lesquels on ne peut pas continuer à vivre dans ce climat encore quelques mois, je vous le dis comme je le pense. C'est une des raisons pour lesquelles, en dehors des deux autres, je tenais à intervenir dans ce débat car, honnêtement, je suis très préoccupé de la dégradation de la situation dans ce secteur.
M. Jean-Philippe Lachenaud. Quel mépris du voisin !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, je veux tout d'abord remercier les deux rapporteurs, MM. Le Grand et Collin, et louer la qualité de leurs rapports, qui témoigne de leur bonne connaissance du transport aérien de leur fidélité au transport aérien.
Je ne peux qu'adhérer au tableau qu'a brossé M. Le Grand de la croissance du transport aérien - vous avez été plusieurs à le dire - et du redressement des entreprises. Ce point n'est pas négligeable pour moi parce qu'on peut ainsi mesurer l'évolution qui s'est produite depuis trois ans notamment. C'est mon quatrième budget en qualité de ministre. Cette évolution est réelle. Vous avez bien fait de le souligner. Elle ne correspond pas aux prévisions qui prévalaient à l'automne 1997, lorsque je présentais mon premier budget.
Comme l'ont rappelé vos rapporteurs et M. Plancade, le transport aérien se développe fortement, de l'ordre de 5 % à 6 % par an. Les résultats d'Air France sont bons. Ils viennent d'être publiés et ils sont très positifs. Personne ne pensait que cette entreprise, en déclin voilà quelques années, qui supprimait des emplois, qui était menacée de liquidation, pourrait passer des alliances. Tout cela est aujourd'hui démenti. Cette entreprise publique, certes ouverte et modernisée, confirme qu'elle est capable de se développer.
Les résultats de l'industrie aéronautique sont bons, vous l'avez souligné, et les perspectives aussi.
Le seul point faible porte sur les petites compagnies de transport aérien dont certaines, en métropole et outre-mer, se trouvent dans des situations financières délicates. M. Le Grand y a fait allusion, et je partage cette préoccupation.
La situation du transport aérien français évolue vers des regroupements autour d'Air France d'une part, ou autour d'AOM et Air Liberté d'autre part, qui dépendent aujourd'hui de Swissair.
MM. Le Grand et Plancade craignent que ces regroupements ne conduisent à la suppression de lignes régionales. C'est une question, même si aucun phénomène d'ampleur généralisée n'a jusqu'à présent été constaté. Des suppressions de ligne peuvent affecter certaines liaisons. C'est le cas en Normandie mais aussi à Clermont-Ferrand, comme cela a été dit. Une concertation est en cours à ce sujet entre la compagnie et les élus. Sachez que j'observe attentivement ces évolutions.
Pour autant, ne me demandez pas - ou alors dites-le franchement - d'administrer les entreprises, y compris quand elles sont publiques. Ce n'est pas l'intention du Gouvernement.
Il faut savoir ce qu'on veut. Ce sont des entreprises publiques. Au conseil d'administration d'Air France siègent six représentants administrateurs de l'Etat et six représentants du personnel. C'est un événement, qui a d'ailleurs été quelque peu retardé, notamment en raison de la position du Sénat.
La compagnie Air France s'administre pour se développer, se défendre sur la base de divers critères. C'est là que peut intervenir l'actionnaire public qu'est l'Etat.
La croissance du trafic aérien se traduit nécessairement par des créations d'emplois. En 2001, le budget annexe de l'aviation civile verra la création de 429 emplois, dont 216 seront d'ailleurs consacrés à la résorption de surnombres, c'est-à-dire des postes existants mais qui n'étaient pas affectés. Il permet également de pallier les départs en retraite, de prendre en compte l'évolution des qualifications, et de lutter contre les problèmes de retard dont vous avez parlé. J'y reviendrai, M. Plancade a d'ailleurs insisté sur ce point à juste raison.
Monsieur Collin, vous avez évoqué le surbooking, la surréservation en français. Pour moi, c'est une pratique absolument insupportable, mais c'est à l'échelle de l'Europe au moins et sûrement à l'échelle du monde qu'il faut faire évoluer les choses.
J'ai également le sentiment qu'il faut à la fois développer et défendre les droits des passagers, y compris, monsieur Paul Girod, lorsqu'il s'agit d'une personne qui s'apprête à partir en vacances et qui se retrouve dans cette situation. Cela peut être vrai pour les sénateurs qui veulent arriver à l'heure, surtout compte tenu des horaires très précis auxquels vous êtes maintenant astreints, mesdames, messieurs.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Même à un train de sénateur !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Cela peut avoir de très graves conséquences. C'est une pratique inadmissible et, à la limite, une pratique qui méprise l'usager. C'est ainsi que j'ai porté l'affaire à l'échelle européenne en tant que président en exercice du conseil des ministres des transports européens. Mais je pense que si les usagers ont des droits, ils ont aussi des devoirs qu'ils doivent accepter.
Les compagnies ne pratiqueraient pas la surréservation si certains passagers ne prenaient pas, pour de simples convenances d'horaire, des réservations sur cinq, six, voire sept vols.
La bonne situation du transport aérien ne pourra se maintenir que par une politique volontariste des pouvoirs publics dans plusieurs domaines.
En ce qui concerne la politique industrielle, monsieur Collin, vous m'avez félicité, avec l'humour qui vous caractérise, des évolutions du statut de l'industrie aéronautique.
J'étais au Gouvernement lorsque s'est constituée la compagnie EADS, qui résulte de la fusion de deux compagnies privées allemande et espagnole avec une compagnie française, qui était elle-même le résultat d'une fusion entre une compagnie publique, Aérospatiale, et une compagnie privée, Matra. Comment voulez-vous qu'au bout du compte une telle fusion se traduise par une entreprise ayant un capital public majoritaire ? Si c'est ce que vous me reprochez...
M. Yvon Collin, rapporteur spécial. Je ne vous reproche rien, monsieur le ministre !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Permettez-moi de vous faire remarquer que votre humour était assez perfide.
M. Yvon Collin, rapporteur spécial. Pas du tout !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je retire le mot « perfide ».
M. Yvon Collin, rapporteur spécial. Je vous ai même félicité et j'étais sincère !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je me suis battu, y compris au sein du Gouvernement. Lorsque le Premier ministre, le ministre de l'économie et des finances, le ministre de la défense et moi-même avons débattu de ces questions, nous avons veillé à ce que la France ait toute sa place dans ce dispositif.
Ce qui se passe avec l'A3XX, le développement des capacités d'Airbus, y compris la perspective d'implantation de son siège social à Toulouse n'est pas sans liaison avec cette action et mon intervention dans ce domaine.
La création de la société EADS associant le Français Aerospatiale-Matra, l'Allemand DASA et l'Espagnol CASA, confortée par l'accord conclu par la suite entre EADS et l'Italien Finmeccanica, et la transformation du statut de GIE d'Airbus Industrie en société de plein exercice, associant notamment EADS et British Aerospace, sont des facteurs décisifs de cette transformation.
Le développement de l'industrie aéronautique bénéficie de soutiens importants, tant en ce qui concerne la recherche qu'en matière de nouveaux produits.
Je ne reviens pas sur le montant des avances remboursables qui, vous le savez, seront pour une large part destinées au nouvel avion très gros porteur A3XX, ainsi qu'au moteur de la SNECMA et au nouveau Falcon de chez Dassault. Parfois, on néglige ces affectations. C'est d'ailleurs le cas dans vos interventions, me semble-t-il. Par ailleurs, la décision de lancement par Airbus de l'A3XX est, je crois, tout à fait imminente.
Je puis vous dire, monsieur Collin, que le Royaume-Uni et l'Espagne ont déjà décidé de verser des avances remboursables. Quant à l'Allemagne, à la suite de la rencontre franco-allemande de Vittel, celle-ci a annoncé qu'elle se ralliait à la position commune en faveur des avances remboursables. Nous sommes dans le cadre de l'accord de 1992 conclu entre l'Europe et les Etats-Unis sur le financement de ce genre de situations.
Vous me demandez, monsieur Collin, quel est le taux de consommation des avances remboursables pour l'A3XX : je vous réponds franchement, et je vais vous étonner : zéro !
M. Yvon Collin, rapporteur spécial. Ah bon !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. En effet, l'A3XX n'est pas encore lancé !
Pourquoi avons-nous inscrit des crédits dans le budget au titre des avances remboursables ?
M. Yvon Collin, rapporteur spécial. C'est la question !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. En agissant ainsi, nous avons voulu montrer l'engagement de la France. En choisissant cette démarche, nous vous avons permis, mesdames, messieurs les sénateurs, comme l'ensemble des parlementaires, de contribuer à lever toutes les hésitations qui pouvaient planer sur le rôle de la France dans le lancement de l'A3XX.
Les crédits prévus en 2000 à cet effet - 240 millions de francs en autorisations de programme - seront reportés sur 2001.
En matière aéroportuaire, la politique préconisée dans les propositions de schémas de services collectifs « transport », consiste à rechercher une meilleure utilisation des aéroports existants et à envisager la construction de nouvelles infrastructures.
Toutes les études convergent sur le fait que la limite de trafic qu'il est raisonnable de prévoir, notamment pour des raisons d'environnement, pour les aéroports existant en région parisienne sera atteinte avant dix ans, à une échéance plus rapprochée, disent certains, que l'échéance prévue lorsque la décision avait été prise de construire deux doublets de pistes sur l'aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle.
Le Gouvernement a donc adopté une politique aéroportuaire globale, fondée sur le développement d'un réseau de plates-formes complémentaires à l'échelle nationale.
Dans ce cadre, grâce aux plates-formes de Notre-Dame-des-Landes entre Nantes et Rennes ou de Lyon-Saint-Exupéry, par exemple, les relations aériennes des grandes aires métropolitaines seront facilitées avec les principaux pôles européens ou mondiaux.
En complément de ces mesures, une plate-forme à vocation internationale est nécessaire pour le Bassin parisien.
Des études sont engagées sur la configuration du projet et sur les sites. Si vous me demandez, monsieur Paul Girod, de vous dire tout de suite quel site sera choisi, je ne pourrai pas le faire, puisque, justement, l'implantation de ce nouvel aéroport est à l'étude.
Nous avons dit que trois régions étaient susceptibles d'accueillir ce nouvel aéroport du grand Bassin parisien : les régions Picardie, Centre et Champagne-Ardenne.
Il faut choisir le site le plus favorable, celui qui présente le moins de risques, du point de vue de l'environnement urbain notamment, et il ne faut pas faire les erreurs qui ont pu être faites auparavant.
Il faut aussi penser aux liaisons entre les trois aéroports, entre Orly, Roissy et ce troisième aéroport dont on parle.
Il faut tenir compte également de ce qui se passe dans le ciel, car il ne faut pas croire qu'on peut tout faire passer n'importe où, n'importe comment.
