SEANCE DU 3 DECEMBRE 2002


L'amendement n° II-50, présenté par MM. Arthuis, Marini et Bourdin, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
« Réduire les crédits du titre III de 200 000 euros. »
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Joël Bourdin, rapporteur spécial. Il ne faut pas oublier que nous sommes ici dans le cadre d'une discussion budgétaire, et que le pacte de stabilité nous contraint à faire particulièrement attention, surtout lorsqu'un déficit de 2,6 % nous a été légué et que la norme européenne est de 3 %. Tout nous pousse à faire attention car, si la croissance fléchit un tout petit peu, nous atteindrons les 3 % de déficit avec toutes les conséquences que cela engendre, en termes de pénalités, notamment.
Par ailleurs, il faut savoir qu'un budget doit être sincère. Le ministre l'a rappelé tout à l'heure s'agissant du BAPSA, mais c'est valable pour tous les budgets.
Le Gouvernement ayant annoncé, en pleine discussion budgétaire, une moins-value de recettes de 700 millions d'euros, la commission des finances, pour ne pas alourdir le déficit, propose donc de réduire de 700 millions d'euros les dépenses.
Nous avons donc la douloureuse charge de proposer des réductions de dépenses. C'est aussi cela la discussion budgétaire ! (M. Bernard Piras proteste.)
La commission des finances a effectué une répartition des propositions qu'elle fera pour diminuer les prévisions de dépenses et nous avons proposé un certain nombre de réductions de dépenses pour le budget de l'agriculture.
Après quelques recherches, nous avons évidemment estimé que nous devions proposer des réductions dans les domaines où, apparemment, cela ne ferait pas de mal. Nous avons trouvé, et ce premier amendement porte sur le chapitre 36-20 « Enseignement agricole », à l'article 30 « Enseignement agricole public supérieur », et vise à diminuer les subventions de fonctionnement.
Nous avons choisi ce chapitre et cet article parce que nous nous sommes aperçus que, dans le passé, il y avait des reports de crédits. A quoi bon prévoir des crédits lorsque l'on traîne des reports de crédits ? C'est donc sans avoir le sentiment de nuire de quelque manière que ce soit à l'enseignement agricole public que nous proposons une diminution de 200 000 euros.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Hervé Gaymard, ministre. Je m'en remets à la sagesse de votre assemblée.
Je demande une marge de manoeuvre quant à la répartition de cette diminution en fonction de l'évolution des effectifs en 2003. Je souhaite en effet pouvoir avoir la latitude de répartir la baisse entre les deux articles de ce chapitre, compte tenu de l'évolution des effectifs et des besoins.
M. le président. La parole est à M. Bernard Piras, contre l'amendement.
M. Bernard Piras. Mon intervention ayant porté sur l'enseignement agricole, je me dois de m'exprimer sur cet amendement.
Au cours de la discussion générale, M. le ministre a parlé de l'enseignement agricole comme d'un « joyau ». Et ce joyau qu'est l'enseignement agricole, on essaie de le dilapider au nom du pacte de stabilité. On aurait pu choisir un autre secteur !
Chaque fois qu'il y a eu des économies à faire, le Gouvernement a orienté ses choix sur l'éducation nationale, la recherche et l'environnement, c'est-à-dire sur tous les domaines qui préparent l'avenir.
Je m'insurge donc contre cet amendement. Je souhaite bien évidemment que ces crédits soient maintenus et qu'il soit remédié aux carences, en postes notamment.
M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau, pour explication de vote.
M. Gérard Delfau. Je tiens à dire d'abord que, même s'il s'agit d'une mesure d'ordre général, il est heureusement des exceptions.
S'agissant du budget de l'agriculture, l'heure tardive et la présence de si nombreux sénateurs devraient vous inciter, monsieur le ministre, à faire exception à la règle.
Mais il y a, selon moi, plus significatif : le choix s'est porté, au hasard sans doute, sur l'enseignement agricole public supérieur.
Tout à l'heure, M. le ministre a dit que, s'agissant de l'enseignement privé du second degré, les augmentations de crédits étaient substantielles, et je ne les discute pas. S'agissant de l'enseignement supérieur privé, il nous a dit que les augmentations étaient significatives, et je ne les discute pas. S'agissant de l'enseignement agricole public supérieur, il nous a dit que les crédits étaient stables ce qui, traduit en langage parlementaire, signifie qu'ils sont à peine suffisants pour couvrir les besoins. Et par les propos qu'il vient de tenir, M. le ministre a bien montré qu'il nourrit lui-même quelques inquiétudes.
Le Sénat ferait preuve de sagesse en ne suivant pas sur ce point la commission des finances. Je crois que nous devrions, tous ensemble, refuser cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Naturellement, le groupe communiste républicain et citoyen s'opposera à cet amendement n° II-50, que je qualifierai de scandaleux. Il est en effet scandaleux de s'attaquer à l'enseignement agricole public supérieur en proposant cette diminution de crédits de 200 000 euros.
De la même façon, nous nous opposerons à l'amendement n° II-51.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Tout d'abord, je voudrais rendre hommage à M. le ministre qui a pris le temps nécessaire pour répondre à tous les intervenants dans ce débat qui nous concerne tous. Je tiens à saluer son ardeur, son enthousiasme et sa compétence.
Comme l'a rappelé notre excellent collègue, le rapporteur spécial M. Joël Bourdin, si la commission des finances prend cette initiative, c'est parce que, dans le cadre de cette discussion budgétaire, le Gouvernement, dans sa grande sagesse, a jugé opportun, en venant devant le Sénat, de préciser - c'était un fait nouveau - que les prévisions de recettes pour 2003 devaient être revues à la baisse à hauteur de 700 millions d'euros. Dans ces conditions, et en dépit de la contribution du Sénat qui, je vous le rappelle, a voté un amendement, sur proposition de la commission des finances, qui apporte annuellement à l'Etat 400 000 millions d'euros pendant quatre ans, il convient de donner un signe : le Sénat doit donc s'efforcer de contenir la dépense publique.
Nous avons consulté M. le ministre pour faire porter cet effort là où il apparaissait le moins contraignant pour la politique conduite par le Gouvernement.
Nous avons été tentés, dans un premier temps, de faire porter cet effort sur l'administration centrale, partant de l'idée qu'au fil des années les effectifs des administrations centrales n'avaient peut-être pas évolué au même rythme de la démographie agricole. Mais nous avons compris que des efforts étaient accomplis pour réorganiser l'administration centrale.
C'est dans ces conditions qu'une concertation a permis d'identifier deux sources d'économie, dont l'une vient d'être présentée par M. le rapporteur spécial.
C'est pourquoi j'invite le Sénat à voter cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-50.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix, modifiés, les crédits figurant au titre III.

(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président. « Titre IV : moins 53 410 316 euros. »