SEANCE DU 8 OCTOBRE 2002


« 1° Une première part, qui ne peut-être inférieure à la moitié du total, est répartie à parts égales entre les auteurs et les éditeurs ayants droit des auteurs à raison du nombre des exemplaires de chaque ouvrage achetés chaque année, pour leurs bibliothèques accueillant du public pour le prêt, par les personnes mentionnées au b de l'article 3 de la loi n° 81-766 du 10 août 1981 relative au prix du livre ;
« 2° Une seconde part est affectée à la prise en charge d'une fraction des cotisations dues au titre de la retraite complémentaire par les auteurs d'une oeuvre de l'esprit définie au 1° de l'article L. 112-2 du code de la propriété intellectuelle, affiliés au régime général en application de l'article L. 382-1 du code de la sécurité sociale. Cette fraction ne pourra excéder la moitié des cotisations dues en application de l'article L. 382-12 du code de la sécurité sociale. »
« II. - L'article L. 335-4 est complété par les dispositions suivantes :
« Est puni d'une peine d'amende de 100 000 EUR le fait de ne pas verser la rémunération due à l'auteur et à l'éditeur ayant droit de l'auteur au titre du prêt en bibliothèque et prévue au troisième alinéa de l'article L. 351-3. »
« III. - L'article L. 811-1 est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art. L. 811-1. - Les dispositions du présent code sont applicables à Mayotte à l'exception du quatrième alinéa de l'article L. 335-4 et des articles L. 351-1 à L. 351-4 et sous réserve des adaptations prévues aux articles suivants. Sous la même réserve, elles sont applicables en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna, dans les terres Australes et Antarctiques françaises et en Nouvelle-Calédonie à l'exception du quatrième alinéa de l'article L. 335-4 et des articles L. 351-1 à L. 351-4, L. 421-1 à L. 422-10 et L. 423-2. »
L'amendement n° 1, présenté par M. Eckenspieller, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Rédiger ainsi les trois premiers alinéas du I de cet article :
« Le titre III du livre Ier est complété par un chapitre III ainsi rédigé :
« Chapitre III
« Rémunération au titre du prêt en bibliothèque. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Daniel Eckenspieller, rapporteur de la commission des affaires culturelles. Le projet de loi vise à insérer le dispositif relatif au droit de prêt au sein du livre III du code de la propriété intellectuelle. Ce livre comporte des dispositions communes au droit d'auteur et aux droits voisins auxquelles ont été ajoutées, en 1998, celles qui sont relatives aux droits des producteurs de bases de données.
Aucun argument ne justifie cette insertion alors que le dispositif relatif au droit de prêt est relatif aux conditions d'exercice d'un droit d'auteur et ne concerne en aucun cas les droits voisins. Je vous propose donc d'insérer ce dispositif au sein du livre premier du code consacré au droit d'auteur sous la forme d'un chapitre nouveau qui viendra compléter le titre III relatif à l'exploitation des droits.
L'adoption de cet amendement entraînera une modification de la numérotation des articles que le projet de loi vise à insérer dans le code.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jacques Aillagon, ministre. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1.

(L'amendement est adopté.)

ARTICLE L. 351-1
DU CODE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE

M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 2 rectifié, présenté par M. Eckenspieller, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Rédiger ainsi le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 351-1 du code de la propriété intellectuelle :
« Art. L. 133-1. - Lorsqu'une oeuvre a fait l'objet d'un contrat d'édition en vue de sa publication et de sa diffusion sous forme de livre, l'auteur ne peut s'opposer au prêt d'exemplaires de cette édition par une bibliothèque accueillant du public.
« Ce prêt ouvre droit à rémunération au profit de l'auteur. Les conventions relatives au partage de cette rémunération entre l'auteur et l'éditeur ne peuvent prévoir d'attribuer à l'éditeur une part excédant la moitié du montant visé au deuxième alinéa (1°) de l'article L. 133-4. »
L'amendement n° 28, présenté par MM. Renar et Ralite, Mme David, M. Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
« Dans le dernier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 351-1 du code de la propriété intellectuelle, après les mots : "de l'auteur", insérer les mots : ", du traducteur". »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 2 rectifié.
M. Daniel Eckenspieller, rapporteur. Outre des précisions rédactionnelles, cette nouvelle rédaction a deux objectifs : d'une part, préciser le champ d'application de la licence légale et, d'autre part, dissiper l'ambiguïté que laisse subsister le projet de loi sur l'identité du titulaire du droit à rémunération.
En effet, le projet de loi définit le champ de la licence légale par référence aux oeuvres visées par le 2° de l'article L. 112-2 du code de la propriété intellectuelle, c'est-à-dire « les livres, brochures, et autres écrits littéraires, artistiques et scientifiques ».
Cette référence est à la fois source d'incertitude, notamment en ce qui concerne le régime applicable à la presse et aux revues, et trop limitative en excluant des oeuvres qui, bien que mentionnées dans d'autres alinéas de cet article, telles les oeuvres photographiques, peuvent être imprimées et publiées sous forme de livres.
Je vous proposerai donc de viser les oeuvres ayant fait l'objet d'un contrat d'édition en vue de leur publication et de leur diffusion sous forme de livre, ce qui a le mérite de la clarté et écarte l'édition de presse du champ de la licence légale.
En prévoyant que « le prêt ouvre droit à rémunération au profit de l'auteur et de l'éditeur ayant droit de l'auteur », le projet de loi introduit une confusion à deux titres.
Il laisse à penser que l'auteur pourrait céder son droit de prêt à l'éditeur, ce qui est exclu dans un mécanisme de licence légale qui prive l'auteur de l'usage du droit exclusif.
Par ailleurs, il pourrait être interprété comme reconnaissant un droit propre à l'éditeur, ce qui n'entre dans les intentions ni des rédacteurs du projet de loi ni des éditeurs.
Afin de dissiper ces ambiguïtés, je vous proposerai donc d'affirmer que le droit à la rémunération est reconnu au bénéfice du seul auteur. Il ne peut en être autrement dans la mesure où la rémunération vient compenser l'impossibilité pour l'auteur d'exercer son droit exclusif.
Pour autant, la commission des affaires culturelles n'a pas contesté la légitimité d'un partage de la rémunération entre l'auteur et l'éditeur. Simplement ce partage ne peut s'effectuer que dans le cadre conventionnel, en pratique dans celui du contrat d'édition.
Dans le souci de garantir les droits des auteurs dans une négociation où les rapports de force peuvent jouer à leur désavantage, il semble préférable de prévoir que la part revenant à l'éditeur ne peut excéder la moitié du montant total perçu par l'auteur.
En pratique, le mécanisme que je vous propose aboutira au même résultat que celui qui est prévu par le projet de loi.
En effet, il est vraisemblable qu'une clause sera introduite dans le contrat type de l'édition afin de prévoir un partage de la rémunération dont les conditions ne seront probablement pas différentes de celles qui sont prévues par le texte qui nous est soumis.
La rédaction proposée par l'amendement a le mérite, me semble-t-il, d'être en cohérence avec les dispositions du code de la propriété intellectuelle relatives au droit d'auteur. Par ailleurs, elle s'avère plus protectrice pour les auteurs, car l'éditeur ne pourra exiger, dans le cadre du contrat d'édition, que l'auteur lui rétrocède sa part de rémunération.
Enfin, je relève que cette rédaction ne reprend pas la définition du prêt empruntée à la directive du 19 novembre 1992 dans la mesure où le code civil suffit à le distinguer d'autres formes d'usage.
M. le président. La parole est à M. Ivan Renar, pour présenter l'amendement n° 28.
M. Ivan Renar. En fait, pour ne pas abuser de la patience de mes collègues, je défendrai les trois amendements relatifs aux traducteurs, même s'ils concernent différents articles du code de la propriété intellectuelle.