M. Jean-François Le Grand, rapporteur pour avis. Mais le travail avait été fait par la mission Douffiagues !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Vous savez bien comment cela marche ! Chaque avion est dans une « boîte à chaussures virtuelle » et il est impératif qu'aucune ne touche l'autre.
M. Jean-François Le Grand, rapporteur pour avis. La comparaison est audacieuse !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. J'ai utilisé cette comparaison en conseil des ministres, et elle a été très appréciée ! (Sourires.)
M. Jean-Pierre Plancade. Nous avons un ministre pédagogue !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur Le Grand, vous avez évoqué la question de l'urbanisation aux abords des aéroports. Ce sujet est difficile.
M. Jean-François Le Grand, rapporteur pour avis. Oui.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Vous aviez déjà évoqué cette question lors d'un précédent débat au sujet des vieux bourgs situés à proximité des aéroports. Nous devons apporter - en tout cas pour le nouvel aéroport - des solutions ambitieuses et protectrices pour les populations.
En matière d'environnement, le Gouvernement souhaite, avec les riverains et les élus, un contrôle démocratique des engagements - et j'en ai pris - et une garantie de l'indépendance du contrôle des nuisances.
C'est dans cet objectif que vous avez voté la loi qui a conféré à l'autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires un pouvoir de recommandation et de contrôle, y compris de sanction, sur toute question relative à la maîtrise des nuisances sonores autour des aéroports.
Cette autorité est en place et commence à travailler. Un de ses premiers dossiers sera celui de la réorganisation de la circulation aérienne en région parisienne. Cette question est extrêmement sensible parmi les populations et les élus.
Je puis vous dire qu'une information précise, détaillée, sera très prochainement diffusée. En effet, il faut éviter qu'il ne se dise tout et n'importe quoi et que certains profitent des fantasmes qui peuvent se créer. Mais il existe aussi de vrais problèmes. Je vais donc veiller à ce qu'il y ait une information rapide et précise.
Il est bien évident que les pistes ne seront pas orientées Nord-Sud. M. Pierre Graff, directeur général de l'aviation civile, ne pourrait que me confirmer que même les changements climatiques ne laissent pas prévoir que cela soit possible à l'avenir.
Venons-en au projet de budget. Je souhaite tout d'abord faire justice d'une affirmation de M. Collin selon laquelle ce budget ne serait pas sincère : certaines charges, tel le financement du futur protocole avec les contrôleurs aériens, ne seraient pas inscrites au budget. Il est sincère comme je le suis !
M. Jean-François Le Grand, rapporteur pour avis. C'est ce qui nous inquiète.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Vous l'êtes assurément plus que le budget ! (Sourires.)
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Si cela ne dépendait que de moi, vous seriez totalement rassurés.
Comme vous le savez, les modifications indemnitaires et statutaires, l'évolution des emplois, l'adaptation de l'organisation du travail figurent, pour l'aviation civile, dans des protocoles conclus pour une durée de trois ans et non pour un budget. Le protocole de 1997 est arrivé à expiration ; des discussions se déroulent sur l'élaboration de celui qui couvrira la période 2001-2003.
M. Yvon Collin, rapporteur spécial. Il risque d'y avoir des blocages en 2001 !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. A la date d'élaboration du budget, on ne pouvait prévoir les dépenses correspondantes.
A cet égard, je vais peut-être vous faire une révélation : les discussions se sont terminées ce matin à huit heures, avec l'adoption d'un nouveau protocole qui a reçu l'accord d'un grand nombre de syndicats.
Les arbitrages nécessaires auront lieu pour que les engagements soient financés en 2001 sans affecter les grandes masses qui conditionnent le budget annexe.
J'ai été interrogé sur les contrôleurs : temps de formation initiale, quatre à cinq ans ; formation après mutation, quinze à vingt ans ; demandes de mutation acceptées au bout de trois ans de service ; durée moyenne d'affectation dans un poste, huit à onze ans, mais il faut dire que de fortes variations interviennent entre le Nord et du Sud, région très recherché.
M. le rapporteur spécial s'étonne que les compagnies aériennes ne soient pas associées aux négociations sociales. Il en a toujours été ainsi pour mes prédécesseurs, de droite comme de gauche, et pour cause.
L'existence d'un budget annexe permet d'associer les compagnies aériennes aux choix budgétaires. Au niveau d'Eurocontrol, les compagnies peuvent s'exprimer au sein de la commission, du conseil provisoire et au comité élargi des redevances de routes.
Vous avez évoqué, monsieur le sénateur Collin, la proposition de loi de M. le député Migaud concernant la réforme des lois de finances. Bien sûr, dans cette proposition est évoquée la suppression des budgets annexes. La réforme des procédures budgétaires, tout à fait nécessaire, ne doit pas servir de prétexte ou de paravent à des évolutions dictées par des présupposés idéologiques. Le budget annexe, outil de gestion plus efficace et plus transparent que le budget général, est en lui-même un des « programmes » que vise à mettre en place la proposition Migaud.
M. Le Grand et M. Lefevre ont évoqué la terrible catastrophe du Concorde. Je voudrais réaffirmer ici mon attachement à la reprise des vols du Concorde dès qu'il sera confirmé que l'enchaînement ayant conduit à une telle catastrophe ne peut se reproduire.
Le travail que mènent actuellement les administrations et les industriels donne à espérer que des mesures permettant d'assurer la sécurité dans des conditions satisfaisantes pourront être prochainement arrêtées et mises en oeuvre dans un délai raisonnable. Nous y travaillons avec nos homologues britanniques et, comme M. le rapporteur, je suis prêt à saluer ici le travail du bureau enquêtes accidents.
La sécurité et la régularité des vols sont deux objectifs principaux.
Monsieur le rapporteur, vous soulignez l'augmentation de 35 % des crédits de fonctionnement de la navigation aérienne entre 1994 et 2001. Mais, dans le même temps, le trafic traité s'est accru de 54 %. Les gains de productivité ont permis de réduire de près de 19 % en francs courants le taux unitaire national. De plus, c'est entre 1997 et 2001 que l'essentiel de ces gains de productivité a été réalisé.
Les transporteurs aériens souhaitent que la croissance des crédits d'investissement soit encore plus rapide.
L'année 2000 est marquée par une réduction sensible des retards, quoique je pense, comme vous, qu'il faut continuer à mener cette bataille pour les réduire encore.
L'analyse des retards dits « en chaîne » sur certaines liaisons intérieures importantes montre que les problèmes de congestion de l'espace aérien représentent entre 30 % et 50 % de toutes les causes de retard. Mais il n'y a pas seulement la navigation qui est en cause, il y a aussi les compagnies, les aéroports et la coordination à l'échelle européenne ; c'est sur tous ces éléments qu'il faut agir.
Il faut aussi reconsidérer les rapports entre civils et militaires de façon que tout soit fait pour que l'aviation civile, qui se développe, dispose de l'espace nécessaire pour faire circuler ses avions. C'est une question difficile à régler, mais nous y travaillons, dans de très bonnes conditions, avec M. Alain Richard, mon collègue de la défense.
M. Paul Girod a abordé ces sujets, il a eu tout à fait raison de le faire. J'y suis, moi aussi, très attentif, y compris à l'échelle européenne. Toutefois, je ne crois pas, comme plusieurs d'entre vous l'ont dit, que c'est par la séparation de l'opérateur et du régulateur dans la navigation aérienne que nous résoudrons les problèmes. Au contraire, il s'agit de mieux coordonner, de régler des problèmes techniques majeurs. C'est pourquoi nous créons plus de postes de contrôleurs du ciel. En tout cas, je ne pense pas qu'il suffise de libéraliser ou de privatiser pour que les choses marchent mieux. La vie a montré que ce n'était pas toujours évident.
La situation de la France s'est améliorée en matière de retard. En effet, la part de la France dans le volume européen des retards liés à la circulation aérienne a diminué ces deux derniers mois, tombant à environ 15 % du total seulement, ce qui est une très bonne performance. Les projets de la Commission européenne doivent être examinés avec attention.
En réaction à l'accroissement des retards des vols constaté en 1999, la Commission européenne a présenté au conseil des ministres une communication sur le contrôle aérien en Europe, relative à la création du « ciel unique européen ». Sur ce thème, la Commission a constitué un groupe de réflexion à haut niveau.
Le Conseil européen va devoir prendre position au premier semestre 2001 sur ces propositions. J'ai demandé que la présidence française évoque ce sujet dans trois semaines au conseil des ministres des transports européens.
Au demeurant, comme je l'ai toujours dit et comme le montrent les résultats de l'année 2000, les solutions pour faire face à l'accroissement du trafic sont essentiellement de nature technique. Ces actions ne nécessitent pas une augmentation de la pression fiscale, monsieur le rapporteur.
L'augmentation du trafic permet en effet d'accroître les recettes sans affecter les grands équilibres du budget annexe. A cet égard, j'entends consolider la baisse des tarifs des redevances qui a été réalisée ces dernières années.
Par ailleurs, les taux de la taxe de l'aviation civile seront maintenus au même niveau que ceux qui ont été votés l'année dernière et l'année précédente. Les fourchettes de la taxe d'aéroport perçue au profit des gestionnaires d'aéroport ne sont pas modifiées.
M. Collin s'est inquiété de l'endettement du budget annexe. Je peux le rassurer : d'ores et déjà, l'endettement net de 4,5 milliards de francs en 1998 est stabilisé et il sera un peu réduit en 2000, ce qui va donc dans le bon sens.
Je voudrais enfin indiquer que le fonds d'intervention pour les aéroports et le transport aérien - le FIATA - reste toujours un outil d'aménagement du territoire. En effet, aux vingt-et-une liaisons exploitées à ce jour s'ajouteront d'autres lignes pour lesquelles des dossiers ont été présentés ou sont en voie de l'être.
Les dépenses du FIATA, monsieur Lefebvre, augmenteront de 50 % par rapport à 2000 alors que l'on doit constater une baisse des crédits de ladite ligne budgétaire. Cette augmentation est essentiellement due à des reports de crédits d'un total de 170 millions de francs.
Cette situation résulte des premières décisions prises lors de la création du fonds de péréquation du transport aérien, le FPTA : le montant de la taxe avait été fixé à un niveau supérieur aux besoins. Il en ira de même avec la prise en charge en 1999 des dépenses de sécurité incendie et de sûreté par le FTPA. Les crédits votés se sont révélés excédentaires.
En fin de compte mesdames, messieurs les sénateurs, je pense que vous devriez tous pouvoir voter ce budget, qui est un bon budget en progrès. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président. Je rappelle au Sénat que les crédits concernant le transport aérien et la météorologie, inscrits à la ligne « Equipement, transports et logement » seront mis aux voix aujourd'hui même à la suite de l'examen des crédits affectés à la mer.

