SEANCE DU 3 DECEMBRE 2001


M. le président. Le Sénat va examiner les dispositoins du projet de loi concernant l'équipement, les transports et le logement : I. - Services communs, II. - Urbanisme et logement.
J'indique au Sénat que, pour cette discussion, la conférence des présidents a opté pour la formule expérimentée l'an dernier et fondée sur le principe d'une réponse immédiate du Gouvernement aux différents intervenants, rapporteurs ou orateurs des groupes.
Ainsi M. le ministre, ou Mme le secrétaire d'Etat, répondra immédiatement et successivement au rapporteur spécial, puis aux trois rapporteurs pour avis, enfin à chaque orateur des groupes.
Ces réponses successives se substitueront à la réponxe unique en fin de discussion.
Chacune des questions des orateurs des groupes ne devant pas dépasser cinq minutes, le Gouvernement répondra en trois minutes à chaque orateur, ce dernier disposant d'un droit de réplique de deux minutes maximum.
Pour assurer la réussite de cette formule et donner un caractère vivant à notre séance, je compte sur chacun des intervenants pour respecter à la fois l'esprit de la procédure et les temps de parole.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jacques Pelletier, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, comme tous les ans, il me revient de présenter deux rapports : le premier porte sur les services communs, le second sur l'urbanisme et le logement.
Le budget des services communs s'élèvera à 4,3 milliards d'euros pour 2002, en progression de 2,4 %.
Les dépenses ordinaires, qui correspondent aux crédits de personnel et de fonctionnement du ministère de l'équipement, représentent 98,4 % du budget. Conséquence logique : les dépenses en capital ne représentent que 1,6 % des crédits.
Mon rapport écrit détaillant les crédits, j'en viens tout de suite à mes observations.
La première a trait à la présentation de ce budget.
Les crédits des services communs ont fait l'objet d'un examen attentif de la Cour des comptes dans son rapport sur les lois de finances établi en 2000.
Il en résulte une confirmation : le budget des services communs est encore très éloigné de la clarté qui permet l'évaluation de la dépense publique. Le budget est affecté par des transferts qui rendent difficile l'analyse des crédits. Bien que dotée de moyens efficaces et d'une expertise reconnue, la Cour a peiné à retracer l'évolution des crédits.
Je réitère donc mon souhait de voir le ministère de l'équipement présenter clairement ses crédits budgétaires en fonction de leurs affectations à des politiques publiques. Si des tableaux de répartition des emplois sont disponibles, ils ne donnent de chiffres que pour les années passées - 1999 et 2000 - alors que l'on débat aujourd'hui des choix budgétaires pour 2002.
De plus, l'existence d'indicateurs de résultats est aujourd'hui l'exception, même pour les établissements subventionnés comme l'Institut géographique national, l'IGN, que je prendrai pour exemple.
Les recommandations de notre collègue député Guy Lengagne concernant l'IGN, rendues publiques le 30 septembre 1999, n'ont fait l'objet d'un relevé de décisions que le 19 février 2001, soit un an et demi plus tard.
Sachant que le dernier contrat d'objectifs signé avec l'IGN a pris fin en 1997, je souhaiterais que vous puissiez, monsieur le ministre, nous apporter des précisions sur celui qui est amené à le remplacer.
Ma deuxième observation sera pour souligner que les dépenses de personnel du ministère de l'équipement sont de plus en plus rigides.
L'an dernier, seule la modération salariale expliquait la stabilisation du budget. Dès 2002, la hausse du budget, qui est de près de 3 %, résulte de l'augmentation des emplois et des accords salariaux.
En 1999 et 2000, le ministère avait procédé à la suppression de 875 postes. En 2001, il y a eu 13 créations nettes d'emplois. Pour 2002, il enregistre 241 créations nettes d'emplois et la régularisation de 969 emplois de personnels de service auparavant sous statut privé.
Dans son rapport, la Cour des comptes évoque la « rigidification de la dépense ». Le budget 2002 s'inscrit entièrement dans ce processus. En effet, lorsque des personnels sont nécessaires pour une action du ministère, on procède désormais à des créations d'emplois et non à des redéploiements.
Je veux également souligner que le deuxième rapport de la Cour des comptes sur la fonction publique est très critique quant à la gestion du personnel de l'équipement. Elle dénonce nombre d'irrégularités comme des surnombres, des emplois sur crédits, des fonds de concours irréguliers, etc. J'espère que ces irrégularités ont été corrigées.
Enfin, j'évoquerai les quelques dépenses d'investissement du budget.
J'avais fait mention, l'an dernier, d'un constat alarmant concernant le patrimoine du ministère, et il semble que celui-ci ait décidé d'augmenter légèrement les crédits, ce qui constituerait un début d'amélioration, que je salue.
Au-delà, je m'inquiète de la réduction des crédits d'études et de recherche pour 2002. Les crédits d'équipement du PREDIT, le programme de recherche et de développement pour l'innovation et la technologie dans les transports terrestres, sont réduits de 27 % pour 2002 et les crédits d'équipement du fonds d'aide à la recherche et à l'innovation dans les transports, le FARIT, de 28 %.
Je souhaiterais, monsieur le ministre, que vous nous apportiez des explications sur cette chute des crédits.
En conclusion, je rappelle que la commission des finances a donné un avis défavorable sur l'ensemble des crédits de l'équipement, des transports et du logement, qui, du fait de la nomenclature budgétaire, ne font l'objet que d'un seul vote.
J'en viens à l'urbanisme et au logement.
Cette année encore, le budget du logement nous est présenté dans un contexte favorable : le secteur de la construction et de l'entretien se porte bien ; les bénéficiaires d'aides personnelles au logement sont moins nombreux en raison de la croissance économique. Ainsi, pour 2002, le budget du logement diminue de 1,7 %, pour s'établir à 3,7 milliards d'euros.
Je n'entrerai pas dans les détails, car les principaux chiffres figurent dans mon rapport écrit et, là encore, je formulerai directement quelques observations.
Je dirai d'abord quelques mots des aides personnelles, qui représentent les trois quarts du budget du logement.
Voilà deux ans, j'appelais de mes voeux une réforme des aides personnelles pour inciter à la reprise d'une activité professionnelle. Je me réjouis de constater que cette réforme a été entamée, une deuxième étape devant intervenir au 1er janvier 2002.
Cependant, cette réforme est loin d'être achevée : elle ne prend pas en compte les aides à l'accession, non plus que certains hébergements spécifiques. De surcroît, elle n'aboutit pas à une unification complète des aides. Il faudrait donc aller plus loin.
Pourriez-vous, madame la secrétaire d'Etat, nous indiquer quelles sont vos intentions pour réformer plus encore les aides personnelles, en particulier les aides à l'accession.
En outre, je m'étonne que le projet de loi de finances rectificative annule 1,3 milliard de francs d'aides personnelles, à la suite de ce qui semble être une avance de trésorerie de l'Etat aux caisses d'allocations familiales. Je souhaiterais obtenir des explications sur ce point.
Par ailleurs, je m'inquiète de constater qu'aucune économie n'a été réalisée pour anticiper une détérioration de la conjoncture. Un ralentissement économique en 2002 aurait son plein impact seulement en 2003 mais il n'est pas trop tôt pour envisager des économies. J'en cite souvent plusieurs : la révision des conditions de ressources pour les étudiants, la remise à plat des frais des caisses d'allocations familiales, mais aussi, au-delà des aides personnelles, une réforme de l'épargne-logement qui consisterait à lier l'octroi de la prime à l'obtention du prêt au logement.
Je souhairerais, madame la secrétaire d'Etat, connaître votre point de vue sur les moyens de redonner une certaine efficacité à l'épargne-logement.
Vous avez présenté un plan de relance au printemps dernier, et on ne peut que s'en réjouir. Cependant, la construction sociale n'a cessé de décliner ces dernières années, malgré tous les nouveaux produits. Et les options récemment prises par le Gouvernement dans la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains ne sont pas satisfaisantes.
Plutôt que d'imposer une norme nationale uniforme, il faudrait mieux cerner les équilibres locaux et, à l'instar de nombreux pays européens, conduire une politique beaucoup plus décentralisée. La politique du logement doit, en effet, pouvoir s'adapter à une demande diversifiée.
En outre, vous avez mis l'accent cette année sur les démolitions et sur la qualité de service, ce qui est une très bonne chose. Encore faut-il que les objectifs que vous annoncez soient tenus. Pendant des années, on budgétait 80 000 logements sociaux et on en construisait moins de 45 000. Aujourd'hui, vous révisez à la baisse - à 55 000 - les objectifs de construction sociale - et vous avez raison - mais il ne faudrait pas retrouver le même phénomène pour les démolitions.
Les procédures de démolition, qui sont en effet complexes, exigent des solutions pour reloger les habitants des immeubles démolis. De plus, le coût des démolitions ne cesse d'augmenter. Il faudra donc mener une politique particulièrement volontariste. Je sais que vous avez signé une convention sur ce sujet le 11 octobre dernier avec les collecteurs du 1 % logement, mais le versement des trois milliards de francs en cause au budget général pour 2002 est malheureusement un mauvais signal.
J'en viens aux aides à la construction privée, qui sont, malheureusement, les grandes perdantes du budget.
Vous n'avez pas les moyens de maintenir l'efficacité du prêt à taux zéro, qui a enregistré l'an dernier des mesures de restriction. Pourtant, il s'adresse à des ménages modestes et il a soutenu le secteur de la construction ces dernières années pendant que la construction sociale ralentissait.
En 2002, vous mettez en place un dispositif expérimental d'aide à la pierre pour mille logements dans des zones urbaines sensibles et pour mille logements lancés par des organismes d'HLM à destination de ménages très modestes.
De plus, un débat a lieu, je l'avais d'ailleurs initié il y a deux ans, sur le montant des cotisations au fonds de garantie à l'accession sociale, le FGAS. A mon sens, la révision des cotisations ne peut se faire qu'en concertation avec les banques, mais il faut s'interroger sur le devenir des excédents du fonds, qui apparaîtront dès 2003.
Madame la secrétaire d'Etat, avez-vous eu des engagements sur le retour de ces sommes au budget du logement en 2003 et durant les années qui suivront ? Ces surplus, d'un peu plus de 200 millions de francs, pourraient et devraient, me semble-t-il, abonder les dotations du prêt à taux zéro.
Par ailleurs, le FGAS a été amputé en 2002 de 60 millions en autorisations de programme et en crédits de paiement, ce qui ne sera pas trop grave si vous reportez sans les annuler les autorisations de programme 2001 sur 2002.
J'aborde la réhabilitation du logement privé.
Selon moi, lutter contre le logement insalubre est un objectif essentiel, d'ailleurs défini dans la loi de lutte contre les exclusions de 1998.
Cependant - il faut bien l'avouer - les crédits ne sont pas consommés. En 2000, le chapitre consacré à la lutte contre le saturnisme a fait l'objet d'une consommation de 2 à 3 millions de francs seulement et de reports de crédits pour 100 millions de francs ; manifestement, des problèmes importants se posent dans la coordination des services de l'Etat.
Il me semble qu'il faut clarifier les compétences, alléger les procédures et, surtout, définir un acteur unique pour que cette politique soit enfin efficace.
Je tiens ausssi à attirer votre attention sur les crédits de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat, l'ANAH.
Ses moyens ont été réduits depuis deux ans, alors même qu'elle doit désormais gérer la prime à l'amélioration de l'habitat, la PAH.
L'an dernier, la situation n'était pas trop grave, car l'ANAH disposait d'une trésorerie suffisante, mais l'an prochain, ce ne sera plus le cas, car on a « pompé » dans la trésorerie existante. A l'Assemblée nationale, vous avez obtenu, madame la secrétaire d'Etat, une rallonge de 60 millions de francs en crédits de paiement et de 200 millions de francs en autorisations de programme.
