SEANCE DU 3 MAI 2001


SOMMAIRE

PRÉSIDENCE DE M. GUY ALLOUCHE

1. Procès-verbal (p. 0 ).

2. Prime pour l'emploi. - Rejet d'un projet de loi en nouvelle lecture (p. 1 ).
Discussion générale : MM. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie ; Philippe Marini, rapporteur de la commission des finances ; Michel Sergent, Guy Fischer.
Clôture de la discussion générale.

Question préalable (p. 2 )

Motion n° 1 de la commission. - MM. le rapporteur, Michel Sergent, le secrétaire d'Etat. - Adoption, par scrutin public, de la motion entraînant le rejet du projet de loi.

3. Règlement définitif du budget de 1999. - Adoption d'un projet de loi (p. 3 ).
Discussion générale : MM. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie ; Philippe Marini, rapporteur de la commission des finances ; Bernard Angels, Mme Danielle Bidard-Reydet.
Clôture de la discussion générale.
M. le secrétaire d'Etat.

Articles 1er, 2 à 9 (et tableaux A à G et I annexés)
et 10 à 12. - Adoption (p. 4 )

Article 13 (p. 5 )

Amendement n° 1 de la commission. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 14. - Adoption (p. 6 )

Adoption, par scrutin public, de l'ensemble du projet de loi.

Suspension et reprise de la séance (p. 7 )

4. Conférence des présidents (p. 8 ).

5. Organisme extraparlementaire (p. 9 ).

6. Candidatures à des organismes extraparlementaires (p. 10 ).

7. Candidatures à une commission mixte paritaire (p. 11 ).

8. Actualisation et adaptation du droit applicable outre-mer. - Adoption d'un projet de loi d'habilitation (p. 12 ).
Discussion générale : MM. Christian Paul, secrétaire d'Etat à l'outre-mer ; José Balarello, rapporteur de la commission des lois.
Clôture de la discussion générale.

Article additionnel avant l'article 1er (p. 13 )

Amendement n° 1 rectifié de M. Edmond Lauret. - MM. Edmond Lauret, le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Jacques Larché, président de la commission des lois ; Lucien Lanier. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 1er (p. 14 )

Amendement n° 2 du Gouvernement. - MM. le secrétaire d'Etat, le rapporteur, Henri de Richemont, Lucien Lanier. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 2 (p. 15 )

Amendement n° 3 du Gouvernement. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 3. - Adoption (p. 16 )

Vote sur l'ensemble (p. 17 )

MM. Serge Lagauche, Robert Bret.
Adoption du projet de loi.
M. le secrétaire d'Etat.

9. Nomination de membres d'une commission mixte paritaire (p. 18 ).

10. Nomination de membres d'organismes extraparlementaires (p. 19 ).

11. Groupements à caractère sectaire. - Adoption d'une proposition de loi en deuxième lecture (p. 20 ).
Discussion générale : Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux, ministre de la justice ; MM. Nicolas About, rapporteur de la commission des lois ; Serge Lagauche, Daniel Hoeffel, Michel Caldaguès, Mme Nicole Borvo.
M. le rapporteur.
Clôture de la discussion générale.

Article 1er (p. 21 )

Amendement n ° 1 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le garde des sceaux, M. Michel Caldaguès. - Adoption.
Amendement n° 16 de Mme Dinah Derycke. - MM. Serge Lagauche, le rapporteur, Mme le garde des sceaux. - Adoption.
Amendement n° 2 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le garde des sceaux, M. Michel Caldaguès. - Adoption.
Amendement n° 22 de la commission. - M. le rapporteur. - Adoption.
Amendement n° 3 rectifié de la commission. - M. le rapporteur, Mme le garde des sceaux, M. Michel Caldaguès. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article additionnel après l'article 1er ou après l'article 11 (p. 22 )

Amendements n°s 17 rectifié de M. Robert Badinter et 23 rectifié de la commission. - MM. Serge Lagauche, le rapporteur, Mme le garde des sceaux, M. Michel Caldaguès. - Retrait de l'amendement n° 17 rectifié ; adoption de l'amendement n° 23 rectifié insérant un article additionnel après l'article 11.

Article 2 (p. 23 )

Amendements n°s 24 à 26 de la commission. - Adoption des trois amendements.
Amendement n° 20 rectifié bis de M. Philippe Darniche. - MM. Bernard Seillier, le rapporteur, Mme le garde des sceaux. - Retrait.
Adoption de l'article modifié.

Articles 2 bis à 2 quaterdecies , 4 et 5. - Adoption (p. 24 )

Article 6 (p. 25 )

Amendements n°s 5 de la commission, 15 rectifié de Mme Nicole Borvo et 18 de M. Claude Domeizel. - M. le rapporteur, Mme Nicole Borvo, M. Serge Lagauche, Mme le garde des sceaux, MM. Michel Caldaguès, Philippe Marini, Jacques Larché, président de la commission des lois. - Retrait des amendements n°s 15 rectifié et 18 ; adoption de l'amendement n° 5 supprimant l'article.

Article 7 (p. 26 )

Amendements n°s 6 de la commission et 19 de Mme Dinah Derycke. - MM. le rapporteur, Serge Lagauche, Mme le garde des sceaux, M. Michel Caldaguès. - Retrait de l'amendement n° 19 ; adoption de l'amendement n° 6 supprimant l'article.

Article 8 (p. 27 )

Amendements n°s 7, 8 et 27 de la commission. - Adoption des trois amendements.
Adoption de l'article modifié.

Intitulé du chapitre V (p. 28 )

Amendement n° 9 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le garde des sceaux. - Adoption de l'amendement rédigeant l'intitulé.

Article 9 (p. 29 )

M. Francis Grignon.
Amendement n° 10 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le garde des sceaux, M. Michel Caldaguès. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.

Article 10 (p. 30 )

Amendement n° 11 de la commission. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.

Article 11 (p. 31 )

Amendement n° 12 rectifié de la commission. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.

Article 12 (p. 32 )

Amendement n° 13 de la commission. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.

Article 13 (p. 33 )

Amendements n°s 28 de la commission et 21 rectifié de M. Gaston Flosse. - MM. le rapporteur, Michel Caldaguès, Mme le garde des sceaux. - Retrait de l'amendement n° 21 rectifié ; adoption de l'amendement n° 28.
Adoption de l'article modifié.

Intitulé de la proposition de loi (p. 34 )

Amendement n° 14 rectifié de la commission. - M. le rapporteur, Mme le garde des sceaux, M. Michel Caldaguès. - Adoption de l'amendement rédigeant l'intitulé.

Vote sur l'ensemble (p. 35 )

MM. Christian Bonnet, le président de la commission, Daniel Hoeffel, Michel Caldaguès, le rapporteur.
Adoption de la proposition de loi.
Mme le garde des sceaux.

Suspension et reprise de la séance (p. 36 )

12. Statut des magistrats. - Adoption d'un projet de loi organique en deuxième lecture (p. 37 ).
Discussion générale : Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux, ministre de la justice ; MM. Pierre Fauchon, rapporteur de la commission des lois ; Robert Bret.
Mme le garde des sceaux, M. le rapporteur.
Clôture de la discussion générale.

Suspension et reprise de la séance (p. 38 )

PRÉSIDENCE DE M. GÉRARD LARCHER

Articles 2 bis et 2 ter. - Adoption (p. 39 )

Article additionnel après l'article 2 ter (p. 40 )

Amendement n° 1 rectifié de la commission et sous-amendement n° 10 du Gouvernement. - M. le rapporteur, Mme le garde des sceaux. - Adoption du sous-amendement et de l'amendement modifié insérant un article additionnel.

Article 2 quater (p. 41 )

Amendement n° 25 du Gouvernement. - Mme le garde des sceaux, M. le rapporteur. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 5 bis. - Adoption (p. 42 )

Article additionnel après l'article 5 bis (p. 43 )

Amendement n° 42 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le garde des sceaux. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 6. - Adoption (p. 44 )

Article 6 bis (p. 45 )

Amendement n° 11 du Gouvernement. - Mme le garde des sceaux, M. le rapporteur. - Adoption.
Amendement n° 12 du Gouvernement. - Mme le garde des sceaux, M. le rapporteur. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 6 ter (p. 46 )

Amendements n°s 36 de M. Josselin de Rohan, 37 de M. Henri de Richemont, 2 rectifié de la commission et sous-amendement n° 41 de M. Patrice Gélard. - MM. Henri de Richemont, le rapporteur, Mme le garde des sceaux, MM. Jacques Larché, président de la commission des lois ; Robert Badinter, Alain Vasselle. - Rejet des amendements n°s 36, 37 et du sous-amendement n° 41 ; adoption de l'amendement n° 2 rectifié.
Adoption de l'article modifié.

Articles additionnels après l'article 6 ter (p. 47 )

Amendements n°s 13 du Gouvernement et 39 de M. Hubert Haenel. - Mme le garde des sceaux, MM. le rapporteur, Henri de Richemont. - Retrait des deux amendements.
Amendement n° 14 du Gouvernement. - Mme le garde des sceaux. - Retrait.
Amendement n° 15 du Gouvernement. - Mme le garde des sceaux, MM. le rapporteur, le président de la commission. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article additionnel après l'article 8 (p. 48 )

Amendement n° 16 du Gouvernement. - Mme le garde des sceaux, M. le rapporteur ; - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Articles 9 bis et 9 ter. - Adoption (p. 49 )

Article additionnel après l'article 9 ter (p. 50 )

Amendement n° 3 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le garde des sceaux. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 10 A (p. 51 )

Amendement n° 17 du Gouvernement. - Mme le garde des sceaux, M. le rapporteur. - Adoption.
Amendement n° 18 du Gouvernement. - Mme le garde des sceaux, M. le rapporteur. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article additionnel après l'article 10 A (p. 52 )

Amendement n° 19 du Gouvernement. - Mme le garde des sceaux, M. le rapporteur. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Articles 10 à 11 bis. - Adoption (p. 53 )

Article additionnel après l'article 11 bis (p. 54 )

Amendement n° 20 du Gouvernement. - Mme le garde des sceaux, M. le rapporteur. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Articles additionnels après l'article 12 (p. 55 )

Amendement n° 21 du Gouvernement. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 22 du Gouvernement. - Mme le garde des sceaux, MM. le rapporteur, Robert Badinter. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 23 du Gouvernement. - Mme le garde des sceaux, M. le rapporteur. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 13 (supprimé)

Article 14 (p. 56 )

Amendement n° 38 de M. Josselin de Rohan. - MM. Henri de Richemont, le rapporteur, le président de la commission, Mmes le garde des sceaux, Nicole Borvo. - Rejet.
Adoption de l'article.

Article 15. - Adoption (p. 57 )

Article additionnel après l'article 15 (p. 58 )

Amendement n° 24 du Gouvernement. - Mme le garde des sceaux, M. le rapporteur. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Adoption, par scrutin public, de l'ensemble du projet de loi organique.

13. Transmission d'un projet de loi (p. 59 ).

14. Dépôt d'une proposition de loi (p. 60 ).

15. Transmission d'une proposition de loi (p. 61 ).

16. Dépôt d'un rapport d'information (p. 62 ).

17. Ordre du jour (p. 63 ).



COMPTE RENDU INTÉGRAL

présidence de m. guy allouche
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à dix-huit heures cinq.)

1

procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

2

PRIME POUR L'EMPLOI

Rejet d'un projet de loi en nouvelle lecture

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion en nouvelle lecture du projet de loi (n° 285, 2000-2001), adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, portant création d'une prime pour l'emploi. [Rapport n° 286 (2000-2001).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous prie de bien vouloir excuser l'absence de Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget, et suis très heureux d'être devant vous pour cette nouvelle lecture du projet de loi portant création d'une prime pour l'emploi.
Lors d'un débat très approfondi, voilà un mois, la Haute Assemblée a manifesté des convergences, dont je me félicite, avec le diagnostic qui fondait ce projet de loi : faire en sorte que le travail paie davantage quand il est faiblement rémunéré.
Sans être, et de loin, le seul instrument disponible, le mécanisme novateur de la prime pour l'emploi rejoint de façon cohérente l'ensemble des politiques mises en place par le Gouvernement depuis 1997 en faveur de l'emploi.
Sur le fond, vous avez admis l'essentiel du dispositif proposé : quatre amendements avaient été adoptés par le Sénat, trois d'entre eux avaient été déposés par la commission des finances, l'un d'eux traduisant le souci que personne parmi les 10 millions de bénéficiaires dès 2001 ne perde son droit à la prime pour l'emploi malgré les difficultés de mise en place qui ont été rencontrées.
Le Gouvernement est très satisfait que la nouvelle lecture à l'Assemblée nationale ait permis de trouver sur ce point une rédaction convenable juridiquement et efficace en pratique, une rédaction plus conforme sans doute à votre intention véritable.
Je précise à nouveau, sur ce sujet important, que l'objectif du Gouvernement n'est pas que les contribuables qui auraient, cette année, manqué l'occasion attendent l'expiration du délai légal de réclamation. Au contraire, au moment même où nous parlons et pendant plusieurs semaines, des courriers de relance partiront. Ils sont destinés à ceux qui ont déposé leur déclaration de revenus, mais qui n'ont pas rempli les cases correspondant à la prime pour l'emploi alors que leur niveau de revenu pourrait les placer dans le champ de la mesure. En répondant par retour du courrier, ils pourront faire valoir leurs droits sans formalisme et sans réclamation.
Dans cet esprit, le Gouvernement aurait souhaité que la commission mixte paritaire parvînt à un accord. Tel n'a pas été le cas, mais je prends note de la tonalité positive du rapport de M. Marini et des raisons pour lesquelles il vous propose d'adopter la motion tendant à apposer la question préalable.
Le Parlement sera à nouveau saisi de la prime pour l'emploi lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2002, puisqu'il prévoira la seconde tranche de ce dispositif dont le Premier ministre a récemment confirmé publiquement le doublement.
Nous souhaitons que la prime pour l'emploi devienne, pour nos concitoyens les moins récompensés pour leur travail, un instrument fort, novateur, utile, favorisant l'activité et le retour à l'activité.
C'est une condition indispensable pour que la société française continue d'aller mieux ; c'est, mesdames, messieurs les sénateurs, la priorité du Gouvernement. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, comme vous le savez, l'Assemblée nationale a examiné en nouvelle lecture, le 24 avril dernier, ce texte portant création d'une prime pour l'emploi.
Il convient de rappeler que nous avons eu sur ce sujet de longs débats, qui se sont situés entre, d'une part, l'été dernier, le moment où M. le ministre Laurent Fabius a annoncé son plan de baisse des impôts et des prélèvements obligatoires et, d'autre part, la décision du Conseil constitutionnel en fin d'année d'annuler la ristourne dégressive de contribution sociale généralisée votée par l'Assemblée nationale dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001.
Je dirai une nouvelle fois, mes chers collègues, que, si le Gouvernement avait, en temps utile, accepté d'écouter et même d'entendre la voix de la commission des affaires sociales et de la commission des finances du Sénat, il n'aurait pas dû improviser en début d'année un dispositif qui a été quelque peu laborieux à mettre en place.
En effet, ce dispositif que vous appelez « prime pour l'emploi » n'est autre, à quelques détails techniques près et négligeables à ce stade, que le « crédit d'impôt en faveur de l'activité » que le Sénat avait voté dans son principe lors des débats concernant la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, puis dans un dispositif lors des débats concernant la loi de finances pour 2001 et la seconde loi de finances rectificative pour 2000.
L'adoption du dispositif voté par le Sénat aurait évité de perdre du temps, de faire couler beaucoup de salive, de susciter bien des controverses juridiques. Mais, monsieur le secrétaire d'Etat, cette proposition avait le tort de venir d'une assemblée « ringarde », dont les avis ne sont pas suffisamment pris en considération et le travail pas assez reconnu.
Ce crédit d'impôt a également suscité, à certains moments, monsieur le secrétaire d'Etat - vous le reconnaîtrez sans doute - des controverses et des interprétations diverses au sein même de votre formation politique. Certains se posaient la question : est-il politiquement correct d'envisager un crédit d'impôt qui n'est qu'un avatar ou le début d'un raisonnement susceptible de conduire à cet affreux impôt négatif américain ? C'est ce que j'ai lu ou entendu de la part de certains de vos collègues, ou, plus exactement, de vos camarades.
M. Guy Fischer. Vous avez de mauvaises lectures !
M. Philippe Marini, rapporteur. Certes, j'ai le tort, mon cher collègue, d'écouter et d'être toujours intéressé par les controverses, lorsqu'elles traduisent de véritables interrogations, de véritables clivages politiques.
Bref, ce texte ne diffère que sur trois points des votes du Sénat.
Le premier point concerne le nom de la mesure qui, pour nous, est une question de principe. En effet, une mesure qui est décrite et qui fonctionne comme un crédit d'impôt doit, selon nous, recevoir une appellation conforme à sa nature.
J'avais eu l'occasion de dire en première lecture qu'il fallait se référer à la vieille maxime de Boileau : « J'appelle un chat un chat, et Rolet un fripon ». En l'occurrence, il s'agit d'un crédit d'impôt, et nous estimons, en ce qui nous concerne, que le nom de la mesure doit être « crédit d'impôt », puisque ceux qui sont redevables de l'impôt bénéficieront d'une ristourne et paieront un peu moins d'impôts ; quant à ceux qui ne paient pas d'impôts et qui représentent le coeur de la cible de cette mesure, ils se verront restituer l'impôt qu'ils n'auront pas à payer. Ce dispositif est bien dans la logique d'un crédit d'impôt.
Le deuxième point de désaccord est la question de savoir s'il faut réserver un sort particulier aux non-salariés qui sont tout à fait en bas de l'échelle des rémunérations, c'est-à-dire ceux qui gagnent moins de 20 575 francs par an pour un emploi à temps plein. Se fondant sur les situations souvent préoccupantes de petits agriculteurs ou d'agriculteurs conjoints de personnes ayant une autre activité, notre excellent collègue M. Philippe Nogrix avait soumis à la Haute Assemblée un amendement pour tenir compte de ces situations particulières. L'Assemblée nationale n'a pas cru devoir le retenir et, monsieur le secrétaire d'Etat, pour ne pas allonger les débats, la commission des finances estime qu'il suffit de constater de ce désaccord.
Certes, les situations dont il s'agit sont dignes d'intérêt, mais leur prise en compte n'est pas nécessairement simple sur le plan technique si l'on veut respecter le principe d'égalité auquel le Conseil constitutionnel accorde la vigilance très grande qu'il mérite.
Ainsi, nous bornant à rappeler notre vote de première lecture, nous avons estimé, au sein de la commission des finances, qu'il n'était pas indispensable de refaire la démonstration d'un vote majoritaire de la Haute Assemblée sur cette question. Néanmoins, nous estimons que ce problème devra être traité le moment venu !
Par ailleurs - et ce troisième point est en vérité essentiel -, nous avons fait valoir en première lecture que l'application de la mesure était complexe et qu'il fallait, en quelque sorte, accorder au contribuable un droit à repentir pour un temps suffisant, de telle sorte qu'il puisse faire état de tous les éléments de sa situation. Cela n'était pas correctement prévu, à notre sens, dans le texte initial du Gouvernement, d'où la mesure que la commission des finances, mes chers collègues, vous avait demandé de voter.
L'Assemblée nationale a encore amélioré l'approche technique de la question. Elle a affirmé par voie législative, comme nous le souhaitions, le droit à rectification, et cela conduit à un dispositif techniquement différent de celui que nous avons voté, mais qui, dans l'ensemble, nous paraît satisfaisant, car il a les mêmes objectifs.
Monsieur le secrétaire d'Etat, compte tenu de cette analyse que je viens de résumer brièvement et de l'échec de la commission mixte paritaire, la commission des finances du Sénat s'est interrogée sur la conduite à tenir en nouvelle lecture.
Nous pourrions, naturellement, sur le nom de la mesure et sur la question des travailleurs indépendants, plus particulièrement des agriculteurs les moins favorisés, reprendre nos positions de principe. Mais, à la vérité, il nous semble peu probable que l'Assemblée nationale, qui aura le dernier mot, change son analyse. Il n'est pas nécessairement indispensable, sur ce texte qui a fait l'objet d'effets d'annonce il y a longtemps déjà, de renouveler pour des raisons de principes les votes que nous avions émis en première lecture.
Toutefois, en notant que le rapport de mon homologue à l'Assemblée nationale était coloré d'une teinte assez élogieuse à l'égard des travaux du Sénat sur ce sujet, et pour éviter à celui-ci de se dédire, la commission des finances propose l'adoption d'une motion tendant à opposer la question préalable, question préalable que je qualifierai en l'occurrence de « positive » (Sourires)...
M. Guy Fischer. Ce serait un nouveau concept !
M. Philippe Marini, rapporteur. ... en laissant aux spécialistes du travail parlementaire la liberté de décrypter cette expression.
La formule me semble de nature à tenir compte et des positions que nous avons prises et de notre jugement, dans l'ensemble favorable, sur le principe du crédit d'impôt pour l'activité.
La commission des finances vous incitera, mes chers collègues, à adopter la motion par scrutin public, compte tenu de l'importance symbolique de ce vote.
Je voudrais insister, en terminant, sur un dernier point.
Le crédit d'impôt pour l'activité est important mais, de notre point de vue, il serait d'autant plus important, d'autant plus utile et d'autant plus efficace qu'il se placerait à l'intérieur d'un contexte, d'un ensemble cohérent de mesures législatives visant à inciter au retour à l'activité.
Le crédit d'impôt pour l'activité vise à placer les salariés les moins favorisés dans une situation qui devrait conduire, objectivement, à leur reconnaître la capacité de progresser. Cette mesure devrait donc être de nature à faciliter l'augmentation de leur pouvoir d'achat. De ce point de vue, elle est propice à la promotion sociale des salariés les moins favorisés. Mais, si l'on s'occupe de cette catégorie, et à juste titre, il ne faut pas oublier, monsieur le secrétaire d'Etat, celles et ceux qui sont complètement laissés sur le bord du chemin, c'est-à-dire celles et ceux qui n'ont pas d'emploi, qui figurent sous la rubrique de l'inactivité, qui contribuent à la persistance d'un niveau de chômage structurel exceptionnellement élevé dans notre pays par rapport à celui qui prévaut dans les pays comparables.
En effet, il convient de rappeler, mes chers collègues, que, dans cette période de relative prospérité économique, la France continue à présenter un niveau de chômage structurel qui, comme la plupart des experts le reconnaissent, est de l'ordre de 6 % à 7 % de la population active, soit beaucoup plus que ce que l'on constate dans des pays voisins comme les Pays-Bas et le Royaume-Uni, pour ne pas parler d'autres pays jouant un rôle majeur sur la scène économique internationale. Je pourrais d'ailleurs évoquer à cet égard la situation de certains pays scandinaves et d'une grande partie de l'Europe du Nord.
Faut-il se satisfaire, monsieur le secrétaire d'Etat, de cette situation dans laquelle une part très significative de la population active se trouve abritée sous le parapluie de mesures d'assistance ? Celles-ci sont certes indispensables pour lui permettre de vivre, mais elles ne doivent assurément pas tuer l'énergie et la volonté nécessaires au retour vers la vie de travail, qui seule permet à une personne humaine d'affirmer sa dignité et celle de sa famille.
Par conséquent, monsieur le secrétaire d'Etat, lorsque nous, membres de la majorité sénatoriale, nous prononçons favorablement sur le crédit d'impôt pour l'activité, nous le faisons bien entendu dans l'optique de cette analyse, c'est-à-dire que notre vote d'il y a quelques semaines sur le revenu minimum d'activité est une étape à nos yeux indispensable.
Il est indispensable en effet de trouver avec les entreprises le moyen de conduire sur le marché du travail, grâce à de vrais emplois et à de vrais contrats normalement rémunérés selon la législation de droit commun, une partie au moins des personnes qui bénéficient aujourd'hui du revenu minimum d'insertion ou d'autres prestations d'assistance, notamment celles qui sont versées par l'UNEDIC, car le partenariat avec ces entreprises est le seul capable de créer de vrais emplois dans le secteur marchand.
Je terminerai en disant que le vote du Sénat, favorable à la prime pour l'emploi, mais dans notre esprit au crédit d'impôt pour l'activité, ne s'entend que dans ce sens. Ce sont, à nos yeux, deux étages indissociables de la même démarche et de la même doctrine. Ce sujet, même s'il n'est peut-être pas aujourd'hui perçu médiatiquement comme il devrait l'être, est tout à fait crucial et structurant du débat public qui se prolongera jusqu'aux échéances, essentielles bien sûr, auxquelles nous accordons les uns et les autres toute notre attention et consacrons tous nos efforts.
C'est dire, mes chers collègues, l'importance du vote de la motion tendant à opposer la question préalable que la commission des finances vous soumettra, importance justifiant, je le répète, que la Haute Assemblée se prononce par scrutin public. (Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. Je tiens à préciser que sont actuellement réunies quatre commissions, au sein desquelles nombre de nos collègues sont par conséquent retenus.
La parole est à M. Sergent.
M. Michel Sergent. Monsieur le président, je vous remercie de cette précision, mais nous savons bien que, à défaut de quantité, il y a la qualité ! (Sourires.)
M. Gérard Braun. Merci !
M. Michel Sergent. Nous voici réunis afin d'examiner, pour la deuxième fois, le projet de loi portant création d'une prime pour l'emploi, mesure fiscale due, rappelons-le, à la censure, par le Conseil constitutionnel, d'une mesure de réduction de la contribution sociale généralisée, la CSG, et de la contribution pour le remboursement de la dette sociale, la CRDS, et ce après l'échec, que nous regrettons, de la commission mixte paritaire.
Je me bornerai à rappeler en quoi cette mesure fiscale, non seulement nouvelle, mais aussi novatrice, est importante.
Elle est importante parce qu'elle favorise la lutte contre les « trappes à inactivité », qui freinent la reprise d'une activité professionnelle par certains travailleurs sans emploi, en allégeant la charge fiscale pesant sur les titulaires de bas revenus, tout en encourageant leur emploi.
Elle est importante parce que, préservant la progression du pouvoir d'achat des foyers modestes, elle soutient la consommation des ménages et, par conséquent, la progression de l'emploi, qui elle-même conforte la croissance de l'économie française.
Elle est importante, non seulement parce qu'elle entraînera une réduction de l'impôt sur le revenu de certains foyers, mais aussi, ce qui est beaucoup plus original, parce qu'elle donnera lieu au versement d'un chèque, établi par l'administration fiscale, au profit des personnes non imposables ou des foyers dont la contribution à l'impôt sur le revenu sera inférieure au montant de la prime.
La prime pour l'emploi est importante parce que, visant les personnes percevant un revenu d'activité inférieur à 1,4 fois le SMIC, elle est conditionnée par les seuls revenus de l'activité professionnelle, puisqu'elle vise à accroître et à conforter cette activité professionnelle, tout en tenant compte de l'ensemble des revenus du foyer ainsi que des charges de famille de ses bénéficiaires.
C'est dans le même esprit que les contribuables à revenus d'activité modestes bénéficieront de la prime, même s'ils perçoivent ensuite des revenus complémentaires.
Je ne souhaite donc pas que l'on se remette à discuter du sexe des anges et que l'on se demande si cette prime pour l'emploi est un crédit d'impôt, un impôt négatif ou une prime pour l'emploi !
Ce qui compte, c'est que cette prime, qui sera versée aux travailleurs les plus modestes pour compléter leur revenu, concernera 10 millions de personnes et coûtera, à terme, 25 milliards de francs, c'est-à-dire le même montant que la mesure initialement prévue, tout en accroissant le nombre des bénéficiaires de cette mesure initiale et en majorant l'aide prévue pour les personnes à leur charge.
Ce qui compte, c'est que, sur 8 millions de foyers fiscaux concernés, 5 millions recevront plus de 1 000 francs dès 2001 et 600 000 plus de 2 000 francs.
Ce qui compte, c'est que 30 % des foyers concernés bénéficieront d'une réduction d'impôt et que 70 % des foyers bénéficiaires, non imposables, recevront un chèque en provenance des services fiscaux.
Ce qui compte encore, c'est qu'une moitié des sommes distribuées bénéficiera à des couples, et l'autre moitié à des personnes seules.
La prime pour l'emploi, monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, va donc encourager l'exercice ou la reprise d'une activité professionnelle par les travailleurs à bas revenus, qu'ils soient salariés, commerçants, artisans, agriculteurs ou travailleurs indépendants, sans favoriser le temps partiel et sans aider les employeurs à contenir les salaires.
Caractéristique du souci constant du Gouvernement d'allier la justice sociale à l'efficacité économique, la prime pour l'emploi est un dispositif de justice sociale visant à faire bénéficier d'allégements fiscaux des personnes insérées dans la vie professionnelle mais qui ne bénéficient pas, ou peu, de la baisse de l'impôt sur le revenu, tout en étant un dispositif de stimulation de la demande intérieure, facteur de croissance et de création d'emplois.
Pour toutes ces raisons, monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le groupe socialiste soutiendra une nouvelle fois ce projet de loi portant création d'une prime pour l'emploi, et ce tel qu'il a été adopté en nouvelle lecture par l'Assemblée nationale. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les termes du débat ont peu évolué depuis l'examen du présent texte en première lecture par notre assemblée, le 3 avril dernier, et à la suite du débat en nouvelle lecture à l'Assemblée nationale, si ce n'est que M. le rapporteur de la commission des finances va présenter une motion tendant à opposer la question préalable, qu'il a qualifiée de « positive ».
Je ne reprendrai donc par la totalité des arguments développés par mon ami Roland Muzeau à cette occasion.
Je souhaite d'emblée rappeler les responsabilités de la droite. Si elle n'avait pas suscité, par son recours devant le Conseil constitutionnel contre la loi de finances pour 2001, l'annulation de l'allégement de la CSG pour les revenus les plus modestes...
M. Philippe Marini, rapporteur. Parce qu'il ne faudrait pas que les parlementaires utilisent leurs droits ! Voyons, mon cher collègue !
M. Guy Fischer. Je n'ai pas dit cela ! Vous savez bien la différence d'interprétation qui nous sépare !
En tout cas, si la droite n'avait pas saisi le Conseil constitutionnel nous n'en serions pas là, et les plus modestes auraient reçu, bien que de manière insatisfaisante, certes, dès le 1er janvier de cette année, la somme dont le Gouvernement s'apprêtait à les faire bénéficier.
Pour en revenir à la mesure elle-même, qui peut s'opposer à l'octroi de sommes supplémentaires à nos concitoyens qui en ont le plus besoin ? Certainement pas les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen.
Cela étant dit, nous tenons à souligner les ambiguïtés de cette disposition, nous l'avons fait savoir dans différentes assemblées. Nous souhaitons voir avancer une réflexion bien plus globale, notamment sur l'absence de réforme fiscale d'ampleur générale visant à renforcer, par exemple, le principe de l'impôt progressif - je pense notamment aux revenus financiers, à propos desquels des progrès substantiels restent à faire.
Sur ce dernier point, je souhaite saisir l'occasion de ce débat, qui allie, au moins dans son intitulé, le social et le fiscal, pour souligner la contradiction entre la volonté affichée de lutter contre l'action de grands groupes multinationaux qui licencient à tour de bras depuis quelques semaines et l'absence de mesures fortes pour les contraindre fiscalement à cesser leurs agissements anti-sociaux.
Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen ont d'ailleurs déposé, lors de l'examen du projet de loi de modernisation sociale, une série d'amendements visant à sanctionner fiscalement et financièrement les entreprises bénéficiaires qui licencient. Mais le débat se développe dans le pays, et il n'est pas près de cesser !
De telles mesures seraient, à notre sens, un acte de résistance à cette offensive libérale. En fait, le crédit d'impôt que le Gouvernement nous propose sous l'appellation de « prime pour l'emploi » est reconnu par beaucoup comme une disposition d'accompagnement du libéralisme. Vous le savez, nous avons été critiques sur ce point : nous suivons l'expérience qui est menée dans certains pays anglo-saxons.
En effet, c'est bien la collectivité publique qui va prendre en charge l'augmentation du pouvoir d'achat des salariés les plus modestes, permettant ainsi aux entreprises de se dégager de leurs responsabilités.
C'est ce point, vous l'aurez compris, monsieur le secrétaire d'Etat, qui suscite notre première réserve essentielle à l'égard de ce projet.
La seconde réserve porte sur l'absence pour le moment, malgré les assurances de M. le Premier ministre, d'augmentation significative du pouvoir d'achat et du SMIC.
Comment la gauche plurielle pourra-t-elle faire face à son bilan si elle n'a pas pu renforcer la part du salaire dans la valeur ajoutée, alors que ce sont les revenus financiers qui progressent toujours.
Le projet de loi créant une prime pour l'emploi ne nous satisfait pas. Toutefois, nous ne nous y opposerons pas car les salariés les plus modestes en seront bénéficiaires. En tout cas, il faudra être souple dans l'appréciation des feuilles d'impôts, qui étaient peu compréhensibles sur ce point. Vous avez précisé à cet égard, monsieur le secrétaire d'Etat, que des lettres de relance avaient été envoyées.
Au demeurant, nous regrettons fortement que ce soit ce gouvernement qui érige en principe supérieur la baisse d'impôt alors que, dans notre pays, la croissance a, pensons-nous, besoin d'une dépense publique forte, tournée vers l'emploi et vers le service public.
M. le rapporteur de la commission des finances s'apprête à présenter une motion tendant à opposer la question préalable. Nous n'allons pas entrer dans ce jeu-là. Nous nous étions abstenus lors de la précédente lecture de ce texte, et nous maintiendrons cette position. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.

Question préalable



M. le président.
Je suis saisi d'une motion n° 1, présentée par M. Marini, au nom de la commission des finances, et tendant à opposer la question préalable.
Cette motion est ainsi rédigée :
« En application de l'article 44, alinéa 3, du règlement du Sénat, le Sénat :
« Considérant que, le projet de loi portant création d'une prime pour l'emploi présenté par le gouvernement s'analyse en réalité comme un ralliement de celui-ci au projet de crédit d'impôt en faveur de l'activité que le Sénat avait adopté par trois fois, lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, du projet de loi de finances pour 2001, et du second projet de loi de finances rectificative pour 2000 ;
« Considérant que, lors de l'examen en première lecture du présent projet de loi, le Sénat avait souhaité que soit précisé et préservé le droit de rectification des contribuables, compte tenu de la complexité du dispositif et des difficultés concrètes d'application de celui-ci ;
« Considérant qu'en nouvelle lecture l'Assemblée nationale a pris en compte la préoccupation exprimée par le Sénat, concernant le délai de réclamation ouvert aux contribuables, et a complété la rédaction de ce dispositif ;
« Considérant que le gouvernemnet a reconnu en séance publique qu'il s'agissait effectivement d'un crédit d'impôt, ainsi que le Sénat l'avait baptisé ;
« Déplorant toutefois que, en nouvelle lecture, l'Assemblée nationale n'ait pas suivi le Sénat dans sa volonté de donner à ladite mesure une dénomination plus conforme à la réalité, ni voulu prendre en compte la spécificité des personnes exerçant à temps plein une activité non salariée et disposant de revenus inférieurs à 0,3 SMIC ;
« Décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, portant création d'une prime pour l'emploi (n° 285, 2000-2001). »
Je rappelle que, en application du dernier alinéa de l'article 44 du règlement, ont seuls droit à la parole sur cette motion l'auteur de l'initiative ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d'opinion contraire, pour quinze minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.
La parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n'excédant pas cinq minutes, à un représentant de chaque groupe.
La parole est à M. le rapporteur, auteur de la motion.
M. Philippe Marini, rapporteur. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, j'ai déjà eu l'occasion, dans mon intervention liminaire, de présenter le texte de cette motion. Je vous ai dit, mes chers collègues, dans quel esprit positif elle avait été rédigée pour des raisons de principe.
Je crois inutile de prolonger nos débats par d'autres explications sur cette motion, que je vous invite naturellement à voter.
M. Michel Sergent. Je demande la parole contre la motion.
M. le président. La parole est à M. Sergent.
M. Michel Sergent. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, vous comprendrez que le groupe socialiste s'oppose à l'adoption de cette motion tendant à opposer la question préalable. Je voudrais simplement souligner les contorsions auxquelles M. le rapporteur a été obligé de se livrer pour justifier le dépôt de cette dernière.
M. Mariani a commencé son propos, tout à l'heure, en disant que le Sénat n'était pas écouté lorsqu'il proposait de bons textes, pour dire à la fin que, lorsque le texte du Gouvernement allait dans le bon sens, on ne pouvait toujours pas l'adopter, qu'il fallait lui opposer une question préalable « positive ». Je ne sais d'ailleurs pas ce qu'est une question préalable positive ou négative.
M. Nicolas About. Les communistes font bien de l'abstention positive !
M. Michel Sergent. Il y a des questions préalables adoptées ou repoussées, qu'elles soient positives ou pas.
Cela dit, je regrette cette position car, finalement, on retiendra que, sur un texte aussi important que la création de la prime pour l'emploi, le Sénat aura adopté une motion tendant à opposer la question préalable. En tout cas, le groupe socialiste votera contre.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. J'ai exposé tout à l'heure les raisons pour lesquelles il me paraissait nécessaire que soit voté le texte du Gouvernement.
Je tiens en cet instant à rassurer M. le rapporteur général sur la très haute considération en laquelle le Gouvernement tient la Haute Assemblée ; il le sait d'ailleurs. Mesdames, messieurs les sénateurs, c'est moi qui ai le privilège de représenter le Gouvernement auprès de vous ce matin, et vous savez en quelle très haute estime je tiens le travail du Sénat pour sa qualité et sa compétence. J'ai eu l'occasion de dire à cette tribune l'année dernière, à l'occasion de la discussion de la loi de finances initiale pour 2000, que le travail du Sénat constituait une sorte « d'espace vert » législatif par son caractère approfondi et sérieux. Je n'ai pas changé d'avis.
En l'occurrence, j'ai écouté avec beaucoup d'attention l'ensemble des intervenants, et je me range naturellement, au nom du Gouvernement, du côté de ceux qui souhaitent que cette motion soit repoussée.
M. Philippe Marini, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. Je remercie M. le secrétaire d'Etat pour ses propos extrêmement aimables à l'égard du Sénat.
En effet, mes chers collègues, nous pouvons tout à fait nous reconnaître dans la description qu'il a faite du Sénat comme seule assemblée vraiment écologique (Sourires) du Parlement. Cette description bucolique, mais réaliste, qu'il a faite de nos travaux et de la place que les réflexions bien menées de nos commissions peuvent y prendre ne peut qu'aller droit au coeur des sénateurs et de leurs collaborateurs.
Cela étant dit, mes chers collègues, déposer une motion tendant à opposer la question préalable signifie simplement - vous le savez - que l'on estime qu'il n'y a plus lieu de délibérer. Cela n'implique pas nécessairement un rejet du texte au fond.
En l'occurrence, nous avons tout dit : dès lors, pourquoi recommencer à le dire ? Ce n'est pas parce que l'on répète que l'on est nécessairement mieux entendu ou mieux écouté. Ce que nous avions à dire, nous l'avons dit, et, par cette question préalable, nous nous limitons à observer que les points particuliers qui ont fondé le désaccord en commission mixte paritaire, notamment sur le sort des travailleurs indépendants et des agriculteurs les moins favorisés, n'ont pas pu, à ce stade, trouver de solution technique satisfaisante dans le dialogue entre les deux assemblées.
Ayant exprimé les sentiments et les analyses qui étaient les nôtres, il n'y a pas lieu d'aller au-delà ; c'est dans cet esprit que la question préalable vous est soumise, mes chers collègues.
M. le président. Vous savez, comme moi, monsieur le rapporteur, que la question de l'écologie sera aujourd'hui à l'ordre du jour dans une assemblée orléanaise ! (Sourires.)
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix la motion n° 1, repoussée par le Gouvernement.
Je rappelle que son adoption entraînerait le rejet du projet de loi.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission des finances.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 49:

Nombre de votants 318
Nombre de suffrages exprimés 301
Majorité absolue des suffrages 151
Pour l'adoption 219
Contre
82 En conséquence, le projet de loi est rejeté.

3

RÈGLEMENT DÉFINITIF DU BUDGET DE 1999

Adoption d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 22, 2000-2001), adopté par l'Assemblée nationale, portant règlement définitif du budget de 1999.
[Rapport n° 176, 2000-2001.]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous prie de bien vouloir excuser à nouveau l'absence de Mme la secrétaire d'Etat au budget. J'ai donc le plaisir de vous présenter maintenant le projet de loi portant règlement définitif du budget de 1999.
Je me plais à souligner que, grâce aux progrès accomplis dans la gestion budgétaire par le Gouvernement, ce projet de loi a été déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale au début du mois de juillet. Nous avons ainsi gagné trois mois par rapport au calendrier tenu l'an passé et six mois par rapport à la situation antérieure.
Je crois que le Gouvernement répond ainsi à votre préoccupation d'être saisis le plus vite possible des lois de règlement. Cette accélération du calendrier permet, en effet - en théorie au moins, car l'ordre du jour très chargé des travaux parlementaires ne l'a malheureusement pas permis cette année - d'enrichir le débat budgétaire sur les prévisions pour l'année à venir.
Je soulignerai en quelques mots les lignes de force de l'exécution du budget de 1999, qui confirme les grandes orientations fixées en loi de finances initiale.
Tout d'abord, l'objectif de stabilisation de la dépense qui est, à mes yeux, essentiel, est respecté. En effet, avec un taux d'inflation de 0,5 %, la progression des dépenses en volume a été abaissée à 1,1 %, selon la norme mesurée hors dépenses exceptionnelles et hors modification du périmètre de la loi de finances pour 1999.
Premier point fort, l'objectif d'excellente gestion des finances publiques, et de stabilisation de la dépense est donc atteint.
Deuxième point fort, grâce à la croissance économique, les recettes fiscales nettes s'élèvent à 1 565,6 milliards de francs, soit un surplus de 30,7 milliards de francs par rapport à la loi de finances initiale. Ce surplus est explicable, en particulier, par l'évolution de l'impôt sur les sociétés - plus 30 milliards de francs - du fait des bons résultats des entreprises bénéficiant, en 1998, de la première année de croissance forte qui force l'admiration en Europe.
Troisième point fort, le déficit budgétaire connaît en 1999 une diminution sans précédent. A 206 milliards de francs, il diminue de 41,5 milliards de francs par rapport à 1998, année qui a enregistré un déficit de 247,5 milliards de francs.
Quatrième point fort lié au précédent, la baisse du déficit permet d'inverser la spirale de la dette dès 1999. Pour la première fois depuis vingt ans, mesdames, messieurs les sénateurs, la dette est ainsi ramenée en dessous du seuil de 60 % du produit intérieur brut, seuil qui est pris en considération dans les différents critères dits « de Maastricht » de la bonne gestion financière.
Je veux également souligner que, parallèlement au dépôt du projet de loi de règlement et conformément à la circulaire du 21 février 2000 de M. le Premier ministre, des comptes rendus de gestion financière préparés par les ministères ont été diffusés pour la première fois.
Cette initiative vise à enrichir les données strictement comptables de la loi de règlement. Ces documents permettront en effet d'améliorer sensiblement votre information en portant à votre connaissance de nouveaux éléments pour appréhender les résultats des politiques publiques.
Le résultat de la politique publique est au coeur même du contrôle parlementaire. Aussi les parlementaires doivent-ils bénéficier d'un véritable tableau de bord décrivant ce que la dépense publique a réussi à construire et à réaliser dans la réalité.
Sur la base de la présentation de la loi de finances initiale en agrégats, les comptes rendus de gestion budgétaire doivent dégager une analyse fine des objectifs et des coûts. Ainsi - je viens de le souligner, mais je crois nécessaire de le redire - l'élément de mesure des résultats obtenus en termes d'efficacité socio-économique, d'efficience des administrations, de qualité de services rendus et donc, en fin de compte, de justification de la dépense publique sera-t-il porté à votre connaissance.
Le projet de loi de règlement pour 1999 contient également des mesures traditionnelles de gestion des autorisations budgétaires, ainsi que des mesures de remise de dette aux pays les moins développés : 2,3 milliards de francs au titre des échéances de 1999, conformément d'ailleurs à une résolution de la CNUCED, la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement, et aux engagements internationaux pris par la France lors des différents sommets auxquels notre pays a participé.
Tels sont, monsieur le président, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les sénateurs, les éléments sur lesquels je tenais à mettre l'accent et que j'ai l'honneur de soumettre maintenant à votre approbation. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la loi de règlement, comme vous le savez, est la dernière étape du parcours budgétaire, celle de la reddition des comptes par l'exécutif au législatif. Il s'agit donc d'un exercice important qui suscite traditionnellement l'intérêt d'un grand nombre d'entre nous, ce que je me réjouis de constater.
Cela dit, mes chers collègues, il faut avoir conscience que si voter un budget est une chose, si contrôler son exécution en cours d'année en est une autre, le fait de prendre connaissance de la réalité comptable à la clôture de cet exercice représente la clé de voûte du raisonnement.
Faute de loi de règlement présentée dans les formes, après toutes les études et analyses nécessaires, le processus d'élaboration des lois de finances et leur suivi n'est qu'un processus fictif ne reposant sur aucune réalité, se déroulant dans un théâtre d'ombres où l'on se berce de discours sans prêter attention aux choses concrètes.
Mes chers collègues, cette entrée en matière, pour être rituelle de la part du rapporteur général de la commission des finances, n'en est pas moins le témoignage des convictions très fortes que nous partageons au sein de cette commission.
Le quitus comptable auquel je vais vous inviter au terme de cet exposé ne vaut évidemment pas acceptation de la politique conduite et des pratiques budgétaires du pouvoir exécutif. Le quitus comptable consiste à constater la régularité des opérations et la prise en compte des analyses et observations de la Cour des comptes qui, traditionnellement et juridiquement, jouent un rôle essentiel en amont des travaux parlementaires consacrés aux lois de règlement.
Du point de vue de la commission des finances du Sénat, il est tout à fait clair que l'année 1999 a été gérée de manière extrêmement contestable. Souvenez-vous du rapport de notre commission d'enquête dont le titre - significatif - était : « En finir avec le mensonge budgétaire » et le sous-titre - peut-être encore plus significatif, monsieur le secrétaire d'Etat - « Enquête sur la transparence toute relative des comptes de l'Etat »...
La loi de règlement telle qu'elle nous est présentée fait apparaître la réalité de cet exercice budgétaire 1999.
Il convient d'espérer, mes chers collègues, que la réforme actuellement entreprise de l'ordonnance organique de 1959 sur les lois de finances que nous allons examiner prochainement en commission, puis en séance publique, permettra réellement de faire face aux besoins de transparence fondamentaux dans le monde d'aujourd'hui.
Au-delà de la procédure, au-delà des détails techniques qui n'intéressent que les administrations, des actions importantes sont à lancer dans le respect des règles fondatrices de la Ve République pour rendre les documents budgétaires plus compréhensibles, pour donner une base plus crédible au débat démocratique et pour permettre que le contrôle parlementaire ne soit pas - ou ne soit plus - que de pure forme.
Mais je reviens à l'année 1999. La loi de règlement constate la réalisation du budget dans un certain contexte macro-économique, en l'occurrence celui d'une croissance soutenue. Cependant, cette croissance n'a pas reposé sur les enchaînements qui avaient été imaginés ex ante par le Gouvernement : le poids respectif des ressorts de la croissance s'est révélé différent de ce que l'on avait présumé.
Ainsi, en particulier, les investissements des entreprises ont été très dynamiques, plus que le Gouvernement ne l'avait anticipé au début de l'année 1999, c'est-à-dire dans cette période caractérisée par ce que Dominique Strauss-Kahn avait appelé le « trou d'air », où il semblait que des perturbations dans le rythme de croissance pouvaient être constatées. En définitive, l'impact de ces perturbations sur le fonctionnement des entreprises et sur le rythme de leurs investissements s'est révélé réduit.
A l'inverse, la consommation des ménages a augmenté plus lentement que prévu : sa progression n'a été que de 2,1 % en volume en 1999, contre 3,3 % en 1998. Cela s'explique par un ralentissement des gains de pouvoir d'achat au cours de l'année 1999, phénomène essentiel, monsieur le secrétaire d'Etat, que, sans doute pour des raisons de débats internes à votre majorité plurielle, vous avez souhaité minimiser dans vos présentations.
En résumé, pendant cette année 1999, l'investissement des entreprises a progressé plus et la consommation des ménages moins que ce qui avait été prévu. Il reste que, globalement, la croissance en 1999 a été à peu près « en ligne » avec ce qui était imaginé avant l'épisode du « trou d'air » ; ce sont les composantes de la croissance qui ont subi des variations par rapport aux pronostics initiaux.
Voilà pour le contexte.
Très rapidement, monsieur le secrétaire d'Etat, je formulerai quelques considérations sur les recettes, puis sur les dépenses et enfin sur le solde.
Les recettes, chacun s'en souvient, ont progressé de manière très dynamique puisque leur augmentation d'une année sur l'autre en volume a été de 6,4 %, taux à comparer à celui de la croissance du PIB en volume : 2,9 %. C'est ce qui permettait à Dominique Strauss-Kahn d'expliquer que les impôts baissaient mais que les prélèvements obligatoires augmentaient ; c'était le théorème, ou le paradoxe, alors invoqué...
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Oui, grâce à la croissance !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Oui mais, je l'ai rappelé, la croissance a été de 2,9 % quand les recettes du budget général ont progressé de 6,4 % ! Il y a donc certainement des étapes du raisonnement permettant d'expliquer cet effet multiplicateur qui conduit à payer toujours plus pour faire fonctionner la lourde machine publique...
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. C'est une question d'élasticité, tout simplement !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Au demeurant, les recettes du budget général se répartissent, nous le savons, en deux grandes rubriques : les recettes fiscales nettes, qui ont augmenté de 7,8 % en 1999, et les recettes non fiscales, qui ont augmenté, elles, de 6,8 %. La conciliation des chiffres s'opère notamment par la prise en considération des prélèvements sur ressources.
Qu'on me permette de souligner la très vive progression des recettes fiscales en 1999. La Cour des comptes évoque en particulier une « augmentation exceptionnellement rapide de l'impôt sur le revenu » : de 9,8 %.
Elle aurait pu qualifier de la même façon la progression de l'impôt sur les sociétés puisque celle-ci a été de 24,4 % ! S'agissant de ce dernier impôt, on constate une majoration de plus de 15 points par rapport aux prévisions de la loi de finances !
En ce qui concerne la TVA nette, la progression a été plus proche du rythme de croissance puisqu'elle a été de 4,5 %. La Cour des comptes estime cependant que le montant des recettes de TVA inscrit dans le budget de l'Etat pour 1999 est inférieur au montant réellement encaissé au cours de cet exercice.
A la lecture des observations de la Cour des comptes, je suis fondé à relever - et c'est ce que la commission d'enquête du Sénat avait fait en son temps - que les opérations ont été comptabilisées d'une manière rien moins que transparente, et que les imputations comptables relèvent d'une politique extrêmement arbitraire, ne faisant pas la place indispensable à la permanence des méthodes, qui seule crédibiliserait la reddition des comptes de l'Etat.
En ce qui concerne les recettes non fiscales, cette observation est, bien entendu, à reprendre et même à amplifier. En effet, mes chers collègues, ces recettes non fiscales représentent en exécution 168,4 milliards de francs, soit un recul de près de 15 milliards de francs par rapport à ce qui était prévu en loi de finances initiale.
A l'évidence, monsieur le secrétaire d'Etat, cela reflète une manipulation, un pilotage politique : la définition des recettes non fiscales obéit manifestement, comme l'a indiqué la direction du budget à la commission d'enquête, à des « spécificités fortes » ... On ne pourrait mieux dire que les recettes non fiscales sont une variable d'ajustement dont le Gouvernement se réserve le pilotage : on en met un peu plus, on en met un peu moins, on verse une louche supplémentaire ou on la garde pour l'exercice suivant, en fonction des chiffres que l'on souhaite présenter.
Cela, monsieur le secrétaire d'Etat, pardonnez-moi de le redire, n'est pas très sérieux, et il faudra bien, d'une manière ou d'une autre, mettre fin à ce genre de fantaisies, car elles ne trompent personne, du moins chez nous ou chez les analystes qui, à Bruxelles et ailleurs, passent au crible nos comptes publics. Ce sont des façons de faire qui relèvent plus des astuces procédurières et subalternes que d'une présentation et d'une gestion responsables des comptes publics. La représentation nationale, lorsqu'elle examine la loi de règlement, pour laquelle elle manifeste un grand intérêt, se doit de relever cet aspect des choses avec beaucoup de force. On ne peut pas crédibiliser la gestion de l'Etat avec des systèmes à géométrie variable en fonction de l'opportunité du moment.
Au total, le niveau des prélèvements obligatoires s'est élevé à 45,7 % du produit intérieur brut en 1999, en progression de 0,8 point par rapport à 1998. La pression fiscale a donc augmenté. Cependant, bien entendu, cette triste exception fiscale française a donné lieu à des engagements verbaux de la part du Gouvernement, qui annonce toujours des baisses pour le lendemain. Mais nous aurons l'occasion de vivre un épisode supplémentaire de cette histoire lors du débat d'orientation budgétaire.
Quant à la dépense budgétaire, elle n'a pas été véritablement maîtrisée en 1999. Et nous ne sommes pas les seuls à le dire ! Nous, nous sommes des « ringards », nous sommes une « anomalie de la démocratie » ! Bref, même si, à vous croire, monsieur le secrétaire d'Etat, le Sénat est la seule assemblée vraiment écologique, nous ne sommes pas crédibles ! (Sourires.) La Cour des comptes, elle, est nécessairement crédible. Or elle valide nos analyses. Elle rappelle que l'objectif de progression des dépenses fixé initialement par le Gouvernement était, pour l'année 1999, de 1 % en volume mais que la progression finalement enregistrée a été de 2,7 % en volume. La différence représente quand même beaucoup d'argent !
Et le verdict est implacable. Car il apparaît, à partir des travaux de la Cour des comptes, que le Gouvernement a pris des libertés avec le principe de la permanence des méthodes budgétaires afin, tout simplement, d'afficher le respect des engagements initiaux. Il est évident que, si l'on bloque le thermomètre sur la température à afficher, le malade se porte toujours bien !
En vérité, nous devons considérer les libertés qui ont été prises avec le principe de permanence des méthodes budgétaires comme foncièrement coupables.
En effet, monsieur le secrétaire d'Etat, le Gouvernement a exclu de son calcul près de 50 milliards de francs de dépenses, dont 13 milliards de francs de dépenses prétendument exceptionnelles, notamment les 10 milliards de francs versés à l'UNEDIC.
L'exercice ne peut qu'aboutir à un CQFD imparable ! Vous êtes toujours en mesure de dire : « les dépenses ne progressent pas ; nous avons tenu nos objectifs » puisque vous maîtrisez la notion de dépenses exceptionnelles. C'est tout simple ! Ce qui, à vos yeux, est exceptionnel, vous l'extrayez de votre calcul. Cela vous permet de montrer toujours que vos résultats sont conformes à ce que vous aviez annoncé ! Cela relève plus d'une astuce de garçon de bain que de pratiques sérieuses. Cela ne trompe aucun analyste. Il s'agit plus d'une gesticulation politique que de la reddition de comptes au sens propre du terme.
Enfin, il convient d'observer que la dépense budgétaire est de plus en plus rigide. Elle s'est rigidifiée au cours de l'année 1999, au détriment des dépenses d'investissement, dont la part relative se contracte sans cesse.
Procéder, dans une période de croissance, à une évaporation ou à une dilution sans cesse plus grande des dépenses d'investissement au sein d'une masse budgétaire qui représente des contraintes de plus en plus rigides pour demain et après-demain, c'est proprement inadmissible, monsieur le secrétaire d'Etat.
Il faut ajouter que l'augmentation des dépenses, qui s'est donc établie à 2,7 % en volume, a été réalisée malgré un allégement significatif de la charge brute de la dette. Monsieur le secrétaire d'Etat, lorsque, tout à l'heure, vous avez évoqué la dette publique, vous avez omis de préciser que vous entendiez par là la dette de l'ensemble du secteur public,...
M. Yves Fréville. C'est exact !
M. Philippe Marini, rapporteur général. ... c'est-à-dire l'Etat, les organismes de sécurité sociale et les collectivités territoriales. Sans doute la direction du Trésor et la direction du budget sont-elles réticentes pour vous donner des éléments et ont-elles bien des difficultés pour les calculer. Cependant, si vous nous aviez donné des éléments sur l'endettement en capital de l'Etat, vous auriez dû nous dire que, au cours de l'année 1999, il a progressé, et non pas diminué. En effet, vous savez fort bien que nous vivons dans un théâtre d'ombres étonnant, où les parlementaires, en matière de dette, ne votent en vérité, dans le budget, que les intérêts de la dette.
Personne ne fait cela, ni un ménage qui doit s'adresser à la banque pour financer je ne sais quel équipement ou investissement, ni la commune, le département ou la région. Tout agent économique normal prend ses décisions en matière d'emprunt non seulement en prenant en compte le niveau des intérêts, mais aussi, et surtout, en évaluant le niveau de dette en capital qui lui semble cohérent avec le flux à venir de ses ressources, afin que cette dette soit soutenable sur la durée.
A la vérité, l'Etat ne fait pas cela. Il faut le répéter, mes chers collègues, car c'est une particularité qui remonte aux origines de notre comptabilité publique, voilà deux cents ans, et qui est venue jusqu'à nous avec beaucoup de continuité. L'Etat fait voter dans la loi de finances uniquement la charge d'intérêts, c'est-à-dire la rubrique des frais de fonctionnement issus de la dette, sans tenir compte des conditions de remboursement du capital de ses emprunts.
Il est vrai qu'en 1999, je vous en donne acte, monsieur le secrétaire d'Etat, la charge de la dette, c'est-à-dire les intérêts, a diminué de 2,7 %, ce qui, la Cour des comptes l'a relevé, est sans précédent depuis plus de quinze ans. Cependant, vous le savez, cette baisse, c'est une économie de constatation, car elle reflète plus l'évolution des marchés financiers qu'une volonté politique quelconque. Le Gouvernement a bénéficié de cette économie de constatation et nous disons, nous, qu'il n'en a même pas fait bon usage, puisque, on l'a vu, la dépense publique n'a pas été globalement suivie et contrôlée comme elle aurait dû et pu l'être.
En vérité, lorsqu'on regarde la dépense publique, il faut s'attacher à ce qui est le plus important en volume et pour l'avenir, c'est-à-dire aux dépenses de personnels. Celles-ci représentent 84 % des crédits du titre III, c'est-à-dire de l'ensemble des moyens de fonctionnement de l'Etat.
Qu'observe-t-on au cours de l'année 1999 ?
Les rémunérations d'activité supportées par le budget de l'Etat se sont élevées à quelque 391 milliards de francs, soit une augmentation de 2,1 %. Les pensions ont représenté quelque 184 milliards de francs, soit un accroissement de 3,4 %. Les charges sociales se sont établies à quelque 82 milliards de francs, soit une augmentation de 3,7 %.
Comme l'année précédente - 1998 -, le coût des pensions et des charges sociales a donc évolué plus rapidement que celui des rémunérations d'activité. Cela suscite, à bon droit, de vives inquiétudes pour l'avenir.
Ces inquiétudes sont d'autant plus vives que les dernières mesures de revalorisation des traitements dans la fonction publique décidées par le Premier ministre, à savoir 1,2 % en 2001 et 1,1 % en 2002, bien qu'elles soient considérées comme totalement insuffisantes par tous les lobbies professionnels que l'on appelle « syndicats de fonctionnaires », vont alourdir la barque de près de 20 milliards de francs supplémentaires, alors que le Gouvernement n'a provisionné, d'après ce que nous croyons comprendre, que 3 milliards de francs pour 2001. Il devra donc trouver, au titre de la loi de finances pour 2001, environ 17 milliards de francs. J'attends avec grand intérêt les explications de M. Fabius qui, même si ses craintes n'ont probablement pas toujours été examinées et partagées comme, de son point de vue, il l'aurait fallu au niveau interministériel, va devoir, par redéploiements, dégager les ressources nécessaires afin de faire face aux promesses qui ont été faites et qui, de surcroît, ne satisfont pas les intéressés.
M. le président. Monsieur le rapporteur général, veuillez vous rapprocher de votre conclusion, je vous prie.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur le président, je me rapproche de ma conclusion en évoquant les dépenses en capital, qui demeurent le parent pauvre de l'exercice. En effet, l'augmentation des dépenses en capital, c'est-à-dire des investissements qui réellement préparent l'avenir, n'a été que de 1,3 %. Leur part au sein de la dépense de l'Etat continue à diminuer : elles représentaient plus de 9 % en 1997 et s'établissent à 8,2 % en 1999.
Au total et en conclusion, le déficit budgétaire à l'issue de l'année 1999 s'est établi à 200 milliards de francs. Il a représenté 2,3 % du produit intérieur brut. En 1999, l'Etat est demeuré, au sein de la sphère publique, la seule collectivité qui soit encore déficitaire.
Ainsi que le souligne fort justement la Cour des comptes s'agissant du déficit des administrations publiques, « une comparaison avec les autres Etats de l'Union européenne conduit à relativiser ces résultats. Au sein de l'Union européenne, la position de la France n'est pas parmi les meilleures : avec 1,8 %, le déficit public français, tout en ayant diminué sensiblement, reste, en 1999, l'un des plus élevés des Etats membres de l'Union européenne dont le déficit moyen s'établit à 1,2 % du produit intérieur brut pour la zone euro et à 0,7 % du produit intérieur brut pour les Quinze. »
L'effort de réduction des déficits publics, et en premier lieu celui de l'Etat, doit incontestablement être amplifié.
La réduction des déficits est une question élémentaire de bonne gestion budgétaire, de compétitivité par rapport à nos principaux partenaires, mais aussi et surtout, mes chers collègues, de solidarité intragénérationnelle avec ceux qui nous suivront, nos enfants et nos petits-enfants.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je voudrais insister sur ce point en terminant. Si le Sénat éprouve beaucoup d'intérêt pour la réforme de l'ordonnance de 1959 et pour tout ce qui concerne les conditions de prise de la décision politique sur l'endettement en capital, c'est parce qu'il y a là, nous semble-t-il, un aspect essentiel du débat public : que voulons-nous et que pouvons-nous faire supporter à celles et ceux qui nous suivront ?
Notre problème, ce n'est pas de gérer sans vague la période qui nous sépare de telle ou telle élection générale, c'est de faire en sorte que, grâce à des décisions fondamentales que l'on est en mesure de prendre sur le fonctionnement des institutions et la méthodologie des comptes publics, le pays bénéficie d'une meilleure préparation de ses décisions financières ainsi que de documents transparents, clairs et lisibles, permettant de traiter les questions qui se posent réellement.
Face à l'état de fait qui nous est présenté par ce texte, traduction comptable d'une gestion que nous avons largement et énergiquement dénoncée, il vous est proposé, mes chers collègues, de vous borner à prendre acte du document que nous transmet le Gouvernement, à en prendre acte sur la forme, puisque telle est la procédure à suivre, mais bien entendu en ne partageant en aucune manière la responsabilité de la gestion telle qu'elle a été conçue et menée au cours de l'exercice 1999.
Ainsi, mes chers collègues, sous réserve de l'adoption d'un amendement portant sur quarante centimes et qui vise à corriger une erreur matérielle, la commission des finances vous propose d'adopter le présent projet de loi en tant que quitus comptable donné au Gouvernement pour sa gestion. Nous remercions tout particulièrement les magistrats de la Cour des comptes et la première chambre de celle-ci pour leur travail tout à fait remarquable, qui nous a permis de bien éclairer nos délibérations et de vous présenter ce rapport. (Applaudissements sur les travées du RPR, et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Tout rapporteur dispose d'un temps de parole de vingt minutes, mais, si on vous laissait faire, monsieur Marini, vous parleriez indéfiniment. Vos propos sont très intéressants, mais, vous le savez, nous avons des contraintes horaires.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il s'agit de beaucoup d'argent, monsieur le président !
M. le président. La parole est à M. Angels.
M. Bernard Angels. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, comme j'ai souvent regretté le délai excessif qui s'écoule entre l'exécution d'un budget et l'examen du projet de loi portant règlement définitif dudit budget, vous comprendrez aisément que je commence mon intervention en félicitant le Gouvernement de l'effort qu'il a produit en matière de remise des documents nécessaires à la discussion du présent projet de loi, portant règlement définitif du budget 1999.
Le calendrier parlementaire étant ce qu'il est, le Sénat a, cette année encore, examiné le projet de loi de finances pour 2001 avant le projet de loi de règlement pour 1999, mais je ne doute pas, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous poursuivrez les efforts entrepris pour permettre aux parlementaires de disposer rapidement de toutes les données permettant d'éclairer le débat budgétaire.
Je souhaiterais également exprimer ma satisfaction devant l'effort de présentation effectué par le Gouvernement pour ce qui est des comptes rendus de la gestion budgétaire des ministères.
Ces nouvelles informations constituent une amélioration notable, qui devrait permettre au Parlement de dépasser une approche par trop comptable de la dépense, pour s'attacher aux réalisations et aux résultats des politiques publiques. Cependant, ces informations étant encore, hélas ! incomplètes et d'une qualité inégale, il apparaît, à la lecture de ces comptes rendus, que les ministères vont devoir affiner les outils dont ils disposent pour mesurer les résultats obtenus et pour évaluer l'effet des dépenses effectuées.
Par ailleurs, je remarque que des innovations ont été introduites dans le rapport de présentation du compte général de l'administration des finances, puisqu'il présente désormais la dette « en droits constatés ». Les principales créances fiscales sont ainsi provisionnées ; il est indéniable que cela apporte des éclaircissements sur le patrimoine de l'Etat, ainsi que des informations sur les engagements hors bilan.
Au-delà de ces aspects formels dont l'importance n'aura cependant échappé à aucun de mes collègues, puisqu'ils touchent à la sincérité et à la transparence de l'information budgétaire, je souhaiterais maintenant m'attarder sur la signification réelle de ce projet de loi de règlement, dans la mesure où il prend acte des résultats de la politique économique menée par le Gouvernement. L'exécution de la loi de finances pour 1999 doit être appréciée par comparaison avec celle des années précédentes. Si plusieurs indicateurs peuvent être choisis, je ne retiendrai que les plus pertinents et ceux qui illustrent le mieux la situation.
Afin de ne pas citer à nouveau l'ensemble des chiffres que vous avez évoqués, monsieur le secrétaire d'Etat, et même s'il serait peut-être utile de les rappeler à certains de mes collègues de la majorité sénatoriale, je m'en tiendrai à une analyse en trois temps.
J'évoquerai tout d'abord la progression des dépenses et recettes définitives.
Le Gouvernement s'était engagé, dans la loi de programmation pluriannuelle, sur une progression maîtrisée de 1 % des dépenses du budget général. Le résultat final peut être apprécié autour de 1,1 %, compte tenu de la garantie accordée à l'UNEDIC en 1993 qui, couverte pour un montant de 10 millards de francs, a augmenté d'autant le montant des dépenses liées à la garantie de l'Etat. Même si nous avons rappelé ce fait à plusieurs reprises, M. le rapporteur général ne veut pas entendre raison. Par ailleurs, nous gardons tous à l'esprit les dégâts causés par les intempéries de décembre 1999, auxquels il a naturellement fallu faire face. Ces dépenses exceptionnelles mises à part, vous conviendrez, mes chers collègues, que le très faible écart résiduel constaté entre les prévisions et l'exécution est dû à des changements de périmètre.
On peut donc dire que l'objectif de maîtrise des dépenses a été globalement respecté, conformément à la volonté du Gouvernement de stabiliser les dépenses de notre pays.
Ensuite, il convient d'examiner la couverture des dépenses par les recettes, qui permet de juger de l'équilibre d'un budget national.
En la matière, des efforts notables ont été accomplis dans la mesure où cette couverture s'est établie à 88 %, contre 82,2 % en 1996. Mais je ne m'attarderai pas sur ce chiffre, qui est suffisamment explicite quant à l'évolution tout à fait positive dont il est le reflet statistique.
Enfin, qu'en a-t-il été de l'évolution du déficit budgétaire et du besoin de financement des administrations publiques ?
Le déficit budgétaire était, en 1997, de 267,7 milliards de francs. Il s'est élevé à 206 milliards de francs en 1999, ce qui représente 2,3 % du PIB. Le besoin de financement des administrations publiques a été ramené de 2,7 % du PIB en 1998 à 1,8 % en 1999. Ces chiffres justifient, eux aussi, les choix de politique économique du Gouvernement et doivent encourager celui-ci à poursuivre ses efforts pour assainir encore plus nos finances publiques.
Mais, vous le savez bien, l'exécution d'un budget peut être aussi analysée au regard des recettes. D'ailleurs, vous avez été nombreux à vous saisir de ce désormais célèbre - et pourtant ô combien infondé ! - concept de « cagnotte ».
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je n'a pas cité ce terme !
M. Bernard Angels. Pas aujourd'hui, monsieur le rapporteur général, mais vous l'avez tellement utilisé que je me permets de le reprendre !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Vos amis journalistes l'ont employé plus souvent que moi !
M. Bernard Angels. Le rapport de la commission d'enquête du Sénat chargée de recueillir des éléments d'information sur l'élaboration et l'exécution des lois de finances, à laquelle j'ai pris part - et une large part - s'est borné à confirmer l'existence, en 1999, de plus-values de recettes fiscales et d'un écart entre les prévisions et les résultats effectifs. Ce ne sont guère que des interprétations partisanes et polémiques, des déclarations tonitruantes à la presse qui ont permis de parler de « dissimulation volontaire ».
Depuis plus de dix ans, en effet, les exécutions des recettes fiscales nettes successives ont présenté des écarts substantiels par rapport aux lois de finances auxquelles elles se rattachaient, et ce quelle que soit la couleur politique du gouvernement aux affaires.
C'est pourquoi je vous citerai rapidement, ainsi que je l'ai fait dans le cadre du rapport de la commission d'enquête paru en octobre dernier, les écarts constatés entre 1987 et 1989 : 32,41 milliards de francs et 25 milliards de francs. Ces écarts sont orientés à la hausse en période de croissance, mais aussi à la baisse en période de récession, comme ce fut le cas en 1996, où un écart de moins 41 milliards de francs avait été constaté.
M. Yves Fréville. Et en 1992 et 1993 ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur Angels, me permettez-vous de vous interrompre, sans esprit de polémique, bien sûr ?
M. Bernard Angels. Je vous en prie, monsieur le rapporteur général.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général, avec l'autorisation de l'orateur.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ce n'est pas l'existence des écarts qui est grave ! Comme vous le relevez à juste titre, des écarts, il y en a souvent, dans un sens et dans l'autre. Ce qui est grave, c'est le fait de les avoir niés en cours d'année, alors que les preuves de leur matérialité existaient. C'est le fait, par exemple, d'avoir dit dans cet hémicycle au rapporteur général - vous vous souvenez de l'expression très élogieuse de M. Sautter - qu'il était le « prince de l'extrapolation ». Or M. Sautter disposait des éléments lui permettant de constater qu'il s'agissait non pas d'extrapolation, mais bien d'une réalité.
Ce que nous critiquons, je le répète, c'est non pas l'existence des écarts, mais le fait de les avoir niés si longtemps.
M. Yves Fréville. Très bien !
M. le président. Monsieur Angels, veuillez poursuivre, je vous prie.
M. Bernard Angels. Vous prenez donc acte, monsieur le rapporteur général, que sous les gouvernements que vous soutenez, les écarts étaient aussi importants sinon plus importants.
Moi aussi, j'ai cherché à comprendre les raisons de tels écarts. Comme vous, je suis un élu de la nation, et je veux pouvoir suivre l'activité gouvernementale.
Il est indéniable que la prévision du taux de croissance pour 1999 avait été particulièrement délicate, cette année-là ayant été très spécifique sur le plan économique. En effet, les crises asiatique et russe avaient participé à créer ce fameux « trou d'air », qui avait conduit à réviser à la baisse les hypothèses de croissance. D'ailleurs, dans cet hémicycle, j'étais l'un de ceux qui reprochaient à Dominique Strauss-Kahn de formuler des hypothèses trop fortes.
En outre, en 1999, l'amplitude entre le dynamisme des recettes et l'activité économique sous-jacente a été très marquée. Habituellement, on constate une corrélation entre l'augmentation des recettes et le taux de croissance du PIB, mais il se trouve qu'en 1999 les recettes ont progressé à un rythme deux fois plus important.
Il convient également de noter que, tout au long de l'année, les recouvrements de recettes ont été perturbés par des effets calendaires : dynamisme, pendant la première moitié de l'année, du recouvrement de l'impôt sur le revenu, dû aux importants retards de la campagne de 1998 ; abaissement de seuil pour le versement obligatoire de la TVA et de l'impôt sur les sociétés par virement ; médiocrité des recouvrements de la TVA jusqu'à l'automne. Ces phénomènes, relativement exceptionnels, ont donc rendu particulièrement difficile l'analyse du dynamisme des recouvrements.
Je rappellerai aussi que, si on la compare aux résultats budgétaires des autres pays européens, la situation française de 1999 n'est pas du tout atypique. En effet, la plupart des pays voisins ont connu, en 1999, une situation similaire et ont enregistré des plus-values fiscales allant de 1,5 à 4 %, contre 2 % pour la France.
J'espère, monsieur le rapporteur général, vous avoir convaincu par ces arguments.
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'était un bel exercice !
M. Bernard Angels. Je regrette donc le manque d'impartialité qui a présidé aux conclusions de cette commission, ainsi qu'aux analyses de la majorité sénatoriale.
En matière budgétaire, plus que dans toute autre, il est nécessaire de faire preuve de mesure. Si l'on souhaite - et c'est le voeu de chacun ici, me semble-t-il - que le Parlement exerce pleinement son rôle aux côtés de l'exécutif, il me paraît en effet nécessaire d'oeuvrer, loin des querelles partisanes, à l'établissement de règles claires et transparentes, dont la réforme de l'ordonnance de 1959 portant loi organique relative aux lois de finances pourrait constituer la première pierre angulaire, ainsi que l'occasion de parvenir à un véritable consensus républicain.
Aussi, au vu des évolutions positives de présentation qu'expose ce projet de loi portant règlement définitif du budget, mais surtout des résultats tout à fait satisfaisants qu'il traduit - je ne citerai que la maîtrise des dépenses, la réduction du déficit et de la dette, et l'amélioration sensible des comptes nationaux - le groupe socialiste soutient bien entendu l'action du Gouvernement, et lui donne acte de sa gestion pour l'année 1999. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à Mme Bidard-Reydet.
Mme Danielle Bidard-Reydet. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les discussions relatives au règlement définitif des budgets sont souvent considérées comme de simples formalités.
Cela est en grande partie vrai, puisque la discussion budgétaire elle-même relève de plus en plus d'un contenu décidé par le pouvoir exécutif, sous le contrôle étroit des autorités européennes.
La discussion de la réforme de l'ordonnance de 1959 relative à la procédure budgétaire nous donnera prochainement l'occasion de revenir sur cet affaiblissement progressif des pouvoirs du Parlement dans ce domaine.
Comment ce dernier est-il réellement associé à la préparation du futur budget ? La discussion des orientations budgétaires, qui aura lieu dans quelques semaines, est un mieux ; nous souhaitons qu'elle ne soit pas formelle.
Nous ne pourrons aller au fond des choses sur ces questions si nous ne levons pas le tabou lié à la pression constante des critères européens d'organisation des finances politiques.
Comment sérieusement parler de la revalorisation du rôle du Parlement alors que toute initiative pourra être sanctionnée au nom de Bruxelles ?
La discussion des projets de loi portant règlement définitif du budget a toutefois le mérite de tirer les leçons d'un exercice budgétaire.
Rappelons-nous l'exercice 1999 : il a été marqué par l'affaire dite de la « cagnotte ». Au-delà des procès politiciens engagés par une droite dont la gestion particulièrement austère n'a jamais pu dégager de telles sommes, il est clair que, si le terme de « cagnotte » pouvait être diversement apprécié, la prudence budgétaire du Gouvernement a été incomprise par ceux qui attendaient une redistribution des fruits de la croissance vers les revenus les plus faibles.
Cet épisode a clairement démontré la nécessité pour le Gouvernement de permettre au Parlement, en particulier à sa majorité, de mieux définir les grandes lignes budgétaires.
L'exercice 1999 s'est déroulé dans un contexte de croissance forte : 2,9 %. Nous nous en félicitons. A qui a profité cette croissance ?
La politique monétaire qui prévaut à l'échelon européen comme dans notre pays a favorisé sans nul doute l'acquisition de titres financiers et les opérations de fusion-acquisition.
Le paradoxe est le suivant : dopés par la croissance, des grands groupes licencient. Certes, 445 000 emplois ont été créés au cours de cette période ; c'est une réalité incontestable. Mais combien d'emplois précaires parmi ceux-ci ?
La gauche plurielle doit s'attaquer résolument à cette grave question de la précarité, qui pèse lourdement sur l'appréciation de la politique économique et sociale du Gouvernement.
C'est cette précarité massive qui fait stagner, voire reculer, le pouvoir d'achat et qui pèse aussi sur le rythme de la croissance, sans pour autant favoriser les plus modestes.
Il est clair que deux philosophies budgétaires s'affrontent : soit nous décidons de nous appuyer sur la revalorisation du pouvoir d'achat et le choix d'un plein emploi stable, soit la priorité est donnée aux investissements financiers.
Le Gouvernement est au milieu du gué. Des mesures budgétaires courageuses doivent être prises dans un avenir proche pour orienter les excédents importants vers la consommation.
C'est sans nul doute le moyen le plus sûr de poursuivre efficacement l'effort de réduction de la dette de l'Etat et de rétablir l'équilibre des comptes sociaux.
Nous avons d'ailleurs regretté certains choix effectués pour l'exercice 2001 qui, de toute évidence, n'ont pas permis d'assurer la redistribution attendue par tant de nos concitoyens.
Mais l'exercice 1999 présentait des aspects positifs. Nous voterons donc, monsieur le secrétaire d'Etat, le texte que vous nous proposez.
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Répondant maintenant aux divers intervenants, je souhaite d'abord remercier M. Bernard Angels de la qualité de son intervention. Chacun connaît sa maîtrise des problèmes budgétaires.
J'ai beaucoup apprécié ses remarques - remarques dont le Gouvernement tirera le plus grand profit - concernant la poursuite de l'évolution vers plus de transparence, de clarté - j'y reviendrai dans un instant - notamment à l'occasion de la réforme de l'ordonnance de 1958 sur les lois de finances. Je le remercie de sa contribution et, à travers lui, de celle du groupe socialiste.
Mme Bidard-Reydet vient également d'apporter son soutien au projet de loi que présente le Gouvernement. Ses observations, notamment dans le domaine social, donnent un éclairage très utile pour l'action gouvernementale.
Monsieur le rapporteur général, vous avez, comme le veut votre fonction, émis un certain nombre de critiques, que je ramènerai de manière cursive à trois.
La première a trait à l'évolution des prélèvements obligatoires. C'est un vieux débat que nous avons déjà eu ensemble ici même, lorsque j'ai présenté des éléments de lois de finances il y a quelques mois.
Vous savez très bien pourquoi l'évolution des prélèvements obligatoires a été celle que nous avons connue en 1999, à savoir 0,7 point d'augmentation par rapport à 1998.
D'abord, il y a eu désinflation, et, soulignant cette évolution des prélèvements obligatoires, vous avez naturellement souligné les résultats positifs de l'action gouvernementale en matière de désinflation : les prix à la consommation n'ont augmenté que de 0,5 % en moyenne, en 1999, alors qu'en effet la prévision associée au projet de loi de finances était de 1,3 %. La progression du PIB en a naturellement été réduite d'autant. La moindre croissance en valeur du PIB a été de presque 100 milliards de francs cette année-là !
Ensuite, les prélèvements obligatoires ont évolué comme vous l'avez souligné parce que l'augmentation des revenus a été forte, en 1998 : 14 % pour les entreprises et près de 4 % pour les ménages. Cela a engendré mécaniquement - on ne peut pas, mesdames, messieurs les sénateurs, passer outre ces faits ! - une augmentation plus forte, plus dynamique que prévu des rentrées fiscales, augmentation que les allégements d'impôts déjà adoptés en 1999 - ceux qui soutiennent le Gouvernement se souviennent certainement de la suppression de la part salariale de la taxe professionnelle, de la baisse de la TVA sur les abonnements d'électricité, de la réduction des droits d'enregistrement - n'ont pas suffi à réduire.

