M. le président. L'amendement n° 271 rectifié, présenté par MM. Mouly, Laffitte, Seillier, de Montesquiou et Fortassin est ainsi libellé : 

Compléter le texte proposé par le 1° du I de cet article pour le III de l'article L. 322-2 du code de la sécurité sociale par un alinéa ainsi rédigé :

« La participation mentionnée au présent paragraphe n'est pas exigée des titulaires de l'allocation aux adultes handicapés mentionnée à l'article L. 821-1 du code de la sécurité sociale. »

La parole est à M. Bernard Seillier.

M. Bernard Seillier. Monsieur le président, il est déjà défendu.

M. le président. L'amendement n° 338 rectifié, présenté par M. Fischer, Mme David, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - Les bénéficiaires de l'allocation aux adultes handicapés telle que définie à l'article L. 821-1 du code de la sécurité sociale sont exonérés des participations forfaitaires exigées au présent article.

La parole est à M. Guy Fischer.

M. Guy Fischer. Cet amendement, comme l'amendement n° 337, vise à exclure du champ d'application des franchises médicales une population particulièrement fragilisée. Il s'agit ici des bénéficiaires de l'AAH.

Cette allocation n'a pas évolué comme elle l'aurait dû s'agissant d'un minima social. Mme Létard nous a, certes, informés qu'elle serait augmentée de 1,1 % au 1er janvier 2008 et de 1 % au 1er septembre, mais je ne sais pas si, malgré cela, le compte y sera !

Comme vous le savez, cette allocation est octroyée à des personnes atteintes d'un taux d'incapacité de 80 % ou plus, ou bien de 50 à 79 %, dans des conditions particulières, liées principalement à l'impossibilité de travailler et de vivre de son salaire.

Je vous rappelle pour mémoire, madame la ministre, que les personnes qui ne disposent pas d'autres ressources que l'AAH bénéficient de celle-ci à taux plein et reçoivent au plus 621,27 euros. Autant dire que, avec un tel revenu, chaque euro compte.

Il est bien évidemment possible de cumuler cette allocation avec d'autres aides, mais, vous en conviendrez avec moi, le compte n'y est par toujours.

Par ailleurs, un débat a lieu actuellement sur la substitution à l'AAH de la prestation de compensation du handicap, mais nous aurons certainement l'occasion d'y revenir.

Vous n'ignorez pas que, à 10 euros près, en raison d'un effet de seuil, les bénéficiaires de l'AAH ne peuvent pas profiter de la CMU complémentaire, la CMU-C.

Je vous appelle donc à la sagesse. Si vous avez estimé juste - et je crois que ça l'est, en effet - d'exonérer de franchise les bénéficiaires de la CMU-C, vous comprendrez la nécessité d'exonérer aussi ceux qui n'en bénéficient pas pour seulement 10 euros. À moins, bien sûr, que vous n'envisagiez rapidement d'augmenter du même montant le seuil à partir duquel la CMU complémentaire est refusée.

Dans l'attente d'une réponse à cette question, je vous invite donc, mes chers collègues, à voter le présent amendement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Alain Vasselle, rapporteur. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, vous me permettrez de manifester mon étonnement devant les amendements nos 157 rectifié et 338 rectifié, déposés respectivement par les groupes socialiste et CRC.

En revanche, l'initiative de M. Seillier, à travers l'amendement n° 271 qu'il a défendu, ne me surprend pas : elle est en parfaite cohérence avec la position qui a toujours été celle de la majorité de la commission des affaires sociales depuis le jour où Martine Aubry, lorsqu'elle était ministre de l'emploi et de la solidarité, a institué la CMU-C. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. Guy Fischer. Vous ne lui avez jamais pardonné, n'est-ce pas ? Vous avez la dent dure !

M. Alain Vasselle, rapporteur. Eh bien oui ! On ne vous a guère entendu, alors, défendre les handicapés ! (Mêmes mouvements.)

Vous avez beau nier, on peut parfaitement reprendre les débats parus alors au Journal officiel !