Les traducteurs sont considérés comme les auteurs de la traduction et je pense à la Société des gens de lettres. Les discussions que nous avons pu avoir avec les traducteurs, qu'ils fassent partie de l'Association des traducteurs littéraires de France, de la Société française des traducteurs, ou d'autres encore, ou qu'ils ne soient pas organisés, nous ont fait prendre conscience de la particularité de ces auteurs de textes écrits et de leur difficulté à faire entendre, reconnaître et exécuter leurs droits auprès des éditeurs en particulier. Comprenez-le bien, il s'agit non pas ici de revenir sur le consensus auquel est parvenu le Gouvernement pour élaborer ce projet de loi, mais de faire apparaître clairement un des acteurs fort de la circulation de l'écrit dans la chaîne du livre.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Daniel Eckenspieller, rapporteur. L'amendement n° 28 est incompatible avec l'amendement n° 2 rectifié de la commission.
Je ferai toutefois observer que les traducteurs ont incontestablement la qualité d'auteur, de même que les illustrateurs ou encore les commentateurs qui, si l'amendement était adopté, se trouveraient exclus du bénéfice du dispositif proposé dans le projet de loi.
La préoccupation des auteurs de l'amendement est en fait satisfaite par la rédaction de l'amendement de la commission, lequel vise toutes les catégories d'auteur. A la page 16 de mon rapport, je me réfère de manière explicite aux traducteurs pour distinguer leur situation de celle des illustrateurs et des photographes qui disposent déjà d'un régime de retraite complémentaire.
Enfin, l'amendement n° 3 de la commission, qui vise à exiger pour l'agrément des sociétés de perception et de répartition des droits que soit respectée la diversité des associés, répond précisément au souci de voir représentées les différentes catégories d'auteurs, traducteurs compris.
Par conséquent, la commission émettrait un avis défavorable à l'amendement n° 28 si M. Renar ne le retirait pas.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jacques Aillagon, ministre. L'amendement n° 2 rectifié améliore la rédaction du projet de loi, notamment en ce qui concerne la définition du type d'oeuvres ouvrant droit à rémunération et l'articulation avec la notion de livre en tant que support servant d'assiette à cette rémunération.
Le Gouvernement considère que, dans cette définition, la notion de livre recoupe celle de la loi du 10 août 1981 relative au prix du livre. Néanmoins, la définition du prêt figurant au deuxième alinéa du texte du Gouvernement, si elle n'est pas strictement nécessaire à l'application de cette loi, permet de mieux encadrer l'activité des bibliothèques.
Par ailleurs, l'amendement n° 2 rectifié touche à des points essentiels à l'équilibre du projet de loi, à savoir la répartition de la rémunération entre auteurs et éditeurs et le versement d'une partie de la rémunération aux éditeurs, versement justifié par le risque économique qu'ils assument et par les usages en cours dans la profession, qui les font bénéficier de la moitié des droits dérivés de l'exploitation de l'oeuvre. En fixant par la loi une clé de répartition, l'intention du Gouvernement, en accord avec les auteurs eux-mêmes, était d'éviter des négociations, sans doute longues et difficiles, avec les éditeurs, qui pourraient conduire à bloquer ou ralentir le versement effectif des droits.
Ayant appelé votre attention sur les difficultés que suscite cette rédaction, le Gouvernement s'en remet toutefois, à ce stade de l'examen du projet de loi, à la sagesse du Sénat.
Sur l'amendement n° 28, je me range à l'analyse de M. le rapporteur. Les traducteurs, qui, étant des auteurs à part entière, font l'objet de la plus grande attention de la part du ministère de la culture, sont concernés par ce projet de loi. Il n'y a donc pas lieu de prévoir d'aménagement particulier en leur faveur, leurs droits étant totalement pris en compte et défendus.
M. le président. La parole est à Mme Danièle Pourtaud contre l'amendement n° 2 rectifié.
Mme Danièle Pourtaud. Malgré les explications de M. le rapporteur, je continue à craindre que la rédaction qu'il propose ne remette en cause le principe de la licence légale ou qu'elle ne fasse cohabiter deux régimes - d'un côté licence légale, de l'autre côté convention, contrat d'édition - qui ne pourront que difficilement coexister.
Par ailleurs, je demande à M. le rapporteur ce qu'il adviendra des contrats d'édition déjà signés, déjà en cours, s'il n'y a plus de licence légale. Je crains qu'un tel dispositif n'affaiblisse la portée juridique du projet de loi. C'est la raison pour laquelle il est préférable, me semble-t-il, de s'en tenir à la rédaction initiale.
M. le président. La parole est à Ivan Renar.
M. Ivan Renar. Je vais me rendre aux arguments développés avec une patience inlassable par M. le rapporteur. Il a tout fait pour m'expliquer que j'avais tort, mais il a bien compris que l'amendement n° 28 était un texte de témoignage, en quelque sorte, pour les traducteurs. Je ne veux pas prendre le risque de rouvrir un débat complexe. Par conséquent, je voterai l'amendement n° 2 rectifié présenté par la commission et je retire les amendements n°s 28 et 29.
M. le président. L'amendement n° 28 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 2 rectifié.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, le texte proposé pour l'article L. 351-1 du code de la propriété intellectuelle est ainsi rédigé.

ARTICLE L. 351-2
DU CODE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE

M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 3, présenté par M. Eckenspieller, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Rédiger ainsi le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 351-2 du code de la propriété intellectuelle :
« Art. L. 133-2 . - La rémunération prévue par l'article L. 133-1 est perçue par une ou plusieurs des sociétés de perception et de répartition des droits régies par le titre II du livre III et agréées à cet effet par le ministre chargé de la culture.
« L'agrément prévu au premier alinéa est délivré en considération :
« - de la diversité des associés ;
« - de la qualification professionnelle des dirigeants ;
« - des moyens que la société propose de mettre en oeuvre pour assurer la perception et la répartition de la rémunération au titre du prêt en bibliothèque ;
« - de la représentation équitable des auteurs et des éditeurs parmi ses associés et au sein de ses organes dirigeants.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions de délivrance et de retrait de cet agrément. »
L'amendement n° 29, présenté par MM. Renar et Ralite, Mme David, M. Autain et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« I. - Dans le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 351-2 du code de la propriété intellectuelle, après les mots : "pour le compte des auteurs", insérer les mots : "des traducteurs".
« II. - Dans le même texte, après les mots : "équitable des auteurs", insérer les mots : "des traducteurs". »
Je rappelle que l'amendement n° 29 a été précédemment retiré par son auteur.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 3.
M. Daniel Eckenspieller, rapporteur. Cet amendement tend à préciser les critères d'octroi de l'agrément des sociétés appelées à percevoir et à répartir la rémunération au titre du droit de prêt. En effet, la référence faite par le projet de loi aux exigences requises par l'article L. 122-12 du code de la propriété intellectuelle n'est pas pertinente dans la mesure où certaines d'entre elles sont propres au droit de reproduction par reprographie.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jacques Aillagon, ministre. Favorable.
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.
M. Michel Charasse. Sauf erreur de ma part, pour la première fois, on voit apparaître, en ce qui concerne les sociétés de perception, un régime d'agrément. C'est une grande nouveauté, monsieur le rapporteur ! En effet, jusqu'à présent, le ministre était plutôt muet à cet égard : on lui envoyait les documents et il en prenait acte, sans plus.
La commission que nous avons créée ici - le texte a été définitivement adopté en 2000 - qui est en place et qui est présidée par un magistrat de la Cour des comptes qui contrôle les sociétés de droit, aura compétence pour contrôler les sociétés qui sont visées dans le présent texte.
Certes, j'aurais pu proposer un sous-amendement, mais je ne veux pas encombrer le débat. L'amendement n° 3 de notre rapporteur prévoit in fine qu'un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions de délivrance et de retrait de cet agrément. Dès lors, est-il impensable d'imaginer qu'avant d'accorder l'agrément on puisse consulter le dernier rapport de la commission dont je parlais il y a un instant ou la commission elle-même en ce qui concerne la gestion de la société, même si ce cela ne figure pas dans la loi ? Si, véritablement, sa gestion financière fait l'objet de critiques lourdes, ce pourrait être un motif de ne pas accorder l'agrément. Rien, me semble-t-il, n'interdit de prévoir dans le décret la consultation de cette commission.
M. le président. Sauf avis contraire, on peut estimer que l'interprétation donnée par M. Charasse est à considérer comme applicable.
Je mets aux voix l'amendement n° 3.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, le texte proposé pour l'article L. 351-2 du code de la propriété intellectuelle est ainsi rédigé.