Cette double évolution - désinflation et augmentation des revenus - explique donc l'augmentation de 0,7 point des prélèvements obligatoires en 1999.
Mais ce qui est important, c'est que, faisant suite à l'exécution de la loi de finances de 1999 que nous jugeons aujourd'hui, il y a eu, comme M. Laurent Fabius l'a annoncé à l'Assemblée nationale et ici même au Sénat, une réduction de 0,5 point des prélèvements obligatoires en 2000 et qu'il y aura une réduction de 0,5 point des prélèvements obligatoires en 2000.
Ce qui importe, c'est l'évolution, c'est la permanence d'une politique économique et budgétaire qui permet la réduction patiente, organisée, des prélèvements obligatoires et qui tranche ainsi - vous le savez, monsieur le rapporteur général - avec ce qui se passait avant l'arrivée au Gouvernement de l'équipe de M. Jospin, puisque lorsque vos amis étaient au Gouvernement, entre 1993 et 1996,...
M. Philippe Marini, rapporteur général. La situation n'était pas la même ! Pas vous et pas ça, monsieur le secrétaire d'Etat !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. C'est vrai, monsieur le rapporteur général ! Il n'empêche que vous ne pouvez effacer le fait que les prélèvements obligatoires ont augmenté de deux points entre 1993 et 1996.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Si vous aviez eu à gérer la récession, on aurait vu le résultat !
M. Christian Pierret secrétaire d'Etat. Nous avons en effet vu le résultat, monsieur le rapporteur général, de la non-baisse des impôts, alors que cette baisse avait été annoncée par M. Juppé,...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Vous avez la prospérité, c'est facile !
M. Christian Pierret secrétaire d'Etat. ... et même de l'augmentation des prélèvements obligatoires de 120 milliards de francs constatée sous le gouvernement dudit M. Juppé !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Qu'auriez-vous fait si ces recettes n'avaient pas existé !
M. Christian Pierret secrétaire d'Etat. Ma deuxième remarque portera sur les succès de la politique économique et sociale du Gouvernement, que bien involontairement, monsieur le rapporteur général, vous avez largement soulignés.
Le premier succès, c'est l'évolution de la demande des ménages, qui a été le principal moteur, madame Bidard-Reydet, de la bonne activité économique en 1999. Un chiffre le montre : les ventes d'automobiles en France ont augmenté, cette année-là, de 10,7 %. La demande des ménages a donc été l'un des éléments essentiels de la croissance économique,...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Plus faible que prévu !
M. Christian Pierret secrétaire d'Etat. ... donnant ainsi satisfaction aux groupes politiques qui soutiennent l'action du Gouvernement.
Le second succès, essentiel lui aussi, en lui-même et parce qu'il est lié au premier, c'est l'évolution de l'investissement des entreprises. En 1999, les dépenses d'avenir, l'investissement des entreprises, ont augmenté de 7,6 % par rapport à 1998.
Au fond, le succès principal de la politique économique et sociale du Gouvernement a été de concilier ces deux évolutions : une demande interne fortement soutenue par la demande des ménages et la projection en avant, vers l'avenir, des dépenses qui comptent pour armer la France dans la compétition mondiale, des dépenses d'investissement.
La conciliation de ces deux évolutions, monsieur le rapporteur général, résonne comme un satisfecit qu'il faut adresser - que le Sénat va certainement adresser ! - à la politique économique du Gouvernement. En effet, les économistes estiment généralement que consacrer d'importants crédits à l'investissement pour armer l'économie est antinomique avec une évolution forte de la demande des ménages. C'est un peu la quadrature du cercle. Eh bien, nous avons réussi les deux, nous avons réussi à asseoir, pour de longues années, la croissance économique dans notre pays...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Vous avez eu de la chance !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. ... sur ces deux piliers stables, sur ces deux composantes de la croissance qui paraissent essentiels !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je le répète, vous avez eu de la chance. Maintenant, vous en avez un peu moins !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Vous avez évoqué aussi, monsieur le rapporteur général, la transparence. M. Bernard Angels a d'ailleurs fait justice de vos critiques quant à la volonté et à la pratique de transparence, et donc de contrôle parlementaire, du Gouvernement.
Transparence sur ce que l'on veut faire, d'abord. Je rappelle au Sénat que les lettres de cadrage signées du Premier ministre sont transmises aux commissions des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat. Je rappelle entre autres - je ne prends que deux ou trois illustrations - que la fourniture d'un résumé lisible des objectifs, des coûts et des résultats quantifiés à l'aide d'indicateurs est désormais une réalité pour chaque ministère. S'il n'y a pas là un progrès de la clarté et de la transparence, de la faculté de contrôle parlementaire, qu'appelle-t-on, alors, transparence ?
Transparence sur ce que l'on a fait, ensuite. A cet égard, je relève l'accélération des comptes rendus et des contrôles parlementaires, le dépôt de la loi de règlement en juin, avant la discussion du projet de loi de finances de l'année suivante, la communication aux présidents et aux rapporteurs généraux des commissions des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat de la situation budgétaire de l'Etat, désormais transmise tous les quinze jours.
M. Philippe Marini, rapporteur général. On l'a suffisamment demandée ! Il a fallu des années pour l'avoir !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Autant d'exemples qui montrent que ce gouvernement s'est attaché à oeuvrer dans le sens de la clarté, à améliorer les conditions du contrôle parlementaire, qui montrent que vraiment, pour lui, monsieur le rapporteur général, le travail du Sénat comme celui de l'Assemblée nationale sont considérés comme des aides pour une plus grande connaissance des finances publiques. C'est une ouverture, au fond, des livres des finances publiques à tous les parlementaires qui souhaitent accroître leur contrôle, et le Gouvernement est naturellement disposé à faciliter encore et toujours plus les travaux des parlementaires dans cette direction.
Enfin, monsieur le rapporteur général, vous avez émis - et j'en terminerai par là - une critique sur les recettes non fiscales. Je serai un peu plus technique pour répondre à cette objection, à laquelle j'avais d'ailleurs déjà répondu à la tribune du Sénat.
En exécution, les recettes non fiscales sont en effet, en 1999, en retrait de 15,8 milliards de francs par rapport aux prévisions de la loi de finances rectificative : 183,23 milliards de francs. A cela, il y a trois raisons.
Première raison : un prélèvement moindre que prévu sur les fonds d'épargne. Le prélèvement effectué sur la Caisse des dépôts et consignations au titre des fonds d'épargne a en effet été limité, en 1999, à 10 milliards de francs, en raison de l'importance de la collecte enregistrée sur le livret d'épargne populaire en 1999 et, essentiellement aussi, de la remontée des taux longs cette même année.
Deuxième raison : l'annulation d'un versement prévu de la COFACE, la Compagnie française d'assurance pour le commerce extérieur de 7 milliards de francs, le Gouvernement ayant la volonté de consolider l'équilibre de moyen terme du compte de l'Etat à la COFACE. Cela l'a conduit, en 1999, à ne pas opérer de prélèvements sur ce compte. Le compte de l'Etat à la COFACE est en effet géré dans une logique pluriannuelle, prudentielle, de moyen et long terme, conforme à son objectif de couverture de risques.
Troisième raison, technique elle aussi : le report d'un versement que devait effectuer la CADES, la caisse d'amortissement de la dette sociale.
La CADES doit verser annuellement un total de 12,5 milliards de francs à l'Etat au titre de la reprise des engagements du fonds de solidarité vieillesse. Ce versement est échelonné sur l'année. En 1999, la CADES a ainsi versé 2,5 milliards de francs le 31 mars, le 30 juin et le 30 septembre. Le solde - 5 milliards de francs -, a été reporté au début de l'année 2000. Il est intervenu le 9 février 2000.
Ce report, décidé d'un commun accord, monsieur le rapporteur général, entre la CADES et l'Etat, était justifié par les tensions constatées sur les marchés monétaires à l'époque, tensions qui étaient liées aux craintes de nombreux opérateurs du bogue de l'an 2000.
La CADES, pour des raisons tenant à la prudence de sa gestion de trésorerie, devait en effet emprunter les fonds sur les marchés pour les verser à l'Etat.
Vous voyez donc qu'il n'y a là aucun artifice, aucune raison de critiquer la gestion des recettes non fiscales.
Et même si tel avait été le cas, monsieur le rapporteur général, vous savez mieux que quiconque de combien et de combien de manques de transparence et de clarté dans la gestion des recettes non fiscales s'étaient rendus « coupables » les gouvernements que vous aviez soutenus auparavant ! Nous y avons mis fin.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Tous les gouvernements sont coupables, dans ce domaine !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Je viens de vous donner des raisons techniques pertinentes qui expliquent l'évolution que vous avez voulu fustiger tout à l'heure.
Mesdames, messieurs les sénateurs, il y a donc là, une fois de plus, au travers de la lecture de la loi de règlement, l'affirmation de la pertinence de la politique économique et sociale du Gouvernement, pertinence qui d'ailleurs a été soulignée volens nolens par M. le rapporteur général...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. ... et, en tout cas, explicitement par le groupe socialiste et son orateur, M. Angels, ainsi que le signe de notre volonté d'affirmer la réalité et l'acuité du contrôle parlementaire. Cela, je le crois très sincèrement, honore le gouvernement de M. Lionel Jospin, auquel j'appartiens. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. Nous passons à la discussion des articles.

Article 1er



M. le président.
« Art. 1er. - Les résultats définitifs de l'exécution des lois de finances pour 1999 sont arrêtés aux sommes mentionnées ci-après :


CHARGES

(en francs)

RESSOURCES

(en francs)

A. - Opérations à caractère définitif


Budget général
Recettes (a) 1 840 658 081 406,50 . .

A déduire : Dégrèvements et remboursements d'impôts

- 329 135 973 898,38 . 1 511 522 107 508,12
Dépenses ordinaires civiles 1 778 090 171 365,86 .

A déduire : Dégrèvements et remboursements d'impôts
- 329 135 973 898,38 1 448 954 197 467,48
Dépenses civiles en capital 99 465 041 287,56
Dépenses militaires

178 345 124 832,86

Total pour le budget général
1 726 764 363 587,90 (b)

1 511 522 107 508,12

Soldes du budget général

215 242 256 079,78

Comptes d'affection spéciale

Recettes . 64 580 677 041,34
Dépenses ordinaires civiles 20 744 891 381,13
Dépenses civiles en capital
40 640 124 903,72
Total pour les comptes d'affectation spéciale 61 385 016 284,85

64 580 677 041,34

Solde des comptes d'affectation spéciale .

3 195 660 756,49

Totaux (budget général et comptes d'affectation spéciale) 1 788 149 379 872,75

1 576 102 784 549,46

Budgets annexes

Aviation civile 8 978 521 670,31 8 978 521 670,31
Journaux officiels 1 237 610 223,62 1 237 610 223,62
Légion d'honneur 121 099 814,92 121 099 814,92
Monnaies et médailles 1 112 998 641,85 1 112 998 641,85
Ordre de la Libération 5 014 031,00 5 014 031,00
Prestations sociales agricoles 95 747 266 110,79
95 747 266 110,79
Totaux budgets annexes 107 202 510 492,49

107 202 510 492,49

Totaux des opérations à caractère définitif (A) 1 895 351 890 365,24

1 683 305 295 041,95

Solde des opérations à caractère définitif (A) 212 046 595 323,29

»

B. - Opérations à caractère temporaire


Comptes spéciaux du Trésor
Comptes d'affectation spéciale 16 398 428,70 115 705 927,09
Comptes de prêts 6 470 815 845,84 6 413 555 195,33
Comptes d'avances 439 156 475 641,02 443 409 968 549,61
Comptes de commerce (solde) - 2 135 778 640,04 »
Comptes de règlement avec les gouvernements étrangers (solde) 9 571 357,01 »
Comptes d'opérations monétaires (solde hors FMI) 376 344 698,53
»
Totaux des opérations à caractère temporaire (B) 443 893 827 331,06

449 939 229 672,03

Solde des opérations à caractère temporaire hors FMI (B) »

6 045 402 340,97

Solde d'exécution des lois de finances hors FMI (A + B) 206 001 192 982,32 »
Solde d'exécution des lois de finances hors FMI, hors FSC 206 001 597 741,11

»



(a) Après déduction des prélèvements sur recettes de l'Etat (267 704 944 685,13 F) au profit des collectivités locales et des Communautés européennes.
(b) Le montant des dépenses brutes du budget général s'établit à 2 055 900 337 486,28 F.

Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er.

(L'article 1er est adopté.)

Article 2 et tableau A annexé

M. le président. « Art. 2. - Le montant définitif des recettes du budget général de l'année 1999 est arrêté à 1 840 658 081 406,50 francs. La répartition de cette somme fait l'objet du tableau AVoir ce tableau dans le projet de loi n° 2534 (annexes).
annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 2 et le tableau A annexé.

(L'article 2 et le tableau A annexé sont adoptés.)

Article 3 et tableau B annexé

M. le président. « Art. 3. - Le montant définitif des dépenses ordinaires civiles du budget général de 1999 est arrêté aux sommes mentionnées au tableau ci-après. Les crédits ouverts sont modifiés comme il est dit au même tableau et répartis par ministère conformément au tableau BVoir ce tableau dans le projet de loi n° 2534 (annexes).
annexé à la présente loi. »


AJUSTEMENTS DE LA LOI DE RÈGLEMENT





DÉSIGNATION DES TITRES

DÉPENSES

(en francs)

Ouvertures de crédits
complémentaires

(en francs)

Annulations de crédits
non consommés

(en francs)

I. - Dette publique et dépenses en atténuation de recettes 590 879 535 200,26 14 804 143 798,70 668 808 598,44
II. - Pouvoirs publics 4 658 498 629,88 » 1 651 870,12
III. - Moyens des services 671 273 310 833,17 872 911 798,67 5 027 570 514,50
IV. - Interventions publiques 511 278 826 702,55 682 080 690,93
2 831 981 031,38
Totaux 1 778 090 171 365,86 16 359 136 288,30 8 530 012 014,44


Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 3 et le tableau B annexé.

(L'article 3 et le tableau B annexé sont adoptés.)

Article 4 et tableau C annexé

M. le président. « Art. 4. - Le montant définitif des dépenses civiles en capital du budget général de 1999 est arrêté aux sommes mentionnées au tableau ci-après. Les crédits ouverts sont modifiés comme il est dit au même tableau et répartis par ministère conformément au tableau CVoir ce tableau dans le projet de loi n° 2534 (annexes).
annexé à la présente loi. »


AJUSTEMENTS DE LA LOI DE RÈGLEMENT





DÉSIGNATION DES TITRES

DÉPENSES

(en francs)

Ouvertures de crédits
complémentaires

(en francs)

Annulations de crédits
non consommés

(en francs)

V. - Investissements exécutés par l'Etat 22 396 867 355,32 » 27,68
VI. - Subventions d'investissement accordées par l'Etat 77 068 030 866,32 » 80 562 881,68
VII. - Réparations des dommages de guerre 143 065,92 »
0,08
Totaux 99 465 041 287,56 » 80 562 909,44


Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 4 et le tableau C annexé.

(L'article 4 et le tableau C annexé sont adoptés.)

Article 5 et tableau D annexé

M. le président. « Art. 5. - Le montant définitif des dépenses ordinaires militaires du budget général de 1999 est arrêté aux sommes mentionnées au tableau ci-après. Les crédits ouverts sont modifiés comme il est dit au même tableau et répartis conformément au tableau DVoir ce tableau dans le projet de loi n° 2534 (annexes).
annexé à la présente loi. »


AJUSTEMENTS DE LA LOI DE RÈGLEMENT





DÉSIGNATION DES TITRES

DÉPENSES

(en francs)

Ouvertures de crédits
complémentaires

(en francs)

Annulations de crédits
non consommés

(en francs)

III. - Moyens des armes et services 109 342 476 585,59 5 751 262,82
1 485 520 928,23
Totaux 109 342 476 585,59 5 751 262,82 1 485 520 928,23


Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 5 et le tableau D annexé.

(L'article 5 et le tableau D annexé sont adoptés.)

Article 6 et tableau E annexé

M. le président. « Art. 6. - Le montant définitif des dépenses militaires en capital du budget général de 1999 est arrêté aux sommes mentionnées au tableau ci-après. Les crédits ouverts sont modifiés comme il est dit au même tableau et répartis conformément au tableau EVoir ce tableau dans le projet de loi n° 2534 (annexes).
annexé à la présente loi. »


AJUSTEMENTS DE LA LOI DE RÈGLEMENT





DÉSIGNATION DES TITRES

DÉPENSES

(en francs)

Ouvertures de crédits
complémentaires

(en francs)

Annulations de crédits
non consommés

(en francs)

V. - Equipement 67 823 996 437,42 1,49 1,07
VI. - Subventions d'investissement accordées par l'Etat 1 178 651 809,85 »
0,15
Totaux 69 002 648 247,27 1,49 1,22



Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 6 et le tableau E annexé.

(L'article 6 et le tableau E annexé sont adoptés.)

Article 7 et tableau F annexé

M. le président. « Art. 7. - Le résultat du budget général de 1999 est définitivement fixé comme suit :
« Recettes 1 840 658 081 406,50 F
« Dépenses 2 055 900 337 486,28 F


« Excédent des dépenses sur les recettes 215 242 256 079,78 F

« La répartition des recettes et des dépenses fait l'objet du tableau FVoir ce tableau dans le projet de loi n° 2534 (annexes).
annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 7 et le tableau F annexé.

(L'article 7 et le tableau F annexé sont adoptés.)

Article 8 et tableau G annexé

M. le président. « Art. 8. - Les résultats des budgets annexes sont arrêtés aux sommes mentionnées au tableau ci-après. Les crédits ouverts sont modifiés comme il est dit au même tableau. Ces crédits sont répartis par budget conformément au tableau GVoir ce tableau dans le projet de loi n° 2534 (annexes).
annexé à la présente loi. »


AJUSTEMENTS DE LA LOI DE RÈGLEMENT





DÉSIGNATION DES BUDGETS

TOTAUX ÉGAUX
en recettes et en dépenses

(en francs)

Ouvertures de crédits
complémentaires

(en francs)

Annulations de crédits
non consommés

(en francs)

Aviation civile 8 978 521 670,31 772 981 207,19 172 811 968,88
Journaux officiels 1 237 610 223,62 14 643 069,08 26 866 572,46
Légion d'honneur 121 099 814,92 1 184 738,82 4 099 575,90
Monnaies et médailles 1 112 998 641,85 58 057 734,41 415 062 651,56
Ordre de la Libération 5 014 031,00 1 153 165,75 325 698,75
Prestations sociales agricoles 95 747 266 110,79 2 015 620 339,23
615 354 228,44
Totaux 107 202 510 492,49 2 863 640 254,48 1 234 520 695,99


Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 8 et le tableau G annexé.

(L'article 8 et le tableau G annexé sont adoptés.)

Article 9 et tableau I annexé

M. le président. I. - Les résultats des comptes spéciaux du Trésor dont les opérations se poursuivent sont arrêtés, pour 1999, aux sommes mentionnées au tableau ci-après. Les crédits et les autorisations de découverts sont modifiés commes il est dit au même tableau et répartis par catégories de comptes et ministère gestionnaire conformément au tableau IVoir ce tableau dans le projet de loi n° 2534 (annexes).
annexé à la présente loi.


OPÉRATIONS DE L'ANNÉE 1999


AJUSTEMENTS DE LA LOI DE RÈGLEMENT




DÉSIGNATION

Dépenses

(en francs)

Recettes

(en francs)

Ouvertures de crédits
complémentaires

(en francs)

Annulations de crédits
non consommés

(en francs)

Autorisations
de découverts
complémentaires

(en francs)


I. - Opérations à caractère définitif
Comptes d'affectation spéciale 55 755 628 202,89 55 335 483 425,33 14 813 342 919,09 82 227 016,20
»
Totaux 55 755 628 202,89 55 335 483 425,33 14 813 342 919,09 82 227 016,20 »

II. - Opérations à caractère temporaire

Comptes d'affectation spéciale 450 000,00 9 933 301,56 » 43 016 687,00 »
Comptes de commerce 23 159 398 173,09 25 295 176 813,13 » » »
Comptes de règlement avec les gouvernements étrangers 9 571 357,01 » » » »
Comptes d'opérations monétaires 50 145 928 449,21 30 705 465 101,48 » » 56 562 324 379,40
Comptes de prêts 6 470 815 845,84 6 413 555 195,33 0,84 700 000,00 »
Comptes d'avances 439 156 475 641,02 443 409 968 549,61 66 721 461 971,00 2 064 986 329,98
»
Totaux 518 942 639 466,17 505 834 098 961,11 66 721 461 971,84 2 108 703 016,98

56 562 324 379,40

Totaux généraux 574 698 267 669,06 561 169 582 386,44 81 534 804 890,93 2 190 930 033,18 56 562 324 379,40


« II. - Les soldes des comptes spéciaux du Trésor dont les opérations se poursuivent sont arrêtés à la date du 31 décembre 1999 aux sommes ci-après et répartis, par ministère, conformément au tableau I.



SOLDES AU 31 DÉCEMBRE 1999



DÉSIGNATION DES CATÉGORIES DE COMPTES SPÉCIAUX

Débiteurs

(en francs)

Créditeurs

(en francs)

Comptes d'affectation spéciale : opérations à caractère définitif et à caractère temporaire » 9 467 012 193,16
Comptes de commerce 63 530 135,39 6 054 420 535,10
Comptes de règlement avec les gouvernements étrangers 194 924 334,32 »
Comptes d'opérations monétaires 56 699 774 519,25 14 916 578 069,90
Comptes de prêts 121 568 717 358,92 »
Comptes d'avances 108 345 666 336,90
»
Totaux 286 872 612 684,78 30 438 010 798,16



« III. - Les soldes arrêtés au II sont reportés à la gestion 2000, à l'exception d'un solde débiteur de 137 450 139,85 francs concernant les comptes d'opérations monétaires et d'un solde débiteur de 2 343 076 389,16 francs concernant les comptes de prêts qui font l'objet d'une affectation par l'article de transport aux découverts du Trésor.
« IV. - Les sommes de 7 847 549 francs et de 45 000 000 francs figurant au compte de prêts du Fonds de développement économique et social et correspondant respectivement à une perte sur cession et à un abandon de créances sont apurées par transport aux découverts du Trésor. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 9 et le tableau I annexé.

(L'article 9 et le tableau I annexé sont adoptés.)

Article 10

M. le président. « Art. 10. - Les résultats des comptes spéciaux du Trésor définitivement clos au 31 décembre 1999 sont arrêtés aux sommes mentionnées au tableau ci-après. Les crédits sont modifiés comme il est dit au même tableau. »


OPÉRATIONS DE L'ANNÉE


SOLDES AU 31 DÉCEMBRE 1999

AJUSTEMENTS DE LA LOI

de règlement







D É S I G N A T I O N

Dépenses

(en francs)

Recettes

(en francs)

Débit

(en francs)

Crédit

(en francs)

Ouvertures

(en francs)

Annulations

(en francs)


Comptes d'affectation spéciale
902-01 Fonds forestier national 392 732 703,21 479 210 521,55 » 589 739 532,86 0,25 1,04
902-13 Fonds de secours aux victimes de sinistres et calamités 40 684 036,83 600,00 » 5 271 628,87 1,00 1,17
902-16 Fonds national du livre 120 555 386,12 112 732 278,63 » 10 373 344,06 666 703,12 3 934 425,00
902-22 Fonds pour l'aménagement de l'Ile-de-France 1 921 330 055,39 2 183 777 186,92 » 2 787 609 741,42 26 757 138,15 2,76
902-30 Fonds pour la financement de l'accession à la propriété 3 170 034 329,11 6 575 245 654,44 » 6 952 518 671,32 »
7 273 014,89
Total général 5 645 336 510,66 9 350 966 241,54 » 10 345 512 918,53 27 423 842,52 11 207 441,86


Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 10.

(L'article 10 est adopté.)

Articles 11 et 12

M. le président. « Art. 11. - I. - Le solde débiteur des pertes et profits sur emprunts et engagements de l'Etat est arrêté au 31 décembre 1999 à la somme de 4 829 907 753,89 F, conformément au tableau ci-après :


OPÉRATIONS

DÉPENSES

(en francs)

RECETTES

(en francs)

Annuités non supportées par le budget général ou un compte spécial du Trésor 4 896 681 333,90 »

Pertes de change : - pertes de change sur engagements

109 265,80 »

Dotations aux amortissements. - Charges financières : - dotations aux amortissements des primes d'émission des obligations
» »
- dotations aux amortissements des suppléments résultant des indexations 17 960 505,40 »
- dotations aux amortissements des décotes 276 552 044,50 »
Quote-part des primes sur emprunts et BTAN » 576 878 450,61

Pertes et profits divers sur emprunts et engagements : - pertes sur emprunts à long terme
174 146 141,00 »
- profits divers sur emprunts à long terme » »
- pertes sur BTAN 66 479 462,79 »
- profits divers sur BTAN » 5 797 598,41
- pertes diverses 6 350,71 »
- profits divers »

19 351 301,19

Totaux 5 431 935 104,10

602 027 350,21

Solde 4 829 907 753,89 »


« II. - Une somme de 23 164 331 089,32 F correspondant à la reprise sur antérieurs des primes et décotes est portée en augmentation des découverts du Trésor. » - (Adopté.)
« Art. 12. - Est définitivement apurée par transport en augmentation des découverts du Trésor une perte de 3 701,13 F correspondant à la contre-valeur en francs de shillings somaliens non convertibles détenus dans les caisses de l'Etat. » - (Adopté.)

Article 13



M. le président.
« Art. 13. - I. - Sont reconnues d'utilité publique, pour un montant de 5 461 984,40 F, les dépenses comprises dans la gestion de fait des deniers de l'Etat, jugée par la Cour des comptes dans ses arrêts du 6 décembre 1995, du 22 janvier 1997, du 16 septembre 1998 et du 22 septembre 1999, au titre du ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement.
« II. - Sont reconnues d'utilité publique, pour un montant de 895 385 F, les dépenses comprises dans la gestion de fait des deniers de l'Etat, jugée par la Cour des comptes dans ses arrêts du 9 avril 1998 et du 19 février 1999, au titre du ministère de la défense.
« III. - Sont reconnues d'utilité publique, pour un montant de 1 501 215,52 F, les dépenses comprises dans la gestion de fait des deniers de l'Etat, jugée par la Cour des comptes dans ses arrêts du 9 juillet 1997, du 16 décembre 1998 et du 25 juin 1999, au titre du ministère de l'équipement, des transports et du logement. »
« IV. - Sont reconnues d'utilité publique, pour un montant de 15 721 151,08 F, les dépenses comprises dans la gestion de fait des deniers de l'Etat, jugée par la Cour des comptes dans ses arrêts du 8 février 1990, du 12 mars 1992, du 17 novembre 1994 et du 26 mai 1999, au titre du ministère de l'équipement, des transports et du logement.
« V. - Sont reconnues d'utilité publique, pour un montant de 1 801 737,42 F, les dépenses comprises dans la gestion de fait des deniers de l'Etat, jugée par la Cour des comptes dans ses arrêts du 15 décembre 1997 et du 19 novembre 1998, au titre du ministère de l'intérieur et de la décentralisation. »
Par amendement n° 1, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose, dans le V de cet article, de remplacer la somme : « 1 801 737,42 F » par la somme : « 1 801 737,82 F ».
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est une rectification d'erreur matérielle.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 13, ainsi modifié.

(L'article 13 est adopté.)

Article 14



M. le président.
« Art. 14. - I. - Les sommes énumérées ci-après, mentionnées aux articles 7, 9 (III et IV), 11 (I et II) et 12, sont transportées en augmentation des découverts du Trésor :


« - Excédent des dépenses sur les recettes du budget général de 1999 215 242 256 079,78 F
« - Résultat net du compte spécial du Trésor "Pertes et bénéfices de change" soldé chaque année 137 450 139,85 F
« - Remises de dettes aux pays les moins avancés 2 343 076 389,16 F
« - Pertes sur des opérations du Fonds de développement économique et social 52 847 549,00 F
« - Pertes et profits sur emprunts et engagements 4 829 907 753,89 F
« - Reprise sur antérieurs des primes et décotes 23 164 331 089,32 F
« - Perte en trésorerie sur devises inconvertibles 3 701,13 F
« Total I. - Augmentation des découverts du Trésor 245 769 872 702,13 F



« II. - La somme visée à l'article 10 est transportée en atténuation des découverts du Trésor :

« - Résultats nets des comptes spéciaux clos au 31 décembre 1999 10 345 512 918,53 F
« Total II. - Atténuation des découverts du Trésor 10 345 512 918,53 F
« Total net à transporter en augmentation des découverts du Trésor (I - II) 235 424 359 783,60 F»


Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 14.

(L'article 14 est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
En application de l'article 59 du règlement, le scrutin public est de droit.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 50:

Nombre de votants 318
Nombre de suffrages exprimés 318
Majorité absolue des suffrages 160
Pour l'adoption 318

M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est extraordinaire, monsieur le secrétaire d'Etat : vous avez quitus ! (Sourires.)
M. le président. Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures cinq, est reprise à quinze heures.)

M. le président. La séance est reprise.

4

CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS

M. le président. La conférence des présidents a établi comme suit l'ordre du jour des prochaines séances du Sénat :

Mercredi 9 mai 2001,
à quinze heures et le soir :

Ordre du jour complémentaire

1° Conclusions de la commission des affaires économiques sur la proposition de résolution de MM. Pierre Martin, Fernand Demilly et Marcel Deneux tendant à la création d'une commission d'enquête sur les inondations de la Somme afin d'établir les causes et les responsabilités de ces crues, d'évaluer les coûts et de prévenir les risques d'inondations (n° 278, 2000-2001).

Ordre du jour prioritaire

2° Nouvelle lecture du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, relatif à l'interruption volontaire de grossesse et à la contraception (n° 273, 2000-2001).
La conférence des présidents a fixé :
- au lundi 7 mai 2001, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;
- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant dix-sept heures, le lundi 7 mai 2001.
3° Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, de modernisation sociale (n° 185, 2000-2001).

Jeudi 10 mai 2001 :

A neuf heures trente :
1° Sous réserve de sa création par le Sénat, nomination des membres de la commission d'enquête sur les inondations de la Somme ;
Les candidatures à cette commission d'enquête devront être déposées au secrétariat central du service des commissions avant le mercredi 9 mai 2001, à dix-huit heures.

Ordre du jour prioritaire

2° Deuxième lecture de la proposition de loi, adoptée avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, tendant à la reconnaissance de la traite et de l'esclavage en tant que crime contre l'humanité (n° 314, 1999-2000).
La conférence des présidents a décidé de fixer au mercredi 9 mai 2001, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte.
3° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant diverses dispositions statutaires relatives aux magistrats de la Cour des comptes et des chambres régionales des comptes et modifiant le code des juridictions financières (n° 297, 1999-2000).
La conférence des présidents a fixé :
- au mercredi 9 mai 2001, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;
- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant dix-sept heures, le mercredi 9 mai 2001.
A quinze heures et le soir :
4° Questions d'actualité au Gouvernement.
L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant onze heures.

Ordre du jour prioritaire

5° Eventuellement, suite de l'ordre du jour du matin ;
6° Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, de modernisation sociale (n° 185, 2000-2001).

Mardi 15 mai 2001 :

A dix heures :
1° Quatorze questions orales (l'ordre d'appel des questions sera fixé ultérieurement) :
- N° 1013 de M. Louis Souvet à Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité (réduction du temps de travail et viabilité hivernale) ;
- N° 1014 de Mme Marie-Claude Beaudeau à Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité (interdiction des produits à base d'éthers de glycol) ;
- N° 1023 de M. Jean-Louis Lorrain à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement (etat d'avancement du projet TGV Rhin-Rhône) ;
- N° 1034 de Mme Nicole Borvo à M. le ministre de l'éducation nationale (manque de postes d'enseignant du premier degré dans l'académie de Paris) ;
- N° 1041 de M. Robert Bret à Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité (situation des retraités de la Société marseillaise de crédit) ;
- N° 1049 de M. Gérard Larcher à M. le ministre de l'intérieur (mise en place du contrat local de sécurité à Rambouillet) ;
- N° 1053 de M. Jean-Claude Peyronnet à M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation (indemnisation des réparations des dégâts causés par les tempêtes de décembre 1999) ;
- N° 1054 de M. André Ferrand à M. le ministre de l'éducation nationale (internat scolaire pour les enfants des Français expatriés) ;
- N° 1055 de M. Claude Haut à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche (réhabilitation du parc naturel régional du Lubéron) ;
- N° 1056 de M. Daniel Goulet à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie (baisse de la TVA dans le secteur de la restauration) ;
- N° 1059 de M. Gérard Cornu à M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation (maintien des petites stations-service en milieu rural) ;
- N° 1060 de M. Josselin de Rohan à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement (aménagement de la RN 165) ;
- N° 1061 de M. Serge Lagauche à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement (dédoublement de l'A 4 par l'A 86 dans le Val-de-Marne) ;
- N° 1065 de M. Gérard Delfau à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie (accès aux services bancaires).
A seize heures et, éventuellement, le soir :

Ordre du jour prioritaire

2° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la prise en charge de la perte d'autonomie des personnes âgées et à l'allocation personnalisée d'autonomie (n° 279, 2000-2001).
La conférence des présidents a fixé :
- à l'ouverture de la discussion générale le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;
- à quatre heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant dix-sept heures, le lundi 14 mai 2001.

Mercredi 16 mai 2001 :

Ordre du jour prioritaire

A quinze heures et le soir :
1° Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la prise en charge de la perte d'autonomie des personnes âgées et à l'allocation personnalisée d'autonomie (n° 279, 2000-2001) ;
2° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la réalisation d'un itinéraire à très grand gabarit entre le port de Bordeaux et Toulouse (n° 254, 2000-2001).
La conférence des présidents a décidé de fixer au mardi 15 mai 2001, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte.

Jeudi 17 mai 2001 :

Ordre du jour réservé

A neuf heures trente :
1° Conclusions de la commission des lois sur la proposition de loi organique de M. Josselin de Rohan et de plusieurs de ses collègues tendant à harmoniser les conditions d'éligibilité aux mandats électoraux et aux fonctions électives (n° 6, 2000-2001).
2° Conclusions de la commission des lois sur :
- la proposition de loi de M. Josselin de Rohan et de plusieurs de ses collègues tendant à harmoniser les conditions d'éligibilité aux mandats électoraux et aux fonctions électives (n° 7, 2000-2001) ;
- la proposition de loi de M. Daniel Hoeffel modifiant la loi n° 77-080 du 19 juillet 1977 relative à la publication et à la diffusion de certains sondages d'opinion (n° 57, 2000-2001) ;
- la proposition de loi de MM. Alain Dufaut et Patrice Gélard tendant à permettre à des élus se trouvant dans une situation d'incompatibilité, en raison de l'acquisition d'un mandat en remplacement d'un autre élu, de la faire cesser en démissionnant du mandat de leur choix (n° 280, 2000-2001).
Pour ces deux textes, la conférence des présidents a :
- décidé qu'il serait procédé à une discussion générale commune ;
- fixé au mercredi 16 mai 2001, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt des amendements.
A quinze heures et, éventuellement, le soir :
3° Conclusions de la commission des affaires culturelles sur la proposition de loi de Mme Danièle Pourtaud et des membres du groupe socialiste et apparentés tendant à prévoir un barème de rémunération équitable applicable aux discothèques et activités similaires (n° 244, 2000-2001) ;
4° Conclusions de la commission des affaires culturelles sur la proposition de loi de Mme Danièle Pourtaud et des membres du groupe socialiste et apparentés modifiant le code de la propriété intellectuelle et tendant à prévoir une rémunération pour la copie privée numérique (n° 245, 2000-2001).
Pour ces deux textes, la conférence des présidents a fixé au mercredi 16 mai 2001, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt des amendements.

Mardi 22 mai 2001 :

Ordre du jour prioritaire

A seize heures et, éventuellement, le soir :
Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la sécurité quotidienne (n° 296, 2000-2001).
La conférence des présidents a fixé :
- au lundi 21 mai 2001, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;
- à trois heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant dix-sept heures, le lundi 21 mai 2001.

Mercredi 23 mai 2001 :

Ordre du jour prioritaire

A quinze heures :
Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la sécurité quotidienne (n° 296, 2000-2001).

Mardi 29 mai 2001 :

A neuf heures trente :
1° Questions orales.
A seize heures et le soir :
2° Eloge funèbre de François Abadie ;
3° Sous réserve de sa transmission, projet de loi portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel (urgence déclarée) (AN, n° 3025) ;
La conférence des présidents a fixé :
- à l'ouverture de la discussion générale, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;
- à quatre heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant dix-sept heures, le lundi 28 mai 2001.

Mercredi 30 mai 2001 :

Ordre du jour prioritaire

A quinze heures et le soir :
1° Suite du projet de loi portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel (urgence déclarée) (AN, n° 3025).
2° Sous réserve de sa transmission, le projet de loi (urgence déclarée) (AN, n° 2990) portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier.
La conférence des présidents a fixé :
- au mardi 29 mai 2001, à douze heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;
- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant dix-sept heures, le mardi 29 mai 2001.

Jeudi 31 mai 2001 :

A neuf heures trente :

Ordre du jour prioritaire

1° Suite du projet de loi portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier (urgence déclarée) (AN, n° 2990).
A quinze heures et le soir :
2° Questions d'actualité au Gouvernement.
L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant onze heures.

Ordre du jour prioritaire

3° Suite du projet de loi portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier (Urgence déclarée) (AN, n° 2990).
Y a-t-il des observations en ce qui concerne les propositions de la conférence des présidents relatives à la tenue des séances et à l'ordre du jour réservé ? ...
Ces propositions sont adoptées.

5

ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE

M. le président. J'informe le Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation du sénateur appelé à siéger au sein du Conseil supérieur de la mutualité.
Conformément à l'article 9 du règlement, j'invite la commission des affaires sociales à présenter une candidature.
La nomination au sein de cet organisme extraparlementaire aura lieu ultérieurement, dans les conditions prévues par l'article 9 du règlement.

6

CANDIDATURES À DES ORGANISMES
EXTRAPARLEMENTAIRES

M. le président. Je rappelle au Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation des sénateurs appelés à siéger au sein de trois organismes extraparlementaires.
La commission des affaires économiques a fait connaître qu'elle propose les candidatures de :
- MM. Philippe François et Rémi Herment pour la Commission consultative pour la production de carburants de substitution ;
- M. Jean Bizet pour la Commission nationale du débat public ;
- et MM. François Gerbaud, pour siéger en qualité de titulaire, et Jean-Pierre Plancade, pour siéger en qualité de suppléant au sein du Conseil supérieur de l'aviation marchande.
Ces candidatures ont été affichées et seront ratifiées, conformément à l'article 9 du règlement, s'il n'y a pas d'opposition à l'expiration du délai d'une heure.

7

CANDIDATURES A` UNE COMMISSION
MIXTE PARITAIRE

M. le président. J'informe le Sénat que la commission des finances m'a fait connaître qu'elle a procédé à la désignation des candidats qu'elle présente à la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant règlement définitif du budget de 1998.
Cette liste a été affichée et la nomination des membres de cette commission mixte paritaire aura lieu conformément à l'article 9 du règlement.