A mon avis, ce n'est pas suffisant, et je voudrais que vous nous donniez des assurances sur le maintien des opérations de l'ANAH en 2002, notamment sur le développement des opérations programmées d'amélioration de l'habitat, les OPAH, qui, dans nos départements, sont très efficaces.
J'évoquerai maintenant brièvement ce qu'il est convenu d'appeler le statut du bailleur privé, ou dispositif « Besson », du nom de votre prédécesseur.
La commission des finances a accepté, vous le savez, ce dispositif, mais elle constate qu'il n'est pas assez performant, et, en tout cas, qu'il n'est pas efficace dans le logement ancien. C'est pourquoi elle a proposé - et le Sénat l'a suivie - des dispositions pour la location aux ascendants et descendants du contribuable et pour une revalorisation de la déduction forfaitaire dans l'ancien. J'espère que vous nous soutiendrez sur ce point.
En conclusion, je vous rappelle que la commission des finances a donné un avis défavorable sur l'ensemble des crédits de l'équipement, des transports et du logement. Je regrette, pour ma part, que du fait de la nomenclature budgétaire, ils ne fassent l'objet que d'un seul vote. (Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le président, madame, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, j'ai entendu avec intérêt M. Pelletier, que je remercie de son rapport comme je remercie à l'avance Mme Henneron, MM. Mano et Piras, rapporteurs pour avis dans les domaines du logement et de l'urbanisme.
En 2002, pour la seconde année consécutive, interviendront des créations d'emplois. Ce sont, en effet, 300 emplois nouveaux qui seront créés, auxquels il conviendra de rajouter les 467 postes portés au budget annexe de l'aviation civile. Cet effort sans précédent marque à mes yeux la reconnaissance des responsabilités et du rôle des services de ce ministère.
Par ailleurs, j'ai tenu à ce que soit ajouté à ces créations nettes un plan de résorption des postes vacants qui concernera 1 200 postes en 2002 et permettra d'accroître de 1 500 agents les effectifs dans les services.
A quoi serviront ces effectifs nouveaux ?
Ils viendront d'abord consolider les missions traditionnelles que sont l'exploitation et l'entretien des routes, notamment pour assurer la viabilité hivernale, et des voies navigables.
Ils viseront ensuite à renforcer les missions de sécurité et de contrôle, notamment pour la sécurité routière - 77 inspecteurs - et la sécurité maritime - 32 inspecteurs.
Ils serviront enfin à soutenir la mise en oeuvre des politiques urbaines et d'aménagement du territoire, en particulier la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains et les contrats de plan.
Monsieur Pelletier, vous avez évoqué les critiques faites sur la gestion du personnel de l'équipement.
La présentation de ce rapport a pu laisser croire qu'il y a, dans mon ministère, des agents en surnombre dont le Parlement n'aurait pas autorisé le recrutement. Les 8 500 agents qui seraient en surnombre ne sont pas, je le précise, dans mes services. Ils sont recrutés par l'équipement pour le compte d'autres ministères ou établissements publics.
D'autres emplois pointés du doigt correspondent à des effectifs autorisés dans des grades supérieurs par réduction des effectifs dans les grades inférieurs, procédure indispensable pour assurer des promotions normales et réglementaires.
Sans doute est-il nécessaire de moderniser la gestion publique des personnels, notamment dans mon ministère, mais la situation est loin d'être aussi mauvaise que celle qu'a bien voulu décrire un quotidien du soir.
Je sais, monsieur Pelletier, que vous prêtez une grande attention aux autres crédits des services communs. L'immobilier n'est pas sacrifié puisque les moyens d'engagement en ce domaine seront en augmentation de 12,4 % en 2002.
S'agissant de l'IGN, sur lequel vous m'avez interrogé, je vous confirme qu'à l'image de ce qui a été fait en 2001 pour Météo-France un nouveau contrat d'objectifs entre l'établissement public et les ministères de tutelle est en cours de discussion.
Ce contrat donnera pour mission à l'IGN d'établir et de mettre à jour des référentiels géographiques de qualité, orientés désormais vers les grandes échelles, de les diffuser et de contribuer au développement et à l'utilisation des applications de valeur ajoutée en soutenant les professionnels de l'information géographique.
L'augmentation de plus de 4 % de la subvention d'exploitation à l'IGN pour 2002 permettra à l'établissement de s'engager dans cette voie en attendant la signature du contrat d'objectifs qui devrait intervenir dans le courant du premier trimestre de 2002.
Vous avez, enfin, évoqué la baisse des crédits du PREDIT et du FARIT cette année. Elle s'explique par la fin des anciens programmes PREDIT et FARIT qui se traduit mécaniquement par une baisse des besoins en crédits de paiement.
En revanche, un effort significatif sera réalisé en engagements, essentiellement sur le FARIT, pour permettre de lancer de nouveaux programmes de recherche dans les transports. Cela se traduit par une augmentation des autorisations de programme de 16 % en 2002.
Voilà les éléments que je voulais vous apporter, monsieur le rapporteur spécial, avant que Mme le secrétaire d'Etat vous réponde sur les problèmes du logement que vous avez évoqués.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Marie-Noëlle Lienemann, secrétaire d'Etat au logement. Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, le budget du logement qui vous est présenté s'articule autour de trois grands axes : assurer à nos concitoyens un droit au logement - c'est un combat de longue haleine qu'il faut poursuivre - ; éviter, grâce à la mixité sociale, que notre pays ne bascule vers les ghettos ; soutenir l'activité du bâtiment et de l'immobilier, secteurs essentiels pour notre économie et pour l'emploi.
Ce budget se veut un budget de vérité ; il faut que les crédits qui y sont inscrits soient consommés à la fin de l'exercice et ne soient pas plus ou moins gelés, bloqués dans des mécanismes administratifs qui finissent par rendre difficilement utilisables les sommes que la représentation nationale a voulu voter dans la loi de finances.
Dans cette perspective, les priorités du Gouvernement sont clairement affichées.
Il souhaite, d'abord, consolider et améliorer la réforme de l'aide à la personne qui a été engagée en particulier par M. Gayssot. Cette fameuse réforme consiste en une revalorisation et vise à éviter les « trappes à pauvreté » ou, en tout cas, l'incitation moindre au retour à l'emploi. Elle bénéficie à 4,8 millions de familles. Le « supplément familial du forfait charges » sera augmenté de 5 % et le taux des allocations sera valorisé de 1 % environ, pour suivre à peu près l'évolution des loyers au cours de l'année précédente.
Vous avez bien voulu indiquer, monsieur le rapporteur spécial, que d'autres phases étaient envisagées dans la réforme. Le Sénat sait bien qu'il n'est pas forcément de bonne méthode d'empiler des réformes les unes sur les autres sans s'assurer de leur mise en oeuvre. La conférence sur la famille de 2002 traitera de la question des allocations pour les foyers. Nous avons également engagé une réflexion sur l'accession à la propriété qui, à mon avis, mérite un travail structurel sur financement de l'aide à la pierre.
Les aides à la personne nous laissent des marges de manoeuvre. Cela signifie-t-il que nos estimations ont été trop serrées ? Sachez que, en l'état actuel des choses, nous envisageons encore de reporter un milliard de francs de 2001 sur 2002. Cette baisse par rapport à nos estimations s'explique à la fois par l'amélioration du climat économique - gardons-nous d'entretenir un catastrophisme dénué de fondement qui risquerait d'avoir un effet psychologique allant à l'encontre de l'objectif que nous nous sommes tous fixé, à savoir le soutien à la confiance et à la consommation - et par l'allongement de la durée d'indemnisation des chômeurs, qui sera de nature à alléger les coûts d'aides à la personne.
Nous avons donc une consolidation, avec des marges de manoeuvre nouvelles, dont la majeure partie est affectée à une très forte augmentation, en moyenne 3 %, de l'aide à la pierre, avec un effort particulier en faveur du logement social.
Là encore, le plan de relance fonctionne bien : nous atteindrons 50 000 logements sociaux cette année. Pour 2002, 55 000 sont déjà - si je puis me permettre l'expression - « dans les tuyaux », avec les contrats de relance.
Le budget consacre donc ce qui nous paraît raisonnable et réaliste en matière de construction de logements sociaux.
Le deuxième point relatif à l'aide à la pierre, c'est l'amélioration de la qualité du service, c'est-à-dire la qualité de la vie quotidienne de nos concitoyens.
A cet égard, vous savez à quel point la sécurisation des halls et la résidentialisation contribuent à régler les problèmes d'insécurité ou, plutôt, à garantir la tranquillité publique et privée dans l'habitat.
Le troisième volet concerne l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat, l'ANAH.
L'Agence a fait l'objet d'un débat à l'Assemblée nationale. Le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie a accepté - et je l'en remercie - de consentir un effort en lui octroyant 200 millions de francs supplémentaires.
L'an dernier, vous le savez, 2,7 milliards de francs étaient réservés à l'ANAH ; cette année, son budget s'élèvera à 2,9 milliards de francs. A cela s'ajoute le fait que le fonds de roulement de l'ANAH est aujourd'hui très correct.
Le Gouvernement a le souci de veiller à ce que les aides destinées à l'ANAH soient prioritairement accordées aux secteurs qui ont les besoins les plus substantiels.
Il s'agit, tout d'abord, d'éradiquer l'habitat insalubre. Vous avez constaté une faible consommation des crédits. Elle m'a alarmée. En conseil des ministres, comme je le disais tout à l'heure, j'ai donc présenté un plan visant la consommation des crédits indispensables à la défense de la dignité de nos concitoyens. Je crois que nous partageons tous un tel objectif.
Il s'agit, ensuite, de veiller à ce qu'il y ait davantage de logements conventionnés.
Je rappelle que, dans la fameuse loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, les 20 % de logements concernés sont, soit des logements sociaux, soit des logements conventionnés. Or nous avons tout intérêt à jouer sur la mixité des acteurs pour garantir l'équilibre social dans notre pays.
En tout cas, je crois que l'effort que l'Assemblée a souhaité et que le Gouvernement a accepté est de nature à répondre à nos espérances raisonnables à l'égard de l'ANAH et à la montée en puissance progressive de la fameuse « grande ANAH ».
Pour ce qui est de l'accession à la propriété, je voudrais maintenant réaffirmer qu'il n'y a pas eu de baisse du nombre des prêts à taux zéro.
D'une manière générale - nous aurons l'occasion d'y revenir - la politique du Gouvernement a pour objectif la mixité sociale, c'est-à-dire la démolition, la reconstruction et la répartition judicieuse sur tout le territoire du logement social. Or, mesdames, messieurs les sénateurs, cette orientation du Gouvernement en faveur du droit au logement pour tous et de la mixité sociale, c'est, d'une certaine façon, l'idéal républicain que chacun d'entre nous doit s'appliquer à faire triompher dans sa ville.
M. le président. La parole est à M. Piras, rapporteur pour avis.
M. Bernard Piras, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan, pour l'urbanisme. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les crédits inscrits au titre de l'urbanisme dans le projet de loi de finances pour 2002 atteignent un peu plus de 500 millions de francs en moyens d'engagement. A titre personnel, je considère que ce budget est un bon budget et qu'il répond à l'ambition qui vous anime.
La commission a également relevé les progrès faits dans la préparation des directives territoriales d'aménagement au cours de ces derniers mois. Elle a aussi noté que les moyens consacrés aux agences d'urbanisme étaient consolidés et que le contentieux de l'urbanisme était désormais mieux suivi. Elle m'a cependant chargé de vous faire part, madame la secrétaire d'Etat, de plusieurs préoccupations qui se sont exprimées en son sein.
Sa première préoccupation a trait à l'incidence de l'entrée en vigueur de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains. Comme vous le savez, en effet, l'article L. 122-2 du code de l'urbanisme prévoit qu'il est désormais interdit d'ouvrir à l'urbanisation les zones situées dans un rayon de quinze kilomètres autour des principales agglomérations françaises dès lors qu'il n'existe pas de schéma de cohérence territoriale.