ARTICLE L. 351-3
DU CODE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE

M. le président. L'amendement n° 4, présenté par M. Eckenspieller, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Au début du huitième alinéa du I de cet article, remplacer la référence : "L. 351-3" par la référence : "L. 133-3". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Daniel Eckenspieller, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de conséquence.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jacques Aillagon, ministre. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 4.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 5, présenté par M. Eckenspieller, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Au premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 351-3 du code de la propriété intellectuelle, remplacer les mots : "au troisième alinéa de l'article L. 351-1" par les mots : "au second alinéa de l'article L. 133-1" ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Daniel Eckenspieller, rapporteur. C'est un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jacques Aillagon, ministre. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 5.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 6, présenté par M. Eckenspieller, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Rédiger ainsi le deuxième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 351-3 du code de la propriété intellectuelle :
« La première part, à la charge de l'Etat, est assise sur une contribution forfaitaire par usager inscrit dans les bibliothèques accueillant du public pour le prêt, à l'exception des bibliothèques scolaires. Un décret fixe le montant de cette contribution, qui peut être différent pour les bibliothèques des établissements d'enseignement supérieur, ainsi que les modalités de détermination du nombre d'usagers inscrits à prendre en compte pour le calcul de cette part. »
Le sous-amendement n° 26 rectifié, présenté par Mmes Pourtaud et Blandin, MM. Dauge, Godefroy, Lagauche, Todeschini, Weber et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
« Compléter le texte proposé par l'amendement n° 6 pour le deuxième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 351-3 du code de la propriété intellectuelle par la phrase suivante : "Ce décret s'appliquera au premier jour du deuxième mois suivant la publication de la présente loi au Journal officiel ." »
La parole et à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 6.
M. Daniel Eckenspieller, rapporteur. Cet amendement tend à préciser la rédaction des dispositions relatives aux modalités de calcul de la part de la rémunération à la charge de l'Etat qui sera versée chaque année sur la base d'une contribution forfaitaire par usager inscrit dans les bibliothèques accueillant du public pour le prêt. C'est non pas le calcul qui est forfaitaire, mais la dotation annuelle par abonné.
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, pour présenter le sous-amendement n° 26 rectifié.
M. Jean-Marc Todeschini. Le projet de loi prévoit une rémunération des auteurs et éditeurs pour le prêt en bibliothèque de leurs oeuvres. Il prévoit également d'affecter une partie des fonds ainsi dégagés pour abonder les cotisations dues au titre de la retraite complémentaire des auteurs.
Le législateur a souhaité que le prêt soit payé selon deux sources : d'abord, une taxe de 6 % assise sur le prix des ventes des ouvrages aux bibliothèques et versée par les grossistes et les libraires ; ensuite, une part forfaitaire versée par l'Etat qui sera fonction chaque année du nombre d'usagers des bibliothèques et pourra varier selon qu'il s'agit d'une bibliothèque universitaire ou non.
Le dernier article de la loi prévoit une application quasi immédiate du dispositif, tempérée par notre rapporteur : il a préféré, par réalisme, différer l'entrée en vigueur des dispositions au premier jour du deuxième mois suivant la publication de la loi au Journal officiel.
Des fonds permettant de fournir une rémunération et une retraite complémentaire aux auteurs - et éditeurs, dans le premier cas - devraient donc être très rapidement dégagés au titre du prêt en bibliothèque, du moins pour ce qui concerne la part à la charge des fournisseurs.
La part de l'Etat n'est, pour le moment, que posée dans son principe par le projet de loi. En effet, c'est un décret d'application qui, aux termes de l'article L. 351-3, fixera son mode de calcul et ses modalités de versement. Je ne veux pas présupposer de la mauvaise volonté du pouvoir réglementaire, mais vous savez tout aussi bien que moi que les décrets d'application des lois mettent souvent des mois, voire des années, à être pris, quand ils le sont !
Seule la part à la charge des fournisseurs sera immédiatement applicable. Elle ne permettra pas de fournir, à elle seule, une rémunération satisfaisante aux bénéficiaires de ce droit.
De plus, sera ainsi créée une inégalité, même momentanée, entre les deux parties au « prêt payé » et par rapport aux personnes morales gérant des bibliothèques, qui se verront immédiatement appliquer un plafonnement - certes progressif la première année - des réductions consenties pour l'acquisition des ouvrages destinés au prêt.
Notre amendement tend donc à prévoir que le décret précisant les modalités de calcul et de versement de la part de l'Etat sera pris dans les meilleurs délais, c'est-à-dire à la même date que celle qui est prévue pour l'entrée en vigueur des dispositions de la loi ne nécessitant pas d'intervention du pouvoir réglementaire pour être applicables.
Pour toutes ces raisons, je vous demande de bien vouloir adopter le présent sous-amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Daniel Eckenspieller, rapporteur. Le fonds qui servira à alimenter la rémunération des auteurs est abondé par deux sources : une dotation de l'Etat et une participation de 6 % des fournisseurs. La participation des fournisseurs entrera automatiquement en application par la promulgation de la loi, alors que la dotation de l'Etat dépendra de la publication d'un décret.
Les auteurs du sous-amendement n° 26 rectifié semblent craindre que le décret qui fixe le montant et les modalités de la part de la rémunération incombant à l'Etat ne soit jamais publié ou que sa publication ne soit différée et qu'en conséquence la charge du droit de prêt ne repose sur le seul prélèvelement de 6 % versé par les fournisseurs.
Cette crainte paraît très largement infondée et l'on sait déjà que le projet de loi de finances prévoit des mesures nouvelles destinées à tenir compte du coût que doit assumer l'Etat au titre de la contribution forfaitaire.
Par ailleurs, la disposition prévue dans ce sous-amendement constitue une injonction et ne relève donc pas de la compétence législative.
Je pense que les uns et les autres souhaitent simplement que M. le ministre nous apporte l'assurance que le décret sera signé dans des délais convenables et que, par voie de conséquence, la loi pourra entrer en application dans sa totalité dans les délais les plus brefs possibles.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jacques Aillagon, ministre. En ce qui concerne le sous-amendement n° 26 rectifié, j'observe que la dissymétrie, en termes de calendrier, entre les deux modes de financement du droit de prêt n'est qu'apparente. Le plafonnement des rabais s'applique, certes, dès l'entrée en vigueur de la loi, mais il ne produit ses effets pour les établissements acquéreurs qu'au fur et à mesure de l'expiration des marchés en cours.
De même, l'Etat, quelle que soit la date de parution du décret fixant le mode de calcul de sa contribution, ne pourra verser cette dernière qu'à la première échéance.
En revanche, le calcul de la contribution de l'Etat partira bien du jour de l'entrée en vigueur de la loi, comme le rend d'ailleurs possible la mesure nouvelle prévue dans le projet de loi de finances pour 2003, tant au budget du ministère de la culture et de la communication pour les bibliothèques de prêt, qu'au budget du ministère de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche pour les bibliothèques univesitaires.
Le sous-amendement n° 26 rectifié me paraît donc inopérant pour accélérer le versement à la charge de l'Etat qui, en tout état de cause, pourra intervenir avant la mise en oeuvre complète du prêt payé à l'achat par les fournisseurs.
J'émets donc un avis défavorable sur ce sous-amendement.
Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 6. La rédaction proposée est en effet plus simple que celle qui figure dans le projet de loi et je remercie la commission de sa contribution à la clarification du texte.
M. le président. Monsieur Todeschini, le sous-amendement n° 26 rectifié est-il maintenu ? M. Jean-Marc Todeschini. A la suite des précisions apportées par M. le ministre, nous retirons ce sous-amendement.
M. le président. Le sous-amendement n° 26 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 6.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 7, présenté par M. Eckenspieller, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Rédiger ainsi le début de la première phrase du troisième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 351-3 du code de la propriété intellectuelle :
« La seconde part est assise sur le prix public de vente des livres achetés pour être prêtés par les personnes morales mentionnées au troisième alinéa (2°) de l'article 3 de la loi n° 81-766 du 10 août 1981 relative au prix du livre ; elle est versée... »
Le sous-amendement n° 37, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Dans le texte proposé par l'amendement n° 7, après les mots : "sur le prix public de vente", insérer les mots : "hors taxes". »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 7.