8

ACTUALISATION ET ADAPTATION
DU DROIT APPLICABLE A` L'OUTRE-MER

Adoption d'un projet de loi d'habilitation

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 269, 2000-2001) portant habilitation du Gouvernement à prendre, par ordonnances, les mesures législatives nécessaires à l'actualisation et à l'adaptation du droit applicable outre-mer. [Rapport n° 295 (2000-2001).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Paul, secrétaire d'Etat à l'outre-mer. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement et le Parlement ont, depuis 1997, engagé ensemble une importante modernisation du droit applicable outre-mer, dans les départements comme dans les territoires, et cela dans un très grand nombre de domaines. Cette modernisation a notamment été réalisée par la voie des ordonnances de l'article 38 de la Constitution.
C'est aujourd'hui le dernier projet de loi d'habilitation de la législature relatif à l'outre-mer qui est soumis à votre examen. Je souhaite vous présenter ce texte de la manière la plus précise possible, d'autant que c'est aussi pour moi l'occasion de faire le point sur ce qui a été fait dans la période récente et qui éclaire en la matière les choix de ce Gouvernement.
La technique des ordonnances prises par le Gouvernement après habilitation n'est pas la panacée, monsieur le rapporteur, je le reconnais bien volontiers et je crois savoir que vous reviendrez sur ce point. Mais, compte tenu du calendrier parlementaire et de l'intense activité de production normative de cette législature, compte tenu surtout des urgences sociales en outre-mer, nous en avons fait, je crois, le meilleur usage possible. Cette technique permet en effet au Gouvernement, sous le contrôle du Parlement, sous votre contrôle, mesdames, messieurs les sénateurs, d'apporter de manière efficace des réponses aux attentes de nos concitoyens.
C'est ainsi que les deux précédentes lois d'habilitation du 6 mars 1998 et du 25 octobre 1999 ont donné lieu à des ordonnances importantes. Par ailleurs, en matière de sécurité juridique et de renforcement de l'Etat de droit, plusieurs ordonnances du printemps 2000 ont aligné les règles applicables outre-mer sur le droit commun, notamment pour le droit d'asile et l'entrée ainsi que le séjour des étrangers. La réforme de l'état civil à Mayotte, réalisée également par une ordonnance du 8 mars 2000, doit également être rappelée. Enfin, en matière économique et sociale, le droit du travail a été modernisé outre-mer par une ordonnance du 30 mars 2000 et les règles applicables aux professions de santé ont été adaptées par des ordonnances du 2 mars 2000.
Nous aurons l'occasion de revenir en détail sur ces ordonnances, puisque les projets de loi de ratification déposés en juillet 2000 seront débattus très prochainement devant le Parlement.
Mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de loi qui vous est soumis aujourd'hui permettra de moderniser le droit applicable dans trois domaines essentiellement.
Le premier sujet que je voudrais évoquer concerne Mayotte.
Vous savez que le Gouvernement a engagé une action sans précédent en faveur de cet ensemble d'îles et entend respecter les engagements qu'il a pris devant la population de Mayotte dans l'accord sur l'avenir de Mayotte, signé le 27 janvier 2000. A ce titre, le présent projet de loi constitue à part entière une nouvelle étape.
Je voudrais préciser également qu'il avait été entendu avec les membres du comité de suivi de l'accord, composé notamment du président du conseil général, du député Henry Jean-Baptiste et du sénateur Marcel Henry, que, si les dispositions statutaires, que l'Assemblée nationale a adoptées le 4 avril dernier et dont nous débattrons ici même le mois prochain, pouvaient entrer en vigueur en janvier 2002, en revanche, il fallait apporter une réponse plus rapide aux attentes de nos concitoyens en matière sociale. Le Premier ministre a d'ailleurs confirmé, lors de son déplacement sur l'île, en janvier dernier, qu'il entendait répondre à ces attentes.
C'est ainsi que l'habilitation sollicitée, dans les 5°, 6° et 7° de l'article 1er du projet de loi sera suivie, dès l'automne, de mesures dans le domaine de l'emploi et de la protection sociale.
Notre objectif est clair : ouvrir la voie du développement, de la responsabilité, et non celle de l'assistance ou de l'assistanat, et donc faire oeuvre utile pour le développement social et économique de Mayotte.
Je peux ainsi vous dire aujourd'hui que le dispositif emploi-jeunes sera adapté à Mayotte et que, dès cette année, 300 emplois-jeunes seront créés pour y développer des actvités d'utilité sociale et satisfaire ainsi les besoins d'encadrement des associations et des collectivités locales. La mise en place d'un régime conventionnel d'indemnisation du chômage en cas de licenciement économique sera par ailleurs encouragée et le code du travail dans son ensemble sera complété pour mieux assurer notamment l'hygiène et la sécurité du travail. De plus, le statut des travailleurs indépendants, commerçants, artisans, des exploitants agricoles et des pêcheurs sera consolidé : c'est le 7° de l'article 1er du projet de loi.
A Mayotte toujours, mais cette fois en matière de protection sociale, objet du cinquième point, la modernisation est aussi une nécessité afin que les habitants, qui bénéficient actuellement d'une protection faible, voire nulle, voient leurs droits très concrètement renforcés. Notre première priorité portera sur l'enfance et la famille, et les allocations familiales, essentiellement réservées jusqu'ici aux salariés, seront généralisées à toutes les familles en situation régulière.
La première étape concernera les travailleurs indépendants ; la seconde, en 2002, toutes les autres familles. La revalorisation du niveau de ces allocations sera réalisée par étapes, et ce dès le 1er octobre prochain. Dans un an, le montant de ces allocations aura été augmenté de moitié environ pour les familles comptant un ou deux enfants et d'un tiers pour les familles de trois enfants. Par ailleurs, le montant minimal des allocations versées aux plus démunis sera également augmenté, pour les personnes âgées comme pour les personnes handicapées.
Enfin, l'éducation à Mayotte bénéficiera de moyens nouveaux. L'allocation de rentrée scolaire sera doublée - 300 francs dans le primaire et 700 francs dans le secondaire - et complétée par les aides à l'achat de fournitures scolaires. Une aide à la restauration scolaire sera également versée aux gestionnaires des établissements. En outre, la modernisation du statut des instituteurs fait également l'objet d'une habilitation - c'est le 8° de l'article 1er - afin, notamment, de constituer un cadre unique d'instituteurs qui se substituera aux six corps actuels de fonctionnaires territoriaux. Dans le même esprit, un institut de formation des maîtres sera également créé à Mayotte.
Mesdames et messieurs les sénateurs, je crois que cette modernisation spécifique à Mayotte appelait ces précisions. Nous reparlerons ensemble de cette île au cours du débat qui sera consacré, le mois prochain, à son statut.
J'en arrive au deuxième volet du projet de loi.
L'habilitation permettra ensuite de moderniser le droit applicable dans plusieurs domaines qui appellent également une réponse.
C'est d'abord le cas à propos de l'entrée et du séjour des étrangers en Nouvelle-Calédonie. Plusieurs ordonnances ont été prises en la matière pour appliquer le droit commun issu de l'ordonnance du 2 novembre 1945. Elles sont d'ailleurs entrées en vigueur à Mayotte, en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna avant-hier, le 1er mai. En Nouvelle-Calédonie, cette modernisation n'avait pu être réalisée, notamment du fait de la réforme institutionnelle. La future ordonnance actualisera donc le droit applicable.
C'est ensuite la sûreté et la sécurité des aérodromes dans les territoires d'outre-mer, en Nouvelle-Calédonie et à Mayotte qui doivent être modernisées, afin que notre pays respecte les exigences de l'Organisation de l'aviation civile internationale, l'OACI, notamment grâce à l'extension des dispositions de droit commun du code de l'aviation civile.
Enfin - et c'est le troisième objectif de ce texte -, le projet de loi d'habilitation concerne les règles applicables aux transports intérieurs dans les départements d'outre-mer, d'une part, et aux privatisations, d'autre part.
La loi du 25 octobre 1999 avait déjà habilité ce Gouvernement à légiférer par ordonnances pour adapter, en ce qui concerne les départements d'outre-mer, la loi d'orientation des transports intérieurs, la LOTI. Un débat avait été engagé avec les transporteurs sans qu'un texte puisse recevoir l'aval de l'ensemble des parties.
Le Gouvernement a alors sollicité l'avis du Conseil d'Etat, qui, il y a quelques mois, s'est prononcé sur plusieurs questions fondamentales. Aussi le Gouvernement est-il prêt aujourd'hui à traduire plusieurs propositions de réforme dans une ordonnance. Celle-ci pourrait notamment instituer un établissement public administratif avec les collectivités locales concernées, afin d'organiser le transport public des personnes. Les conventions de transport public de personnes actuellement en vigueur pourraient être prorogées afin de permettre une réorganisation efficace de ce secteur.
J'ajoute que, sur un sujet aussi sensible - nous en connaissons bien, vous et moi, l'importance dans les territoires et les départements d'outre-mer, et singulièrement dans ces derniers -, le dispositif qui sera adopté par voie d'ordonnance a bien sûr fait l'objet d'un intense travail de préparation et, surtout, de concertation, aussi bien avec les collectivités locales qu'avec l'ensemble des acteurs professionnels concernés par ce secteur.
Enfin, le Gouvernement souhaite rendre applicable dans les territoires outre-mer, à Mayotte et en Nouvelle-Calédonie la loi de 1986 sur les transferts de propriété d'entreprises du secteur public. Il s'agit là encore de combler une lacune dans le droit applicable outre-mer. Cela permettra d'envisager, dans le droit commun, l'évolution de certaines de ces sociétés.
Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, les précisions et les informations que je souhaitais vous apporter. Le Gouvernement, vous l'avez perçu, entend poursuivre la modernisation du droit applicable outre-mer et respecter les engagements pris, notamment vis-à-vis de la population de Mayotte. Ce sont ces raisons qui me conduisent aujourd'hui à vous demander de bien vouloir délivrer l'habilitation sollicitée. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen. - M. Lanier applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le Gouvernement a saisi le Sénat en première lecture d'une demande d'habilitation ayant pour objet d'adapter et d'actualiser le droit de l'outre-mer en utilisant la procédure des ordonnances.
Il s'agit d'autoriser le Gouvernement, en vertu de la procédure de l'article 38 de la Constitution, à opérer une modernisation du droit applicable dans les départements d'outre-mer, dans les territoires d'outre-mer, en Nouvelle-Calédonie et, surtout, dans la collectivité territoriale de Mayotte.
Aussi, dans un premier chapitre, la commission des lois a-t-elle examiné le régime législatif applicable aux collectivités d'outre-mer.
Il est de deux sortes.
Il s'agit premièrement du régime de l'assimilation législative.
Ce régime s'applique aux départements d'outre-mer et à Saint-Pierre-et-Miquelon. Il implique que les lois métropolitaines y sont de plein droit applicables, l'article 73 de la Constitution prévoyant seulement que « le régime législatif et l'organisation administrative des départements d'outre-mer peuvent faire l'objet de mesures d'adaptation nécessitées par leur situation particulière ».
A Saint-Pierre-et-Miquelon, collectivité territoriale depuis 1985, les lois sont applicables de plein droit, à quelques exceptions près.
Le second régime est celui de la spécialité législative.
Il s'applique dans les territoires d'outre-mer, en Nouvelle-Calédonie et à Mayotte.
Ainsi, l'applicabilité des textes législatifs dans ces collectivités est subordonnée à l'adoption d'une disposition expresse d'extension.
Seules les lois dites « lois de souveraineté », qui, en raison de leur objet, sont nécessairement destinées à régir l'ensemble du territoire de la République, s'appliquent automatiquement.
Ce principe de la spécialité législative trouve, pour les territoires d'outre-mer, son fondement dans l'article 74 de la Constitution, aux termes duquel « les territoires d'outre-mer de la République ont une organisation particulière tenant compte de leurs intérêts propres dans l'ensemble des intérêts de la République » et « les autres modalités » - que les aspects statutaires - « de leur organisation particulière sont définies et modifiées par la loi après consultation de l'assemblée territoriale intéressée ».
Bien que n'étant plus un territoire d'outre-mer depuis la loi constitutionnelle du 20 juillet 1998, la Nouvelle-Calédonie continue à être régie par ce même principe de spécialité.
Le principe de la spécialité législative s'applique également à la collectivité territoriale de Mayotte - mon collègue Simon Sutour et moi-même étions d'ailleurs à Mayotte voilà trois semaines - en vertu de l'article 10 de la loi du 24 décembre 1976.
Le projet de loi sur le statut de Mayotte, qui fera l'objet d'un examen en première lecture au Sénat au début du mois de juin, comme vous l'avez rappelé, monsieur le secrétaire d'Etat, précise le champ d'application du principe de spécialité.
Le principe demeurerait cependant celui de la spécialité pour les autres lois, ordonnances et décrets, qui ne seraient applicables à Mayotte que sur mention expresse, mais nous en débattrons longuement, je le pense, dans cette assemblée.
Dans un deuxième chapitre, la commission a voulu attirer l'attention du Parlement et du Gouvernement sur le danger qu'il y a à recourir trop fréquemment aux ordonnances, car il s'agit là d'une banalisation périlleuse.
Examinons cependant le respect par le projet de loi d'habilitation des dispositions de l'article 38 de la Constitution, avant d'en apprécier l'opportunité.
Mes chers collègues, quel est le régime juridique des ordonnances, lesquelles peuvent se définir comme « des actes faits par le Gouvernement avec l'autorisation du Parlement dans les matières qui sont du domaine de la loi » ?
Le recours aux ordonnances suppose une autorisation du législateur qui accepte de se dessaisir au profit de l'exécutif : cette habilitation doit donc être correctement délimitée. Le Conseil constitutionnel a été amené à préciser la portée de l'article 38 de la Constitution, aux termes duquel - je cite l'arrêt du Conseil constitutionnel - « le Gouvernement peut, pour l'exécution de son programme, demander au Parlement l'autorisation de prendre par ordonnances, pendant un délai limité, des mesures qui sont normalement du domaine de la loi ».
Le juge constitutionnel a tout d'abord exigé du Gouvernement qu'il spécifie la finalité des mesures qu'il entend prendre sur le fondement de l'habilitation. Enfin, dans l'article 38 de la Constitution, la possibilité de la délégation n'est conçue que pour un laps de temps limité. La loi d'habilitation doit fixer la date avant laquelle les ordonnances devront être prises, ainsi que la date butoir assignée au Gouvernement pour déposer le projet de loi de ratification.
Tel est le cas en l'espèce, puisqu'il est prévu que les ordonnances devront être prises au plus neuf mois après la promulgation de la loi, les projets de ratification des ordonnances devant être déposés devant le Parlement au plus tard trois mois après cette première date butoir.
Si le respect formel des dispositions de l'article 38 de la Constitution paraît donc assuré, monsieur le secrétaire d'Etat - nous vous en donnons acte -, on assiste, ainsi que l'avait déjà souligné la commission des lois lors de l'examen par le Sénat du projet de loi portant habilitation du Gouvernement à transposer par ordonnances plus de cinquante directives communautaires en octobre 2000, à une banalisation périlleuse du recours aux ordonnances.
Il s'agit là d'un dessaisissement préoccupant du Parlement. C'est en effet la sixième fois depuis son entrée en fonctions que le Gouvernement demande au Parlement de l'habiliter à prendre par ordonnances des mesures législatives. Il existe un risque réel, si le recours aux ordonnances se banalise, que ces dernières ne soient jamais ratifiées, même si elles peuvent l'être tacitement, nous le savons, par le biais de textes de loi postérieurs.
Or on observe que plus d'une quinzaine de projets de loi de ratification d'ordonnances sont actuellement en attente d'une inscription à l'ordre du jour du Parlement par le Gouvernement. Cette situation devrait encore se détériorer à partir de juillet prochain, date à laquelle les projets de loi de ratification des ordonnances prises avant le 4 mai 2001 sur le fondement de la loi d'habilitation du 3 janvier 2001 devront être déposés. Or ces ordonnances, très techniques, représentent un volume d'articles considérable.
La commission des lois appelle une nouvelle fois le Gouvernement à inscrire ces projets de loi de ratification d'ordonnances à l'ordre du jour.
Un troisième chapitre de notre rapport est consacré à l'économie du projet de loi.
L'article 1er énumère les huit matières pour lesquelles le Gouvernement envisage de légiférer par ordonnances, matières que vous avez rappelées voilà un instant, monsieur le secrétaire d'Etat. Le champ de l'habilitation est nécessairement très disparate, mais les différentes rubriques peuvent s'ordonner autour de trois objectifs principaux.
Le premier est la nécessité de doter la collectivité territoriale de Mayotte, dont le statut doit prochainement faire l'objet d'une évolution, d'une législation adaptée dans une optique de remise à niveau, notamment dans le domaine économique et social.
Le deuxième objectif est la reprise d'un programme d'ordonnances déjà commencé dans la précédente loi d'habilitation du 25 octobre 1999.
Il s'agit des dispositions concernant les transports intérieurs dans les départements de la Guadeloupe, de la Guyane et de la Martinique qui étaient prévues dans la précédente loi d'habilitation, mais qui n'avaient pu être adoptées dans le laps de temps imparti au Gouvernement du fait de l'hostilité des transporteurs locaux.
M. Georges Othily. Des Martiniquais !
M. José Balarello, rapporteur. Martiniquais peut-être, mais si les Guyanais sont d'accord, cela va simplifier le travail du Gouvernement.
Une ordonnance devrait également concerner les conditions d'entrée et de séjour des étrangers en Nouvelle-Calédonie, et notamment des ressortissants de l'Union européenne, et leurs conséquences sur l'ensemble du territoire de la République, complétant les ordonnances prises en la matière s'agissant des îles Wallis-et-Futuna, de la Polynésie française et de Mayotte dans le cadre de la précédente loi d'habilitation.
Troisièmement, des dispositions plus techniques concernent, d'une part, l'extension aux territoires de la Polynésie française et des îles Wallis-et-Futuna, à la Nouvelle-Calédonie et à Mayotte de la loi n° 86-612 du 6 août 1986 relative aux modalités des privatisations et, d'autre part, l'extension aux territoires de la Polynésie française et des îles Wallis-et-Futuna, à la Nouvelle-Calédonie et à Mayotte des dispositions législatives du code de l'aviation civile relatives à la sûreté et à la sécurité des aérodromes, où nous pouvons avoir une responsabilité un jour ou l'autre en cas d'accident.
L'article 2 prévoit la consultation des assemblées des différents territoires, départements ou collectivités intéressés par les projets d'ordonnance.
Enfin, l'article 3 définit les délais de l'habilitation : d'une part, le délai avant l'expiration duquel les ordonnances devront être prises, d'autre part, le délai imparti au Gouvernement pour déposer les projets de loi de ratification sur le bureau du Parlement.
Un délai de neuf mois est ainsi prévu pour permettre au Gouvernement de prendre les ordonnances envisagées, les projets de loi de ratification devant être déposés au cours des trois mois suivants. Le premier délai est ainsi de trois mois supérieur à celui qui est accordé au Gouvernement à l'automne 1999 par la dernière loi d'habilitation ; le second, en revanche, est le même.
Tout en soulignant une nouvelle fois les inconvénients qui s'attachent à une utilisation systématique de la procédure des ordonnances, la commission ne s'opposera pas à ce projet de loi d'habilitation, soucieuse de ne pas retarder davantage le processus de modernisation de la législation applicable outre-mer, la plupart des extensions et adaptations envisagées répondant à des demandes pressantes des collectivités concernées.
En conclusion, monsieur le secrétaire d'Etat, je formulerai une interrogation. Qu'en est-il de l'habilitation prévue dans le projet de loi statutaire sur Mayotte concernant les dispositions de droit civil relatives aux personnes ? Il y a là de réels problèmes de constitutionnalité et de compatibilité avec des conventions internationales, telle la convention européenne des droits de l'homme, problèmes dont l'examen ne saurait être soustrait au Parlement ; une deuxième mission que nous avons menée à Mayotte nous a confirmés dans ce sentiment. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants du RPR et de l'Union centriste. - M. Bret applaudit également.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.

Article additionnel avant l'article 1er



M. le président.
Par amendement n° 1 rectifié, M. Lauret et les membres du groupe du Rassemblement pour la République et apparentés proposent d'ajouter, avant l'article 1er, un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans le premier alinéa de l'article L. 5911-1 du code général des collectivités territoriales, les mots : "d'outre-mer" sont remplacés par les mots : "françaises d'Amérique".
La parole est à M. Lauret.
M. Edmond Lauret. Cet amendement a pour objet de mettre en cohérence les articles 1er et 62 de la loi d'orientation pour l'outre-mer votée définitivement le 15 novembre 2000 par l'Assemblée nationale.
Le texte proposé au vote des députés après l'échec de la commission mixte paritiare prévoyait, d'une part, la bidépartementalisation de la Réunion et, d'autre part, l'instauration d'un congrès dans les départements français d'Amérique.
L'article 1er, adopté par les deux assemblées, consacrait formellement cette possibilité d'évolution séparée en interdisant toute possibilité d'évolution statutaire pour la Réunion, et ce conformément à la volonté unanime de sa population et de tous ses élus.
En visite à la Réunion en janvier dernier, M. le Premier ministre a d'ailleurs approuvé à nouveau cette disposition en déclarant : « La loi relève aussi, dès son article 1er, que la Réunion souhaite conserver un statut de droit commun. La Réunion ne sera donc en rien concernée par les éventuelles évolutions institutionnelles des trois autres départements d'outre-mer. »
Mais, en retirant les dispositions relatives à la bidépartementalisation de la Réunion en dernière lecture - par crainte de la sanction prévisible du Conseil constitutionnel -, les députés ont « omis » de préciser que le Congrès ne devait s'appliquer qu'aux départements français d'Amérique, conformément à l'article 1er.
Formellement, il en résulte une contradiction dans la loi entre l'article 1er, qui, respectant l'attachement des Réunionnais à ce que l'organisation de leur île s'inscrive dans le droit commun, accorde aux seuls départements d'Amérique la capacité de proposer des évolutions statutaires, et l'article 62, qui, au contraire, propose au congrès de délibérer de toute proposition d'évolution institutionnelle et de toute proposition relative à de nouveaux transferts de compétences.
Cet amendement prévoit donc la suppression de cette contradiction, conformément à la volonté du législateur et du Gouvernement, afin de rassurer la population et les investisseurs concernés.
L'outre-mer, en particulier la Réunion, a besoin de sérénité sur le plan statutaire. En votant cet amendement, le Parlement participera à cet objectif.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. José Balarello, rapporteur. La commission émet un avis favorable.
En effet, cet amendement précise qu'il n'est pas créé de congrès à la Réunion, contrairement à ce qui se passe pour la Guadeloupe, la Martinique et la Guyane. Il s'agit certes, nous en sommes conscients, d'un cavalier, mais la commission des lois, suivant en cela l'opinion de la population réunionnaise, s'est toujours opposée à la création d'un congrès.
Le congrès n'était prévu que dans les régions monodépartementales d'outre-mer et ne devait donc pas s'appliquer à la Réunion dans l'optique de la création d'un deuxième département à la Réunion. Le Gouvernement ayant renoncé à la bidépartementalisation, il n'est pas normal que la disposition relative au congrès demeure alors que ni le Gouvernement ni les élus réunionnais ne la souhaitaient à l'origine.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement, les élus réunionnais, la commission des lois sont, à l'évidence, au moins d'accord sur un point : personne n'entend favoriser la tenue d'un congrès à la Réunion. Au demeurant votre amendement, monsieur le sénateur, pose différentes questions et me conduira dans un instant à donner, au nom du Gouvernement, un avis défavorable.
Ma première raison est d'ordre juridique. De la bouche même de M. le rapporteur, j'ai pu entendre que cet amendement était, hélas ! inconstitutionnel. En effet, M. Balarello a dit clairement à l'instant que c'était un cavalier législatif dépourvu de tout lien avec le texte que le Sénat examine cet après-midi. Or les cavaliers, vous le savez, sont proscrits aussi bien par le règlement du Sénat que par la jurisprudence du Conseil constitutionnel.
Toujours sur le terrain constitutionnel, cet amendement m'a conduit, monsieur le sénateur, à relire une décision du Conseil constitutionnel du 7 décembre 2000 que vous connaissez bien, puisque vous étiez de ceux qui avaient saisi le Conseil constitutionnel à cette occasion. Comme vous êtes un excellent juriste, je sais que vous avez forcément médité la décision du Conseil constitutionnel que vous aviez sollicitée. Cette décision précisait très clairement qu'il n'était pas possible, même si chacun sait bien l'attachement des Réunionnais au droit commun, voire leur hostilité à toute réforme statutaire qui les conduirait de près ou de loin à faire évoluer la situation juridique de leur département, à la différence d'ailleurs d'autres départements, d'opérer, en l'état de notre Constitution, une distinction parmi les départements d'outre-mer. C'est le second motif d'inconstitutionnalité de cet amendement. C'est au moins ainsi que le Conseil constitutionnel, voilà seulement quelques mois, en avait jugé.
Monsieur Lauret, je suis comme vous profondément convaincu que les élus réunionnais et la population de la Réunion ne souhaitent pas voir évoluer le statut de département d'outre-mer qui est celui de leur île.
C'est pourquoi, au-delà de l'aspect constitutionnel et juridique, je pense que cet amendement n'est ni nécessaire ni utile. En effet, vous le savez, dans la loi d'orientation, c'est seulement à la demande du conseil général ou du conseil régional que peut se réunir le congrès. En d'autres termes, le congrès n'existera que là où les élus le souhaiteront.
Il est des départements où les élus le souhaitent. M. Othily le sait bien pour la Guyane, M. Lise pourrait le dire également pour la Martinique et Mme Michaux-Chevry pour la Guadeloupe.
A la Réunion, le congrès n'est pas souhaité. Par conséquent, pourquoi faudrait-il modifier cet article du code général des collectivités territoriales qui a été voulu et débattu dans le cadre de la loi d'orientation ?
Le Gouvernement a voulu inscrire dans la loi une possibilité d'évolution institutionnelle pour les départements français d'Amérique. Mais ces réformes ne prendront réalité, le moment venu, qu'après consultation de la population.
En effet, qu'il s'agisse d'organisation territoriale - j'ai eu l'occasion de le dire récemment à la Réunion - ou qu'il s'agisse d'évolution substantielle des statuts, il est indispensable - c'est un passage obligé si l'on a le souci de promouvoir la démocratie de proximité que les populations soient consultées.
En tout cas, s'agissant de la Réunion, toutes les garanties me semble réunies pour permettre au Gouvernement de donner un avis défavorable sur cet amendement.
M. Jacques Larché, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jacques Larché, président de la commission. Monsieur le secrétaire d'Etat, au-delà des questions de procédures, l'amendement, qui a recueilli un soutien déterminé de la commission, pose une question de principe, sur laquelle je souhaite appeler votre attention.
Laissons de côté les problèmes de procédure. Sachez, monsieur le secrétaire d'Etat, que, si vous vouliez engager le débat sur ce terrain, nous pourrions vous répondre sur l'abus des ordonnances, ce que nous ne faisons pas. Nous sommes donc à égalité, et je souhaiterais que l'on n'insiste pas sur ce point.
Venons-en à l'outre-mer français. Vous en avez une vue monolithique, c'est-à-dire que vous voulez traiter de la même manière les Antilles, la Guyane et la Réunion, alors que les situations sont totalement différentes.
De la mission que nous avons conduite, je suis revenu avec une impression dont j'ai voulu immédiatement faire part à M. le Premier ministre et à M. le Président de la République : il faut adapter les évolutions en fonction des situations.
Que vous le vouliez ou non - M. Georges Othily ne me contredira pas - la Guyane, ce n'est pas la Martinique ; la Martinique, ce n'est pas la Réunion.
Nous sommes très ouverts - nous l'avons dit - à des évolutions institutionnelles. Sur ce point, nous ne pratiquons aucun blocage. Mais quand on constate, comme c'est le cas de la Polynésie, que nos concitoyens sont satisfaits de leur statut, on se demande pourquoi toucher à celui-ci, même si nous avons, par ailleurs, une loi constitutionnelle sur le coeur, et que nous aimerions bien la voir venir un jour ?
A la Réunion, nos concitoyens ne réclament aucune modification. Alors, pourquoi vouloir surcharger les institutions d'un congrès qui ne servira à rien ? Nos compatriotes de la Réunion vous ont montré avec netteté qu'ils ne voulaient pas de ce que vous leur proposiez. Respectez leur décision ! Ils ne veulent pas de congrès parce qu'ils estiment qu'ils n'ont pas à engager une réflexion sur le changement de leur statut.
En revanche, j'aurais souhaité que l'on reconnaisse à nos compatriotes des Antilles ou de la Guyane la possibilité de réunir un congrès, parce qu'une grande réflexion doit s'y engager sur une évolution institutionnelle indispensable ; mais ne mélangez pas tout ! Si vous voulez traiter de manière monolithique toutes les composantes de l'outre-mer français, vous aboutirez à un échec. Vous avez une lourde responsabilité en ce domaine ; prenez garde !
Nous attachons donc une grande importance à l'adoption de cet amendement, qui conditionnera peut-être notre vote sur l'ensemble. Il ne s'agit pas de jouer avec la Réunion, ni de mettre en place des mesures qui n'ont aucun effet pratique. Mes collègues adopteront sans doute cet amendement, mais j'insiste, monsieur le secrétaire d'Etat, pour que vous n'adoptiez pas une attitude trop statique.
M. Christian Paul, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Paul, secrétaire d'Etat. Je me réjouis que cet amendement n° 1 rectifié nous permette d'avoir, fût-ce pour un bref moment, un véritable débat de fond sur ce que sont aujourd'hui et ce que pourront être à l'avenir les institutions locales de l'outre-mer.
Je me suis tout à l'heure délibérément placé sur le terrain constitutionnel. Je laisse de côté le caractère de « cavalier » de l'amendement : ce ne serait ni le premier ni sans doute le dernier cavalier qu'adopterait le Parlement. Selon la jurisprudence très récente du Conseil constitutionnel, il n'est guère concevable de faire une distinction entre les différents départements d'outre-mer et d'exclure tel d'entre eux de l'application d'une disposition de cette nature.
S'agissant de l'intention que, monsieur le président de la commission des lois, vous prêtez au Gouvernement, je tiens à préciser l'orientation politique de fond qui l'a guidé depuis 1997, une orientation qui correspond d'ailleurs à ma propre conviction : le Gouvernement considère que l'outre-mer doit être une école de la diversité dans la République. Compte tenu de la diversité des situations géographiques et de l'histoire de ces départements ou territoires, nous devons apporter, sur le plan institutionnel, des réponses différenciées.
C'est bien ce gouvernement qui a adopté, à travers l'accord de Nouméa, une approche spécifique pour la Nouvelle-Calédonie.
M. Jacques Larché, président de la commission. Avec notre soutien !
M. Christian Paul, secrétaire d'Etat. Avec le soutien d'une très large majorité des forces politiques de notre pays.
C'est ce gouvernement qui a proposé au Parlement - nous en avons déjà débattu à l'Assemblée nationale et nous en débattrons bientôt au Sénat - un statut pour Mayotte. Ce statut fait certes progresser par étapes Mayotte vers le droit commun des départements, mais il n'en reste pas moins que Mayotte attendait depuis vingt-cinq ans une réponse adaptée à sa situation.
Enfin, s'agissant des quatre départements d'outre-mer - la Réunion et les trois départements français d'Amérique -, c'est bien ce gouvernement, permettez-moi, monsieur le président Larché, de le rappeler - et je sais que, sur ce point, nous sommes en phase, pour ne pas dire en sympathie intellectuelle et politique -, qui, à l'article 1er de la loi d'orientation pour l'outre-mer, lequel article constitue une sorte de « préambule » de cette loi, a fait en sorte que soit reconnu de façon forte, pour la première fois depuis la loi de 1946, le droit à l'évolution différenciée pour les départements d'outre-mer.
Evolution différenciée, cela veut dire - vous avez raison - que ce qui vaut pour la Guyane ne vaut pas forcément pour la Guadeloupe, que ce qui vaut pour la Martinique ne vaut pas forcément pour la Réunion.
Nous avons très clairement invité le Parlement, qui a répondu favorablement à cet appel, à reconnaître ce droit à une évolution différenciée, rompant effectivement, concernant l'outre-mer français, avec des approches successives de l'outre-mer qui avaient pour point commun d'être statiques et, parfois, monolithiques.
Nous sommes donc bien là unis par une volonté d'apporter des réponses différentes à des attentes spécifiques.
Pour ce qui est du congrès, j'ai rappelé simplement que la Constitution, en l'état - et il faudra peut-être un jour, sur ces questions, la faire évoluer - ne permet pas, ainsi que le Conseil constitutionnel l'a indiqué, de mettre en place ce dispositif uniquement pour trois départements sur quatre. C'est le seul obstacle constitutionnel que j'ai cru pouvoir identifier.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 1 rectifié.
M. Lucien Lanier. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lanier.
M. Lucien Lanier. Monsieur le secrétaire d'Etat, tout a été clairement dit, en particulier par M. le président de la commission des lois et par M. le rapporteur, mais je connais trop votre bon sens pour ne pas estimer que je dois, en cet instant, faire appel à lui.
Car enfin, pourquoi voulez-vous faire le bonheur des peuples malgré eux ? Je suis quand même très étonné de cette attitude ! Pourquoi voulez-vous absolument mettre dans le même moule des départements d'outre-mer qui sont, à bien des égards, très différents les uns des autres et dont nous proclamons tous, vous et nous, la diversité ?
La Guyane, la Martinique et la Gaudeloupe constituent déjà trois entités bien différentes. Cela est évidemment encore plus vrai pour la Réunion, qui a de surcroît, par rapport aux trois autres, une situation géographique totalement différente, où le climat n'est pas le même, où les mentalités ne sont pas non plus les mêmes. Pourquoi, dès lors, faudrait-il couler ce département dans un moule qui serait celui des autres ?
Vous nous invitez à bien lire le texte et vous invoquez la jurisprudence du Conseil constitutionnel. Tout à coup, vous vous réfugiez derrière le Conseil constitutionnel et la Constitution, sans me convaincre d'ailleurs par vos arguments.
Et puis vous nous dites que cet amendement est un cavalier. Là encore, vous ne me convainquez pas, car il a trait directement au sujet : il n'arrive pas comme un cheveu sur la soupe !
Pourquoi voulez-vous donner un congrès à la Réunion alors qu'elle a manifesté qu'elle n'en voulait pas ? Vous arguez que la question ne se posait pas dans la mesure où il était question de créer deux départements mais que, puisque cela n'a pas été accepté et que la Réunion est restée monodépartementale, il faut ipso facto , lui appliquer la règle des autres régions monodépartementales. Je ne vois pas du tout les raisons pour lesquelles on imposerait à des gens qui n'en veulent pas un congrès qui n'était pas compris dans la monodépartementalisation.
Tout cela est contenu dans l'article 1er de la loi d'orientation pour l'outre-mer, qui établit précisément une différenciation pour la Réunion. Qu'on me pardonne de rappeler encore, après M. Lauret, ce que disait le Premier ministre le 26 janvier dernier à la Réunion : « La loi relève aussi, dès son article 1er, que la Réunion souhaite conserver un statut de droit commun. La Réunion ne sera donc en rien concernée par les éventuelles évolutions institutionnelles des trois autres départements d'outre-mer. »
M. le Premier ministre parlait d'or, et je souhaite seulement, monsieur le secrétaire d'Etat, que votre parole soit du même métal ! Vous prétendez que cet amendement ne sert à rien puisque, de toute façon, vous consulterez les populations et que le texte tel qu'il est permet précisément de ne pas accorder un congrès à la Réunion. Monsieur le secrétaire d'Etat, si les choses vont sans le dire, elles vont encore mieux en le disant !
M. Edmond Lauret. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lauret.
M. Edmond Lauret. Si nous avons été obligés de rattacher cet amendement à ce projet de loi, c'est simplement parce que les projets de loi relatifs à l'outre-mer sont devenus excessivement rares, le Gouvernement ayant pris la mauvaise habitude de privilégier les ordonnances. D'ailleurs, dans son rapport, M. le rapporteur de la commission des lois a regretté cette pratique contestable de recours systématique aux ordonnances qui limite les prérogatives du Parlement.
Au demeurant, la seule loi relative à l'outre-mer, en quatre ans, qui ait été votée sous le gouvernement actuel n'est pas encore applicable. Or il est urgent de supprimer ce congrès dont personne ne veut à la Réunion : ni la population ni les différentes familles politiques. Cette institution, qui nous fait sortir du droit commun, inquiète la population et décourage les investisseurs.
J'ajouterai que cette rédaction de l'article 62 pollue le débat démocratique local à un an des importantes échéances de 2002, chacune des parties rejetant sur l'autre la responsabilité de cette innovation institutionnelle. Globalement, les responsables de la gauche argumentent - à tort, à mon sens - que le congrès est la conséquence nécessaire du refus de la bidépartementalisation par la droite, et la droite reproche aux députés de gauche de ne pas avoir fait correctement leur travail en retirant, en dernière lecture, le texte sur la bidépartementalisation sans réserver expressément le congrès aux départements français d'Amérique. Or tout le monde est contre ce congrès !
Il est donc nécessaire de ramener immédiatement la sérénité dans le département de la Réunion en supprimant cette institution dont personne ne veut, pas même le Premier ministre.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1 rectifié, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 1er.

Article 1er



M. le président.
« Art. 1er. - Dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution et sous réserve de la compétence de la loi organique, le Gouvernement est autorisé à prendre, par ordonnances, les mesures nécessaires pour actualiser et adapter le droit applicable dans les départements de la Guadeloupe, de la Guyane et de la Martinique et pour rendre applicables en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna, ainsi qu'en Nouvelle-Calédonie et dans la collectivité territoriale de Mayotte en tenant compte des intérêts propres à chacun de ces territoires et de la Nouvelle-Calédonie dans l'ensemble des intérêts de la République ou de la situation particulière de la collectivité territoriale de Mayotte, les lois en vigueur, dans les domaines suivants :
« 1° Transports intérieurs dans les départements de la Guadeloupe, de la Guyane et de la Martinique ;
« 2° Extension aux territoires de la Polynésie française et des Iles Wallis et Futuna, à la Nouvelle-Calédonie et à Mayotte de la loi n° 86-912 du 6 août 1986 relative aux modalités d'application des privatisations ;
« 3° Extension aux territoires de la Polynésie française et des Iles Wallis et Futuna, à la Nouvelle-Calédonie et à Mayotte des dispositions législatives du code de l'aviation civile relatives à la sûreté et à la sécurité sur les aérodromes ;
« 4° Conditions d'entrée et de séjour des étrangers en Nouvelle-Calédonie et leurs conséquences sur l'ensemble du territoire de la République ;
« 5° Protection sanitaire et sociale à Mayotte en matière d'allocations et de prestations familiales, d'aide à la famille, d'aide aux personnes âgées et handicapées, d'assurance vieillesse, de prise en charge des dépenses de santé et d'organisation des soins, de réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles ; mesures d'organisation et d'administration correspondantes ;
« 6° Droit du travail et de l'emploi à Mayotte en matière d'aide à la création d'emplois, de maintien de l'exploitation agricole familiale, de formation, de création d'entreprise, d'instauration d'un régime d'indemnisation du chômage, de congé de maternité, d'organisation et de développement des activités d'utilité sociale ;
« 7° Règles applicables à l'exercice de l'activité des travailleurs indépendants, des agriculteurs et des pêcheurs à Mayotte ;
« 8° Statut des instituteurs à Mayotte. »
Par amendement n° 2, le Gouvernement, propose :
I. - Dans le premier alinéa de cet article, après les mots : « Wallis et Futuna », d'insérer les mots : « et dans le territoire des Terres australes et antarctiques françaises ».
II. - De compléter in fine cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« 9° Armement des navires dans le territoire des Terres australes et antarctiques françaises. »
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Paul, secrétaire d'Etat. Le comité interministériel de la mer de juillet 2000 avait décidé de faire évoluer le registre d'immatriculation des navires des Terres australes et antarctiques françaises afin de le rendre plus attractif et de lui permettre de mieux garantir les conditions de travail des marins embarqués.
Je sais que, parmi vous, certains, notamment M. Lanier, sont très attentifs à l'avenir des Terres australes et antarctiques françaises. Ils seront donc sûrement très sensibles à cet amendement. Peut-être même le voterez-vous, monsieur Lanier...
Un relevé de conclusions a récemment été établi par les partenaires sociaux, et les discussions qui ont été menées permettent en particulier de faire évoluer les conditions de fixation de la proportion minimale de marins français embarqués. Cette proportion est actuellement définie, aux termes de la loi de 1996, par voie réglementaire. Le protocole prévoit qu'elle pourra dorénavant l'être également par des accords d'entreprise conclus dans chaque armement.
Le Gouvernement appuie ce processus qui donne de la souplesse dans la gestion des effectifs et renforce l'attractivité du registre des Terres australes et antarctiques françaises, ce qui est de nature à y soutenir l'emploi.
La mise en oeuvre de ce protocole nécessite cependant une modification législative sur les conditions de fixation de la proportion de marins français embarqués en introduisant la possibilité d'une référence à un accord d'entreprise. Le présent amendement tant à prévoir que ce point pourra être traité par ordonnance.
J'indique dès à présent que l'amendement n° 3, que nous avons déposé à l'article 3, est un amendement de conséquence. Il prévoit la consultation du Conseil des Terres australes et antarctiques françaises sur l'ordonnance qui fait l'objet de l'amendement n° 2.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. José Balarello, rapporteur. La commission est favorable à cet amendement, qui a pour objet de rendre plus attractive l'immatriculation des navires marchands et de croisière dans le territoire des Terres australes, d'autant qu'un accord est intervenu sur ce point entre les armateurs, les organisations syndicales et le comité interministériel à la mer.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 2.
M. Henri de Richemont. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. de Richemont.
M. Henri de Richemont. Je m'exprimerai en mon nom personnel et au nom du groupe d'étude de la mer du Sénat qui, bien que regrettant le dépôt tardif de cet amendement, reconnaît qu'il vise à débloquer la situation relative aux conditions d'armement des navires immatriculés dans les Terres australes et antarctiques françaises.
Votre exposé des motifs rappelle avec justesse, monsieur le secrétaire d'Etat, le difficile processus de négociation entre le comité central des armateurs de France et les organisations syndicales de marins. Il faut aboutir, et tout ce qui pourra y contribuer est bienvenu, dans le respect des normes convenues à l'échelon européen.
La procédure de l'ordonnance donne certes la maîtrise du jeu à l'exécutif, mais, si elle permet de débloquer la situation, il faut soutenir cet amendement, comme le font la commission et le groupe de la mer du Sénat.
Cet amendement suscite toutefois notre perplexité. Quel que soit l'intérêt que nous portons tous, et plus particulièrement notre collègue Lanier, aux Terres australes et antarctiques françaises, je me demande s'il est encore opportun de soutenir le pavillon bis. Ne faudrait-il pas imiter tous nos partenaires de l'Union européenne et rendre plus attractif le pavillon national sous lequel à peine 1 % de navires est désormais immatriculé ?
Le moment n'est-il pas venu, monsieur le secrétaire d'Etat, de convaincre M. le ministre de l'économie et des finances de mettre un terme à la taxation au tonnage ? En continuant en y recourir contrairement à tous les pays de l'Union européenne, la France a ainsi facilité la tâche de ses partenaires qui ont pu récupérer des navires immatriculés sous pavillon dit de libre immatriculation, c'est-à-dire sous pavillon de complaisance. Nous avons intérêt à rendre notre pavillon plus attractif, et donc à prendre les dispositions nécessaires.
En attendant le soutien de Bercy pour que la France cesse d'être à la traîne dans ce domaine, nous voterons bien entendu, l'amendement n° 2. (« Très bien ! » et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. Lucien Lanier. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lanier.
M. Lucien Lanier. Monsieur le secrétaire d'Etat, je suis heureux des paroles que vous avez prononcées sur ce pavillon des Terres australes et antarctiques françaises, que l'on appelle « pavillon des Kerguelen ». J'adhère également aux déclarations de mon collègue Henri de Richemont.
En effet, si l'amendement n° 2 et le suivant permettent de régler enfin un conflit qui s'enlise, ils sont bienvenus.
L'idéal serait cependant de rendre le pavillon français concurrentiel grâce à la liberté qui lui serait accordée. Vaste programme, me direz-vous. J'en suis conscient, et c'est la raison pour laquelle, personnellement, je voterai, comme mon groupe, cet amendement.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 2, accepté par la commission.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er, ainsi modifié.

(L'article 1er est adopté.)

Article 2



M. le président.
« Art. 2. - Les projets d'ordonnance mentionnés à l'article 1er sont soumis pour avis :
« 1° Lorsque leurs dispositions sont relatives à la Guadeloupe, à la Guyane ou à la Martinique, au conseil général et au conseil régional du département en cause dans les conditions prévues aux articles L. 3444-1 et L. 4433-3-1 du code général des collectivités territoriales ;
« 2° Lorsque leurs dispositions sont relatives à la Polynésie française ou à la Nouvelle-Calédonie, aux institutions compétentes prévues respectivement par la loi organique n° 96-312 du 12 avril 1996 portant statut d'autonomie de la Polynésie française et par la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie ;
« 3° Lorsque leurs dispositions sont relatives au territoire des Iles Wallis et Futuna ou à la collectivité territoriale de Mayotte, respectivement à l'assemblée territoriale des Iles Wallis et Futuna ou au conseil général de Mayotte. L'avis est alors émis dans le délai d'un mois ; ce délai expiré, l'avis est réputé avoir été donné. »
Par amendement n° 3, le Gouvernement propose de compléter, in fine, cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« 4° Lorsque les dispositions sont relatives au territoire des Terres australes et antarctiques françaises et ont une incidence sur son budget, au conseil consultatif des Terres australes et antarctiques françaises. »
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Paul, secrétaire d'Etat. Cet amendement a déjà été défendu.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. José Balarello, rapporteur. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 3, accepté par la commission.
M. Lucien Lanier. Le groupe du RPR vote pour.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 2, ainsi modifié.

(L'article 2 est adopté.)

Article 3



M. le président.
« Art. 3. - Les ordonnances prévues à l'article 1er seront prises, au plus tard, le dernier jour du neuvième mois commençant après la promulgation de la présente loi. Les projets de loi de ratification des ordonnances seront déposés devant le Parlement, au plus tard, le dernier jour du douzième mois commençant après la promulgation de la présente loi. » - (Adopté.)

Vote sur l'ensemble



M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Lagauche, pour explication de vote.
M. Serge Lagauche. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, en la circonstance, le Gouvernement nous propose de procéder à la modernisation et à l'adaptation du droit applicable outre-mer par voie d'ordonnances.
Ce projet de loi est conforme à la Constitution ; en effet, il répond à toutes les exigences rappelées par le juge constitutionnel. C'est notamment le cas de l'article 1er, qui précise que la finalité est « d'actualiser et d'adapter le droit » outre-mer et détaille les domaines d'intervention. Le groupe socialiste l'approuve donc.
Concernant l'outre-mer, le recours aux ordonnances est assez fréquent. L'article 74 de la Constitution nous rappelle que les territoires d'outre-mer sont régis par le principe de la spécialité législative. Les règles en vigueur dans ces territoires ne peuvent résulter que de textes qui leur sont spécifiques ou de textes généraux dont l'application outre-mer est expressément mentionnée. Quant aux départements d'outre-mer, les lois s'y appliquent de plein droit sans mention spécifique.
Toutes ces modalités particulières d'application de textes législatifs expliquent le retard du droit en vigueur outre-mer.
Périodiquement, le Gouvernement est amené à déposer des projets de loi portant diverses dispositions relatives à l'outre-mer, projets de loi un peu fourre-tout, comportant des dispositions hétéroclites et souvent techniques. Nous savons que ces projets de loi portant DDOM ne suscitent guère l'enthousiasme du législateur, qui s'en accommode tant bien que mal.
Les domaines visés par ce projet de loi sont fort bien explicités dans le rapport de la commission des lois, et je n'y reviendrai donc pas.
Tous les sujets visés par ce projet de loi d'habilitation nécessitent une action urgente. Cependant, je soulignerai plus particulièrement deux points : les transports intérieurs dans les départements de la Guadeloupe, de la Guyane et de la Martinique et le développement social à Mayotte.
Le premier point a déjà fait l'objet d'une loi d'habilitation. Mais l'ordonnance n'a pu aboutir, faute d'avoir reçu l'accord des collectivités territoriales en raison de l'hostilité des transporteurs.
Aussi, je me réjouis qu'aujourd'hui un accord sur les termes de la future ordonnance, dont les grandes lignes sont précisées dans l'exposé des motifs, ait pu se dégager pour sortir d'une situation extrêmement difficile qui dure depuis de trop nombreuses années.
En ce qui concerne Mayotte, où l'attente est très forte, ces ordonnances mettront en place une nouvelle politique sociale, qui s'inscrit dans une logique de développement durable de l'île.
Ces ordonnances doivent être rapprochées du projet de loi sur le statut de Mayotte que nous allons examiner dans quelques semaines. Ce processus marque la volonté du Gouvernement de traduire rapidement dans les faits l'accord sur l'avenir de Mayotte signé le 27 janvier 2000. Il s'agit de mettre un terme à une incertitude institutionnelle de vingt-cinq ans, de stimuler le développement économique et de donner de nouveaux droits sociaux aux Mahorais.
Tout en tenant compte des particularismes, ces ordonnances mettront progressivement un terme à des disparités injustifiées notamment dans le domaine de l'enfance et de la famille. Ces mesures sont justes et d'une urgente nécessité.
Le groupe socialiste se félicite du calendrier annoncé pour la mise en oeuvre de ces ordonnances et votera bien sûr ce projet de loi.
M. le président. La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le recours à la procédure des ordonnances de l'article 38 de la Constitution pour assurer l'actualisation et l'adaptation du droit devient une habitude.
Comme l'a rappelé M. le rapporteur, c'est en effet la troisième fois en un an et demi que le Gouvernement nous soumet un texte qui l'autorise à se substituer au législateur. Après la partie législative de certains codes et la transposition de cinquante et une directives communautaires, vient, aujourd'hui, le droit applicable à l'outre-mer.
Ces dérogations successives au principe de la séparation des pouvoirs posé par les articles 34 et 37 de la Constitution ne peuvent être banalisées.
En effet, elles privent le Parlement de la simple possibilité de débattre, alors que celui-ci dispose normalement d'un réel pouvoir de légiférer et que son rôle ne se cantonne pas, par conséquent, à formuler un simple avis.
A chaque fois, les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen réaffirmeront leur opposition de principe à cette méthode.
A l'heure où le Gouvernement et les parlementaires s'accordent pour réviser l'ordonnance de 1959 afin de réaffirmer plus fortement le rôle et les prérogatives du Parlement lors de la procédure budgétaire, n'est-il pas contradictoire de multiplier les recours, lesquels ne respectent pas les droits de la représentation nationale ?
Sous réserve de ces observations, nous avons entendu, monsieur le secrétaire d'Etat, vos arguments relatifs à l'encombrement du calendrier parlementaire et à la nécessité de légiférer rapidement, pour répondre aux urgences sociales de l'outre-mer en actualisant et en adoptant par ordonnances le droit applicable outre-mer, comme cela nous est proposé.
Huit matières sont énumérées dans ce projet de loi : transports intérieurs, modalités de privatisation, sûreté et sécurité des aérodromes, conditions d'entrée et de séjour des étrangers, protection sanitaire et sociale en matière d'allocations et de prestations familiales, droit du travail et emploi, règles applicables à l'exercice de l'activité des travailleurs indépendants, des agriculteurs et des pêcheurs et statut des instituteurs.
Ces questions, qui font l'objet, on le sait, d'un consensus local, ne sont pas nouvelles ; toutes existent déjà dans notre droit. Il ne s'agit, en quelque sorte, que d'élargir leur champ d'application.
Cette raison suffit à nous faire approuver ce projet de loi d'habilitation, d'autant qu'il s'agit de matières sur lesquelles le Parlement a déjà eu l'occasion de se prononcer.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)
M. le président. Je constate que ce texte a été adopté à l'unanimité. (Applaudissements sur l'ensemble des travées.)
M. Christian Paul, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Paul, secrétaire d'Etat. Je voudrais, bien sûr, me féliciter de l'adoption unanime par le Sénat de ce projet de loi d'habilitation.
J'ai entendu les réserves émises au-delà des critiques qui ont été formulées à l'égard du principe du recours aux ordonnances.
S'agissant de l'outre-mer - je n'élargirai pas mon propos -, ce recours se fondait sur la double nécessité d'étendre le droit applicable outre-mer et - dans le cas de Mayotte, chacun sait bien combien c'était impératif et urgent - de répondre concrètement à des situations de souffrance sociale.
Le Sénat connaît la situation de Mayotte. Je sais d'ailleurs, monsieur le rapporteur, que vous n'êtes pas revenu en parfaite santé d'une mission récente à Mayotte. Tout en vous souhaitant un prompt rétablissement, je vous remercie d'être allé mesurer sur place les difficultés de la population mahoraise. C'est bien pour répondre à cette situation d'urgence sociale que nous avons proposé ces ordonnances.
S'agissant de l'avenir des départements, d'outre-mer, j'espère, monsieur le président de la commission des lois, que nous aurons prochainement - peut-être à l'occasion du débat sur Mayotte - la possibilité d'en débattre plus à fond.
En tout cas, s'il est une conviction intangible du Gouvernement, c'est bien que l'évolution institutionnelle des départements d'outre-mer, qu'elle réclame ou non une révision de la Constitution, doit être choisie par leur population. Et c'est bien dans ce sens-là que le dialogue s'engage d'ailleurs aux Antilles, comme en Guyane. (Applaudissements sur l'ensemble des travées.)

9

NOMINATION DE MEMBRES
D'UNE COMMISSION MIXTE PARITAIRE

M. le président. Il va être procédé à la nomination de sept membres titulaires et de sept membres suppléants de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant règlement définitif du budget de 1998.
La liste des candidats établie par la commission des finances a été affichée conformément à l'article 12 du règlement.
Je n'ai reçu aucune opposition.
En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire :
Titulaires : MM. Alain Lambert, Philippe Marini, Roland du Luart, André Vallet, Jacques Oudin, Bernard Angels et Mme Marie-Claude Beaudeau ;
Suppléants : MM. Denis Badré, Joël Bourdin, Michel Charasse, Yann Gaillard, Marc Massion, Joseph Ostermann et Jacques Pelletier.

10

NOMINATION DE MEMBRES
D'ORGANISMES EXTRAPARLEMENTAIRES

M. le président. Je rappelle que la commission des affaires économiques a proposé des candidatures pour trois organismes extraparlementaires.
La présidence n'a reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par l'article 9 du règlement.
En conséquence, ces candidatures sont ratifiées et je proclame :
- MM. Philippe François et Rémi Herment membres de la commission consultative pour la production de carburants de substitution ;
- M. Jean Bizet membre de la commission nationale du débat public ;
- et MM. François Gerbaud, membre titulaire, et Jean-Pierre Plancade, membre suppléant du Conseil supérieur de l'aviation marchande.

11

GROUPEMENTS À CARACTÈRE SECTAIRE

Adoption d'une proposition de loi en deuxième lecture

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion en deuxième lecture de la proposition de loi (n° 431, 1999-2000), modifiée par l'Assemblée nationale, tendant à renforcer la prévention et la répression à l'encontre des groupements à caractère sectaire. [Rapport n° 192 (2000-2001).]
Dans la discussion générale, la parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, le Sénat examine aujourd'hui en deuxième lecture la proposition de loi sur les groupements sectaires déposée par M. About.
Il s'agit d'une proposition de loi importante, qui vient très opportunément compléter notre droit afin d'améliorer l'action des pouvoirs publics, déjà largement engagée comme M. Jean-Jack Queyranne avait eu l'occasion de vous l'indiquer lors de la première lecture de ce texte, à l'encontre du phénomène sectaire.
Je tiens donc à remercier M. About de son initiative, qui a permis à la représentation nationale de réfléchir de façon approfondie sur cette question douloureuse et complexe.
Douloureuse, parce que les dommages causés par les mouvements sectaires, essentiellement à l'encontre de personnes vulnérables et de leur famille, constituent une réalité incontestable.
Complexe, parce que la lutte légitime contre les dérives sectaires ne doit pas porter atteinte aux libertés individuelles et collectives que garantit un Etat démocratique soucieux de respecter les droits de l'homme.
M. Emmanuel Hamel. Très bien !

Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Cette problématique essentielle, qui avait guidé les travaux du Sénat en première lecture, a évidemment gouverné les débats devant l'Assemblée nationale.
Prenant en compte plusieurs propositions de loi déposées par des députés sur le sujet, et notamment celle de Mme Picard, l'Assemblée nationale a, comme vous le savez, modifié ou complété le texte initial sur plusieurs points.
En premier lieu, l'Assemblée nationale a remplacé la procédure de dissolution administrative envisagée par M. About, qui complétait à cette fin la loi de 1936 sur les groupes de combats et les milices privées, par une dissolution judiciaire.
Le texte adopté par l'Assemblée nationale est directement inspiré, sur le fond, de celui qui avait été initialement envisagé par M. About : la dissolution d'une personne morale n'est notamment possible que lorsque ont déjà été prononcées plusieurs condamnations pour certaines infractions limitativement énumérées.
La dissolution est toutefois décidée par le tribunal de grande instance, à l'issue d'une procédure judiciaire garantissant les droits de la défense, et non par décret du Président de la République.
Je me réjouis que la commission des lois du Sénat ait accepté ce dispositif, sous réserve de quelques modifications sur lesquelles je m'exprimerai lors de l'examen des amendements.
En second lieu - je cite brièvement ces dispositions car elles font l'objet d'un consensus entre les deux assemblées - la proposition de loi de M. About a été complétée, à la suite d'amendements déposés tant par la commission des lois de l'Assemblée nationale que par le Gouvernement, par plusieurs articles étendant la responsabilité pénale des personnes morales pour un certain nombre d'infractions, notamment de crimes ou délits contre les personnes, qui peuvent être commises au sein de mouvements sectaires.
Le bien-fondé de ces différentes dispositions est évident, notamment en ce qu'elles prévoient, pour les infractions les plus graves, la peine de dissolution.
L'Assemblée nationale a par ailleurs complété le texte par des dispositions limitant l'installation et la publicité des groupements sectaires.
La commission des lois du Sénat entend supprimer les deux dispositions donnant au maire la possibilité d'interdire à des groupements sectaires - dans des conditions similaires à celles qui sont prévues par l'article 1er sur la dissolution judiciaire - leur installation à moins de cent mètres de certains lieux sensibles, comme les écoles, ou de refuser la délivrance d'un permis de construire.
Elle s'est demandé si ces pouvoirs ne devaient pas être confiés aux préfets plutôt qu'aux maires, et des amendements en ce sens ont d'ailleurs été déposés par les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen et par les membres du groupe socialiste. Je m'expliquerai sur ce point lors de l'examen des amendements, tout en indiquant dès à présent que les interrogations de la commission des lois ne sont pas sans justification, mais qu'il s'agit là d'une question relativement complexe.
Enfin, l'Assemblée nationale a institué une nouvelle infraction : le délit de manipulation mentale.
Si l'amélioration de l'arsenal législatif en matière pénale paraissait justifiée, la création d'une telle infraction n'était toutefois pas sans soulever d'importantes difficultés au regard des risques d'atteintes aux libertés fondamentales.
Mon prédécesseur, Mme Elisabeth Guigou, avait fait part de ses interrogations lors de la discussion de ce texte devant l'Assemblée nationale, interrogations qui l'avaient conduite à saisir de cette question la Commission nationale consultative des droits de l'homme.
L'avis donné par cette commission, et que le Gouvernement a immédiatement remis à la commission des lois du Sénat et à son rapporteur, M. About, a permis d'approfondir la réflexion et de parvenir à une solution satisfaisante. Celle-ci, qui recueille également l'agrément de Mme Picard, consiste non pas à créer une nouvelle incrimination de manipulation mentale, mais à améliorer le délit d'abus frauduleux de l'état de faiblesse, en étendant légèrement les éléments constitutifs de cette infraction.
Ainsi modifié, ce délit permettra de condamner le fait d'abuser frauduleusement de l'état d'ignorance ou de la situation de faiblesse d'une personne en état de sujétion psychologique ou physique résultant de l'exercice de pressions graves ou réitérées ou de techniques propres à altérer son jugement pour conduire cette personne à un acte ou à une abstention qui lui sont gravement préjudiciables.
J'observe que le terme « sujétion » est préféré au terme « dépendance », et qu'une modification similaire est faite par la commission des lois du Sénat dans les autres dispositions de la proposition de loi. Cette expression paraît effectivement mieux appropriée.
La commission des lois du Sénat propose, par ailleurs, l'institution d'une circonstance aggravante lorsque l'infraction est commise par le dirigeant d'un groupement qui a pour objet de créer ou de maintenir de telles sujétions.
Elle propose, enfin, d'insérer cette infraction dans le livre II du code pénal consacré aux crimes et aux délits contre les personnes, dans lequel cette infraction a en effet plus sa place que dans le livre II du code consacré aux crimes et délits contre les biens, où elle figure actuellement.
Ces nouvelles dispositions permettent ainsi de réprimer en tant que telles les dérives sectaires, sans porter atteinte à la liberté de conscience.
Elles présentent ainsi un caractère équilibré et reçoivent en conséquence le plein accord du Gouvernement.
La proposition de loi de M. About me paraît constituer un exemple privilégié du rôle du Parlement dans la recherche de solutions aux problèmes que peut connaître notre société.
Le phénomène sectaire existe depuis de nombreuses années, et il a donné lieu à des prises de conscience successives de l'opinion publique et des pouvoirs publics qui ont permis d'améliorer progressivement les conditions dans lesquelles ce phénomène doit être maîtrisé et combattu.
Notre droit était toutefois à cet égard encore imparfait, et les dispositions de la présente proposition de loi, qui résultent d'une coordination et d'une complémentarité parfaites entre le Sénat, l'Assemble nationale et le Gouvernement, permettent d'améliorer très sensiblement notre arsenal juridique.
Elles constituent une avancée significative permettant à un Etat démocratique de se doter, dans des conditions respectueuses des droits de l'homme, des dispositions nécessaires pour lui permettre de lutter utilement contre des groupements portant justement atteinte à ces valeurs essentielles. Je vous demande donc de les adopter. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen. - M. le rapporteur applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Nicolas About, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd'hui en deuxième lecture la proposition de loi tendant à renforcer la prévention et la répression à l'encontre des sectes, groupements portant atteinte aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales. Je suis particulièrement heureux que la proposition de loi que j'ai déposée en 1995 ait été adoptée par le Sénat en décembre 1999, puis examinée et enrichie par l'Assemblée nationale. Je regrette simplement qu'il ait fallu autant de temps pour que ce texte revienne devant la Haute Assemblée.
Pendant longtemps, on a affirmé que nous disposions de tous les instruments nécessaires pour lutter contre les dérives sectaires. Or, si le droit actuel est effectivement suffisant pour combattre les comportements individuels, il n'en va pas de même en ce qui concerne la lutte contre les groupements sectaires eux-mêmes. Et c'est ce manque que la proposition de loi dont nous débattons aujourd'hui doit nous permettre de combler.
Je rappelle que le texte que nous avons adopté à l'unanimité en première lecture prévoyait, pour l'essentiel, la possibilité pour le Président de la République de dissoudre par décret des groupements dangereux condamnés pénalement à plusieurs reprises. Cette procédure était placée sous le contrôle du Conseil d'Etat.
Nous avons également souhaité prévoir la responsabilité pénale des personnes morales pour certaines infractions fréquemment commises par les sectes, à savoir l'exercice illégal de la médecine et de la pharmacie. Je sais que des inquiétudes se sont manifestées à propos de ce renforcement des sanctions pénales en matière d'exercice illégal de la pharmacie. En effet, notre réglementation n'est pas entièrement claire en ce qui concerne la définition des produits qui ne peuvent être mis en vente que par les pharmacies. Or notre propos dans cette proposition de loi est bien de lutter contre les dérives sectaires, et non d'intervenir dans la difficile question de savoir quels produits peuvent ou non être vendus en dehors des pharmacies.
Aussi, madame la ministre, nous souhaiterions savoir où en est la réflexion du Gouvernement sur les moyens de régler la question de la parapharmacie, des médicaments dits « frontière », car le renforcement des sanctions en matière d'exercice illégal de la pharmacie doit s'accompagner du règlement de cette question dans le respect des textes européens qui existent en ce domaine.
Cette mise au point étant faite, j'en viens aux modifications apportées à la proposition de loi par les députés.
L'Assemblée nationale a approuvé notre proposition prévoyant la possibilité de dissoudre ces groupements dangereux. Cependant, elle n'a pas retenu, comme le rappelait madame la ministre, la procédure de décret présidentiel, lui préférant une procédure judiciaire.
L'Assemblée nationale a surtout apporté plusieurs compléments à la proposition de loi. Elle a étendu à de nombreuses infractions nouvelles la responsabilité pénale des personnes morales. Elle a en outre prévu des dispositions limitant l'installation et la publicité des groupements sectaires. Ainsi, les maires pourraient désormais interdire l'installation dans certaines zones de groupements sectaires condamnés à plusieurs reprises. Enfin et surtout, l'Assemblée nationale a créé un délit de manipulation mentale, disposition qui, vous le savez, a suscité un vif émoi, notamment de la part des représentants des grandes confessions religieuses.
Saisie par le garde des sceaux, la Commission nationale consultative des droits de l'homme a estimé inopportune la création du délit de manipulation mentale.
Dans ces conditions, la commission des lois du Sénat a souhaité procéder à des auditions avant d'examiner en deuxième lecture la présente proposition de loi. Elle a entendu les représentants des grandes confessions religieuses, les membres des associations de lutte contre les dérives sectaires, le président de la mission interministérielle de lutte contre les sectes et, enfin, le président de la Commission nationale consultative des droits de l'homme.
Au terme de ces auditions, la commission a recherché les moyens de concilier la liberté de croyance, à laquelle nul d'entre nous ne veut porter atteinte, et la nécessité de lutter contre des groupements qui bafouent régulièrement les lois de la République.
Quelles sont, compte tenu de cet objectif, les propositions de la commission des lois ?
Tout d'abord, nous proposons de supprimer le délit de manipulation mentale, qui a suscité beaucoup d'inquiétude. Nous proposons plutôt de déplacer le délit d'abus frauduleux de l'état d'ignorance ou de faiblesse et de le compléter, conformément au souhait de la Commission nationale consultative des droits de l'homme. Je rappelle qu'actuellement, ce délit n'est constitué qu'en cas d'abus de l'état de faiblesse d'un mineur ou d'une personne particulièrement vulnérable en raison d'une déficience physique ou psychique. Or telle n'est pas, à l'origine, la situation des personnes qui entrent dans des groupements sectaires. Nous proposons donc que le délit soit constitué non seulement en cas d'abus de la situation de faiblesse d'un mineur ou d'une personne particulièrement vulnérable, mais également en cas d'abus de la situation de sujétion psychologique ou physique d'une personne résultant de pressions graves ou réitérées ou de techniques propres à altérer son jugement, surtout pour conduire cette personne à une abstention ou à un acte qui lui soit gravement préjudiciable.
Ainsi, nous évitons de créer un délit spécialement consacré aux sectes et nous inscrivons la lutte contre certains groupements dangereux dans un cadre juridique déjà bien connu du juge pénal.
Par ailleurs, la commission des lois propose d'accepter la procédure judiciaire de dissolution proposée par l'Assemblée nationale, dès lors que celle-ci a retenu une procédure à jour fixe, qui peut donc être conduite très rapidement.
Toutefois, pour que cette procédure soit efficace, nous souhaitons, madame la ministre, que le juge puisse dissoudre toutes les structures d'un même groupement sectaire, dès lors que chacune d'elles a subi au moins une condamnation. Faute d'une telle disposition, le juge ne pourrait dissoudre que la structure installée dans le ressort de son tribunal, et la procédure n'aurait alors aucune efficacité.
Enfin, nous nous sommes longuement interrogés sur les dispositions limitant l'installation des groupements à caractère sectaire. Le texte donne aux maires le droit d'interdire l'installation de sectes condamnées pénalement à proximité de certains lieux comme les écoles.
Mais le maire est-il véritablement à même d'identifier un groupement sectaire, d'avoir connaissance des condamnations subies par ce groupement ? Ne risque-t-il pas de se voir reprocher son inaction s'il n'a pas été informé de l'installation d'une secte ?
Certains de nos collègues ont pensé que les préfets étaient mieux à même d'exercer un tel pouvoir. Ce point sera débattu lors de la discussion des amendements, et nous attendons avec impatience de connaître l'avis du Gouvernement à cet égard.
Telles sont, mes chers collègues, les propositions de la commission des lois. Le texte que nous vous proposons ne porte atteinte ni à la liberté de croyance ni à la liberté d'association. Il a simplement pour objet de veiller à ce que ces libertés fondamentales s'exercent dans le plein respect des lois de la République.
A cet égard, j'estime que les attaques portées contre cette proposition de loi émanent soit de personnes mal informées, soit de personnes pour qui le respect de la liberté et des lois n'est pas une priorité.
Ce texte ne combat pas les minorités religieuses. Il ne s'attaque qu'aux groupements condamnés pénalement. La procédure de dissolution ne concernera que des groupements condamnés à plusieurs reprises pour des délits, pour des faits graves, et je ne vois pas comment on peut prétendre que cela porte atteinte à la liberté d'association ou à la liberté religieuse. Les associations de toutes sortes sont une richesse pour notre pays.
En conclusion, je dirai simplement ceci : oui à la liberté de croyance, oui à la liberté d'association, mais non à l'utilisation de ces libertés pour perpétrer des crimes ou des délits.
Je pense sincèrement que la navette parlementaire nous a permis de parvenir à un texte d'équilibre, qui, je l'espère, recueillera, mes chers collègues, votre soutien le plus large. (Applaudissements sur des travées des Républicains et Indépendants, de l'Union centriste et du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président. J'ai plaisir à souligner une nouvelle fois la qualité du rapport que vient de nous présenter notre excellent collègue Nicolas About.
M. Nicolas About, rappporteur. Je vous remercie, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Lagauche.
M. Serge Lagauche. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, en première lecture, le groupe socialiste, malgré les réserves exprimées par ma collègue Dinah Derycke et moi-même, avait apporté son soutien à la proposition de loi de notre collègue Nicolas About, comptant sur la navette pour améliorer et enrichir le texte. En effet, aborder la lutte contre les sectes dangereuses par la loi du 10 janvier 1936 ne nous apparaissait pas comme la démarche la plus heureuse.
Nos doutes portaient aussi sur l'efficacité de l'article 1er en ce qu'il ne permettait pas de répondre aux situations d'urgence dans le cas de mouvements dangereux jamais condamnés ou de procédures judiciaires en cours.
A cela s'est ajoutée, à la suite de la première lecture à l'Assemblée nationale, la création du délit de manipulation mentale. Celui-ci a suscité de vives protestations de la part de certains représentants des grandes Eglises constituées et des observations de la Commission nationale consultative des droits de l'homme, laquelle ne jugeant pas opportune la création de ce délit spécifique, a cependant reconnu que cela ne portait pas atteinte aux droits de l'homme et aux libertés. Notons néanmoins que le délit de manipulation mentale n'a pas fait l'unanimité contre lui. Des membres éminents de l'Eglise catholique, notamment, se sont exprimés en faveur de sa création, montrant le clivage entre ceux qui jugent le droit actuel suffisant et ceux qui considèrent nécessaire de le renforcer. D'ailleurs, les Eglises ont également leur rôle à jouer pour lutter contre les dérives sectaires : elles devraient être plus vigilantes et intransigeantes envers celles qui peuvent se développer à leur marge.
Certes, il convient de mieux faire fonctionner notre arsenal juridique ; mais en rester là serait méconnaître les évolutions du phénomène sectaire : certaines sectes sont devenues des professionnelles de la mue pour déjouer les contrôles des pouvoirs publics et les décisions judiciaires.
Aujourd'hui, il revient donc au Sénat de travailler à l'amélioration de cette proposition de loi.
Dans cette perspective, on peut se féliciter qu'à l'issue d'un travail en commun des rapporteurs de chaque assemblée un accord soit intervenu concernant l'abandon du délit de manipulation mentale, au profit de l'extension et du déplacement, dans le code pénal, du délit d'abus frauduleux de l'état d'ignorance ou de faiblesse d'une personne. Ainsi, nous évitons de créer un délit spécifique pour les groupements sectaires au profit d'un renforcement du droit existant. Celui-ci va dans le sens des recommandations de la Commission nationale consultative des droits de l'homme. Et, sauf à utiliser la mauvaise foi coutumière de certaines sectes, cette nouvelle disposition ne pourra donc pas prêter le flanc à la critique : tout risque de dérive est écarté.
Le récent procès de l'Ordre du temple solaire a montré les difficultés rencontrées par la justice pour dégager les responsabilités de l'unique prévenu accusé d'avoir suscité une « dynamique homicide » ayant conduit au suicide collectif de seize personnes dans le Vercors, en 1995. On peut espérer que l'extension du délit d'abus de faiblesse rendra la tâche de la justice plus aisée.
Je regrette, pour ma part, que le traitement de ce procès par les médias n'ait pas permis de mettre plus en évidence, auprès du grand public, les méthodes coercitives d'aliénation des sectes ; mais peut-être est-ce tout simplement dû à la complexité même de l'affaire.
En ce qui concerne l'article 1er, l'utilisation d'une législation d'exception, la loi du 10 janvier 1936 sur les groupes de combat et les milices privées, ainsi que la dissolution administrative ne sont plus retenues, ce qui répond à nos réserves exprimées en première lecture.
La dissolution judiciaire permettra ainsi de respecter les droits de la défense et du débat contradictoire.
Par ailleurs, M. le rapporteur propose de considérer comme une même personne morale les personnes morales juridiquement distinctes, mais qui, par leur dénomination ou leur statut, cherchent à atteindre le même objectif et sont unies dans une communauté d'intérêts. Même si les sectes sont passées maîtres dans l'art de se dissimuler derrière des masques acceptables, cette disposition va dans le bons sens.
Restent cependant des insuffisances certaines. La dissolution judiciaire ne résout pas la question de l'urgence à agir pour protéger les personnes ou l'ordre public, en dehors du cas spécifique de la menace terroriste.
S'il faut exiger deux condamnations définitives pour dissoudre, on peut attendre bien longtemps : les déboires liés à l'instrution du procès contre la scientologie le montrent de manière fort éloquente.
C'est pourquoi nous proposons deux amendements importants visant à accélérer la procédure.
En premier lieu, il s'agit de rendre possible la dissolution de la personne morale dès la première condamnation définitive de cette dernière, ou de ses dirigeants de fait ou de droit, et non à la suite de plusieurs condamnations.
En second lieu, il s'agit de permettre au juge d'instruction de placer la personne morale sous contrôle judiciaire et d'assortir de sanctions le non-respect des obligations de ce contrôle. Cet amendement est très important, car il autorise une véritable action de prévention, en attendant la condamnation judiciaire.
L'examen de cette proposition de loi a donné lieu à un intense lobbying des sectes. Comme nombre de sénateurs, j'ai été le destinataire d'une série de mails de protestation envoyés par quelques adeptes de la scientologie.
Ce qui me choque, en revanche, c'est d'abord la prise de position d'une cinquantaine de parlementaires du Conseil de l'Europe demandant au Sénat de retarder la discussion de ce texte, et même de s'aligner sur les travaux du Conseil de l'Europe pour légiférer. C'est ensuite la déclaration du sous-secrétaire d'Etat aux droits de l'homme des Etats-Unis exprimant sa préoccupation au sujet de la proposition de loi qui menacerait, selon Washington, la liberté religieuse en France.
M. Nicolas About, rapporteur. Ils feraient mieux de s'occuper de leurs affaires !
M. Serge Lagauche. L'administration américaine a en effet quelque difficulté à intégrer le fait que la France, en vertu de la loi de 1905 de séparation de l'Eglise et de l'Etat, ne reconnaît aucune religion.
Ces deux déclarations prouvent deux choses : l'impact de la stratégie de lobbying de la scientologie et le fait que cette proposition de loi, incontestablement, dérange les sectes. Je crois donc que, tout en réaffirmant notre refus de mettre en place une législation d'exception, nous sommes en train d'élaborer une loi à la fois garante des libertés fondamentales et relativement efficace contre les groupements les plus dangereux.
Mais n'oublions pas le caractère transnational des sectes et son corollaire : le nécessaire développement de la coopération internationale. De son côté, le Conseil de l'Europe s'était prononcé officiellement, en 1999, pour la création d'un observatoire européen sur les sectes. Aussi, pouvez-vous, nous indiquer, madame la ministre, quel est l'état d'avancement des discussions sur ce sujet au sein même de l'Union européenne ? (Applaudissements sur les travées socialistes et sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen. - M. Bonnet applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Hoeffel.
M. Daniel Hoeffel. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la proposition de loi tendant à renforcer la prévention et la répression à l'encontre des groupements à caractère sectaire cherche des réponses et des parades à un certain nombre de dérives qui mettent en péril l'homme et sa liberté ; nous connaissons tous des exemples et des témoignages qui les mettent en évidence.
Les propositions présentées par notre collègue Nicolas About découlent de ce constat, et je les comprends. Il est cependant nécessaire qu'elles soient entourées d'un maximum de précautions et, à cet égard, trois questions méritent d'être posées.
La première concerne la définition des sectes. L'Etat saura-t-il discerner et désigner les sectes alors que les sociologues les plus avertis n'arrivent pas à se mettre d'accord sur ce qu'est vraiment une secte ? Les sectes ne naissent-elles pas parce que les institutions religieuses, philosophiques, politiques et notre société en général ne sont plus en mesure de répondre aux inquiétudes et aux interrogations et à la quête d'espérance des hommes ? N'oublions pas que beaucoup de mouvements religieux ont été qualifiés de secte au départ et que la définition peut varier selon les époques et selon les contextes.
M. Michel Caldaguès. C'est exact !
M. Daniel Hoeffel. La deuxième interrogation concerne les notions subjectives auxquelles il est fait appel pour déterminer l'action d'un groupement à caractère sectaire.
La manipulation mentale, notion excessive et dangereuse, a heureusement été abandonnée, et je vous en remercie, monsieur le rapporteur. Mais ne risque-t-on pas de la voir réapparaître autrement ?
M. Michel Caldaguès. Bien sûr !
M. Daniel Hoeffel. Certaines formes de publicité ou de propagande, la foi ou les convictions rayonnantes d'un prédicateur ou d'un orateur qui séduit ou qui subjugue peuvent entraîner le meilleur et le pire et porter atteinte à la liberté de conscience et à la liberté d'expression, sans qu'il s'agisse nécessairement d'un délit d'abus frauduleux de l'état de faiblesse.
Ma dernière question concerne l'opportunité et la nécessité d'élaborer une loi. Les textes qui existent ne sont-ils pas suffisants ? Ne disposons-nous pas d'une panoplie de mesures permettant de sanctionner tout acte contraire à la démocratie, tout groupement en contradiction avec les lois de la République ? D'ailleurs, si, par certains agissements, des personnes morales, c'est-à-dire les groupements en tant que tels, se mettent en contradiction avec les lois de la République, elles peuvent et doivent être poursuivies, voire dissoutes, sans qu'il soit nécessaire pour cela d'introduire une législation antisectes spécifique.
M. Michel Caldaguès. Très juste !
M. Daniel Hoeffel. Mais ce serait méconnaître l'une de nos originalités qui consiste à répondre sur tous les plans à un problème en empilant des dispositions législatives et réglementaires plutôt qu'en veillant à l'application de celles qui existent. Et nous y participons tous ! Faut-il, pour établir une comparaison avec un sujet d'actualité, lutter contre le délit de vitesse en créant le délit de grande vitesse ?
Je conclurai en souhaitant que ceux qui sont chargés d'appliquer les propositions présentées par M. le rapporteur, dont l'objet est de protéger la liberté, respectent scrupuleusement l'esprit qui nous aura guidé dans ce débat qui interpelle notre conscience. Puisse la liberté sortir gagnante de cette discussion ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Caldaguès.
M. Michel Caldaguès. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, parmi les phénomènes qui marquent notre époque, on constate une prolifératin d'organismes plus ou moins religieux qui, dans certains cas - il faut bien en convenir - ont fait reculer les bornes de la possession des âmes et celles de la naïveté humaine. Ce ne sont pas là des phénomènes contemporains ni inédits.
On pourrait en rechercher les raisons. On pourrait se demander, par exemple, si les Eglises ayant pignon sur rue répondent entièrement au besoin de spiritualité que ressentent un certain nombre de personnes qui, n'y trouvant pas ce à quoi elles aspirent, sont entraînées à rechercher d'autres satisfactions. Mais ce n'est pas le lieu d'en débattre ici.
Toujours est-il que les phénomènes que je viens d'évoquer ont provoqué dans l'opinion une perplexité mêlée d'effroi, un sentiment d'impuissance, et même jusqu'à un certain abandon de la rationalité.
J'ai eu l'occasion, dans mon entourage, d'avoir des discussions à ce sujet, en prélude à ce débat, et, par moments, je me suis demandé si l'on n'allait pas me parler de sorcellerie. J'avais l'impression que l'on était revenu pas très loin du Moyen-Age. Il est tout à fait évident, par ailleurs, que ce phénomène a été considérablement aggravé par le coup de tonnerre de l'affaire du Temple solaire.
C'est pourquoi certains se sont demandé si le fait qu'une organisation d'hommes puisse disposer d'une telle puissance mortifère totalement gratuite ne dépassait pas l'entendement et s'il ne fallait pas appliquer des remèdes de choc à cette situation.
C'est donc à juste titre que les pouvoirs publics et la justice ont réagi lors de cette affaire effroyable, et je les en approuve. Il y a eu procès ; celui-ci va vers sa conclusion, ce qui prouve bien qu'il y a des textes, et je ne puis que m'en féliciter.
En présence de cette monumentale anomalie qu'a révélée l'affaire du Temple solaire, certains ont considéré qu'il fallait tenter de résoudre le problème à l'aide de moyens spécifiques.
Pour donner une idée de la difficulté de l'entreprise, je vais user d'une image, mes chers collègues : supposez, sur une étagère, des récipients de tailles très variables, qui vont de la grande jarre à la fiole minuscule, en passant par le magnum et par la bouteille, dont certains contiennent des poisons, d'autres des placebos, sans que l'on sache très bien lesquels, dans quel ordre et dans quelle proportion. Et il s'agit de rédiger une seule et même étiquette pour toute l'étagère ! Car telle est bien la question posée.
La commission et son rapporteur, M. Nicolas About, ont fait un travail considérable pour tenter une gageure, et je suis impressionné par la quantité de textes qu'ils ont recensés quant aux infractions susceptibles de permettre d'apposer un sceau d'infâmie sur les dirigeants de certaines associations.
M. About a évoqué tout à l'heure l'entorse aux règles d'exercice de la profession de pharmacien. Je ne considère pas qu'il faille approuver ce genre d'entorse. Mais, tout de même, entre celle-ci et des actes qui mettent en cause la vie des gens, il y a plus qu'une nuance !
Ce n'est pas seulement par le nombre que cette liste impressionnante d'infractions frappe les esprits, c'est aussi par sa disparité - je viens de le dire, il y a un peu de tout ! - et par l'absence de rapport de certaines de ces infractions avec ce que l'on appelle les déviations sectaires. Il en est qui n'ont strictement aucun rapport avec ces déviations sectaires, qui ne constituent même pas des indices, qui peuvent être totalement indépendantes.
Mes chers collègues, on peut trouver des pédophiles dans des organisations tout à fait respectables. C'est, hélas ! déjà arrivé. Je ne pense pas que cela mette en cause l'existence même ou la respectabilité de ces organisations. Mais ce n'est qu'une réflexion au passage.
M. About et la commission ont donc tenté de résoudre la quadrature du cercle, à savoir donner une définition des contenants et des contenus de l'étagère. Il fallait que ces définitions fussent précises, intelligibles, directement utilisables par ceux qui sont chargés d'appliquer la loi, et qu'au surplus elles ne fussent pas redondantes. Mission impossible, on le voit dans le texte !
Nous verrons cela plus en détail lors de la discussion des articles. En l'instant, je me bornerai à faire quelques observations.
Quant aux contenants, je suis frappé par le fait que, dans l'intitulé du texte, on utilise l'appellation avant la définition. C'est tout à fait extraordinaire !
La commission avait été plus prudente en première lecture, puisqu'il était question de « renforcer le dispositif pénal à l'encontre des associations ou groupement, constituant, par leurs agissements délictueux, un trouble à l'ordre public ou un péril majeur pour la personne humaine ». C'était précautionneux. On donnait la priorité à la définition par rapport à l'appellation.
Cette fois, monsieur About, vous allez droit au but. L'Assemblée nationale vous a précédé en parlant de « groupements à caractère sectaire ». Vous, vous parlez tout simplement de « sectes », en prenant soin d'ajouter : « , groupements portant atteinte aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales ».
Là, c'est trop ou pas assez ! En effet, si nous dressons ici, mes chers collègues, une liste exhaustive des groupements qui portent atteinte aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales, nous ne nous en tiendrons pas à ce que l'on appelle les sectes, c'est tout à fait évident. Aussi, je ne comprends pas très bien la présence de ce membre de phrase dans l'intitulé.
Je ferai une autre observation, sur le contenu cette fois. Je n'ai relevé, je dois le dire, quant au contenu même des turpitudes à sanctionner, aucune définition qui me satisfasse complètement, et ce n'est pas une critique, car c'est pratiquement impossible.
Alors, en combinant ces deux quadratures du cercle, monsieur About, vous paraissez être victime d'une illusion, celle selon laquelle deux notions à demi précises constitueraient une notion précise. Moi, je ne le crois pas. Effectivement, une notion à demi précise sur le contenant et une notion à demi précise sur le contenu, cela ne fait pas une notion précise sur le tout, en tout cas pas à mes yeux.
Par ailleurs, j'ai été particulièrement frappé, en me reportant aux débats de première lecture, de lire ce propos dans la bouche de l'une de nos collègues : « En ce qui concerne le pouvoir législatif, la présence de la représentation française de... - figure ici le nom d'une église supposée sectaire -... dans la tribune de l'Assemblée nationale, le 8 février 1996, avait choqué les républicains que nous sommes ».
Mais, mes chers collègues, en d'autres temps - je parle des années noires -, il y a eu des écrits qui reprochaient la présence de quelqu'un à un endroit donné en raison de son appartenance à une communauté. (M. le rapporteur s'exclame.) C'est un processus extrêmement dangereux, dont beaucoup peuvent garder un très mauvais souvenir. Ce type de raisonnement peut conduire aux pires excès.
Un autre sujet d'inquiétude était pour moi le dernier alinéa de l'article 1er, qui créait un amalgame, une sorte de contagion de la responsabilité totalement inacceptable au regard des considérations démocratiques. Vous avez, par voie d'amendement, atténué la mesure : on ne peut plus condamner ou dissoudre une association parce que, loin de là, une autre association a eu dans ses rangs des personnes qui ont commis des turpitudes. C'était d'une iniquité farouche.
Mais, au passage, vous enregistrez un gain - si j'ose dire - en ce sens qu'il n'est plus nécessaire que soient intervenues deux condamnations. Une seule suffit. Autrement dit, l'amélioration que vous apportez est - je n'hésite pas à le dire - dans une certaine mesure, fallacieuse.
M. Nicolas About, rapporteur. Je n'ai jamais proposé cela !
M. Michel Caldaguès. Permettez-moi de lire l'amendement en cause : « Le tribunal de grande instance peut prononcer, au cours de la même procédure la dissolution de plusieurs personnes morales mentionnées au premier alinéa dès lors que ces personnes morales poursuivent le même objectif et sont unies par une communauté d'intérêts » - je vous demande un peu ! - « et qu'a été prononcée à l'égard de chacune d'entre elles ou de ses dirigeants de droit ou de fait, au moins une condamnation pénale... » Ce n'est plus deux, je le répète, c'est une !
M. Nicolas About, rapporteur. Cela veut dire qu'il y en a eu plusieurs !
M. Michel Caldaguès. Plusieurs, en additionnant celles qui ont pu être prononcées contre des associations différentes.
M. Nicolas About, rapporteur. La même association !
M. Michel Caldaguès. Quoi qu'il en soit, mon inquiétude demeure, même si je remarque que vous avez essayé d'améliorer votre texte.
Monsieur About, je ne veux pas engager un dialogue avec vous, car M. le président pourrait m'en faire le reproche.
M. le président. Je vous remercie de le rappeler, monsieur Caldaguès. (Sourires.)
M. Michel Caldaguès. Je prends mes précautions, monsieur le président. (Nouveaux sourires.)
Aussi dirai-je à la cantonade...
M. le président. A vos collègues dans l'hémicycle, tout simplement.
M. Michel Caldaguès. Soit, monsieur le président, mais aussi à ceux qui ne sont pas dans l'hémicycle, si vous le permettez !
Je voudrais donc faire la réflexion suivante, car elle peut expliquer nos débats : sont-ils nombreux, parmi nous, ceux qui, à l'âge adulte ou à l'adolescence, au moment où l'on commence à comprendre les choses, ont connu les années où notre pays était privé de liberté ?

La liberté a un goût différent selon qu'on en a connu ou non la privation. Cela me paraît être un élément essentiel s'il on veut mieux comprendre certaines de nos différences d'approche.
Moi, monsieur About, je reste très marqué par cette époque. J'en ai gardé le sentiment qu'il ne faut pas mettre n'importe quel texte entre toutes les mains. Le gouvernement de la collaboration - puisque c'est de lui qu'il s'agit - a, certes, élaboré des lois d'exception - Dieu sait lesquelles ! - mais il a aussi utilisé des lois existantes, lois que nos bons devanciers de la IIIe République avaient votées, avec la meilleure bonne foi du monde, sans savoir qui les appliquerait.
Cette constatation est restée très présente dans mon esprit et doit nous inciter à prendre beaucoup de précautions lorsque, avec une parfaite bonne conscience, nous élaborons un texte qui risque, sinon, dans certains circonstances, d'être mal utilisé.
J'ajoute que, à l'époque dont je parle, les textes ont été appliqués non pas par des magistrats d'exception, madame le garde des sceaux, mais par des magistrats professionnels ! Et ils étaient dirigés par tels de vos devanciers, qui étaient de grands juristes, ce qui ne nous a épargné ni les iniquités, ni les persécutions, ni une grave détérioration dans l'exercice de nos libertés. C'est un thème de réflexion que je voulais vous soumettre.
Ma dernière observation sera pour exprimer mon inquiétude devant la faculté accordée - et ce n'est pas la première fois - à « toute association reconnue d'utilité publique régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans à la date des faits... » d'exercer les droits reconnus à la partie civile. C'est peut-être la porte ouverte aux pires déviations.
J'ai évoqué hier, lors de la discussion du projet de loi de modernisation sociale, une affaire scandaleuse survenue voilà quelques années. Une association s'était portée partie civile contre un membre en exercice du Gouvernement à qui l'on reprochait un livre dans lequel se trouvaient des propos, maladroits, je le reconnais, et qui étaient qualifiés - abusivement - « d'incitation à la haine raciale ».
Comment s'est terminée cette affaire, mes chers collègues ? Je n'ai pas apporté à la tribune l'article qui en a rendu compte, à l'époque, dans un grand journal du soir, mais sachez qu'il y a eu « négociation » ! Il a même été question - tenez-vous bien, mes chers collègues - que l'auteur supposé de l'incitation à la haine raciale rétrocède à l'association une partie de ses droits d'auteur !
L'affaire était à tel point scandaleuse qu'au sein de cette association un grave différend est né, à la suite duquel les dirigeants ont été mis en minorité. Mais l'affaire ne s'est réglée, selon le quotidien en question, que lorsque l'on a appris que le Gouvernement renouvelait sa subvention à ladite association !
Tout cela est-il très digne ? L'affaire ne nous renvoie-t-elle pas à un article du code pénal, mes chers collègues ?
Dès lors, donner aux associations la faculté de se porter partie civile est leur offrir une arme à manier avec la plus grande précaution si l'on veut éviter les excès.
En conclusion, mes chers collègues, il n'est pas douteux que certaines organisations pratiquent ce qu'il faut bien appeler un certain conditionnement à l'égard de leurs adhérents. Mais il ne faudrait pas que le souci légitime de combattre de tels abus passe, lui aussi, par le conditionnement.
Or les conditionnements existent. En voici un exemple scandaleux que je soumets à votre vigilance.
Voilà quelques mois, nos assistants parlementaires ont reçu une lettre, dont voici un extrait significatif : « A l'approche de l'examen de la proposition de loi "About-Picard" tendant à renforcer la prévention et la répression à l'encontre des groupements à caractère sectaire, il nous paraît important de vous inviter » - vous, c'est-à-dire les assistants parlementaires - « à la plus grande prudence.
« Vous recevrez sans doute des appels téléphoniques sollicitant un entretien avec votre sénateur. Vos interlocuteurs évoqueront les thèmes de liberté de conscience, de pluralité des religions. Sans dénier l'intérêt philosophique que ces thèmes peuvent présenter » - intérêt philosophique ? Il s'agit, mes chers collègues, de la liberté de conscience et de la pluralité des religions, rien de moins ! - « nous vous déconseillons d'entrer dans la discussion » - on s'adresse aux collaborateurs des parlementaires, alors même que les parlementaires n'ont d'autre mission précisément que d'entrer dans la discussion ! -, « nous vous suggérons de demander à votre interlocuteur un document écrit et de mettre fin à l'entretien.
« Si vous souhaitez répondre aux courriers que nous recevons » - il s'agit de notre courrier, mes chers collègues - « actuellement en nombre par la poste ou par Internet, sachez que les groupements à caractère sectaire utilisent à leur avantage les signatures et les phrases privées de leur contexte. Un simple accusé de réception devrait vous en prémunir. »
Voilà le type de pression, de conditionnement qui a pu être exercé dans le dos des parlementaires auprès de leurs collaborateurs. Permettez-moi de vous dire que c'est absolument scandaleux !
M. le président. Pour la bonne information de nos collègues, monsieur Caldaguès, pouvez-vous m'indiquer qui sont les expéditeurs de ce courrier adressé aux assistants de parlementaires ?
M. Michel Caldaguès. Je ne mettrai pas en cause à cette tribune ceux qui sont les expéditeurs de ce courrier, que je connais et qui ne sont pas en mesure de répondre. Mais, si vous le voulez, j'en ferai part au président du Sénat.
M. le président. Monsieur Caldaguès, si je vous demande cette précision, c'est parce que, en tant que président de l'AGAS, l'association pour la gestion des assistants de sénateurs, j'ai aussi un devoir de précaution auprès des assistants de sénateurs.
M. Michel Caldaguès. Monsieur le président, je vous tiendrai informé, de même que M. le président du Sénat qui, d'ailleurs, ne manquera sans doute pas de vous saisir, encore que vous ne soyez absolument pas responsable.
M. Nicolas About, rapporteur. On va bientôt voter, et l'on nous laisse entendre qu'il y a des manipulations ! C'est un procédé insidieux et inacceptable !
M. Michel Caldaguès. En tout cas, je garantis l'authenticité de ce texte !
M. le président. Monsieur Caldaguès, je ne mets pas en doute votre propos, mais, compte tenu de sa gravité,...
M. Michel Caldaguès. Oui, il est grave !
M. le président. ... puisque, semble-t-il, un document interne au Sénat a circulé auprès des assistants des sénateurs, j'ai simplement souhaité, pour la bonne information de nos collègues, que cette précision fût donnée. Mais si vous la transmettez à M. le président du Sénat ainsi qu'au président de l'AGAS, sachez qu'il sera fait le meilleur usage de ce courrier.
M. Michel Caldaguès. Je vous en remercie, monsieur le président. En tout cas, je ne peux pas citer nommément, à cette tribune, des personnes qui n'ont pas la possibilité de me répondre. Je crois que c'est la moindre des choses, et c'est l'usage dans cette enceinte.
M. Nicolas About, rapporteur. Nous ne sommes donc pas les auteurs de ce courrier !
M. Michel Caldaguès. Non, absolument pas, ce n'est pas du tout ce que j'ai voulu dire !
M. Nicolas About, rapporteur. La manipulation mentale n'est donc pas chez nous ?
M. Michel Caldaguès. Non, bien sûr, elle n'est pas chez vous ! Mais elle existe, je l'ai rencontrée !
Encore une fois, je vous en donne acte bien volontiers, monsieur le rapporteur, vous n'êtes pas à l'origine de ce courrier, et je n'ai jamais rien dit de tel. D'ailleurs, ce n'est pas l'habitude sur nos travées. Reste que cela peut se passer à l'intérieur du Sénat.
M. Nicolas About, rapporteur. Avant un vote, la précision est importante !
M. le président. Veuillez poursuivre, mon cher collègue.
M. Michel Caldaguès. Mes chers collègues, en conclusion, faut-il ne rien faire ? Non, il ne faut pas rester inactif. Il faut appliquer sans faiblesse notre code pénal et réprimer les infractions. C'est ce que je demande en règle générale, et je ne vois pas pourquoi je ne le demanderais pas s'agissant du type d'infraction dont nous débattons aujourd'hui. Il faut donc appliquer le code pénal sans faiblesse, et je me tourne, bien entendu, vers le garde des sceaux, mais ce n'est pas une objurgation limitative, madame.
S'il y a des lacunes, définissons de nouvelles infractions et de nouvelles peines, mais faisons-le avec une extrême précaution et avec une extrême précision pour ne pas donner lieu à des dérives. Il faut en quelque sorte ciseler la législation répressive, de façon que le pouvoir législatif ne soit pas indirectement laissé à la jurisprudence, ce qui serait pour lui une reculade.
Mes chers collègues, pour terminer, permettez au membre de la commission de la défense et des forces armées que je suis une image militaire : nous devons non pas répandre un tapis de bombes, mais définir des cibles, procéder à des frappes chirurgicales et éviter à tout prix des dommages collatéraux. En d'autres termes, nous ne devons prendre aucun risque au détriment des libertés publiques et individuelles. (M. Hamel applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo. Monsieur Caldaguès, je suis inquiète. Je ne sais pas si vous parliez en votre nom propre ou au nom de votre groupe, mais j'estimais, et les débats de la commission des lois me le laissaient à juste titre penser, que nous arrivions, après des péripéties qui, certes, ont montré la difficulté de légiférer en matière de renforcement de la lutte contre le phénomène sectaire, à un consensus. Je tenais, d'ailleurs, à remercier M. About du rôle qu'il a joué dans ce résultat que j'espère encore possible.
M. Michel Caldaguès. Timeo Danaos et dona ferentes ! (M. le rapporteur proteste.)
Mme Nicole Borvo. Monsieur Caldaguès, vous nous laissez perplexes ! Oui, il faut légiférer, malgré des difficultés que nul n'ignore, parce que la dernière décennie a été marquée par une prise de conscience, qui n'est pas nouvelle, de l'ampleur et des méfaits du phénomène sectaire. Il est passé, pour reprendre l'expression de M. Bouchereau, du stade de « phénomène social inquiétant » à celui de « problème de sécurité publique de premier plan ».
Cette prise de conscience s'est d'abord traduite par le souci de mieux former les intervenants publics au phénomène sectaire : la mise en place de différentes structures d'alerte au sein de la police et de la gendarmerie - les « cellules de vigilance » -, l'institution de « correspondants sectes » dans les parquets généraux, mais également la mise à contribution des écoles constituent un système de veille permanent.
Je ne veux pas oublier non plus le rôle joué par la mission interministérielle de lutte contre les sectes, qui succède à la délégation interministérielle. Combinée avec celle des associations reconnues d'utilité publique que sont le CCMM et l'UNAFDI, son action permet d'avoir une meilleure connaissance d'un phénomène sectaire éminemment protéiforme en perpétuelle mutation et, ainsi, de tester la pertinence et l'efficacité de nos outils de lutte.
La contribution du Parlement au renforcement de cette lutte n'est pas moindre. Je citerai les deux commissions d'enquête parlementaire créées dans la dernière décennie et l'institution de nouveaux dispositifs de lutte, en particulier la loi du 18 décembre 1998 sur le contrôle de l'obligation scolaire, mais aussi la possibilité donnée aux associations susvisées de se constituer partie civile prévue dans la loi du 30 juin 2000. Autant d'outils vraiment utiles.
Aujourd'hui, il s'agit de renforcer le dispositif répressif en s'attaquant plus directement aux personnes morales elles-mêmes, afin de permettre leur dissolution en urgence ou de s'opposer à leur implantation, ou encore de prononcer des peines contre le groupement sectaire lui-même.
Qui - certainement pas moi ! - songerait à nier l'action particulièrement néfaste de certains mouvements sectaires ? Le procès de l'Ordre du temple solaire nous rappelle cruellement à quel point cette action est nuisible, et on ne peut qu'être ému et ébranlé par la détresse des familles des victimes, souvent dans l'incapacité d'agir.
Attentatoires à tous les droits de la personne humaine jusqu'à la vie elle-même, les agissements des sectes qualifiées de dangereuses mettent également en cause la société tout entière sur le plan économique le plus souvent, mais parfois même dans ses fondements démocratiques.
En même temps, il est vrai, la légitimité même de l'objectif visé doit nous conduire à la plus extrême vigilance quant aux moyens à employer : il nous impose une conduite irréprochable du point de vue du respect des libertés fondamentales. C'est le travail qui a été effectué au cours d'un processus, certes long, mais qui a permis un réel respect des libertés que l'on constate dans le texte aujourd'hui proposé.
Il est, en particulier, essentiel de préserver la liberté constitutionnelle de pensée et de croyance. N'oublions pas que cette liberté fait partie intégrante de nos principes démocratiques et républicains. Consacrée par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, la constitution du 4 octobre 1958 et la loi de 1905 sur la séparation des Eglises et de l'Etat, cette liberté est également l'objet d'un engagement international de la France au titre de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
C'est en ce sens que le groupe communiste républicain et citoyen avait exprimé ses plus vives réticences à l'égard d'un processus de dissolution administrative, même très encadré. Au-delà de nos doutes quant à l'efficacité d'un tel dispositif - il n'y a qu'à voir les pressions du Congrès américain ! -, il ne nous avait pas paru offrir toutes les garanties nécessaires, en particulier du point de vue des droits de la défense.
Nous sommes évidemment beaucoup plus favorables au système de dissolution judiciaire qui, sans préjuger l'efficacité du dispositif, garantit le respect des droits de la défense. Nous sommes d'ailleurs heureux que la commission des lois se soit ralliée à cette proposition.
Plus que la question procédurale, c'est la création d'un délit de manipulation mentale qui a soulevé de nombreuses interrogations, c'est-à-dire, en réalité, la question de savoir si la lutte contre les sectes nécessite ou non l'élaboration d'une législation spécifique. Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen n'y sont pas favorables, comme l'avait rappelé mon collègue Thierry Foucaud en première lecture.
Le code pénal actuel permet souvent d'incriminer les mouvements sectaires : les violences, les escroqueries, les abus sexuels, l'exercice illégal de la pharmacie ou de la médecine, mais aussi les abus frauduleux de l'état de faiblesse sont autant de délits qui ont permis la condamnation de groupements dangereux. Il est vrai que le problème réside souvent dans l'application de cette législation pénale.
La création d'un délit de manipulation mentale pourrait certes permettre d'agir plus en amont, avant même que se produisent les cas extrêmes que j'ai cités. Elle comporte néanmoins certains dangers. Les réserves des organismes qui ont été interrogés par le Gouvernement, et les protestations des représentants des églises et des mouvements officiels religieux en témoignent.
On sait d'ailleurs que la Commission nationale consultative des droits de l'homme comme la Ligue des droits de l'homme se sont montrées particulièrement réticentes à l'égard de l'institution d'un délit « d'exception », et ont, au contraire, suggéré un aménagement des textes généraux relatifs à l'abus de faiblesse.
Une telle position ne revient pas à méconnaître le danger de ces mouvements, elle consiste à poser la question des infractions et, ainsi, à mettre en exergue la prévention.
Le texte qui nous est présenté ici tient compte de ces observations. Il résulte des travaux communs des rapporteurs de nos deux assemblées, du Gouvernement et de la mission interministérielle de lutte contre les sectes, la MILS.
Le choix s'est porté sur un élargissement du délit d'abus de faiblesse - le terme « abus » est évidemment essentiel - d'une personne « en état de sujétion psychologique ou physique résultant de pressions graves ou réitérées ou de techniques propres à altérer son jugement ». L'insertion dans le code pénal au chapitre consacré aux atteintes contre les personnes de cette nouvelle définition du délit d'abus de faiblesse devrait lever les obstacles au déclenchement de l'action publique par le ministère public qui se heurtait jusque-là aux entrées volontaires en sectes.
Ainsi, pour reprendre l'actualité malheureuse de ces jours-ci, une personne diminuée par la maladie pourrait être protégée par le biais de ce nouveau délit, malgré son adhésion volontaire à un groupement sectaire.
Pour autant, la liberté de croyance n'est pas mise en cause en tant que telle, puisque ce qui est sanctionné, c'est l'« abus frauduleux » de l'exploitation de l'état de faiblesse d'une personne. C'est donc bien sous l'angle de la faute constituée par l'abus et la fraude que l'on « attaque » le mouvement sectaire. Je considère que c'est parfaitement légal, parfaitement justifié.
Un deuxième élément différencie la proposition de loi telle qu'elle a été adoptée par l'Assemblée nationale du texte issu de nos travaux : la responsabilité des personnes morales est, en effet, très fortement étendue.
Je partage les réserves évoquées en filigrane dans le rapport de la commission des lois : la responsabilité pénale des personnes morales est une innovation de la loi de 1994 portant réforme du code pénal. Or - nous avions évoqué ce point lors du débat relatif aux délits non intentionnels -, la courte histoire de ce délit n'est pas concluante et nous devrions, avant de penser à étendre son champ d'application, être capable d'en dresser le bilan.
Enfin, s'agissant des pouvoirs du maire, le texte de l'Assemblée nationale a le mérite de poser une question essentielle : celle de la capacité des maires à faire face aux dérives sectaires.
On connaît la difficulté de certains maires à s'opposer à l'implantation, sur leur commune, de mouvements que l'on peut qualifier de sectaires, Néanmoins, il n'est pas certain, à mon sens, que l'octroi de pouvoirs directs en la matière ne soit pas une arme à double tranchant qui se retourne contre le maire.
C'est pourquoi nous vous proposons de confier au représentant de l'Etat le soin de définir un périmètre « sensible » à l'intérieur duquel un mouvement antérieurement condamné du point de vue judiciaire ne pourrait s'implanter, sachant que le maire pourra toujours appeler l'attention sur les agissements de certains mouvements dans sa commune. Cet amendement nous semble se situer dans le droit-fil du délit d'abus de faiblesse en se concentrant sur des zones où les personnes peuvent être particulièrement exposées. Mais nous écouterons avec attention l'avis des uns et des autres et nous pourrions, me semble-t-il, nous mettre d'accord.
Le groupe communiste républicain et citoyen soutiendra, quoi qu'il en soit, le texte proposé par la commission des lois. Ce texte nous semble acceptable par tous dans la perspective de contrecarrer le phénomène sectaire.
En guise de conclusion, vous me permettrez néanmoins de m'attarder un instant sur l'intitulé même de la proposition de loi : la proposition de loi vise à « renforcer la prévention et la répression à l'encontre des groupements à caractère sectaire ».
Avec ce texte, il est vrai, la France sera à la pointe de la répression. C'est utile. Sera-t-elle pour autant mieux armée contre la constitution de groupements sectaires ?
La Ligue des droits de l'homme mettait récemment en garde les pouvoirs publics dans les termes suivants : « Plus qu'en d'autres domaines, la multiplication de la législation ne saurait remplacer l'action concrète des pouvoirs publics et des associations ».
Les réponses se situent certainement bien en amont du répressif, par l'identification et la lutte contre les causes de l'entrée en secte, dont on sait qu'elles résident pour beaucoup dans la crise des repères, dans le malaise de notre société. De nombreuses études sociologiques soulignent combien le développement du phénomène sectaire renvoie la société à ses propres contradictions. Aussi le débat sur les phénomènes eux-mêmes est-il loin d'être clos.
En tout cas, je crois que nous avons besoin de cette loi qui nous permettra de lutter plus efficacement contre les manifestations de ces groupements sectaires. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, sur les travées socialistes ainsi qu'au banc de la commission.)
M. Nicolas About, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Nicolas About, rapporteur. Je voudrais tout d'abord remercier Mme Borvo : effectivement, il vaut mieux prévenir que punir.
Je voudrais également m'adresser à M. Hoeffel. Chrétien comme lui, je sais les risques qui ont été évoqués par les Eglises, et j'ai fait miennes les préoccupations à la fois des Eglises traditionnelles et de M. Hoeffel. Je crois donc que le texte auquel est parvenue la commission met tout à fait à l'abri toutes les religions du risque de le voir utilisé abusivement à leur encontre.
M. Emmanuel Hamel. Est-ce bien certain ?
M. Nicolas About, rapporteur. Peut-être y aura-t-il un jour un problème ! Mais un pouvoir n'a pas besoin de ce texte pour devenir fascisant. C'est l'utilisation du texte qui fait le fascisme, ce n'est pas le texte lui-même.
M. Michel Caldaguès. C'est l'occasion qui fait le larron !
M. Nicolas About, rapporteur. Par conséquent, le jour où il y aura ce type de pouvoir, peu importe le texte en vigueur, il sera de toute façon détourné dans un mauvais but.
Je tiens à ajouter, puisque l'occasion m'en est donnée par mon excellent collègue Emmanuel Hamel, que, aujourd'hui, le médecin que je suis, le parlementaire que je suis ont la certitude que l'on trouve dans les sectes des enfants dénutris, des enfants qui ne sont pas éduqués, pas scolarisés, qu'on y trouve aussi des adultes assujettis ou qui se font escroquer. Tout cela est certain, ce n'est pas « peut-être » ! (M. Caldaguès s'exclame.)
M. Christian Bonnet. Très bien !
M. Nicolas About, rapporteur. Or, aujourd'hui, les organisations ne tombent pas sous le coup de la répression de la personne morale, et c'est sur ce point que je voudrais terminer.
Monsieur Caldaguès, vous nous avez dit que nous avions le choix, que nous étions comme un pharmacien devant des étagères sur lesquelles se trouvaient le bon médicament, le placebo, la fiole vide, l'eau et éventuellement du poison. Mais pas du tout, monsieur Caldaguès. Nous sommes devant un magasin qui nous propose la publicité mensongère, la fraude, l'atteinte volontaire à la vie, les tortures et les actes de barbarie, les violences, les menaces, le viol, les agressions sexuelles, les entraves aux mesures d'assistance !
M. Michel Caldaguès. Pas uniformément ! C'est là qu'est l'imposture !
M. Nicolas About, rapporteur. Mais si ! C'est cela que nous voulons condamner.
Ne prétendez pas à la tribune du Sénat que nous sommes en train de faire un texte pour condamner les innocents ; nous sommes là pour protéger les plus faibles, ceux qui ont besoin du soutien de la loi, nos enfants en particulier.
MM. Christian Bonnet et Jacques Machet. Très bien !
M. Nicolas About, rapporteur. Je crois d'ailleurs que, ce soir, nous pourrons faire le point de cet effort extraordinaire, de ce consensus qui se dégage au niveau du Parlement français pour protéger les plus faibles d'entre nous, c'est-à-dire nos enfants et ceux qui, de par la maladie ou certaines actions conduites sur eux, sont éventuellement en situation de faiblesse ou en état de sujétion.
Ainsi, nous aurons fait un grand pas dans la défense des plus malheureux d'entre nous. (Très bien ! et applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, de l'Union centriste, du RDSE et du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Je rappelle que, en vertu de l'article 42, alinéa 10, du règlement, à partir de la deuxième lecture au Sénat des propositions de loi, la discussion des articles est limitée à ceux pour lesquels les deux chambres du Parlement n'ont pas encore adopté un texte identique.

Chapitre Ier

Dissolution civile de certaines personnes morales

Article 1er



M. le président.
« Art. 1er. - Peut être prononcée, selon les modalités prévues par le présent article, la dissolution de toute personne morale, quelle qu'en soit la forme juridique ou l'objet, qui poursuit des activités ayant pour but ou pour effet de créer ou d'exploiter la dépendance psychologique ou physique des personnes qui participent à ces activités, lorsque ont été prononcées à plusieurs reprises, contre la personne morale elle-même ou ses dirigeants de droit ou de fait, des condamnations pénales définitives pour l'une ou l'autre des infractions mentionnées ci-après :
« 1° Infractions d'atteintes volontaires ou involontaires à la vie ou à l'intégrité physique ou psychique de la personne, de mise en danger de la personne, d'atteinte aux libertés de la personne, d'atteinte à la dignité de la personne, d'atteinte à la personnalité, de mise en péril des mineurs ou d'atteintes aux biens prévues par les articles 221-1 à 221-6, 222-1 à 222-40, 223-1 à 223-15, 224-1 à 224-4, 225-5 à 225-15, 225-16-4 à 225-16-6, 225-17 et 225-18, 226-1 à 226-23, 227-1 à 227-27, 311-1 à 311-13, 312-1 à 312-12, 313-1 à 313-4, 314-1 à 314-3 et 324-1 à 324-6 du code pénal ;
« 2° Infractions d'exercice illégal de la médecine ou de la pharmacie prévues par les articles L. 376 et L. 517 du code de la santé publique ;
« 3° Infractions de publicité mensongère, de fraudes ou de falsifications prévues par les articles L. 121-6 et L. 213-1 à L. 213-4 du code de la consommation.
« La procédure de dissolution est portée devant le tribunal de grande instance à la demande du ministère public agissant d'office ou à la requête de tout intéressé.
« La demande est formée, instruite et jugée conformément à la procédure à jour fixe.
« Le délai d'appel est de quinze jours. Le président de chambre à laquelle l'affaire est distribuée fixe à bref délai l'audience à laquelle l'affaire sera appelée. Au jour indiqué, il est procédé selon les modalités prévues aux articles 760 à 762 du nouveau code de procédure civile.
« Le maintien ou la reconstitution, ouverte ou déguisée, d'une personne morale dissoute en application des dispositions du présent article constitue le délit prévu par le deuxième alinéa de l'article 434-43 du code pénal.
Par amendement n° 1, M. About, au nom de la commission, propose, dans le premier alinéa de cet article, de remplacer les mots : « ou d'exploiter la dépendance » par les mots : « , de maintenir ou d'exploiter la sujétion ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Nicolas About, rapporteur. Nous ne voulons pas qu'il y ait confusion avec les termes « prestation dépendance » ; c'est pourquoi nous proposons de remplacer les mots : « ou d'exploiter la dépendance » par les mots : « de maintenir ou d'exploiter la sujétion ».
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Favorable. Comme je l'ai déjà indiqué dans mon discours, je suis favorable à l'utilisation du terme « sujétion » pour définir notamment, dans la nouvelle rédaction du délit d'abus de faiblesse, les activités des mouvements sectaires.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 1.
M. Michel Caldaguès. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Caldaguès.
M. Michel Caldaguès. Je me bornerai à faire une observation : il faut connaître le sens des mots quand on légifère ! Prenez un dictionnaire et regardez les définitions des termes « sujétion » et « dépendance » : ce sont les mêmes !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 16, Mme Derycke, MM. Lagauche, Domeizel, Signé et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, dans le premier alinéa de l'article 1er, après les mots : « lorsque ont été prononcées », de supprimer les mots : « à plusieurs reprises ».
La parole est à M. Lagauche.
M. Serge Lagauche. L'article 1er prévoit la possibilité de prononcer la dissolution de toute personne morale qui poursuit des activités ayant pour but ou pour effet de créer ou d'exploiter la dépendance psychologique ou physique des personnes qui participent à ces activités, lorsque ont été prononcées à plusieurs reprises, contre la personne morale ou ses dirigeants, des condamnations pour d'autres infractions.
Pourquoi subordonner cette dissolution à la condamnation à plusieurs reprises de la personne morale ou de ses dirigeants ? Une seule procédure peut, en effet, impliquer la poursuite de faits très graves commis par des auteurs nombreux dans des situations diverses et peut commander la dissolution immédiate de la personne morale. Il nous paraît souhaitable de laisser au juge la liberté de choisir, selon la gravité des faits, si la dissolution doit être prononcée immédiatement ou après plusieurs condamnations.
Par ailleurs, le 1° de l'article 131-39 du code pénal dispose que, lorsque la loi le prévoit à l'encontre d'une personne morale, un crime ou un délit peut être sanctionné de la dissolution de la personne morale. Si le domaine et les conditions d'application de la dissolution sont rigoureux, cet article laisse au juge la possibilité de prononcer la dissolution sans qu'il soit nécessaire que la personne morale ait été condamnée plusieurs fois.
Par cet amendement, nous souhaitons calquer cet article et donner au juge du tribunal de grande instance la possibilité de prononcer la dissolution de la personne morale dès la première condamnation.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Nicolas About, rapporteur. Le texte faisant état « des condamnations », l'expression « à plusieurs reprises » est superflue. La commission a donc émis un avis favorable sur l'amendement de M. Lagauche.
Cela ne signife pas pour autant qu'elle accepte le recours à la nouvelle procédure de dissolution dès la première condamnation. Son acceptation traduit simplement sa volonté de supprimer une précision redondante.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Si, effectivement, cet amendement avait eu pour conséquence de permettre une dissolution prononcée par le juge civil après une seule condamnation pénale, je n'y aurais pas été favorable, car cela reviendrait à condamner deux fois pour les mêmes faits, ce qui n'est pas accepté.
Cependant, comme l'amendement proposé vise à supprimer les mots « à plusieurs reprises » sans modifier le reste du texte, qui précise que doivent avoir été prononcées contre la personne morale ou ses dirigeants « des condamnations pénales définitives », je rejoins l'argument du rapporteur et je m'en remets à la sagesse du Sénat.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 16, accepté par la commission et pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 2, M. About, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit le deuxième alinéa de l'article 1er :
« 1° Infractions d'atteintes volontaires ou involontaires à la vie ou à l'intégrité physique ou psychique de la personne, de mise en danger de la personne, d'atteinte aux libertés de la personne, d'atteinte à la dignité de la personne, d'atteinte à la personnalité, de mise en péril des mineurs ou d'atteintes aux biens prévus par les articles 221-1 à 221-6, 222-1 à 222-40, 223-1 à 223-15, 223-15-2, 224-1 à 224-4, 225-5 à 225-15, 225-17 et 225-18, 226-1 à 226-23, 227-1 à 227-27, 311-1 à 311-13, 312-1 à 312-12, 313-1 à 313-3, 314-1 à 314-3 et 324-1 à 324-6 du code pénal ; ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Nicolas About, rapporteur. La commission des lois ayant repoussé le délit de manipulation mentale, il nous faut modifier, dans la liste des infractions commises par les groupements sectaires, les références qui pourraient permettre de demander la dissolution de ceux-ci. C'est à cette correction que vise l'amendement n° 2.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 2.
M. Michel Caldaguès. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Caldaguès.
M. Michel Caldaguès. Comme j'ai eu l'occasion de le dire dans la discussion générale, les infractions concernées étant extrêmement disparates, on ne peut pas les mettre toutes sur le même plan. C'est la raison pour laquelle je n'approuve pas cet amendement.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 2, accepté par le Gouvernement.
M. Emmanuel Hamel. Je vote contre cet amendement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 22, M. About, au nom de la commission, propose, dans le troisième alinéa (2°) de l'article 1er, de remplacer les références : « L. 376 et L. 517 » par les références : « L. 4161-5 et L. 4223-1 ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Nicolas About, rapporteur. Il s'agit à nouveau d'un amendement tendant à une correction. En effet, pour tenir compte de la publication de la partie législative du nouveau code de la santé publique, intervenue depuis l'adoption de ce texte par le Sénat en première lecture, il convient de changer la numérotation des articles.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Il s'agit d'un amendement de coordination, et le Gouvernement émet donc un avis favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 22, accepté par le Gouvernement.
M. Emmanuel Hamel. Je vote contre.
M. Michel Caldaguès. Moi de même !

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 3 rectifié, M. About, au nom de la commission, propose de compléter l'article 1er par un alinéa ainsi rédigé :
« Le tribunal de grande instance peut prononcer au cours de la même procédure la dissolution de plusieurs personnes morales mentionnées au premier alinéa dès lors que ces personnes morales poursuivent le même objectif et sont unies par une communauté d'intérêts et qu'a été prononcée à l'égard de chacune d'entre elles ou de ses dirigeants de droit ou de fait au moins une condamnation pénale définitive pour l'une des infractions mentionnées aux 1° à 3°. Ces différentes personnes morales doivent être parties à la procédure. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Nicolas About, rapporteur. La nouvelle procédure de dissolution instituée par le texte risque d'être inefficace si le juge ne peut dissoudre que la structure située dans le ressort du tribunal de grande instance. C'est pourquoi l'amendement tend à permettre au juge de prononcer au cours de la même procédure la dissolution non pas de l'ensemble des structures, mais de plusieurs structures du même groupement dangereux, dès lors que chacune d'entre elles a déjà subi une condamnation pénale devenue définitive.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Le texte initialement adopté par la commission des lois appelait d'importantes réserves de ma part.
Ce dernier semblait en effet permettre de dissoudre une personne morale du seul fait qu'elle était liée par une communauté d'intérêts à une personne morale pénalement condamnée - ou dont les dirigeants auraient été pénalement condamnés -, alors qu'elle n'avait jamais été personnellement condamnée et qu'aucun crime ou délit ne pouvait donc lui être reproché.
Une telle disposition était contraire au principe constitutionnel de liberté d'association.
L'amendement rectifié proposé par la commission ne présente pas cet inconvénient, car il précise clairement que chacune des personnes morales en cause doit avoir fait l'objet d'« au moins une condamnation ».
Si deux associations juridiquement distinctes, car situées dans deux villes différentes, mais qui font en réalité partie d'une même secte, font chacune l'objet d'une condamnation - par exemple la première pour escroquerie, et la seconde pour le délit d'abus de faiblesse -, le juge judiciaire pourra ainsi prononcer leur dissolution, sans attendre que chacune de ces deux associations fasse à nouveau l'objet d'une condamnation pénale.
L'efficacité du dispositif adopté par l'Assemblée nationale est ainsi améliorée, tout en conservant la logique de cette disposition, à savoir l'exigence de plusieurs - donc d'au moins deux - condamnations pénales, même si ces différentes condamnations pourront être « réparties » sur plusieurs personnes morales différentes.
Il est ainsi répondu à l'une des objections soulevées devant la commission des lois par M. Badinter, qui s'inquiétait du fait que soient exigées plusieurs condamnations pénales.
Les droits de la défense sont par ailleurs garantis, puisque chacune des associations concernées doit être appelée en la cause devant le tribunal de grande instance.
Dans ces conditions, je suis favorable à l'amendement n° 3 rectifié.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 3 rectifié.
M. Michel Caldaguès. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Caldaguès.
M. Michel Caldaguès. Je me prononcerai contre cet amendement parce que je considère qu'une association doit être dissoute en considération de ses propres turpitudes dans le domaine qui nous intéresse aujourd'hui et non pas en raison d'une condamnation subie dans des domaines totalement différents, et quelquefois anodins, par les dirigeants de cette association ou d'autres associations.
Mes chers collègues, si nous généralisions ce principe, nous aurions quelques surprises !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 3 rectifié, accepté par le Gouvernement.
M. Michel Caldaguès. Je vote contre.
M. Emmanuel Hamel. Moi de même !