Pour réaliser un tel schéma, il faut du temps et de l'argent. Si l'on y ajoute le coût qui résultera de l'élaboration des futurs plans locaux d'urbanismes, les PLU, on peut penser que les collectivités locales devront engager des crédits supplémentaires pour mettre pleinement en oeuvre leurs compétences en matière d'urbanisme. Mais que fait l'Etat pour leur venir en aide ?
La commission vous demande également, madame la secrétaire d'Etat, de repousser dans le temps la date d'entrée en vigueur des dispositions de l'article L. 122-2 du code de l'urbanisme précité. Tout donne en effet à penser que la situation sur le terrain n'est pas mûre pour appliquer des dispositions aussi contraignantes.
La deuxième interrogation concerne les dispositions de l'article 34 de la loi SRU relatives à la création d'aires de stationnement aux abords des grandes surfaces et des commerces de la grande distribution. Cet article dispose que l'emprise au sol des surfaces, bâties ou non, affectées aux aires de stationnement d'un commerce ne peut excéder une fois et demie la surface hors oeuvre nette des bâtiments affectés au commerce. Mais, selon nos informations, le flou qui caractérise les concepts de « surfaces affectées aux aires de stationnement » et celles de « bâtiments affectés au commerce » justifierait qu'un décret soit pris pour préciser l'intention du législateur.
Si telle est l'intention du Gouvernement, madame la secrétaire d'Etat, pouvez-vous nous faire connaître le contenu et le délai de publication de ce document ?
La troisième question porte sur l'article 46 de la loi SRU, qui concerne le financement des voies nouvelles et des réseaux. Cet article prévoit la possibilité, pour les communes, d'instituer une « participation pour voies nouvelles et réseaux ». Il est cependant nécessaire, au préalable, que les communes délibèrent à cette fin. Or nous constatons que, faute d'une information suffisante, nombre de petites communes n'ont pas pris la délibération qui constitue le pré-requis pour le recouvrement de cette participation.
Le Gouvernement peut-il nous faire connaître les mesures qu'il a arrêtées afin que les services extérieurs de l'Etat présentent aux collectivités locales intéressées l'économie générale du dispositif et l'intérêt de sa mise en oeuvre ?
Nous nous interrogeons, en outre, sur la possibilité d'utiliser le nouveau système de taxe au financement des « réseaux nouveaux » et pas seulement des voies nouvelles. Leur est-il, selon le Gouvernement, applicable ?
Avant de conclure mon propos sur la loi SRU, permettez-moi d'indiquer que, quelles que soient les réserves émises par la majorité sénatoriale sur ce texte, les décrets d'application ont été élaborés avec une remarquable célérité, ce dont nous nous félicitons.
J'indique enfin au Sénat que, contrairement aux conclusions que j'ai présentées, la commission des affaires économiques a émis un avis défavorable sur l'adoption des crédits de l'urbanisme inscrits dans le projet de loi de finances pour 2002.
M. le président. La parole est à M. Mano, rapporteur pour avis.
M. Jean-Yves Mano, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan, pour le logement.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le budget du logement et de l'urbanisme pour 2002 marque de nouveau l'effort du Gouvernement en faveur de l'amélioration des conditions de logement de nos concitoyens et de la transformation de la politique du logement depuis 1997, grâce, notamment, à la loi SRU. L'objectif de construction de 55 000 logements démontre la volonté politique de l'Etat et des collectivités locales de s'engager dans cette voie.
Les inflexions du budget en matière de relogement d'urgence confirment l'intérêt porté par le Gouvernement aux personnes les plus défavorisées. De même, l'expérimentation d'un accès très social à la propriété se situe dans la volonté de développer un parcours résidentiel structurant.
Il faut également signaler que la réforme des aides à la personne simplifie et harmonise les aides au logement. Elle constitue une mesure de justice sociale et offre un moyen de lutte contre le phénomène des « trappes à pauvreté ».
Dans l'immédiat, il convient de noter que la bonne tenue de l'économie a permis d'absorber le coût total de cette réforme nécessaire.
En matière de requalification urbaine, la priorité est donnée cette année aux opérations de démolition-reconstruction : 15 000 logements vétustes seront détruits, telle est votre ambition, et nous l'apprécions. Cependant, madame la secrétaire d'Etat, malgré une politique volontariste et utile de destruction d'habitations, des interrogations subsistent quant à l'avenir d'une partie des logements sociaux, notamment en centre urbain, dont la vocation n'est pas d'être détruits mais d'être mis aux normes.
Ces logements ont démontré la qualité de leur intégration socio-urbaine mais ils nécessitent un investissement important. La commission des affaires économiques craint, madame la secrétaire d'Etat, un arbitrage difficile entre les fonds nécessaires aux opérations de démolitions-reconstruction et les réhabilitations indispensables.
Si nous voulons éviter de nouvelles démolitions, il nous faut rénover et moderniser. Le budget pour 2002 présente des risques à cet égard, soyons-en conscients.
Par ailleurs, la lutte contre l'insalubrité demeure une priorité pour le Gouvernement, comme en témoigne l'augmentation de 28 % de la ligne RHI, « résorption de l'habitat insalubre ». Toutefois, après une baisse en 2001, en raison de la sous-consommation des crédits budgétaires, il apparaît nécessaire de simplifier les procédures et de mobiliser tous les partenaires institutionnels à la réalisation de cet objectif.
La question de la résorption de l'habitat insalubre m'amène tout naturellement à évoquer, madame la secrétaire d'Etat, la réduction des crédits attribués à l'ANAH. Vous avez déjà répondu en partie sur ce sujet.
L'agence ne bénéficiant plus cette année de trésorerie pour mettre en oeuvre les objectifs ambitieux du Gouvernement, il convient de renforcer ses moyens budgétaires pour qu'elle devienne, comme le souhaite le Gouvernement, « l'outil fondamental de l'amélioration du parc privé et de la lutte contre le logement indécent ou insalubre ». Très concrètement, il nous semblait effectivement nécessaire de dégager une ligne budgétaire de 200 millions de francs complémentaires.
Enfin, quelles que soient les oppositions affichées aux moyens de mettre en oeuvre une plus grande mixité sociale fixée par la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, l'année 2002 constitue la première année d'application positive.
Nous pouvons nous en réjouir car les logements financés par un prêt au logement social, un PLS, ou un prêt locatif à usage social, un PLUS, ou encore un prêt locatif aidé d'intégration, un PLAI, seront éligibles au quota de 20 % demandés aux communes. Ainsi, les crédits budgétaires alloués ont de bonnes chances d'être consommés.
Toutefois, madame la secrétaire d'Etat, il est nécessaire d'abonder les lignes budgétaires correspondant à la surcharge foncière pour pouvoir concrétiser la réalisation de logements sociaux en zone urbaine dense.
Les opportunités d'acquisition d'immeubles issus du parc des institutionnels ou de sociétés foncières existent aujourd'hui et, de ce fait, nécessitent une mobilisation budgétaire immédiate. Il serait donc souhaitable à notre sens que les conventions d'objectifs pluriannuelles de productions de logements sociaux, que nous appellerons de nos voeux, prennent en compte la question de la surcharge foncière. Un engagement d'effort à parité entre l'Etat et les collectivités locales doit être pris pour ne pas freiner la volonté politique de mise en conformité avec la loi SRU qui s'exprime aujourd'hui.
Au-delà de la discussion budgétaire stricte, je ne peux passer sous silence l'accord passé avec les unions d'économie sociale du logement, les UESL, visant à la création d'une société foncière.
Si nous pouvons nous réjouir d'un accord entre les partenaires sociaux, le mouvement des entreprises de France, le MEDEF, et les organisations syndicales sur un objectif qui n'est pas contestable car il est extrêmement ambitieux et utile, à savoir la constitution d'un patrimoine immobilier important servant de base de garantie à un fonds de retraite, je veux cependant me faire le porte-parole des inquiétudes du mouvement HLM dans son ensemble au regard du risque de concurrence dans le cadre de la répartition des publics candidats à un logement social.
Je pense à la concurrence dans l'acquisition d'immeubles existants, à l'inégalité entre les offices et les sociétés d'économie mixte, les SEM, par rapport aux sociétés foncières dans la mobilisation des fonds nécessaires à ces acquisitions, au problème de la répartition des publics, notamment des salariés dont les ressources permettent un accès à un logement PLS.
N'oublions pas que la mixité sociale est une nécessité d'équilibre sociologique des immeubles qui peut être mise à mal par les conséquences de la création de ces structures immobilières nouvelles.
A l'évidence, la concrétisation de ces objectifs devra faire l'objet d'une convention stricte et respectueuse des intérêts et des missions des organismes d'HLM dans leurs diversités et des objectifs des collectivités locales dans leur volonté de développer un parc social équilibré en termes géographiques et dans la composition sociologique des immeubles.
En conclusion, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, permettez-moi de saluer ce budget, qui s'avère être réaliste et qui n'a pas soulevé de critiques sérieuses auprès des organismes professionnels du secteur du logement.
Cependant, je me dois de noter l'avis défavorable de la commission des affaires économiques de notre Haute Assemblée. Mais il est vrai que nous sommes là, à l'évidence, dans un rôle convenu ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à Mme Henneron, rapporteur pour avis.
Mme Françoise Henneron, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, pour le logement social. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le budget proposé pour cette année est le dernier de la législature.
Sans doute, le rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales doit-il justifier, de manière concise, l'avis défavorable rendu par la commission quant à l'adoption des crédits du logement.
La commission a tout d'abord souhaité donner acte au Gouvernement des initiatives qui ont jalonné l'année, depuis le plan de relance du logement social présenté le 7 mars dernier jusqu'aux intentions que vous avez exprimées lors de votre conférence de presse, le 7 novembre dernier.
La commission a néanmoins considéré que les propositions que vous avez formulées ne se trouvaient guère confortées par un budget en baisse et sur lequel pèsent des contraintes et des interrogations que notre rapporteur spécial, M. Jacques Pelletier, a excellemment analysées.
Je pense notamment au caractère encore inachevé de la réforme des aides à la personne, à l'évolution incertaine du prêt à taux zéro ou à l'effort insuffisant en faveur de la réhabilitation.
A la suite du comité interministériel sur les villes qui s'est tenu le 1er octobre dernier, les partenaires sociaux gestionnaires du 1 % logement sont appelés à s'impliquer lourdement dans la politique du logement ainsi que dans la politique de la ville.
La commission des affaires sociales salue bien évidemment la mobilisation de nouvelles ressources permettant de donner à nos paysages urbains un visage rénové.
Néanmoins, la lecture de la convention signée entre l'Union d'économie sociale du logement et l'Etat le 12 octobre dernier suscite quelques interrogations.
Les moyens mis en oeuvre de concert par cette association et l'Etat vont faciliter le programme de démolition-reconstruction, dont vous avez annoncé les objectifs.
Cette convention prévoit, à ce titre, la constitution d'une société foncière dotée en fonds propre par le 1 % logement pour des montants importants.
Vous ne vous étonnerez donc pas, madame la secrétaire d'Etat, que la commission des affaires sociales s'interroge sur les futurs rapports entre cette société et les bailleurs sociaux actuels.
Cette société foncière se cantonnera-t-elle à faciliter la réalisation des opérations de démolition-reconstruction ou deviendra-t-elle une sorte de nouveau bailleur social mis, de fait, en concurrence avec les bailleurs sociaux existants, notamment pour la clientèle la plus solvable ? C'est ma première question.
Je reprendrai, ensuite, à mon compte une interrogation du rapporteur spécial de l'Assemblée nationale, formulée en des termes assez directs : « Le 1 % logement devenant le principal financeur du renouvellement urbain par l'octroi de subventions aux opérateurs, nul doute que l'accès des organismes d'HLM à ces financements, indispensables au succès de l'actuelle majorité, sera subordonné par les collecteurs du 1 % logement à des appports en terrains à la société foncière. »
Aussi considère-t-il que cette convention pourrait instaurer « un marché de dupes entre les organismes d'HLM et le 1 % logement ».