M. Daniel Eckenspieller, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de clarification.
La formulation retenue par le projet de loi risque d'exclure du champ du prélèvement certaines bibliothèques, en particulier les bibliothèques de fondations, ce qui ne semble pas justifié au regard des intentions des rédacteurs du texte.
La rédaction proposée permet de viser toutes les bibliothèques accueillant du public qui achètent des livres pour les prêter, quel que soit leur statut. Elle tient compte de la nouvelle rédaction que je vous proposerai à l'article 4 du projet de loi pour l'article 3 de la loi du 10 août 1981.
M. le président. La parole est à M. le ministre, pour présenter le sous-amendement n° 37 et pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 7.
M. Jean-Jacques Aillagon, ministre. Il convient de préciser, au niveau de la loi, la situation de la rémunération assise sur le prix public de vente des livres achetés pour le prêt à l'égard de la TVA. En effet, le dispositif ne doit pas léser les fournisseurs. C'est la raison pour laquelle le versement, par ces derniers, de 6 % du prix public doit être calculé sur une base hors taxe. A défaut, les fournisseurs acquitteraient une TVA sur un prix public taxe comprise sur lequel la TVA a déjà été prélevée. Tel est l'objet du sous-amendement n° 37.
Par ailleurs, le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 7.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Daniel Eckenspieller, rapporteur. Il apporte une précision utile. Par conséquent, la commission émet un avis favorable.
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 37.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. La parole est à Mme Danièle Pourtaud, pour explication de vote, sur l'amendement n° 7.
Mme Danièle Pourtaud. En fait, je ne suis pas certaine que l'amendement n° 7 soit d'une mise en oeuvre très aisée. Si effectivement les bibliothèques achètent principalement des livres pour les prêter, il leur est tout à fait habituel d'acheter des livres destinés à être consultés sur place. Aussi, limiter le champ d'application de la loi aux livres achetés pour être prêtés risque d'aboutir à un véritable casse-tête pour ceux qui auront à trier les livres selon qu'ils supporteront ou non la taxe. Par conséquent, nous sommes plutôt contre cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7, modifié.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 30, présenté par MM. Renar et Ralite, Mme David, M. Autain et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Dans la première phrase du dernier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 351-3 du code de la propriété intellectuelle, après les mots : "elle est versée par", insérer les mots : "les distributeurs et par". »
La parole est à M. Ivan Renar.
M. Ivan Renar. Le distributeur est le professionnel du livre qui passe contrat avec l'éditeur pour diffuser les stocks imprimés dans les réseaux dont il a la maîtrise et avec lesquels il a passé des accords, en particulier les libraires.
La chaîne du livre est devenue plus complexe pour ce qui est de l'approvisionnement des points de vente ou d'exploitation du livre. Les distributeurs doivent donc figurer, au même titre que les fournisseurs et les grossistes.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Daniel Eckenspieller, rapporteur. L'amendement ne correspond pas à l'objectif fixé, à savoir la compensation du coût du plafonnement des rabais pour les collectivités rurales. En effet, le montant du prélèvement n'est pas modifié - il reste fixé à 6 % -, l'amendement précisant seulement qu'il est assuré, certes par les fournisseurs, mais également par les distributeurs - catégorie dont on ne voit pas très exactement ce qu'elle recouvre - et d'ailleurs selon des modalités qui ne sont pas précisées.
La commission, qui s'est interrogée sur la portée exacte du dispositif proposé, a demandé aux auteurs de bien vouloir retirer leur amendement sur lequel, à défaut, elle ne pourra pas émettre un avis favorable.
M. le président. Monsieur Renar, l'amendement n° 30 est-il maintenu ?
M. Ivan Renar. Je dois faire amende honorable, monsieur le président ; je préfère en rire puisque, vous le savez, je suis du parti d'en rire avant tout. (Rires.) J'avais, en effet, promis à mes collègues, ce matin, lorsque nous avons examiné cet amendement en commission, que je le retirerais. Toutefois, perdu dans mon aventure de porteur de banderole, je l'avais maintenu. Je le retire donc maintenant.
M. le président. Une promesse est donc ainsi tenue ! (Sourires.)
L'amendement n° 30 est retiré.
L'amendement n° 31, présenté par MM. Renar et Ralite, Mme David, M. Autain et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« I. - Compléter le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 351-3 du code de la propriété intellectuelle par l'alinéa suivant :
« Les collectivités locales recevront de l'Etat une compensation budgétaire équivalant aux investissements nécessaires.
« II. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - Le droit de timbre sur les opérateurs en bourse est augmenté à due concurrence de la compensation budgétaire prévue à l'article L. 351-3 du code de la propriété intellectuelle. »
La parole est à M. Ivan Renar.
M. Ivan Renar. Tout à l'heure, dans la discussion générale, j'ai plaidé pour les collectivités territoriales, en particulier les municipalités, qui consacrent une part substantielle de leur budget, tant en investissement qu'en fonctionnement, à la bonne marche des bibliothèques et au développement de la lecture publique. Le plafonnement prévu du rabais doit entraîner des dépenses nouvelles. Or il a toujours été compris que l'Etat devait assurer la cohérence territoriale et le développement des réseaux de lecture publique. Il serait donc bon que les collectivités locales soient soulagées de ces nouvelles charges, et ce n'est pas notre président de séance, par ailleurs également président de l'Association des maires de France, qui me contredira.
M. le président. Vous me prenez par les sentiments, monsieur Renar !
M. Ivan Renar. Vous aurez remarqué que j'ai gagé cet amendement sur la spéculation en bourse !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Daniel Eckenspieller, rapporteur. Nous tous ici, élus locaux, partageons les mêmes préoccupations. L'amendement n° 31 prévoit un mécanisme de compensation, pour les collectivités locales, du coût du plafonnement des rabais.
Sur le principe de la compensation, j'observe que le projet de loi repose sur un équilibre, créant, pour les différents acteurs concernés à la fois des droits, s'agissant des auteurs, des éditeurs, des libraires et, bien sûr, des usagers des bibliothèques, mais également des obligations, pour l'Etat et pour les collectivités territoriales.
Nous avons accepté cet équilibre. Les charges incombant aux collectivités ne résultent pas, en l'occurrence, d'un transfert de compétences, mais sont la conséquence de la compétence qu'elles détiennent dans le domaine de la lecture publique.
S'agissant du dispositif lui-même, on peut s'interroger sur sa recevabilité comme, d'ailleurs, sur les modalités de calcul des sommes ouvrant droit à compensation.
Enfin, je note, accessoirement, que les achats de livres constituent non pas une dépense d'investissement mais une dépense de fonctionnement.
Donc, tout en prenant acte du souci louable des auteurs de l'amendement - souci qui est, d'ailleurs, partagé -, la commission a, pour des raisons que j'ai indiquées, donné un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jacques Aillagon, ministre. L'Etat, pour sa part, assume l'intégralité du prêt payé forfaitaire, et l'ensemble des collectivités et organismes dont relèvent les établissements acquéreurs se partagent la charge du prêt payé à l'achat, y compris l'Etat lui-même pour ses propres bibliothèques. Il m'aurait été infiniment agréable de faire plaisir à votre collègue Ivan Renar, mais j'ai le grand regret de devoir me ranger à l'avis de la commission.
Je le disais tout à l'heure, ce projet de loi est un texte d'équilibre, jusque dans le partage, entre les collectivités publiques, de la charge de la mise en place du droit de prêt dans les bibliothèques. L'Etat y contribue, les collectivités locales également et les fournisseurs sont, eux aussi, mis à contribution. Il convient donc de ne pas compromettre cet équilibre, qui me semble, au demeurant, aussi légitime que judicieux.
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse pour explication de vote.
M. Michel Charasse. Monsieur le président, je profite d'une façon un peu coquine de ce que le président de l'Association des maires de France est muet, lui qui, en cet instant, occupe le fauteuil de la présidence (Sourires) pour dire à notre collègue et ami rapporteur que les achats de livres ne sont pas un investissement, sauf le premier achat, lors de la création de la bibliothèque. Dans ce cas, au départ, la bibliothèque comporte forcément une dotation de livres que nous avons toujours admise au titre du fonds de compensation pour la TVA.