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er, modifié.
M. Michel Caldaguès. Je vote contre !
M. Emmanuel Hamel. Moi également !

(L'article 1er est adopté.)

Article additionnel après l'article 1er ou après l'article 11



M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 17 rectifié, M. Badinter, Mme Derycke, MM. Lagauche, Domeizel, Signé et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 1er, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après le cinquième alinéa (4°) de l'article 706-45 du code de procédure pénale, est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Mise sous contrôle ou sous surveillance de la personne morale poursuivie, par un administrateur judiciaire. »
Par amendement n° 23, M. About, au nom de la commission, propose d'insérer, après l'article 1er, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 706-45 du code de procédure pénale est ainsi modifié :
« I. - Après le cinquième alinéa (4°), il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« 5° Placement sous contrôle d'un mandataire de justice désigné par le juge d'instruction pour une durée de six mois renouvelable, en ce qui concerne l'activité dans l'exercice ou à l'occasion de laquelle l'infraction a été commise. »
« II. - L'avant-dernier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : "La mesure prévue au 5° ne peut être ordonnée par le juge d'instruction si la personne morale ne peut être condamnée à la peine prévue par le 3° de l'article 131-39 du code pénal". »
La parole est à M. Lagauche, pour défendre l'amendement n° 17 rectifié.
M. Serge Lagauche. Les administrateurs judiciaires sont définis par l'article 1er de la loi de 1985 relative aux administrateurs judiciaires, mandataires judiciaires à la liquidation des entreprises et experts en diagnostic d'entreprise comme des « mandataires chargés par décision de justice d'administrer les biens d'autrui ou d'exercer des fonctions d'assistance ou de surveillance dans la gestion de ces biens ».
Ils n'ont vocation à intervenir que dans le cadre du redressement des entreprises en difficultés et ont pour mission de surveiller, d'assister ou de remplacer le débiteur, selon les cas, dans la gestion de son entreprise. Ils sont par ailleurs spécialement chargés d'élaborer un rapport un bilan économique et social de l'entreprise, et de proposer un plan de redressement.
Enfin, en tant qu'organe de la procédure, plusieurs attributions leur sont confiées, notamment l'examen des documents comptables, la possibilité d'effectuer des actes conservatoires et de participer à l'élimination de l'influence des dirigeants sociaux, de demander la condamnation de ceux-ci au paiement du passif social et leur déclaration personnelle au redressement judiciaire.
Il pourrait être intéressant que, dans le cadre de la mise en examen de personnes morales, et plus particulièrement de celles qui poursuivent des activités à caractère sectaire, le juge pénal puisse s'allier les compétences d'un administrateur judiciaire.
Notre amendement a donc pour objet de modifier l'article 706-45 du code de procédure pénale, qui prévoit que le juge d'instruction peut placer la personne morale sous contrôle judiciaire, en ajoutant la possibilité pour le juge d'instruction de nommer, dans ce cadre, un administrateur judiciaire qui pourra apporter un concours avisé sur la gestion de la personne morale.
En effet, actuellement, le juge d'instruction peut, aux termes de l'article 706-45, soumettre la personne morale à une ou plusieurs obligations : dépôt d'une caution, constitution des sûretés destinées à garantir les droits de la victime, interdiction d'émettre des chèques, interdictions d'exercer certaines activités professionnelles. Ces dispositions ne permettent nullement de contrôler et de maîtriser la gestion passée et présente de la personne morale pendant toute la durée de l'instruction qui, dans ces affaires d'une grande complexité, peut être très longue.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 23 et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 17 rectifié.
M. Nicolas About, rapporteur. L'amendement n° 17 rectifié défendu à l'instant par M. Lagauche est très intéressant, mais la commission souhaite apporter des précisions ; c'est pourquoi elle vous propose l'amendement n° 23.
Cet amendement n° 23 permet de placer sous surveillance judiciaire une personne morale dans le cadre d'un contrôle judiciaire. Néanmoins, il encadre cette possibilité en précisant que la mesure ne peut être ordonnée par le juge d'instruction si la personne morale ne peut être condamnée à la peine de placement sous surveillance judiciaire. En outre, il est bon de prévoir une durée maximale éventuellement renouvelable afin que le juge soit conduit à exercer un contrôle sur l'exécution de la mesure.
La commission souhaite donc le retrait de l'amendement n° 17 rectifié et l'adoption de l'amendement n° 23, qui donne satisfaction à M. Lagauche.
M. le président. Monsieur Lagauche, l'amendement n° 17 rectifié est-il maintenu ?
M. Serge Lagauche. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 17 rectifié est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 23 ?
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. J'étais tout à fait favorable, sur le principe, à l'amendement n° 17 rectifié qui avait été déposé par le groupe socialiste et qui permettait le placement sous surveillance judiciaire d'une personne morale mise en examen dans le cadre d'un contrôle judiciaire. Cette disposition s'inscrivait logiquement dans la continuité de celles qui avaient été adoptées en 1992 lors de la réforme du code pénal. Son intérêt en matière de lutte contre les sectes est évident.
Toutefois, je préfère la rédaction juridiquement plus précise et plus complète proposée, à l'amendement n° 23, par la commission des lois du Sénat. Je remercie donc M. Lagauche d'avoir retiré l'amendement n° 17 rectifié.
Cependant, il me semble que l'amendement n° 23 devrait être rectifié sur un point purement formel si le Sénat souhaite, comme à son habitude, adopter une proposition de loi aussi rigoureuse que possible, ce qui pourrait permettre une adoption conforme du texte par l'Assemblée nationale.
En effet, ce n'est pas après l'article 1er de la proposition de loi, qui concerne la dissolution judiciaire mais qui se trouve dans un chapitre I intitulé : « Dissolution civile de certaines personnes morales », que doit être inséré cet article additionnel. Celui-ci devrait figurer après l'article 11, qui vise également à modifier le code de procédure pénale, dans le chapitre intitulé : « Dispositions diverses ». Je souhaite donc que cet amendement soit rectifié pour remplacer les mots : « après l'article 1er » par les mots : « après l'article 11 ».
M. le président. Monsieur le rapporteur, que pensez-vous de la suggestion de Mme le garde des sceaux ?
M. Nicolas About, rapporteur. J'y suis favorable, monsieur le président, et je rectifie mon amendement en ce sens.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 23 rectifié, déposé par M. About, au nom de la commission, et tendant à insérer, après l'article 11, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 706-45 du code de procédure pénale est ainsi modifié :
« I. - Après le cinquième alinéa (4°), il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« 5° Placement sous contrôle d'un mandataire de justice désigné par le juge d'instruction pour une durée de six mois renouvelable, en ce qui concerne l'activité dans l'exercice ou à l'occasion de laquelle l'infraction a été commise. »
« II. L'avant-dernier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : "La mesure prévue au 5° ne peut être ordonnée par le juge d'instruction si la personne morale ne peut être condamnée à la peine prévue par le 3° de l'article 131-39 du code pénal". »
Je vais mettre aux voix cet amendement.
M. Michel Caldaguès. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Caldaguès.
M. Michel Caldaguès. Je ne m'opposerai pas à l'amendement n° 23 rectifié, parce qu'il présente l'avantage, par rapport à l'amendement n° 17 rectifié, de ne pas comporter l'expression : « organismes sectaires ».
La commission vise les personnes morales, et elle a raison de le faire, car toute personne morale qui commet une turpitude quelconque doit se voir appliquer les règles du code pénal. Mais prétendre le faire à des organisations qui ont été unilatéralement qualifiées de « sectaires », sans expliciter pourquoi elles ont reçu cette qualification, constitue une dérive à laquelle je m'oppose et je m'opposerai à chaque fois qu'un exposé des motifs ou un dispositif comportera une telle mention.
Ce n'est pas le cas de cet amendement, et j'en donne acte à la commission.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 23 rectifié, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l'article 11.

Chapitre II

Extension de la responsabilité pénale
des personnes morales à certaines infractions

Article 2



M. le président.
« Art. 2. - I. - Après les mots : "est puni", la fin de la première phrase de l'article L. 376 du code de la santé publique est ainsi rédigée : "d'un an d'emprisonnement et de 100 000 francs d'amende". »
« II. - L'article L. 377 du même code est ainsi rétabli :
« Art. L. 377 . - Les personnes morales peuvent être déclarées pénalement responsables dans les conditions prévues par l'article 121-2 du code pénal des infractions définies aux articles L. 372 et L. 374.
« Les peines encourues par les personnes morales sont :
« 1° L'amende, suivant les modalités prévues par l'article 131-38 du code pénal ;
« 2° Les peines mentionnées aux 2° à 9° de l'article 131-39 du code pénal.
« L'interdiction mentionnée au 2° de l'article 131-39 du code pénal porte sur l'activité dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise. »
« III. - L'article L. 517 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 517 . - Quiconque se sera livré sciemment à des opérations réservées aux pharmaciens sans réunir les conditions exigées pour l'exercice de la pharmacie sera puni d'un an d'emprisonnement et de 100 000 francs d'amende.
« Les personnes morales peuvent être déclarées pénalement responsables dans les conditions prévues par l'article 121-2 du code pénal de l'infraction définie au présent article.
« Les peines encourues par les personnes morales sont :
« 1° L'amende, suivant les modalités prévues par l'article 131-38 du code pénal ;
« 2° Les peines mentionnées aux 2° à 9° de l'article 131-39 du code pénal.
« L'interdiction mentionnée au 2° de l'article 131-9 du code pénal porte sur l'activité dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise. »
Par amendement n° 24, M. About, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit le I de cet article :
« I. - Après les mots : "est puni", la fin du premier alinéa de l'article L. 4161-5 du code de santé publique est ainsi rédigée : "d'un an d'emprisonnement et de 100 000 francs d'amende". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Nicolas About, rapporteur. Cet amendement vise simplement à apporter une correction.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Le Gouvernement y est favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 24, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 25, M. About, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit les deux premiers alinéas du II de l'article 2 :
« Il est inséré, après l'article L. 4161-5 du code de la santé publique, un article L. 4161-6 ainsi rédigé :
« Art. L. 4161-6. - Les personnes morales peuvent être déclarées pénalement responsables dans les conditions prévues par l'article 121-2 du code pénal des infractions prévues à l'article L. 4161-5. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Nicolas About, rapporteur. Il s'agit également d'un amendement tendant à apporter une correction.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 25, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 26, M. About, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit le III de l'article 2 :
« III. - Dans l'article L. 4223-1 du même code, les mots : "de 30 000 francs d'amende et, en cas de récidive, de six mois d'emprisonnement et de 60 000 francs d'amende", sont remplacés par les mots : "d'un an d'emprisonnement et de 100 000 francs d'amende". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Nicolas About, rapporteur. C'est encore un amendement visant à une correction, monsieur le président.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 26, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 20 rectifié bis, MM. Darniche, Branger, Durand-Chastel, Lorrain, Foy, Seillier, Türk, Donnay et Adnot proposent de compléter, in fine, l'article 2 par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... Après l'article L. 517 du même code, est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. .... Quiconque se sera livré aux opérations visées à l'article L. 517 dans le cadre d'une entité qui poursuit des activités ayant pour but ou pour effet de créer ou d'exploiter la dépendance psychologique ou physique des personnes participant à ces activités sera puni de deux ans d'emprisonnement et de 1 000 000 francs d'amende.
« Les personnes morales, quels qu'en soient la forme juridique ou l'objet, qui poursuivent des activités ayant pour but ou pour effet de créer ou d'exploiter la dépendance psychologique ou physique des personnes qui participent à ces activités peuvent être déclarées pénalement responsables dans les conditions prévues par l'article L. 121-2 du code pénal de l'infraction définie au présent article.
« Les peines encourues par les personnes morales sont :
« 1° L'amende, suivant les modalités prévues par l'article 131-38 du code pénal ;
« 2° Les peines mentionnées aux 2° à 9° de l'article 131-9 du code pénal.
« L'interdiction mentionnée au 2° de l'article 131-9 du code pénal porte sur l'activité dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise. »
La parole est à M. Seillier.
M. Bernard Seillier. A l'occasion de l'examen de ce texte en première lecture, le 16 décembre 1999, le Sénat a souhaité étendre la responsabilité pénale des personnes morales aux infractions d'exercice illégal de la médecine ou de la pharmacie.
L'Assemblée nationale a décidé d'augmenter les peines encourues par les personnes physiques pour les mêmes infractions.
Cet amendement a pour objet d'éviter la confusion possible, dans l'esprit de nos concitoyens, entre les entreprises de produits biologiques et de parapharmacie qui ne sont aucunement des groupements sectaires et des personnes morales sectaires. Il faut trouver une ligne de démarcation entre les deux.
Je ne sais si cet amendement peut y contribuer. En tout cas, j'espère, madame le ministre, que vous pourrez nous donner des garanties et nous rassurer sur le non-amalgame.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Nicolas About, rapporteur. Je partage tout à fait les préoccupations de M. Seillier en ce qui concerne les problèmes liés à la parapharmacie. Il serait effectivement judicieux qu'à l'occasion de cet amendement Mme la ministre nous indique le point de vue du Gouvernement.
Toutefois, il me semble préférable que cet amendement soit retiré, car, même si cette proposition de loi vise la prévention et la répression à l'encontre des sectes, je ne souhaite pas, pour une bonne technique législative, que soient prévus des délits applicables spécifiquement aux groupes sectaires.
M. Michel Caldaguès. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Le Gouvernement souhaite le retrait de cet amendement.
En opportunité, les peines actuellement prévues pour ce délit - 30 000 francs d'amende - sont sans conteste inadaptées au regard, d'une part, de la répression prévue pour le délit d'exercice illégal de la médecine, qui est assez voisin, et, d'autre part, de la gravité de certains des comportements qui peuvent être sanctionnés par ce texte.
Je veux à cet égard vous rassurer, comme vous me l'avez demandé, en observant que le délit d'exercice illégal de la pharmacie recouvre deux situations très différentes que les tribunaux sont à même d'apprécier.
Il n'est nullement dans l'intention du Gouvernement de permettre une répression plus sévère en cas de mise sur le marché par des professionnels de la grande distribution commerciale de produits qui ne présentent pas de véritables dangers pour la santé publique, mais qui constituent des médicaments par présentation, ce qui contrevient au monopole de la distribution de médicaments par les officines de pharmacie.
Dans de telles hypothèses, les peines aujourd'hui prononcées par les juridictions se situent entre 10 000 et 20 000 francs d'amende, parfois avec sursis, soit moins que les 30 000 francs d'amende actuellement encourus.
L'aggravation proposée n'a donc rien à voir avec la question complexe que certains dénomment la « parapharmacie », question qui est sans rapport avec la présente proposition de loi.
Mais le délit d'exercice illégal de la pharmacie permet également de réprimer de véritables pratiques de charlatanisme commises par des personnes ne disposant d'aucune qualification professionnelle et qui mettent en danger la santé de tiers en leur fournissant des produits dangereux.
Dans de tels cas, la répression actuellement prévue est évidemment insuffisante, et ce même dans l'hypothèse où l'infraction n'est pas commise dans le cadre d'une secte.
J'observe enfin que la solution proposée par l'amendement est juridiquement contraire aux dispositions du nouveau code pénal sur la responsabilité pénale des personnes morales : si cette responsabilité est prévue pour une infraction, elle doit nécessairement concerner toutes les personnes morales, à la seule exception de l'Etat et sous réserve des limites concernant les collectivités territoriales, conformément aux dispositions générales de l'article 121-2 du code pénal.
J'observe enfin que la rédaction proposée par l'amendement ne semble pas correspondre aux objectifs recherchés par ses auteurs, car elle ne se substitue pas à l'aggravation générale prévue par l'article 2 mais prévoit une seconde aggravation quand les faits sont commis par une secte.
Pour ces différentes raisons, je vous demande de retirer cet amendement, même si, sur le fond, il peut se justifier.
M. le président. L'amendement n° 20 rectifié bis est-il maintenu, monsieur Seillier ?
M. Bernard Seillier. Non, je le retire, pour les raisons qu'a exposées Mme le ministre et pour faire écho aux arguments de cohérence soulignés par M. le rapporteur, qui souhaite ne pas voir aborder dans ce texte les délits spécifiques aux groupements sectaires.
M. le président. L'amendement n° 20 rectifié bis est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 2, modifié.

(L'article 2 est adopté.)

Articles 2 bis à 2 quaterdecies



M. le président.
« Art. 2 bis. - I. - Il est inséré, après l'article L. 213-5 du code de la consommation, un article L. 213-6 ainsi rédigé :
« Art. L. 213-6 . - Les personnes morales peuvent être déclarées pénalement responsables dans les conditions prévues par l'article 121-2 du code pénal des infractions définies aux articles L. 213-1 à L. 213-4.
« Les peines encourues par les personnes morales sont :
« 1° L'amende, suivant les modalités prévues par l'article 131-38 du code pénal ;
« 2° Les peines mentionnées aux 2° à 9° de l'article 131-39 du code pénal.
« L'interdiction mentionnée au 2° de l'article 131-39 du code pénal porte sur l'activité dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise. »
« II. - L'article L. 121-6 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions de l'article L. 213-6 prévoyant la responsabilité pénale des personnes morales sont applicables à ces infractions. » - (Adopté.)
« Art. 2 ter. - Il est inséré, après l'article 221-5 du code pénal, un article 221-5-1 ainsi rédigé :
« Art. 221-5-1 . - Les personnes morales peuvent être déclarées pénalement responsables dans les conditions prévues par l'article 121-2 des infractions définies à la présente section.
« Les peines encourues par les personnes morales sont :
« 1° L'amende, suivant les modalités prévues par l'article 131-38 ;
« 2° Les peines mentionnées à l'article 131-39.
« L'interdiction mentionnée au 2° de l'article 131-39 porte sur l'activité dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise. » - (Adopté.)
« Art. 2 quater . - Il est inséré, après l'article 222-6 du même code, un article 222-6-1 ainsi rédigé :
« Art. 222-6-1 . - Les personnes morales peuvent être déclarées pénalement responsables dans les conditions prévues par l'article 121-2 des infractions définies au présent paragraphe.
« Les peines encourues par les personnes morales sont :
« 1° L'amende, suivant les modalités prévues par l'article 131-38 ;
« 2° Les peines mentionnées à l'article 131-39.
« L'interdiction mentionnée au 2° de l'article 131-39 porte sur l'activité dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise. » - (Adopté.)
« Art. 2 quinquies . - Il est inséré, après l'article 222-16 du même code, un article 222-16-1 ainsi rédigé :
« Art. 222-16-1 . - Les personnes morales peuvent être déclarées pénalement responsables dans les conditions prévues par l'article 121-2 des infractions définies au présent paragraphe.
« Les peines encourues par les personnes morales sont :
« 1° L'amende, suivant les modalités prévues par l'article 131-38 ;
« 2° Les peines mentionnées à l'article 131-39.
« L'interdiction mentionnée au 2° de l'article 131-39 porte sur l'activité dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise. » - (Adopté.)
« Art. 2 sexies . - Il est inséré, après l'article 222-18 du même code, un article 222-18-1 ainsi rédigé :
« Art. 222-18-1 . - Les personnes morales peuvent être déclarées pénalement responsables dans les conditions prévues par l'article 121-2 des infractions définies au présent paragraphe.
« Les peines encourues par les personnes morales sont :
« 1° L'amende, suivant les modalités prévues par l'article 131-38 ;
« 2° Les peines mentionnées aux 2° à 9° de l'article 131-39 ;
« 3° La peine mentionnée au 1° de l'article 131-39 pour les infractions définies par les articles 222-17 (deuxième alinéa) et 222-18.
« L'interdiction mentionnée au 2° de l'article 131-39 porte sur l'activité dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise. » - (Adopté.)
« Art. 2 septies . - Il est inséré, après l'article 222-33 du même code, un article 222-33-1 ainsi rédigé :
« Art. 222-33-1 . - Les personnes morales peuvent être déclarées pénalement responsables dans les conditions prévues par l'article 121-2 des infractions définies aux articles 222-22 à 222-31.
« Les peines encourues par les personnes morales sont :
« 1° L'amende, suivant les modalités prévues par l'article 131-38 ;
« 2° Les peines mentionnées à l'article 131-39.
« L'interdiction mentionnée au 2° de l'article 131-39 porte sur l'activité dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise. » - (Adopté.)
« Art. 2 octies . - Il est inséré, après l'article 223-7 du même code, un article 223-7-1 ainsi rédigé :
« Art. 223-7-1 . - Les personnes morales peuvent être déclarées pénalement responsables dans les conditions prévues par l'article 121-2 des infractions définies à la présente section.
« Les peines encourues par les personnes morales sont :
« 1° L'amende, suivant les modalités prévues par l'article 131-38 ;
« 2° Les peines mentionnées aux 2° à 9° de l'article 131-39 ;
« 3° La peine mentionnée au 1° de l'article 131-39 pour les infractions prévues aux articles 223-5 et 223-6.
« L'interdiction mentionnée au 2° de l'article 131-39 porte sur l'activité dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise. » - (Adopté.)
« Art. 2 nonies . - Il est inséré, après l'article 223-15 du même code, un article 223-15-1 ainsi rédigé :
« Art. 223-15-1 . - Les personnes morales peuvent être déclarées pénalement responsables dans les conditions prévues par l'article 121-2 des infractions définies à la présente section.
« Les peines encourues par les personnes morales sont :
« 1° L'amende, suivant les modalités prévues par l'article 131-38 ;
« 2° Les peines mentionnées aux 2° à 9° de l'article 131-39 ;
« 3° La peine mentionnée au 1° de l'article 131-39 pour l'infraction prévue au deuxième alinéa de l'article 223-13.
« L'interdiction mentionnée au 2° de l'article 131-39 porte sur l'activité dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise. » - (Adopté.)
« Art. 2 decies . - La section 4 du chapitre V du titre II du livre II du même code est complétée par un article 225-18-1 ainsi rédigé :
« Art. 225-18-1 . - Les personnes morales peuvent être déclarées pénalement responsables dans les conditions prévues par l'article 121-2 des infractions définies aux articles 225-17 et 225-18.
« Les peines encourues par les personnes morales sont :
« 1° L'amende, suivant les modalités prévues par l'article 131-38 ;
« 2° Les peines mentionnées aux 2° à 9° de l'article 131-39 ;
« 3° La peine mentionnée au 1° de l'article 131-39 pour les infractions définies par l'article 225-18.
« L'interdiction mentionnée au 2° de l'article 131-39 porte sur l'activité dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise. » - (Adopté.)
« Art. 2 undecies . - Il est inséré, après l'article 227-4 du même code, un article 227-4-1 ainsi rédigé :
« Art. 227-4-1 . - Les personnes morales peuvent être déclarées pénalement responsables dans les conditions prévues par l'article 121-2 des infractions définies à la présente section.
« Les peines encourues par les personnes morales sont :
« 1° L'amende, suivant les modalités prévues par l'article 131-38 ;
« 2° Les peines mentionnées aux 2° à 9° de l'article 131-39.
« L'interdiction mentionnée au 2° de l'article 131-39 porte sur l'activité dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise. » - (Adopté.)
« Art. 2 duodecies . - L'article 227-17-2 du même code est ainsi modifié :
« 1° Dans la première phrase, les mots : "de l'infraction définie au second alinéa de l'article 227-17-1" sont remplacés par les mots : "des infractions définies aux articles 227-15 à 227-17-1" ;
« 2° Dans le 2°, les mots : "aux 1°, 2°, 4°, 8° et 9° de" sont remplacés par le mot : "à". » - (Adopté.)
« Art. 2 terdecies . - Dans le deuxième alinéa (1°) de l'article 131-39 du même code, les mots : "à cinq ans" sont remplacés par les mots : "ou égale à trois ans". » - (Adopté.)
« Art. 2 quaterdecies . - I. - L'article 132-13 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans les cas prévus par les deux alinéas précédents, la personne morale encourt, en outre, les peines mentionnées à l'article 131-39, sous réserve des dispositions du dernier alinéa de cet article. »
« II. - Dans le dernier alinéa du même article, les mots : "supérieure à 100 000 francs" sont remplacés par les mots : "d'au moins 100 000 francs". » - (Adopté.)

Chapitre III


Dispositions concernant la peine de dissolution encourue par les personnes morales pénalement responsables

Articles 4 et 5

M. le président. « Art. 4. - L'article 434-43 du code pénal est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Le fait, pour toute personne physique, de participer au maintien ou à la reconstitution, ouverte ou déguisée, d'une personne morale dont la dissolution a été prononcée en application des dispositions du 1° de l'article 131-39 est puni de trois ans d'emprisonnement et de 300 000 francs d'amende.
« Lorsque la dissolution a été prononcée pour une infraction commise en récidive, ou pour l'infraction prévue à l'alinéa précédent, la peine est portée à cinq ans d'emprisonnement et 500 000 francs d'amende. » - (Adopté.)
« Art. 5. - Avant le dernier alinéa de l'article 434-47 du même code, il est inséré un 5° ainsi rédigé :
« 5° Pour les infractions prévues aux deuxième et troisième alinéas de l'article 434-43, la peine de dissolution mentionnée au 1° de l'article 131-39. » - (Adopté.)

Chapitre IV

Dispositions limitant l'installation ou
la publicité des groupements sectaires

Article 6



M. le président.
« Art. 6. - Dans un périmètre situé à 200 mètres d'un hôpital, d'un hospice, d'une maison de retraite, d'un établissement public ou privé de prévention, de cure ou de soins comportant hospitalisation, d'un dispensaire de prévention relevant des services départementaux d'hygiène sociale, d'un centre social et médico-social ou d'un établissement d'enseignement maternel, primaire ou secondaire, le maire et, à Paris, le préfet de police peut interdire l'installation d'une personne morale, quels qu'en soit la forme juridique ou l'objet, qui poursuit des activités ayant pour but ou pour effet de créer ou d'exploiter la dépendance psychologique ou physique des personnes qui participent à ces activités, lorsqu'ont été prononcées à plusieurs reprises, contre la personne morale elle-même ou ses dirigeants de droit ou de fait, des condamnations pénales définitives pour l'une ou l'autre des infractions mentionnées ci-après :
« 1° Infractions d'atteintes volontaires ou involontaires à la vie ou à l'intégrité physique ou psychique de la personne, de mise en danger de la personne, d'atteinte aux libertés de la personne, d'atteinte à la dignité de la personne, d'atteinte à la personnalité, de mise en péril des mineurs ou d'atteintes aux biens prévues par les articles 221-1 à 221-6, 222-1 à 222-40, 223-1 à 223-15, 224-1 à 224-4, 225-5 à 225-15, 225-16-4 à 225-16-6, 225-17 et 225-18, 226-1 à 226-23, 227-1 à 227-27, 311-1 à 311-13, 312-1 à 312-12, 313-1 à 313-4, 314-1 à 314-3 et 324-1 à 324-6 du code pénal ;
« 2° Infractions d'exercice illégal de la médecine ou de la pharmacie prévues par les articles L. 376 et L. 517 du code de la santé publique ;
« 3° Infractions de publicité mensongère, de fraudes ou de falsifications prévues par les articles L. 121-6 et L. 213-1 à L. 213-4 du code de la consommation.
« Le non-respect d'une interdiction prononcée en application des dispositions du présent article est puni de deux ans d'emprisonnement et de 200 000 francs d'amende.
« Les personnes morales peuvent être déclarées pénalement responsables, dans les conditions prévues par l'article 121-2 du code pénal, de cette infraction. La peine encourue par les personnes morales est l'amende, suivant les modalités prévues par l'article 131-38 du code pénal. »
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 5, M. About, au nom de la commission, propose de supprimer cet article.
Par amendement n° 15 rectifié, Mme Borvo et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent :
I. - De rédiger comme suit le premier alinéa de l'article 6 :
« Le représentant de l'Etat dans le département, et à Paris le préfet de police, peut prendre des arrêtés pour déterminer le périmètre autour d'un hôpital, d'un hospice, d'une maison de retraite, d'un établissement public ou privé de prévention, de cure ou de soins comportant hospitalisation, d'un dispensaire de prévention relevant des services départementaux d'hygiène sociale, d'un centre social et médico-social ou d'un établissement d'enseignement maternel, primaire ou secondaire, à l'intérieur duquel ne peut s'établir une personne morale, quelle qu'en soit la forme juridique, qui poursuit des activités ayant pour but ou pour effet de créer, de maintenir ou d'exploiter la sujétion psychologique, physique des personnes qui participent à ces activités, lorsqu'ont été prononcées, à plusieurs reprises, contre la personne morale elle-même ou ses dirigeants de droit ou de fait, des condamnations pénales définitives pour l'une ou l'autre des condamnations pénales définitives pour l'une ou l'autre des infractions mentionnées ci-après »
II. - Après le quatrième alinéa de cet article, d'insérer trois alinéas nouveaux ainsi rédigés :
« Le périmètre est calculé en suivant l'axe des voies ouvertes à la circulation publique entre et à l'aplomb des portes d'accès et de sortie les plus rapprochées de l'établissement protégé d'une part et la personne morale d'autre part.
« Dans le calcul, la dénivellation au-dessus et au-dessous du sol, selon que la personne morale susvisée est installée dans un édifice en hauteur ou une infrastructure en sous-sol, doit être prise en ligne de compte.
« L'intérieur des édifices et établissements en cause est compris dans les zones de protection ainsi déterminées. »
Par amendement n° 18, M. Domeizel, Mme Derycke, MM. Lagauche, Signé et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent :
I. - De rédiger ainsi le début du premier alinéa de l'article 6 : « Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris » ;
II. - Dans le même alinéa, après les mots : « lorsqu'ont été prononcées », supprimer les mots : « à plusieurs reprises ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 5.
M. Nicolas About, rapporteur. L'article 6 tend à permettre aux maires d'interdire l'installation de groupements sectaires à proximité de certains établissements tels que les écoles ou les hospices.
L'idée est intéressante, mais la commission des lois s'est demandée comment le maire pourrait mettre en oeuvre ce pouvoir alors qu'il ne dispose pas des informations nécessaires.
Elle propose donc la suppression de cet article. Néanmoins, nos collègues du groupe socialiste et ceux du groupe communiste républicain et citoyen proposent un autre système mis en oeuvre par le préfet. Si l'un de ces systèmes est jugé acceptable par le Gouvernement, la commission pourrait retirer son amendement de suppression.
M. le président. La parole est à Mme Borvo, pour défendre l'amendement n° 15 rectifié.
Mme Nicole Borvo. Comme je l'ai dit tout à l'heure, nous suggérons, par cet amendement, de conserver la logique du périmètre à l'intérieur duquel ne pourrait pas s'implanter un mouvement sectaire et de confier le pouvoir de faire appliquer la mesure non plus au maire, mais au seul préfet.
D'autres avant moi ont émis la crainte que ce pouvoir d'interdiction ne se retourne contre le maire, qui sera directement en butte aux pressions de toutes sortes. Il nous semble que le préfet est mieux armé pour vérifier les mouvements sectaires et leur degré de dangerosité.
Pour tenter de respecter au mieux les libertés, nous proposons une rédaction moins radicale que celle qui a été retenue par nos collègues socialistes. En effet, en nous situant dans la logique du délit d'abus de faiblesse, nous pensons judicieux de raisonner en termes de zones sensibles définies comme celles où se situent des personnes dont on peut présupposer qu'elles sont en situation de faiblesse en raison de leur âge ou de leur état physique.
Néanmoins, je l'ai dit, nous ne sommes pas fermés à la discussion. Nous déciderons du sort de notre amendement au vu des arguments des uns et des autres. J'attends notamment de connaître l'avis du Gouvernement.
M. le président. La parole est à M. Lagauche, pour défendre l'amendement n° 18.
M. Serge Lagauche. Notre argumentation va dans la même direction que celle que vient d'exposer Mme Borvo. Nous souhaitons, nous aussi, connaître l'avis de Mme le ministre pour déterminer l'attitude que nous prendrons.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 5, 15 rectifié et 18 ?
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 5, présenté par la commission des lois, qui tend à supprimer l'article 6 de la proposition de loi relatif à la limitation géographique de l'implantation des établissements dits sectaires.
En effet, il est nécessaire que les maires et, à Paris, le préfet de police aient la possibilité d'interdire à des groupements sectaires, dans des conditions similaires à celles qui sont prévues à l'article 1er sur la dissolution judiciaire, de s'installer à moins de deux cent mètres de certains lieux sensibles.
Cette disposition s'inspire de l'article 99 de la loi du 30 juillet 1987 portant diverses mesures d'ordre social, qui prévoit également une interdiction, dans un périmètre de cent mètres autour des écoles, des établissements dont l'activité principale est la vente ou la mise à disposition publique de publications interdites aux mineurs, en particulier les sex-shops.
L'amendement n° 15 rectifié, présenté par le groupe communiste républicain et citoyen, et l'amendement n° 18, présenté par les sénateurs socialistes, tendent à modifier l'article 6 pour confier le pouvoir de s'opposer à l'implantation des établissements dits sectaires, non pas au maire ou, à Paris, au préfet de police, comme le prévoit le texte voté par l'Assemblée nationale, mais aux préfets, considérant que ces derniers ont à leur disposition plus d'informations et de moyens que les maires et qu'ils sont donc mieux à même de prendre des décisions.
Je crois utile de préciser, dans la mesure du possible, quels sont les degrés de l'opposition du Gouvernement à ces différents amendements.
L'avis défavorable que le Gouvernement émet sur ces trois amendements - avis que je vous communique bien évidemment en accord avec le ministre de l'intérieur, qui est plus principalement concerné par ces dispositions, car elles relèvent de la police administrative - signifie que le Gouvernement souhaiterait une adoption conforme par la Haute Assemblée de l'article 6 de la proposition de loi.
Il me semble toutefois que la solution la plus mauvaise serait de confier ces pouvoirs aux préfets, car ils relèvent sans aucun doute de la police municipale et doivent donc être mis en oeuvre par les maires. C'est là une question de cohérence juridique et de respect du partage des compétences entre les pouvoirs respectifs des maires et des préfets, partage que le Gouvernement ne souhaite pas voir mis en cause à l'occasion de ce texte. Le Gouvernement est donc très fermement opposé aux amendements n°s 15 rectifié et 18.
L'opposition du Gouvernement à l'amendement n° 5 de suppression est d'une autre nature, puisqu'il répond à des critères d'opportunité. En effet, le Gouvernement estime opportun de donner aux maires, dans certaines conditions précisément délimitées, la possibilité d'interdire l'implantation d'un mouvement sectaire sur leur commune. Cette proposition a d'ailleurs pour origine plusieurs propositions de loi déposées à l'Assemblée nationale par des députés-maires de l'opposition, que le rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée nationale, Mme Picard, a intégrées à la proposition de loi de M. About. Il appartient donc aux maires d'apprécier s'ils souhaitent ou non bénéficier de ces nouvelles prérogatives et, de par sa composition, le Sénat est évidemment très bien placé pour donner son point de vue sur cette question.
L'opposition du Gouvernement à l'amendement n° 5 est en conséquence moins forte que son opposition aux amendements n°s 15 rectifié et 18, même si elle reste particulièrement ferme.
La question est difficile. Le problème est, d'abord, de ne pas donner au préfet un pouvoir qu'il ne pourra évidemment pas exercer. Faut-il que les maires aient ce pouvoir ?
Discutant récemment d'un autre projet de loi, l'Assemblée nationale s'est interrogée sur le lien qui existe entre le maire officier, magistrat, et le procureur. La sagesse a semblé finalement de laisser à la justice ce qui relève de la justice ; c'est à vous d'en décider ici.
M. le président. Monsieur le rapporteur, l'amendement n° 5 est-il maintenu ?
M. Nicolas About, rapporteur. La commission a indiqué que, dans la mesure où le Gouvernement n'accepterait pas l'un des deux amendements n°s 15 rectifié ou 18, elle demanderait la suppression de l'article 6. Je maintiens donc l'amendement.
M. le président. Madame Borvo, l'amendement n° 15 rectifié est-il maintenu ?
Mme Nicole Borvo. Je vais retirer mon amendement, mais je ne suis pas convaincue. Je remarque que tout le monde s'accorde à dire qu'il y a une véritable difficulté. Faut-il mettre les maires devant cette difficulté ? Je ne le pense pas. Or, justement, notre amendement tendait à les en soustraire. Peut-être effectivement ne faut-il pas statuer sur la question.
M. le président. L'amendement n° 15 rectifié est retiré.
Monsieur Lagauche, l'amendement n° 18 est-il maintenu ?
M. Serge Lagauche. Je crois que le raisonnement de Mme la ministre est très juste. Simplement, il était opportun de s'interroger : le maire aura-t-il la capacité de connaître la situation ? En tout cas, Mme Lebranchu a raison de dire que, pour le préfet, la situation est la même. Je retire donc l'amendement.
M. le président. L'amendement n° 18 est retiré.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 5.
M. Michel Caldaguès. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Caldaguès.
M. Michel Caldaguès. En fait, monsieur le président, je souhaiterais poser une question. Selon la réponse qui me sera faite, je déterminerai ma position. S'il avait été maintenu, j'aurais voté l'amendement de Mme Borvo, à condition qu'une réponse positive ait été donnée à la question que je vais poser.
J'aimerais savoir si, parmi les infractions mentionnées, figurent le trafic de stupéfiants et la complicité de trafic de stupéfiants. M. le rapporteur a, tout à l'heure, très justement évoqué nos préoccupations touchant à la santé et à l'intégrité de nos enfants. Elles sont singulièrement en cause lorsqu'il s'agit du trafic de stupéfiants. Par conséquent, tout dispositif qui permettrait d'empêcher l'installation, dans le rayon des établissements dont il est question, de personnes morales ayant encouru ou dont les dirigeants auraient encouru des condamnations pour trafic ou complicité de trafic de stupéfiants recueillerait mon approbation.
Je pose la question soit à la commission, soit au Gouvernement, en les priant de m'excuser de n'avoir pas été en mesure de vérifier par moi-même.
M. Nicolas About, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Nicolas About, rapporteur. Effectivement, la personne morale peut être condamnée pour trafic de stupéfiants. Cela fait partie des condamnations qui pourraient être infligées.
Je peux rassurer M. Caldaguès : bien entendu, nous ne souhaitons pas permettre à des groupements de favoriser le développement des stupéfiants, ce qui est pour nous tout aussi condamnable, puisque frappant, comme toujours, les plus fragiles d'entre nous, c'est-à-dire nos enfants.
M. Michel Caldaguès. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Caldaguès.
M. Michel Caldaguès. Monsieur le rappporteur, je ne pense pas que nous nous soyons bien compris. Je demande si les condamnations visées tant dans l'amendement de Mme Borvo que dans le texte de l'Assemblée nationale s'appliquant aux infractions définies comme « l'une ou l'autre des infractions mentionnées ci-après » concernent ou non le trafic de stupéfiants et la complicité de trafics de stupéfiants. Cette question est très importante.
M. Nicolas About, rapporteur. Ce n'est pas nécessaire de le mentionner. Cela figure déjà dans le code pénal.
M. Michel Caldaguès. Veuillez excuser mon ignorance, monsieur le rapporteur. Lorsqu'on n'est pas membre de la commission des lois, on a toujours la possibilité de remédier à son ignorance en séance publique.
Si j'ai bien compris, il existe donc déjà un texte permettant d'interdire l'installation dans un périmètre donné d'une personne morale qui...
M. Nicolas About, rapporteur. Non !
M. Michel Caldaguès. Mais c'est ce que je souhaite ! Selon moi, il faut aussi pouvoir interdire l'installation, dans le périmètre d'un hospice, d'une maison de retraite ou d'un établissement public, etc., d'une personne morale dont les dirigeants ont subi une condamnation définitive pour trafic de stupéfiants ou complicité de trafic de stupéfiants. Vous m'obligeriez beaucoup, monsieur le rapporteur, en me répondant avec précision, parce que j'ai épuisé mes possibilités de prise de parole sur cet amendement.
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Monsieur le sénateur, le trafic de stupéfiants peut évidemment donner lieu à des condamnations pénales. Dès lors, je ne comprends pas votre interrogation.
M. Michel Caldaguès. Mais le trafic de stupéfiants fait-il partie des infractions mentionnées dans le texte ?
M. Nicolas About, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Nicolas About, rapporteur. On a évoqué un certain nombre de délits pour lesquels sont condamnées régulièrement les organisations sectaires. Le trafic de drogue, a priori , n'en fait pas partie. Cela dit, nous faisons preuve d'humilité : nous ne prétendons pas avoir visé tous les cas qui méritaient de l'être. C'est pourquoi je regrette que M. Caldaguès n'ait pas déposé un amendement spécifique : l'adopter nous aurait permis de renforcer la lutte contre ces organisations très dangereuses.
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Je crois pouvoir rassurer tout le monde : le trafic de drogue figure parmi les infractions visées au chapitre IV de la proposition de loi ; il s'agit de l'article 222-40 du code pénal.
M. Michel Caldaguès. Je vous remercie, madame le garde des sceaux ! Je ne voterai donc pas l'amendement de suppression.
M. Philippe Marini. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini. Moi non plus, je ne voterai pas cet amendement de suppression, car je ne crois pas que les maires doivent éluder leurs responsabilités.
Certes, le maire n'a pas les renseignements généraux à sa disposition, mais il est en mesure de savoir ce qui se passe dans sa commune en écoutant les habitants. Si des décisions doivent être prises, fussent-elles difficiles à prendre, il lui appartient, en son âme et conscience, d'assumer ses responsabilités.
Je ne suis donc pas partisan de dispositifs qui, à l'image des amendements qui ont été retirés, auraient pour effet de faire glisser du maire vers le préfet une responsabilité qui, après tout, peut très bien être celle du maire. Nous ne saurions, en tant que gestionnaires de collectivités territoriales, solliciter l'autonomie quand cela nous arrange et fuir les responsabilités quand elles nous gênent. C'est une question de cohérence et de bon sens.
Une fois n'est pas coutume, je voterai donc le texte que soutient le Gouvernement, mais je le ferai, malgré tout, avec un peu d'ironie. En effet, les gens dont il est ici question sont-ils vraiment de ceux qui sollicitent systématiquement des autorisations pour s'installer ? Pour tomber sous le coup d'une mesure d'interdiction d'installation, encore faut-il que la demande soit formulée auprès d'une autorité quelconque !
La disposition préconisée par le Gouvernement ne me paraît pas mauvaise dans son objet ; elle me paraît simplement quelque peu naïve dans son dispositif. Je ne crois pas qu'elle change grand-chose aux risques très réels qui peuvent peser sur une partie de nos concitoyens, en particulier sur les plus fragiles d'entre eux.
C'est sous le bénéfice de ces différentes observations, et aussi sous l'éclairage du très intéressant échange entre M. Caldaguès et M. le rapporteur auquel cet amendement a donné lieu, que je m'apprête - la commission, je l'espère, ne m'en voudra pas - à ne pas voter l'amendement n° 5.
M. Jacques Larché, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jacques Larché, président de la commission. Cet amendement de suppression est nécessaire parce que nous sommes dans un domaine où nous engageons très lourdement la responsabilité des maires, alors même qu'ils ne disposent pas véritablement des éléments d'information nécessaires. Quelle que soit la taille de la commune, comment voulez-vous qu'un maire sache que le groupement qui va s'installer entre dans le champ d'application de ce texte ?
Si le maire ne faisait pas ce que la loi lui permettrait dans le cas où l'amendement de suppression ne serait pas voté, sa responsabilité personnelle serait en cause puisqu'il n'aurait pas accompli un devoir qui lui serait imparti par la loi.
Je rappelle au Sénat que, à de très nombreuses reprises, nous avons tenté de bien cerner ces problèmes de la responsabilité des maires, en nous préoccupant en particulier de ne pas l'étendre à des domaines nouveaux. Nous devons, en cet instant, être très attentifs à cet aspect.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 5, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 6 est supprimé.

Article 7



M. le président.
« Art. 7. - L'article L. 421-1 du code de l'urbanisme est complété par quatre alinéas ainsi rédigés :
« Le permis peut être refusé à toute personne morale, quelle qu'en soit la forme juridique ou l'objet, qui poursuit des activités ayant pour but ou pour effet de créer ou d'exploiter la dépendance psychologique ou physique des personnes qui participent à ces activités, lorsque ont été prononcées à plusieurs reprises, contre la personne morale elle-même ou ses dirigeants de droit ou de fait, des condamnations pénales pour l'une ou l'autre des infractions mentionnées ci-après :
« 1° Infractions d'atteintes volontaires ou involontaires à la vie ou à l'intégrité physique ou psychique de la personne, de mise en danger de la personne, d'atteinte aux libertés de la personne, d'atteinte à la dignité de la personne, d'atteinte à la personnalité, de mise en péril des mineurs ou d'atteintes aux biens prévues par les articles 221-1 à 221-6, 222-1 à 222-40, 223-1 à 223-15, 224-1 à 224-4, 225-5 à 225-15, 225-16-4 à 225-16-6, 225-17 et 225-18, 226-1 à 226-23, 227-1 à 227-27, 311-1 à 311-13, 312-1 à 312-12, 313-1 à 313-4, 314-1 à 314-3 et 324-1 à 324-6 du code pénal ;
« 2° Infractions d'exercice illégal de la médecine ou de la pharmacie prévues par les articles L. 376 et L. 517 du code de la santé publique ;
« 3° Infractions de publicité mensongère, de fraudes ou de falsifications prévues par les articles L. 121-6 et L. 213-1 à L. 213-4 du code de la consommation. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 6, M. About, au nom de la commission, propose de supprimer cet article.
Par amendement n° 19, Mme Derycke, MM. Lagauche, Domeizel, Signé, les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, dans le premier alinéa du texte présenté par l'article 7 pour compléter l'article L. 421-1 du code de l'urbanisme, après les mots : « lorsque ont été prononcées », de supprimer les mots : « à plusieurs reprises ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 6.
M. Nicolas About, rapporteur. Il s'agit d'un problème comparable à celui que nous venons d'aborder.
L'article 7 de la proposition de loi tend à permettre de refuser un permis de construire à un groupement sectaire déjà condamné.
La commission a estimé qu'une telle disposition serait très difficile à mettre en oeuvre et qu'un maire qui n'aurait pas perçu la véritable nature d'un groupement pourrait se faire reprocher d'avoir accordé le permis de construire.
Il existe des documents d'urbanisme qui règlent les conditions d'attribution du permis de construire. C'est donc sur ces documents qu'il faut travailler.
M. le président. La parole est à M. Lagauche, pour défendre l'amendement n° 19.
M. Serge Lagauche. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 19 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 6 ?
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement pour les raisons qui ont été précédemment invoquées.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 6.
M. Michel Caldaguès. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Caldaguès.
M. Michel Caldaguès. Je crois savoir que cette disposition résulte d'une initiative de l'un de mes excellents amis, député de Paris. Cet ami me paraît avoir été emporté par son zèle, et je voterai l'amendement de suppression proposé par la commission.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 6, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 7 est supprimé.

Article 8



M. le président.
« Art. 8. - Est puni de 50 000 F d'amende le fait de diffuser, par quelque moyen que ce soit, des messages destinés à la jeunesse et faisant la promotion d'une personne morale, quelle qu'en soit la forme juridique ou l'objet, qui poursuit des activités ayant pour but ou pour effet de créer ou d'exploiter la dépendance psychologique ou physique des personnes qui participent à ces activités, lorsqu'ont été prononcées à plusieurs reprises, contre la personne morale elle-même ou ses dirigeants de droit ou de fait, des condamnations pénales définitives pour l'une ou l'autre des infractions mentionnées ci-après :
« 1° Infractions d'atteintes volontaires ou involontaires à la vie ou à l'intégrité physique ou psychique de la personne, de mise en danger de la personne, d'atteinte aux libertés de la personne, d'atteinte à la dignité de la personne, d'atteinte à la personnalité, de mise en péril des mineurs ou d'atteintes aux biens prévues par les articles 221-1 à 221-6, 222-1 à 222-40, 223-1 à 223-15, 224-1 à 224-4, 225-5 à 225-15, 225-16-4 à 225-16-6, 225-17 et 225-18, 226-1 à 226-23, 227-1 à 227-27, 311-1 à 311-13, 312-1 à 312-12, 313-1 à 313-4, 314-1 à 314-3 et 324-1 à 324-6 du code pénal ;
« 2° Infractions d'exercice illégal de la médecine ou de la pharmacie prévues par les articles L. 376 et L. 517 du code de la santé publique ;
« 3° Infractions de publicité mensongère, de fraudes ou de falsifications prévues par les articles L. 121-6 et L. 213-1 à L. 213-4 du code de la consommation.
« Les mêmes peines sont applicables lorsque les messages visés au premier alinéa du présent article invitent à rejoindre une telle personne morale.
« Les personnes morales peuvent être déclarées pénalement responsables dans les conditions prévues par l'article 121-2 du code pénal des infractions définies au présent article. La peine encourue par les personnes morales est l'amende, suivant les modalités prévues par l'article 131-38 du code pénal. »
Par amendement n° 7, M. About, au nom de la commission, propose, dans le premier alinéa de cet article, de remplacer les mots : « ou d'exploiter la dépendance » par les mots : « , de maintenir ou d'exploiter la sujétion ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Nicolas About, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination. J'indique d'ores et déjà qu'il en est de même pour les amendements n°s 8 et 27.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Le Gouvernement est favorable à cet amendement, de même qu'aux amendements n°s 8 et 27.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 7, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 8, M. About, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit le deuxième alinéa de l'article 8 :
« 1°. Infractions d'atteintes volontaires ou involontaires à la vie ou à l'intégrité physique ou psychique de la personne, de mise en danger de la personne, d'atteinte aux libertés de la personne, d'atteinte à la dignité de la personne, d'atteinte à la personnalité, de mise en péril des mineurs ou d'atteintes aux biens prévues par les articles 221-1 à 221-6, 222-1 à 222-40, 223-1 à 223-15, 223-15-2, 224-1 à 224-4, 225-5 à 225-15, 225-17 et 225-18, 226-1 à 226-23, 227-1 à 227-27, 311-1 à 311-13, 312-1 à 312-12, 313-1 à 313-3, 314-1 à 314-3 et 324-1 à 324-6 du code pénal. »
Cet amendement a déjà été défendu et le Gouvernement a déjà fait connaître son avis.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 8, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 27, M. About, au nom de la commission, propose, dans le troisième alinéa (2°) de l'article 8, de remplacer les mots : « L. 376 et L. 517 » par les mots : « L. 4161-5 et L. 4223-1 ».
Cet amendement a déjà été défendu et le Gouvernement a déjà fait connaître son avis.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 27, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 8, modifié.

(L'article 8 est adopté.)

Chapitre V

Dispositions instituant
le délit de manipulation mentale

M. le président. Par amendement n° 9, M. About, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit cet intitulé : « Dispositions relatives à l'abus frauduleux de l'état d'ignorance ou de faiblesse ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Nicolas About, rapporteur. La commission proposant de supprimer le délit de manipulation mentale, il est logique de modifier l'intitué du chapitre V.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. La proposition de la commission est tout à fait cohérente. Le Gouvernement émet donc un avis favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 9, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'intitulé du chapitre V est ainsi rédigé.

Article 9



M. le président.
« Art. 9. - Il est créé, après l'article 225-16-3 du code pénal, une section 3 ter ainsi rédigée :
« Section 3 ter
« De la manipulation mentale
« Art. 225-16-4 . - Le fait, au sein d'un groupement qui poursuit des activités ayant pour but ou pour effet de créer ou d'exploiter la dépendance psychologique ou physique des personnes qui participent à ces activités, d'exercer sur l'une d'entre elles des pressions graves et réitérées ou d'utiliser des techniques propres à altérer son jugement afin de la conduire, contre son gré ou non, à un acte ou à une abstention qui lui est gravement préjudiciable, est puni de trois ans d'emprisonnement et de 300 000 F d'amende.
« Art. 225-16-5 . - L'infraction prévue à l'article 225-16-4 est punie de cinq ans d'emprisonnement et de 500 000 F d'amende lorsqu'elle est commise sur une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de son auteur.
« Art. 225-16-6 . - Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues par l'article 121-2, des infractions définies à la présente section.
« Les peines encourues par les personnes morales sont :
« 1° L'amende, suivant les modalités prévues par l'article 131-38 ;
« 2° Les peines mentionnées à l'article 131-39.
« L'interdiction mentionnée au 2° de l'article 131-39 porte sur l'activité dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise. »
Sur l'article, la parole est à M. Grignon.
M. Francis Grignon. Dans toute démocratie, la liberté de conscience, la liberté religieuse et la liberté d'association sont des droits fondamentaux assurés aux citoyens. Cependant, les groupements à caractère sectaire, dangereux pour la démocratie, s'appuient sur ces libertés fondamentales pour prospérer. La difficulté est de s'opposer à ces groupements qui ignorent les règles démocratiques et républicaines tout en veillant à ne porter atteinte à aucune des libertés garanties par la Constitution.
A ce titre, le délit de manipulation mentale introduit par l'Assemblée nationale a fait l'objet de nombreuses critiques et interrogations dans la mesure où il pouvait se montrer dangereux pour l'exercice de ces libertés, et notamment pour la liberté religieuse. De surcroît, il existe déjà un arsenal juridique suffisant pour sanctionner les pratiques de déstabilisation mentale. Ces mesures, il faut les appliquer, et il ne sert à rien de bouleverser le droit.
Je pense qu'il est essentiel de concilier le bon exercice de la liberté religieuse avec la lutte contre les sectes.
Autant le délit de manipulation mentale présente certains dangers, autant le dispositif proposé par la commission des lois est plus prudent, tout en introduisant un arsenal qui permet de lutter efficacement contre les sectes. La nouvelle rédaction de l'article 9 s'appuie sur l'avis de la Commission nationale consultative des droits de l'homme, qui estime qu'il n'est pas nécessaire de créer un délit spécifique et considère que des circonstances aggravantes peuvent être prévues lorsque l'état de dépendance physique ou psychique a été causé par une secte.
Je considère que, face au problème des sectes, il est essentiel de conserver une attitude très pragmatique en améliorant quelques points du dispositif juridique existant mais qu'il ne faut en aucun cas bouleverser le droit en créant un régime juridique spécifique aux sectes, car, à terme, cela conduirait à une limitation de l'exercice des libertés fondamentales.
C'est pourquoi je voterai l'amendement qu'a déposé la commission sur cet article.
M. le président. Par amendement n° 10, M. About, au nom de la commission des lois, propose de rédiger comme suit cet article :
« Il est créé, après l'article 223-15 du code pénal, une section VI bis ainsi rédigée :
« Section VI bis
« De l'abus frauduleux de l'état d'ignorance ou de faiblesse
« Art. 223-15-2. - Est puni de trois ans d'emprisonnement et de 2 500 000 F d'amende, l'abus frauduleux de l'état d'ignorance ou de la situation de faiblesse soit d'un mineur, soit d'une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente et connue de son auteur, soit d'une personne en état de sujétion psychologique ou physique résultant de l'exercice de pressions graves ou réitérées ou de techniques propres à altérer son jugement, pour conduire ce mineur ou cette personne à un acte ou à une abstention qui lui sont gravement préjudiciables.
« Lorsque l'infraction est commise par le dirigeant de fait ou de droit d'un groupement qui poursuit des activités ayant pour but ou pour effet de créer, de maintenir ou d'exploiter la sujétion psychologique ou physique des personnes qui participent à ces activités, les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et à 5 000 000 F d'amende.
« Art. 223-15-3. - Les personnes physiques coupables du délit prévu à la présente section encourent également les peines complémentaires suivantes :
« 1° L'interdiction des droits civiques, civils et de famille, suivant les modalités prévues par l'article 131-26 ;
« 2° L'interdiction, suivant les modalités prévues par l'article 131-27, d'exercer une fonction publique ou d'exercer l'activité professionnelle ou sociale dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise, pour une durée de cinq ans au plus ;
« 3° La fermeture, pour une durée de cinq ans au plus, des établissements ou de l'un ou de plusieurs des établissements de l'entreprise ayant servi à commettre les faits incriminés ;
« 4° La confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l'infraction ou de la chose qui en est le produit, à l'exception des objets susceptibles de restitution ;
« 5° L'interdiction de séjour, suivant les modalités prévues par l'article 131-31 ;
« 6° L'interdiction, pour une durée de cinq ans au plus, d'émettre des chèques autres que ceux qui permettent le retrait de fonds par le tireur auprès du tiré ou ceux qui sont certifiés ;
« 7° L'affichage ou la diffusion de la décision prononcée dans les conditions prévues par l'article 131-35.
« Art. 223-15-4. - Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues par l'article 121-2, de l'infraction définie à la présente section.
« Les peines encourues par les personnes morales sont :
« 1° L'amende, suivant les modalités prévues par l'article 131-38 ;
« 2° Les peines mentionnées à l'article 131-39.
« L'interdiction mentionnée au 2° de l'article 131-39 porte sur l'activité dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Nicolas About, rapporteur. Cet amendement tend à modifier l'article 9 pour tenir compte des critiques formulées contre le délit de manipulation mentale et surtout des remarques de la Commission nationale consultative des droits de l'homme.
Il s'agit de compléter et de déplacer du livre III au livre II du code pénal le délit d'abus frauduleux de l'état d'ignorance et de faiblesse plutôt que de créer un nouveau délit spécifique aux sectes ; j'ai déjà dit que je n'aimais pas les délits spécifiques...
Les peines encourues seraient aggravées lorsque l'infraction est commise par le dirigeant ou le représentant d'un groupement qui poursuit des activités ayant pour but ou pour effet de créer, de maintenir et d'exploiter la sujétion psychologique ou physique des personnes qui participent à ces activités. Les personnes morales pourraient, en outre, être déclarées pénalement responsables de ce délit d'abus de faiblesse.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. J'ai déjà indiqué dans mon discours introductif que j'étais pleinement favorable à cet amendement.
Il convient de se féliciter que, sur cette question sensible, M. About et la commission des lois du Sénat, à partir des dispositions initialement adoptées par l'Assemblée nationale et éclairés par l'avis de la Commission consultative des droits de l'homme, aient pu parvenir à un texte satisfaisant.
Je souhaite, par ailleurs, observer que les dispositions retenues ont pour origine une infraction très ancienne de notre droit, puisqu'elle figurait dans le code pénal napoléonien, à savoir l'abus des faiblesses d'un mineur.
Cette infraction, plus ou moins tombée en désuétude, avait ensuite, sur l'initiative de M. Robert Badinter, trouvé une nouvelle vie dans le nouveau code pénal, qui étendit ses éléments constitutifs à l'hypothèse de l'abus frauduleux de la faiblesse d'une personne vulnérable.
J'éprouve une certaine satisfaction à constater que c'est une infraction traditionnelle qui, sous réserve d'avoir fait l'objet à deux reprises d'une « cure de jouvence », permettra à l'avenir de réprimer et, je l'espère, de prévenir de façon efficace les dérives sectaires que connaît malheureusement aujourd'hui notre société.
Les rédacteurs du code Napoléon n'avaient certes pas songé qu'une de ses dispositions aurait un jour, près de deux siècles après sa promulgation, une telle utilité !
Cette solution est, en tout état de cause, préférable à la création d'une infraction nouvelle, dont la spécificité pouvait paraître critiquable.
L'amendement n° 10 inscrit, en effet, le caractère pénalement condamnable des dérives sectaires dans l'ensemble du droit pénal existant, ce qui renforce la légitimité d'une telle répression.
J'y suis donc favorable.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 10.
M. Michel Caldaguès. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Caldaguès.
M. Michel Caldaguès. Avec l'article 9, modifié ou non par l'amendement n° 10, nous nous heurtons très précisément au risque que j'évoquais au cours de la discussion générale.
Il est intéressant de décortiquer cet article 9 - je le répète ; amendé ou non. On constate qu'il contient toute une collection d'alternatives. Par conséquent, il frappe les esprits par un certain nombre de notions, de faits ou d'affirmations qui ne sont que des alternatives par rapport à d'autres.
Alors, j'ai fait mes emplettes au sein de l'article 9.
Voici comme j'ai reconstitué le « panier » : si on lit bien l'article 9 et que l'on tient compte des alternatives - des « ou » - on constate qu'est puni l'abus frauduleux de l'état d'ignorance d'une personne en état de sujétion psychologique résultant de l'exercice de pressions réitérées pour la conduire à un acte ou à une abstention qui lui sont gravement préjudiciables.
Je me ferais fort, si j'étais maître de l'action publique, d'envoyer, sinon n'importe qui en prison avec une telle phrase, en tout cas beaucoup de gens !
M. Nicolas About, rapporteur. Il faudrait y parvenir !
M. Michel Caldaguès. C'est pourquoi je ne voterai évidemment ni l'amendement ni l'article.
M. Nicolas About, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Nicolas About, rapporteur. Je ne peux pas laisser dire que la France est remplie de gens qui abusent frauduleusement de l'état de faiblesse, d'ignorance ou de sujétion de certaines personnes pour les amener à des actes qui leur sont gravement préjudiciables. Ce n'est pas possible ! Ces gens sont malheureusement trop nombreux, mais il n'y a pas qu'eux, et c'est justement à ces personnes que nous nous attaquons pour essayer de les faire condamner.
M. Michel Caldaguès. Je demande la parole, pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Caldaguès. M. Michel Caldaguès. Je veux répondre à M. About, qui essaye, parce que c'est de cela qu'il s'agit, de déconsidérer mon intervention.
M. Nicolas About, rapporteur. Non, je réponds !
M. Michel Caldaguès. L'article 9 peut parfaitement permettre, par exemple, de condamner ceux qui ont recours à des procédés publicitaires douteux. C'est ainsi que la télévision publique aurait l'intention de supprimer la publicité dans les émissions enfantines, laquelle peut en effet être à l'origine des conditionnements qu'il est aisé d'imaginer. Ce n'est qu'un exemple !
Sans aller jusqu'à dire que la France est remplie de gens qui abusent de l'ignorance, ou de la faiblesse des autres - si mon expression a été trop forte, je l'atténue - je dis qu'avec un tel texte, on peut condamner beaucoup de gens,...
M. Nicolas About, rapporteur. Je ne le crois pas !
M. Michel Caldaguès. ... peut-être même nuire à la liberté d'expression et, plus précisément, à la liberté de la presse. Lisez attentivement ce texte, et vous me comprendrez!
M. Nicolas About, rapporteur. Le rapporteur a une autre idée de la valeur des juges !
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Monsieur Caldaguès, j'ai confiance dans les magistrats de mon pays et je suis convaincue qu'ils feront la différence entre une publicité pour une lessive et un abus de faiblesse.
En revanche, je vous rappelle que certains procédés de vente qui forcent la porte de personnes considérées comme fragiles sont actuellement condamnables, y compris par le code de la consommation. Ce sont dorénavant des délits.
Par conséquent, je crois les magistrats parfaitement capables de distinguer un vrai abus d'un faux.
M. Michel Caldaguès. C'est bien ce que je voulais dire ! Si le délit existe déjà, il n'est pas nécessaire de le créer à nouveau !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 10, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 9 est ainsi rédigé.