ÉTAT B

M. le président. « Titre III : 1 213 286 420 francs. »

Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre III est réservé.
« Titre IV : 214 404 732 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre IV est réservé.

ÉTAT C

M. le président. « Titre V. - Autorisations de programme : 11 119 112 000 francs ;
« Crédits de paiement : 5 346 588 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre V est réservé.
« Titre VI. - Autorisations de programme : 18 352 298 000 francs ;
« Crédits de paiement : 7 243 682 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre VI est réservé.
Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits concernant le budget annexe de l'aviation civile et figurant aux articles 35 et 36.

Services votés

M. le président. « Crédits : 7 725 779 993 francs.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits ouverts à l'article 35 au titre des services votés.

(Ces crédits ne sont pas adoptés.)

Mesures nouvelles

M. le président. « I. - Autorisations de programme : 1 401 500 000 francs ;
« II. - Crédits : 1 233 279 504 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les autorisations de programme et les crédits ouverts à l'article 36, au titre des mesures nouvelles.

(Ces crédits ne sont pas adoptés.)
M. le président. Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances concernant le transport aérien, la météorologie et le budget annexe de l'aviation civile.

IV. - MER

M. le président. Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi concernant l'équipement, les transports et le logement : IV. - Mer.
La parole est à M. Lise, rapporteur spécial.
M. Claude Lise, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation, pour la marine marchande. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les crédits inscrits au budget de la marine marchande pour 2001 s'élèvent à 6 041 millions de francs, en augmentation de près de 7 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2000. Cette augmentation fait suite à une légère diminution - de 0,41 % - du budget de la marine marchande l'année passée.
Il s'agit donc d'une progression très supérieure à celle du budget de l'Etat et même à celle du budget de l'équipement, des transports et du logement.
Cette croissance est certainement la conséquence d'une meilleure prise de conscience des enjeux liés à la sécurité maritime depuis le naufrage de l' Erika.
La marée noire provoquée par ce naufrage et les rapports parlementaires qui l'ont suivi, en particulier celui du Sénat intitulé : Erika : indemniser et prévenir ont montré avec force qu'il fallait renforcer les contrôles des navires qui viennent dans nos ports, l'action de prévention assurée par les unités littorales des affaires maritimes, ainsi que la signalisation maritime.
Cette triple nécessité s'est trouvée malheureusement confirmée par le naufrage du navire chimiquier italien Ievoli Sun, moins d'un an après celui de l' Erika.
Le montant des crédits affectés à la sécurité dans le projet de loi de finances pour 2001 traduit le caractère prioritaire de cet aspect.
Ainsi, la dotation consacrée à la signalisation maritime progresse significativement.
Le comité interministériel de la mer du 28 février 2000 a, en effet, pris la décision d'accélérer le programme de remise en état des phares et balises et de modernisation de la flotte de balisage, pour une réalisation sur trois ans au lieu des cinq prévus initialement.
Il a décidé de lui consacrer 300 millions et de débloquer, immédiatement, 17,6 millions de francs pour réparer les matériels de balisage endommagés par la tempête.
Après les crédits obtenus en collectif budgétaire, les crédits d'investissement augmentent de 40 % en autorisations de programme, même s'il faut signaler une diminution des crédits de paiement.
Les centres de sécurité des navires - CSN - chargés de contrôler les navires français de commerce, de pêche et de plaisance, ainsi que les navires étrangers en escale dans les ports ont fait l'objet d'une attention particulière.
Leurs moyens humains sont manifestement insuffisants : les inspecteurs et contrôleurs des CSN sont actuellement au nombre de 54, alors que chez nos voisins anglais ou espagnols, ils sont plus de 200 à effectuer les mêmes missions.
Cette situation de sous-effectif, on s'en est aperçu, a des conséquences directes sur le contrôle des navires étrangers.
Les Etats parties au Mémorandum de Paris s'engagent, en effet, à effectuer un nombre total d'inspections par an correspondant à 25 % du « nombre estimé de navires de commerce entrés dans leurs ports ». Or, depuis 1997, ce taux s'est effondré, atteignant à peine 14 % aujourd'hui.
C'est dans ce contexte que le Gouvernement a établi pour objectif le doublement des effectifs d'inspecteurs affectés aux missions de sécurité d'ici à 2003. Le projet de loi de finances pour 2001 prévoit donc la création de 16 emplois d'inspecteur de la sécurité des navires.
Les centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage en mer, les CROSS, au nombre de cinq en métropole, voient également leurs moyens augmenter.
Ils sont aujourd'hui confrontés à deux contraintes : la réforme du service national, l'extension de leurs missions, en métropole et outre-mer.
Ils doivent faire face également au caractère obsolète de leus moyens techniques, surtout en ce qui concerne les radars et les moyens de communication.
Lors du dernier comité interministériel de la mer, le 27 juin 2000, il a donc été décidé de renouveler l'ensemble des radars de la Manche et de moderniser les équipements des CROSS.
Le projet de loi de finances pour 2001 traduit ces priorités en augmentant sensiblement les autorisations de programme dévolues aux CROSS.
Rappelons que les cinq CROSS métropolitains sont complétés par deux centres opérationnels de sauvetage outre-mer, dont votre rapporteur tient à souligner la rapide expansion, en particulier en ce qui concerne le COSMA, le centre opérationnel de sauvetage maritime aux Antilles, créé en 1992, aujourd'hui amené à couvrir une zone de 3 millions de kilomètres carrés autour des Antilles et de la Guyane.
Par ailleurs, les moyens nautiques d'assistance et de surveillance dévolus aux unités littorales des affaires maritimes, actuellement au nombre de quinze, sont revus à la hausse.
Les moyens hauturiers comprennent sept vedettes et un patrouilleur.
En 2001, il sera passé commande d'un deuxième patrouilleur de haute mer destiné à la surveillance des pêches. Cette mesure répond à un besoin réel, né de l'accroissement important de la demande de contrôle et de surveillance maritime en haute mer.
La volonté politique de renforcer la sécurité maritime est donc au rendez-vous - je crois qu'il est possible de l'affirmer - et sa traduction en objectifs pluriannuels doit être considéré comme la marque d'une approche réaliste, même si elle peut sembler timide au regard de l'ampleur des dégâts causés par la catastrophe de l' Erika.
Cependant, les questions de réglementation sont traditionnellement régies par des conventions internationales.
C'est pourquoi la France doit aussi agir aux niveaux européen et international pour améliorer la sécurité maritime.
Je souhaiterais d'ailleurs, monsieur le ministre, que vous nous éclairiez sur les délais de mise en oeuvre des mesures qu'à votées hier le Parlement européen et qui visent à la réforme de trois directives concernant respectivement : le contrôle par l'Etat du port, les sociétés de classification, l'élimination progressive des bateaux à simple coque.
J'en viens à l'important problème du soutien à la flotte de commerce française.
Celle-ci n'a cessé de décliner depuis le début des années soixante-dix. Au 1er janvier 2000, on ne comptait plus que 209 navires de commerce français. La nécessité de maintenir un régime de soutien important s'impose donc.
En 1997, les nouvelles orientations définies par la Commission européenne en matière d'aides d'Etat ont induit de profonds changements dans le système de soutien mis en place depuis 1990.
Il a pris, à partir de 1999, exclusivement la forme de réductions ou d'annulations de charges fiscales et sociales applicables aux marins des compagnies maritimes. Le projet de loi de finances pour 2001 reconduit ce dispositif.
En outre, le soutien de l'Etat aux investissements navals fait l'objet, depuis le second semestre de 1998, d'une mesure d'allégement fiscal pour les groupements d'intérêt économique qui acquièrent un navire.
Au 1er septembre 2000, dix-neuf dossiers ont été acceptés, représentant vingt-cinq navires pour un montant total d'investissements de 6 797 millions de francs.
Je formulerai ici deux remarques.
Tout d'abord, je tiens à saluer la décision prise par le comité interministériel de la mer du 27 juin dernier d'intensifier le soutien à la flotte de commerce française.
Il a en effet prévu, sous réserve de l'accord de la Commission européenne, d'étendre aux allocations familiales et aux cotisations ASSEDIC le remboursement des charges sociales pour les entreprises dont les navires sont confrontés à la concurrence internationale. Cette décision n'aura cependant de répercussions que dans la prochaine loi de finances.
En revanche, je regrette, comme je l'avais fait l'année dernière, qu'en matière d'allégements des charges soit maintenu un système de remboursement qui ne manque pas de pénaliser la trésorerie de nombreuses entreprises. N'est-il pas possible, monsieur le ministre, d'envisager de le remplacer pas un système d'exonération, plus simple, plus lisible et, j'en suis convaincu, plus efficace ?
En conclusion, je dirai que, à titre personnel, je suis favorable aux orientations que traduit le projet de budget de la marine marchande pour 2001 ; mon vote vous est donc acquis. Cependant, je dois vous confirmer que la commission des finances a décidé de proposer au Sénat le rejet de l'ensemble du budget du ministère de l'équipement, des transports et du logement pour 2001.
M. le président. La parole est à M. Massion, rapporteur spécial.
M. Marc Massion, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation, pour les ports maritimes. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'activité des ports maritimes a connu un léger ralentissement en 1999, principalement dû à la baisse, à partir de la fin de 1998, du trafic de produits pétroliers. La diminution a été de 1,1 % par rapport à 1998 ; le trafic des ports autonomes a diminué de 2,4 %, celui des ports d'intérêt national augmentant toutefois de 3,5 %.
La concurrence est, évidemment, venue des autres ports européens, et c'est sur la façade nord que les ports français se sont mieux comportés que leurs concurrents européens, à l'inverse des autres façades, où l'évolution des ports européens a été plus favorable.
Cependant, toutes marchandises confondues, les tonnages cumulés des grands ports européens, ports français inclus, sont restés stables en 1999. Dans l'ensemble, la progression des ports européens a donc été faible ou négative. Les ports de Marseille et du Havre ont ainsi affiché des baisses de trafic du même ordre de grandeur que les ports de Rotterdam ou d'Anvers.
En revanche, ces évolutions devraient s'inverser en l'an 2000, la tendance étant à une hausse du trafic à la fin du premier semestre 2000 pour les ports français, avec une augmentation de 4,3 %. Cela est dû en grande partie à la progression soutenue du trafic des produits pétroliers au cours du premier semestre.
Au total, l'activité des ports français connaît donc à court terme des évolutions heurtées, largement commandées par les fluctuations des échanges mondiaux de produits pondéreux.
Pour porter une appréciation sur le budget qui nous est proposé, il convient donc de le replacer dans un contexte plus large.
Au cours de ces vingt dernières années, l'économie portuaire française s'est trouvée confrontée à un marché international de plus en plus concurrentiel, largement conditionné par des centres de décision mondialisés.
Or la filière portuaire n'est elle-même qu'un élément d'une chaîne logistique de plus en plus complexe. Elle doit y trouver sa place et se mettre en position de s'adapter aux évolutions de la chaîne elle-même.
Aujourd'hui, les facteurs décisifs d'attraction du trafic sont, outre la nécessaire qualité des infrastructures, la compétitivité des services offerts, leur fiabilité et la qualité des dessertes terrestres.
C'est dire si le défi à relever pour les ports français est encore de taille, et cela même si certains d'entre eux affichent des perspectives de croissance prometteuses sur certains trafics, comme c'est le cas du trafic de conteneurs au port du Havre, qui s'est accru de plus de 7 % au cours des premiers mois de l'année 2000 par rapport à la même période en 1999. Mais l'écart par rapport à nos concurrents européens demeure important.