Je ne voulais pas laisser subsister cette ambiguïté. Le rapporteur le sait, naturellement, mais il vaut mieux que les choses soient dites plus clairement.
M. Daniel Eckenspieller, rapporteur. Merci, mon cher collègue.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 31.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article L. 351-3 du code de la propriété intellectuelle.

(Ce texte est adopté.)

ARTICLE L. 351-4
DU CODE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE

M. le président. Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 8, présenté par M. Eckenspieller, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Rédiger ainsi le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 351-4 du code de la propriété intellectuelle :
« Art. L. 133-4. - La rémunération au titre du prêt en bibliothèque est répartie dans les conditions suivantes :
« 1° Une première part est répartie entre les auteurs et, le cas échéant, les éditeurs de leurs oeuvres conformément aux conventions visées au second alinéa de l'article L. 133-1 et à raison du nombre d'exemplaires de ces oeuvres achetés chaque année pour le prêt par les personnes morales visées au troisième alinéa (2°) de l'article 3 de la loi n° 81-766 du 10 août 1981 précitée, déterminé sur la base des informations qu'elles fournissent à la ou aux sociétés mentionnées à l'article L. 133-2 ;
« 2° Une seconde part, qui ne peut excéder la moitié du total, est affectée à la prise en charge d'une fraction des cotisations dues au titre de la retraite complémentaire par les personnes visées au second alinéa de l'article L. 382-12 du code de la sécurité sociale. »
L'amendement n° 32, présenté par MM. Renar et Ralite, Mme David, M. Autain et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Dans le deuxième alinéa (1°) du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 351-4 du code de la propriété intellectuelle, remplacer les mots : "à parts égales" par les mots : "à 75 % et 25 %". »
L'amendement n° 33, présenté par MM. Renar et Ralite, Mme David, M. Autain et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Dans le deuxième alinéa (1°) du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 351-4 du code de la propriété intellectuelle, après les mots : "entre les auteurs", insérer les mots : "les traducteurs,". »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 8.
M. Daniel Eckenspieller, rapporteur. Cet amendement prévoit une nouvelle rédaction pour les dispositions relatives à la répartition des sommes perçues au titre du droit de prêt. Il précise que la répartition de la première part de la rémunération s'effectue entre auteurs et éditeurs conformément aux conventions passées à cette fin et sur la base des informations fournies par les bibliothèques à la ou aux sociétés de perception et de répartition agréées.
Cette rédaction ne reprend pas la précision selon laquelle la fraction des cotisations financée par le droit de prêt ne peut excéder 50 % du montant total de ces dernières, disposition qui trouve mieux sa place à l'article L. 382-12 du code de la sécurité sociale.
M. le président. La parole est à M. Ivan Renar, pour présenter les amendements n°s 32 et 33.
M. Ivan Renar. Les droits des auteurs doivent être mis arithmétiquement en valeur sans qu'ils ne soient jamais plus considérés comme les vassaux des droits de l'éditeur. Qu'un auteur cède un certain pourcentage de ses droits à l'éditeur ne fait pas de ce dernier un auteur : l'éditeur reste le maillon financier moteur de la chaîne du livre, certes, et c'est déjà beaucoup, mais cela ne suffit pas pour qu'il soit traité à égalité avec l'auteur. L'auteur doit enfin obtenir une reconnaissance réelle à part entière.
Après cet hymne à l'auteur, le dispositif de l'amendement paraît bien sec, puisqu'il s'agit tout simplement du rapport 75 %-25 % !
M. le rapporteur a manifesté une certaine inquiétude. Je pense, quant à moi, que nous pourrons tout de même trouver un terrain d'entente sur cette question, tout en préservant les droits des auteurs - et sans tuer les éditeurs !
Quant à l'amendement n° 33, je le retire.
M. le président. L'amendement n° 33 est retiré.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 32 ?
M. Daniel Eckenspieller, rapporteur. L'amendement n° 32 est incompatible avec l'amendement n° 8 de la commission.
Nous avons retenu un dispositif qui renvoie la détermination des modalités du partage de la rémunération aux conventions passées entre les auteurs et les éditeurs. Si nous avons pu entériner le rapport 50 %-50 %, ce n'est pas pour opter maintenant pour un 75 %-25 % ! Je remarque, d'ailleurs, que, si le partage du droit de prêt se fait effectivement à hauteur de 50 %-50 % il faut toutefois ajouter, pour les auteurs, la part prise en compte pour les cotisations de leurs régimes de retraite complémentaire, estimée, pour la première année, à environ 22 % du montant collecté. Dans les faits, pour les auteurs, nous ne serons guère éloignés du pourcentage que vous proposez, mon cher collègue !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jacques Aillagon, ministre. En ce qui concerne l'amendement n° 8, je m'en remets à la sagesse du Sénat, pour les mêmes raisons que celles que j'ai développées au moment de la présentation de l'amendement n° 2.
S'agissant de l'amendement n° 32, je rappelle que l'équilibre qui nous est proposé a été négocié, de façon cordiale, d'ailleurs, avec les éditeurs et les auteurs. Je précise, à ce propos, que l'ensemble du combat pour la mise en place du droit de prêt dans les bibliothèques a été mené solidairement par l'édition et par les auteurs ; le regretté Jérôme Lindon, président des Editions de Minuit, a joué un rôle prépondérant dans la reconnaissance de ce droit et dans l'élaboration de ce texte.
Pour ces raisons, là encore avec regret, monsieur Renar, je me range à l'avis de la commission.
M. le président. La parole est à Mme Danièle Pourtaud contre l'amendement.
Mme Danièle Pourtaud. Je trouve dommage de remettre en cause l'équilibre qui avait été trouvé, après des mois, des années, même, de négociations entre les différentes parties. Un tel équilibre, inscrit dans la loi, constituait effectivement une garantie pour les auteurs. Nous préférions le texte initial.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 8.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, le texte proposé pour l'article L. 351-4 du code de la propriété intellectuelle est ainsi rédigé et l'amendement n° 32 n'a plus d'objet.
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 9, présenté par M. Eckenspieller, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Rédiger ainsi le texte proposé par le II de cet article pour compléter l'article L. 335-4 du code de la propriété intellectuelle :
« Est puni de la peine d'amende prévue au premier alinéa le défaut de versement du prélèvement mentionné au troisième alinéa de l'article L. 133-3. »
L'amendement n° 34, présenté par MM. Renar et Ralite, Mme David, M. Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
« Dans le texte proposé par le II de cet article pour compléter l'article L. 335-4 du code de la propriété intellectuelle, après les mots : "peine d'amende", insérer les mots : ", suite au contrôle de l'administration fiscale,". »
L'amendement n° 35, présenté par MM. Renar et Ralite, Mme David, M. Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
« Dans le texte proposé par le II de cet article pour compléter l'article L. 335-4 du code de la propriété intellectuelle, après les mots : "due à l'auteur,", insérer les mots : "au traducteur,". »
Cet amendement a été retiré.
La parole est à M. le rapporteur pour défendre l'amendement n° 9.
M. Daniel Eckenspieller, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de précision.
Il nous semble préférable de ne pas faire mention de l'auteur et de l'éditeur dans cet article, puisque la rémunération profite également aux régimes de retraite complémentaire prévus à l'article 2.
Par ailleurs, il convient, me semble-t-il, de prévoir, pour cette infraction, la même peine d'amende, soit 150 000 euros - un million de francs -, que celle prévue par l'article L. 335-4 du code de la propriété intellectuelle pour les autres infractions qu'il vise, à savoir le défaut de versement de la rémunération prévue dans le cadre de la licence légale des phonogrammes du commerce et de la rémunération au titre de la copie privée.
M. le président. La parole est à M. Ivan Renar, pour présenter l'amendement n° 34.
M. Ivan Renar. Il s'agit d'un amendement de bon sens. Il nous paraît nécessaire de préciser puisqu'il y a amende qu'un contrôle préalable concernant le versement des rémunérations régulières sera exercé. L'administration fiscale nous paraît la mieux à même d'assurer ces contrôles et de rester en liaison avec le ou les organismes collecteurs.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Daniel Eckenspieller, rapporteur. La peine d'amende sera prononcée par la juridiction pénale. L'administration fiscale n'est pas compétente pour connaître de ces infractions, le prélèvement de 6 % n'ayant pas le caractère d'un impôt.