Article 10



M. le président.
« Art. 10. - Au premier alinéa de l'article 225-19 du même code, les mots : "par les sections 1 et 3" sont remplacés par les mots : "par les sections 1, 3 et 3 ter ". »
Par amendement n° 11, M. About, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit cet article :
« I. - L'article 313-4 du code pénal est supprimé.
« II. - Dans le premier alinéa de l'article 313-7 du même code, la référence : ", 313-4" est supprimée.
« III. - A la fin du premier alinéa de l'article 313-9 du même code, les mots : "à 313-4" sont remplacés par les mots : "à 313-3". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Nicolas About, rapporteur. C'est un amendement de coordination, monsieur le président.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 11, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 10 est ainsi rédigé.

Chapitre VI

Dispositions diverses

Article 11



M. le président.
« Art. 11. - A l'article 2-17 du code de procédure pénale, après le mot : "association", sont insérés les mots : "reconnue d'utilité publique". »
Par amendement n° 12 rectifié, M. About, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit cet article :
« L'article 2-17 du code de procédure pénale est ainsi rédigé :
« Art. 2-17. - Toute association reconnue d'utilité publique régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans à la date des faits et se proposant par ses statuts de défendre et d'assister l'individu ou de défendre les droits et libertés individuels et collectifs peut, à l'occasion d'actes commis par toute personne physique ou morale, dans le cadre d'un mouvement ou organisation ayant pour but ou pour effet de créer, de maintenir ou d'exploiter une sujétion psychologique ou physique, exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les infractions d'atteintes volontaires ou involontaires à la vie ou à l'intégrité physique ou psychique de la personne, de mise en danger de la personne, d'atteinte aux libertés de la personne, d'atteinte à la dignité de la personne, d'atteindre à la personnalité, de mise en péril des mineurs ou d'atteintes aux biens prévues par les articles 221-1 à 221-6, 222-1 à 222-40, 223-1 à 223-15, 223-15-2, 224-1 à 224-4, 225-5 à 225-15, 225-17 et 225-18, 226-1 à 226-23, 227-1 à 227-27, 311-1 à 311-13, 312-1 à 312-12, 313-1 à 313-3, 314-1 à 314-3 et 324-1 à 324-6 du code pénal, les infractions d'exercice illégal de la médecine ou de la pharmacie prévues par les articles L. 4161-5 et L. 4223-1 du code de la santé publique, et les infractions de publicité mensongère, de fraudes ou de falsifications prévues par les articles L. 121-6 et L.213-1 à L. 213-4 du code de la consommation. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Nicolas About, rapporteur. Il s'agit encore d'une coordination et d'une simplification rédactionnelle.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 12 rectifié, accepté par le Gouvernement.
M. Michel Caldaguès. Je vote contre.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 11 est ainsi rédigé.

Article 12



M. le président.
« Art. 12. - Après les mots : "d'exploiter une dépendance psychologique ou physique,", la fin de l'article 2-17 du même code est ainsi rédigée : "exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les infractions d'atteintes volontaires ou involontaires à la vie ou à l'intégrité physique ou psychique de la personne, de mise en danger de la personne, d'atteinte aux libertés de la personne, d'atteinte à la dignité de la personne, d'atteinte à la personnalité, de mise en péril des mineurs ou d'atteintes aux biens prévues par les articles 221-1 à 221-6, 222-1 à 222-40, 223-1 à 223-15, 224-1 à 224-4, 225-5 à 225-15, 225-16-4 à 225-16-6, 225-17 et 225-18, 226-1 à 226-23, 227-1 à 227-27, 311-1 à 311-13, 312-1 à 312-12, 313-1 à 313-4, 314-1 à 314-3 et 324-1 à 324-6 du code pénal, les infractions d'exercice illégal de la médecine ou de la pharmacie prévues par les articles L. 376 et L. 517 du code de la santé publique, et les infractions de publicité mensongère, de fraudes ou de falsifications prévues par les articles L. 121-6 et L. 213-1 à L. 213-4 du code de la consommation". »
Par amendement n° 13, M. About, au nom de la commission, propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Nicolas About, rapporteur. C'est un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 13, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 12 est supprimé.

Article 13



M. le président.
« Art. 13. - La présente loi est applicable en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna et dans la collectivité territoriale de Mayotte. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 28, M. About, au nom de la commission, propose de compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
« Pour l'application de la présente loi en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Wallis-et-Futuna, dans la collectivité territoriale de Mayotte et à Saint-Pierre-et-Miquelon, les mots : "tribunal de grande instance" sont remplacés par les mots : "tribunal de première instance".
« Pour l'application de la présente loi en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Wallis-et-Futuna et dans la collectivité territoriale de Mayotte, les références aux dispositions législatives du code de la santé publique, du code de la consommation et du code de procédure civile sont remplacées si nécessaire par les références aux dispositions applicables localement ayant le même objet. »
Par amendement n° 21 rectifié, M. Flosse et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent de compléter l'article 13 par trois alinéas ainsi rédigés :
« Pour l'application de la présente loi en Polynésie française :
« 1° les mots : "tribunal de grande instance" sont remplacés par les mots : "tribunal de première instance" ;
« 2° les références aux dispositions législatives du code de la santé publique, du code de la consommation et du code de procédure civile sont remplacées par les références aux dispositions réglementaire en vigueur dans le territoire. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 28.
M. Nicolas About, rapporteur. Par l'amendement n° 28, nous apportons une réponse au souci de M. Flosse d'adopter le texte pour son application en Polynésie. Mais, au-delà de la Polynésie française, nous l'étendons à l'ensemble des territoires susceptibles d'être concernés.
M. le président. La parole est à M. Caldaguès, pour défendre l'amendement n° 21 rectifié.
M. Michel Caldaguès. Cet amendement a pour objet d'adapter à l'organisation judiciaire de la Polynésie française les dispositions de cette proposition de loi, afin de les y rendre applicables.
Par ailleurs, il vise à prendre en compte les références réglementaires applicables en Polynésie française, dans le respect du partage des compétences entre l'Etat et les institutions territoriales.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 21 rectifié ?
M. Nicolas About, rapporteur. La commission souhaite le retrait de cet amendement, qui est satisfait par celui de la commission, dont l'objet est plus large puisqu'il vise l'ensemble des territoires et non pas seulement la Polynésie française.
S'il n'était pas retiré, la commission émettrait alors un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Caldaguès, l'amendement n° 21 rectifié est-il maintenu ?
M. Michel Caldaguès. Je crois que, en toute bonne foi, il faut souscrire à l'observation de M. le rapporteur. Mes amis du groupe du RPR ne m'en voudront donc pas de retirer l'amendement.
M. le président. L'amendement n° 21 rectifié est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 28 ?
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 28, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 13, ainsi modifié.

(L'article 13 est adopté.)

Intitulé de la proposition de loi



M. le président.
Par amendement n° 14, M. About, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit l'intitulé de la proposition de loi : « Proposition de loi tendant à renforcer la prévention et la répression à l'encontre des sectes, groupements portant atteinte aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Nicolas About, rapporteur. Cette précision vise à bien rappeler les conditions dans lesquelles ce texte a été élaboré.
Même si les dispositions qu'il contient s'appliquent à tout groupement, nous souhaitons tout de même souligner que notre pays a traversé des moments très difficiles provoqués par les agressions de groupes sectaires. Il me paraît nécessaire que l'intitulé de la proposition de loi y fasse référence.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Je ne suis pas opposée au fait que le titre de la proposition de loi fasse apparaître que les sectes portent « atteinte aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales », puisque c'est cela même qui justifie le dépôt de ce texte.
Cela étant, il serait à mon avis préférable de retenir l'intitulé suivant : « Proposition de loi tendant à renforcer la prévention et la répression des mouvements sectaires portant atteinte aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales ».
Je m'en remets à la sagesse de la Haute Assemblée sur ce point.
M. le président. Monsieur le rapporteur, que pensez-vous de la suggestion de Mme le garde des sceaux ?
M. Nicolas About, rapporteur. J'y suis favorable, monsieur le président, et je rectifie mon amendement en ce sens.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 14 rectifié, présenté par M. About, au nom de la commission, et visant à rédiger comme suit l'intitulé de la proposition de loi : « Proposition de loi tendant à renforcer la prévention et la répression des mouvements sectaires portant atteinte aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales ».
Je vais mettre aux voix cet amendement.
M. Michel Caldaguès. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Caldaguès.
M. Michel Caldaguès. Je suis hostile à ce texte qui ne contient aucune définition de la secte et ne précise pas qui est chargé de délivrer ce sceau d'infamie. On ne peut donc pas voter des dispositions aussi imprécises ! !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 14 rectifié.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'intitulé de la proposition de loi est ainsi rédigé.
Les autres dispositions de la proposition de loi ne font pas l'objet de la deuxième lecture.

Vote sur l'ensemble



M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à M. Bonnet, pour explication de vote.
M. Christian Bonnet. Monsieur le président, monsieur le ministre, le groupe des Républicains et indépendants se félicite que l'un des siens ait eu le courage de prendre l'initiative de cette proposition de loi et qu'il ait, avec beaucoup de ténacité, mais aussi de souplesse, su la conduire à son terme.
J'ajoute, à titre personnel, que, si j'avais eu une once d'hésitation sur mon vote, les pressions dont nous avons été l'objet, les méthodes qui réussissent vis-à-vis des êtres fragiles et dont nous avons eu un certain nombre d'exemples depuis des mois à travers des démarches, à travers des appels téléphoniques, et, ces jours derniers, à travers le bourrage des sites, m'auraient convaincu que je fais bien en votant la proposition de notre ami M. About. (Applaudissements.)
M. Jacques Larché, président de la commission. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jacques Larché, président de la commission. Je voudrais noter, en cet instant, le temps qu'il a fallu pour aboutir au vote qui va intervenir et souligner la qualité du travail accompli tout au long des différentes étapes.
C'est en effet, comme M. Bonnet l'a rappelé, sur l'initiative de la commission des lois, singulièrement de son rapporteur, que ce travail a pu être entrepris.
La manière dont vous avez participé au débat, madame le garde des sceaux, me paraît laisser présager un accord entre l'Assemblée nationale et le Sénat.
En cet instant, je me pose une question : très légitimement, peut-être, certains d'entre nous semblent s'être opposés au fond même de ces dispositions. De deux choses l'une : soit la menace existe - et on a essayé d'y répondre. Parfaitement ? Je n'en sais rien. L'expérience le dira. Nous faisons confiance aux juges pour mettre en oeuvre des dispositions qui, croyez-le, ont fait l'objet de réflexions très approfondies et qui n'ont pas été pour autant faciles à formuler. Il fut ardu de trouver une rédaction qui corresponde à nos souhaits.
Mais ce qui peut poser problème pour certains d'entre nous, c'est de constater que les oppositions qui se sont manifestées n'ont été assorties d'aucune contre-proposition.
Alors, encore une fois, est-ce que le problème se pose ? Oui, sûrement ! Est-ce qu'il fallait le résoudre ? Oui, sûrement ! Est-ce que nous l'avons bien résolu ? En tout cas, nous nous y sommes efforcés, et l'avenir dira si nous y sommes parvenus.
M. le président. La parole est à M. Hoeffel.
M. Daniel Hoeffel. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, j'ai exposé, au cours de la discussion générale, les problèmes de conscience qui se posent et les scrupules que peut ressentir chacun d'entre nous s'agissant d'un débat de cette importance. Je maintiens bien entendu les propos que j'ai tenus à cet égard.
En cet instant, je veux, à mon tour, rendre hommage au rapporteur, M. Nicolas About, pour les efforts qu'il a accomplis afin d'éviter les excès, dans un sens et dans l'autre, et d'aboutir à un texte le plus équilibré possible.
Je souhaite que, dans la phase finale du débat devant le Parlement, les principales orientations retenues par le Sénat soient maintenues afin de préserver l'équilibre de ce texte. Il fallait, au-delà des pressions venant d'ici ou de là, tenir le cap. M. le rapporteur a réussi à le faire. Qu'il en soit remercié !
M. Pierre Fauchon. Bravo !
M. le président. La parole est à M. Caldaguès.
M. Michel Caldaguès. J'ai été amené à m'intéresser à la question des sectes - je n'en suis absolument pas un spécialiste, je le reconnais - lorsque j'ai pris connaissance, le 12 avril 1999 - cela ne date pas tout à fait d'hier - d'une interview d'un homme dont je ne partage pas toujours les opinions mais qui est généralement considéré comme un être épris des libertés et qui est une conscience reconnue par les politologues, je veux parler du professeur René Rémond.
Cette interview, que j'ai en main, est intitulée : « Non à toute législation anti-secte ». Cela signifie-t-il que le professeur Rémond n'est pas désireux de protéger l'intégrité, la santé des individus les plus faibles ? Cela veut-il dire que je ne suis pas, moi non plus, animé par cette préoccupation ?
J'ai dit, au cours de la discussion générale, que je demandais la plus grande rigueur à l'égard des infractions à la loi, quelles qu'elles soient, dans ce domaine comme en d'autres, car je suis tout à fait conscient des affreuses aberrations auxquelles on est parvenu dans certains cas, et chacun les connaît. Cependant, il faut se garder des amalgames.
Au cours de cette discussion, j'ai entendu des propos qui, véritablement, étaient empreints de ce risque d'amalgame, notamment l'usage répété et législatif du terme de « secte », qui est employé à tout propos et à l'égard de n'importe qui. Ainsi, si l'on veut détruire quelqu'un, on dira qu'il anime une secte.
Voilà un instant, nous avons entendu le président de la commission des lois exprimer des préoccupations qui, comme d'habitude, font honneur à notre assemblée. Toutefois, si légitimes que soient de telles préoccupations, je considère qu'il faut évaluer plus soigneusement les risques d'atteinte aux libertés. J'ai rappelé des souvenirs qui montrent que l'on peut atteindre les libertés par ricochet. En effet, on a mis imprudemment entre les mains de qui il appartiendra...
M. Nicolas About, rapporteur. Des juges !
M. Michel Caldaguès. ... des dispositions qui risquent de porter atteinte à ces libertés.
Voilà ma préoccupation et celle d'un grand nombre de mes amis qui ne sont pas présents en cet instant et qui m'ont demandé d'être leur interprète pour manifester les inquiétudes que je viens d'exprimer. Ces inquiétudes sont, elles aussi, respectables. Je récuse tout esprit de chasse aux sorcières, d'où qu'il vienne et où qu'il aille.
Cette discussion aura eu le mérite, comme c'est la tradition au sein de la Haute Assemblée, de permettre la confrontation, dans la meilleure foi possible,...
M. Michel Charasse. C'est le mot !
M. Michel Caldaguès. ... d'opinions différentes et l'expression des convictions diverses, auxquelles chacun est légitimement attaché.
Voilà les quelques mots que je voulais prononcer avant de confirmer que je voterai bien sûr contre ce texte. (MM. Hamel et Neuwirth applaudissent.)
M. Nicolas About, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Nicolas About, rapporteur. Monsieur le président, compte tenu des votes intervenus précédemment, il y a lieu de rédiger ainsi l'intitué du chapitre IV : « Dispositions limitant la publicité des mouvements sectaires ».
M. le président. Il n'y a pas d'opposition ?...
L'intitulé du chapitre IV est ainsi rédigé.
Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur.
M. Nicolas About, rapporteur. Je vais bien sûr voter ce texte, non pas en eu égard aux risques qu'il peut éventuellement faire courir, car nous avons beaucoup travaillé sur ce point.
Je le voterai en pensant à ceux qui sont morts. En effet, les organisations sectaires ont occasionné des massacres et des morts dans le monde entier ; nous pouvons avoir en cet instant une pensée pour eux. Ils sont morts parce qu'ils étaient faibles, parce qu'ils se sont laissé placer en état de sujétion et conduire jusqu'à la mort, quand ils n'ont pas été assassinés ! Je songe aussi à un jeune qui est mort dernièrement car on lui a interdit de se soigner. Au nom d'une prétendue liberté, on a poussé ces jeunes vers la mort.
Je vais penser à ces jeunes qui sont malades, à ces jeunes qui ne sont pas éduqués, qui sont sortis du système social, à ces jeunes à qui on refuse l'école. C'est en effet à tous ceux-là que je vais penser pendant que je voterai, et non pas à d'éventuelles dérives. Je fais confiance aux juges pour éviter les dérives.
Je sais que, aujourd'hui, nous devons mettre fin à un certain nombre de désordres intolérables dans nos sociétés dites « modernes ».
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.

(La proposition de loi est adoptée.)
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Après l'émotion qu'a fait naître M. About, je tiens à remercier la commission des lois et son rapporteur pour leur travail. Je remercie également Mme Picard et l'ensemble des parlementaires. On parle souvent de régulation. En l'occurrence, il s'agit d'un texte de régulation sociale et éthique. Il est important que la régulation éthique ait sa place en ce début de siècle.
M. Nicolas About, rapporteur. Merci beaucoup !
M. le président. Chacun aura à coeur d'apprécier les propos qui ont été tenus tout au long de ce débat.
Mes chers collègues, avant d'aborder le point suivant de l'ordre du jour, nous allons interrompre nos travaux pendant quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures quarante, est reprise à dix-huit heures cinquante-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

12

STATUT DES MAGISTRATS

Discussion d'un projet de loi organique
en deuxième lecture

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion en deuxième lecture du projet de loi organique (n° 196, 2000-2001), modifié par l'Assemblée nationale, relatif au statut des magistrats et au Conseil supérieur de la magistrature. [Rapport n° 281 (2000-2001).]
Dans la discussion générale, la parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, au mois de novembre dernier, la Haute Assemblée a examiné en première lecture le projet de loi organique qui revient devant vous aujourd'hui en deuxième lecture.
Le projet initial du Gouvernement était à la fois limité dans son objet et important dans sa portée puisqu'il tendait à revaloriser et à simplifier le déroulement de la carrière des magistrats judiciaires. Il était en effet devenu indispensable de mettre fin à une situation injuste de blocage de l'avancement, tout en favorisant la mobilité.
En premier lieu, j'observerai que, dès la première lecture, le dispositif initialement proposé par le Gouvernement a fait l'objet d'un vote conforme du Sénat et de l'Assemblée nationale.
En second lieu, la Haute Assemblée ayant élargi le cadre initialement fixé au débat parlementaire, demeurent aujourd'hui en discussion les amendements dont a été enrichi le projet gouvernemental, amendements du Sénat, mais aussi de l'Assemblée nationale et du Gouvernement.
Il me paraît essentiel de souligner la grande qualité des débats et l'esprit d'ouverture qui, en première lecture, ont présidé aux discussions parlementaires.
La justice, lorsqu'elle est rendue, doit l'être dans la sérénité. Il faut aussi en discuter sans polémique ni simplification abusive ou anathème.
J'ai conscience que je demande encore aujourd'hui une contribution supplémentaire à la Haute Assemblée puisque, en deuxième lecture, le Gouvernement dépose de nouveaux amendements. Vous pouvez légitimement vous poser la question : pourquoi si tard ? Je vous dois donc quelques explications, nécessairement brèves en raison du temps qui est imparti pour l'examen du texte qui vient en discussion.
Au mois de mars dernier, le Premier ministre a fait part de son arbitrage sur le « plan d'urgence » pour la justice que je lui ai proposé.
Ce plan est ambitieux et à la hauteur des besoins indispensables au développement d'un service public de la justice, au service des citoyens, digne de leurs attentes, c'est-à-dire à la fois d'une plus grande qualité et plus rapide.
Au 1er septembre 2005, 8 000 magistrats seront effectivement présents dans les juridictions ; ils étaient 5 900 en 1997. Cet objectif exigera un effort budgétaire permettant la création de 1 200 emplois de magistrats et un accroissement, bien évidemment corrélatif, du nombre des greffiers et fonctionnaires des services judiciaires.
D'autres mesures d'accompagnement sont prévues, notamment en matière d'équipements informatiques, mais aussi dans le domaine immobilier, pour offrir de meilleures conditions d'accueil aux justiciables et de travail aux magistrats, fonctionnaires et auxiliaires de justice.
Je sais que l'annonce sur les moyens étant ainsi faite, vous me poserez immédiatement la question : de nouveaux moyens, pour quoi faire ?
C'est vrai, l'accroissement des moyens ne résoudra pas toutes les questions : encore faut-il les employer à bon escient.
Comment parvenir à instaurer durablement une justice de qualité ?
Pour répondre à cette question, il m'est apparu indispensable de donner la parole non seulement aux acteurs du monde judiciaire - magistrats, fonctionnaires et auxiliaires de justice - mais aussi aux citoyens et élus afin qu'ils puissent exprimer leurs attentes. Cette prise de parole ne doit pas être enfermée dans un cadre strict et purement hiérarchique : elle doit être libre, tant sur les sujets que dans l'expression.
Nous devons collectivement nous interroger et rechercher des réponses à des questions aussi essentielles que celle de la mission du juge : qui fait quoi et où?
Une nouvelle implantation sur le territoire des juridictions ne pourra être mise en oeuvre que si, au préalable, on donne un contenu à la notion d'accessibilité de la justice : quelles proximité ? Quelles nouvelles technologies doivent être mises en oeuvre ?
Il est d'autres questions essentielles, comme la place du citoyen dans le fonctionnement quotidien de la justice ou la déconcentration dans la gestion et l'administration des juridictions, sans oublier, bien évidemment, le dialogue social.
Répondre à ces questions et à bien d'autres, telle est la finalité des « entretiens de Vendôme ».
Certains ne manqueront pas de penser et de proclamer que tout a été dit et écrit sur la justice. C'est vrai qu'il existe des rapports de qualité ; je pense tout particulièrement au rapport de la mission sénatoriale sur les moyens de la justice, présidée par votre collègue M. Jolibois.
Mais la démarche des entretiens de Vendôme est différente, même si les idées déjà développées au travers tant de ces rapports sur la justice que de telle ou telle mission seront de nouveau mises en avant. Je souhaite que non seulement les acteurs du monde judiciaire, mais aussi les citoyens « prennent en main » une réflexion commune pour que, enfin, la justice soit ressentie comme une valeur commune à la nation tout entière, y compris dans son fonctionnement.
Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, les amendements dont le Gouvernement vous propose l'adoption sont indispensables pour « initialiser » le plan d'urgence pour la justice que vous avez été nombreux à réclamer. Il est important que nous puissions en discuter. Ainsi, cette démarche collective en faveur de la justice, que j'appelle de mes voeux, trouvera aussi sa traduction devant la Haute Assemblée.
Déroulement des carrières des magistrats amélioré, accroissement sans précédent des moyens, redéfinition d'un service public de la justice plaçant la qualité au coeur de son action sont autant de mesures qui marquent la volonté de donner à l'institution judiciaire la place qui doit être la sienne au sein d'une démocratie participative moderne. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen. - M. Hamel applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Fauchon, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Monsieur le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, un projet de loi limité à la revalorisation de la situation des magistrats - vous vous en souvenez - a conduit le Sénat, d'abord, et, à sa suite, l'Assemblée nationale à mener une réflexion plus générale sur le statut des magistrats, sur leur recrutement et leur formation, sur leur emploi, plus spécialement sur leur mobilité et, enfin, sur leur mission et leur déontologie.
Ainsi le Parlement a-t-il affirmé son souci de partager avec le Gouvernement l'initiative législative et de s'engager dans le vaste débat ouvert par la crise que connaît manifestement notre justice, et que nous annoncions ici même, depuis bien des années, en particulier depuis ce rapport de 1996, dont j'étais l'auteur, sur les moyens de la justice.
Nous écrivions alors que la justice était en situation d'hémiplégie. On nous avait dit, en levant les bras au ciel, que c'était tout à fait exagéré. Je crois que tel n'était pas le cas, et des manifestations récentes l'ont montré ! Elles ont porté ces problèmes sur la place publique. Les juges eux-mêmes - phénomène tout de même remarquable qui n'a pas été assez souligné - ont dénoncé, en parlant d'« abattage », leur incapacité à assurer leur mission.
Des magistrats en sont réduits à jeter les codes, sinon le « froc », aux orties, tandis qu'ils affirment leur volonté de passer au crible de leurs critiques la totalité de la vie publique ou privée, sans égards pour les limites que la pudeur, la prudence ou le conformisme leur ont longtemps - trop longtemps, diront certains - fait respecter.
Du côté du public - il ne faut pas l'oublier ! - les interrogations ne manquent pas non plus sur la lenteur, bien sûr, mais aussi sur la complexité de la justice et sur la responsabilité des juges.
Le présent projet de loi, du fait de son caractère limité au départ, ne permettait évidemment pas d'aborder ce problème par une démarche d'ensemble.
Du moins avons-nous souhaité, en coopération avec l'Assemblée nationale, apporter sur plusieurs points des améliorations qui, nous le croyons, constituent déjà une première et substantielle réforme, et nous remercions le Gouvernement d'avoir su surmonter une certaine réticence initiale pour s'associer aujourd'hui à notre demande.
Ces améliorations portent essentiellement sur l'obligation d'un minimum de mobilité dans les postes de responsabilité - sept ans ou dix ans selon les cas ; je crois que nous n'aurons aucun mal à nous mettre d'accord - sur l'ouverture et la transparence du régime disciplinaire - ce point est acquis - ainsi que, sur l'initiative de l'Assemblée nationale, sur le mode d'élection des membres du Conseil supérieur de la magistrature, mais aussi, à votre demande, madame le garde des sceaux, sur un élargissement substantiel du mode de recrutement des magistrats et sur l'introduction de multiples assouplissements dans la gestion des juridictions.
Dans l'ensemble, il n'y a guère de divergences graves entre les uns et les autres, au stade où nous en sommes de cette deuxième lecture. Nous en parlerons au fur et à mesure de l'examen des amendements.
J'ai été très sensible, madame le garde des sceaux, à votre évocation des entretiens de Vendôme, puisque je suis, dans cette assemblée, le représentant non pas de la place Vendôme, mais de la ville de Vendôme, qui n'est tout de même pas sans affinité avec la place ! Cela dit, soyez assurée que je ne cherche pas à faire un coup d'Etat pour passer de la ville à la place ; je respecte l'état actuel des choses. (Sourires.)
Je souhaite profiter de l'occasion qui m'est donnée pour attirer votre attention sur deux points : d'une part, le recrutement et la formation des magistrats ; d'autre part, l'ensemble de la réorganisation judiciaire.
S'agissant du recrutement des magistrats, nous nous réjouissons, bien sûr, de voir celui-ci s'élargir et se diversifier par un appel substantiel à des personnes choisies à partir de l'expérience qu'elles ont acquise dans des activités qui leur ont permis de connaître les réalités de la vie sociale ou professionnelle. Cela va tout à fait dans le sens de nos préoccupations.
Mais pourquoi s'en tenir à cette forme de recrutement, pourquoi refuser de recourir à l'emploi de ces « magistrats à titre temporaire » créé par la loi, il y a bien des années, sur la même base de la prise en considération de l'expérience acquise ?
Permettez-moi, madame le garde des sceaux, de m'étonner ! On crée des systèmes nouveaux, et l'on ne veut pas recourir à celui que j'évoque et qui offre des avantages considérables. Il est en effet fondé sur une expérience acquise pendant presque toute une vie professionnelle. Les listes sont établies par les cours d'appel, ce qui évite tout risque d'erreur de choix, de « casting », comme on dirait maintenant. Le système ne coûte pratiquement rien, puisque les intéressés n'entrent pas dans une carrière, avec toutes les charges que cela impose ; perçoivent seulement des indemnités. Le système est très souple, puisqu'il permet de recruter pour cinq ans : vous pouvez en recruter beaucoup pendant deux ou trois ans pour combler les lacunes et puis, ensuite, ne plus en recruter.
Pourquoi se priver de cette possibilité dans l'immédiat, alors que, à tout le moins, ces magistrats à titre temporaire pourraient venir compléter les formations collégiales, qui ont énormément de mal à fonctionner correctement, ou, peut-être, les effectifs des tribunaux d'instance ?
Vous auriez ainsi à votre disposition des emplois que vous pourriez gérer avec beaucoup de souplesse, de manière très concrète. Ils rendraient sans aucun doute service, au moins pendant quelques années, dans la situation où nous sommes.
Cela étant, la nécessité de recourir pendant quelques années à des recrutements complémentaires ne doit pas nous faire perdre de vue le problème de la formation, dont on ne parle peut-être pas assez dans ce texte, et qui est essentiel. Il ne se conçoit pas en dehors d'un fonctionnement amélioré de l'Ecole nationale de la magistrature.
Il est déplorable, à cet égard - je le dis d'autant plus facilement, madame le garde des sceaux, que vous n'y êtes pour rien - que, ces dernières années, on ait trop strictement limité l'accès normal à cette école et que l'on ait ainsi découragé nombre d'étudiants de qualité mieux placés que quiconque pour devenir de bons magistrats. C'est absurde, puisque l'on est maintenant en train de chercher, à droite ou à gauche - si j'ose dire ! - des gens qui viendront plus ou moins en complément, après s'être privé du recrutement de gens qui seraient entrés un peu plus nombreux à l'Ecole nationale de la magistrature. C'est navrant.
Le système de l'Ecole nationale de la magistrature présente cependant une grave carence, déjà dénoncée à maintes reprises, en particulier par notre excellent collègue Jean-Jacques Hyest. Cette carence, c'est le caractère excessivement théorique d'une formation qui produit des magistrats jeunes, instruits sans doute, mais dépourvus pratiquement de toute expérience des choses de la vie sociale et professionnelle.
Comment peut-on juger les multiples contentieux, alors que l'on ignore les réalités quotidiennes dans lesquelles ils s'inscrivent ? C'est pourtant bien la situation de nos magistrats actuels ! La solution est simple, bien connue : elle pourrait être trouvée dans la participation pendant une durée significative - un an - à la vie d'un cabinet qui ne peut qu'être un cabinet d'avocats, puisque c'est le seul endroit où l'on sait quelles sont les réalités de la vie contentieuse.
Cela me semble nécessaire, mais, dans l'état de carence où nous sommes, je n'ai pas cru possible de proposer des améliorations s'agissant de la formation, parce que cela rallongerait évidemment d'un an la durée des études. Cela étant, sans doute faudra-t-il revenir sur cette réflexion, et le plus tôt sera le mieux, pour compenser, corriger le caractère excessivement théorique de la formation que reçoivent actuellement nos magistrats.
Je dirai un dernier mot sur le problème d'ensemble de l'organisation du système judiciaire, en vue de le rendre plus apte à traiter les divers contentieux de manière plus satisfaisante au triple point de vue de la rapidité, de l'intelligibilité et de la sûreté de ses décisions.
Nous ne pouvons que nous réjouir de la vaste réflexion que vous avez engagée, à cet égard, sur le thème des Entretiens de Vendôme. Nous la suivrons avec la plus grande attention, soyez-en assurée.
Reprenant des réflexions anciennes de la commission, je me permets de formuler la suggestion suivante : on ne résoudra pas le problème de l'organisation de la justice si l'on ne procède pas à une prise en compte spécifique de ce qu'il est convenu d'appeler le contentieux de masse. Je n'entre pas dans des explications trop longues on sait bien quels problèmes j'entends évoquer, tant en matière pénale qu'en matière civile.
C'est l'inflation croissante de ce contentieux de masse qui perturbe profondément le fonctionnement de notre justice, les mécanismes classiques n'étant pas adaptés à ce contentieux. En outre, il nous paraît dangereux de croire indéfiniment que l'on pourra résoudre le problème en recourant à des procédures alternatives, parallèles, qui échappent plus ou moins au fonctionnement normal de la justice et aux critères fondamentaux d'une bonne justice.
Ces expériences sont intéressantes en tant qu'expériences. Je ne crois pas que l'on puisse en faire un système qui se développerait indéfiniment et qui mettrait en quelque sorte en place deux justices : une véritable justice et un système plus ou moins associatif qui gérerait la justice des petites gens dans des conditions dont on s'apercevrait un jour qu'elles ne correspondent pas vraiment aux critères que nous souhaitons.
La solution ne consiste pas à renvoyer ce contentieux à l'extérieur ni à le traiter par voie d'« abattage ». Il faut imaginer une justice adaptée au contentieux de masse par ses procédures, par ses modes de fonctionnement, par la typologie de ses magistrats. On retrouve là les magistrats issus de la société civile, à l'exemple de ce que font les Anglais avec les magistrat's courts, qui fonctionnent fort bien depuis Henry II et qui emploient 7 000 ou 8 000 magistrats de la société civile. Personne ne s'en plaint, cela fonctionne très bien.
En résumé, il s'agit, au fond, de ressusciter les justices de paix de naguère, fort bien adaptées au petit contentieux lorsqu'il était rural. Il n'y a plus de petit contentieux rural, mais il y a un considérable petit contentieux des quartiers suburbains, qui est quantitativement plus important que cet ancien contentieux rural.
Ces juridictions renouvelées pourraient connaître le renouveau en intégrant les expériences les plus récentes, telles que celles des maisons de justice, des conciliateurs, qui sont forts intéressantes. Elles seraient capables de traiter ce contentieux d'une manière originale, différente du traitement classique, qui est beaucoup trop sophistiqué, intellectuel et incompréhensible, et elles présenteraient l'avantage de se situer au sein de l'appareil judiciaire, et non à l'extérieur. Mais il s'agit là, évidemment, de perspectives nouvelles qui dépassent le cadre du présent projet de loi.
J'en reviens donc au texte, pour conclure, au nom de la commission des lois, à son adoption, d'autant que nous en sommes en grande partie les auteurs, sous réserve de l'adoption de quelques amendements qui sont le plus souvent de nature à apporter des améliorations mais sans aller - M. Charasse voudra bien m'en excuser - jusqu'à l'adoption de certaines autres propositions dont la commission pense qu'ils étaient surtout de nature à enrichir et à animer le débat.
M. Michel Charasse. Courage, fuyons !
M. le président. La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de loi organique relatif à la carrière des magistrats prend un relief particulier dans le contexte actuel, à un moment où la profession apparaît à bien des égards sinistrées.
Le déficit apparaît patent en termes de personnel, qu'ils soient magistrats ou greffiers, de locaux ou de matériel informatique, dont la pénurie a retardé, on le sait, l'entrée en application du juge des libertés ; sans un bureau ni une liaison informatique, il était en effet difficile à ce juge d'exercer sa mission !
Submergée par un accroissement constant de ses missions, sans que les moyens de les mettre en oeuvre suivent toujours, la justice judiciaire exprime depuis maintenant de nombreux mois son inquiétude.
Vous avez pris la mesure de ce mécontentement, madame la ministre, en acceptant de réfléchir avec l'ensemble des acteurs du monde judiciaire à une réforme en profondeur de la justice du triple point de vue de son fonctionnement, de sa qualité et de son accessibilité.
Les Entretiens de Vendôme, qui sont entrés dans leur phase pratique avec la consultation nationale des magistrats, devraient ainsi déboucher sur des pistes d'autant plus instructives qu'ils traduisent, une fois encore, votre esprit d'ouverture et votre souci de la participation.
Encore faudra-t-il, madame la ministre, une fois l'état des lieux dressé, que les moyens budgétaires suivent, et parce que nous savons que cette bataille n'est pas gagnée, nous n'hésiterons pas à le rappeler et à vous soutenir, vous le savez.
En attendant, le texte, tel qu'il nous revient de l'Assemblée nationale, est un premier pas vers la revalorisation de la profession, ce qui n'est pas négligeable à l'heure où l'on parle de recrutements massifs : 1 200 magistrats d'ici à 2005.
Les amendements présentés par le Gouvernement s'agissant des recrutements complémentaires - concours exceptionnels, recrutements sur titres - permettent en tout cas de donner une dimension concrète à ces engagements en termes d'effectifs.
Ce texte satisfait donc pour une large part les sénateurs de notre groupe ; il complète et enrichit le texte qui avait été précédemment adopté ici, et nous nous réjouissons que la commission des lois ait choisi de l'approuver dans une large part, même si - j'y reviendrai - nous regrettons que l'idée d'un délai couperet de sept ou dix ans ait fini par s'imposer.
Notre satisfaction est d'autant plus grande que l'Assemblée nationale a fait siennes les suggestions et les remarques que nous avions pu formuler en première lecture.
Je pense, d'abord, à la question de la transparence des audiences disciplinaires du CSM, qui est étendue, comme nous l'avions souhaité, aux magistrats du parquet. L'équité entre les magistrats de l'ordre judiciaire est ainsi rétablie.
Mais c'est surtout la reprise de nos amendements tendant à la représentation proportionnelle pour l'élection au Conseil supérieur de la magistrature qui est, pour nous, source de satisfaction.
Je me réjouis que M. le rapporteur se rallie à notre position en proposant l'adoption de l'article 14, alors qu'il l'avait considérée comme hors sujet et non urgente en première lecture.
Avec cet article 14, s'il est adopté, les élections supérieur se feront dorénavant à la représentation proportionnelle au sein du CSM, et non plus au scrutin uninominal à un tour, comme c'est le cas aujourd'hui, ce qui jouera dans le sens d'une représentation pluraliste du corps.
Notre attention a néanmoins été appelée sur les modalités d'application du système. En effet, si l'on fait référence aux décrets, dans certaines cours d'appel, seuls un, deux ou trois sièges sont à pourvoir, ce qui limite - nous devons le reconnaître - la portée de la représentation proportionnelle ! Il faudrait penser à augmenter notablement le corps des électeurs.
Par ailleurs, si l'article 14 proposé par l'Assemblée nationale institue la parité, ce dont nous ne pouvons que nous réjouir, il ignore le problème du surpoids de la hiérarchie judiciaire au sein du CSM, ce qui atténue, selon nous, la portée de la démarche.
Nous avions, pour notre part, proposé en première lecture l'institution d'un collège unique pour l'ensemble des magistrats, sans distinction hiérarchique.
Cette réforme nous semblait cohérente avec la démarche de simplification des grades et nous regrettons qu'elle n'ait pas été reprise. C'est pourquoi nous soutiendrons l'amendement de notre collègue M. Courtois, qui va dans le même sens.
Notre lecture du texte est donc positive, et ce d'autant plusque les députés ont apporté de réelles améliorations aux nouvelles règles de mobilité en garantissant que les magistrats y appelés à quitter leur poste en vertu de la limitation de la durée des fonctions de chef de juridiction ou de procureur, retrouveront une place dans la hiérarchie judiciaire.
En revanche, les sénateurs communistes restent tout à fait réservés sur le couperet des sept ans, à nouveau présenté par la commission des lois, et auquel se range, nous le déplorons, le Gouvernement, qui propose une rédaction transactionnelle à dix ans.
Cette règle leur paraît, en l'état actuel des textes, attenter au principe d'inamovibilité. (M. Charasse s'exclame.) Je tiens à rappeler qu'il en serait différemment si la droite n'avait pas fait échouer la révision constitutionnelle relative à la réforme du Conseil supérieur de la magistrature, qui seule, en garantissant l'autonomie réelle des magistrats, peut justifier une mobilité renforcée.
En outre, nous avions déjà exprimé en première lecture nos réserves quant aux conséquences d'une telle règle sur des dossiers complexes dont l'instruction peut s'étendre sur plusieurs années ; je pense aux affaires financières et au suivi des mineurs en danger, mais M. Badinter a également évoqué, en commission, l'affaire du tunnel du Mont-Blanc ou des disparues de l'Yonne.
Il est certain à cet égard que, si la règle de la collégialité, notamment en matière d'instruction, que nous avions instamment demandée lors du vote du projet de loi relatif au renforcement de la présomption d'innocence, avait été retenue, nous ne nous trouverions pas devant les mêmes difficultés.
Sous réserve de ces remarques, mon groupe votera un texte qui, très attendu par la profession, sera le premier signe manifestant que nous ne laisserons pas en déshérence une mission aussi essentielle que celle de la justice.
Je crois que nous aurons marqué une singulière avancée en ce sens avec ce projet de loi.
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Je souhaite répondre à M. Fauchon, qui m'a interpellée très aimablement tout à l'heure.
En ce qui concerne les magistrats à titre temporaire, vous avez raison, monsieur le rapporteur, mais le problème vient de ce que nous n'avons pas de candidats pour ces postes-là. Je m'engage devant vous à sensibiliser de nouveau les intéressés potentiels pour répondre à votre souci, mais encore faut-il que les candidats se présentent.
Vous avez dit, monsieur Fauchon, que l'enseignement à l'Ecole nationale de la magistrature était très théorique. Il l'est de moins en moins grâce aux stages en entreprise, dans des cabinets d'avocat et en juridiction, stage qui offrent une formation de qualité. Mais peut-être, en effet, la durée de ces stages est-elle à revoir.
Je pense que l'Ecole nationale de la magistrature présente surtout cet avantage d'évoluer très vite et constamment : ce n'est pas une école figée. A cet égard, il faut saluer les directeurs successifs, qui ont su faire évoluer la formation, même si je comprends votre souci de la rendre plus citoyenne, en quelque sorte.
Concernant maintenant les postes, et sans polémique aucune car ce n'est pas du tout le ton de nos échanges, il faut prendre en compte - je réponds ici également aux sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen - les arrivées nettes des magistrats dans les juridictions : 82 en 1995, 57 en 1996, pour tomber à 39 en 1997. Ces arrivées ont repris, passant à 107 en 1998, à 214 en 1999, à 226 en 2000. Puis, un creux est apparu en 2001, faute de concours exceptionnel, avec 176 arrivées seulement. Depuis, elles ont repris avec 325 arrivées nettes, puis 354, 370 et 390, pour atteindre le fameux effectif de 8 000 magistrats sur le terrain. J'insiste sur le fait que ces chiffres comprennent les départs en retraite, parce que c'est cela qui est important pour répondre à ce que vous avez l'un et l'autre qualifié de malaise de la justice.
Pour ce qui est des Entretiens de Vendôme, après une réponse en termes de moyens, qui sera vérifiable d'année en année, il s'agit de mettre à plat l'institution dans son ensemble, et peut-être, à cette occasion, des questions de formation seront-elles abordées, comme celle du passage d'une profession à une autre. Nous aurons là des débats importants, à condition qu'ils soient à la fois sereins et constructifs.
Il a été question tout à l'heure de la carte judiciaire, et j'avais moi-même esquissé les problèmes d'accessibilité. Les maisons de la justice et du droit sont un moyen, mais pas le seul. Il importe de mener une réflexion sur les tribunaux d'instance, sur le rôle qu'ils peuvent jouer, très proche de ce que vous disiez concernant les juges de paix en milieu rural.
En résumé, nous avons à parler en termes non plus de géographie mais d'efficacité, de la même manière que nous aurons à parler en termes d'exercice serein de la justice et de responsabilité.
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Je souhaiterais simplement ajouter quelques mots.
Sur cette question des magistrats exerçant à titre temporaire, on nous dit qu'il n'y a pas de candidats. Mais il faut souligner que les conditions posées pour accéder à ces postes n'ont rien d'encourageant ! Vous pensez bien que des personnes arrivant en fin de carrière et âgées d'une soixantaine d'années y peuvent attester une expérience assez grande pour ne pas avoir, de surcroît, à passer des épreuves et à suivre des stages.
De deux choses l'une : ou bien l'on considère qu'elles sont capables et, dans ce cas-là, elles exercent leurs fonctions pendant cinq ans et ce sans pratiquement percevoir de rémunération, si ce n'est une indemnisation, ou bien on renonce purement et simplement à utiliser cette voie de recrutement.
Pour avoir rencontré un ou deux candidats, je sais que, compte tenu des conditions qui leurs sont proposées, il préfèrent rester chez eux. C'est un certain service que rendent les magistrats exerçant à titre temporaire, et qu'ils exercent avec dévouement ; il faut donc savoir être accueillant. Il faut peut-être aussi faire circuler l'information, sans pour autant placarder des annonces disant : « Engagez-vous, rengagez-vous dans la magistrature ! », certes, mais en réfléchissant aux modalités d'accès à ces postes.
Je crois que les gens ne connaissent pas très bien l'existence de cette possibilité : le faible nombre de recrutements de ce type incite peu au dépôt de candidatures. Il faudrait peut-être essayer de relancer cette initiative, ce qui s'inscrirait tout à fait dans la démarche actuelle de la chancellerie.
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Je suis tout à fait d'accord avec vous !
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante-cinq.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures vingt, est reprise à vingt et une heures quarante-cinq, sous la présidence de M. Gérard Larcher.)

PRÉSIDENCE DE M. GÉRARD LARCHER
vice-président

M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi organique relatif au statut des magistrats et au Conseil supérieur de la magistrature.
La discussion générale a été close.
Nous passons à la discussion des articles.
Je rappelle que, aux termes de l'article 42, alinéa 10, du règlement, à partir de la deuxième lecture au Sénat des projets de loi, la discussion des articles budgétaires est limitée à ceux pour lesquels les deux chambres du Parlement n'ont pas encore adopté un texte identique.

Chapitre Ier

Dispositions relatives à la carrière
et à la mobilité des magistrats

Article 2 bis



M. le président.
« Art. 2 bis . - Après l'article 28-1 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 précitée, il est inséré un article 28-2 ainsi rédigé :
« Art. 28-2 . - Les fonctions de président et de procureur de la République d'un tribunal de grande instance ou de première instance du premier grade sont exercées respectivement par un conseiller ou un substitut du procureur général de la cour d'appel dans le ressort de laquelle est situé ce tribunal, désigné à cet effet dans les formes prévues à l'article 28.
« Par dérogation à l'alinéa précédent, les fonctions de président et de procureur de la République d'un tribunal de première instance situé dans le ressort d'un tribunal supérieur d'appel sont exercées respectivement par un magistrat du siège ou un magistrat du parquet du premier grade du tribunal de grande instance de Paris.
« Les fonctions de président et de procureur de la République d'un tribunal supérieur d'appel sont exercées respectivement par un conseiller ou un substitut du procureur général de la cour d'appel de Paris.
« S'il n'occupe pas déjà cet emploi, lors de sa désignation en qualité de président ou de procureur de la République d'un tribunal de grande instance, d'un tribunal de première instance ou d'un tribunal supérieur d'appel conformément aux alinéas précédents, le magistrat est nommé concomitamment à un emploi de conseiller ou de substitut général de la cour d'appel, ou à un emploi du premier grade du tribunal de grande instance de Paris. Cette nomination est prononcée, le cas échéant, en surnombre de l'effectif organique de la cour d'appel ou du tribunal de grande instance. Ce surnombre est résorbé à la première vacance utile dans cette juridiction.
« Nul ne peut exercer plus de sept années la fonction de président ou de procureur de la République d'un même tribunal de grande instance ou de première instance ou d'un même tribunal supérieur d'appel. A l'expiration de cette période, s'il n'a pas reçu une autre affectation, le magistrat est déchargé de cette fonction par décret du Président de la République et exerce au sein de la cour d'appel ou du tribunal de grande instance les fonctions auxquelles il a été initialement nommé. Il en est de même dans le cas où, avant ce terme, il est déchargé de cette fonction sur sa demande ou en application de l'article 45. »
Par amendement n° 28, M. Charasse propose de compléter in fine le texte présenté par cet article pour l'article 28-2 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 par un alinéa ainsi rédigé :
« Tout magistrat ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire ou pénale ne peut être nommé premier président de la Cour de cassation, premier président de cour d'appel, président de chambre à la Cour de cassation ou d'une cour d'appel, président d'un tribunal de grande instance ou d'un tribunal d'instance ou d'une formation interne à ces tribunaux. »
Cet amendement est-il soutenu ?...
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 2 bis .

(L'article 2 bis est adopté.)

Article 2 ter

M. le président. « Art. 2 ter. - L'article 37 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 précitée est complété par cinq alinéas ainsi rédigés :
« La fonction de premier président de cour d'appel est exercée par un magistrat hors hiérarchie du siège de la Cour de cassation, désigné à cet effet dans les formes prévues à l'alinéa précédent.
« S'il n'occupe pas déjà cet emploi lors de sa désignation en qualité de premier président conformément à l'alinéa précédent, le magistrat est nommé concomitamment à un emploi hors hiérarchie du siège de la Cour de cassation. En ce cas, les dispositions du troisième alinéa de l'article 39 ne sont pas applicables. Cette nomination est prononcée, le cas échéant, en surnombre de l'effectif organique de la Cour de cassation. Ce surnombre est résorbé à la première vacance utile dans cette juridiction.
« Nul ne peut exercer plus de sept années la fonction de premier président d'une même cour d'appel.
« Six mois au moins avant l'expiration de cette période, le premier président peut solliciter sa nomination en qualité d'inspecteur général adjoint des services judiciaires. Cette nomination est alors de droit au terme des sept années d'exercice de ses fonctions.
« A l'expiration de cette période, s'il n'a pas reçu une autre affectation, le premier président est déchargé de cette fonction par décret du Président de la République et exerce au sein de la Cour de cassation les fonctions auxquelles il a été initialement nommé. Il en est de même dans le cas où, avant ce terme, il est déchargé de cette fonction sur sa demande ou en application de l'article 45. » - (Adopté.)

Article additionnel après l'article 2 ter



M. le président.
Par amendement n° 1 rectifié, M. Fauchon, au nom de la commision, propose d'insérer après l'article 2 ter un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article 28-1 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 précitée, il est inséré un article 28-3 ainsi rédigé :
« Art. 28-3. - Les fonctions de juge d'instruction, de juge des affaires familiales, de juge des enfants et de juge de l'application des peines d'un tribunal de grande instance ou de première instance et celles de juge d'un tribunal de grande instance chargé du service d'un tribunal d'instance sont exercées par un magistrat du siège de ce tribunal de grande instance ou de première instance, désigné à cet effet dans les formes prévues à l'article 28.
« S'il n'occupe pas déjà cet emploi lors de sa désignation, en qualité de juge d'instruction, de juge des affaires familiales, de juge des enfants, de juge de l'application des peines ou de juge chargé du service d'un tribunal d'instance, conformément à l'alinéa précédent, le magistrat est nommé concomitamment à un emploi de magistrat du siège de ce tribunal de grande instance ou de première instance. Cette nomination est prononcée, le cas échéant, en surnombre de l'effectif organique de la juridiction, surnombre résorbé à la première vacance utile dans cette juridiction.
« Nul ne peut exercer plus de sept années la fonction de juge d'instruction, de juge des affaires familiales, de juge des enfants, de juge de l'application des peines ou de juge chargé du service d'un tribunal d'instance dans un même tribunal de grande instance ou de première instance. A l'expiration de cette période, s'il n'a pas reçu une autre affectation, le magistrat est déchargé de cette fonction par décret du Président de la République et exerce au sein du tribunal de grande instance ou de première instance les fonctions de magistrat du siège auxquelles il a été initialement nommé. Il en est de même dans les cas où, avant ce terme, il est déchargé de cette fonction sur sa demande ou en application de l'article 45. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 10, présenté par le Gouvernement, et tendant, dans la première phrase du troisième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 1 pour l'article 28-3 de l'ordonnace du 22 décembre 1958, à remplacer les mots : « sept années » par les mots : « dix années ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 1 rectifié.
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Cet amendement tend à rétablir un amendement adopté en première lecture par le Sénat, tendant à introduire une limitation de l'exercice de certaines fonctions de responsabilité. Cette limitation - je n'ai pas besoin d'y revenir - nous avait paru souhaitable. Ce dispositif, préparé par votre prédécesseur dans un avant-projet de loi, madame le garde des sceaux, avait été également suggéré par le Conseil supérieur de la magistrature. Nous l'avions adopté pour les chefs de juridiction et nous proposons de l'étendre aux juges spécialisés.
En ce qui concerne les juges spécialisés tels que le juge du tribunal d'instance, le juge des enfants, le juge des affaires familiales, notamment, la durée d'occupation des postes est quelquefois choquante, surtout dans les petits tribunaux. Quand un juge occupe le poste depuis dix ans, chacun connaît sa jurisprudence sur telle ou telle question, et ce n'est même pas la peine de discuter.
Nous attachons donc de l'importance à une limitation. Nous considérons cependant qu'elle peut être entendue de manière assez large.
A l'Assemblée nationale, assez curieusement, tout en admettant le bien-fondé de notre raisonnement, nos collègues députés ont considéré qu'il suffisait de restreindre cette limitation aux seuls chefs de juridiction.
La commission propose de rétablir cette limitation pour les juges spécialisés, en y ajoutant le juge aux affaires familiales, qui est probablement l'un de ceux pour lesquels une excessive durée d'occupation du poste paraît incompatible avec l'idée qu'on peut se faire de la justice. Je ne reprendrai pas le fond du débat car je crois qu'il n'y a pas beaucoup de difficultés entre la commission et le Gouvernement sur ce point.
J'ajoute immédiatement, pour ne pas avoir à reprendre la parole sur cette question, que le Gouvernement propose par un sous-amendement de faire une distinction, en ce qui concerne cette durée, entre les chefs de juridiction et les juges spécialisés. Le Gouvernement pense qu'il vaut mieux dix années pour les juges spécialisés. Si le Gouvernement le propose, c'est qu'il a ses raisons et, comme cela s'inscrit dans la ligne de la limitation de la durée, à deux ou trois ans près, nous sommes d'accord.
M. le président. La parole est à Mme le garde des sceaux, pour défendre le sous-amendement n° 10.
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Les exigences de mobilité souhaitables pour les magistrats spécialisés ne peuvent être les mêmes que celles des juges de cours et de tribunaux, qui obéissent à des considérations différentes. Telle est la raison du dépôt de ce sous-amendement, sous réserve de l'adoption duquel le Gouvernement émettra un avis favorable sur l'amendement n° 1 rectifié.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 10 ?
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Favorable, comme je l'ai déjà laissé entendre.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 10, accepté par la commission.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, l'amendement n° 1 rectifié, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi organique, après l'article 2 ter .

Article 2 quater



M. le président.
« Art. 2 quater . - Après l'article 38 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 précitée, sont insérés deux articles 38-1 et 38-2 ainsi rédigés :
« Art. 38-1 . - La fonction de procureur général près une cour d'appel est exercée par un magistrat hors hiérarchie du parquet de la Cour de cassation, désigné à cet effet dans les formes prévues à l'article précédent.
« S'il n'occupe pas déjà cet emploi lors de sa désignation en qualité de procureur général conformément à l'alinéa précédent, le magistrat est nommé concomitamment à un em ploi hors hiérarchie de la Cour de cassation. En ce cas, les dispositions du troisième alinéa de l'article 39 ne sont pas applicables. Cette nomination est prononcée, le cas échéant, en surnombre de l'effectif organique de la Cour de cassation. Ce surnombre est résorbé à la première vacance utile dans cette juridiction.
« Nul ne peut exercer plus de sept années la fonction de procureur général près une même cour d'appel.
« Six mois au moins avant l'expiration de cette période, le procureur général peut solliciter sa nomination en qualité d'inspecteur général adjoint des services judiciaires. Cette nomination est alors de droit au terme des sept années d'exercice de ses fonctions.
« A l'expiration de cette période, s'il n'a pas reçu une autre affectation, le procureur général est déchargé de cette fonction par décret du Président de la République et exerce au sein de la Cour de cassation les fonctions auxquelles il a été initialement nommé. Il en est de même dans le cas où, avant ce terme, il est déchargé de cette fonction sur sa demande ou en application de l'article 45.
« Art. 38-2 . - Les fonctions de président et de procureur de la République d'un tribunal de grande instance ou de première instance placé hors hiérarchie sont exercées respectivement par un président de chambre et un avocat général de la cour d'appel dans le ressort de laquelle est situé ce tribunal, désigné à cet effet dans les formes prévues aux articles 37 et 38.
« Par dérogation à l'alinéa précédent, les fonctions de président et de procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris sont exercées respectivement par un conseiller et un avocat général à la Cour de cassation.
« S'il n'occupe pas déjà cet emploi lors de sa désignation en qualité de président ou de procureur de la République conformément aux premier et deuxième alinéas du présent article, le magistrat est nommé concomitamment à un emploi de président de chambre ou d'avocat général de la cour d'appel, ou à un emploi de conseiller ou d'avocat général à la Cour de cassation. En ce cas, les dispositions du troisième alinéa de l'article 39 ne sont pas applicables. Cette nomination est prononcée, le cas échéant, en surnombre de l'effectif organique de la juridiction. Ce surnombre est résorbé à la première vacance utile dans cette juridiction.
« Nul ne peut exercer plus de sept années la fonction de président ou de procureur de la République d'un même tribunal de grande instance ou de première instance.
« A l'expiration de cette période, s'il n'a pas reçu une autre affectation, le magistrat est déchargé de cette fonction par décret du Président de la République et exerce au sein de la cour d'appel ou de la Cour de cassation les fonctions auxquelles il a été initialement nommé. Il en est de même dans le cas où, avant ce terme, il est déchargé de cette fonction sur sa demande ou en application de l'article 45. »
Par amendement n° 25, le Gouvernement propose de rédiger ainsi le texte présenté par cet article pour l'article 38-1 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 :
« Art. 38-1. - Nul ne peut exercer plus de sept années la fonction de procureur général près une même cour d'appel. »
La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Selon les dispositions votées en première lecture par l'Assemblée nationale, il faut, pour nommer en qualité de procureur général un magistrat qui n'est pas déjà avocat général à la Cour de cassation, intégrer « concomitamment » l'intéressé au parquet général de cette haute juridiction et le désigner sans délai comme chef du ministère public dans une cour d'appel.
Le premier mouvement exige un décret présidentiel simple, pris après avis du Conseil supérieur de la magistrature. Le second mouvement nécessite un décret en conseil des ministres, pris sans que le CSM soit consulté.
Ces dispositions présentent un risque sur le terrain constitutionnel.
En effet, en contractant ces deux opérations, la première - c'est-à-dire la nomination comme avocat à la Cour de cassation - n'étant qu'un préalable de la seconde et n'ayant de sens que par rapport à l'objectif final - la nomination comme procureur général - la loi organique aboutirait, en réalité, à ce que le CSM se prononce sur toutes les désignations de procureur général, hormis celles où le magistrat choisi est déjà membre en exercice du parquet général de la Cour de cassation. On ne pourra en effet pas solliciter l'avis du CSM sur la nomination d'un magistrat comme avocat général sans indiquer à cet organisme que l'objet réel du mouvement est de désigner l'intéressé comme procureur général. Et le CSM sera nécessairement conduit à prendre en compte l'affectation finale projetée lorsqu'il émettra son avis.
Cette procédure de nomination paraît contraire à l'avant-dernier alinéa de l'article 65 de la Constitution, qui dispose que : « La formation du CSM compétente à l'égard des magistrats du parquet donne son avis pour les nominations concernant les magistrats du parquet, à l'exception des emplois auxquels il est pourvu en conseil des ministres ».
C'est pourquoi je ne pense pas possible de retenir le texte tel qu'il est actuellement proposé par l'Assemblée nationale.
Toutefois, les procureurs généraux n'étant pas couverts par l'inamovibilité dont bénéficient constitutionnellement les magistrats du siège, une solution consiste à supprimer la possibilité de nommer un magistrat « pour ordre » en tant qu'avocat général à la Cour de cassation dans le seul but de le désigner comme procureur général.
Nommé en conseil des ministres, la durée de ses fonctions dans le poste ne pourra excéder sept ans. Il sera donc - ce qui évite l'injustice que créeraient des régimes différents - traité comme l'ensemble des autres magistrats sur lesquels pèsera l'obligation de mobilité, que le Parlement souhaite voir affirmée dans le présent projet de loi.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 25, accepté par la commission.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 2 quater , ainsi modifié.