Le Gouvernement, qui a négocié cette convention avec l'UESL, peut-il, en répondant à cette question, en préciser la teneur ?
Par ailleurs, la loi relative à la lutte contre les exclusions, votée en 1998, prévoyait plusieurs dispositifs destinés à améliorer la situation des moins favorisés. La non-consommation des crédits consacrés à la lutte contre le saturnisme témoigne des difficultés d'application rencontrées par cette loi.
Dans son 7e rapport annuel, remis au Président de la République et au Premier ministre, le Haut Comité pour le logement des personnes défavorisées dresse une évaluation de certains dispositifs de cette loi et formule vingt-six propositions pour en améliorer l'application ou explorer de nouvelles voies.
Madame la secrétaire d'Etat, pouvez-vous préciser les propositions du Gouvernement en la matière ? (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants et du RPR. - M. Jacques Pelletier, rapporteur spécial, applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Marie-Noëlle Lienemann, secrétaire d'Etat au logement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je répondrai d'abord à M. Piras sur la question spécifique de l'urbanisme avant d'en venir à l'ensemble du dossier logement.
Chaque nouvelle loi ouvre, en quelque sorte, une période de transition accompagnée d'inquiétudes, fondées ou non, et un temps d'ajustement. C'est particulièrement le cas de la loi SRU, qui est structurellement très différente des autres lois, car elle nous conduit à prendre en compte le développement durable, la globalité des enjeux dans la pratique de l'urbanisme et, par ailleurs, les questions d'insertion du droit au logement et de la mixité sociale dans les documents d'urbanisme eux-mêmes.
Je ne crois pas qu'il serait sain de retarder la mise en oeuvre de cette loi. Nous avons tendance, en France, à toujours vouloir nous donner des délais, au terme desquels nous éprouvons toujours les mêmes incertitudes et les mêmes difficultés à mettre en oeuvre la loi. En outre, mon expérience de député européen m'amène à penser que, quelle que soit la longueur des délais, c'est toujours dans les six mois qui précèdent l'échéance que l'on découvre la nécessité de mettre en oeuvre rapidement la loi !
J'en viens à un certain nombre de sujets qui méritent d'être clairement rappelés.
Vous m'avez d'abord demandé si certaines des zones qui sont aujourd'hui non urbanisables, et qui se situent dans les fameux quinze kilomètres autour des agglomérations bloqueraient de toute urbanisation. La réponse est non.
Hypothèse numéro un : ces zones font partie d'un futur schéma de cohérence territoriale, dit SCOT, et l'EPCI est déjà constitué. Si la procédure de SCOT est en cours, l'EPCI peut rendre urbanisables les zones concernées.
Hypothèse numéro deux : ces zones ne font pas partie d'un SCOT soit parce que celui-ci n'est pas encore engagé, soit parce qu'elles n'y figureront jamais. Il suffit alors de faire une demande au préfet. Celui-ci peut accorder une dérogation afin de rendre les zones urbanisables après consultation de la chambre d'agriculture et de la commission des sites.
Le préfet et la collectivité peuvent ne pas être d'accord en raison de problèmes structurels. On ne peut pas alors, vous en conviendrez, permettre aveuglément l'urbanisation des terrains sans qu'il y ait eu un consensus.
Pour répondre à votre question, il n'y a donc pas de blocage de l'urbanisation dans les zones auxquelles vous faisiez référence. Il faut toutefois connaître la procédure. Il est donc nécessaire, c'est vrai, de convaincre et de faire passer l'information. Les services de l'Etat ont, notamment depuis cet été, bien amélioré la diffusion des informations auprès des collectivités locales et des élus. Nous avons publié des documents, envoyé des courriers individuels aux maires et des projets de délibérations types pour aider les petites communes, notamment sur l'un des sujets que vous avez évoqués, à savoir la question des voies nouvelles et des réseaux.
Les procédures habituellement mises en oeuvre étaient, la plupart du temps, illégales. D'ailleurs, vous le savez très bien, les riverains qui ont saisi les tribunaux parce qu'ils contestaient précisément ces procédures ont gagné. On ne pouvait effectivement pas faire porter la responsabilité sur le premier qui construisait l'ensemble de l'infrastructure. En la matière, les choses avancent et nous y sommes, en tout cas, très vigilants.
J'en viens à votre question relative aux aires de stationnement, qui mérite aussi attention.
De notre point de vue, il n'est pas nécessaire de prendre un décret. La loi s'applique de plein droit telle quelle. Si les sénateurs ou d'autres élus jugeaient opportun que nous clarifiions la situation grâce à une circulaire, personnellement, je n'y suis pas opposée, mais je me méfie, malgré tout, des circulaires publiées trop vite, car elles donnent, en général, aux acteurs locaux moins de souplesse.
J'en arrive au logement. Les interventions de l'ensemble de vos rapporteurs m'amènent à prolonger, en quelque sorte, l'intervention que j'ai faite tout à l'heure sur l'accession sociale à la propriété. Je ne comprends pas l'inquiétude de nos concitoyens, en particulier du milieu mobilisé par les questions du logement, sur l'avenir du prêt à taux zéro, à moins qu'elle n'ait un rapport avec les réticences historiques de l'administration du ministère des finances.
Le nombre de ces prêts est le même depuis plusieurs années. Fort heureusement, avec la baisse des taux, le coût du prêt à taux zéro est moindre pour l'Etat. Mais on ne va quand même pas se plaindre du fait que la puissance publique ne soit pas obligée de réguler l'économie et que, d'une certaine façon, elle contribue à rendre plus favorable l'accession à la propriété ! C'est bien l'objectif de notre politique que de baisser les taux d'intérêt et c'est le succès de notre politique qui, fort heureusement, allège l'obligation de financement de l'Etat. Tous ceux, ici, qui sont comptables des fonds publics savent très bien que nous souhaitons, au contraire, une économie qui fonctionne bien et dans laquelle l'Etat ne serait pas obligé d'intervenir sans arrêt pour colmater les brèches !
En matière d'accession sociale, nous essayons de lancer deux pistes.
D'abord, nous voulons la rendre plus sociale pour que les familles qui ont les plus faibles ressources puissent y accéder, ne pas, en effet, retomber dans les erreurs du passé en termes de surendettement, d'où la logique d'une procédure engagée à travers le mouvement HLM et fondée sur la sécurisation des accédants.
Ensuite, nous affichons une volonté de favoriser l'accession « sociale », au sens large du terme, dans les zones urbaines sensibles, car c'est l'un des éléments de la mixité urbaine que nous souhaitons promouvoir.
Personnellement, je fonde beaucoup d'espoirs dans ces pistes. En outre, après le rapport sur l'avenir du prêt à taux zéro, et le bilan qui en sera tiré, rapport en cours d'élaboration par le conseil général des ponts et chaussées et l'inspection générale des finances, j'espère que nous pourrons porter un regard objectif sur ce prêt à taux zéro. Qu'en est-il ? Est-il suffisamment urbain ? J'entends des discours assez contradictoires à ce sujet ; les accessions seraient plus nombreuses en zones périurbaines qu'en zones urbaines, etc.
Je veillerai particulièrement à ce que ce type d'accession permette, dans les secteurs où c'est vraiment nécessaire, de réintroduire des familles. Je pense aux centres-villes qui, les statistiques démographiques le montrent, sont désertés.
Monsieur Pelletier, vous m'avez interrogée sur l'avenir de l'épargne logement. L'idée d'une réforme dans ce domaine me paraît opportune et mérite d'être retenue, car il est, en effet, quelque peu désolant, pour un secrétaire d'Etat au logement, de voir que les placements des Français dans la pierre ne retournent pas à la pierre, si je puis dire. Mon orientation est donc bien d'essayer de consolider la formule à long terme.
Mais, encore une fois, il n'y a aucune inquiétude à avoir sur le prêt à taux zéro, et l'accession à la propriété : c'est l'une des grandes priorités du Gouvernement, d'autant que cette aspiration numéro un des Français correspond aussi à une inquiétude par rapport à l'avenir et à un souci de garantir leurs retraites. Cela compte dans l'équilibre global de l'épargne à long terme !
Vous m'avez tous fait part de vos inquiétudes, s'agissant de la politique du 1 % logement, sur les démolitions et la rénovation du parc d'HLM. Il est vrai que, au moment de traduire dans les faits la volonté que nous avons de casser les ghettos et de changer l'ampleur des financements consacrés à ces actions, on peut nourrir certaines craintes.
Je voudrais d'abord vous rassurer sur la question de la réhabilitation du parc social. Il est évident que l'on ne va pas le raser, y compris dans les quartiers. Il est vrai, monsieur Mano, que les crédits nécessaires à la réhabilitation doivent être maintenus à un niveau élevé. Pour l'heure, les crédits consacrés aux primes à l'amélioration des logements à usage locatif et à occupation sociale, dits crédits PALULOS, concernent 120 000 logements réhabilités dans le budget de l'Etat, et cela depuis plusieurs années.
En faut-il moins ? Je suis sûr que non. En faut-il plus ? Peut-être, à condition qu'ils soient utilisés à bon escient. C'est pourquoi le Gouvernement financera à hauteur de 50 % les études stratégiques d'analyse de la maintenance, de l'entretien et de l'avenir du parc social par organisme. Nous allons démolir un certain nombre de sites qui ont fait l'objet récemment de plusieurs opérations dites PALULOS.
On pourrait avoir le sentiment d'un certain gaspillage des fonds publics si un tel mécanisme s'opérait. Il faut donc que chaque organisme établisse un plan stratégique et dresse la liste des logements qu'il va faire démolir, rénover ou construire. Nous connaîtrons alors l'ampleur de l'effort que la nation doit consentir au côté du monde HLM.
Sans doute sera-t-il alors opportun de repenser les financements, pour éviter les stratégies « par accordéon » qui consistent à attendre que les logements soient détériorés avant de les rénover. Il en résulte qu'une fois cette rénovation réalisée une sorte de ségrégation sociale s'est installée. En effet, des gens sont partis et ceux qui reviennent ne reflètent pas forcément la même diversité sur le plan social. Nous sommes donc à un carrefour. A partir du moment où nous entrons dans cette logique, nous devons repenser notre stratégie. Mais il n'y a pas de baisse de l'effort de réhabilitation. Il faut maintenant davantage en calibrer la forme et le contenu.
Vous avez également fait état de vos craintes à propos de l'émergence d'un nouvel opérateur avec le 1 %.
D'abord, félicitons-nous ensemble que la mixité sociale et le renouvellement urbain soient une grande cause nationale, partagée par l'ensemble des acteurs économiques et sociaux - puisque les syndicats, vous le savez, ont donné leur accord - et par le pays. On ne peut avancer que lorsque tout le monde partage la même philosophie, dont j'ai tenu à rappeler qu'elle me paraissait être un principe de notre République.
Comment être sûr que la société foncière, qui est constituée, ne concurrencera pas - ce serait absurde - le monde HLM, pis, ne le marginalisera pas, le cantonnant dans le « très social » alors qu'elle se réserverait le « social supérieur », comme disait Coluche en parlant des classes moyennes ouvrières classiques ? Très franchement, il n'y a pas de crainte à avoir. C'est l'objet du contenu de l'accord que nous allons maintenant préciser d'ici à la fin de l'année, et une consultation du mouvement HLM est évidemment permanente sur ce sujet.
D'abord, il n'y aura pas de lien obligatoire entre le financement par la société foncière des démolitions et des reconstructions. Ensuite, elle devra faire du social et du très social. Enfin, il y aura une sorte de respiration entre les HLM et la société foncière. J'ai par conséquent la certitude que nous ne mettrons pas en péril le monde HLM. En tout cas, soyez convaincus que le Gouvernement fera preuve à cet égard d'une totale et absolue détermination, bien qu'il n'y ait pas, je crois, du côté du 1 %, une volonté hégémonique. J'y vois plutôt une volonté de collaboration et de coopération.