Comment les choses se passeront-elles concrètement ? La déclaration des montants à payer est faite par les acheteurs, c'est-à-dire par les responsables des bibliothèques. Il faut distinguer ceux qui font la déclaration et ceux qui sont redevables des 6 %. Autrement dit, la société de perception reçoit une déclaration indiquant le montant que lui doit un fournisseur donné. Il lui appartient ensuite de réclamer les sommes dues et de mettre en oeuvre les moyens nécessaires à leur recouvrement. Si ces sommes ne lui sont pas versées, la société de perception peut user de tous les moyens de droit, à la fois pour recouvrer sa créance et pour faire sanctionner les contrevenants.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jacques Aillagon, ministre. Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 9 et, comme la commission, défavorable à l'amendement n° 34.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 9.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 34 n'a plus d'objet.
L'amendement n° 10, présenté par M. Eckenspieller, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« I. - Dans la première phrase du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 811-1 du code de la propriété intellectuelle, remplacer les références : "L. 351-1 à L. 351-4" par les références : "L. 133-1 à L. 133-4". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Daniel Eckenspieller, rapporteur. C'est un amendement de conséquence.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jacques Aillagon, ministre. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 10.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de dix amendements présentés par M. Charasse.
L'amendement n° 15 est ainsi libellé :
« Compléter in fine l'article 1er par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - A. - Le premier alinéa de l'article L. 132-25 est complété par la phrase suivante : "Son montant est révisé tous les sept ans".
« B. - Le second alinéa de l'article L. 212-4 est complété par les dispositions suivantes : ", dont le montant est révisé tous les sept ans. La révision de la fraction de cette rémunération définie à l'article L. 212-6 est négociée individuellement entre l'artiste-interprète et le producteur. »
L'amendement n° 16 est ainsi libellé :
« Compléter in fine cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - A. - La dernière phrase de l'article L. 212-7 est supprimée.
« B. Les dispositions de l'article L. 212-7 du code de la propriété intellectuelle :
« 1° Ne sont pas applicables aux actes d'exploitation de l'interprétation d'un artiste-interprète décédé antérieurs à la date d'entrée en vigueur de la présente loi ;
« 2° Ne sont pas opposables à l'exploitation des oeuvres, fixations ou programmes en vue de la réalisation desquels les actes d'exploitation mentionnés au 1° ont été autorisés. »
L'amendement n° 17 est ainsi libellé :
« Compléter in fine cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - L'article L. 311-5 est ainsi rédigé :
« Art L. 311-5. - Les types de supports, les taux de rémunération et les modalités de versement de celle-ci sont déterminés par décret après avis d'une commission composée, pour moitié, de personnes désignées par les organisations représentant les bénéficiaires du droit à rémunération, pour un quart, de personnes désignées par les organisations représentant les personnes mentionnées au premier alinéa de l'article L. 311-4 et, pour un quart, de personnes désignées par les personnes représentant les consommateurs. »
L'amendement n° 18 est ainsi libellé :
« Compléter in fine cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - L'article L. 321-1 est complété par les dispositions suivantes :
« Les produits financiers des droits perçus bénéficient dans leur intégralité aux titulaires de ces droits.
« Les droits prescrits en application du troisième alinéa et les droits qui n'ont pu être versés à leurs titulaires en application des conventions internationales auxquelles la France est partie, ainsi que les produits financiers de ces droits, sont ajoutés, à la fin de chaque exercice, aux droits perçus pendant cet exercice. »
L'amendement n° 19 est ainsi libellé :
« Compléter in fine cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - Dans le premier alinéa de l'article L. 321-3, les mots : "sont adressés au ministre" sont remplacés par les mots : "sont soumis à l'agrément du ministre". »
L'amendement n° 20 est ainsi libellé :
« Compléter in fine cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - L'article L. 321-5 est ainsi rédigé :
« Art. L. 321-5. - L'information des associés est assurée dans les conditions prévues par l'article 1855 du code civil, aucun associé ne pouvant toutefois obtenir communication du montant des droits répartis individuellement à tout autre ayant droit que lui-même. »
L'amendement n° 21 est ainsi libellé :
« Compléter in fine cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - Les quatre premiers alinéas de l'article L. 321-9 sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé : « Ces sociétés utilisent à des actions d'aide à la création, à la diffusion du spectacle vivant et à des actions de formation des artistes 5 % des sommes provenant de la rémunération pour copie privée. »
L'amendement n° 22 est ainsi libellé :
« Compléter in fine cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - Il est inséré, après l'article L. 321-9, un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Les actions mentionnées au premier alinéa de l'article L. 321-9 s'entendent :
« 1° Pour l'aide à la création, des concours apportés à la création d'une oeuvre, à son interprétation, à la première fixation d'une oeuvre ou d'une interprétation sur un phonogramme ou un vidéogramme ;
« 2° Pour l'aide à la diffusion du spectacle vivant, des concours apportés à la production, à la représentation et à la promotion des spectacles vivants ;
« 3° Pour l'aide à la formation, des concours apportés à des actions de formation d'auteurs ou d'artistes-interprètes. »
L'amendement n° 23 est ainsi libellé :
« Compléter in fine cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - A. - Avant le premier alinéa de l'article L. 321-12, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :
« I. - Sont soumis à l'agrément du ministre chargé de la culture :
« a) Les modifications des statuts de la société de perception et de répartition des droits ;
« b) Tout projet d'opération immobilière ;
« c) Tout placement financier dont le montant excède 5 % des droits encaissés pendant l'année précédente. »
« B). - En conséquence, le premier alinéa de cet article est précédé de la mention : "II. - ". »
L'amendement n° 24 est ainsi libellé :
« Compléter in fine cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - Il est inséré, après l'article L. 321-12, un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Les sociétés de perception et de répartition des droits constituent, pour mener les actions de prévoyance, de solidarité et d'entraide bénéficiant à leurs associés ou à leurs ayants droit, des personnes morales de droit privé régies par les dispositions du code de la mutualité. »
La parole est à M. Michel Charasse, pour présenter les amendements n°s 15 à 24.
M. Michel Charasse. Mes chers collègues, je suis l'auteur d'une série d'amendements numérotés de 15 à 24, que nous examinons maintenant, d'un amendement n° 25, qui sera appelé ultérieurement. En ce qui concerne ce dernier amendement, je voudrais préciser d'ores et déjà que je le retire puisqu'il concerne l'avenir de la redevance audiovisuelle et qu'il sera mieux placé dans le projet de loi de finances pour 2003.
M. le président. L'amendement n° 25 est retiré.
Veuillez poursuivre, monsieur Charasse.
M. Michel Charasse. Dans le souci de ne pas encombrer excessivement les travaux du Sénat, je souhaite présenter en bloc, si le président en est d'accord, l'ensemble de ces amendements, afin que les choses soient bien cadrées.
M. le président. Le procédé bénéficie d'un préjugé très favorable !
M. Michel Charasse Nous débattons d'un texte qui concerne le prêt du livre, mais aussi les droits d'auteur. J'ai donc décidé de profiter de ce projet de loi pour signaler par amendements certains autres points touchant aux droits d'auteur qu'il faut régler à un moment ou à un autre.
Ces points sont, pour l'essentiel, le résultat de mes réflexions anciennes sur certains sujets, mais aussi et surtout de la lecture du prérapport de la commission de contrôle des sociétés d'auteurs instituée par la loi du 2 août 2000, et siégant aujourd'hui à la Cour des comptes. La commission est maintenant constituée et a entamé son travail l'année dernière. Elle a diffusé un premier prérapport qui n'est pas encore rendu public, mais qui circule sous le manteau. Je l'ai trouvé un matin dans mon casier postal, je vous le garantis, sans source d'origine. Il révèle un certain nombre de pratiques auxquelles le législateur ne peut pas être indifférent, dans la mesure où elles empêchent les auteurs de disposer de l'intégralité des droits qui leur sont légalement dus.
