SEANCE DU 22 NOVEMBRE 2001


M. le président. La parole est à M. Longuet. (Murmures sur les travées socialistes.)
M. Gérard Longuet. Ma question, qui s'adressait à Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité, porte sur la solution récemment adoptée s'agissant du plan social de l'entreprise Moulinex.
Par respect pour les salariés, par respect pour les collectivités locales concernées par les fermetures de sites, par respect aussi, peut-être, pour la complexité du dossier, je n'aurai pas la prétention de vouloir traiter, en cette occasion, la totalité du sujet.
Je souhaiterais simplement souligner que l'une des conditions du ralliement des organisations syndicales au plan social a été l'engagement pris par le négociateur du Gouvernement, M. Bove, relatif au versement d'une indemnité supplémentaire qui, selon le communiqué de Mme Guigou, sera à la charge de l'AGS, l'assurance de garantie des salariés en cas de faillite, sous réserve naturellement que cette dernière accepte de l'acquitter. Dans l'attente d'un éventuel contentieux, le Gouvernement s'engage à verser les indemnités pour le compte de l'AGS. Ma question sera donc la suivante : à la suite de l'arrêt rendu par la chambre sociale de la Cour de cassation le 12 juin dernier dans l'affaire Félix Potin, le Gouvernement entend-il organiser une négociation entre les partenaires sociaux, afin que soit dissipée cette ambiguïté assez surprenante, qui veut qu'un régime d'assurance général reposant sur des cotisations uniformes pourrait, selon ledit arrêt, allouer des indemnisations de montants très différenciés et parfois bien plus importantes pour quelques entreprises, au motif que celles-ci auraient bénéficié d'un accord d'entreprise ? En Lorraine, les salariés de Flextronics ou de Bata, par exemple, se trouvent ainsi placés dans une situation ou ni l'Etat ni l'AGS ne peuvent prendre en charge le versement d'indemnités supplémentaires.
Vous connaissez l'arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation que j'ai évoqué, madame le ministre. Le Gouvernement décide pour autrui, en l'occurrence pour l'AGS. Ne pensez-vous pas qu'une solution négociée permettrait de clarifier les choses et de répondre à l'attente de l'ensemble des salariés de France exposés à ce type de situation ? (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Ségolène Royal, ministre déléguée à la famille, à l'enfance et aux personnes handicapées. Monsieur le sénateur, Mme Guigou est retenue à l'Assemblée nationale par le débat sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale et m'a chargée de vous répondre.
Vous avez posé une question générale relative à la négociation. Bien sûr, il est toujours nécessaire de négocier et l'Etat peut toujours contribuer à promouvoir les discussions entre partenaires sociaux. Cela étant, je crois que les premiers responsables des plans sociaux sont les entreprises elles-mêmes et leurs dirigeants.
Je répondrai à votre question, monsieur le sénateur, au travers du cas particulier de l'entreprise Bata, que vous avez cité et qui touche particulièrement la région dont vous êtes l'élu.
Le 13 juillet dernier, cette société a déposé son bilan à la suite du désengagement du groupe Bata, et 870 salariés sont menacés de perdre leur emploi. Cette annonce a engendré de fortes tensions sociales, qui sont à la mesure de la détresse des salariés et de l'inquiétude compréhensible des collectivités locales du bassin d'activité de Moussey, dans le département de la Moselle.
A cet instant, il faut souligner très nettement que Bata appartient à un important groupe international, qui dispose des moyens de réagir. Se tourner systématiquement vers l'Etat me paraît donc être une solution de facilité : on ne peut pas d'un côté réclamer moins d'Etat et de l'autre l'appeler à la rescousse. En fait, c'est la responsabilité des employeurs qui est ici engagée. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur certaines travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
Mme Nelly Olin. Et Moulinex ?
Mme Ségolène Royal, ministre déléguée. L'Etat, quant à lui, assume ses responsabilités. Ainsi, le Gouvernement a déployé tous ses efforts pour que le groupe s'engage sur les conditions de l'accompagnement social et sur le sort réservé aux salariés.
M. Hilaire Flandre. Ce n'est pas la question ! (« C'est la réponse ! » sur les travées socialistes.)
Mme Ségolène Royal, ministre déléguée. Si, c'est la question !
M. le président. Veuillez écouter en silence la réponse de Mme le ministre, mes chers collègues !
Mme Ségolène Royal, ministre déléguée. Chacun doit être clair s'agissant de ses responsabilités : il est un peu trop facile d'engranger des plus-values boursières ou des bénéfices financiers importants et de se retourner vers l'Etat et les contribuables pour éviter d'avoir à faire face aux conséquences des plans sociaux.
Cependant, les services du ministère de l'emploi et de la solidarité ainsi que le préfet de la région Lorraine jouent un rôle de médiation important afin de rapprocher les points de vue en amont de l'examen des projets de reprise partielle. Cette médiation a déjà permis d'obtenir l'accord de principe du groupe Bata sur une forte participation de sa part dans l'optique du futur plan social, qui reste toutefois encore à établir. Les syndicats ont soumis leurs revendications. Vous les connaissez. Le tribunal de grande instance de Metz a débuté l'examen des deux projets de reprise partielle.
M. le président. Veuillez conclure, madame le ministre.
Mme Ségolène Royal, ministre déléguée. Je conclus.
Les salariés et leurs représentants attendent aujourd'hui la définition d'un plan social digne, avec l'engagement du soutien financier du groupe Bata. Il n'est pas question que les contribuables se substituent systématiquement à la responsabilité du patronat. (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes.)
M. René-Pierre Signé. C'est une réponse de gauche !

ÉTATS GÉNÉRAUX DE LA PROTECTION DE L'ENFANCE