SEANCE DU 6 DECEMBRE 2000


« Crédits de paiement : 753 069 000 francs. »
Sur ces crédits, la parole est à M. Bret.
M. Robert Bret. Le projet de loi de finances pour 2001, dans son volet consacré à la sécurité, a fait ressurgir le dossier du traitement des étrangers en France, avec la question des centres de rétention et des zones d'attente.
La réalité que dénonce vigoureusement M. Mermaz dans son rapport ne date malheureusement pas d'hier : des associations comme le GISTI et la CIMADE ou le collectif ANAFÉ ont maintes fois dénoncé les conditions bien éloignées de notre conception de la dignité humaine dans lesquelles trop souvent sont retenus les étrangers.
La réputation du dépôt de Paris n'est plus à faire ; la situation du centre de rétention d'Arenc, sur laquelle j'ai, à plusieurs reprises, dans cette enceinte, attiré l'attention de votre prédécesseur, ne s'est pas créée du jour où j'ai été amené en tant qu'élu local à en connaître la réalité.
Il a fallu quelques scandales et, surtout, une réflexion sur les conditions de détention en prison pour que l'on se préoccupe de la situation des étrangers retenus en France. Dès lors que l'on s'attaquait aux conditions d'enfermement, on ne pouvait faire l'impasse sur la situation dans les centres de rétention et dans les zones d'attente. Il serait parfaitement inconcevable que des personnes dont le seul délit est d'être en situation irrégulière soient moins bien traitées que si elles avaient été condamnées pour vol ou agression.
Oserai-je rappeler que l'ordonnance de 1945 fait état de « prestations de type hôtelier » concernant l'accueil des étrangers non encore admis sur le territoire français ? On en est évidemment bien loin dans certains cas, même si des efforts ont pu être notés, dans les locaux de la zone d'attente de Roissy, par exemple.
Peut-être le savez-vous, monsieur le ministre, la semaine dernière, les retenus d'Arenc, excédés par leurs conditions de rétention, ont mis le feu à leurs matelas. Depuis, une partie des chambres et des parties communes est devenue inutilisable.
J'ai attiré l'attention de vos services sur la nécessité de procéder rapidement aux travaux de réfection et au relogement des retenus, de façon à garantir la sécurité des personnes. En effet, la situation particulière du centre d'Arenc, perché sur un dock du port, est telle que toute évacuation est rendue difficile. Je n'ai reçu aucune réponse à ce jour.
Quant à celle qui m'a été fournie par le préfet de police, elle n'a pu que confirmer les lacunes du système de sécurité, qui ne comprend aucun dispositif de détection incendie ; quant à l'escalier de secours intérieur, il est actuellement en cours de réalisation ! Mais, m'a-t-on fait remarquer, « la proximité du bataillon des marins-pompiers, présent dans l'enceinte même du port autonome, garantit également une intervention rapide des secours ». Quel soulagement, monsieur le ministre !
Vous comprendrez que je ne puisse me contenter d'une telle réponse.
Des mesures d'urgence s'imposent, et l'annonce de la construction d'un nouveau centre de rétention à Marseille, parmi les six centres prévus d'ici à 2004, ne peut évidemment satisfaire les attentes.
En réponse, il y a un instant, à notre collègue M. Jean Guérini, vous nous avez annoncé 2 millions de francs de travaux pour la rénovation rapide du centre d'Arenc ; c'était vraiment nécessaire.
Sur le même chapitre, vous nous avez confirmé, lors de votre audition par la commission des lois, la rédaction en cours du décret relatif aux centres de rétention administrative, qui comporterait certains aspects positifs, telle la distinction des lieux de rétention des zones d'attente ou l'assistance médicale gratuite.
Cependant, je souhaiterais avoir une réponse claire concernant la présence de la CIMADE en rétention.
Vous nous avez parlé de « convention passée avec une association à caractère national de défense des étrangers à laquelle un local serait attribué dans chaque centre ».
Je souhaiterais que vous me confirmiez que cette mission sera bien confiée à une organisation indépendante, extérieure à l'administration. Ce ne peut être l'OMI, qui, quelles que soient la qualité et la neutralité de son travail, ne peut prétendre à cette mission. (M. le ministre opine.)
Les sénateurs communistes seraient heureux d'entendre vos explications sur tous ces points, monsieur le ministre.
M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur. Je ne peux laisser ces questions sans réponse, monsieur Bret. Sachez qu'un programme de rénovation systématique et de création de centres et de locaux de rétention à été engagé depuis 1998, pour un total de 160 millions de francs.
Comme je le disais à votre collègue M. Guérini, s'agissant d'Arenc, le ministère vient de choisir le terrain et de caler le programme immobilier qui devra être réalisé d'ici à 2004. Mais, avant cette date, 200 millions de francs de travaux de rénovation seront réalisés. Par ailleurs, le décret dont vous avez parlé est à la signature et doit sortir prochainement.
Je vous le confirme, la présence de la CIMADE est maintenue, comme cela lui a d'ailleurs été notifié. Il n'y a aucune ambiguïté sur ce point.
Nous allons continuer dans ce sens, méthodiquement, mais progressivement aussi, compte tenu des moyens. Je puis vous assurer, par exemple, qu'à Roissy tout a été fait pour que l'accueil soit décent. Cela permettra peut-être aux magistrats de venir y faire leur travail !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre V est réservé.
« Titre VI. - Autorisations de programme : 11 533 064 000 francs ;
« Crédits de paiement : 6 613 979 000 francs. »