SEANCE DU 30 JANVIER 2001


M. le président. La parole est à M. Murat, auteur de la question n° 976, adressée à Mme le ministre déléguée à la famille et à l'enfance.
M. Bernard Murat. Madame le secrétaire d'Etat, la croissance économique a généré des moyens considérables, qui ont fait naître dans toutes les familles l'espoir d'être davantage écoutées et soutenues.
Or la confiscation des excédents de la branche famille du régime général de sécurité sociale et le plan de réforme fiscale annoncé en août dernier ne permettront pas l'élaboration d'une politique familiale à la hauteur des besoins.
La famille contribue aujourd'hui plus qu'hier à l'équilibre et à l'harmonie sociale. Elle est un moteur de la croissance économique. En retour, elle attend des pouvoirs publics qu'ils conduisent une politique familiale ambitieuse, de nature à renforcer leur pouvoir d'achat et à faciliter la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle.
En ce qui concerne le pouvoir d'achat des familles, je souhaiterais connaître votre position sur trois propositions.
La première concerne le versement des allocations familiales dès le premier enfant. Généralement, un couple attend son premier enfant peu de temps après son mariage. On peut considérer qu'un couple qui vient d'entrer dans la vie active ne dispose pas de ressources importantes. Or l'arrivée du premier enfant suppose des achats substantiels, qui serviront peut-être aux futurs frères ou soeurs. C'est d'ailleurs pour toutes ces raisons que, dans ma ville, Brive-la-Gaillarde, nous mettons en place une aide pour les trois premiers enfants nés dans tous les foyers de la commune. Il me semble donc cohérent d'ouvrir la perception d'allocations familiales dès le premier enfant. Cela permettrait notamment d'alléger les charges pesant sur ces jeunes couples.
Les deux autres propositions portent, d'une part, sur la suppression de la condition de ressources relative au versement de l'allocation pour jeune enfant, et, d'autre part, sur la fixation à vingt-deux ans de l'âge limite de versement des prestations logement et du complément familial.
En ce qui concerne la conciliation entre vie professionnelle et vie familiale, il me semble nécessaire de renforcer la possibilité, pour chaque famille, de recourir au mode de garde de son choix. Or les mesures annoncées en faveur de la garde des enfants demeurent insuffisantes parce que uniquement tournées vers l'accueil collectif.
Là encore, je souhaiterais connaître votre position sur deux propositions.
La première vise à la suppression de la condition de ressources pour l'attribution de l'allocation de garde d'enfant à domicile l'AGED. En effet, en 1997, votre gouvernement, madame le secrétaire d'Etat, a mis cette allocation sous condition de ressources. Cette mesure constitue une régression pour les femmes qui travaillent et fait peser un risque certain sur le développement de la garde à domicile. Or ce mode de garde offre une grande souplesse horaire, une aide précieuse en cas de naissances multiples et constitue une solution lorsque les structures d'accueil collectif sont insuffisantes.
Face aux objections du Sénat, le Gouvernement avait, à l'époque, présenté la réduction de l'AGED comme une mesure provisoire. Trois ans plus tard, le dossier n'a guère progressé !
Quant à la seconde proposition, elle vise à étendre le temps partiel choisi jusqu'au sixième anniversaire de l'enfant. En effet, actuellement, cette possibilité est limitée au troisième anniversaire de l'enfant.
Madame la secrétaire d'Etat, les familles attendent un soutien tout particulier de l'Etat. Ces quelques propositions permettraient d'amorcer le renforcement de la politique familiale. Aussi, j'espère que vous pourrez y répondre favorablement.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat aux droits des femmes et à la formation professionnelle. Monsieur le sénateur, dans la mesure où vous avez posé votre question en dehors de tout esprit polémique, je n'aurai garde d'y céder et me dispenserai donc d'évoquer un certain nombre de décisions qui ont été prises en 1995 et en 1996.
Vous me permettrez de dire simplement que, à mes yeux, le gouvernement auquel j'appartiens poursuit une politique familiale réellement ambitieuse, dont je rappellerai quelques-uns des éléments essentiels.