(L'article 2 quater est adopté.)

Article 5 bis



M. le président.
« Art. 5 bis . - L'article 26 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 précitée est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Les années d'activité professionnelle accomplies par les magistrats recrutés par les voies du deuxième et du troisième concours d'accès à l'Ecole nationale de la magistrature ainsi que par ceux recrutés au titre de l'article 18-1 de la présente ordonnance sont prises en compte pour leur classement indiciaire dans leur grade et pour leur avancement. Ces dispositions sont applicables aux magistrats concernés qui ont été nommés dans les dix années qui précèdent la date d'entrée en vigueur de la loi organique n° du relative au statut des magistrats et au Conseil supérieur de la magistrature.
« Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions d'application du présent article. » - (Adopté.)

Article additionnel après l'article 5 bis



M. le président.
Par amendement n° 42, M. Fauchon, au nom de la commission, propose d'insérer après l'article 5 bis, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 25-2 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les années d'activité professionnelle accomplies par les magistrats recrutés au titre de l'article 22 sont assimilées aux services effectifs requis pour l'avancement dans la limite de deux années. Ces dispositions sont applicables aux magistrats concernés qui ont été nommés dans les dix années qui précèdent la date d'entrée en vigueur de la loi organique n° du relative au statut des magistrats et au Conseil supérieur de la magistrature. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Il s'agit d'un amendement qui tend à permettre aux magistrats recrutés au second grade par la voie de l'intégration directe, en application de l'article 22 de l'ordonnance statutaire, de bénéficier de la prise en compte, pour leur avancement, des années d'activité professionnelle exercées antérieurement, dans la limite de deux années seulement.
Ces derniers ne bénéficiaient pas jusqu'à présent, contrairement aux autres magistrats recrutés au même grade, de la reprise de ces années d'activité. Il nous semble que cet amendement répond à un souci d'équité et mérite d'être adopté par notre assemblée.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. c'est une excellente proposition à laquelle le Gouvernement est favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 42, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi organique, après l'article 5 bis.

Article 6



M. le président.
« Art. 6. - Les dispositions du troisième alinéa de l'article 39 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 précitée, dans la rédaction résultant de l'article 3 de la présente loi organique, ne sont pas applicables aux magistrats qui exercent ou ont exercé les fonctions de président de chambre d'une cour d'appel ou d'avocat général à la date d'entrée en vigueur de cette loi.
« Les dispositions du deuxième alinéa de l'article 39 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 précitée, dans la rédaction résultant de l'article 3 de la présente loi organique, ne sont pas applicables aux magistrats du second groupe du premier grade qui justifient de plus de dix années de services effectifs au premier grade à la date d'entrée en vigueur de cette loi.
« Par dérogation aux dispositions du troisième alinéa de l'article 39 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 précitée, dans sa rédaction résultant de l'article 3 de la présente loi organique, peuvent également être nommés à un emploi hors hiérarchie à la Cour de cassation les magistrats exerçant les fonctions de conseiller ou de substitut général à la cour d'appel de Paris ou de Versailles à la date d'entrée en vigueur de ladite loi. » - (Adopté.)

Article 6 bis



M. le président.
« Art. 6 bis. - Les dispositions des articles 28-2, 38-1 et 38-2 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 précitée, et les dispositions de l'article 37, dans la rédaction résultant de l'article 2 ter de la présente loi organique, s'appliqueront aux nominations intervenant après la publication de la présente loi organique. »
Par amendement n° 11, le Gouvernement propose, après la référence : « 28-2, », d'insérer la référence : « 28-3, »
La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. L'article 6 bis prévoit d'appliquer aux seules nominations nouvelles les dispositions relatives à l'exercice pour une durée limitée des fonctions de chef de juridiction et de chef de cour d'appel.
Cet amendement, quant à lui, tend à prévoir la même règle d'application dans le temps pour les dispositions nouvelles relatives à l'exercice pour une durée limitée des fonctions spécialisées du siège.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Avis favorable ; c'est en effet une question de cohérence.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 11, accepté par la commission.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 12, le Gouvernement propose, à la fin de l'article 6 bis , de remplacer les mots : « après la publication de la présente loi organique. » par les mots : « à compter du 1er janvier 2002. ».
La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Cet amendement tend à fixer au 1er janvier 2002 le date d'entrée en vigueur des dispositions nouvelles relatives à l'exercice pour une durée limitée à sept ans des fonctions de chef de juridiction et de chef de cour d'appel.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 12, accepté par la commission.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 6 bis, modifié.

(L'article 6 bis est adopté.)

Article 6 ter



M. le président.
« Art. 6 ter. - Le deuxième alinéa de l'article 8 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 précitée est complété par les mots : ", à l'exception des activités d'arbitrage". »
Je suis saisi de cinq amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 26 est présenté par M. Hyest.
L'amendement n° 36 est déposé par M. de Rohan et les membres du groupe du Rassemblement pour la République et apparentés.
Tous deux tendent à supprimer cet article.
Les deux amendements suivants sont également identiques.
L'amendement n° 27 est présenté par M. Hyest.
L'amendement n° 37 est déposé par M. de Richemont et les membres du groupe du Rassemblement pour la République et apparentés.
Tous deux tendent, à la fin du texte proposé par l'article 6 ter pour compléter le deuxième alinéa de l'article 8 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958, après le mot : « arbitrage » ajouter le mot : « interne ».
Par amendement 2 rectifié, M. Fauchon, au nom de la commission, propose de compléter le texte présenté par l'article 6 ter pour compléter le deuxième alinéa de l'article 8 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 par les mots : « , sous réserve des cas prévus par les dispositions législatives en vigueur. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 41, présenté par M. Gélard et les membres du groupe du Rassemblement pour la République et apparentés, et tendent à compléter le texte proposé par l'amendement n° 2 rectifié par les mots : « ou par les conventions internationales. »
L'amendement n° 26 est-il soutenu ? ...
La parole est à M. de Richemont, pour défendre l'amendement n° 36.
M. Henri de Richemont. Cet amendement se justifie par son texte même.
M. le président. L'amendement n° 27 est-il soutenu ? ...
La parole est à M. de Richemont, pour défendre l'amendement n° 37.
M. Henri de Richemont. Cet amendement a pour objet d'ajouter le qualificatif « interne », afin de permettre aux magistrats de notre pays de siéger dans les collèges d'arbitrage international. Il est bien évident qu'un magistrat en activité ne pourra intervenir comme arbitre que si le chef de cour l'autorise par dérogation et compte tenu de sa charge de travail. Je ne comprends pas très bien pourquoi une telle interdiction serait faite aux magistrats de l'ordre judiciaire, alors que les magistrats de l'ordre administratif ne seraient pas concernés.
En tout état de cause, ce qui paraît important, madame la ministre, c'est que les magistrats français puissent continuer à siéger comme arbitres pour les litiges internationaux, car l'interdiction de telles activités, telle qu'elle a été votée par l'Assemblée nationale, porterait préjudice à l'image de la France ainsi qu'au rayonnement du droit français et à la renommée de l'arbitrage français dans les contentieux internationaux.
Ce serait d'autant plus regrettable que, d'après les statistiques que nous avons consultées, les magistrats suisses, allemands et britanniques en activité sont déjà très souvent nommés. En maintenant une telle interdiction, nous renforcerions encore l'influence du système anglo-saxon dans les échanges économiques internationaux.
Je pense particulièrement aux contentieux mettant en cause des entreprises du continent africain, notamment. En effet, les Etats africains qui avaient jusqu'à présent tendance à nommer des magistrats français pourraient être tentés de faire appel à des magistrats anglo-saxons. Les litiges impliquant des parties francophones, s'ils n'étaient plus arbitrés par des juges français, passeraient alors entre les mains de professionnels étrangers.
La concurrence qui existe entre les différents systèmes judiciaires, et dont il faut que nous soyons conscients, devrait nous inciter à maintenir un service public performant. L'arbitrage international, qui nécessite une formation de grande qualité, contribue au rayonnement de notre système judiciaire et permet aux Etats francophones de choisir des magistrats français. Il est important de contribuer à assurer le rayonnement de notre pays.
M. Alain Vasselle. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 2 rectifié.
M. Pierre Fauchon, rapporteur. La rédaction adoptée par l'Assemblée nationale vise à interdire les activités d'arbitrage en général exercées par des magistrats.
Avec cet amendement n° 2 rectifié, nous proposons de préciser que cette exclusion s'applique sous réserve des cas d'arbitrage prévus par les dispositions législatives en vigueur, notamment celles qui figurent dans le code du travail.
M. le président. La parole est à M. de Richemont, pour présenter le sous-amendement n° 41.
M. Henri de Richemont. Ce sous-amendement va dans le sens de l'amendement n° 37, que je viens de défendre.
Interdire les activités d'arbitrage non seulement provoquerait une rupture entre la France et ses voisins de l'Union européenne, mais serait en contradiction avec nos engagements internationaux et avec les attentes de nombreux Etats francophones.
Le fait d'interdire aux magistrats français de siéger dans des collèges d'arbitrage international irait vraiment à l'encontre des intérêts de notre pays, nuirait au rayonnement de notre droit, ainsi qu'au prestige de notre législation et du système juridique français.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 36, 37 et sur le sous-amendement n° 41 ?
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Pour la clarté du débat, permettez-moi de revenir sur la façon dont se pose le problème.
En première lecture, la commission des lois avait décidé de ne pas supprimer la possibilité donnée aux magistrats de participer à des activités d'arbitrage, et la Haute Assemblée l'avait suivie.
L'Assemblée nationale a été d'un avis différent, puisqu'elle a considéré qu'il n'y avait pas lieu d'autoriser les magistrats à devenir arbitres.
En deuxième lecture, la commission s'est finalement rangée à l'avis de l'Assemblée nationale. La raison principale de ce ralliement a été que, les magistrats étant surchargés de travail du fait des tâches normales de la justice, il n'était pas normal de les autoriser à y ajouter des tâches extérieures d'arbitrage, lesquelles prennent un certain temps.
La commission est par conséquent défavorable à l'amendement n° 36, qui tend purement et simplement à supprimer l'article 6 ter.
L'amendement n° 37 et le sous-amendement n° 41 ont le même objet, à savoir réserver l'hypothèse des arbitrages internationaux par exception à l'exclusion de la possibilité d'arbitrage. A titre personnel, je suis, sur ce point particulier, d'accord avec M. de Richemont, mais la commission des lois ne m'a pas suivi. Elle a en effet décidé à la majorité qu'il n'y avait pas lieu de faire une distinction en faveur des arbitrages internationaux. Par conséquent, elle est défavorable à l'amendement n° 37 et au sous-amendement n° 41.
Je fais simplement observer à M. de Richemont que la rédaction du sous-amendement n° 41 me paraît plus claire, car elle vise formellement les conventions internationales. Voilà pour l'avis de la commission, monsieur le président. A titre personnel, naturellement, je réserve mon vote.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 36, 37 et 2 rectifié, ainsi que sur le sous-amendement n° 41 ?
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. On voit bien qu'il s'agit d'une question difficile. Pour ma part, je crois qu'il est opportun que le statut de la magistrature réglemente les activités d'arbitrage. En effet, le principe demeure, pour le magistrat en activité, celui de l'interdiction de toute autre activité professionnelle ou salariée.
Faut-il exclure toute possibilité d'arbitrage ?
J'ai été très attentive aux arguments qui ont été développés, et j'ai par ailleurs procédé à diverses consultations sur cette question.
Ma conviction est que le système le meilleur, le plus équilibré, est celui qui exclut les arbitrages internes, mais laisse ouverte la faculté de participer à des arbitrages internationaux, parce que c'est l'influence du système juridique français qui est alors en cause. C'est l'argument que nous retenons.
Naturellement, comme aujourd'hui, une autorisation devra être sollicitée par le magistrat auprès de son chef de cour préalablement à chaque participation à un arbitrage, fût-il international.
Le Gouvernement est donc défavorable à l'amendement n° 36. Il est en revanche favorable à l'amendement n° 37 et, par voie de conséquence, défavorable à l'amendement n° 2 rectifié et au sous-amendement n° 41. Si on laisse cette porte ouverte, il faut totalement encadrer cette activité d'arbitrage et lui donner un périmètre réservé aux arbitrages internationaux.
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Fauchon, rapporteur. J'ai peur de ne pas m'être bien clairement exprimé sur l'amendement n° 2 rectifié.
Cet amendement a seulement pour objet de préciser que l'interdiction des activités d'arbritrages ne s'appliquera pas dans les cas prévus par les dispositions législatives qui sont actuellement en vigueur. Il semble qu'il en existe quelques-unes dans le code du travail.
Cet amendement n'est pas d'une très grande portée dans la mesure où il s'agit d'hypothèses assez exceptionnelles je crois ; mais il convient néanmoins de respecter des dispositions qui figurent dans le code du travail.
M. Jacques Larché, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jacques Larché, président de la commission. On nous réclame la possibilité d'autoriser des activités d'arbitrage alors que les magistrats sont surchargés. Ils doivent, nous ont-ils dit, emporter des dossiers en week-end et prétendent ne pas parvenir à accomplir normalement les tâches qui sont les leurs.
Il se trouve que j'ai quelque expérience en matière d'arbitrages. Leur durée est, nous le savons, longue, singulièrement lorsqu'il s'agit d'un arbitrage international. En fonction du domaine concerné, des auditions de témoins, et sous réserve que le magistrat désigné comprennent les langues dans lesquelles le plus souvent ces arbitrages ont lieu, il arrive que ces derniers durent un temps considérable, jusqu'à deux ou trois mois, De surcroît, ils n'ont le plus souvent pas lieu en France. (M. de Richemont fait un signe de dénégation.) Monsieur de Richemont, vous savez très bien que cela se passe à Genève ! J'y suis allé comme vous.
Il s'agit donc d'une question de principe.
Compte tenu des conditions dans lesquelles nous travaillons ce soir, qui sont - pardonnez-moi ! - à la limite du dérisoire, puisque nous sommes cinq en séance, et eu égard au travail qui a été accompli en commission par plus de vingt commissaires, et à la façon dont les textes ont été étudiés, je tiens à dire que si les conclusions auxquelles nous sommes parvenus devraient être modifiées, je demanderais des scrutins publics !
M. le président. Monsieur de Richemont, l'amendement n° 36 est-il maintenu ?
M. Henri de Richemont. Oui, monsieur le président, car je ne me sens pas autorisé à la retirer.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 36, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 37.
M. Henri de Richemont. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. de Richemont.
M. Henri de Richemont. J'ai écouté avec attention les arguments de M. le président de la commission des lois, pour qui j'ai une très grande admiration. Mais, ayant eu la chance et l'honneur de plaider à Genève devant le président Bellet, je peux dire qu'un magistrat français, même quand il travaille à Genève, participe au rayonnement de notre système juridique dans le monde. C'est donc une aberration d'interdire aux magistrats français d'être arbitres sous le seul prétexte qu'ils sont surchargés de travail. Je crois rêver ! Ce sont là des préoccupations de boutiquiers qui vont ruiner l'influence de notre pays et son rayonnement international, alors que la concurrence est réelle.
On va, de plus, privilégier le système anglo-saxon au détriment du nôtre, ce qui est extrêmement regrettable.
Telles sont les raisons pour lesquelles il est important selon moi de laisser aux magistrats français la possibilité d'être arbitres dans les litiges internationaux.
M. Robert Badinter. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Badinter.
M. Robert Badinter. Sur cette question à la fois complexe et intéressante, je voudrais rappeler quelques évidences qui, hélas ! sont celles de la cruelle réalité de la justice d'aujourd'hui.
Nous vivons une époque où, nous le savons, la justice est surchargée et les magistrats suroccupés. Il suffit, pour s'en convaincre, de lire ce qu'ils écrivent eux-mêmes, à juste titre, de leur condition. A cet égard, nous félicitons Mme le garde des sceaux pour les efforts considérables qu'elle déploie afin de remédier à cet état de fait.
Dans cette situation, il appartient à tous les magistrats, en particulier aux plus éminents d'entre eux - ce sont ceux que l'on choisit comme arbitres et non les autres -, de consacrer, avant leur retraite bien entendu, et sous réserve peut-être d'obligations universitaires que parfois ils remplissent, la totalité de leur temps, de leur énergie, de leur talent, de leurs compétences et de leur savoir à leur mission. On me dit qu'il faut faire face, dans le domaine international, à la concurrence. Je répondrai que nous ne manquons pas d'excellents arbitres et qu'au sein de la doctrine française, à l'université, au sein du barreau, comme d'ailleurs dans des professions qui ne sont pas nécessairement judiciaires, il y a des femmes et des hommes de la première qualité, appréciés dans tous les grands arbitrages internationaux, qui défendent les couleurs de l'arbitrage français.
Pour connaître l'arbitrage international, je sais que, de tous les arbitrages c'est celui qui requiert le plus de temps. Par ailleurs, les arbitrages ne se déroulent pas nécessairement selon la procédure qui est celle en usage dans les pays de droit écrit. Très souvent, les arbitrages internationaux se déroulent dans le cadre des règles de l' American Association, et cela implique quelquefois des mois d'audition de témoins.
Alors, oui, il faut que nos magistrats participent à l'arbitrage, mais quand ? Quand ils sont à la retraite. S'ils désirent se consacrer à l'arbitrage avant, qu'ils cessent à ce moment-là d'assumer la plénitude de fonctions qui sont, à mes yeux, les plus exaltantes qui se puissent concevoir, qu'ils quittent l'état de magistrat ! Aussi longtemps que notre justice connaîtra les difficultés dans lesquelles elle se trouve actuellement et alors qu'il y a pour tenir l'arbitrage des femmes et des hommes de la plus haute compétence pour satisfaire à tous les besoins internationaux, il faudra prendre en considération cette situation, je regrette d'avoir à le rappeler ici.
J'ajouterai enfin qu'il existe des procédures de contrôle de la régularité du déroulement des arbitrages. Chacun sait ce qu'il en est de l'examen des causes de nullité comme du problème de l'exequatur et que la magistrature, à ce titre, est appelée à intervenir pour contrôler, vérifier, et améliorer.
Elle participe donc d'une certaine façon à l'arbitrage. Voilà la voie qui doit être suivie.
M. Alain Vasselle. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. J'éprouve quelques hésitations à m'exprimer après M. Badinter, qui, sans aucun doute, est un grand spécialiste en la matière. Mais je me hasarde avec la naïveté qui est la mienne et sans les connaissances que vous avez, les uns et les autres, et sur lesquelles je devrais me reposer pour me prononcer.
Je souhaiterais tout de même réagir aux propos essentiellement centrés sur le problème de la surcharge de travail des magistrats, qui ont été tenus à la fois par M. le rapporteur, par M. le président de la commission et par M. Badinter, pour justifier leur opposition à l'amendement n° 37 de M. de Richement. Je note au passage, l'avis favorable du Gouvernement.
J'ai été très étonné de leur position, confortée par l'argumentation développée par M. Badinter, qui estime qu'en définitive, la surchage est une réalité et que ce ne serait pas rendre service aux magistrats que de leur permettre de procéder aux arbitrages pendant le temps de leur activité professionnelle. Il ajoute que, de toute façon, la France est bien représentée sur le plan international et que le droit français aura toute sa place dans le cadre des arbitrages internationaux, qui pourront être assumés par des magistrats à la retraite.
Mais quel est donc ce pays qui attend que des hommes, dont l'activité professionnelle est la magistrature, ait atteint l'âge de la retraite pour leur permettre d'intervenir dans les arbitrages internationaux ? Il est tout de même surprenant de voir un pays fonctionner en s'appuyant sur les retraités d'une profession ! Au moment où se pose la question du financement des retraites, de l'âge auquel on pourra prendre sa retraite, permettez-moi de dire que c'est étonnant !
Pour ma part, je suis tenté de soutenir l'amendement n° 37 de M. de Richemont, et j'aurais bien aimé entendre Mme le ministre, qui a donné un avis favorable à cet amendement, nous expliquer comment elle entend faire face aux difficultés que nous risquons de rencontrer, aux dires de M. le rapporteur, de M. le président de la commission et de M. Badinter.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 37, repoussé par la commission et accepté par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 41.
M. Henri de Richemont. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. de Richemont.
M. Henri de Richemont. Je n'ai pas coutume de défendre ce qui est en opposition avec à un vote émis par le Sénat. Toutefois, alors que mon amendement n° 37, qui me paraît tout à fait raisonnable et qui, à mes yeux, devait renforcer le prestige du système judiciaire français, a été rejeté, je défends néanmoins le sous-amendement n° 41, qui, je l'espère sera adopté. Au demeurant, je ne me fait pas beaucoup d'illusions ! M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 41, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 2 rectifié, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 6 ter, modifié.

(L'article 6 ter est adopté.)

Articles additionnels après l'article 6 ter



M. le président.
Par amendement n° 13, le Gouvernement propose d'insérer, après l'article 6 ter, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le deuxième alinéa de l'article 6 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 précitée est ainsi rédigé :
« Je jure de me comporter en tout comme un digne et loyal magistrat, impartial, libre, intègre, respectueux de la loi, des droits de toutes les parties et du secret des délibérations. »
La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Cet amendement fait suite à un débat qui a eu lieu à l'Assemblée nationale concernant les serments. Je me suis permise de demander à la Haute Assemblée d'actualiser le serment prêté par les magistrats, de manière à faire apparaître plus explicitement le contenu de leur engagement. Le terme de « loi » doit naturellement être entendu dans son sens le plus large, qui est celui de la légalité. Il inclut ainsi toutes les normes de droit positif, quels que soient leur niveau et leur source.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Cet amendement, ainsi d'ailleurs que l'amendement suivant, déposé par M. Haenel, amendements qui portent tous deux sur le serment des magistrats, soulèvent et une question de méthode et une question de fond. Je dirai un mot de la question de fond, puis je conclurai sur la question de méthode.
Sur le fond, la commission est très réservée à l'idée de modifier la rédaction du serment, peut-être en raison du scepticisme qu'elle éprouve sur l'efficacité et la valeur contraignante du serment. En effet, le contenu du serment n'est pas doté d'un effet aussi décisif qu'on pourrait l'espérer.
Quand on examine la proposition du Gouvernement, on se heurte à deux difficultés.
Tout d'abord, on voit qu'est supprimé le mot « religieusement » dans une phrase où il est dit que l'on s'engage à « respecter religieusement » le secret des délibérations. Il est évident que, dans l'emploi ainsi fait du mot « religieusement », il n'y a aucune référence au sens métaphysique du terme et qu'ainsi employé, cet adverbe signifie « très consciencieusement ». Je trouve qu'il y a quelque chose de mesquin, de suranné et même de franchement démodé à faire la chasse au mot « religieusement ». C'est aussi, je crois, le sentiment de la commission.
Ensuite, la nouvelle rédaction se livre à une énumération détaillée des devoirs du magistrat, alors que la formule actuelle est plus générale. Or il nous semble qu'une formule générale, qui englobe toutes les hypothèses possibles, même celles auxquelles on ne pense pas, mais qui se rencontreront peut-être un jour, est préférable à une énumération qui risque de ne pas prendre en compte tel ou tel cas précis. Certains pourront dire : il y a une énumération précise ; donc, ce qui ne figure pas dans l'énumération n'est pas visé par le serment.
D'où notre réticence à l'égard de cette modification du serment.
J'en viens à la question de méthode que, finalement, la commission a considérée comme plus décisive.
Cette question du serment revêt une importance non seulement morale, mais aussi normative, dans la mesure où des poursuites disciplinaires peuvent être déclenchées sur le fondement d'une violation du serment.
Pour notre part, nous avons déjà montré l'intérêt que nous attachions à l'amélioration du régime disciplinaire, d'une part, par l'extension de la saisine de la juridiction disciplinaire qu'est le CSM aux chefs de juridictions d'appel, en ce qui concerne les juges du siège, ainsi que - c'est un ajout de l'Assemblée nationale - aux procureurs généraux, pour ce qui concerne les magistrats du parquet, d'autre part, par l'introduction d'une plus grande transparence. Cela nous paraissait nécessaire pour répondre à un certain nombre d'inquiétudes, que j'ai exprimées tout à l'heure à la tribune.
La question du serment va donc prendre une importance grandissante. Dès lors, il nous paraît difficile de nous prononcer sur une modification à laquelle, madame le garde des sceaux, vous et vos services avez sûrement réfléchi, je n'en doute pas, mais qui n'a pas pu faire l'objet d'un travail suffisamment approfondi de la part de la commission. Ainsi, nous n'avons pu consulter les différents représentants qualifiés des instances juridictionnelles et des magistrats, je veux parler des syndicats de magistrats, du président ou d'un représentant du CSM, mais aussi du Premier président de la Cour de cassation, qui d'ordinaire éclairent nos réflexions. Il nous paraît tout à fait nécessaire d'entendre les personnes que je viens de citer pour mieux mesurer l'importance du problème et déterminer ce qui doit figurer dans le serment.
Ne croyez pas que nous soyons hostiles à toute modification de la rédaction actuelle du serment. Ce que nous voulons, c'est la modifier en connaissance de cause, après avoir procédé aux consultations qui sont de règle dans toute assemblée.
Dans cet esprit, nous vous faisons donc la proposition suivante, madame le garde des sceaux. M. Haenel a déposé une proposition de loi organique portant sur ce sujet. Il suffirait qu'elle soit inscrite à notre ordre du jour pour que nous puissions aborder la question avec la préparation voulue et la sérénité convenable.
Ne voyez dans ma proposition, madame, aucune astuce pour gagner du temps ou pour cacher une réticence de fond. Simplement, cette façon de procéder me paraît beaucoup plus sage et raisonnable et permettrait d'aboutir à une modification du serment dans un délai assez bref.
Aussi, pour l'instant, je me permets respectueusement de vous suggérer de bien vouloir retirer votre amendement. Vous pourrez ensuite parfaitement inscrire la proposition de loi de M. Haenel à l'ordre du jour d'une prochaine séance ; donnez-nous toutefois au moins un mois, pour que nous procédions aux consultations nécessaires ! Dans le même esprit, je demande à M. de Richemont de retirer l'amendement n° 39.
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Sur le fond, je comprends parfaitement ce qui vient d'être dit. Cependant, je suis embarrassée pour accéder à votre demande, monsieur le rapporteur, parce que je m'étais engagée devant les députés - qui le désiraient ardemment -, lors de la première lecture d'un autre texte, à vous proposer cet amendement dans le projet de loi organique relatif au statut des magistrats. Je ne pouvais pas proposer d'insérer cette disposition dans le texte alors en discussion à l'Assemblée nationale dans la mesure où elle y aurait constitué un cavalier.
Cet amendement résulte donc d'un engagement que j'ai pris devant l'Assemblée natioanle, peut-être avec une grande imprudence. Son dépôt témoignera en tout cas de ma bonne foi.
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Nous vous en donnons acte !
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Sans doute serait-il possible d'inscrire une proposition de loi à l'ordre du jour du Sénat. En revanche, elle aurait peu de chances d'être inscrite avant un certain temps à celui de l'Assemblée nationale, qui est déjà très chargé. Mais je verrai ce qu'il est possible de faire ...
Quoi qu'il en soit, monsieur le rapporteur, j'accepte de retirer cet amendement.
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Je vous remercie, madame le garde des sceaux.
M. le président. L'amendement n° 13 est retiré.
Par amendement n° 39, M. Haenel et les membres du groupe du Rassemblement pour la République et apparentés proposent d'insérer, après l'article 6 ter , un article additionnel ainsi rédigé :
« Après le quatrième alinéa de l'article 6 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 précitée, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Tout magistrat, qu'il soit du siège ou du parquet, doit réitérer, à chaque changement d'affectation, devant la juridiction à laquelle il est nommé, sa prestation de serment dont la teneur suit : "Je jure de me comporter en tout comme un digne et loyal magistrat intègre, libre, impartial, respectueux de la loi, des droits de toutes les parties et du secret professionnel". »
La parole est à M. de Richemont.
M. Henri de Richemont. J'indique d'emblée que je vais accéder au souhait de M. le rapporteur et retirer cet amendement.
Au demeurant, je crois que l'identité des termes du serment, qu'il s'agisse d'un magistrat du parquet ou d'un magistrat du siège pose quelques problèmes. Demander à un magistrat du parquet de respecter les droits de toutes les parties, voire d'être impartial, c'est lui demander quelque chose qu'il ne doit pas faire. Le rôle du parquet est de défendre l'intérêt public, d'agir au nom de l'Etat, de requérir contre l'accusé et non de le défendre. La défense, c'est la mission de l'avocat ! Le parquet n'est qu'une partie parmi d'autres.
J'approuve donc la proposition de M. le rapporteur : il convient de réfléchir encore aux termes des serments à prêter.
M. le président. L'amendement n° 39 est retiré.
Par amendement n° 14, le Gouvernement propose d'insérer après l'article 6 ter , un article additionnel ainsi rédigé :
« Le troisième alinéa de l'article 20 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 précitée est ainsi rédigé :
« Je jure de respecter le secret professionnel et de me comporter en tout comme un digne et loyal auditeur de justice. »
La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Il s'agit du même problème. Cet amendement tend à instituer une formule actualisée du serment prêté par les auditeurs de justice. Dans la mesure où je suppose que la réponse de M. le rapporteur sera la même, je le retire.
M. le président. L'amendement n° 14 est retiré.
Par amendement n° 15, le Gouvernement propose d'insérer, après l'article 6 ter, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 29 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 précitée est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions de la loi du 30 décembre 1921 rapprochant les fonctionnaires qui, étrangers au département, sont unis par le mariage, soit à des fonctionnaires du département, soit à des personnes qui y ont fixé leur résidence ne sont pas applicables aux magistrats. »
La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Le statut de la magistrature, dans son article 29 issu de la loi organique du 5 février 1994, prévoit expressément la prise en compte de la situation de famille des magistrats lors de l'élaboration des projets de nomination, dans toute la mesure compatible avec le bon fonctionnement du service et les particularités de l'organisation judiciaire.
L'application systématique des dispositions de la loi dite « loi Roustan » est, en effet, largement incompatible avec le mode de gestion des affectations des magistrats et, par là même, du service public de la justice.
Le présent amendement tend, en conséquence, à écarter l'application de ce texte aux magistrats, dont la situation familiale est prise en compte, selon des modalités qui leur sont spécifiques, par le statut de la magistrature.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Favorable.
M. Jacques Larché, président de la commission. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jacques Larché, président de la commission des lois. Il me semble que Mme le garde des sceaux a oublié la situation des « pacsés ». On me dit que le PACS sert, dans un certain nombre de cas, à favoriser les rapprochements géographiques. Mais peut-être les magistrats ne se « pacsent »-ils pas ? (Sourires.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 15, accepté par la commission.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi organique, après l'article 6 ter .

Chapitre II

Dispositions relatives au régime disciplinaire
des magistrats

Article additionnel après l'article 8



M. le président.
Par amendement n° 16, le Gouvernement propose d'insérer, après l'article 8, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 56 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 précitée est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« En cas d'empêchement du directeur des services judiciaires, il est suppléé par un magistrat de sa direction d'un rang au moins égal à celui de sous-directeur. »
La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. C'est là le premier d'une série d'amendements qui tendent à améliorer le fonctionnement du Conseil supérieur de la magistrature.
Cet amendement se justifie par le fait que l'absence de toute possibilité de suppléance du directeur des services judiciaires lors des audiences disciplinaires du CSM peut être source de difficultés.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 16, accepté par la commission.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi organique, après l'article 8.

Article 9 bis



M. le président.
« Art. 9 bis. - Après le premier alinéa de l'article 63 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 précitée, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Le procureur général près la Cour de cassation est également saisi par la dénonciation des faits motivant les poursuites disciplinaires que lui adressent les procureurs généraux près les cours d'appel ou les procureurs de la République près les tribunaux supérieurs d'appel.
« Copie des pièces est adressée au garde des sceaux, ministre de la justice, qui peut demander une enquête à l'inspection générale des services judiciaires. »
Par amendement n° 29, M. Charasse propose de compléter in fine le texte présenté par cet article pour insérer deux alinéas après le premier alinéa de l'article 63 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 par un alinéa ainsi rédigé :
« « Dans le cas où l'Etat est condamné en application de l'article L. 781-1 du code de l'organisation judiciaire, pour faute lourde ou déni de justice, l'ouverture de poursuites pénales à l'encontre du ou des magistrats ou fonctionnaires responsables intervient dès que la condamnation est devenue définitive, à la diligence du garde des sceaux ou à défaut d'une des personnes ayant mis en cause avec succès la responsabilité de l'Etat. »
Cet amendement est-il soutenu ?...
Par amendement n° 30, M. Charasse propose de compléter in fine le texte présenté par cet article pour insérer deux alinéas après le premier alinéa de l'article 63 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 par un alinéa ainsi rédigé :
« « Le procureur général près la Cour de cassation reçoit et transmet au Conseil supérieur de la magistrature toute plainte disciplinaire concernant un magistrat du siège ou du parquet formulée par tout citoyen y ayant intérêt à la suite de la condamnation de l'Etat dans des conditions prévues par l'article L. 781-1 du code de l'organisation judiciaire. »
Cet amendement est-il soutenu ?...
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 9 bis.

(L'article 9 bis est adopté.)

Article 9 ter

M. le président. « Art. 9 ter. - L'article 65 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 précitée est ainsi rédigé :
« Art. 65 . - Si le magistrat cité, hors le cas de force majeure, ne comparaît pas, il peut être passé outre. L'audience de la formation compétente du Conseil supérieur de la magistrature est publique. Toutefois, si la protection de l'ordre public ou de la vie privée l'exigent, ou s'il existe des circonstances spéciales de nature à porter atteinte aux intérêts de la justice, l'accès de la salle d'audience peut être interdit pendant la totalité ou une partie de l'audience, au besoin d'office, par la formation compétente du Conseil supérieur de la magistrature.
« La formation compétente du Conseil supérieur de la magistrature émet un avis motivé sur la sanction que les faits reprochés lui paraissent entraîner ; cet avis est transmis au garde des sceaux, ministre de la justice. »
Par amendement n° 31, M. Charasse propose, dans la troisième phrase du premier alinéa du texte présenté par cet article pour l'article 65 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958, de remplacer le mot : « justice » par le mot : « République ».
Cet amendement est-il soutenu ?...
Persone ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 9 ter .

(L'article 9 ter est adopté.)

Article additionnel après l'article 9 ter



M. le président.
Par amendement n° 3, M. Fauchon, au nom de la commission, propose d'insérer, après l'article 9 ter , un article additionnel ainsi rédigé :
« « La première phrase du second alinéa de l'article 38 de la loi du 29 juillet 1881 est complétée par les mots : ", à l'exception des informations concernant les audiences publiques et les décisions publiques rendues en matière disciplinaire à l'encontre des magistrats". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Cet amendement tend à mettre en cohérence la loi sur la presse avec les modifications que nous avons décidées par ailleurs en ce qui concerne la publicité des audiences et des décisions rendues en matière disciplinaire.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 3, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi organique, après l'article 9 ter .
Par amendement n° 32, M. Charasse propose d'insérer, après l'article 9 ter , un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article 65 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art... - En cas de publication de noms, images et qualités de magistrats de l'ordre judiciaire ayant en charge les poursuites ou l'instruction d'une affaire pénale qui n'a pas encore été examinée par une formation de jugement, par toute publication française ou étrangère vendue ou diffusée en France, les magistrats qui ont facilité la divulgation des informations en cause ou qui y ont participé sont révoqués après décision ou avis, selon le cas, du Conseil supérieur de la magistrature ».
Cet amendement est-il soutenu ?...

Articles additionnels avant l'article 10 A

M. le président. Par amendement n° 33, M. Charasse propose d'insérer, avant l'article 10 A, un article additionnel ainsi rédigé :
« Ne donnent lieu à aucune poursuite les faits susceptibles d'être qualifiés de délits et relevés par la Cour des comptes dans son rapport d'avril 2001 relatif à la gestion administrative et financière du ministère de la justice lorsqu'ils ont été commis par des magistrats de l'ordre judiciaire agissant sur instruction des services centraux de leur ministère. »
Cet amendement est-il soutenu ?...
Par amendement n° 34, M. Charasse propose d'insérer, avant l'article 10 A, un article additionnel ainsi rédigé :
« « L'article 245 du code de procédure pénale est ainsi rédigé :
« « Art. 245 - Le président de chaque cour d'assises est désigné par décret, après avis du Conseil supérieur de la magistrature. En cas d'absence ou d'empêchement du président de la cour d'assises, le premier président procède à son remplacement temporaire. Le premier président fixe la date d'ouverture des sessions. »
Cet amendement est-il soutenu ?...

Chapitre III

Dispositions diverses

Article 10 A



M. le président.
« Art. 10 A. - La section l du chapitre II de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 précitée est complétée par un article 21-1 ainsi rédigé :
« Art. 21-1 . - Deux concours sont ouverts pour le recrutement de magistrats du second et du premier grade de la hiérarchie judiciaire.
« Les candidats doivent remplir les conditions prévues à l'article 16.
« Ils doivent en outre :
« 1° Pour les candidats aux fonctions du second grade de la hiérarchie judiciaire, être âgés de quarante ans au moins au 1er janvier de l'année d'ouverture du concours et justifier d'au moins dix ans d'activité professionnelle dans le domaine juridique, administratif, économique ou social, les qualifiant particulièrement pour exercer des fonctions judiciaires ;
« 2° Pour les candidats aux fonctions du premier grade de la hiérarchie judiciaire, être âgés de cinquante ans au moins au 1er janvier de l'année d'ouverture du concours et justifier d'au moins quinze ans d'activité professionnelle dans le domaine juridique, administratif, économique ou social, les qualifiant particulièrement pour exercer des fonctions judiciaires.
« Les candidats admis reçoivent une formation à l'Ecole nationale de la magistrature. Ils sont rémunérés pendant cette période, qui comprend des stages accomplis dans les conditions prévues à l'article 19 et au premier alinéa de l'article 20.
« Préalablement à toute activité, ils prêtent serment devant la cour d'appel en ces termes : "Je jure de conserver le secret des actes du parquet, des juridictions d'instruction et de jugement dont j'aurai eu connaissance au cours de mon stage". Ils ne peuvent en aucun cas être relevés de ce serment.
« A l'issue de cette période de formation, ils sont nommés, dans les formes prévues à l'article 28, aux emplois pour lesquels ils ont été recrutés. Les dispositions de l'article 27-1 ne sont pas applicables.
« Les années d'activité professionnelle accomplies par les magistrats recrutés au titre du présent article sont prises en compte pour leur classement indiciaire dans leur grade et pour leur avancement.
« Les dispositions de l'article 25-4 sont applicables aux magistrats recrutés au titre du présent article.
« Le nombre total des postes offerts au concours pour une année déterminée ne peut excéder :
« 1° Pour les concours de recrutement au second grade de la hiérarchie judiciaire, le quart du nombre total d'auditeurs de justice recrutés au cours de l'année précédente ;
« 2° Pour les concours de recrutement au premier grade de la hiérarchie judiciaire, le dixième du nombre total de nominations en avancement au premier grade prononcées au cours de l'année précédente.
« Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions d'application du présent article. »
Par amendement n° 35, M. Charasse propose, avant le deuxième alinéa du texte présenté par cet article pour l'article 21-1 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958, d'insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Avant leur nomination à leur premier poste, les auditeurs de justice doivent se soumettre à une visite médicale complétée par une enquête de personnalité au sens du sixième alinéa de l'article 81 du code de procédure pénale. Une enquête similaire de personnalité est effectuée tous les dix ans tout au long de la carrière de chaque magistrat en même temps que la visite médicale annuelle. »
Cet amendement est-il soutenu ?...
Par amendement n° 17, le Gouvernement propose, dans le quatrième alinéa (1°) du texte présenté par l'article 10 A pour l'article 21-1 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958, de remplacer les mots : « quarante ans » par les mots : « trente-cinq ans ».
La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Dans le même souci que celui qu'exprimait M. le rapporteur pour d'autres types de recrutements, je souhaite abaisser de quarante à trente-cinq ans l'âge minimal requis pour se présenter au concours complémentaire de recrutement au second grade, afin d'élargir le vivier de candidats.
Il s'agit d'améliorer la pyramide sans modifier l'exigence des dix années d'activité professionnelle qualifiante.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 17, accepté par la commission.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 18, le Gouvernement propose de rédiger ainsi le douzième alinéa du texte présenté par l'article 10 A pour l'article 21-1 de l'ordonnance n° 88-1270 du 22 décembre 1958.
« 1° Pour les concours de recrutement au second grade de la hiérarchie judiciaire, le cinquième du nombre total des recrutements intervenus au second grade au cours de l'année civile précédente, cette proportion pouvant toutefois être augmentée à concurrence de la part non utilisée au cours de la même année civile des possibilités de nomination déterminées par l'article 25 ; ».
La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Le présent amendement tend à fixer la limite des recrutements au second grade au cours de l'année précédente, et non plus par référence au seul recrutement des auditeurs de justice.
Corrélativement, la proportion maximale des recrutements possibles par le concours complémentaire est ramenée du quart au cinquième.
Cet amendement institue enfin un mécanisme qui permettra, si les possibilités d'intégration directe n'ont pas été épuisées par la commission d'avancement, de reporter sur le concours complémentaire les possibilités de recrutement qui n'auront pas été utilisées au cours de l'année précédente.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 18, accepté par la commission.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 10 A, modifié.

(L'article 10 A est adopté.)

Article additionnel après l'article 10 A



M. le président.
Par amendement n° 19, le Gouvernement propose d'insérer, après l'article 10 A, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 25 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 précitée est ainsi rédigée :
« Art. 25 . - Au cours d'une année civile déterminée, les nominations au titre de l'article 22 ne peuvent excéder un cinquième de la totalité des recrutements intervenus au second grade au cours de l'année civile précédente. »
La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. L'actuel article 25 de l'ordonnance statutaire fixe, pour chacune des catégories de personnes pouvant être intégrées directement au second grade, des proportions différentes de recrutement.
Le présent amendement tend à fixer une proportion globale pour l'ensemble des intégrations directes au second grade de la hiérarchie judiciaire, sans distinguer par catégories.
Il est raisonnable de fixer cette proportion à 20 % de l'ensemble des recrutements au second grade au cours de l'année précédente.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 19, accepté par la commission.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi organique, après l'article 10 A.

Articles 10, 11 et 11 bis



M. le président.
« Art. 10. - Le dernier alinéa de l'article 40-1 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 précitée est ainsi rédigé :
« Le nombre des conseillers et des avocats généraux en service extraordinaire ne peut respectivement excéder le dixième de l'effectif des magistrats hors hiérarchie du siège de la Cour de cassation et le dixième de l'effectif des magistrats hors hiérarchie du parquet de ladite cour. » - (Adopté.)
« Art. 11. - I. - Non modifié .
« I bis. - L'article L. 151-2 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 151-2 . - La formation de la Cour de cassation qui se prononce sur la demande d'avis est présidée par le premier président ou, en cas d'empêchement, par le président de chambre le plus ancien.
« La formation appelée à se prononcer sur une demande d'avis dans une matière autre que pénale comprend, outre le premier président, les présidents de chambre et deux conseillers désignés par chaque chambre spécialement concernée. En cas d'empêchement de l'un d'eux, il est remplacé par un conseiller désigné par le premier président ou, à défaut de celui-ci, par le président de chambre qui le remplace.
« La formation appelée à se prononcer sur une demande d'avis en matière pénale comprend, outre le premier président, le président de la chambre criminelle, un président de chambre désigné par le premier président, quatre conseillers de la chambre criminelle et deux conseillers, désignés par le premier président, appartenant à une autre chambre. En cas d'empêchement du président de la chambre criminelle, il est remplacé par un conseiller de cette chambre désigné par le premier président ou, à défaut de celui-ci, par le président de chambre qui le remplace.
« La formation ne peut siéger que si tous les membres qui doivent la composer sont présents. »
« II. - Non modifié .
« III. - Il est inséré, dans le livre IV du code de procédure pénale, un titre XX ainsi rédigé :

« TITRE XX

« SAISINE POUR AVIS
DE LA COUR DE CASSATION

« Art. 706-55 . - Les juridictions pénales, à l'exception des juridictions d'instruction et de la cour d'assises, peuvent solliciter l'avis de la Cour de cassation en application de l'article L. 151-1 du code de l'organisation judiciaire. Toutefois, aucune demande d'avis ne peut être présentée lorsque, dans l'affaire concernée, une personne est placée en détention provisoire ou sous contrôle judiciaire.
« Art. 706-56 . - Lorsque le juge envisage de solliciter l'avis de la Cour de cassation en application de l'article L. 151-1 du code de l'organisation judiciaire, il en avise les parties et le ministère public. Il recueille les observations écrites éventuelles des parties et les conclusions du ministère public dans le délai qu'il fixe, à moins que ces observations ou conclusions n'aient déjà été communiquées.
« Dès réception des observations et conclusions ou à l'expiration du délai, le juge peut, par une décision non susceptible de recours, solliciter l'avis de la Cour de cassation en formulant la question de droit qu'il lui soumet. Il surseoit à statuer jusqu'à la réception de l'avis ou jusqu'à l'expiration du délai mentionné à l'article 706-58.
« Art. 706-57 . - La décision sollicitant l'avis est adressée, avec les conclusions et les observations écrites éventuelles, par le greffier de la juridiction au greffe de la Cour de cassation.
« Elle est notifiée, ainsi que la date de transmission du dossier, aux parties par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.
« Le ministère public auprès de la juridiction est avisé ainsi que le premier président de la cour d'appel et le procureur général lorsque la demande d'avis n'émane pas de la cour.
« Art. 706-58 . - La Cour de cassation rend son avis dans les trois mois de la réception du dossier.
« Art. 706-59 . - L'affaire est communiquée au procureur général près la Cour de cassation. Celui-ci est informé de la date de séance.
« Art. 706-60 . - L'avis peut mentionner qu'il sera publié au Journal officiel de la République française.
« Art. 706-61 . - L'avis est adressé à la juridiction qui l'a demandé, au ministère public auprès de cette juridiction, au premier président de la cour d'appel et au procureur général lorsque la demande n'émane pas de la cour.
« Il est notifié aux parties par le greffe de la Cour de cassation. » - (Adopté.)
« Art. 11 bis. - I. - Le deuxième alinéa de l'article L. 131-6 du code de l'organisation judiciaire est ainsi rédigé :
« Cette formation déclare non admis les pourvois irrecevables ou non fondés sur un moyen sérieux de cassation. Elle statue lorsque la solution du pourvoi s'impose. Dans le cas contraire, elle renvoie l'examen du pourvoi à l'audience de la chambre. »
« II. - Le dernier alinéa du même article est complété par une phrase ainsi rédigée :
« La formation déclare non admis les pourvois irrecevables ou non fondés sur un moyen sérieux de cassation. » - (Adopté.)

Article additionnel après l'article 11 bis



M. le président.
Par amendement n° 20, le Gouvernement propose d'insérer, après l'article 11 bis, un article additionnel ainsi rédigé :
« Les dispositions des articles 1er, 2, 3, 4, 6, 11 et 11 bis de la présente loi organique prendront effet au 1er janvier 2002. »
La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Cet amendement tend à fixer au 1er janvier 2002 la date d'entrée en vigueur des dispositions nouvelles relatives à l'organisation de la carrière des magistrats et à la mobilité du corps judiciaire, ainsi que les dispositions du code de l'organisation judiciaire qui instituent la saisine pour avis de la Cour de cassation en matière pénale et le mécanisme de « filtrage » des pourvois en cassation.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Fauchon, rapporteur. La commission s'en remet à l'appréciation du Gouvernement sur cette question d'organisation des modalités pratiques du nouveau dispositif et émet donc un avis favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 20, accepté par la commission.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi organique, après l'article 11 bis .

Articles additionnels après l'article 12



M. le président.
Par amendement n° 21, le Gouvernement propose d'insérer, après l'article 12, un article additionnel ainsi rédigé :
« Au deuxième alinéa de l'article 18-1 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 précitée, les mots : "allocataires d'enseignement et de recherche en droit ayant exercé cette fonction" sont remplacés par les mots : "personnes ayant exercé des fonctions d'enseignement ou de recherche en droit dans un établissement public d'enseignement supérieur". »
La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 21, accepté par la commission.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi organique, après l'article 12.
Par amendement n° 22, le Gouvernement propose d'insérer, après l'article 12, un article additionnel ainsi rédigé :
« Pour chacune des années 2002 et 2003, par dérogation aux dispositions de l'article 21-1 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 précitée, le recrutement par concours de magistrats du second grade de la hiérarchie judiciaire est autorisé dans la limite de 125 postes. »
La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Cet amendement a pour objet de porter à 125, pour les deux prochaines années, le nombre de magistrats du second grade qui pourraient être recrutés directement par voie de concours. Cette disposition nous permettra de renforcer rapidement l'effectif des juridictions et d'améliorer à court terme le service public de la justice.
J'ajoute que cet amendement correspond à un engagement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Fauchon, rapporteur. La commission est favorable à cet amendement, compte tenu de l'urgence et du fait qu'il s'agit d'un dispositif qui ne jouera que pendant les deux années à venir.
Comme je l'indiquais dans mon propos général, la commission exprime très vivement le souhait que les futurs concours de la magistrature soient organisés de telle sorte que l'on n'ait plus besoin de recourir à de tels recrutements exceptionnels. Naturellement, il faut toutefois laisser s'écouler le temps nécessaire pour que les nouveaux venus à l'Ecole nationale de la magistrature puissent en sortir et être disponibles comme magistrats.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 22.
M. Robert Badinter. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Badinter.
M. Robert Badinter. Le groupe socialiste votera cet amendement, mais, madame le garde des sceaux, je ne peux pas ne pas dire à quel point je ressens douloureusement la situation qui, d'année en année, de concours en concours, de recrutement extraordinaire en recrutement extraordinaire, aboutit à décourager quelques-uns des meilleurs parmi nos étudiants.
Il faut bien mesurer que le concours de la magistrature offre aujourd'hui, par rapport au nombre de candidats, un nombre très limité de postes. Voilà des jeunes femmes et des jeunes hommes qui ont beaucoup travaillé pour réussir ce concours, qui parviennent presque au succès mais qui ne sont pas reçus et qui constatent que d'autres formes de recrutement interviennent.
Je sais, pour avoir dirigé pendant des années un institut d'études judiciaires, que cela crée beaucoup d'amertume au sein des jeunes générations.
J'ai eu l'occasion de dire à vos prédécesseurs, à bien des reprises, que c'était l'avenir même de la magistrature qui se jouait là et qu'il était profondément regrettable de frustrer ainsi des jeunes femmes et des jeunes hommes qui veulent se consacrer à la magistrature, mais qui se voient préférer d'autres candidats. Nous pouvons comprendre les raisons circonstancielles qui conduisent à procéder à ces recrutements exceptionnels, mais force est de constater qu'elles se renouvellent assez souvent, et cela crée une frustration durable.
Je joins donc ma voix à celle de M. le rapporteur, pour demander instamment à la Chancellerie de projeter dans l'avenir ce que seront les besoins largement calculés de la magistrature française, de façon que le concours demeure la voie principale de recrutement des magistrats.
Madame le garde des sceaux, ne décourageons pas les meilleurs de nos jeunes gens !
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Je partage tout à fait votre analyse, monsieur Badinter. C'est vrai qu'en 2001 il n'y a pas eu de concours de ce type, car nous espérions, avec le rythme retrouvé par Mme Guigou, pouvoir répondre à ces défis. Mais nous nous sommes rendu compte, jour après jour, semaine après semaine, que, pour obtenir ce que nous voulions, c'est-à-dire 8 000 magistrats sur le terrain au 1er septembre 2005, il fallait augmenter considérablement les effectifs de l'Ecole nationale de la magistrature.
Après m'en être entretenue avec l'équipe du directeur de l'ENM, qui a déjà quelques difficultés à répondre à ce qu'on lui demande, il m'a semblé possible de tabler sur le passage à 280 magistrats par promotion à partir de 2004. Nous allons faire entrer dès maintenant 280 jeunes femmes et jeunes hommes, au lieu de 200. Je puis vous dire que la négociation n'a pas été simple et qu'il a fallu donner des moyens nouveaux à l'Ecole nationale de la magistrature, aussi bien en vacations qu'en matériel informatique, notamment.
Le réalisme m'a conduite à plafonner à 280 l'effectif d'une promotion, pour les deux prochaines années. En tout cas, je n'ai pas voulu anticiper au-delà des deux prochaines années. Mais vous avez raison : il faudra sans doute penser autrement les promotions.
Pour réussir, malgré tout, à avoir ces 8 000 magistrats, correspondant au chiffre qu'il nous paraît raisonnable d'atteindre pour que la justice fonctionne au moins convenablement dans notre pays, je n'avais pas d'autre solution que de passer, concernant le concours complémentaire, à 125 en 2002 et en 2003, puis de revenir à 90 en 2004 et en 2005.
Je puis vous assurer, monsieur Badinter, que nous nous sommes efforcés de trouver d'autres solutions. La crise était telle que m'engager pour une date aussi lointaine que 2006 ou 2007, compte tenu de la situation actuelle, aurait profondément démoralisé les représentants de tous les magistrats de ce pays. C'est pourquoi je vous propose ce dispositif, dont je comprends qu'il puisse choquer.
Cet amendement est simplement la conséquence de l'engagement que j'ai pris de répondre aux besoins de l'institution judiciaire. Ce n'est pas un amendement déposé dans l'enthousiasme.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 22, accepté par la commission.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi organique, après l'article 12.
Par amendement n° 23, le Gouvernement propose d'insérer, après l'article 12, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - A la fin du troisième alinéa (2°) du I de l'article 1er de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 précitée, les mots : "dans l'ensemble des tribunaux de première instance du ressort de la cour d'appel à laquelle ils sont rattachés" sont remplacés par les mots : "à la cour d'appel à laquelle ils sont rattachés et dans l'ensemble des tribunaux de première instance du ressort de ladite cour".
« II. - L'article 3-1 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 précitée est ainsi rédigé :
« Art. 3-1. - Les magistrats mentionnés au 2° du I de l'article 1er sont appelés à remplacer temporairement les magistrats de leur grade des tribunaux de première instance et de la cour d'appel qui se trouvent empêchés d'exercer leurs fonctions du fait de congés de maladies, de longue maladie, pour maternité ou adoption, ou du fait de leur participation à des stages de formation, ou admis à prendre leur congé annuel.
« Ils peuvent, en outre, être temporairement affectés dans ces juridictions, pour exercer, pour une durée qui n'est pas renouvelable et qui ne peut excéder huit mois, les fonctions afférentes à un emploi vacant de leur grade.
« Ils peuvent enfin, pour une durée qui n'est pas renouvelable et qui ne peut excéder huit mois, être temporairement affectés dans un tribunal de première instance, ainsi qu'à la cour d'appel pour les magistrats du premier grade, pour renforcer l'effectif d'une juridiction afin d'assurer le traitement du contentieux dans un délai raisonnable.
« S'il s'agit de magistrats du siège et sauf consentement de leur part à un changement d'affectation, ils demeurent en fonctions jusqu'au retour du magistrat dont ils assurent le remplacement, ou jusqu'au terme fixé de leur affectation temporaire par l'ordonnance du premier président.
« L'affectation de ces magistrats, selon qu'ils appartiennent au siège ou au parquet, est prononcée par ordonnance du premier président de la cour d'appel ou par décision du procureur général, qui précise le motif et la durée du remplacement à effectuer ou de l'affectation temporaire.
« A défaut d'assurer un remplacement ou d'être temporairement affectés, en application des alinéas qui précèdent, ces magistrats exercent des fonctions du siège ou du parquet du niveau hiérarchique auquel ils appartiennent au tribunal de grande instance du siège de la cour d'appel à laquelle ils sont rattachés ou au tribunal de grande instance le plus important du département où est située ladite cour.
« Le nombre de ces magistrats ne peut excéder, pour chaque cour d'appel, le quinzième des emplois de magistrats de la cour d'appel et des tribunaux de première instance du ressort.
« Leur nomination peut, le cas échéant, être prononcée en surnombre de l'effectif de la cour d'appel de rattachement, dans la limite de l'effectif budgétaire global des emplois de leur grade.
« Après deux ans d'exercice dans leurs fonctions et sur leur demande, ces magistrats sont nommés au tribunal de grande instance du siège de la cour d'appel à laquelle ils sont rattachés ou au tribunal de grande instance le plus important du département où est située ladite cour. La nomination intervient sur le premier emploi vacant, respectivement du siège ou du parquet du niveau hiérarchique auquel ces magistrats appartiennent et pour lequel ils se sont portés candidats, à l'exception des emplois de chef de juridiction.
« Ces magistrats ne peuvent en aucun cas exercer les fonctions prévues au présent article, pendant une durée supérieure à six ans. A l'issue de cette période, ils sont nommés respectivement en qualité de magistrat du siège ou du parquet du niveau hiérarchique auquel ils appartiennent dans celle des deux juridictions mentionnées à l'alinéa précédent où, au plus tard, quatre mois avant la fin de la sixième année de leurs fonctions, ils ont demandé à être affectés. A défaut d'avoir effectué un choix, ils sont nommés au tribunal de grande instance le plus important du département où est située la cour d'appel à laquelle ils sont rattachés. Les nominations sont prononcées, le cas échéant, en surnombre de l'effectif budgétaire du niveau hiérarchique auquel ils appartiennent et, s'il y a bien, en surnombre de l'effectif organique de la juridiction. Les surnombres sont résorbés à la première vacance utile intervenant dans la juridiction considérée,
« Un décret en Conseil d'Etat détermine, en tant que de besoin, les conditions d'application du présent article. »
La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Le présent amendement a pour objet d'améliorer le dispositif relatif aux magistrats placés auprès des chefs de cour d'appel, qui apportent un renfort appréciable aux juridictions.
Il autorise l'exercice de ces fonctions non seulement par des magistrats du second grade, mais aussi désormais par des magistrats du grade d'avancement, le premier grade, qui bénéficient d'une plus grande expérience.
Par ailleurs, le champ d'intervention de ces magistrats est élargi puisqu'ils pourront, à l'avenir, être temporairement affectés au sein des cours d'appel.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Avis favorable, car cet amendement apporte un élément de souplesse qui paraît tout à fait opportun.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 23, accepté par la commission.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi organique, après l'article 12.