M. le président. Nous passons aux questions.
La parole est à M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson. Notre excellent rapporteur spécial de la commission des finances M. Pelletier ayant déjà présenté une analyse globale du budget et, par ailleurs, les rapporteurs pour avis MM. Piras, Mano et Mme Henneron ayant soulevé un certain nombre de problèmes, je poserai directement mes questions.
Personne ne conteste aujourd'hui les difficultés d'application de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains. La mise en place des schémas de cohérence territoriale, les SCOT, en est un exemple particulièrement criant : elle devrait coûter entre 350 000 euros et 400 000 euros. Certaines collectivités ne pourront pas l'assumer financièrement.
Pourtant, les lois de décentralisation ont prévu, en matière d'urbanisme, la mise à disposition gratuite des services de l'Etat. Cette mesure, inscrite en lettres d'or, devait permettre à l'ensemble des collectivités du territoire de s'organiser et d'être assistées. Mais le Gouvernement et les parlementaires ont peut-être oublié cette disposition lors de l'examen de la loi SRU !
Au moment où nous allons créer les EPCI, nécessaires à l'élaboration de ces schémas de cohérence territoriale, et devant la réticence des petites communes ou des petites collectivités, qui craignent d'être absorbées ou de disparaître en s'associant avec les grandes, tout en rappelant plus particulièrement la règle des syndicats mixtes où la représentation peut être proportionnelle à la contribution financière, je suis conduit à vous poser une question toute simple, madame le secrétaire d'Etat : comment allez-vous permettre aux collectivités, plus particulièrement aux plus petites d'entre elles, d'assumer cette charge financière et quel soutien comptez-vous leur apporter ?
Toujours à propos de l'application de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, un certain nombre de problèmes se font jour. Le Sénat avait dénoncé en son temps le dispositif concernant l'obligation pour les communes de se doter de 20 % de logements sociaux. Nous avions souligné qu'une telle mesure serait inapplicable dans certains secteurs, notamment dans les parcs naturels régionaux et dans les communes touristiques. Nous avions vu juste !
Au-delà des difficultés de la gestion de l'espace, le coût très élevé du foncier pose un véritable problème, plus particulièrement dans les communes touristiques ou les stations classées.
Deux solutions s'offrent alors : ou bien les communes concernées sont exclues du dispositif, ou bien un moyen de compensation financière doit être trouvé pour leur permettre de faire face à une charge foncière particulièrement élevée. Entendez-vous apporter un soutien financier complémentaire aux acquisitions foncières nécessaires ?
Enfin, il faut donner aux collectivités locales les moyens de délibérer à propos de la participation financière aux voies nouvelles et aux réseaux, de manière que l'on n'assiste pas à une série de contentieux relatifs aux relations financières entre les opérateurs et les collectivités locales.
Madame le secrétaire d'Etat, telles sont les questions très précises que je voulais vous poser. Le vote du budget est sans doute le moment privilégié pour demander les crédits nécessaires au bon fonctionnement des collectivités locales.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Marie-Noëlle Lienemann, secrétaire d'Etat. Monsieur le sénateur, je répondrai tout d'abord sur le coût, notamment pour les petites communes, des documents d'urbanisme qui seront nécessaires à la mise en oeuvre de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains.
Depuis 1983, l'ensemble des crédits afférents en particulier aux études de modifications des plans d'occupation des sols ont été inclus dans la dotation générale de décentralisation, la DGD. Normalement, il s'agit d'une compétence transférée. Fort heureusement, au cours du temps, toutes les collectivités se doivent de mener des études et des réflexions en matière d'urbanisme sur leur territoire.
Je vous invite à regarder ce qui se passe dans l'ensemble des communes de l'Union européenne : la France n'est pas l'un des pays où les collectivités locales consacrent le plus d'argent aux études urbaines ou aux études de paysage et de territoire. Par conséquent, je les invite à mobiliser les urbanistes. Tout le monde y gagnerait pour la valorisation de ce patrimoine fantastique que constituent nos villes et nos villages, notamment au regard de l'économie du tourisme et du bien-vivre de nos concitoyens.
A partir de ce constat, que pouvons-nous faire ? Je vous rappelle que quarante postes ont été dégagés dans les services de l'urbanisme et de l'habitat des directions départementales de l'équipement, les DDE, pour permettre une meilleure utilisation des moyens de l'Etat et accompagner les communes dans la mise en oeuvre de la loi SRU.
Par ailleurs, il est vrai qu'il est préférable que les collectivités locales s'unissent. Elles peuvent dès lors consulter un urbaniste. J'insiste auprès de vous pour convaincre les maires, car souvent vous entretenez des liens très étroits avec eux, de ne pas avoir recours à des documents d'urbanisme clefs en main. Certes, le coût est moins élevé mais, à long terme, la qualité de nos sites s'en trouve amoindrie. Cet effort s'inscrit dans le long terme.
J'en viens aux 20 % de logements sociaux. Certes, la question du coût foncier se pose, mais elle est récurrente s'agissant de l'avenir du financement de nos logements sociaux. Si le contrat de relance fonctionne bien, c'est en raison des subventions qui sont versées pour un certain nombre d'opérations en zone urbaine. Voilà qui répond en partie à la question que, tout comme M. Mano, vous avez posée, monsieur Hérisson.
Le financement du foncier sera l'un des sujets qu'il nous faudra étudier pour le financement du logement social. Actuellement, les communes qui n'ont pas 20 % de logements sociaux ne sont pas nécessairement les plus défavorisées, car leurs contributions à la diversité de l'habitat, si elles sont regroupées en communauté d'agglomération ou en communauté de communes, peuvent être utilisées pour financer des logements sociaux, tout particulièrement pour le foncier. En clair, elles peuvent récupérer ce qu'elles paient dès lors qu'elles construisent des logements sociaux. Ce système permet de faire pression sur les communes, mais il leur donne aussi les moyens d'atteindre leurs objectifs.
A voir l'effort accompli par la Ville de Paris et par un certain nombre de communes qui atteignent ce quota de 20 %, j'observe que l'aspect convaincant et peut-être, dans certains cas, pressant de la loi commence à produire ses effets. Je ne crois pas qu'il soit impossible d'atteindre ce quota sur le territoire national, ni que l'on assèche les ressources des communes, car ce sont souvent les communes les plus riches qui n'atteignent pas ce taux de 20 %.
M. Pierre Hérisson. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson. Cette procédure de questions et de réponses me paraît très intéressante, surtout pour ceux qui nous regardent ou qui nous écoutent.
Je répondrai à Mme le secrétaire d'Etat par quelques observations. Tout d'abord, je voudrais combattre l'idée selon laquelle les communes touristiques sont plus riches que les autres communes. Elles sont souvent plus endettées, parce qu'elles doivent entretenir de nombreux équipements qui ne sont parfois utilisés qu'une partie de l'année. En outre, compte tenu de la réforme de la taxe professionnelle, qui est par ailleurs une bonne chose elles subissent un tassement de leurs recettes.
Ensuite, si j'ai insisté sur les difficultés rencontrées par les communes touristiques, les stations classées et les communes se situant dans les parcs naturels régionaux pour se doter de 20 % de logements sociaux, c'est que, très souvent, ces communes partent de zéro : aller de zéro à 20 % tout en maintenant une politique de développement de la commune pose un problème de rattrapage qui mérite d'être étudié, s'agissant notamment du soutien aux acquisitions foncières destinées à réaliser ces constructions.
J'ai bien noté, madame le secrétaire d'Etat, que vous aviez conscience que la DGD n'était pas suffisante pour pallier le vide juridique en la matière. Pour être sénateur et maire, j'ai le sentiment que les services de l'Etat, qui, jusqu'à présent, assuraient un travail important pour les communes en matière de plan d'occupation des sols et d'urbanisme, profitent de cette mesure pour conseiller aux maires de faire appel à des bureaux d'études pour l'élaboration des SCOT. De ce fait, on assistera à un glissement d'une prestation gratuite vers une prestation payante et coûteuse. Il y là un véritable problème. En effet, pour élaborer correctement un SCOT, la dépense est de l'ordre de 2,5 millions à 3 millions de francs, ce qui est considérable.
M. le président. La parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, d'un montant de 7,3 millions d'euros, le budget du logement est en léger recul par rapport à celui de la loi de finances pour 2001. Cette diminution est regrettable, d'autant que le contexte actuel d'accroissement des inégalités sociales et de stagnation du pouvoir d'achat exigerait qu'un effort supplémentaire soit accompli afin de mettre en place un véritable service public du logement, qui consacrerait la pleine reconnaissance du droit au logement.
Cette relative modicité de votre budget face aux énormes besoins ne vous a pas empêchée de faire preuve d'un réel volontarisme politique et de mener avec détermination un certain nombre d'actions en faveur des populations les plus démunies. Madame la secrétaire d'Etat, la tâche que vous avez entreprise n'était pas aisée et nous devons reconnaître que le bilan de votre ministère, où figurent des avancées auxquelles notre groupe a largement contribué, est positif. Autant le dire dès maintenant, le groupe communiste républicain et citoyen votera votre budget.
La nouvelle procédure de questions et de réponses ne nous permet malheureusement pas de rendre justice à votre action en s'y attardant quelque peu. Je me limiterai donc aux mesures les importantes.
Le rétablissement de l'aide à la pierre supprimée par la droite, l'exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties et l'application d'un taux réduit de TVA à 5,5 % suscitant la construction de nouveaux logements sont autant de mesures positives au bénéfice du logement social.
A ces mesures s'ajoutent celles qui tendent à favoriser la mixité sociale, que vous avez rappelées tout à l'heure, madame la secrétaire d'Etat. Je pense notamment au relèvement du seuil d'application du surloyer obligatoire et des plafonds de ressources.
Ces dispositifs s'inscrivent dans la continuité des actions menées depuis 1997 pour lutter contre les exclusions sociales. Rappelons que les dispositions de la loi relative à la solidarité et du renouvellement urbains participent pleinement de cette problématique visant le rééquilibrage de la répartition des logements sociaux, même si, et nous le regrettons vivement, les avancées concrètes demeurent encore largement insuffisantes.
Malgré l'amélioration des conditions de financement, que nous approuvons, la construction sociale, outre le fait qu'elle ait pris du retard, est beaucoup trop modeste. Tandis que l'on prévoit la construction de 55 000 logements sociaux, il est, dans le même temps, non seulement prévu d'en démolir 15 000, mais aussi d'en revendre 10 000.
Nous savons aussi que la faiblesse de la dotation destinée à l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat compromet un programme ambitieux de réhabilitation. Dans ces conditions, le solde annoncé de 30 000 logements sociaux sera-t-il atteint ? Permettez-moi, madame la secrétaire d'Etat, d'en douter. Quand bien même le serait-il, il ne permettrait pas de faire face à l'évidence et à l'urgence des besoins. Cela constitue l'une de nos principales préoccupations.
Autre source d'inquiétude : l'effort louable que vous accomplissez en faveur de la mixité sociale se heurte à de trop nombreux obstacles, notamment l'existence d'un surloyer qui pénalise, en la détournant, l'épargne logement des jeunes ménages et retarde ainsi leur accès possible à la propriété. A l'inverse, les jeunes issus de milieux défavorisés sont pénalisés du point de vue du montant du loyer et des garanties exigées pour accéder à un logement type HLM.
Par ailleurs, nous le savons - diverses enquêtes en témoignent - beaucoup trop de jeunes vivent aujourd'hui dans des situations d'extrême précarité, sans réelle indépendance financière. Les conditions exigées pour la location sont donc trop contraignantes.
Je tiens encore à attirer votre attention sur la question de l'aide personnalisée au logement l'APL, et sa nécessaire revalorisation. Je citerai un exemple : au début des années quatre-vingt-dix, un couple de retraités touchant une pension de 9 000 francs bénéficiait de 580 francs au titre de l'APL ; aujourd'hui, ce couple n'a plus droit à l'APL, alors que sa retraite est restée identique. Cet exemple, qui concerne un foyer dont les revenus sont modestes, est particulièrement significatif.