Or il est nécessaire que les ports français puissent durablement développer leur activité en captant de nouvelles parts de marché et en saisissant les opportunités offertes par les perspectives européennes de croissance de certains trafics, tel celui des conteneurs, dont la croissance annuelle, à l'échelon européen, devrait se poursuivre à un rythme de 8 à 10 %.
Le fort développement des zones logistiques portuaires dans nos ports maritimes, notamment avec l'opération Port 2000 au Havre, doit donc être encouragé. Le comité interministériel de la mer du 27 juin dernier a d'ailleurs confirmé le rôle des ports dans les choix stratégiques prévus par les schémas de service collectif de transport de marchandises et de voyageurs.
Enfin, la croissance du trafic maritime doit intégrer de manière croissante l'enjeu que constitue la sécurité maritime.
Ces grandes orientations - amélioration de la sécurité maritime, développement des zones logistiques, renforcement des dessertes terrestres - se retrouvent largement dans le projet de budget des ports maritimes pour 2001.
Comme le budget de la marine marchande, celui des ports maritimes affiche une priorité forte en faveur de la sécurité maritime, laquelle consiste, en matière portuaire, à assurer le bon accès des navires. Il s'agit là, à l'évidence, d'une condition préalable au développement des activités portuaires.
A cet égard, je tiens à souligner l'effort significatif réalisé en direction de l'entretien de infrastructures portuaires et, tout particulièrement, des moyens consacrés aux dragages d'entretien des accès maritimes. En effet, alors que la loi de finances initiale pour 2000 consacrait 437 millions de francs à ces dépenses, le projet de loi de finances pour 2001 prévoit d'y affecter 466 millions de francs, soit une augmentation de 6,5 %.
Précisons que ces crédits d'entretien et d'exploitation permettent d'assurer, d'une part, dans les ports d'intérêt national, les dépenses - hors personnel - relatives aux opérations de maintien des profondeurs et d'entretien des ouvrages d'infrastructure et, d'autre part, dans les ports autonomes, les dépenses d'entretien des chenaux d'accès et avant-ports, des ouvrages de défense contre la mer, ainsi que les dépenses de fonctionnement des écluses d'accès. Ces dépenses comprennent pour plus de 60 % les charges de personnel nécessaires à la réalisation des travaux correspondants.
Le projet de budget pour les ports maritimes prévoit en outre le renforcement des effectifs des officiers de port et officiers de port adjoints, chargés de la police et de la sécurité au sein du port, puisqu'il crée seize postes supplémentaires. Afin de se conformer complètement aux décisions du comité interministériel de la mer de février, le Gouvernement a d'ailleurs annoncé la création de quatorze postes supplémentaires dans la loi de finances pour 2002. On aura alors atteint une augmentation des effectifs de 10 % pour l'ensemble des ports.
La sécurité maritime constitue donc bien la première priorité de ce budget.
Le développement des zones logistiques est la seconde priorité.
A ce titre, comme l'année dernière, qui fut celle de son lancement, l'opération Port 2000 au Havre constitue l'opération majeure du budget des ports maritimes ainsi que la plus importante des extensions portuaires programmées dans le cadre de la politique portuaire.
En effet, réalisant près d'un cinquième du trafic total des ports métropolitains français, le port du Havre n'est plus à même, dans sa configuration actuelle, de répondre à la croissance du trafic, en particulier celle du trafic de conteneurs, passé de 6 millions de tonnes en 1992 à 12 millions de tonnes en 1999.
C'est la décision ministérielle du 5 décembre 1998 qui a autorisé la mise au point d'un important programme d'extension du port, le projet Port 2000. Il s'agit d'étendre le port, en prévoyant de nouveaux quais dédiés au trafic de conteneurs, de grands linéaires et d'importantes surfaces de terre-pleins pour le stockage. Cela devrait permettre les économies d'échelle nécessaires pour accroître la compétitivité du port du Havre face à ses concurrents nord-européens et améliorer la productivité des terminaux ainsi que, globalement, la qualité de service.
Pour la première phase, le projet a été évalué à 2 585 millions de francs, dont 300 millions de francs destinés à des mesures de protection de l'environnement. La loi de finances pour 2000 avait mis en place une autorisation de programme de 220 millions de francs. Le projet de loi de finances pour 2001 prévoit, quant à lui, une nouvelle autorisation de programme d'un montant de 200 millions de francs et des crédits de paiement pour un total de 80 millions de francs. La réalisation du projet a, comme prévu, démarré il y a peu.
Pour ma part, je me réjouis de voir s'engager cet investissement ambitieux, qui confortera les atouts de la place portuaire havraise que sont notamment sa position géographique et sa proximité avec les grandes lignes maritimes océaniques, qui permettra la création de 3 500 emplois directs et indirects et qui induira des aménagements de la desserte du port du Havre.
La desserte ferroviaire, vous le savez, monsieur le ministre, ne sera satisfaisante que lorsque aura été réalisé le contournement de la région parisienne vers l'est. Mais j'ai cru comprendre que vous exploriez des pistes à ce sujet.
Par ailleurs, l'article 48 du projet de loi de finances pour 2001 prévoit de permettre aux collectivités territoriales et aux établissements publics de coopération intercommunale d'exonérer temporairement, à compter de 2001 et jusqu'en 2006, les équipements et outillages spécifiques des entreprises de manutention portuaire.
C'est le comité interministériel de la mer du 1er avril 1998 qui avait proposé cette mesure. Cette proposition a fait l'objet d'une notification auprès de la Commission européenne le 20 mai 1998, et celle-ci a rendu sa décision le 22 décembre 1999. Elle autorise la France à mettre en place un régime d'aide en faveur du secteur portuaire français, en la forme d'une exonération de taxe professionnelle des équipements de manutention portuaire détenus par les entreprises de manutention portuaire.
Cette proposition va dans le même sens que la suppression de la taxe perçue sur les passagers : il s'agit de développer la compétitivité des ports maritimes dans un contexte de concurrence européenne et internationale accrue qui impose la réduction des coûts de passage portuaire. La décision des collectivités locales devant intervenir avant le 31 janvier prochain, cette mesure pourra être mise en oeuvre dès 2001.
Enfin, l'amélioration des dessertes terrestres constitue le troisième volet de la politique de soutien de nos ports.
En effet, la qualité des dessertes terrestres des ports maritimes représente une condition sine qua non de leur développement et de leur compétitivité.
Par ailleurs, les contrats Etat-région prévoient des améliorations de la desserte de nos ports : l'aménagement de la RN 154 permet au port de Rouen, premier exportateur français de céréales, d'être relié correctement aux plaines céréalières du centre ; l'aménagement des deux points noirs ferroviaires que sont la traversée de Hazebrouck et le tronçon entre Douai et Ostricourt permettra d'atténuer la saturation de l'artère Dunkerque-Bétune-Lens-Ostricourt.
Le Sénat se prononce par un seul vote sur le budget de l'équipement, des transports et du logement, et la commission des finances en propose le rejet. Cependant, à titre personnel, je souscris aux orientations que traduit ce budget des ports maritimes pour 2001.
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur pour avis.
Mme Anne Heinis, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de budget de la mer pour 2001 m'amène, une fois encore, à faire le constat préoccupant de l'incapacité des pouvoirs publics à comprendre que notre pays dispose dans le domaine maritime d'atouts majeurs dans le contexte actuel de mondialisation et de développement continu des échanges et que, parallèlement, il est de la responsabilité de l'Etat de mettre en oeuvre une politique de la mer cohérente et dynamique. Hélas ! cette volonté politique n'existe pas.
Sont concernés aussi bien le développement de notre marine marchande que l'aménagement et la sauvegarde du littoral ou la prévention des risques et la sécurité maritime, sans oublier nos ports et leur desserte routière et ferroviaire. En effet, sans hinterland, il n'y a pas de fret ; et c'est un vrai problème d'aménagement du territoire, mais dont on ne s'occupe guère.
Pour résumer, le budget global de la mer pour 2001 s'élève, en chiffres arrondis, à 6,59 milliards de francs, soit une augmentation de 0,45 % seulement par rapport à l'année dernière.
Si l'on soustrait les crédits de l'Etablissement national des invalides de la marine, l'ENIM, c'est-à-dire la sécurité sociale des marins - soit 4,8 milliards de francs -, il reste environ 1,8 milliard de francs, dont à peine 1,25 milliard de francs pour les services actifs, répartis comme suit : pour les ports maritimes, 666 millions de francs ; pour le soutien à la flotte de commerce, 410 millions de francs ; pour le littoral, 24 millions de francs ; pour la sécurité maritime, 132 millions de francs. Autant dire une goutte d'eau dans la mer ! Ou le prix de vingt-cinq kilomètres d'autoroutes... Tel est le budget « actif » de la France pour la mer !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. On est parti de très loin !
Mme Anne Heinis, rapporteur pour avis. Je ne citerai pas d'autres chiffres, monsieur le ministre, mes collègues de la commission des finances l'ayant fait en détail.
Cependant, j'ai plaisir à rendre hommage - je pense que cela vous fera plaisir, ainsi qu'à ceux auxquels je m'adresse - à l'ingéniosité dont font preuve certains des services du ministère pour utiliser les moyens extrêmement modestes dont ils disposent.
Faute de temps, je n'évoquerai que le problème de la prévention et de la sécurité maritime, qui préoccupe particulièrement nos concitoyens, les autres points étant développés dans mon rapport.
Pour s'en tenir, donc, à la sécurité maritime, les avancées se font malheureusement au rythme des catastrophes. Mais à en juger au projet de budget pour 2001, les deux dernières n'ont pratiquement pas eu d'impact.
Ainsi, pour mémoire, la mise en service de nos trois remorqueurs de veille, d'intervention et de sauvetage date du naufrage de l' Amoco Cadiz , il y a plus de vingt ans, de même que la mise en place du rail d'Ouessant.
Depuis, les risques majeurs se sont considérablement accrus et diversifiés, notamment dans leurs effets sur les populations et sur l'environnement terrestre et maritime.
Les navires marchands sont de plus en plus nombreux, puissants et rapides, sans compter les « navires-poubelles ». On voit également se multiplier les ferries, navires à passagers chargés parfois de plus de 2 000 personnes coupant à grande vitesse, dans la Manche, le flux est-ouest de navires atteints de gigantisme et transportant souvent des matières dangereuses.
Que se passerait-il en cas de collision grave, de nuit, par très mauvais temps, dans la Manche ? C'est la grande crainte de ceux qui sont chargés de porter secours. Mais on ne les écoute pas.
Nous savons bien que le risque zéro n'existe pas, mais il nous appartient de tout mettre en oeuvre pour prévenir les accidents possibles et de réfléchir sur l'évaluation des risques, avec les gens de mer. Or l'évaluation des risques est totalement occultée : on pare au plus pressé !
Une véritable prévention s'appuie sur un contrôle efficace des navires et du trafic.
Cela suppose du matériel et des moyens techniques - c'est une question de financement - et des moyens humains, ce qui est le point le plus difficile. La situation est alarmante, essentiellement pour deux raisons : le manque de vivier et la faiblesse de notre flotte qui, au vingt-huitième rang mondial, ne représente que 1 % du total. Or il n'y a pas de sécurité maritime sans un pavillon fort, qui nous donne, d'une part, l'indispensable vivier d'hommes compétents et expérimentés dont nous avons besoin et, d'autre part, le poids nécessaire auprès des instances internationales, notamment l'OMI, l'Organisation maritime internationale.
Vous avez décidé, à juste titre, monsieur le ministre, de doubler le nombre des inspecteurs des affaires maritimes. Mais, au dernier concours, pour huit postes ouverts il y a eu trois candidats et un seul admis.