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Ils ont même délibérément revalorisé l'AAH pour que ses bénéficiaires n'aient pas droit à la CMU-C !

M. Alain Vasselle, rapporteur. Monsieur le président de la commission a parfaitement raison : vous avez revalorisé à l'époque l'AAH et l'effet de seuil a fait que les bénéficiaires des minima sociaux de la CMU-C ont été totalement exclus ! S'ils avaient été intégrés alors, ils seraient aujourd'hui totalement exonérés de la franchise !

Par conséquent, ce que vous faites actuellement s'appelle de la démagogie. Je trouve quand même que c'est fort de café ! Et je dirai même que vous manquez vraiment d'amour-propre... (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. Alain Vasselle, rapporteur. ... parce que vous n'assumez même pas vos responsabilités !

Cela étant, un débat s'est engagé au sein de la commission des affaires sociales, sur ce sujet.

Sur l'initiative de M. Martin Hirsch a été lancée une réflexion sur les minima sociaux, afin que soit étudiée l'extension du RSA, le revenu de solidarité active, à d'autres catégories de personnes, les handicapés et les travailleurs pauvres, notamment.

J'estime, à titre personnel, que ces amendements ne sont pas opportuns, même si je comprends que l'on puisse vouloir faire bénéficier les handicapés de cette mesure, comme cela aurait dû être le cas s'ils avaient pu bénéficier de la couverture maladie universelle complémentaire.

Une courte majorité transversale de la commission s'est dégagée en faveur de ces amendements mais, si le Sénat décidait de n'en retenir qu'un, il vaudrait mieux que ce fût l'amendement n° 271 rectifié, mieux rédigé que les deux autres et mieux adapté au dispositif.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je comprends les motivations des auteurs de ces amendements, mais le dispositif des franchises a évolué et les seuils ne seront atteints que progressivement. Voulant prendre toutes les garanties, le Gouvernement a prévu d'adjoindre à ce plafond annuel de 50 euros un plafond journalier pour les actes paramédicaux et les transports, qui sera fixé par décret, et selon lequel le nombre des franchises pour chacune de ces deux catégories devrait être limité à quatre par jour.

Les bénéficiaires de l'AAH et les allocataires du minimum vieillesse pourront, en outre, profiter du dispositif d'aide au paiement d'une complémentaire santé. Nous avons évoqué ce sujet ce matin.

Environ 60 % des 800 000 bénéficiaires de l'allocation pour adulte handicapé et les personnes seules bénéficiaires du minimum vieillesse, soit environ 360 000 personnes, y auront droit. Cette aide permet de bénéficier d'une réduction importante sur le montant de la mutuelle complémentaire et son montant sera variable selon l'âge : par année, il sera, pour les adultes entre 25 ans et 59 ans, de 200 euros, c'est-à-dire à peu près la moitié du coût annuel du contrat, et, pour les personnes âgées de 60 ans et plus, de 400 euros.

Cependant, nombre de bénéficiaires potentiels, faute d'une information suffisante, ne font pas valoir leurs droits, ce qui est d'autant plus regrettable que ces complémentaires leur assureraient un meilleur accès aux soins, à un coût moindre.

Pour remédier à cette situation, largement dénoncée sur ces travées, j'ai décidé de lancer des campagnes d'information.

En premier lieu, les caisses d'allocations familiales doivent, en lien avec les CPAM, adresser un courrier ciblé aux bénéficiaires de l'AAH pour leur rappeler l'existence de l'ACS. Ce dispositif est en phase d'élaboration et est testé en Isère. Les premiers courriers d'information, sur l'ensemble du territoire, seront envoyés en janvier prochain, c'est-à-dire dans quelques semaines.

En deuxième lieu, la caisse nationale d'assurance vieillesse a, en relation avec les CPAM, informé l'ensemble des personnes seules bénéficiaires du minimum vieillesse, ce entre le 26 septembre et le 10 octobre derniers. Il est encore trop tôt pour mesurer les effets de cette campagne de sensibilisation mais, dès le 15 octobre, les caisses primaires d'assurance maladie ont vu doubler les demandes des personnes âgées de plus de 60 ans.