Le Gouvernement a décidé de garantir le pouvoir d'achat des allocations familiales, puisque celles-ci sont désormais légalement indexées sur les prix, de porter, puis de maintenir le montant de l'allocation de rentrée scolaire à 1 600 francs et d'affecter aux familles les excédents de la branche famille, comme l'a montré la dernière conférence de la famille, avec une enveloppe totale de 10,5 milliards de francs de mesures nouvelles.
Outre l'importante réforme des allocations logement, dont vont bénéficier plus de 4 millions d'allocataires, pour un coût de 6,5 milliards de francs, la conférence de la famille qui s'est tenue au mois de juin a permis de lancer un plan sans précédent pour l'accueil de la petite enfance. Ce plan prévoit la modernisation des lieux d'accueil collectif mais aussi une forte croissance des aides accordées à la garde individuelle avec une revalorisation de l'aide versée pour l'emploi d'une assistante maternelle agréée.
Il me plaît d'ajouter, en tant que secrétaire d'Etat aux droits des femmes, que j'ai veillé personnellement à ce que les femmes éloignées du marché du travail puissent être soutenues lors de la reprise d'un emploi ou lors de l'entrée en formation. Je pense à l'aide à la recherche d'emploi versée par l'ANPE.
La politique familiale de ce gouvernement est donc bien ambitieuse.
S'agissant plus particulièrement de l'AGED, il est vrai que cette forme de soutien est dorénavant soumise à condition de ressources. Cette décision a donné lieu à un grand débat, mais c'est une approche sociale qui a été privilégiée afin d'augmenter d'une façon massive le nombre de bénéficiaires.
Ainsi, au-delà de l'aide renforcée à l'emploi des assistantes maternelles, mesure destinée aux familles qui font le choix de la garde individuelle, un fonds d'investissement de 1,5 milliard de francs destiné à créer 40 000 places de crèche supplémentaires va permettre de répondre à la demande massive des parents qui souhaitent privilégier l'accueil en structure collective.
L'importance de cette somme montre l'ambition du Gouvernement et son attachement à une juste politique familiale. La bonne articulation entre vie personnelle, vie familiale et vie professionnelle impose la mise en place de plans massifs et diversifiés d'accueil pour la petite enfance permettant de respecter les choix des familles.
M. Bernard Murat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Murat.
M. Bernard Murat. Au sein de la Haute Assemblée, chacun exprime son point de vue en son âme et conscience. Si être polémique, c'est faire des propositions au Gouvernement, oui, je suis polémique, comme tout parlementaire libre, du moins au Sénat.
Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat. Me permettez-vous de vous interrompre, monsieur le sénateur ?
M. Bernard Murat. Je vous en prie.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat, avec l'autorisation de l'orateur.
Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat. Monsieur le sénateur, j'ai dit que votre intervention, qui visait à obtenir des précisions de fond, n'était pas polémique et que je m'interdisais donc de polémiquer, raison pour laquelle je n'ai pas souhaité rappeler certaines mesures prises précédemment, dans les années 1995-1996, alors que j'avais prévu de le faire.
C'est donc tout le contraire !
M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur Murat.
M. Bernard Murat. Madame la secrétaire d'Etat, je vous présente toutes mes excuses. J'avais mal interprété vos propos et tout va donc pour le mieux dans le meilleur des mondes !
Cependant, lorsque le lien familial s'affaiblit, c'est l'exclusion et la délinquance qui progressent. En estimant que les propositions que j'ai évoquées sont inadaptées, vous refusez aux parents le renforcement des moyens d'éduquer leurs enfants.
Une telle situation est regrettable, car une politique de la famille ambitieuse, je l'ai rappelé hier devant l'assemblée générale des puéricultrices, constitue le meilleur investissement, tant pour l'avenir de notre pays et sa démographie, que pour remédier à la délinquance des mineurs, que votre gouvernement semble découvrir aujourd'hui, alors que les maires tirent les signaux d'alarme depuis bien longtemps.
Par ailleurs, au moment où tant de Français s'interrogent sur l'avenir de leur retraite, mise en péril par une démographie défavorable, il serait opportun de favoriser la natalité : elle constitue une réponse pour assurer la pérennité de notre système de retraite par répartition, système auquel je suis très attaché.

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