En conséquence, vous allez ouvrir des postes, mais il va falloir assurer une formation. Or l'enseignement maritime lui-même « patine » par manque de postes. J'en ai eu l'exemple concret toute l'année passée à Cherbourg.
Au total, il nous manque cent postes d'enseignant ; nous en avons obtenu quatre ; M. Jack Lang, cinq mille. Quel mépris pour l'enseignement maritime, même s'il faut garder les proportions à l'esprit !
Par ailleurs, on me dit que, pour à peine 1 milliard de francs de plus en 2001, nous aurions pu achever les programmes en cours sur les phares et balises, la construction et la rénovation des vedettes, l'équipement des CROSS -, les centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage, et des radars, avec les deux cents emplois globalement nécessaires pour l'ensemble des services.
Monsieur le ministre, quel aveuglement de la part du Gouvernement, qui veut développer la sécurité maritime et ne trouve même pas le milliard de francs nécessaire pour faire les réparations, les rénovations et les constructions d'urgence !
Il s'agit non pas de dépenser plus, mais de dépenser « plus dynamique et plus productif ». La mer, chez nos voisins, est source de richesses et d'emplois, pas chez nous. Ils ont une politique maritime souvent audacieuse et des investissements parfois considérables dans leurs provisions. En dépit de nos 5 500 kilomètres de côtes, la mer est inexistante dans la réflexion politique. Pourquoi ?
Un progrès pourrait déjà être fait en donnant au comité interministériel à la mer le rôle de proposition et de coordination qu'il n'a pas à l'heure actuelle.
Reste le volet européen, incontestablement accéléré par les deux derniers naufrages, volet qui est indispensable pour l'efficacité et la coordination des dispositifs. Les gens de mer, d'instinct, y sont acquis et ils coopèrent déjà.
Mais ils doivent pouvoir s'appuyer sur une politique et une réglementation européennes, ce qui suppose la définition d'objectifs communs, en particulier pour la responsabilisation des différents acteurs de la filière, armateurs, affréteurs et chargeurs, notamment. Je vous invite à consulter, sur ce sujet, le rapport du Sénat sur l' Erika.
Cela suppose aussi des échanges de personnels et d'expériences, une meilleure coordination des surveillances avec transparence des résultats sous peine d'évasion de trafic.
A ce titre, il est indispensable d'instituer une agence européenne de sécurité maritime que mes collègues de la Manche et moi-même demandons pour Cherbourg, monsieur le ministre, de donner un réel contenu à la banque de données EQUASIS, et de ne pas oublier le poids de l'Organisation maritime internationale.
Au vu de l'ensemble de ces considérations, la commission des affaires économiques a jugé que le projet de budget de la mer ne répondait pas aux besoins et l'a rejeté.
J'ajoute, à titre personnel, qu'à mes yeux ce projet de budget représente « encore une occasion manquée entre la France et la mer ». (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants.)
M. le président. Mes chers collègues, à la demande de M. le ministre, nous allons interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt-trois heures trente-cinq, est reprise à vingt-trois heures quarante-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe de l'Union centriste, cinq minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, cinq minutes.
Je vous rappelle qu'en application des décisions de la conférence des présidents aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.
Par ailleurs, le temps programmé pour le Gouvernement est prévu au maximum pour vingt-cinq minutes.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de budget de la mer, qui s'élève à 6 708 millions de francs, est en augmentation de 2,36 %. Si l'on tient compte de l'ensemble des contributions des autres ministères, le montant des crédits affectés représente aujourd'hui près de 10,5 milliards de francs.
Ces chiffres sont encourageants et rompent avec les années de basses eaux auxquelles les gouvernements précédents nous avaient habitués.
Mais comment ne pas s'interroger sur la faiblesse en valeur absolue du budget d'un secteur au coeur des préoccupations écologiques actuelles en matière de préservation de l'environnement, de transport et de développement durable ?
Ce budget, monsieur le ministre, ne nous semble pas correspondre exactement aux exigences auxquelles nous aurons à faire face en ce nouveau millénaire.
L'Etablissement national des invalides de la marine, l'ENIM, consomme 72 % de ce budget ; aussi, nous devons viser à augmenter en valeur les 26 % restant, sans bien sûr porter atteinte au budget de l'ENIM et à ses évolutions nécessaires.
Soulignons au passage que, même si un certain nombre de mesures ont été prises pour garantir le pouvoir d'achat des retraités, elles ne reposent encore que sur la compensation entre les régimes sociaux de base et consacrent de surcroît l'affaiblissement des recettes du régime par la réduction du nombre des emplois du secteur.
La question de l'emploi et de l'investissement dans le domaine maritime est, de ce point de vue, particulièrement essentielle.
Les solutions antérieurement définies dans ce cadre - système des quirats, défiscalisation des investissements - ont démontré leurs insuffisances et la nécessité d'un engagement public plus important, que la douloureuse affaire des Ateliers et Chantiers du Havre permet de souligner encore un peu plus. En ce sens, nous approuvons le plan « port 2000 » mais des besoins nouveaux apparaissent, en particulier ceux qui ont trait au renouvellement indispensable du parc mondial des navires ; ceux-ci, qui sont souvent obsolètes, qui, la plupart du temps, ont amorti leur investissement, continuent d'être affrétés par les compagnies.
Car un savoir-faire français existe, dont nul n'oserait douter qu'il puisse rivaliser, à qualité comparable, avec la concurrence asiatique, pour autant que cesse la pression internationale en faveur de la baisse des coûts salariaux. Alors, pourquoi pas Le Havre en complément de Saint-Nazaire ?
S'agissant de l'emploi, deux choses essentielles doivent, de notre point de vue, être retenues.
La première est l'effort accompli par le ministère en matière d'enseignement, et donc de renouvellement des cadres.
Les efforts doivent être poursuivis, notamment en direction de la formation secondaire et de son intégration dans l'enseignement public. Les 315 postes budgétaires créés l'an dernier relèvent de ce souci. Mais les moyens budgétaires engagés par le projet de loi de finances pour 2001 sont-ils réellement à la hauteur de l'ambition de créer un grand service public de l'enseignement public maritime et, plus globalement, d'inscrire au coeur des priorités la formation, indispensable pour attirer les jeunes et redynamiser l'emploi et l'activité ?
Certes, il est aussi d'autres urgences, notamment celle qui concerne la sécurité maritime. En ce domaine, nous nous félicitons que le Gouvernement ait, dès son arrivée, inversé la tendance, en augmentant les emplois d'inspecteurs de sécurité et se préoccupe aujourd'hui du renforcement des CROSS - centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage - des ULAM - unités littorales des affaires maritimes - des remorqueurs et de toute la logistique nécessaire face aux catastrophes.
La seconde, précisément, élargit la problématique à la réglementation internationale de l'espace maritime.
Après la catastrophe écologique qui a touché les côtes du littoral atlantique à la suite du naufrage du pétrolier Erika affrété par TotalFina Elf, le naufrage du chimiquier Ievoli Sun fait peser la menace de lourds préjudices écologiques sur le littoral du Cotentin.
Apparemment, les Torrey Canyon, Olympic Bravery, Boehlen, Amoco Cadiz et autres Tanio n'ont pas encore suffi à modifier durablement la donne et à éviter la persistance du risque écologique. Chaque jour, chaque semaine apporte son lot de dangers. A titre d'exemple, cette semaine, 2 000 tonnes d'ammonitrates prennent l'eau dans le petit port de Plévin en Côtes-d'Armor. A quand la catastrophe qui anéantira le bassin de coquilles saint-jacques auquel nous tenons tous tant ?
Nous constatons avec satisfaction que la France se place à la pointe du combat pour la sécurité maritime et l'évolution des normes environnementales en matière de navigation au long cours.
Mais nous avons l'impression que cette volonté française se heurte de manière frontale aux très mauvaises habitudes qui ont été prises, au seul motif de favoriser l'abaissement des coûts du transport maritime par une fuite en avant effrénée sur les coûts salariaux et les garanties en matière de sécurité.
Les armateurs, les affréteurs, autrement dit les donneurs d'ordre, exercent une telle pression sur les prix du transport que celui-ci n'est plus en mesure d'intégrer le coût des risques écologiques. On a malheureusement de bonnes raisons de croire que la sanction appliquée suivant le principe du pollueur-payeur est de facto inopérante.
Par ailleurs, des réglementations existent à l'échelon tant européen qu'international. Mais, soit parce qu'elles sont peu contraignantes, soit lorsqu'elles le sont, parce qu'un laxisme existe quant à leur application, elles sont trop souvent contournées, plus fondamentalement encore, parce que l'organisation du transport maritime est fondée sur un marché où les grandes compagnies imposent leur loi aux Etats.
Si les Etats sont défaillants, il n'y a aucune raison pour que, dans un environnement d'accroissement de la concurrence, les normes de sécurité soient respectées car - qui le nierait ? - elles sont incompatibles avec une régulation laissée aux seules forces du marché.
La situation fiscale de TotalFina a fait l'objet de toutes les attentions de notre commission des finances. Une part des extraordinaires bénéfices réalisés par le groupe pétrolier devrait, de notre point de vue, être mobilisée sur la sécurité maritime.
Le renforcement des moyens, des effectifs et des investissements inscrits dans ce projet de budget est tout à fait positif, mais il n'est qu'un élément de l'action que notre pays doit mener, et il doit être poursuivi sans relâche.
C'est avec un ton solennel, monsieur le ministre, que je veux vous dire mes craintes justifiées de voir se reproduire près des côtes bretonnes, normandes ou picardes, de nouvelles catastrophes dans la mesure où de nombreux navires-poubelles continuent de circuler et de transporter des produits dangereux pour l'environnement. Je crains qu'en pareil cas nos populations ne cherchent pas d'autres coupables que ceux qu'ils ont près d'eux, à savoir tout d'abord le Gouvernement et l'Etat français. C'est pourquoi il convient de frapper fort auprès des instances européennes et de l'OMI, l'Organisation maritime internationale, pour harmoniser les normes de sécurité sur le plan tant européen que mondial. Je connais votre détermination, monsieur le ministre, et vous aurez compris que cette sollicitation et avant tout un encouragement.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. J'ai compris !
M. Gérard Le Cam. Je vous saurais gré, monsieur le ministre, de bien vouloir nous indiquer, au terme de cette période de présidence française de l'Union européenne, quelles démarches ont été mises en oeuvre sur cette question de l'harmonisation.
Ce sont là les interrogations et observations que nous comptions produire lors de l'examen des crédits de ce projet de budget, dont nous approuvons les orientations. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. Maman.
M. André Maman. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon propos sera bref et portera essentiellement sur la sécurité maritime.
Les crédits consacrés à la mer progressent de près de 7 % dans le budget pour 2001. Ils s'élèvent à plus de 6 milliards de francs. Cela peut être vraisemblablement imputé à une douloureuse prise de conscience des enjeux liés à la sécurité maritime. Je rappelle, à cet égard, que ce budget avait connu, l'an passé, une régression surprenante.
Le montant des crédits affectés à la sécurité maritime, dans le projet de budget pour 2001, traduit-il le caractère prioritaire de celle-ci ? La réponse est négative. Il ne s'agit, malheureusement, que d'une remise à niveau, rendue obligatoire, et nécessaire, par des années de négligence vis-à-vis du budget de la marine marchande. En outre, même méritoire, cette remise à niveau est partielle et insuffisante, tant les besoins sont importants. Pour avoir une idée de l'ampleur de ces derniers, il suffit de consulter le rapport de la mission commune d'information du Sénat sur le naufrage de l' Erika , rédigé par nos deux excellents collègues, que je voudrais saluer ici, Mme Anne Heinis et M. Henri de Richemont. Il décrit parfaitement ce qu'ils nomment « la grande misère de la sécurité maritime », en donnant les caractères de cette scandaleuse situation, qui résulte de crédits budgétaires très insuffisants, de moyens humains déficients, du manque cruel d'inspecteurs de la sécurité des navires, du manque de moyens des centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage, de la faiblesse des moyens de prévention de la pollution et, enfin, de l'inacceptable obsolescence de la signalisation maritime.