En troisième lieu, afin de faciliter la compréhension du dispositif, l'attestation du droit à la couverture maladie délivrée par les caisses primaires, se présentera, dès le 1er janvier prochain, sous la forme d'un chèque santé ou d'un bon d'achat à valoir sur le prix d'un contrat de complémentaire santé.

Je suis très attachée à ce que tous les moyens soient mis en oeuvre pour que chacun puisse accéder à une complémentaire santé. Le mécanisme de l'ACS est particulièrement intéressant de ce point de vue ; il offre des réductions substantielles sur le coût des contrats. Je suis très attentive à sa montée en charge et je ferai procéder par mes services, avant la fin du premier trimestre de 2008, à un bilan des nouvelles opérations qui se mettent en place actuellement et que je viens de décrire. Au vu de ce bilan, je proposerai au Parlement, si nécessaire, des aménagements destinés à améliorer ce dispositif.

Comme vous, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis très attentive à la situation des personnes handicapées. L'approche que nous devons privilégier est celle de la compensation globale du handicap.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C'est évident !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. C'est, d'ailleurs, dans cette optique que s'est situé le Président de la République. Il ne convient donc pas, de mon point de vue, de multiplier les droits connexes.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Tout à fait !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Les personnes handicapées doivent être traitées comme les autres assurés sociaux.

M. Alain Vasselle, rapporteur. C'est une bonne approche.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Absolument !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est défavorable à ces amendements.

M. le président. La parole est à Mme Bernadette Dupont, pour explication de vote sur l'amendement n° 157 rectifié.

Mme Bernadette Dupont. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre : pour bien connaître les problèmes rencontrés par les handicapés, je confirme qu'effectivement très peu d'entre eux savent qu'ils peuvent bénéficier d'une aide pour obtenir une complémentaire santé.

Dans le cas des affections de longue durée, nombre de médicaments prescrits pour soulager des petits maux de toutes sortes qui, malheureusement, sont connexes au handicap, ne sont pas pris en charge par la sécurité sociale et restent ainsi à la charge de la personne handicapée. De plus, les frais liés au handicap sont très élevés. J'en veux pour preuve le prix des protections destinées aux personnes incontinentes, notamment.

Quand les personnes handicapées ont payé tout ce dont elles ont besoin au quotidien, leur reste à vivre est donc bien maigre.

M. Alain Vasselle, rapporteur. Tout à fait ! C'est exact !

Mme Bernadette Dupont. L'annonce de la délivrance de chèques santé ou de bons d'achat pour souscrire des complémentaires santé est, par conséquent, une très bonne nouvelle.

M. le président. La parole est à Mme Annie Jarraud-Vergnolle, pour explication de vote.

Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Madame Procaccia, vous avez la chance d'avoir une voiture et de pouvoir payer deux pleins dans le mois, soit 100 euros de carburant. Les personnes handicapées, avec, en moyenne, 621 euros par mois, n'ont pas, elles, de voiture ou, quand elles en ont une, elles n'ont pas les moyens de la faire réparer lorsqu'elle tombe en panne. Elles doivent donc se déplacer à pied ou en bus.

Monsieur le rapporteur, c'est bien Mme Martine Aubry qui a instauré la CMUC, mais, depuis cinq ans, vous ne l'avez pas modifiée ! Une complémentaire est donc nécessaire pour les personnes qui ont de très faibles revenus.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Nous avons instauré une aide !

M. Alain Vasselle, rapporteur. Nous avons mis en place un crédit d'impôt qui n'existait pas !

Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Enfin, madame la ministre, je prends note de la volonté du Gouvernement de voir le maximum de personnes dans le besoin souscrire à une complémentaire santé. Cependant, lors des auditions préparatoires à ce projet de loi, les représentants de la mutualité française nous ont indiqué que les complémentaires ne rembourseraient pas les franchises.

Qu'en sera-t-il de la CMUC ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Ces mesures sont exonérées de la franchise !