J'ai entendu les propos que M. le ministre a tenus tout à l'heure à la fin de sa réponse aux orateurs, en émettant le souhait que nos discussions s'en tiennent aujourd'hui au prêt du livre, mais en annonçant que nous aurions bientôt l'occasion de revenir à ces sujets. Je me contenterai donc d'un très bref survol.
L'amendement n° 15 prévoit d'instituer une révision plus régulière des contrats de cession de droits compte tenu de l'exploitation qui est tous les jours nouvelle quant aux techniques mises en oeuvre et que les auteurs qui ont cédé leurs droits ne pouvaient prévoir voilà dix, quinze ou vingt ans, lorsqu'ils ont signé la cession de droits.
C'est un vrai problème et les exploitations d'aujourd'hui sont beaucoup plus lucratives que les intéressés n'auraient pu l'imaginer à l'époque.
L'amendement n° 16 concerne le problème des héritiers qui ont été spoliés par la loi de 1985. J'y reviendrai à la fin de mon intervention.
Dans l'amendement n° 17, je propose une nouvelle formule pour la composition, très critiquée, de la commission Brun-Buisson.
L'amendement n° 18 est directement extrait du rapport que nous allons recevoir de la commission de contrôle. Il vise les pratiques peu convenables des sociétés de gestion des droits d'auteur qui encaissent des droits en début d'année, mais ne les versent aux auteurs qu'en fin d'année, ce qui leur permet de les garder en caisse. Ces droits génèrent des produits financiers qui ne sont jamais distribués au auteurs. Je pense, pour ma part, que ces produits font partie du patrimoine des auteurs et que leur rétention relève de l'escroquerie ou de l'abus de bien social. Par conséquent, il faudra bien un jour aborder et régler ce point.
S'agissant de l'amendement n° 19, je propose que les rapports entre le ministère de la culture et les sociétés de gestion de droits d'auteur soient modifiés et qu'il faille désormais l'agrément du ministre pour les statuts, et, non plus seulement sa simple information. A l'heure actuelle, le ministre reçoit les statuts, mais il n'a aucun pouvoir d'approbation ou de rejet. Et s'il s'avise de faire des observations, comme Mme Tasca l'a fait voilà quelques années pour la société des auteurs, compositeurs, éditeurs de musique, la SACEM, il se fait rabrouer et humilier en assemblée générale des sociétés, alors même que les dispositions en question peuvent être parfaitement illégales au regard du droit des sociétés, du droit commercial ou du droit de propriété.
Par l'amendement n° 20, je souhaite rappeler que nous avions beaucoup insisté dans cette enceinte pour que les auteurs bénéficient des mêmes droits de communication des documents que ceux qui existent dans les sociétés commerciales, dans les conditions prévues par l'article 1855 du code civil. Or les sociétés de gestion des droits d'auteur ont refusé d'appliquer les dispositions de l'article 1855 - qui ont été votées par le Parlement à l'unanimité - et Mme Tasca a cédé en prenant un décret illégal ! Ces sociétés refusent donc pour l'instant de donner aux auteurs un certain nombre d'informations sur leur gestion et sur la gestion de l'argent des auteurs. Il faut dire qu'à la lecture du rapport de la commission de contrôle installée auprès de la Cour des comptes on comprendra pourquoi !
Mais il n'empêche que cette pratique et le décret ne sont pas conformes à la loi et le Conseil d'Etat risque de les annuler dans les prochains jours s'il suit les conclusions de son commissaire du Gouvernement sur le recours dirigé contre le décret Tasca.
L'amendement n° 21 tend à mieux cadrer les conditions dans lesquelles les sociétés de droits peuvent extraire des droits d'auteur un certain nombre de sommes, afin de contribuer, paraît-il, à la création, à la formation, à l'animation et au spectacle, puisque le décret relatif aux modalités d'intervention des sociétés de droits a été annulé par le Conseil d'Etat.
C'est également l'objet de l'amendement n° 22. Monsieur le ministre, votre prédécesseur, Mme Tasca, a déféré aux pressions des sociétés et a immédiatement repris un nouveau décret quasiment identique au précédent.
J'ai entendu dire qu'il risquait d'être lui aussi annulé d'ici à quelques mois par le Conseil d'Etat, la violation de la loi et le détournement des fonds revenant aux auteurs étant évidents.
L'amendement n° 23 porte également sur la nécessité de recueillir l'agrément du ministre pour la modification des statuts, alors qu'il est seulement informé aujourd'hui, ainsi que son agrément pour toutes les grosses opérations immobilières.
Enfin, l'amendement n° 24 vise les sociétés de perception qui retiennent sur les droits d'auteur une partie des fonds revenant aux auteurs pour financer les oeuvres sociales collectives. Je pense que la moindre des choses serait que cette action ait un caractère mutualiste et soit soumise au même contrôle que les opérations des mutuelles, conformément aux dispositions du code de la mutualité.
J'en reviens à l'amendement n° 16. Si les sujets que j'ai évoqués peuvent toujours donner lieu à une réflexion, en revanche, l'amendement n° 16 me paraît beaucoup plus urgent ; c'est pourquoi je termine sur ce point.
Il s'agit d'un vieux débat qui a eu lieu dans cette enceinte à plusieurs reprises et je dois dire que j'avais obtenu à l'époque le soutien plus que moral, si je puis dire, du Sénat. Il s'agit d'une disposition de la loi de 1985, dite « loi Lang », disposant que les héritiers des artistes décédés sont déshérités et perdent donc les droits patrimoniaux venant de leur père ou de leur mère.
Cette spoliation de l'héritage est absolument contraire à la directive européenne sur les droits d'auteur. Mme Tasca, votre prédécesseur, monsieur le ministre, m'avait indiqué qu'elle avait créé le Conseil supérieur de la propriété intellectuelle et qu'elle allait lui demander d'examiner cette question en priorité. Le Conseil supérieur a donc été saisi de ce sujet. C'était d'ailleurs la première question qui lui a été soumise. Il a consulté le professeur Lucas, éminent spécialiste des droits d'auteur, qui a rédigé un rapport ne laissant aucun doute. Cette disposition est non seulement injuste et inéquitable, mais de surcroît totalement contraire à la directive européenne 93-98 et au droit de propriété.
J'ai résumé le plus brièvement possible l'objet de mes amendements. Je souhaiterais entendre M. le rapporteur et M. le ministre. Pour ma part, je suis prêt à faire preuve d'une certaine bienveillance s'ils sont eux-mêmes partisans d'un minimum d'ouverture, selon le principe du « donnant donnant ». (Sourires.)
En effet, ce ne sont pas là des problèmes négligeables. Lors de la prochaine publication du rapport de la commission de contrôle des sociétés, il faudra bien que le Gouvernement et le Parlement prennent leurs responsabilités pour tirer les conséquences d'un certain nombre d'analyses. Nous sommes là dans le domaine des droits d'auteur. Il s'agit du salaire de ceux qui travaillent et qui vivent des droits qu'ils perçoivent. Nous n'avons pas le droit de les spolier de leur rémunération.
Nous avons été très attentifs depuis le début de ce débat à bien préserver les droits des auteurs du livre de façon à recadrer le texte qui nous est soumis, comme la commission l'a proposé à plusieurs reprises d'ailleurs, pour clarifier les choses et éviter les pertes en ligne. Je pense que nous ne devons pas en rester là.
Le problème des héritiers est vraiment urgent. On ne peut continuer à spolier les enfants de Claude François, de Joe Dassin, de Coluche, et de quelques autres qui sont privés de tout droit sur les oeuvres de leur père, tout simplement parce que le législateur a décidé, aux termes de la « loi Lang » de 1985, que ces droits bénéficieraient à 100 % aux producteurs.
Je n'ai pas recherché les motifs qui ont présidé à cette disposition. Je suppose qu'il y en avait de sérieux et de légitimes, mais on ne voit pas lesquels ! En tout cas, quels qu'ils soient, il s'agit bien d'une expropriation. Si la loi de 1985 avait été soumise au Conseil constitutionnel, à mon avis, elle aurait été censurée sur ce point puisque, jusqu'à nouvel ordre, le droit républicain en France comporte aussi le droit de propriété !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Daniel Eckenspieller, rapporteur. Mon cher collègue, on a trop souvent reproché au législateur de faire des lois complexes et peu lisibles et d'introduire, à travers des amendements sans rapport direct avec le texte mis en débat, des dispositions n'ayant pas fait l'objet d'une concertation préalable suffisamment approfondie.