Cette mission indiquait, avec force, que la sécurité ne devait pas être victime des contraintes budgétaires. Elle préconisait également l'amélioration des contrôles, la sécurisation de la structure des navires et le renforcement de la transparence et de la prévention. D'autres propositions portaient sur le renforcement des moyens de lutte contre la pollution.
Trouve-t-on dans le projet de budget qui nous est présenté ce soir les éléments nous permettant de répondre, ou de commencer à répondre, aux carences et aux lacunes que je viens d'indiquer ?
Le constat, s'il n'est pas entièrement négatif, ne peut malgré tout emporter l'adhésion. Ainsi, je regrette profondément que les crédits consacrés à la protection et à l'aménagement du littoral soient, cette année, en nette régression. Ils ne représentent plus que 0,3 % du budget de la marine marchande. Quant aux moyens consacrés à la police maritime, au contrôle de la sécurité des navires, à la surveillance maritime, à la sécurité des personnes et des biens dans l'espace maritime et à la protection des ressources halieutiques, il est surprenant de constater que les crédits qui y sont alloués atteignent, cette année, 132 millions de francs, soit une baisse de 2,4 % par rapport à l'an dernier. Malgré l'importance des missions qu'ils recouvrent, ils ne représentent que 2,1 % des crédits du budget de la marine marchande. Il est inutile d'ajouter quoi que ce soit, car ces chiffres parlent d'eux-mêmes.
Les moyens dégagés sont donc malheureusement insuffisants, voire dérisoires, au regard de l'ampleur des besoins. Manifestement, il est très clair que la volonté politique de renforcer la sécurité maritime n'est pas au rendez-vous. Votre budget, monsieur le ministre, n'est même pas un budget de rattrapage. Ce n'est certes pas un budget sur lequel on puisse construire une véritable sécurité maritime.
Il aura malheureusement fallu les naufrages de l' Erika et de l' Ievoli Sun pour que la France se rappelle qu'elle est une grande nation maritime et que cette qualité exige des moyens financiers très importants. Elle exige également une forte volonté politique de se donner ces moyens. Que devra-t-il nous arriver pour que le Gouvernement prenne enfin conscience qu'une grande nation maritime qui n'a pas de véritable sécurité maritime n'est rien ? Dois-je vous rappeler, enfin, que notre pays compte plus de 5 000 kilomètres de côtes ? Comment pouvez-vous parler d'une priorité accordée à la sécurité maritime par ce budget, alors que le Gouvernement auquel vous appartenez ne compte même pas un ministère de la mer ?
Je terminerai par une remarque de bon sens : oui, l'Europe est vraisemblablement le cadre naturel d'une future réglementation, relative à la sécurité maritime de notre continent. Non, elle ne peut pas être un alibi invoqué pour échapper à nos propres responsabilités et pour excuser nos propres fautes.
Pour toutes les raisons que j'ai invoquées, monsieur le ministre, le groupe de l'Union centriste ne votera pas ce budget. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et Indépendants et du RPR.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, l'actualité récente nous rappelle avec force que, dans le domaine maritime, sans contrôle strict de l'état des bateaux, sans responsabilisation financière et pénale des armateurs, des affréteurs et des sociétés de classification, sans un système plus transparent qui doit faire payer le juste coût de notre sécurité, nous ne parviendrons pas à enrayer le risque de catastrophes qui menacent nos côtes dès que la tempête se lève.
La sécurité en mer, c'est l'affaire des marins, bien sûr, mais c'est aussi l'affaire de l'Europe, des Etats et de l'Organisation maritime internationale, c'est donc aussi notre affaire.
Vous connaissez, monsieur Le Cam, l'engagement de la présidence française de l'Union européenne en ce sens, vous l'avez dit. Dès le début de l'année, nous avons envoyé trois mémorandum : un à l'Europe, à l'OMI et un au FIPOL. C'était en février.
Les discussions à l'OMI sont ainsi largement engagées pour obtenir le doublement des contrôles en cale sèche à partir de quinze ans d'âge - et, doublement, cela signifie non pas tous les cinq ans, mais tous les deux ans et demi - et l'élimination d'un tiers des navires à simple coque à l'échelle mondiale d'ici à 2005 et des deux tiers d'ici à 2010, ce qui nous mettra, monsieur Maman, au niveau des Etats-Unis.
S'agissant des discussions communautaires, nous avons obtenu un accord à l'unanimité des Etats membres en faveur d'un renforcement du contrôle de l'Etat du port, d'un agrément et d'une responsabilisation financière des sociétés de classification, ainsi que l'élimination progressive des navires à simple coque.
J'étais il y a deux jours au Parlement européen, et j'ai constaté la volonté des trois institutions européennes - le Parlement, la Commission et le Conseil - d'aller rapidement de l'avant.
Mais nous devons aller encore au-delà, et envisager la création d'une agence européenne de la sécurité maritime pour renforcer - sur ce point, je vous rejoins, madame Heinis - la surveillance et la transparence du secteur du transport maritime et responsabiliser les opérateurs.
A cet égard, je souhaiterais que tous les parlementaires se sentent concernés par un sujet que M. Le Cam a évoqué, à savoir les conditions de vie et de travail des marins. On ne parle pas assez souvent de la surexploitation de ces hommes ! Pourtant, vous savez toutes et tous qu'ils subissent des conditions indignes de notre époque. Et, même s'il faut remplacer les navires-poubelles, les causes de beaucoup d'accidents ne sont pas seulement liées à la structure des navires et aux problèmes de la navigation : les facteurs humains dovient être pris en compte.
Si notre volonté est forte au niveau communautaire et international, elle l'est tout autant au niveau budgétaire, et vous ne serez donc pas surpris si, cette année encore, la sécurité est une des priorités de mon budget.
Mais je n'ai pas attendu cette année pour renforcer le budget de la mer, notamment sur les aspects de sécurité, monsieur Lise ! J'ai pris conscience, dès mon arrivée en 1997, des besoins en ce domaine. Et, si vous considérez que ce budget est encore faible, si vous trouvez qu'il ne s'agit que d'une remise à niveau, monsieur Maman, c'est qu'il a été vraiment abandonné jusqu'en 1997.
Je vais même avouer à Mme Heinis qu'en l'écoutant je me demandais si elle s'adressait bien à moi. Je pensais : « Ce n'est pas possible ! Pour dire autant de mal de la situation des ports et de la politique maritime dans ce pays, elle doit viser les deux gouvernements qui m'ont précédé ! Elle ne peut pas me viser moi, puisque depuis que je suis arrivé j'ai commencé à inverser les choses ! » Je ne comprenais pas votre agressivité, madame Heinis, mais, en réfléchissant, j'ai compris : vous visiez certainement les deux gouvernements qui m'ont précédé, et vous aviez finalement raison !
Quand on part de si bas pour redresser une telle situation, ce n'est pas toujours aussi simple. Pourtant, il faut le faire !
Ainsi, en ce qui concerne les effectifs, nous revenons de loin. Jusqu'en 1997, le nombre d'agents figurant au budget de la mer n'a cessé de décroître régulièrement. Depuis, j'ai inversé la tendance : 75 postes budgétaires seront créés pour la sécurité maritime en 2001, dont 66 sur le budget de la mer.
Force a été de constater que le contrôle des navires étrangers est une arme de dissuasion décisive, dont l'efficacité est proportionnelle à la pression exercée. La concrétisation de la volonté politique affichée - car il faut une volonté politique ! - en faveur du renforcement de cette pression passe par le doublement de la capacité de contrôle dans les ports, et nous nous y engageons, mais pas dans deux ou trois ans : dès 2001 !
Monsieur Lise, vous considérez que le taux de contrôle dans les ports a diminué, et vous avez bien fait d'évoquer ce point, car vous me donnez l'occasion de préciser que ce n'est pas parce que le nombre d'inspecteurs a diminué - au contraire : il a augmenté depuis 1997 - mais parce que nous avons donné des consignes, depuis trois ans, pour mieux cibler les navires, pour les inspecter plus longtemps. Certes, nous pourrions, comme cela se fait parfois ailleurs, faire du chiffre pour du chiffre et dire ensuite que nos inspecteurs ont contrôlé beaucoup de navires, mais s'ils ne font que passer, s'ils ne restent qu'une demi-heure sur le bateau, le bilan chiffré sera peut-être bon, mais la qualité du contrôle sera médiocre. Moi, je ne travaille pas comme cela : avec les inspecteurs que j'ai, j'essaie de faire réaliser des contrôles sérieux, et de les cibler au maximum. Cela étant, il faut davantage d'inspecteurs, j'en conviens.
C'est pourquoi nous avons décidé de doubler le nombre d'inspecteurs dans ce budget. En outre, pour pouvoir engager suffisamment d'inspecteurs rapidement, mesdames, messieurs les sénateurs, nous prévoyons une augmentation sensible des primes - de l'ordre de 4 000 francs - pour rendre cette profession plus attractive.
Par ailleurs, un centre de formation sera créé à Nantes et fonctionnera dès la rentrée prochaine. Comme vous pouvez le constater, nous ne nous contentons pas de reprendre les mesures qui étaient prévues dans le projet de budget précédent : nous agissons.
En ce qui concerne les crédits affectés à la sécurité maritime, les dotations en moyens de fonctionnement sont en hausse de plus de 5 %, mais, surtout, les moyens d'engagement en autorisations de programme s'élèvent à 148 millions de francs, contre 92,25 millions de francs dans la loi de finances pour 2000. Il s'agit donc non pas d'une stagnation, mais d'une progression de plus de 60 % !
Ces crédits permettront de financer notamment l'acquisition d'un second patrouilleur de haute mer dès 2001 et de baliseurs neufs pour les ports du Havre, de Dunkerque et de Brest au titre de la signalisation maritime.
Cette augmentation des crédits profitera également aux CROSS, vous l'avez dit, monsieur Lise. Ces derniers assureront en 2001 l'extension des missions qui leur sont confiées en matière de sécurité maritime, de protection de l'environnement marin et de gestion de l'effort de la pêche, et en particulier la surveillance et le suivi plus systématique des navires.
Le comité interministériel du 27 juin dernier a proposé un certain nombre de mesures en faveur de la sécurité maritime. Pour renforcer l'attractivité de nos ports et le pavillon français, les équipements des CROSS seront modernisés et l'ensemble des radars de la Manche seront renouvelés.
Parallèlement, les crédits affectés à la signalisation maritime augmentent aussi bien en fonctionnement qu'en investissement, permettant la réparation des phares, balises et bouées qui ont été endommagés par la tempête, mais aussi la modernisation de la flotte de balisage sur trois ans au lieu des cinq ans initialement prévus.
Enfin, connaissant l'importance de la Société nationale de sauvetage en mer, la SNSM - je crois qu'il faut en parler un peu plus ! - j'ai souhaité, dans le dispositif de sécurité en mer, que la subvention d'équipement pour 2001 intègre la réserve parlementaire de 0,5 million de francs accordée l'année dernière par votre assemblée.
Mais renforcer la sécurité maritime, cela passe aussi par le renforcement du pavillon français, Mme Heinis l'a souligné, et je suis de cet avis.
Ainsi, le projet de budget pour 2001 traduit la préoccupation de l'Etat d'accroître son soutien à la flotte de commerce battant pavillon français au bénéfice de l'emploi maritime. Les crédits de ce secteur connaîtront ainsi un accroissement de 21,4 %.
Cette augmentation prend en compte la remise à niveau des crédits permettant le remboursement aux armements maritimes de la taxe professionnelle et l'extension aux armements maritimes assurant la desserte de la Corse du dispositif de remboursement des contributions sociales patronales obligatoires.