S'agissant des loyers, la suppression du droit de bail et le gel des loyers pour la période 2000-2001 ont été appréciés par les locataires. C'est que, pour eux, le montant de la quittance mensuelle est primordial !
Cependant, madame la secrétaire d'Etat, comment ne pas s'inquiéter de la sortie de cette période de gel quand, d'ores et déjà, des bailleurs sociaux anticipent afin de rattraper ce prétendu manque à gagner et que les charges locatives sont tirées vers le haut par les hausses d'énergie, comme celles du gaz, par exemple ?
Par ailleurs, vous avez souhaité renforcer le rôle social des gardiens d'immeubles, avec un gardien pour cent logements. Notre groupe approuve une telle mesure. Cependant, pour positive qu'elle soit, ne conduira-t-elle pas aussi à une hausse des charges qui pèsera de nouveau sur les foyers les plus modestes ?
Le contexte actuel d'essoufflement de la conjoncture devrait a contrario nous inciter à libérer du pouvoir d'achat en faveur de la consommation, donc du soutien de la croissance.
Vous avez indiqué que vous veilleriez à ce que la sortie de la période de gel des loyers soit modérée. Pourriez-vous, madame la secrétaire d'Etat, et ce sera là ma question, nous donner quelques précisions et garanties à ce sujet ? (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Marie-Noëlle Lienemann, secrétaire d'Etat. Madame la sénatrice, je vous remercie des propos que vous avez tenus sur le volontarisme politique ; il est, je crois, confirmé dans ce budget.
Ma grande crainte était d'avoir des sommes qui, de toute façon, ne seraient pas dépensées et qui ne nous auraient pas donné une crédibilité suffisante pour demander une montée en puissance de nos dispositifs dans les futurs budgets de l'Etat.
Vous avez raison, nous ne construisons pas assez de logements sociaux. Cela étant, je ne suis pas d'accord avec le chiffre que vous avancez pour les logements qui seront revendus : je ne pense pas que l'on en revendra 10 000, même si, dans certains cas, des opérations sont bienvenues en termes de mixité sociale.
Mais le calcul est simple : 55 000 constructions, 15 000 démolitions, cela ne fait que 40 000 logements construits. Or le pays en a besoin de davantage encore, notamment dans le parc HLM. Faut-il encore que l'on veuille construire et que l'on puisse le faire. L'effort commence à porter ses fruits, mais il faudra le consolider. Tout ce qui a été dit sur le financier, notamment, mérite d'être examiné. M. Cacheux doit nous rendre son rapport et éclairer ainsi le pays sur les orientations en la matière.
Pour ce qui est du secteur privé, vous avez insisté sur l'importance du taux réduit de TVA pour la réhabilitation. Comme le Gouvernement s'y est engagé, il mettra toute son énergie à obtenir de Bruxelles la prorogation de cette mesure.
Par ailleurs, nous souhaitons que les aides fiscales s'inscrivent dans une vision sociale du logement et de l'investissement locatif privé. C'est tout le sens de la déduction forfaitaire de 60 % pour des plafonds de loyer et de ressources assez bas, soit une mesure qui a une vocation plus sociale encore que ce que l'on appelle l'« investissement Besson ». C'était d'ailleurs, madame la rapporteure, une des demandes du Haut Comité pour le logement des plus démunis que l'on favorise, dans le parc privé, une offre correspondant à ceux de nos concitoyens dont les ressources sont les plus faibles.
Ensuite, je voudrais insister après vous sur la question des loyers.
Comme vous le savez, nous sommes sortis du gel. Les associations de locataires et un certain nombre de nos concitoyens craignaient une sorte de rattrapage. Les représentants du mouvement HLM m'avaient assuré que tel ne serait pas le cas. Il nous semblait, par ailleurs, assez difficile de brider par trop les conditions de sortie car, dans certains cas très particuliers, la faiblesse du loyer cumulée aux difficultés propres aux organismes militait pour que l'on ménage une certaine marge de manoeuvre.
La consigne que j'ai donnée aux préfets est claire : chaque fois que les loyers augmenteront de plus de 2,2 %, une deuxième lecture sera rendue obligatoire en conseil d'administration de l'organisme ; le préfet ainsi que la direction départementale de l'équipement demanderont des comptes très précis aux organismes pour qu'ils justifient éventuellement ce dépassement de taux.
Aujourd'hui, les indications que nous avons sur ce qui va se passer en janvier sont plutôt bonnes ; nos inquiétudes portent davantage sur les hausses qui pourraient avoir lieu en cours d'année et qui feront l'objet de nos efforts et de la vigilance des préfets. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
Mme Odette Terrade. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade. Je veux remercier Mme la secrétaire d'Etat des précisions qu'elle vient de nous apporter : elle a largement étayé le sens qu'elle donne, et que nous donnons avec elle, au droit au logement pour tous.
J'insiste encore sur les loyers, qui sont notre principal souci. Dans de nombreux quartiers en difficulté, en effet, la quittance de loyer compte pour une part importante dans le budget des locataires.
Nous serons - soyez-en sûre - attentifs, avec les locataires, pour que les orientations du Gouvernement ne soient pas compromises !
M. le président. La parole est à M. Vezinhet.
M. André Vezinhet. Avec 7,3 milliards d'euros de crédits, le budget que vous nous proposez, madame la secrétaire d'Etat, traduit bien l'effort que, cette année encore, l'Etat consacre au logement.
Hors aides à la personne, qui diminuent de 0,5 % en raison d'une nette amélioration de notre économie, les moyens d'engagement progressent de 2,7 %.
Ce buget s'inscrit dans le droit-fil de l'action menée depuis quatre ans, avec l'augmentation des moyens budgétaires, un environnement fiscal amélioré, des réformes réglementaires et législatives importantes et un dialogue constructif avec les partenaires.
C'est donc un budget de continuité, mais l'accent est mis sur le renforcement de l'aide à la pierre, la relance du renouvellement urbain, l'éradication de l'habitat indigne, l'engagement vers un développement durable de l'habitat.
Depuis 1993, chaque budget faisait apparaître une baisse de la construction du logement social locatif. Aujourd'hui, je note avec plaisir l'inversion de la tendance : 50 000 logements sont attendus en 2001.
Dès 1997, le Gouvernement rétablissait la subvention d'aide à la pierre. Vous poursuivez dans cette voie, mais en allant plus loin, puisque le financement de 55 000 logements est prévu, ce qui représente une augmentation de 10 %, assorti d'une dotation qui passe de 418,6 millions d'euros à 457,4 millions d'euros.
Les crédits pour la prime à l'amélioration des logements à usage locatif et à occupation sociale, les PALULOS, établis à 142 millions d'euros, sont, eux, en légère diminution. Certains s'en émeuvent. Dans une France où le parc social relève pour l'essentiel non pas de la destruction mais de la réhabilitation, quelle est votre réponse, madame la secrétaire d'Etat ?
La loi SRU, qui fixe un seuil obligatoire minimal de 20 % de logements sociaux, trouve évidemment dans ce retour de l'aide à la pierre une réponse adaptée.
Relancer le logement social, mais aussi casser les ghettos et éradiquer l'habitat indigne, tout cela figurait en tête du plan du 7 mars dernier. Il s'agit d'améliorer la vie quotidienne de nos concitoyens et de faire entrer dans les faits le renouvellement urbain.
Cette politique passe par un triplement des crédits de démolition pour 15 000 démolitions prévues en 2002. Des opérations de démolition-reconstruction de grand ampleur, s'appuyant sur la loi SRU, nous font entrer concrètement dans le champ de la mixité sociale voulue par le législateur ; elles permettront une répartition différente du logement social à l'échelle de l'agglomération.
La mixité sociale est aussi favorisée dans les quartiers requalifiés, grâce à l'aide à la pierre complémentaire au prêt à taux zéro. Une aide de 10 700 euros est prévue pour les accidents dans le périmètre des zones urbaines sensibles, les ZUS. Nous souhaitons non seulement la reconduction, mais encore l'extension de cette disposition à l'avenir.
L'année 2001 aura été marquée par une innovation dont les effets sont attendus en 2002, je veux parler de l'investissement du 1 % dans le financement du renouvellement urbain.
A ce titre, 3 milliards de francs par an sont affectés à la démolition des logements sociaux et des copropriétés dégradées. En outre, une société foncière sera dotée, à terme, de 7 milliards de francs pour aider à la mixité sociale.
Enfin, je me félicite du doublement des sommes consacrées à l'amélioration de la qualité du service dans les quartiers d'habitat social.
Le 17 octobre dernier, madame la secrétaire d'Etat, vous avez présenté un plan d'éradication de l'habitat indigne financé par 4 milliards de francs sur cinq ans et concernant 50 000 logements.
Après la loi relative à la lutte contre les exclusions, ce plan contribue à la concrétisation de l'objectif d'un logement décent pour tous contenu dans la loi SRU. Pour 2002, au total 21,85 millions d'euros seront consacrés à cette action.
Onze départements, dont l'Hérault, sont classés prioritaires, avec 1 500 logements à traiter d'ici à cinq ans. On parle d'ailleurs non plus d'« habitat insalubre », mais d'« habitat indécent ». Pouvez-vous nous laisser espérer, madame la secrétaire d'Etat, la sortie prochaine du décret définissant très précisément le « logement décent » ?
Comment ne pas aborder également la question des moyens de l'ANAH ? Les autorisations de programme diminuent de 10 %, bien qu'elles atteignent le niveau de celles qui auront été consommées en 2001. Est-ce suffisant ? On peut en douter, comme nous doutons de la solution adoptée par l'Assemblée nationale qui, pour répondre au besoin, ampute le fonds de garantie de l'accession sociale de plus de 47 millions d'euros.
Avez-vous, madame la secrétaire d'Etat, une proposition autre ?
S'agissant du taux réduit de TVA sur les travaux, avez-vous l'assurance que Bruxelles ne s'opposera pas à la pérennisation de cette mesure ?
Madame la secrétaire d'Etat, nous avons participé côte à côte, vendredi dernier, aux premières assises de la haute qualité environnementale, la HQE, qui se sont tenues à Bordeaux. Ce concept est au service du développement durable dans l'habitat. Je note, dans le budget que vous nous proposez, le retour marqué de l'aide à la pierre. Voilà un signe favorable, gage d'une qualité renforcée et de la concrétisation du concept de haute qualité environnementale.
L'Union régionale des HLM du Languedoc-Roussillon travaille actuellement à l'élaboration d'une charte méditerranéenne de la construction, respectant l'identité très forte des régions du Sud, Languedoc-Roussillon et PACA. Il s'agit d'un programme ambitieux, supposant une offre nouvelle imprégnée de la demande HQE. Il mobilise des efforts pour réaliser des économies d'énergie et d'eau, en permettant non seulement de réduire les charges locatives, mais aussi, au-delà, d'améliorer le confort des habitants, le tout en gérant au mieux les ressources naturelles. Je compte sur votre écoute et votre aide à ce sujet, madame la secrétaire d'Etat.
Bien évidemment, le groupe socialiste votera votre budget.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Marie-Noëlle Lienemann, secrétaire d'Etat. Monsieur le sénateur, vous avez évoqué plusieurs points auxquels je suis très sensible.
Je commencerai par répondre à la dernière question que vous avez soulevée, celle de l'habitat durable, qui mérite que l'on y insiste, car elle est moins souvent abordée que les autres à l'occasion de la discussion budgétaire.
Il faut que nous en soyons tout à fait conscients, il y a là un double enjeu pour nos concitoyens : d'une part, l'amélioration de leur qualité de vie, notamment de leur intérieur, ce qui est essentiel pour la santé, et l'amélioration de la qualité de l'environnement au sens large ; d'autre part, le considérable gisement d'économies d'énergie ou d'utilisation d'énergies peu émettrices de gaz à effet de serre.