Article 13

M. le président. L'article 13 a été supprimé par l'Assemblée nationale.

Chapitre IV

Dispositions relatives au Conseil supérieur
de la magistrature

Article 14



M. le président.
« Art. 14. - I. - Les deux derniers alinéas de l'article 3 de la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature sont remplacés par six alinéas ainsi rédigés :
« Dans chaque collège, les électeurs procèdent à l'élection à bulletin secret au scrutin de liste, à la représentation proportionnelle suivant la règle du plus fort reste, sans panachage ni vote préférentiel.
« Chaque liste comprend autant de noms de candidats qu'il y a de magistrats à élire pour chaque collège dans le ressort considéré, le nom du candidat d'un sexe donné devant être, sur cette liste, obligatoirement suivi de celui d'un candidat de l'autre sexe dans la limite du nombre de noms qu'elle comporte.
« Les listes qui n'ont pas obtenu 5 % des suffrages exprimés ne sont pas admises à répartition des sièges.
« Dans le cas où, pour l'attribution d'un siège, des listes ont le même reste, le siège est attribué à la liste qui a recueilli le plus grand nombre de suffrages. Si plusieurs de ces listes ont obtenu le même nombre de suffrages, le siège est attribué à l'une d'entre elles par voie de tirage au sort.
« Les candidats élus sont désignés selon l'ordre de présentation de la liste.
« Le mandat des candidats élus a une durée de quatre ans. Toutefois, il prend fin si l'élu cesse d'exercer des fonctions correspondant au collège au titre duquel il a été élu. »
« II. - Les deux premiers alinéas de l'article 4 de la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 précitée sont remplacés par huit alinéas ainsi rédigés :
« Les magistrats du siège élus en application de l'article 3 élisent en leur sein les deux magistrats du siège appelés à siéger au Conseil supérieur de la magistrature en application du 4° de l'article 1er et le magistrat du siège appelé à y siéger en application du 4° de l'article 2 à bulletin secret au scrutin de liste, à la représentation proportionnelle suivant la règle du plus fort reste, sans panachage ni vote préférentiel.
« Les magistrats du parquet élus en application de l'article 3 élisent en leur sein dans les mêmes conditions les deux magistrats du parquet appelés à siéger au Conseil supérieur de la magistrature en application du 4° de l'article 2 et le magistrat du parquet appelé à y siéger en application du 4° de l'article 1er.
« Chaque liste comprend trois noms de candidats, les deux sexes devant y être représentés.
« Les listes qui n'ont pas obtenu 5 % des suffrages exprimés ne sont pas admises à répartition des sièges.
« Dans le cas où, pour l'attribution d'un siège, des listes ont obtenu le même reste, le siège est attribué à la liste qui a recueilli le plus grand nombre de suffrages. Si plusieurs de ces listes ont obtenu le même nombre de suffrages, le siège est attribué à l'une d'entre elles par voie de tirage au sort.
« La liste ayant droit au plus grand nombre de sièges choisit alternativement au sein de chacune des deux formations les sièges qu'elle souhaite se voir attribuer. Les autres listes exercent ensuite leur choix successivement dans l'ordre décroissant du nombre de sièges auxquelles elles peuvent prétendre et dans les mêmes conditions.
« En cas d'égalité du nombre des sièges obtenus, l'ordre des choix est déterminé par le nombre respectif de suffrages obtenus par les listes en présence. En cas d'égalité du nombre des suffrages, l'ordre des choix est déterminé par tirage au sort.
« Les membres élus sont désignés selon l'ordre de présentation de la liste. »
« III. - Le deuxième alinéa de l'article 7 de la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 précitée est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :
« Lorsqu'une vacance se produit avant la date normale d'expiration des mandats s'agissant d'un des membres visés aux 1° à 3° de l'article 1er ou d'un des membres visés aux 1° à 3° de l'article 2, il est procédé, dans un délai de trois mois et suivant les modalités prévues à ces articles, à une désignation complémentaire.
« Lorsqu'une vacance se produit avant la date normale d'expiration des mandats s'agissant d'un des membres visés au 4° de l'article 1er ou au 4° de l'article 2, le magistrat dont le nom figurait, sur la liste de candidats mentionnée à l'article 4, après celui du magistrat dont le siège est devenu vacant est désigné pour achever son mandat. Si cette liste ne comporte plus de nom utile, il est procédé, dans un délai de trois mois, à une désignation complémentaire au scrutin uninominal à un tour à bulletin secret parmi des candidats du même sexe que celui du membre dont le siège est devenu vacant.
« Les dispositions du premier alinéa de l'article 6 ne sont pas applicables aux membres désignés pour achever un mandat après la survenance d'une vacance. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 38, M. de Rohan et les membres du groupe du Rassemblement pour la République et apparentés proposent de supprimer cet article.
Par amendement n° 40, M. Courtois propose de rédiger comme suit cet article :
« I. - L'article 3 de la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature est ainsi rédigé :
« Art. 3. - Ont la qualité d'électeur les magistrats de l'ordre judiciaire en position d'activité, de congé parental ou de détachement, à l'exception de ceux placés en congé spécial ou temporairement interdits d'exercer leurs fonctions.
« Sont éligibles les magistrats ayant la qualité d'électeur qui, à la date de l'élection, sont en position d'activité dans les cours et tribunaux et justifient de cinq ans de services effectifs en qualité de magistrat. »
« II. - L'article 4 de la loi organique précitée est ainsi rédigé :
« Art. 4. - Les élections ont lieu à bulletin secret.
« Pour chacun des magistrats élus en qualité de membre, il est procédé, selon les mêmes modalités, à l'élection d'un suppléant.
« Les magistrats mentionnés au 4° de l'article 1er et au 4° de l'article 2 sont élus au suffrage direct et au scrutin de liste, à la représentation proportionnelle suivant la règle du plus fort reste, sans panachage ni vote préférentiel, par l'ensemble des magistrats des cours et tribunaux, à l'exception des magistrats hors hiérarchie de la Cour de cassation, des premiers présidents de cour d'appel et des procureurs généraux près lesdites cours, ainsi que par les magistrats du cadre de l'administration centrale du ministère de la justice et les magistrats placés en position de détachement.
« Chaque liste comprend six noms de candidats en qualité de membre et un nombre égal de candidats en qualité de suppléant, et comporte un nombre égal d'hommes et de femmes tant en qualité de membre que de suppléant.
« Les listes qui n'ont pas obtenu cinq pour cent des suffrages exprimés ne sont pas admises à répartition des sièges.
« Dans le cas où, pour l'attribution d'un siège, des listes ont le même reste, le siège est attribué à la liste qui a recueilli le plus grand nombre de suffrages. Si plusieurs de ces listes ont obtenu le même nombre de suffrages, le siège est attribué à l'une d'entre elles par voie de tirage au sort.
« La liste ayant droit au plus grand nombre de sièges choisit alternativement au sein de chacune des deux formations les sièges des membres qu'elle souhaite se voir attribuer. Les autres listes exercent ensuite leur choix successivement dans l'ordre décroissant du nombre de sièges auxquels elles peuvent prétendre et dans les mêmes conditions.
« En cas d'égalité du nombre des sièges obtenus, l'ordre des choix est déterminé par le nombre respectif de suffrages obtenus par les listes en présence. En cas d'égalité du nombre des suffrages, l'ordre des choix est déterminé par voie de tirage au sort.
« Il est attribué à chaque liste et pour chaque formation et grade un nombre de sièges de suppléants égal à celui des membres élus au titre de cette liste pour cette formation et pour ce grade.
« Les membres et suppléants élus sont désignés selon l'ordre de présentation de la liste.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application des articles précédents ainsi que du présent article, et notamment les modalités du vote par correspondance lors des opérations électorales prévues au 4° de l'article 1er et au 4° de l'article 2. »
« III. - Les deuxième et troisième alinéas de l'article 7 de la loi organique précitée sont remplacés par sept alinéas ainsi rédigés :
« Si, avant l'expiration de son mandat, l'un des membres démissionne ou se trouve dans l'impossibilité d'exercer son mandat, ou si le Conseil supérieur de la magistrature constate qu'il cesse de remplir les conditions requises pour être éligible sous réserve des dispositions du troisième alinéa de l'article 8, il est procédé à son remplacement dans les conditions suivantes :
« 1° Les magistrats qui ont été élus en qualité de suppléants achèvent le mandat du membre qu'ils remplacent.
« Au cas où pour l'une des causes mentionnées ci-dessus le suppléant ne peut exercer son mandat, il est procédé à une élection complémentaire dans un délai de trois mois, selon les modalités prévues lors de la désignation initiale du membre titulaire. Le membre élu dans ces conditions achève le mandat du membre qu'il remplace.
« 2° Les autres membres du Conseil supérieur de la magistrature sont remplacés, dans un délai de trois mois, selon les modalités prévues lors de leur désignation initiale. Les membres ainsi désignés achèvent le mandat des membres qu'ils remplacent et siègent au sein des mêmes formations du Conseil supérieur de la magistrature que ces derniers.
« La démission d'un membre du Conseil supérieur de la magistrature prend effet à partir de la désignation de son remplaçant.
« Les dispositions du premier alinéa de l'article 6 ne sont pas applicables au membre du Conseil supérieur de la magistrature qui achève le mandat d'un membre pendant une durée inférieure ou égale à un an.
« Le suppléant ne peut remplacer le membre momentanément empêché. »
La parole est à M. de Richemont, pour défendre l'amendement n° 38.
M. Henri de Richemont. Cet amendement de suppression se justifie par son texte même.
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Quelle économie de moyens ! (Sourires.)
M. le président. L'amendement n° 40 est-il soutenu ?...
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 38 ?
M. Pierre Fauchon, rapporteur. La commission émet un avis défavorable. Elle considère en effet que l'Assemblée nationale a introduit dans l'élection des membres du Conseil supérieur de la magistrature un élément de proportionnalité, d'ailleurs limité, élément qui, compte tenu de la nature et de la fonction du CSM, reste assez raisonnable.
Après l'avoir envisagé en première lecture, nous ne nous étions pas engagés dans cette voie qui nous paraissait vraiment trop éloignée du texte d'origine.
Compte tenu des enrichissements successifs apportés au projet de loi initial, bientôt plus rien ne lui sera extérieur ! Il ne nous a donc pas paru opportun de nous opposer à la position assez raisonnable de l'Assemblée nationale sur ce point. La commission émet donc un avis défavorable sur l'amendement n° 38.
M. Jacques Larché, président de la commission des lois. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jacques Larché, rapporteur de la commission. Mon propos est destiné à Mme la ministre.
Je l'ai tenu devant chacun de vos prédécesseurs et je voudrais que vous l'entendiez aussi, d'autant que je n'aurai pas l'occasion de le répéter ici.
Ces problèmes ne se poseraient pas à nous si nous n'avions pas laissé s'introduire - c'est une règle à laquelle le Conseil d'Etat n'aurait jamais dû déroger, mais, hélas ! il l'a admis - le syndicalisme dans la magistrature.
M. Henri de Richemont. C'est vrai ! Là, je suis d'accord !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 38 ?
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. L'amendement n° 38 vise à rejeter la proposition juste et équilibrée de l'Assemblée nationale tendant à réformer le mode d'élection des magistrats au CSM. Je pense d'ailleurs qu'elle est inspirée par un débat qui avait eu lieu au Sénat. Cette rédaction me paraît donc largement acceptable.
Je suis donc défavorable à l'amendmenet n° 38.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 38.
Mme Nicole Borvo. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo. Je suis très heureuse que l'Assemblée nationale ait retenu la rédaction de l'article 14 que j'avais en effet proposée ici en espérant que la suite me donnerait raison.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 38, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. Henri de Richemont. Je n'ai décidément pas de chance, ce soir ! (Sourires.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 14.

(L'article 14 est adopté.)

Article 15



M. le président.
« Art. 15. - Les dispositions de l'article 14 de la présente loi organique relatives à l'élection des représentants des magistrats au Conseil supérieur de la magistrature sont applicables lors du prochain renouvellement des membres du Conseil supérieur de la magistrature. » - (Adopté.)

Article additionnel après l'article 15



M. le président.
Par amendement n° 24, le Gouvernement propose d'insérer, après l'article 15, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 18 de la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 précitée est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Lorsqu'elle siège en formation disciplinaire, la formation compétente du Conseil supérieur de la magistrature se réunit sur convocation du premier président de la Cour de cassation ou du procureur général près ladite Cour.
« En cas d'empêchement, le premier président de la Cour de cassation et le procureur général près ladite Cour peuvent être suppléés respectivement par le magistrat hors hiérarchie du siège ou du parquet de la Cour de cassation membre de la formation compétente du Conseil supérieur de la magistrature. »
La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. L'objet du présent amendement est double : il donne en premier lieu compétence au président de chaque formation disciplinaire, conformément à une pratique constante, pour procéder à la convocation de l'instance disciplinaire ; il prévoit en second lieu, en cas d'empêchement, un mécanisme de suppléance du président de la formation disciplinaire par un autre membre du Conseil supérieur de la magistrature, et ce, afin de prévenir toute situation de blocage.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 24, accepté par la commission.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi organique, après l'article 15.
Les autres dispositions du projet de loi organique ne font pas l'objet de la deuxième lecture.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi organique.
En application de l'article 59 du règlement, le scrutin public est de droit.
Il va y être procédé dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 51:

Nombre de votants 317
Nombre de suffrages exprimés 317
Majorité absolue des suffrages 159
Pour l'adoption 317

Le Sénat a adopté.

13

TRANSMISSION D'UN PROJET DE LOI

M. le président. J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 301, distribué et renvoyé à la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

14

DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE LOI

M. le président. J'ai reçu de MM. Roger Karoutchi, Louis Althapé, Pierre André, Roger Besse, Mme Paulette Brisepierre, MM. Robert Calméjane, Auguste Cazalet, Gérard César, Jacques Chaumont, Gérard Cornu, Robert del Picchia, Michel Doublet, Alain Dufaut, Daniel Eckenspieller, Michel Esneu, Bernard Fournier, Alain Gérard, Charles Ginésy, Georges Gruillot, Hubert Haenel, Emmanuel Hamel, René-Georges Laurin, Jacques Legendre, Jean-François Le Grand, Simon Loueckhote, Bernard Murat, Paul Natali, Mme Nelly Olin, MM. Jacques Oudin, Jean-Pierre Schosteck, Martial Taugourdeau et Jacques Valade une proposition de loi relative à la protection des populations résidant à proximité des stations radioélectriques de téléphonie mobile.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 302, distribuée et renvoyée à la commission des affaires sociales, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

15

TRANSMISSION D'UNE PROPOSITION DE LOI

M. le président. J'ai reçu de M. le président de l'Assemblée nationale une proposition de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, portant amélioration de la couverture des non-salariés agricoles contre les accidents du travail et les maladies professionnelles.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 303, distribuée et renvoyée à la commission des affaires sociales, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

16

DÉPÔT D'UN RAPPORT D'INFORMATION

M. le président. J'ai reçu de M. Jacques Oudin un rapport d'information fait au nom de la délégation du Sénat pour l'Union européenne sur la politique commune des transports.
Le rapport d'information sera imprimé sous le n° 300 et distribué.

17

ORDRE DU JOUR

M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mercredi 9 mai 2001, à quinze heures et le soir :
1. Discussion des conclusions du rapport de M. Marcel Deneux, fait au nom de la commission des affaires économiques et du Plan, sur la proposition de résolution (n° 278, 2000-2001) de MM. Pierre Martin, Fernand Demilly et Marcel Deneux, relative à la création d'une commission d'enquête sur les inondations de la Somme afin d'établir les causes et les responsabilités de ces crues, d'évaluer les coûts et de prévenir les risques d'inondations.
M. Laurent Béteille, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
2. Discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi (n° 273, 2000-2001), adopté par l'Assemblée nationale, en nouvelle lecture, relatif à l'interruption volontaire de grossesse et à la contraception.
Rapport (n° 297, 2000-2001) de M. Francis Giraud, fait au nom de la commission des affaires sociales.
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 7 mai 2001, à dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 7 mai 2001, à dix-sept heures.
3. Suite de la discussion du projet de loi (n° 185, 2000-2001), adopté par l'Assemblée nationale, de modernisation sociale.
Rapport (n° 275, 2000-2001) de MM. Claude Huriet, Bernard Seillier, Alain Gournac et Mme Annick Bocandé, fait au nom de la commission des affaires sociales.
Avis (n° 276, 2000-2001) de M. Jacques Legendre, fait au nom de la commission des affaires culturelles.
Le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte est expiré.

Délai limite pour les inscriptions de parole
et pour le dépôt des amendements

Deuxième lecture de la proposition de loi, adoptée avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, tendant à la reconnaissance de la traite et de l'esclavage en tant que crime contre l'humanité (n° 314, 1999-2000) ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 9 mai 2001, à dix-sept heures.
Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant diverses dispositions statutaires relatives aux magistrats de la Cour des comptes et des chambres régionales des comptes et modifiant le code des juridictions financières (n° 297, 1999-2000) ;
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 9 mai 2001, à dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 9 mai 2001, à dix-sept heures.
Personne ne demande la parole ?
La séance est levée.

(La séance est levée à vingt-deux heures cinquante-cinq.)

Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON





ORDRE DU JOUR
DES PROCHAINES SÉANCES DU SÉNAT
établi par le Sénat dans sa séance du jeudi 3 mai 2001
à la suite des conclusions de la conférence des présidents

Mercredi 9 mai 2001 :

Ordre du jour complémentaire

A 15 heures et le soir :
1° Conclusions de la commission des affaires économiques sur la proposition de résolution de MM. Pierre Martin, Fernand Demilly et Marcel Deneux tendant à la création d'une commission d'enquête sur les inondations de la Somme afin d'établir les causes et les responsabilités de ces crues, d'évaluer les coûts et de prévenir les risques d'inondations (n° 278, 2000-2001).

Ordre du jour prioritaire

2° Nouvelle lecture du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, relatif à l'interruption volontaire de grossesse et à la contraception (n° 273, 2000-2001).
(La conférence des présidents a fixé :
- au lundi 7 mai 2001, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;

- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 7 mai 2001.)
3° Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, de modernisation sociale (n° 185, 2000-2001).

Jeudi 10 mai 2001 :

A 9 h 30 :
1° Sous réserve de sa création par le Sénat, nomination des membres de la commission d'enquête sur les inondations de la Somme.
(Les candidatures à cette commission d'enquête devront être déposées au secrétariat central du service des commissions avant le mercredi 9 mai 2001, à 18 heures.)

Ordre du jour prioritaire

2° Deuxième lecture de la proposition de loi, adoptée avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, tendant à la reconnaissance de la traite et de l'esclavage en tant que crime contre l'humanité (n° 314, 1999-2000).
(La conférence des présidents a décidé de fixer au mercredi 9 mai 2001, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte.)
3° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant diverses dispositions statutaires relatives aux magistrats de la Cour des comptes et des chambres régionales des comptes et modifiant le code des juridictions financières (n° 297, 1999-2000).
(La conférence des présidents a fixé :
- au mercredi 9 mai 2001, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;

- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mercredi 9 mai 2001.)
A 15 heures et le soir :
4° Questions d'actualité au Gouvernement.
(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant 11 heures.)

Ordre du jour prioritaire

5° Eventuellement, suite de l'ordre du jour du matin.
6° Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, de modernisation sociale (n° 185, 2000-2001).

Mardi 15 mai 2001 :

A 10 heures :
1° Quatorze questions orales (l'ordre d'appel des questions sera fixé ultérieurement) :
- n° 1013 de M. Louis Souvet à Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité (Réduction du temps de travail et viabilité hivernale) ;

- n° 1014 de Mme Marie-Claude Beaudeau à Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité (Interdiction des produits à base d'éthers de glycol) ;

- n° 1023 de M. Jean-Louis Lorrain à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement (Etat d'avancement du projet TGV Rhin-Rhône) ;

- n° 1034 de Mme Nicole Borvo à M. le ministre de l'éducation nationale (Manque de postes d'enseignant du premier degré dans l'académie de Paris) ;

- n° 1041 de M. Robert Bret à Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité (Situation des retraités de la Société marseillaise de crédit) ;

- n° 1049 de M. Gérard Larcher à M. le ministre de l'intérieur (Mise en place du contrat local de sécurité à Rambouillet) ;

- n° 1053 de M. Jean-Claude Peyronnet à M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation (Indemnisation des réparations des dégâts causés par les tempêtes de décembre 1999) ;

- n° 1054 de M. André Ferrand à M. le ministre de l'éducation nationale (Internat scolaire pour les enfants des Français expatriés) ;

- n° 1055 de M. Claude Haut à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche (Réhabilitation du parc naturel régional du Lubéron) ;

- n° 1056 de M. Daniel Goulet à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie (Baisse de la TVA dans le secteur de la restauration) ;

- n° 1059 de M. Gérard Cornu à M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation (Maintien des petites stations-service en milieu rural) ;

- n° 1060 de M. Josselin de Rohan à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement (Aménagement de la RN 165) ;

- n° 1061 de M. Serge Lagauche à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement (Dédoublement de l'A 4 par l'A 86 dans le Val-de-Marne) ;

- n° 1065 de M. Gérard Delfau à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie (Accès aux services bancaires).

A 16 heures et, éventuellement, le soir :

Ordre du jour prioritaire

2° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la prise en charge de la perte d'autonomie des personnes âgées et à l'allocation personnalisée d'autonomie (n° 279, 2000-2001).
(La conférence des présidents a fixé :
- à l'ouverture de la discussion générale le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;

- à quatre heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 14 mai 2001.)

Mercredi 16 mai 2001 :

Ordre du jour prioritaire

A 15 heures et le soir :
1° Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la prise en charge de la perte d'autonomie des personnes âgées et à l'allocation personnalisée d'autonomie (n° 279, 2000-2001) ;
2° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la réalisation d'un itinéraire à très grand gabarit entre le port de Bordeaux et Toulouse (n° 254, 2000-2001).
(La conférence des présidents a décidé de fixer au mardi 15 mai 2001, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte.)

Jeudi 17 mai 2001 :

Ordre du jour réservé

A 9 h 30 :
1° Conclusions de la commission des lois sur la proposition de loi organique de M. Josselin de Rohan et de plusieurs de ses collègues tendant à harmoniser les conditions d'éligibilité aux mandats électoraux et aux fonctions électives (n° 6, 2000-2001).
2° Conclusions de la commission des lois sur :
- la proposition de loi de M. Josselin de Rohan et de plusieurs de ses collègues tendant à harmoniser les conditions d'éligibilité aux mandats électoraux et aux fonctions électives (n° 7, 2000-2001) ;

- la proposition de loi de M. Daniel Hoeffel modifiant la loi n° 77-080 du 19 juillet 1977 relative à la publication et à la diffusion de certains sondages d'opinion (n° 57, 2000-2001) ;

- la proposition de loi de MM. Alain Dufaut et Patrice Gélard tendant à permettre à des élus se trouvant dans une situation d'incompatibilité, en raison de l'acquisition d'un mandat en remplacement d'un autre élu, de la faire cesser en démissionnant du mandat de leur choix (n° 280, 2000-2001).

(Pour ces deux textes, la conférence des présidents a :
- décidé qu'il serait procédé à une discussion générale commune ;

- fixé au mercredi 16 mai 2001, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements.)

A 15 heures et, éventuellement, le soir :
3° Conclusions de la commission des affaires culturelles sur la proposition de loi de Mme Danièle Pourtaud et des membres du groupe socialiste et apparentés tendant à prévoir un barème de rémunération équitable applicable aux discothèques et activités similaires (n° 244, 2000-2001).
4° Conclusions de la commission des affaires culturelles sur la proposition de loi de Mme Danièle Pourtaud et des membres du groupe socialiste et apparentés modifiant le code de la propriété intellectuelle et tendant à prévoir une rémunération pour la copie privée numérique (n° 245, 2000-2001).
(Pour ces deux textes, la conférence des présidents a fixé au mercredi 16 mai 2001, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements.)

Mardi 22 mai 2001 :

Ordre du jour prioritaire

A 16 heures et, éventuellement, le soir :
Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la sécurité quotidienne (n° 296, 2000-2001).
(La conférence des présidents a fixé :
- au lundi 21 mai 2001, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;

- à trois heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 21 mai 2001.)
Mercredi 23 mai 2001 :

Ordre du jour prioritaire

A 15 heures :
Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la sécurité quotidienne (n° 296, 2000-2001).
Mardi 29 mai 2001 :
A 9 h 30 :
1° Questions orales.
A 16 heures et le soir :
2° Eloge funèbre de François Abadie.
3° Sous réserve de sa transmission, projet de loi portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel (urgence déclarée) (AN, n° 3025).
(La conférence des présidents a fixé :
- à l'ouverture de la discussion générale, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;

- à quatre heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 28 mai 2001.)
Mercredi 30 mai 2001 :

Ordre du jour prioritaire

A 15 heures et le soir :
1° Suite du projet de loi portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel (urgence déclarée) (AN, n° 3025).
2° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier (n° 301, 2000-2001).
(La conférence des présidents a fixé :
- au mardi 29 mai 2001, à 12 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;

- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 29 mai 2001.)
Jeudi 31 mai 2001 :
A 9 h 30 :

Ordre du jour prioritaire

1° Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier (n° 301, 2000-2001).
A 15 heures et le soir :
2° Questions d'actualité au Gouvernement.
(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant 11 heures.)

Ordre du jour prioritaire

3° Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier (n° 301, 2000-2001).

A N N E X E
Questions orales inscrites
à l'ordre du jour du mardi 15 mai 2001

N° 1013. - M. Louis Souvet attire l'attention de Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité sur les très nombreuses contraintes spécifiques liées au service du déneigement et sur les impératifs posés par les lois portant réduction de la durée du travail. L'inadéquation entre ses deux impératifs est telle que soit les collectivités territoriales concernées et les services de l'équipement respecteront strictement les prescriptions légales au détriment de la qualité du service de viabilité hivernale (en particulier le déneigement), soit la qualité du service sera identique aux années précédentes mais au prix de quelques manquements à la règle établie. Afin de ne pas se trouver devant un tel dilemme, il lui demande si elle entend dans ce cas précis apporter les aménagements techniques nécessaires, aménagements permettant de concilier qualité du service et donc de ne pas entraver les déplacements des usagers en période hivernale tout en respectant les textes.
N° 1014. - Mme Marie-Claude Beaudeau attire l'attention de Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité sur la nécessité d'interdire la production et l'utilisation de produits chimiques à base d'éthers de glycol reconnus produits dangereux depuis 1979. Elle lui rappelle les deux questions écrites déposées le 28 octobre 1999 puis le 2 mars 2000 sur la toxicité et l'interdiction des éthers de glycol, restées à ce jour sans réponse. Elle lui fait remarquer que des recherches sur des animaux démontrent que les éthers de glycol ont des effets sur les embryons, qu'ils provoquent des retards de gestation et de développement, des déficits fonctionnels, une baisse de poids, des atteintes à la fertilité et même une atrophie des appareils génitaux. Les éthers de glycol produisent une toxine qui touche la division cellulaire. Elle lui fait remarquer également que les éthers de glycol ont les mêmes effets chez l'homme. Une dizaine d'études ont été menées dont une au Mexique avec quarante quatre cas d'enfants mal formés dont les mères travaillaient dans une usine de condensateurs qui utilisait des éthers de glycol à forte dose. A l'évidence, les éthers de glycol sont dangereux pour la santé. Elle lui rappelle que depuis le 24 août 1999, l'interdiction de quatre éthers de glycol a été prononcée concernant la fabrication de médicaments et de cosmétiques, ces substances représentant un risque tératogène. Pour les produits domestiques, la limitation d'usage a été fixée à 0,5 %. Elle lui demande de lui faire connaître les mesures qu'elle envisage pour que les vingt quatre éthers de glycol fassent désormais l'objet d'une interdiction totale de production, compte tenu du risque toxique de leur utilisation.
N° 1023. - M. Jean-Louis Lorrain appelle l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur l'état d'avancement du projet de TGV Rhin-Rhône. Le coût de ce projet qui détermine l'avenir de trois régions (Alsace, Bourgogne et Franche-Comté), est très inférieur au projet Lyon-Turin (70 milliards de francs) pour lequel le Gouvernement prend des engagements ; or son intérêt européen n'est pas moindre et son utilité est reconnue, de même que sa rentabilité qui sera supérieure à d'autres projets déjà financés. Or, l'enquête publique relative à la branche Est dont la réalisation conditionne la suite du projet, entre autres la branche Sud, vient de recevoir l'avis favorable des commissaires enquêteurs. Un tour de table des trois régions, de la Confédération helvétique et de l'Union Européenne aurait pu être entamé dès mars 2000 à la nomination du mandataire pour cette mission. Pour l'Etat et le Réseau Ferré de France (RFF), qui n'ont pas encore déterminé le montant de leur contribution respective, ce projet n'est pas totalement couvert par les divers partenaires. Or l'engagement de la Suisse et de l'Union européenne et le montant de leur participation dépendent de celui de l'Etat et du RFF. L'Etat s'est engagé pour le TGV Est à hauteur de 3,45 milliards de francs étalés sur cinq ans dès 2003, dans la perspective d'une mise en service en 2008 ; un engagement de l'Etat similaire est attendu pour le TGV Rhin-Rhône afin de mettre sur pied un comité de pilotage à très brève échéance. Les régions Alsace, Bourgogne et Franche-Comté ont pris, quant à elles, leurs responsabilités : elles ont arrêté entre elles la clé de répartition de la part de financement qui leur reviendra et leurs assemblées respectives ont approuvé cette répartition. Sera-t-il possible très bientôt de connaître le montant des contributions de l'Etat et du RFF ainsi que l'échéancier de leur mise à disposition, afin de ne pas freiner davantage la réalisation de ce projet prometteur d'expansion, dans le cadre de la priorité affirmée par le Gouvernement en faveur du transport ferroviaire ?
N° 1034. - Mme Nicole Borvo attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale sur le manque de postes dans le premier degré à Paris. Celui-ci combiné au manque de locaux a des conséquences néfastes comme la scolarisation insuffisante et même dans certains endroits la non-scolarisation des enfants de moins de trois ans, une adaptation et intégration scolaire (AIS) en détresse et aucun moyen pour les nouveaux enseignements. La dotation supplémentaire de neuf postes prévue ne correspond qu'à l'augmentation des effectifs prévus mais ne permet pas d'avancer sur les objectifs prioritaires que l'académie s'est pourtant fixée elle-même, dans lesquels figurent notamment une scolarisation accrue des moins de trois ans, l'efficience des remplacements et la transformation de classes de perfectionnement en classe d'intégration scolaire (CLIS) et classes d'adaptation. Pour toutes ces raisons, nombre d'organisations des enseignants et des parents d'élèves revendiquent une dotation supplémentaire de 60 postes qui paraît répondre à un minimum des besoins d'urgence. Elle lui demande quels moyens supplémentaires il compte effectuer pour répondre aux besoins.
N° 1041. - M. Robert Bret attire l'attention de Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité sur le contentieux qui oppose l'association des retraités de la Société marseillaise de crédit (SMC) à la banque et sa caisse de retraite depuis sa privatisation. En effet, d'abord nationalisée au début des années 80, la SMC a été transférée au secteur privé, sous l'égide du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en 1998. L'Etat, agissant comme actionnaire principal a alors procédé à une recapitalisation, à hauteur de 2,9 milliards de francs, qui avait pour but de permettre l'apurement du passif mais aussi de financer, d'une part les provisions inscrites pour 57,6 millions de francs dans ce passif, garantissant le remboursement intégral de la retenue de 3 % sur la totalité de l'ancienne pension bancaire, et d'autre part une provision de 330 millions de francs pour garantir la pérennité du versement intégral du complément bancaire de retraite des personnels actifs et inactifs. Or, à ce jour, la banque qui dispose pourtant des fonds refuse de les attribuer à la caisse de retraite et aux ayants droit de celle-ci. Il lui demande d'intervenir auprès de la banque afin d'obtenir des garanties pour que l'argent public, versé par l'Etat pour abonder les fonds sociaux de l'entreprise au moment de la privatisation, soit réellement utilisé à cette fin.
N° 1049. - M. Gérard Larcher attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur les difficultés rencontrées pour la mise en oeuvre du contrat local de sécurité signé entre l'Etat et la ville de Rambouillet, le 13 juillet 1999, et la mise en place de la police de proximité telle que prévue par le Gouvernement. Malgré les engagements pris en juillet 1999 par le préfet des Yvelines et lors de la réunion d'évaluation de la mise en oeuvre des CLS en juillet 2000, la circonscription de police de Rambouillet est toujours en attente des effectifs nécessaires pour la mise en oeuvre du contrat local de sécurité, on y constate même un déficit croissant en effectifs de policiers. En conséquence, il lui demande quelles dispositions il compte prendre pour mettre réellement en place les moyens nécessaires à la sécurité publique qui se dégrade depuis trois ans de manière significative, tant au plan de la circonscription de police de Rambouillet que sur la voie ferrée (ligne Montparnasse-Rambouillet-Chartres).
N° 1053. - M. Jean-Claude Peyronnet attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation sur l'application des articles L. 114-1 et L. 114-2 du code des assurances aux sinistres consécutifs à la tempête de décembre 1999. L'article L. 114-1 du code des assurances prévoit que les actions dérivant d'un contrat d'assurances sont prescrites au terme de deux ans à compter de l'événement qui y donne naissance. La difficulté réside dans certaines polices d'assurance qui prévoient que le versement de l'indemnité ne sera dû qu'une fois les travaux réalisés. Ainsi, en application de cet article combiné à ces dispositions contractuelles, les personnes sinistrées ne pourront se voir indemniser des travaux consécutifs à la tempête si ces derniers ne sont pas réalisés avant fin décembre 2001. Certes, l'article L. 114-2 dispose que la prescription est interrompue par lettre recommandée avec accusé de réception adressée par l'une des parties au contrat à l'autre. Là encore, des difficultés apparaissent puisque les personnes sinistrées ont le plus grand mal à trouver des entrepreneurs pouvant réaliser rapidement les travaux. En effet, cette tempête qui a touché notre pays les 26 et 27 décembre 1999 a provoqué de nombreux et conséquents dégâts. L'importance et l'ampleur des travaux à réaliser ne permettront pas aux artisans, malgré des efforts indéniables, de mener à bien l'ensemble des chantiers qui leur sont confiés avant cette date butoir. Dans ces conditions, la lettre recommandée avec accusé de réception pourra-t-elle, malgré les efforts de l'assuré, produire ses pleins effets ? En conséquence, il aimerait connaître dans quelles conditions l'article L. 114-2 est applicable aux hypothèses envisagées ci-dessus. Dans le cas où cet article serait applicable, il souhaiterait savoir si le Gouvernement entend mener une campagne d'information en direction des assurés. Dans le cas contraire, quelles dispositions le Gouvernement entend prendre afin que la prescription biennale ne puisse être opposée aux sinistrés n'ayant pu s'assurer le concours d'un entrepreneur avant fin décembre 2001.
N° 1054. - M. André Ferrand attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale sur la situation de l'internat scolaire dans notre pays et, plus spécialement, des facilités d'accueil réservées aux enfants de Français expatriés. En effet, nombre de ces enfants ne peuvent suivre leurs parents soit parce qu'ils sont appelés à l'étranger pour des missions de courte durée soit lorsque aucune école française n'existe sur place ou qu'elle n'offre pas la section correspondant au choix de l'élève. A la suite de l'annonce gouvernementale d'un plan sur cinq ans de création d'un internat par département, il lui demande de bien vouloir lui préciser quelles mesures seront prises pour favoriser l'accueil dans ces lieux des enfants de Français expatriés et faciliter leur prise en charge lors des congés de courte durée et de fin de semaine quand ils seront éloignés de toute famille capable de les accueillir.
N° 1055. - M. Claude Haut attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur deux événements aux conséquences particulièrement dramatiques pour l'environnement et l'écosystème du département de Vaucluse. Les 27 et 28 août 2000, 187 hectares au coeur du parc naturel régional du Luberon étaient ravagés par un incendie. Aujourd'hui, des travaux sont nécessaires pour permettre la réhabilitation et la sécurisation du site. Le conseil régional Provence - Alpes - Côte d'Azur a déjà signifié son engagement dans ce dossier, le conseil général de Vaucluse participera au montage financier de cette opération. M. le préfet du Vaucluse a sollicité une enveloppe exceptionnelle auprès de vos services pour que cette opération de réhabilitation soit menée à son terme dans les meilleurs délais. Ce soutien financier est également destiné à faire face aux dégâts exceptionnels occasionnés sur l'ensemble du département par les fortes chutes de neige que nous avons connues en Provence - Alpes - Côte d'Azur et particulièrement dans le Vaucluse, au début du mois de mars. A l'approche de la période estivale, la situation est explosive, nos bois et nos forêts étant jonchés d'arbres cassés, déracinés par le poids de la neige. Il lui demande si des moyens supplémentaires seront dégagés pour permettre de traiter au mieux et dans l'urgence les sites concernés.
N° 1056. - M. Daniel Goulet interroge M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur les problèmes qui se posent aux restaurateurs, en particulier ceux liés au taux de TVA (taxe sur la valeur ajoutée). En effet, un arrêt récent a entraîné l'application du taux de 5,5 % de TVA à la restauration collective. Il y a donc une inégalité devant l'impôt qu'il faut corriger en ramenant à 5,5 % le taux de la TVA pour les restaurateurs, et ce d'autant qu'ils sont contraints de financer les 35 heures. Bien que la question ait été posée à de multiples reprises, le problème demeure. C'est pourquoi il lui demande pour quelles raisons il n'abaisse pas le taux de TVA applicable à la restauration.
N° 1059. - M. Gérard Cornu appelle l'attention de M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation sur le problème du maintien des petites stations-service en milieu rural. Les offres ou pratiques de prix abusivement bas appliqués aux carburants n'étant toujours pas prohibées par la loi, les grandes et moyennes surface font des hydrocarbures des produits d'appel au détriment des petits détaillants, dont le nombre décroît chaque année. Dans l'attente que soit instaurée une règle de concurrence loyale entre les différents acteurs, et ceci dans un souci de préservation de l'activité en zone rurale, de maillage de notre territoire, mais aussi pour des raisons évidentes de sécurité d'approvisionnement, il conviendrait à tout le moins de donner aux stations-service le moyen de résister à cette situation difficile. La solution pour y parvenir serait notamment que le Gouvernement dégage chaque année des fonds plus substantiels en faveur du comité des professionnels détaillants de carburants (CPDC), celui-ci étant largement insuffisant pour répondre à tous les besoins. Lors du débat en première lecture sur le projet de loi relatif aux nouvelles régulations économiques, le secrétaire d'Etat avait, pour sa part, mis les défaillances du système sur le compte de la mauvaise utilisation du fonds. Elle avait alors annoncé l'engagement qu'elle avait pris lors de rencontres avec les détaillants de revoir les règles de la distribution. Qu'en est-il très exactement aujourd'hui.
N° 1060. - M. Josselin de Rohan interroge M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur les aménagements envisagés dans le cadre de la mise en voie autoroutière de la route nationale 165 sur la section Lorient-Landaul.
N° 1061. - M. Serge Lagauche rappelle à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement que lors de la discussion d'une précédente question orale, en mai 2000, il avait eu, par la voix de M. le ministre de la défense, une réponse plutôt rassurante concernant le dédoublement de l'A 4 par l'A 86 dans le Val-de-Marne. Il avait alors annoncé : « Une nouvelle expertise de l'opération va être menée afin de rechercher à nouveau une solution financière acceptable par les partenaires... Le Gouvernement partage votre appréciation selon laquelle la situation actuelle ne peut être maintenue sans réponse pendant toute la durée du contrat de plan. ». Mais, récemment, l'équipe d'ingénieurs et de techniciens chargée de l'étude de ce projet a été dissoute. Et, aujourd'hui, les élus locaux craignent un abandon pur et simple de ce projet, d'autant que la déclaration d'utilité publique sera forclose dès 2003. Dans ces conditions, il souhaiterait savoir quelles perspectives claires le Gouvernement entend fixer pour le bouclage de l'A 86 à Joinville-le-Pont.
N° 1065. - M. Gérard Delfau attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur les difficultés rencontrées par plusieurs millions de personnes en France exclues du système bancaire traditionnel. Il a pris acte de l'adoption par l'Assemblée nationale, le 25 avril dernier, d'une proposition de loi assurant la gratuité de la délivrance et du traitement des chèques. Mais il lui semble nécessaire de rappeler que le plus urgent est de restaurer le droit à un service bancaire de base de qualité pour tous, un service bancaire universel gratuit octroyant une gamme complète de prestations élémentaires quel que soit le montant des revenus de nos concitoyens (compte de dépôt, relevé bancaire ou postal, etc.). En outre, il estime que l'autre priorité est d'assurer une meilleure transparence du coût des services bancaires pour les clients et de leur donner le droit de recourir à la protection prévue par le code de la consommation en cas de litige. C'est pourquoi il lui demande ce que le Gouvernement compte entreprendre pour donner un écho favorable à ces deux priorités.

ORGANISMES EXTRAPARLEMENTAIRES
CONSEIL SUPÉRIEUR DE L'AVIATION MARCHANDE

Lors de sa séance du 3 mai 2001, le Sénat a reconduit M. François Gerbaud dans ses fonctions de membre titulaire et M. Jean-Pierre Plancade dans ses fonctions de membre suppléant du Conseil supérieur de l'aviation marchande.

COMMISSION NATIONALE DU DÉBAT PUBLIC

Lors de sa séance du 3 mai 2001, le Sénat a désigné M. Jean Bizet pour siéger au sein de la Commission nationale du débat public, en remplacement de M. Jean-François Le Grand.

COMMISSION CONSULTATIVE POUR LA PRODUCTION
DE CARBURANTS DE SUBSTITUTION

Lors de sa séance du 3 mai 2001, le Sénat a reconduit MM. Philippe François et Rémi Herment dans leurs fonctions de membres de la commission consultative pour la production de carburants de substitution.

NOMINATIONS DE RAPPORTEURS
COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES

M. Marcel Deneux a été nommé rapporteur de la proposition de résolution n° 278 (2000-2001) de M. Pierre Martin tendant à la création d'une commission d'enquête sur les inondations de la Somme afin d'établir les causes et les responsabilités de ces crues, d'évaluer les coûts et de prévenir les risques d'inondations.

COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

M. Bernard Seillier a été nommé rapporteur de la proposition de loi n° 249 (2000-2001) de M. Serge Mathieu visant à restaurer la spécialité de gynécologie médicale.
M. Jacques Bimbenet a été nommé rapporteur de la proposition de loi n° 266 (2000-2001) de M. Georges Mouly relative à la réforme de l'atelier protégé et au statut d'entreprise adaptée.
M. André Vallet a été nommé rapporteur pour avis du projet de loi n° 296 (2000-2001), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la sécurité quotidienne, dont la commission des lois est saisie au fond.

COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES,
DE LÉGISLATION, DU SUFFRAGE UNIVERSEL, DU RÈGLEMENT
ET D'ADMINISTRATION GÉNÉRALE

M. Jean-Pierre Schosteck a été nommé rapporteur du projet de loi n° 296 (2000-2001), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la sécurité quotidienne, dont la commission des lois est saisie au fond.
M. Nicolas About a été nommé rapporteur de sa proposition de loi n° 211 (2000-2001) visant à améliorer les droits et les conditions d'existence des conjoints survivants et à instaurer dans le code civil une égalité successorale entre les enfants légitimes et les enfants naturels ou adultérins, dont la commission des lois est saisie au fond.
M. Nicolas About a été nommé rapporteur de la proposition de loi n° 224 (2000-2001), adoptée par l'Assemblée nationale, relative aux droits du conjoint survivant, dont la commission des lois est saisie au fond.
M. Laurent Béteille a été nommé rapporteur pour avis de la proposition de résolution n° 278 (2000-2001), présentée par MM. Pierre Martin, Fernand Demilly et Marcel Deneux, tendant à la création d'une commission d'enquête sur les inondations de la Somme afin d'établir les causes et les responsabilités de ces crues, d'évaluer les coûts et de prévenir les risques d'inondations, dont la commission des affaires économiques et du Plan est saisie au fond.



Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)


Création d'une zone « Manche » dans le cadre de la politique européenne de pêche

1070. - 3 mai 2001. - M. Jean-François Le Grand attire l'attention de - Question transmise à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche. sur les conséquences pour les pêcheurs de Basse-Normandie des mesures prises à l'échelle européenne dans le cadre du livre vert sur l'avenir de la politique commune des pêches et qui s'appliquent en dépit de la spécificité de l'économie régionale des activités de la pêche. Ainsi, pour que ne soient pas réduits à néant les importants efforts déployés par l'ensemble des partenaires locaux, professionnels et décideurs, pour assurer la pérennité des ressources naturelles et celle des activités économiques qui en dépendent, pour favoriser la mise en oeuvre rationnelle de la politique commune des pêches, collaboration entre sicentifiques européens, pour permettre de faire appliquer par tous les contraintes que les riverains imposent, il lui demande de tout mettre en oeuvre pour faire reconnaître la spécificité et l'identité de la mer de la Manche en créant à l'échelon européen une zone « Manche » indépendante de l'Atlantique et de la Mer du Nord.

Dispositions transitoires de la loi solidarité
et renouvellement urbains

1071. - 3 mai 2001. - M. Bernard Fournier appelle l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur l'application des dispositions transitoires de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains. En effet, certaines communes rurales ou périurbaines le plus souvent dotées avant l'entrée en vigueur d'un plan d'occupation des sols (POS) partiel en instance de mutation vers un POS global, se voient dans l'obligation d'élaborer un plan local d'urbanisme (PLU). Cette obligation génère l'inquiétude des élus municipaux et peut hypothéquer le devenir de certains projets d'aménagement urbanistiques, industriels et commerciaux tels que la création de zones d'activités dont l'état d'avancée est substantiel, mais qui restent soumis à la conformité avec les documents d'urbanisme. A cet égard, il entend illustrer son propos par le cas de la commune d'Usson en Forez (Loire). Cette commune s'est dotée d'un POS partiel en 1989, lequel a été révisé à deux reprises en 1994 et 1997. Le 6 octobre 1999, le conseil municipal a décidé de l'élaboration d'un POS global et ce projet a été arrêté par une délibération du 27 février 2001. La difficulté générée par la loi n° 2000-1208 et relevée par le maire et les services de l'équipement provient de l'interprétation des dispositions de l'article L. 123-19 nouveau du code de l'urbanisme. Il est à craindre que l'absence de couverture totale de la commune par un POS antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi précitée impose à Usson de prescrire l'élaboration d'un PLU. Cela reviendrait à effacer purement et simplement les efforts de la commune à se doter depuis 1989 d'un schéma d'urbanisme cohérent, et cela obligerait la commune à reprendre une procédure, laquelle ne manquera pas d'être longue, donc onéreuse. Une difficulté supplémentaire provient de ce que les zones non couvertes actuellement doivent faire l'objet d'une ZAC intercommunale, non préalablement dotée d'un plan d'aménagement de zone (PAZ). L'interdiction du recours à toute forme de PLU partiel remet ainsi en cause, a priori, toutes les années de travail de la commune et de la communauté de communes. Une interprétation plus large des dispositions de l'alinéa 3 de l'article L. 123-19 du code de l'urbanisme modifié pourrait permettre de considérer que la prescription de l'élaboration d'un POS total équivaudrait, durant la phase transitoire, à une révision des POS partiels approuvés et en vigueur. De nombreux emplois sont à la clé de la création de ces zones d'activité. Aussi il le remercie de lui indiquer si une latitude d'appréciation est possible s'agissant du cas d'école qu'il lui a exposé, ou si la commune sera tenue d'élabrer un PLU, anéantissant des efforts considérables, et illustrant ainsi la rigidité du dispositif telle qu'elle est ressortie des travaux préparatoires du Sénat sur cette loi.




ANNEXES AU PROCÈS-VERBAL
de la séance
du jeudi 3 mai 2001


SCRUTIN (n° 49)



sur la motion n° 1, présentée par M. Philippe Marini au nom de la commission des finances, tendant à opposer la question préalable au projet de loi, adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, portant création d'une prime pour l'emploi.


Nombre de votants : 317
Nombre de suffrages exprimés : 300
Pour : 219
Contre : 81

Le Sénat a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (17) :
Abstentions : 17.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (23) :

Pour : 17.
Contre : 5. _ MM. Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin, Gérard Delfau et François Fortassin.

N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Jacques Bimbenet.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (99) :

Pour : 98.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Christian Poncelet, président du Sénat.

GROUPE SOCIALISTE (77) :

Contre : 76.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Guy Allouche, qui présidait la séance.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (51) :

Pour : 51.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (46) :

Pour : 46.

Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (7) :

Pour : 7.

Ont voté pour


Nicolas About
Philippe Adnot
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Pierre André
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Denis Badré
José Balarello
Janine Bardou
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Laurent Béteille
Jean Bizet
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Jean Boyer
Louis Boyer
Jean-Guy Branger
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Guy-Pierre Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Gérard Cornu
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Charles de Cuttoli
Xavier Darcos
Philippe Darniche
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Robert Del Picchia
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Gérard Deriot
Charles Descours
André Diligent
Jacques Dominati
Jacques Donnay
Michel Doublet
Paul Dubrule
Alain Dufaut


André Dulait
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emin

Jean-Paul Emorine
Michel Esneu
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
André Ferrand
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yves Fréville
Yann Gaillard
René Garrec
Jean-Claude Gaudin
Philippe de Gaulle
Patrice Gélard
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Francis Giraud
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Pierre Guichard
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Alain Hethener
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Jean-Paul Hugot
Jean-François Humbert
Claude Huriet
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jarlier
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Roger Karoutchi
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Patrick Lassourd
Robert Laufoaulu
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Serge Lepeltier
Marcel Lesbros
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Kléber Malécot
André Maman
Max Marest
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
Serge Mathieu
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Jean-Luc Miraux
Louis Moinard
René Monory
Aymeri de Montesquiou
Georges Mouly
Bernard Murat
Philippe Nachbar
Paul Natali
Lucien Neuwirth
Philippe Nogrix
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Lylian Payet
Michel Pelchat
Jacques Pelletier
Jean Pépin
Jacques Peyrat
Xavier Pintat
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Ladislas Poniatowski
André Pourny
Jean Puech
Jean-Pierre Raffarin
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Henri de Richemont
Philippe Richert
Yves Rispat
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Bernard Seillier
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Jean-Pierre Vial
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Guy Vissac

Ont voté contre


Bernard Angels
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
François Autain
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Pierre Biarnès
Marcel Bony
André Boyer
Yolande Boyer
Claire-Lise Campion
Jean-Louis Carrère
Bernard Cazeau
Monique Cerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Yvon Collin
Gérard Collomb
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Dinah Derycke
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Claude Domeizel
Michel Dreyfus-Schmidt
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
Léon Fatous
François Fortassin
Serge Godard
Jean-Noël Guérini
Claude Haut
Roger Hesling
Roland Huguet
Alain Journet
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Dominique Larifla
Louis Le Pensec
André Lejeune
Claude Lise
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Jean-Yves Mano
François Marc
Marc Massion
Pierre Mauroy
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Paul Raoult
Roger Rinchet
Gérard Roujas
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
René-Pierre Signé
Simon Sutour
Michel Teston
Pierre-Yvon Tremel
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber

Abstentions


Jean-Yves Autexier
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Danielle Bidard-Reydet
Nicole Borvo
Robert Bret
Guy Fischer
Thierry Foucaud
Gérard Le Cam
Pierre Lefebvre
Paul Loridant
Hélène Luc
Roland Muzeau
Jack Ralite
Ivan Renar
Odette Terrade
Paul Vergès

N'a pas pris part au vote


M. Jacques Bimbenet.

N'ont pas pris part au vote


MM. Christian Poncelet, président du Sénat, et Guy Allouche, qui présidait la séance.



Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : 318
Nombre des suffrages exprimés : 301
Majorité absolue des suffrages exprimés : 151
Pour : 219
Contre : 82

Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés conformément à la liste ci-dessus.

SCRUTIN (n° 50)



sur l'ensemble du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant règlement définitif du budget de 1999.


Nombre de votants : 318
Nombre de suffrages exprimés : 318
Pour : 318
Contre : 0

Le Sénat a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (17) :
Pour : 17.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (23) :

Pour : 23.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (99) :

Pour : 98.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Christian Poncelet, président du Sénat.

GROUPE SOCIALISTE (77) :

Pour : 76.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Guy Allouche, qui présidait la séance.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (51) :

Pour : 51.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (46) :

Pour : 46.

Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (7) :

Pour : 7.

Ont voté pour


Nicolas About
Philippe Adnot
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Pierre André
Bernard Angels
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
François Autain
Jean-Yves Autexier
Robert Badinter
Denis Badré
José Balarello
Janine Bardou
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Michel Bécot
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Claude Belot
Georges Berchet
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jean Besson
Laurent Béteille
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Jacques Bimbenet
Jean Bizet
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
Marcel Bony
James Bordas
Didier Borotra
Nicole Borvo
Joël Bourdin
André Boyer
Jean Boyer
Louis Boyer
Yolande Boyer
Jean-Guy Branger
Gérard Braun
Dominique Braye
Robert Bret
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Guy-Pierre Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Claire-Lise Campion
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Jean-Louis Carrère
Auguste Cazalet
Bernard Cazeau
Charles Ceccaldi-Raynaud
Monique Cerisier-ben Guiga
Gérard César
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Yvon Collin
Gérard Collomb
Gérard Cornu
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Raymond Courrière
Roland Courteau
Jean-Patrick Courtois
Charles de Cuttoli
Xavier Darcos
Philippe Darniche
Marcel Debarge
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Robert Del Picchia
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Gérard Delfau
Jacques Delong
Jean-Pierre Demerliat
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Gérard Deriot
Dinah Derycke
Charles Descours
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
André Diligent
Claude Domeizel
Jacques Dominati
Jacques Donnay
Michel Doublet
Michel Dreyfus-Schmidt
Paul Dubrule
Alain Dufaut
André Dulait
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Hubert Durand-Chastel
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Michel Esneu
Claude Estier
Hubert Falco
Léon Fatous
Pierre Fauchon
Jean Faure
André Ferrand
Guy Fischer
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
François Fortassin
Thierry Foucaud
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yves Fréville
Yann Gaillard
René Garrec
Jean-Claude Gaudin
Philippe de Gaulle
Patrice Gélard
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Francis Giraud
Paul Girod
Serge Godard
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Jean-Noël Guérini
Pierre Guichard
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Claude Haut
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Roger Hesling
Alain Hethener
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Jean-Paul Hugot
Roland Huguet
Jean-François Humbert
Claude Huriet
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jarlier
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Journet
Alain Joyandet
Roger Karoutchi
Christian de La Malène
Philippe Labeyrie
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Dominique Larifla
Patrick Lassourd
Robert Laufoaulu
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Gérard Le Cam
Jean-François Le Grand
Louis Le Pensec
Dominique Leclerc
Pierre Lefebvre
Jacques Legendre
André Lejeune
Guy Lemaire
Serge Lepeltier
Marcel Lesbros
Claude Lise
Paul Loridant
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Hélène Luc
Jacques Machet
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Kléber Malécot
André Maman
Jean-Yves Mano
François Marc
Max Marest
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Marc Massion
Paul Masson
Serge Mathieu
Pierre Mauroy
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Gérard Miquel
Jean-Luc Miraux
Louis Moinard
René Monory
Aymeri de Montesquiou
Michel Moreigne
Georges Mouly
Bernard Murat
Roland Muzeau
Philippe Nachbar
Paul Natali
Lucien Neuwirth
Philippe Nogrix
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Jean-Marc Pastor
Lylian Payet
Michel Pelchat
Jacques Pelletier
Guy Penne
Jean Pépin
Daniel Percheron
Jacques Peyrat
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Xavier Pintat
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Ladislas Poniatowski
André Pourny
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jean Puech
Jean-Pierre Raffarin
Henri de Raincourt
Jack Ralite
Paul Raoult
Jean-Marie Rausch
Ivan Renar
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Henri de Richemont
Philippe Richert
Roger Rinchet
Yves Rispat
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Gérard Roujas
André Rouvière
Michel Rufin
Claude Saunier
Jean-Pierre Schosteck
Bernard Seillier
Michel Sergent
René-Pierre Signé
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Louis Souvet
Simon Sutour
Martial Taugourdeau
Odette Terrade
Michel Teston
Henri Torre
René Trégouët
Pierre-Yvon Tremel


François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet

Alain Vasselle
Albert Vecten
Paul Vergès
André Vezinhet
Jean-Pierre Vial
Marcel Vidal
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Guy Vissac
Henri Weber

N'ont pas pris part au vote


MM. Christian Poncelet, président du Sénat, et Guy Allouche, qui présidait la séance.



Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : 319
Nombre des suffrages exprimés : 319
Majorité absolue des suffrages exprimés : 160
Pour : 319
Contre : 0

Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés conformément à la liste ci-dessus.

SCRUTIN (n° 51)



sur l'ensemble du projet de loi organique, modifié par l'Assemblée nationale, relatif au statut des magistrats et au Conseil supérieur de la magistrature.


Nombre de votants : 317
Nombre de suffrages exprimés : 317
Pour : 317
Contre : 0

Le Sénat a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (17) :
Pour : 17.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (23) :

Pour : 22.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Guy-Pierre Cabanel.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (99) :

Pour : 97.
N'ont pas pris part au vote : 2. _ M. Christian Poncelet, président du Sénat, et M. Gérard Larcher, qui présidait la séance.

GROUPE SOCIALISTE (77) :

Pour : 77.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (51) :

Pour : 51.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (46) :

Pour : 46.

Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (7) :

Pour : 7.

Ont voté pour


Nicolas About
Philippe Adnot
Guy Allouche
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Pierre André
Bernard Angels
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
François Autain
Jean-Yves Autexier
Robert Badinter
Denis Badré
José Balarello
Janine Bardou
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Michel Bécot
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Claude Belot
Georges Berchet
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jean Besson
Laurent Béteille
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Jacques Bimbenet
Jean Bizet
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
Marcel Bony
James Bordas
Didier Borotra
Nicole Borvo
Joël Bourdin
André Boyer
Jean Boyer
Louis Boyer
Yolande Boyer
Jean-Guy Branger
Gérard Braun
Dominique Braye
Robert Bret
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Claire-Lise Campion
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Jean-Louis Carrère
Auguste Cazalet
Bernard Cazeau
Charles Ceccaldi-Raynaud
Monique Cerisier-ben Guiga
Gérard César
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Yvon Collin
Gérard Collomb
Gérard Cornu
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Raymond Courrière
Roland Courteau
Jean-Patrick Courtois
Charles de Cuttoli
Xavier Darcos
Philippe Darniche
Marcel Debarge
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Robert Del Picchia
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Gérard Delfau
Jacques Delong
Jean-Pierre Demerliat
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Gérard Deriot
Dinah Derycke
Charles Descours
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
André Diligent
Claude Domeizel
Jacques Dominati
Jacques Donnay
Michel Doublet
Michel Dreyfus-Schmidt
Paul Dubrule
Alain Dufaut
André Dulait
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Hubert Durand-Chastel
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Michel Esneu
Claude Estier
Hubert Falco
Léon Fatous
Pierre Fauchon
Jean Faure
André Ferrand
Guy Fischer
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
François Fortassin
Thierry Foucaud
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yves Fréville
Yann Gaillard
René Garrec
Jean-Claude Gaudin
Philippe de Gaulle
Patrice Gélard
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Francis Giraud
Paul Girod
Serge Godard
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Jean-Noël Guérini
Pierre Guichard
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Claude Haut
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Roger Hesling
Alain Hethener
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Jean-Paul Hugot
Roland Huguet
Jean-François Humbert
Claude Huriet
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jarlier
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Journet
Alain Joyandet
Roger Karoutchi
Christian de La Malène
Philippe Labeyrie
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Dominique Larifla
Patrick Lassourd
Robert Laufoaulu
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Gérard Le Cam
Jean-François Le Grand
Louis Le Pensec
Dominique Leclerc
Pierre Lefebvre
Jacques Legendre
André Lejeune
Guy Lemaire
Serge Lepeltier
Marcel Lesbros
Claude Lise
Paul Loridant
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Hélène Luc
Jacques Machet
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Kléber Malécot
André Maman
Jean-Yves Mano
François Marc
Max Marest
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Marc Massion
Paul Masson
Serge Mathieu
Pierre Mauroy
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Gérard Miquel
Jean-Luc Miraux
Louis Moinard
René Monory
Aymeri de Montesquiou
Michel Moreigne
Georges Mouly
Bernard Murat
Roland Muzeau
Philippe Nachbar
Paul Natali
Lucien Neuwirth
Philippe Nogrix
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Jean-Marc Pastor
Lylian Payet
Michel Pelchat
Jacques Pelletier
Guy Penne
Jean Pépin
Daniel Percheron
Jacques Peyrat
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Xavier Pintat
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Ladislas Poniatowski
André Pourny
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jean Puech
Jean-Pierre Raffarin
Henri de Raincourt
Jack Ralite
Paul Raoult
Jean-Marie Rausch
Ivan Renar
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Henri de Richemont
Philippe Richert
Roger Rinchet
Yves Rispat
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Gérard Roujas
André Rouvière
Michel Rufin
Claude Saunier
Jean-Pierre Schosteck
Bernard Seillier
Michel Sergent
René-Pierre Signé
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Louis Souvet
Simon Sutour
Martial Taugourdeau
Odette Terrade
Michel Teston
Henri Torre
René Trégouët
Pierre-Yvon Tremel
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Paul Vergès
André Vezinhet
Jean-Pierre Vial
Marcel Vidal
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Guy Vissac
Henri Weber

N'a pas pris part au vote


M. Guy-Pierre Cabanel.

N'ont pas pris part au vote


MM. Christian Poncelet, président du Sénat, et Gérard Larcher, qui présidait la séance.
Les nombres annoncés en séance ont été reconnus, après vérification, conformes à la liste de scrutin ci-dessus.