Un nouveau pas devra être franchi à la suite des décisions du comité interministériel de la mer du 27 juin dernier, qui doit permettre d'étendre aux allocations familiales et aux cotisations ASSEDIC le remboursement des charges sociales pour les entreprises dont les navires, immatriculés aux registres métropolitain ou des TAAF, les terres Australes et Antarctiques françaises, sont confrontés à la concurrence internationale. Cela se fera sous réserve d'un accord d'entreprise pour les armements ayant des navires sous ce registre, accord qui portera notamment aussi sur les effectifs et sur la formation.
Pour répondre à votre préoccupation, monsieur Lise, ces remboursements seront accélérés, pour éviter les problèmes de trésorerie que vous soulignez.
Par ailleurs, pour répondre à votre préoccupation légitime, monsieur Le Cam, un véritable régime social sera créé pour tous les marins sur le registre des TAAF, en pleine concertation avec les représentants des marins. Et, pour contrôler les conditions de travail, notamment sur ces navires, un nouveau dispositif d'inspection du travail maritime au sein des services déconcentrés des affaires maritimes, avec de nouvelles missions, sera mis en place.
Il est ainsi créé dix emplois à cet effet en 2001.
En complément de ces interventions budgétaires de l'Etat, le dispositif de GIE fiscal, mis en place en 1998, a permis de stimuler les investissements navals. Depuis sa création, ce régime fiscal a, en effet, permis de financer trente-deux navires, pour un montant de 8,3 milliards de francs.
Grâce à toutes ces mesures, nous avons stoppé la tendance à la baisse observée jusqu'en 1997 et que Mme Heinis a, à juste titre, dénoncée avec force.
Il faut également renforcer la sécurité dans les ports et accélérer leur modernisation.
Les moyens d'engagement consacrés aux ports maritimes s'accroissent, monsieur Massion, de 5,3 %, vous l'avez dit. Cette progression répond à la volonté d'accompagner la croissance, aujourd'hui effective et confirmée, des trafics portuaires, dans le contexte de développement des échanges maritimes mondiaux.
Cette évolution positive est confirmée par les résultats des neuf premiers mois de l'année 2000, qui montrent une croissance globale des trafics des ports autonomes maritimes : en dépit des inégalités constatées entre les ports, elle s'élève, en moyenne, à 6 %. Les ports autonomes traitent 80 % du trafic total et ils enregistent une croissance moyenne de 8,5 % de leurs trafics de marchandises diverses, notamment conteneurisées.
Sur ce dernier créneau, le port du Havre présente des perspectives de développement prometteuses et le projet de budget pour 2001 intègre les crédits nécessaires - 200 millions de francs en autorisations de programmes - à la poursuite de l'extension de ses infrastructures, avec le projet « Port 2000 » qui a pour ambition de faire de ce port une grande plate-forme à l'échelle européenne des échanges de marchandises conteneurisées.
Pour vous répondre plus précisément, monsieur Massion, les travaux commenceront, comme prévu, au tout début de l'année 2001, pour une mise en service des premiers quais en 2004.
D'autres investissements d'extension de capacité ou de modernisation - de dimension plus modeste, certes - seront aussi nécessaires dans d'autres ports pour soutenir le développement de leurs trafics de marchandises diverses. C'est le cas, en particulier, à Dunkerque, où le trafic de marchandises conteneurisées s'accroît de plus de 20 % en 2000 par rapport à 1999, mais aussi à Rouen, à Saint-Nazaire et à Marseille, ports qui devraient connaître en 2000 une croissance proche de 10 % de leur trafic de conteneurs.
A la suite du comité interministériel de la mer, actuellement, des rapprochements sont en cours entre différents ports dans une zone géographique donnée, notamment dans le nord de la France. Des évolutions très positives sont actuellement constatées à cet égard : j'étais récemment à Nantes et à Saint-Nazaire, où une réelle volonté existe pour faire en sorte qu'une synergie - et non pas une concurrence - s'établisse entre des ports qui sont voisins, de manière à répondre avec plus d'efficacité aux ports de l'Europe du Nord.
Comme vous l'avez souligné, monsieur Massion, la sécurité des ports maritimes sera aussi renforcée, s'agissant tant de leur exploitation, avec la création de seize postes supplémentaires d'officier de port ou d'officier de port adjoint, que de leurs équipements, avec un programme de rénovation d'infrastructures inclus dans les nouveaux contrats de plan Etat-région, par lesquels l'Etat s'est engagé à quadrupler ses concours aux investissements portuaires. Je dis bien que le montant de ces concours est multiplié par quatre par rapport à ce qui avait été fait par les deux gouvernements précédents, que vous avez sûrement voulu viser tout à l'heure, madame Heinis ! (Sourires.) Cela n'est pas rien !
En outre, notre littoral, dont l'actualité vient encore de démontrer à quel point il peut être soumis à de grands risques, doit être mieux protégé.
Contrairement à ce que vous avez annoncé, monsieur Maman, l'Etat entend consacrer à cette fin des moyens importants, ce qu'il a déjà commencé à faire, en 2000, avec une ouverture spécifique de crédits pour un montant substantiel, après le naufrage de l' Erika et les tempêtes de l'hiver dernier : 7,5 millions de francs ont ainsi été mobilisés pour des opérations exceptionnelles de remise en état du domaine public maritime, 10 millions de francs ont été dégagés pour faire face aux abandons de navire dans les ports, 40 millions de francs ont été consacrés à la reconstitution complète des équipements du dispositif « Polmar-Terre » et 100 millions de francs ont été alloués, dont 70 millions de francs au titre du budget de la mer, à la restauration de digues de protection contre l'érosion marine.
Regardez bien les chiffres ! Le projet de budget pour 2001 prévoit une augmentation de 16 % du montant des moyens d'engagement alloués à la protection de notre littoral et s'inscrit ainsi dans la continuité des efforts déjà réalisés l'an dernier. Les exercices de préparation à la mise en oeuvre des plans de lutte coordonnés contre la pollution accidentelle seront renforcés et des avenants aux contrats de plan accroîtront les concours de l'Etat en matière de défense des côtes littorales contre les effets de la mer.
Par ailleurs, la sécurité des marins passe également par un système de formation performant et une protection sociale renforcée.
Sur ce plan, l'année 2001 verra la poursuite de la réforme du système de formation maritime, avec notamment la continuation de la rénovation des cursus afin de mettre ceux-ci en conformité avec les nouvelles normes internationales définies par l'OMI, et le développement du Centre national de formation des formateurs maritimes de Nantes.
Cet accroissement des effectifs scolarisés s'accompagne de la création de quatre emplois d'enseignant dans le projet de loi de finances pour 2001. A cet effet, les moyens affectés à la formation connaissent une progression à périmètre constant. La dotation de l'Association pour la gérance des écoles maritimes et aquacoles, l'AGEMA, ne subit qu'une diminution apparente, car un transfert de 16,45 millions de francs est opéré sur les chapitres de personnel au titre du passage sous statut public des personnels de l'enseignement maritime secondaire. Trente-quatre postes ont été créés cette année pour répondre aux besoins. Nous n'oublions donc pas la formation.
Enfin, en matière sociale, la subvention de l'Etat à l'Etablissement national des invalides de la marine, l'ENIM, atteint un montant de 4,8 milliards de francs, soit une hausse de 1,9 % par rapport à cette année. Ce montant, qui représente une part significative des crédits consacrés au secteur maritime, témoigne de la solidarité que la communauté nationale se doit de manifester aux gens de mer. Il permettra notamment d'étendre la protection sociale dont bénéficient les ressortissants du régime spécial, par le biais de deux mesures inscrites dans la loi de financement de la sécurité sociale.
La première permet, dans certaines limites, de valider pour la retraite les périodes passées par les marins en invalidité maladie. Une telle réforme était réclamée par les organisations de marins et d'anciens marins. Elle comble, en effet, une sérieuse lacune du régime spécial, puisque les pensions de retraite, et donc de réversion, ne prenaient en compte que les années d'activité du marin. Si celui-ci, de son vivant, bénéficiait de la pension d'invalidité, sa veuve ne percevait parfois qu'une pension de réversion prenant en compte peu d'annuités, et donc d'un montant très faible. Cette situation sera désormais corrigée.
La seconde mesure a été introduite ici même sur l'initiative de vos collègues, Mmes Dieulangard et Boyer, qui ont présenté, avec l'accord du Gouvernement, un amendement au projet de loi de financement de la sécurité sociale que le Sénat a adopté. Cet amendement permet d'augmenter sensiblement le montant des indemnités versées aux marins se trouvant en arrêt maladie, puisque désormais la cotisation vieillesse à la charge des marins concernés sera calculée non plus sur la base de la totalité du salaire forfaitaire de référence, mais selon une assiette correspondant au montant brut de cette indemnité.
Ainsi, mesdames, messieurs les sénateurs, ce projet de budget de la mer est ambitieux, tourné vers le développement économique durable et caractérisé par un souci marqué de donner une priorité absolue à la sécurité, à l'environnement, aux marins et à la population de nos côtes. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Je voudrais simplement remercier M. le ministre d'avoir bien voulu répondre à l'invitation du Sénat d'expérimenter une nouvelle forme de débat budgétaire.
Monsieur le président, je voudrais également vous adresser mes remerciements pour avoir, avec la délicatesse qui vous caractérise, permis que les échanges s'effectuent selon des modalités nouvelles, qui, après quelques petites adaptations, devraient donner satisfaction.
Cette partie expérimentale de la discussion a permis à nombre de nos collègues de poser des questions et d'obtenir des réponses précises. Elle contraste avec la partie plus traditionnelle du débat budgétaire, qui est constituée d'une succession de propos très intéressants mais souvent généraux.
Enfin, je voudrais rappeler que la nomenclature budgétaire, qui est décidée par le Gouvernement et non pas par le Sénat, amène la commission des finances à se prononcer par un seul vote sur l'ensemble des crédits du ministère de l'équipement, des transports et du logement. M. le ministre a un empire sous sa responsabilité.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je n'ai pas tout, il me manque les finances !
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Il vous est arrivé, monsieur le ministre, de regretter que le Sénat ne puisse pas se prononcer sur tel ou tel de vos budgets, mais ce fait résulte d'une décision du Gouvernement ! Nous sommes donc prêts, l'an prochain, à adopter une autre démarche.
S'agissant, plus globalement, de la position que la commission des finances recommande ce soir au Sénat d'adopter, nous vous plaignons, au fond, vous qui présidez le conseil des ministres des transports européens, d'être sans doute le moins heureux pour l'investissement civil, qui est devenu très faible en France. J'ai déjà rappelé en effet que son montant est devenu inférieur au coût du passage aux 35 heures pour notre pays. Cela montre que vous êtes, à l'évidence, une victime, et, pour vous donner de la force en vue des négociations que vous devrez mener avec le Premier ministre pour le prochain budget, la commission des finances du Sénat préconisera le rejet de l'ensemble de vos crédits, à l'exception de l'article 60 ter , que, pour saluer l'effort que vous avez bien voulu consentir, nous voterons.
M. le président. Monsieur le président de la commission des finances, je voudrais ajouter que c'est une initiative de votre part qui nous a permis de vivre cette démarche expérimentale. Le Sénat peut vous en être reconnaissant, car il s'agit là d'une modernisation souhaitable. Il reste sans doute à affiner cette procédure et peut-être, dans la partie conventionnelle du débat budgétaire, conviendrait-il d'alléger quelque peu la présentation des rapports. Il ne faudrait pas non plus mettre le ministre face à une difficulté insurmontable compte tenu du délai très réduit dont il dispose, mais M. Gayssot a parfaitement joué le jeu et il faut l'en remercier.
Nous allons maintenant procéder à l'examen et au vote des crédits figurant aux états B et C concernant l'équipement, les transports et le logement.
Je rappelle que le Sénat a déjà examiné aujourd'hui même les crédits affectés au tourisme, à l'urbanisme, au logement et aux transports terrestres et au transport aérien et à la météorologie.