En fait, 40 % de notre énergie principale sont consommés dans le bâti et au moins 25 % des émissions de CO2 ont pour origine l'habitat. Par conséquent, si nous voulons respecter les critères fixés dans le protocole de Kyoto, le secteur de l'habitat doit faire des efforts considérables.
L'avantage de notre secteur, c'est que les efforts qui sont réalisés peuvent aussi avoir des conséquences sur les charges ; Mme Terrade a insisté sur ce point. En consommant moins d'énergie, on obtiendra une diminution des charges. L'enjeu est donc d'importance.
Le Gouvernement a pris un certain nombre de mesures. J'annoncerai au conseil des ministres du début du mois de janvier un plan général sur l'habitat et le développement durable. Je voudrais citer les éléments pertinents qui figurent dès à présent dans le budget.
Premièrement, un crédit d'impôt de 15 % est prévu pour nos concitoyens qui réaliseraient des travaux au titre des économies d'énergie : changement de chaudière, modification des fenêtres et des huisseries, notamment. Ce crédit d'impôt vient d'ailleurs s'adosser à un dispositif pris l'an dernier sur les énergies renouvelables. Le crédit d'impôt de 15 % concerne donc tout à la fois les énergies renouvelables et les économies d'énergie.
Deuxièmement, pour les organismes d'HLM, l'Assemblée nationale a proposé la prolongation de l'exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties pour la porter de quinze ans à vingt ans quand les opérations répondraient à des exigences de haute qualité environnementale et à un certain nombre d'exigences environnementales ou d'habitat durable.
La lutte contre l'insalubrité s'inscrit dans ce cadre, car la priorité, en matière d'habitat durable, c'est que le logement soit sain et décent pour nos concitoyens.
Le décret relatif au logement décent sortira en fin d'année ou au début de l'année prochaine. Il doit maintenant être examiné par le Conseil d'Etat. Il ne semble pas poser de problèmes majeurs, mais nous attendons l'avis du Conseil d'Etat.
Troisièmement, j'évoquerai les crédits de l'ANAH. L'Assemblée nationale a « rétabli » les 200 millions de francs. Le terme n'est pas tout à fait juste, d'ailleurs, car, en réalité, il y avait déjà 2,7 milliards de francs l'an dernier. C'est donc une augmentation. Je rassure les parlementaires, il n'y a pas de problème de fonds propres à l'ANAH. Il n'est pas non plus illégitime, en cas d'accumulation, que l'Etat récupère les crédits non consommés, car on ne peut pas non plus garder en stock des crédits alors même que la nation en a besoin.
Quatrièmement, sur la baisse de TVA, vous avez raison de dire, monsieur le sénateur, que c'est un enjeu important pour le bâtiment. Nous ne sentons pas, à Bruxelles, de fortes réticences. D'abord, la conjoncture économique pousse nombre de nos partenaires à réfléchir au soutien à l'économie. Or la TVA à 5,5 % a prouvé qu'elle était un fantastique levier à la fois pour la croissance et pour l'emploi.
Forts de notre expérience, nous avons la possibilité de convaincre les autorités de Bruxelles et nos partenaires européens. Sachez que nous y mettrons toute notre énergie !
M. André Vezinhet. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Vezinhet.
M. André Vezinhet. Je voudrais, madame le secrétaire d'Etat, vous dire la grande satisfaction que me procurent vos réponses sur ce sujet.
Le mouvement du logement social, dans sa diversité, est un carrefour historique. Il a su montrer, parfois même au monde de la copropriété, tout l'intérêt de l'amélioration de l'habitat - je pense notamment aux mesures qui ont été prises pour l'isolement phonique et la meilleure maîtrise de la consommation d'énergie.
Les précisions que vous venez d'apporter sur l'aménagement durable sont extrêmement encourageantes. Après vingt ans de vie publique consacrés au logement, je continuerai avec le même enthousiasme, puisque vous tracez des perspectives aussi stimulantes. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. Félicitations pour votre enthousiasme, monsieur Vezinhet !
La parole est à M. Cleach.
M. Marcel-Pierre Cleach. Madame la secrétaire d'Etat, les rapporteurs vous ont dit tout le mal que pensaient leurs commissions respectives du projet de budget que vous présentez ce matin au Sénat.
J'aurais moi-même aimé avoir le temps de développer une analyse complète des dispositions en débat. Si elles ne sont pas toutes inintéressantes, je regrette leur caractère globalement classique : il traduit bien la difficulté du choix entre le souhaitable et le possible, qui se fait surtout au détriment du souhaitable.
Le temps m'étant compté, je me bornerai à vous faire part, madame, de mes inquiétudes sur la situation du logement social, particulièrement sur les problèmes de financement des opérations de construction et de réhabilitation.
Il est vrai que la construction de logements aidés est en panne : vous l'avez reconnu en imaginant un plan de relance - le terme choisi confirme bien la notion de panne - et en affichant des objectifs plus réalistes que ceux des budgets des années précédentes, qui étaient systématiquement et largement démentis par les faits.
Force est de nous interroger ensemble sur cette constante et d'en rechercher les causes.
Louis Besson avait morigéné le mouvement HLM, qui, considérait-il, manquait de volontarisme. Vous-même avez souvent dit et répété que la crise de la construction sociale était due au refus de plusieurs villes d'accueillir ce type d'habitat, et la loi SRU a cru trouver une solution dans la coercition - que, pour ma part, je trouve toujours attentatoire aux libertés communales.
Je voudrais vous faire part de mon expérience de président d'OPAC et d'élu local et départemental en vous livrant une explication toute simple de la crise que nous déplorons tous et que vous cherchez - je vous en donne acte bien volontiers - à surmonter.
Le logement social est de la compétence de l'Etat. Or que constatons-nous depuis plusieurs années ? Le financement - quand il était PLA, ou maintenant qu'il est PLUS - ne permet pas aux organismes d'HLM d'assurer l'équilibre des opérations sans apport de fonds propres, fonds propres dont ils sont souvent bien démunis.
En matière de construction neuve, les organismes se sont donc naturellement tournés vers les collectivités locales, auxquelles ils demandent l'apport gratuit des terrains et des réseaux ; dans mon département, cet apport est évalué aujourd'hui à 80 000, voire à 100 000 francs par logement construit.
L'organisme que je préside a cependant réussi à convaincre près de la moitié des communes du département à coopérer de cette manière au développement d'un secteur locatif horizontal, architecturalement diversifié et géographiquement réparti, contribuant en outre à développer à proximité des bassins d'emplois une politique d'aménagement du territoire reconnue et appréciée.
Mais l'expérience a ses limites, et les maires se montrent de plus en plus réticents, en raison non pas de je ne sais quel ostracisme à l'égard des locataires du secteur aidé, mais tout simplement du coût financier que représente pour leur commune cet apport nécessaire à l'équilibre de l'opération.
En secteur urbain, le coût du foncier est dissuasif, et les villes importantes sont généralement réticentes, voire opposées, c'est vrai, à l'effort budgétaire que nous leur demandons, car les terrains dont elles disposent sont généralement recherchés, et la concurrence ne joue pas en faveur de nos organismes.
En matière de réhabilitation, comme de démolition, d'ailleurs, nous rencontrons les mêmes problèmes d'équilibre ; mais nous ne pouvons pas, car ce n'est pas la tradition dans ce domaine, recourir à l'aide des collectivités locales - même si, ici ou là, des conseils généraux, voire des conseils régionaux, définissent, hors compétence obligatoire, mais conscients de l'importance des besoins, des politiques d'aides ponctuelles à certaines opérations.
Si les financements par les prêts locatifs à usage social, les PLUS, étaient ajustés à la réalité économique et permettaient d'équilibrer nos opérations sans faire appel à l'aide des collectivités locales, nous pourrions construire deux fois plus de logements sociaux chaque année, si tant est, bien entendu, que l'exploitation des renseignements du numéro unique d'enregistrement des demandes en démontre le besoin.
Cette évidence est connue de tous les acteurs du logement social, et vous ne pouvez pas l'ignorer, madame la secrétaire d'Etat - votre prédécesseur ne l'ignorait pas.
Qu'attendons-nous pour adapter le financement aux besoins réels, et ce pour les trois secteurs de la construction sociale : la construction neuve, la réhabilitation et la démolition suivie de reconstruction ?
Vous avez la charge, madame, d'un secteur en crise grave. Nous ne construisons pas assez de logements,...
Mme Marie-Noëlle Lienemann, secrétaire d'Etat. 310 000 !
M. Marcel-Pierre Cleach. ... et nous avons des difficultés à faire de la réhabilitation, ce qui entraîne une vacance croissante alors même que la demande n'est pas satisfaite.
Je ne crois pas que les mesures ou demi-mesures ponctuelles suffisent à endiguer ce phénomène. Il vous faut, il nous faut - mais n'est-ce pas trop simple ? - adapter les financements aux réalités du marché, c'est-à-dire à l'évolution des prix de revient. Envisagez-vous de le faire ?
En liaison directe avec cette inquiétude sur l'avenir du logement social, je voudrais également vous interroger sur les utilisations multiples du 1 % logement.
Quel est l'avenir de l'accession sociale, dont la dotation prévisionnelle est concurrencée par d'autres grandes affectations ?
A quelle préoccupation réelle - je reprends sur ce point ce qui a été dit par un grand nombre d'orateurs - correspond la création de cette Société foncière qui s'intercalera entre les organismes d'HLM et le secteur privé pour réaliser des opérations qui pourraient relever du secteur marchand ou du mouvement HLM ? Est-ce une nouvelle usine à gaz ? Est-ce une demande émanant des collecteurs et destinée à aider leurs propres réseaux de sociétés de construction ? Pensez-vous que cette solution favorisera la mixité ?
Madame la secrétaire d'Etat, malgré les explications que vous nous avez fournies tout à l'heure, je ne comprends pas - et je vous remercie de bien vouloir éclairer le Sénat sur ce point - le bien-fondé de cette nouvelle institution, qui constitue la seule grande originalité contenue dans ce projet de budget, projet que je ne puis toutefois approuver dans la mesure où il ne comporte aucune revalorisation significative de l'aide à la construction.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.
Mme Marie-Noëlle Lienemann, secrétaire d'Etat. Monsieur le sénateur, votre question est ample, et ma réponse ne pourra être que schématique.
D'abord, il faut souligner que la construction va bien en France,...
M. Marcel-Pierre Cleach. La construction sociale !
Mme Marie-Noëlle Lienemann, secrétaire d'Etat. ... avec 300 000 logements construits, voire 310 000 - mais c'est là un niveau exceptionnel.
Une question stratégique se pose à notre pays. En effet, si l'on observe l'économie du logement, on constate sur la longue durée que, lorsque le logement privé se porte bien, le logement social se porte moins bien, et que, lorsque le premier enregistre une chute, le second vient en rattrapage.
Il faut que le logement social cesse de servir de variable d'ajustement.
Toutes les politiques qui ont été menées, que ce soit par des gouvernements de gauche ou de droite, que ce soit à court ou à long terme, ont conforté le logement social dans ce rôle de variable d'ajustement, permettant à la masse globale de la construction d'être maintenue à un niveau satisfaisant. Ce point est stratégique et doit être soulevé.
Le rapport de M. Cacheux devrait justement nous permettre de proposer de nouvelles pistes pour le financement du logement social dans le long terme, de façon à assurer la relance de ce secteur.
Cela étant, nous ne sommes plus en panne : la courbe de la construction remonte de plus de 10 % cette année. Mais vous n'ignorez pas qu'il s'agit d'un bateau lent : on ne décrète pas du jour au lendemain une augmentation de 25 % de la construction à l'échelon national !
Cependant, les contrats de relance qui ont été engagés se traduisent par une remontée permanente et significative, et leur financement a partiellement réglé la question du bouclage global des opérations.