Tel est le cas pour les amendements déposés par notre éminent collègue, Michel Charasse, que nous savons inspiré par le souci constant et parfaitement louable de défendre les droits et les intérêts des créateurs, quels qu'ils soient.
Au demeurant, les problèmes auxquels il entend apporter des réponses méritent en effet un véritable débat de fond et, sans nul doute, un certain nombre de dispositions législatives nouvelles.
Aussi n'est-il pas inopportun que ces problèmes soient évoqués dans cette enceinte, sans qu'il nous paraisse cependant possible de les régler dans le cadre de la discussion du projet de loi sur le droit de prêt en bibliothèque. Le projet de loi relatif aux droits d'auteur dans la société de l'information devrait ouvrir dans cette perspective des possibilités plus adéquates.
Par ailleurs, sur divers points soulevés par notre collègue, la commission de contrôle permanente créée sur son initiative en 2000, devrait remettre incessamment son premier rapport au Parlement. Il paraîtrait judicieux d'en connaître les conclusions avant toute nouvelle initiative législative.
En conséquence, je saurais gré à notre collègue de bien vouloir retirer ses amendements au bénéfice des assurances que M. le ministre saura lui apporter, en particulier sur les droits des héritiers, problème auquel nous sommes également très sensibles.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jacques Aillagon, ministre. Je sais, et je partage, l'intérêt de M. Charasse pour la gestion des sociétés de perception et de répartition des droits et, au-delà de ces sociétés, pour la défense des droits des auteurs et des ayants droits de ces derniers.
Comme je l'ai dit tout à l'heure, monsieur Charasse, je suis très attaché à ce que le texte sur lequel nous avons travaillé ne soit pas alourdi par des amendements qui l'éloigneraient de sa cohérence et de son objet. Il est vrai que les points que vous soulevez ne sont pas totalement étrangers au domaine que nous avons abordé ; cependant, ils ne le recouvrent pas non plus totalement. Dans la mesure où nous aurons à délibérer dans quelques mois de l'application au droit français de la directive du 22 mai 2001 sur le droit des auteurs dans la société de l'information, je préférerais que nous puissions traiter de façon systématique, globale et cohérente, tous ces sujets importants qui me préoccupent également.
Au risque de vous décevoir, monsieur le sénateur, et quels que soient mon intérêt pour vos propositions et mon adhésion à l'esprit qui anime plusieurs d'entre elles, je rejoins donc la commission et j'émets un avis défavorable afin d'éviter que le présent texte ne s'égare trop loin de son objet principal.
Je veux néanmoins vous donner l'assurance que le ministère de la culture - comme le ministre lui-même - est à votre disposition, ainsi qu'à celle, bien sûr, de la commission, pour discuter de ces sujets qui vous tiennent à coeur. M. le président. La parole est à M. Michel Charasse.
M. Michel Charasse. Je dirai amicalement à notre rapporteur et à M. le ministre que ces amendements traitent du droit d'auteur et ne sont pas sans lien direct, au sens de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, avec le présent texte. Certes, ce dernier concerne le livre, mais il concerne aussi le droit d'auteur, et le droit d'auteur, c'est le droit d'auteur ! Je ne pense donc pas qu'il s'agisse de « cavaliers » - sinon, on l'aurait dit - au sens constitutionnel du terme.
Cependant, s'il est bien entendu que ces amendements ne seront pas à nouveau considérés comme des « cavaliers » en janvier lorsque nous procéderons à la transposition en droit français de la directive européenne sur le droit d'auteur, je veux bien faire un geste.
Monsieur le ministre, je vous en ai parlé en privé, je vous le redis, je souhaiterais vivement entendre de votre bouche qu'il est de votre intention de mettre fin à la situation scandaleuse faite aux héritiers des artistes disparus avant le terme de leurs droits par la loi de 1985.
Il n'est pas normal que ces héritiers, qui étaient des gamins à l'époque, qui ont grandi, mais qui vivent toujours, aient été spoliés des droits revenant à leur père ou à leur mère décédés au profit des producteurs. Si vous me dites, monsieur le ministre, que vous avez l'intention de régler cette question au mois de janvier dans la foulée de la transposition, je n'insisterai pas davantage aujourd'hui, mais vous comprendrez que je veuille en savoir en peu plus !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Jacques Aillagon, ministre. Monsieur le sénateur, je vous ai indiqué à quel point j'étais attaché à ce que, dans toutes les situations, les droits des auteurs, de leurs ayants droit, ainsi que des producteurs, puisqu'il s'agit de droits consécutifs à la mise en oeuvre matérielle du droit des auteurs, soient pris en compte et honorés, et, à cet égard, la situation que vous dénoncez est en effet anormale.
Chaque auteur « distille » des droits dans la production de son oeuvre, une partie de ces droits, les droits moraux, étant immatériels, d'autres étant matériels. Ces droits sont des droits patrimoniaux dont les héritiers de l'auteur doivent pouvoir jouir de la façon la plus normale possible.
Je m'engage donc, monsieur le sénateur, à ce que les questions que vous avez soulevées fassent l'objet d'un examen en collaboration avec la commission des affaires culturelles de votre assemblée et avec vous, puisque vous le souhaitez, et je m'engage à ce que la transposition de la directive du 22 mai 2001 en droit français soit l'occasion d'un vaste « balayage » de toutes les questions ayant trait au droit des auteurs et à son respect.
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse ?
M. Michel Charasse. Je retire d'emblée les amendements n°s 15, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23 et 24, mais je veux ajouter un commentaire sur l'amendement n° 16.
Monsieur le ministre, le conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique a confirmé que la situation des héritiers des artistes disparus avant le terme de leurs droits était contraire au droit européen. Si la Commission européenne est saisie, elle ne pourra donc que condamner la France - ce qui ne serait pas très drôle - et la mettre en demeure de mettre son droit interne en conformité avec le droit européen. Cependant, dans cette hypothèse, la modification sera rétroactive et les producteurs seront obligés de rembourser les droits qu'il touchent depuis l'entrée en vigueur de la loi de 1985 !
C'est cette situation que mon amendement n° 16 visait à éviter puisque la précaution était prise de préciser que le rétablissement des héritiers dans leurs droits ne concernerait pas le passé !
Il y a donc deux solutions et, pour ma part, je préférerais que le problème soit réglé par le législateur français ! En d'autres termes, cela me chagrinerait de devoir un jour prendre la plume pour appeler l'attention de la Commission européenne sur ce point. Je n'aime pas beaucoup que mon pays soit condamné par ces organismes internationaux,...
M. Emmanuel Hamel. Très bien !
M. Michel Charasse. ... même si je suis par ailleurs assez européen.
Monsieur le ministre, je ne vous connais pas encore ; je sais que nous avons beaucoup d'amis communs et l'on me dit du bien de vous dans beaucoup de milieux amicaux que nous fréquentons vous et moi. Je vous fais donc confiance - et je retire aussi l'amendement n° 16 -, mais j'espère que cette confiance ne sera pas déçue.
Le problème est réel, il faut le régler. Votre ministère a trop longtemps semblé être - et plus encore ! - le défenseur systématique des pratiques les plus contestables des sociétés d'auteurs pour ne pas devenir enfin, sous votre magistère, le défenseur des droits des auteurs.
M. Jacques Chaumont. Très bien !
M. le président. Les amendements n°s 15 à 24 sont retirés.
M. le président. La parole est à M. Yann Gaillard.
M. Yann Gaillard. Je m'étonne de ce que nous ayons reçu en séance, juste avant la discussion, une véritable philippique signée par l'ensemble des sociétés d'auteurs contre les amendements que M. Charasse vient de retirer et dont l'examen est reporté. Cette pression en séance me paraît quelque peu excessive et cela ne fait que me rendre plus sympathique l'initiative de notre collègue.
M. Michel Charasse. Merci !
M. le président. Je mets aux voix l'ensemble de l'article 1er, modifié.

(L'article 1er est adopté.)

Article 2