ÉTAT B

M. le président. « Titre III : 1 213 286 420 francs. »

Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits figurant au titre III.

(Ces crédits ne sont pas adoptés.)
« Titre IV : 214 404 732 francs. »
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits figurant au titre IV.

(Ces crédits ne sont pas adoptés.)

ÉTAT C

M. le président. « Titre V. - Autorisations de programme : 11 119 112 000 francs ;
Crédits de paiement : 5 346 588 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits figurant au titre V.

(Ces crédits ne sont pas adoptés.)
M. le président. « Titre VI. - Autorisations de programme : 18 352 298 000 francs ;
Crédits de paiement : 7 243 682 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits figurant au titre VI.

(Ces crédits ne sont pas adoptés.)
M. le président. J'appelle en discussion l'article 60 ter, qui est rattaché pour son examen aux crédits affectés à la mer.

Article 60 ter



M. le président.
« Art. 60 ter . - Le Gouvernement déposera sur le bureau des assemblées, avant le 15 avril 2001, un rapport sur l'évolution des moyens humains et matériels consacrés à l'enseignement maritime et aquacole secondaire et sur l'application de l'article 133 de la loi de finances pour 2000 (n° 99-1172 du 30 décembre 1999). »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 60 ter .

(L'article 60 ter est adopté.)
M. le président. Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances concernant la mer et, par là même, l'examen des dispositions concernant le ministère de l'équipement, des transports et du logement.

5

RETRAIT DE TEXTES SOUMIS AU SÉNAT
EN APPLICATION DE L'ARTICLE 88-4
DE LA CONSTITUTION

M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre une communication, en date du 19 décembre 2000, l'informant du retrait, le 8 juin 2000, des neuf textes soumis en application de l'article 88-4 de la Constitution suivants :
N° E 034. - Proposition de règlement du Conseil établissant un système de licences pour les activités de pêche des navires battant pavillon d'un Etat membre ou enregistrés dans un port de la Communauté, exercées dans la zone de réglementation définie par la convention NAFO.
N° E 114. - Proposition de décision du Conseil relative à la conclusion d'un accord entre la CEE et la Fédération de Russie concernant les services des lancements spatiaux.
N° E 185. - Proposition de décision du Conseil concernant la conclusion de certains accords entre la CEE et certains pays tiers sur le commerce de produits textiles - Lettonie, Lituanie.
Cette proposition de décision concernait des accords textiles avec huit pays. Six d'entre eux ont été adoptés au Conseil ECOFIN du 13 octobre 1997 : Albanie, Arménie, Fédération de Russie, Slovénie, Tadjikistan, Ouzbékistan (lettre n° 521/97 FM/NA du 16 octobre 1997).
La Commission procède aujourd'hui au retrait de la proposition s'agissant des accords avec la Lettonie et la Lituanie.
La procédure de l'article 88-4 est donc achevée pour l'ensemble du document.
N° E 209. - Proposition de décision du Conseil relative à l'exercice de la compétence externe de la Communauté aux conférences internationales du travail en cas de compétence appartenant ensemble à la Communauté et à ses Etats membres.
N° E 402. - Proposition de décision du Conseil relative à un soutien communautaire à des actions en faveur des personnes âgées.
N° E 463. - Proposition de décision du Conseil portant adoption d'un programme de mesures non législatives pour améliorer la sécurité et la santé sur le lieu de travail : communication de la Commission sur un programme communautaire dans le domaine de la sécurité, de l'hygiène et de la santé sur le lieu de travail (1996-2000).
N° E 494. - Proposition de règlement du Conseil relatif à la suspension de taux appliqués à l'intérieur de contingents tarifaires pour certains produits agricoles.
N° E 987. - Proposition de décision du Conseil instituant un fonds européen de garantie pour encourager la production cinématographique et télévisuelle.
N° E 1430. - Proposition de règlement (CE) du Conseil portant suspension de certaines concessions prévues par l'accord européen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et la République de Lettonie, d'autre part (beurre).

6

TRANSMISSION D'UN PROJET DE LOI

M. le président. J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, relatif à la résorption de l'emploi précaire et à la modernisation du recrutement dans la fonction publique ainsi qu'au temps de travail dans la fonction publique territoriale.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 117, distribué et renvoyé à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

7

DÉPÔT D'UN RAPPORT

M. le président. J'ai reçu de M. Joseph Ostermann, rapporteur pour le Sénat, un rapport fait au nom de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion sur le projet de loi sur l'épargne salariale.
Le rapport sera imprimé sous le n° 116 et distribué.

8

ORDRE DU JOUR

M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd'hui, samedi 2 décembre 2000, à neuf heures trente, à quinze heures et le soir :
Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2001, adopté par l'Assemblée nationale (n°s 91 et 92, 2000-2001) (M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation).
Deuxième partie. - Moyens des services et dispositions spéciales :
Jeunesse et sports :
M. Michel Sergent, rapporteur spécial (rapport n° 92, annexe n° 31) ;
M. James Bordas, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles (avis n° 93, tome IX).
Emploi et solidarité :
III. - Ville :
M. Alain Joyandet, rapporteur spécial (rapport n° 92, annexe n° 19) ;
M. Gérard Larcher, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan (avis n° 94, tome XXIII) ;
M. Paul Blanc, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales (avis n° 96, tome III).
Communication :
(Crédits du Conseil supérieur de l'audiovisuel, d'aides à la presse et à l'audiovisuel inscrits au budget des services généraux du Premier ministre ; article 46 et lignes 40 et 41 de l'état E annexé à l'article 42) ;
M. Claude Belot, rapporteur spécial (rapport n° 92, annexes n°s 9 et 10) ;
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles (communication audiovisuelle, avis n° 93, tome X) ;
M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles (presse écrite, avis n° 93, tome XI).
Culture :
M. Yann Gaillard, rapporteur spécial (rapport n° 92, annexe n° 8) ;
M. Philippe Nachbar, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles (avis n° 93, tome I) ;
M. Marcel Vidal, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles (cinéma, théâtre dramatique, avis n° 93, tome II).

Délai limite pour les inscriptions de parole
dans les discussions précédant l'examen
des crédits de chaque ministère

Le délai limite pour les inscriptions de parole dans les discussions précédant l'examen des crédits de chaque ministère est fixé à la veille du jour prévu pour la discussion, à dix-sept heures.

Délai limite pour le dépôt des amendements
aux crédits budgétaires
pour le projet de loi de finances pour 2001

Le délai limite pour le dépôt des amendements aux divers crédits budgétaires et articles rattachés du projet de loi de finances pour 2001 est fixé à la veille du jour prévu pour la discussion, à dix-sept heures.

Délai limite pour le dépôt des amendements
aux articles de la deuxième partie,
non joints à l'examen des crédits
du projet de loi de finances pour 2001

Le délai limite pour le dépôt des amendements aux articles de la deuxième partie, non joints à l'examen des crédits du projet de loi de finances pour 2001, est fixé au vendredi 8 décembre 2000, à seize heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.

(La séance est levée le samedi 2 décembre 2000, à zéro heure vingt-cinq.)

Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON





QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)


Situation financière des conseils d'architecture,
d'urbanisme et de l'environnement

958. - 1er décembre 2000. - M. Jean-Pierre Demerliat attire l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur la situation financière délicate dans laquelle se trouvent un certain nombre de conseils d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement (CAUE). Ces organismes ont, aux termes de l'article 7 de la loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 sur l'architecture, « pour mission de développer l'information, la sensibilité et l'esprit de participation du public dans le domaine de l'architecture, de l'urbanisme et de l'environnement ». Ils sont « à la disposition des collectivités qui peuvent les consulter sur tout projet d'urbanisme, d'architecture ou d'environnement ». Ces prestations, gratuites, sont particulièrement appréciées des maires des petites communes, qui trouvent là une aide précieuse pour leurs choix d'urbanisme, d'aménagement et de développement. Pour leur financement, les CAUE bénéficient de la taxe départementale pour les CAUE, qui est instituée par délibération du conseil général. Cette taxe est calculée sur la même base que la taxe locale d'équipement. L'assiette de cette taxe n'est donc pas stable, du fait notamment de l'irrégularité du rythme des constructions. Cette évolution pourrait ouvrir la voie à des difficultés budgétaires pour les CAUE. Il souhaite donc savoir quelles solutions le Gouvernement compte proposer pour garantir des ressources stables aux CAUE, afin de les rassurer sur leur avenir et leur pérennité.