Pourtant, nous revenons de loin, monsieur le sénateur : quand M. Périssol a supprimé toutes les aides à la pierre pour ne conserver que la mesure fiscale portant sur la TVA, nous avons enregistré une chute du financement qui a rendu impossible le bouclage des opérations. Par la suite, M. Besson a instauré le PLUS ; au même moment, du fait de la reprise de la construction, les coûts ont augmenté : coût du foncier d'un côté, coût de la construction de l'autre.
Il faut donc trouver une régulation économique pour que les budgets de l'Etat ne viennent pas sans cesse alimenter cette sorte de spéculation qui conduit à l'augmentation permanente des prix. Le sujet est complexe, mais nous nous attachons à le régler. Quoi qu'il en soit, nous ne sommes plus dans le creux de la vague, et je ne crois pas que l'on puisse parler de panne.
Un deuxième sujet important a été évoqué : celui de la contribution des collectivités locales. La question de la décentralisation fera l'objet, comme toujours, d'un grand débat national lors de la campagne pour l'élection présidentielle, temps fort de notre démocratie, et la question du logement devra être posée. Or je constate que peu nombreux sont ceux qui font des propositions en la matière. Tout le monde est d'accord pour décentraliser, mais dès qu'il s'agit de fixer des modalités concrètes, l'imagination se met soudainement à défaillir.
Or, on le constate à propos du logement, on le constate aussi à propos du seuil de 20 % de logements sociaux, une certaine autonomie des collectivités est nécessaire ; mais l'Etat doit aussi garantir la solidarité, sur laquelle repose le droit fondamental de tous les citoyens d'avoir un toit. C'est cette articulation entre la liberté locale et la garantie d'un logement pour tous, partout, dans un esprit de mixité, qui nous contraint à recourir à la loi, même si l'on peut le regretter. De ce point de vue, les zonages qu'évoquait M. Hérisson sont certainement l'un des éléments sur lesquels il serait possible d'agir rapidement.
Je souhaite maintenant m'expliquer rapidement sur l'institution de la société foncière. Je considère qu'une multitude d'outils sont nécessaires pour soutenir le logement social, car, si toute la charge pèse sur les seuls offices d'HLM, ceux-ci ne pourront pas faire face. Les investissements privés doivent prendre leur part et inventer de nouveaux outils pour répartir l'ensemble de la charge sociale - je n'aime pas ce terme de « charge » ! -, pour que l'effort de solidarité soit partagé entre les divers acteurs.
Il est fondamental que se mettent en place une complémentarité et une collaboration des différents acteurs, et je pense, monsieur le sénateur, que c'est là une piste pour l'avenir. En effet, l'investissement « pierre » doit être en mesure d'adosser le financement des retraites. Or vous remarquerez que, à travers cette société foncière, le pays disposera d'un fonds collectif alimenté par un prélèvement sur la richesse produite par les entreprises, et ce dans un double but social : d'une part, la mixité sociale et la réalisation de logements sociaux et très sociaux dans les zones urbaines, et, d'autre part, un abondement des fonds de répartition - puisqu'il s'agit de cela.
Nous sommes là sur une piste - il faudra peut-être en trouver d'autres - qui peut permettre au pays à la fois de faire davantage d'efforts en matière de logement, particulièrement en matière de logement social, et de renforcer son régime de retraite par répartition. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Marcel-Pierre Cleach. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Cleach.
M. Marcel-Pierre Cleach. En ce qui concerne l'équilibre des opérations - ce que j'ai appelé l'insuffisance du financement par opération -, le plan de relance va tout à fait dans le sens que je souhaite et, grâce à lui, nos dernières opérations sont équilibrées à un iota près. Mais il ne nous permet pas de renoncer, en zone rurale notamment, à demander aux collectivités locales les contributions et les terrains viabilisés que j'évoquais.
Un grand débat doit s'ouvrir : le logement social doit-il rester de la seule compétence de l'Etat, ou bien devons-nous tous « nous y mettre » ?
Le problème est résolu depuis très longtemps dans mon département : il s'agit, certes, d'une compétence d'Etat, mais nous travaillons tous ensemble à tirer la même charrette ; et je constate que cette attitude est en train de se généraliser à l'échelon national. Je crois comprendre que vous aussi allez dans ce sens et, quand nous nous rapprocherons de l'équilibre des opérations, les organismes d'HLM se porteront peut-être mieux.
Le débat sur la décentralisation est passionnant et mérite d'être porté à l'échelon national. Il nous faut tenir compte de votre préoccupation, madame le secrétaire d'Etat - et je m'en étais déjà entretenu avec votre prédécesseur -, qui est d'assurer l'égalité sur l'ensemble du territoire. Mais il est difficile d'y parvenir.
Votre réponse, madame le secrétaire d'Etat, me donne donc, au moins partiellement, satisfaction, parce que je constate que vous allez dans le bon sens.
M. le président. La parole est à M. Collin.
M. Yvon Collin. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, la loi relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage, mais aussi la réforme des aides à la personne, traduisent la volonté du Gouvernement de faire du logement une priorité ; il faut au demeurant reconnaître que le Gouvernement y est aidé par un contexte qui reste relativement favorable. L'examen des crédits consacrés à l'urbanisme et au logement dans le projet de loi de finances pour 2002 confirme votre souci de modernisation, et je m'en rejouis.
Les effets qu'induit la croissance, pour nos concitoyens, en matière de logement permettent de recentrer l'effort budgétaire sur les aides à la pierre. Je vous félicite pour ce choix, sachant que le logement social demeure l'une de vos préoccupations constantes.
Je souhaite toutefois exprimer à mon tour - car il faut « enfoncer le clou » - quelques-unes de mes inquiétudes relatives à la diminution de la dotation en faveur de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat. Nous savons que, en réponse aux nombreuses craintes exprimées par nos collègues de l'Assemblée nationale, vous avez accepté de l'abonder de 200 millions de francs en autorisations de programme et de 60 millions de francs en crédits de paiement. Ce complément sera-t-il suffisant, compte tenu des nouvelles missions confiées à l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat par la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains ?
J'aimerais en tout cas, madame la secrétaire d'Etat, que des garanties soient apportées concernant certains outils qui ont fait leurs preuves - et qui continuent à donner satisfaction - en matière d'amélioration du parc privé.
Je pense en particulier aux opérations programmées d'amélioration de l'habitat, les OPAC, dont les effets sont très bénéfiques sur le parc immobilier locatif. Ces programmes, qui sont un élément fort d'engagement des collectivités locales, sont essentiels à la revitalisation de certains quartiers. Les communes et communautés de communes comptent beaucoup sur les OPAC pour réhabiliter les logements privés et lutter contre l'insalubrité.
Cet outil est aussi un bon moyen de soutenir les PME-PMI locales et - même si, je le concède, l'abaissement du taux de la TVA à 5,5 % joue là un rôle primordial - d'améliorer rapidement la qualité du bâti existant. Plus de 30 000 logements ont ainsi été rénovés l'année dernière, raison pour laquelle les élus sont très attachés aux OPAC.
J'espère donc que l'accroissement des missions de l'ANAH ne se fera pas au détriment des opérations programmées.
Je comprends bien les réserves émises par la Cour des comptes au sujet du ciblage social des aides octroyées par l'ANAH. Celle-ci a une mission de service public et il est normal que les aides qu'elle verse ne constitue pas une aubaine pour le parc privé. Il convient donc de prendre en compte les observations de la Cour des comptes, et, partant, de renforcer les conditions d'attribution des aides et les modalités de leur contrôle.
Je souhaite à présent vous poser deux questions, madame la secrétaire d'Etat.
D'abord, est-il vrai que, comme on le laisse entendre ici ou là, 2 milliards de francs seront prélevés en 2003 sur le 1 % logement au profit des fonds d'épargne de la Caisse des dépôts et consignations ? La commission des finances et son président, M. Lambert, s'interrogent, madame la secrétaire d'Etat.
Ensuite, ne jugez-vous pas utile de porter les crédits de l'ANAH à un niveau lui permettant de continuer à faire face à ses missions ?
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Marie-Noëlle Lienemann, secrétaire d'Etat. Monsieur le sénataur, comme vous, je suis convaincue du rôle de l'ANAH en matière de réhabilitation et c'est pourquoi j'insiste sur le fait qu'il n'y a pas cette année de diminution de ses crédits.
L'an dernier, la subvention de l'ANAH s'élevait à 2,2 milliards de francs, celle de la PAH à 800 millions de francs, soit, au total, 3 milliards de francs, mais il était convenu avec l'ANAH et les gestionnaires de la PAH que les crédits utilisés s'élèveraient en réalité à 2,7 milliards de francs. Personnellement, j'ai souhaité que l'argent disponible soit dépensé et que l'on ne procède donc pas à un gel des crédits. Au total, on parviendra ainsi cette année à 2,9 milliards de francs et la grande ANAH disposera donc objectivement de davantage de moyens pour effectuer les mêmes missions, puisque j'inclus les crédits de la PAH.
Par ailleurs, j'insiste sur le fait qu'il faut ajouter à ces 2,9 milliards de francs les aides à la réhabilitation, en particulier la TVA à 5,5 % et le crédit d'impôt de 15 % pour les améliorations thermiques et l'isolation. De nombreuses réhabilitations dans le champ de la PAH bénéficient en effet de ces mécanismes. Vous avez bien voulu reconnaître par ailleurs que la réduction du taux de la TVA constituait un fantastique moteur pour la réhabilitation.
Votre autre question portait sur le prélèvement opéré par l'Etat sur le 1 % logement. Je rappelle que, pendant des années, les prélèvements de l'Etat ont été considérables. Peu importe la forme qu'ils ont pu revêtir, mais le prélèvement non budgétisé de 7 milliards de francs opéré par M. Périssol pour financer le prêt à taux zéro constituait bien un prélèvement d'Etat.
On affecte une certaine somme à une mission qui n'est plus financée par l'Etat puisque les PAP ont été supprimés, somme que l'on prélève sur le 1 %. Le prêt à taux zéro est en fait rebudgétisé et le prélèvement au titre du renouvellement urbain, qui s'élèvera à quelque 3 milliards de francs, s'étalera sur les cinq années que recouvrent les conventions. Le prélèvement sur le fonds du 1 % est donc dérisoire par rapport à ce qui se faisait jusqu'à présent.
Je ne veux d'ailleurs pas que l'on insiste trop sur le fait qu'il est relativement faible, car la tentation d'y recourir est déjà trop fréquente quand les moyens de l'Etat sont limités, et ils le sont toujours au regard des besoins !
Les partenaires qui gèrent le 1 % logement ont beaucoup tenu à respecter les conventions car ils sont convaincus de la détermination du Gouvernement et, je l'espère, du Parlement à ne pas opérer de prélèvement sur ces fonds et à affecter correctement ceux-ci.
Enfin, s'agissant des crédits de l'ANAH, toutes les observations de la Cour des comptes sur le ciblage social et sur l'habitat indigne font l'objet d'une sorte de contractualisation, en tout cas d'un accord de l'ANAH, pour orienter ces crédits vers les priorités du Gouvernement en respectant les observations de la Cour des comptes.
M. Yvon Collin. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Collin.
M. Yvon Collin. Je remercie Mme la secrétaire d'Etat du volontarisme qu'elle affiche dans ses propos et dans son projet de budget. Je précise, car je ne l'avais pas dit, que je voterai bien entendu celui-ci.
Je tenais à exprimer nos interrogations en la matière, et je vous remercie des réponses que vous y avez apportées, madame la secrétaire d'Etat.
Votre volontarisme ne doit pas se démentir, car l'habitat est un formidable moteur de cohésion sociale. A ce propos, j'ai pris bonne note de votre volonté d'éradiquer les marchands de sommeil, encore trop nombreux dans notre pays.
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures quinze.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures cinq, est reprise à quinze heures quinze, sous la présidence de M. Hoeffel.)