M. le président. La parole est à M. Bernard Seillier, pour explication de vote.

M. Bernard Seillier. Je suis moi-même très attaché à la lutte contre l'exclusion et à une approche globale de la compensation du handicap ; je tiens à ce que ne soient pas créés des droits spécifiques à chaque catégorie. J'avais, d'ailleurs, déposé une proposition de loi avec Mme Valérie Létard en ce sens.

Je suis donc très sensible à la volonté du Gouvernement d'aller dans ce sens et, dans ces conditions, je retire mon amendement.

M. le président. L'amendement n° 271 rectifié est retiré.

La parole est à Mme Michèle San Vicente-Baudrin, pour explication de vote.

Mme Michèle San Vicente-Baudrin. Monsieur le rapporteur, qui êtes-vous pour dire si l'on a la légitimité ou non de défendre un amendement ou une cause ?

M. Alain Vasselle, rapporteur. Vous avez toute légitimité pour défendre un amendement ! Je trouve simplement que vous manquez un peu d'amour propre...

M. le président. Veuillez poursuivre, madame San Vicente-Baudrin !

Mme Michèle San Vicente-Baudrin. Tous, ici, quelle que soit notre tendance politique, nous avons de l'estime pour M. Seillier. Ne parlez donc pas de légitimité !

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Vous n'avez pas le monopole du coeur !

Mme Michèle San Vicente-Baudrin. Cela dit, monsieur Seillier, je regrette que vous ayez retiré votre amendement.

Madame la ministre, je précise que cet amendement concerne non seulement l'AAH et l'allocation de solidarité aux personnes âgées, mais aussi l'allocation supplémentaire d'invalidité.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 157 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 338 rectifié.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 28 :

Nombre de votants 326
Nombre de suffrages exprimés 325
Majorité absolue des suffrages exprimés 163
Pour l'adoption 127
Contre 198

Le Sénat n'a pas adopté.

L'amendement n° 189 rectifié, présenté par Mme Dini, MM. Vanlerenberghe, Mercier et les membres du groupe Union centriste-UDF, est ainsi libellé :

Remplacer le II de cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :

... - 1. Dans le premier alinéa de l'article L. 871-1 du code de la sécurité sociale, les mots : « des 15° et 16° » sont remplacés par les mots : « des 13°, 15° et 16° ».

2. Le 13° de l'article 995 du code général des impôts est complété par les mots : «, si ces garanties respectent les conditions mentionnées à l'article L. 871-1 du code de la sécurité sociale ».

... - Les pertes de recettes résultant du paragraphe ci-dessus sont compensées par le relèvement à due concurrence du taux des contributions sociales visées aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à Mme Anne-Marie Payet.

Mme Anne-Marie Payet. Cet amendement a pour objet de permettre aux contrats d'assurance dits « responsables » de rembourser la franchise annuelle.

En effet, l'article 35 pénalise financièrement les « contrats santé complémentaires » qui prendraient en charge la franchise annuelle instaurée sur les médicaments, les actes paramédicaux et les transports sanitaires. Il prévoit d'interdire la prise en charge des franchises dans le cahier des charges des contrats « responsables » et de faire ainsi du non-remboursement des franchises une des conditions à respecter pour que les exonérations sociales et fiscales dont bénéficient les contrats santé soient maintenues.

En conséquence, les contrats complémentaires qui assureront les franchises seront taxés dans la mesure où ils seront réintégrés dans le régime de droit commun.

La création des contrats « responsables » visait un seul objectif, éviter que la prise en charge par les complémentaires du surcoût lié au non-respect du parcours de soins ne vide ce dernier de toute effectivité.

L'instauration d'une franchise est une mesure d'une tout autre nature, puisqu'elle vise à obtenir le financement nécessaire à la lutte non seulement contre la maladie d'Alzheimer et le cancer, mais aussi au développement des soins palliatifs.

Le fait qu'elle puisse être remboursée par les complémentaires n'aurait pas d'impact sur l'objectif de financement visé, l'intervention des complémentaires n'étant pas de nature à minorer le rendement attendu du dispositif, chiffré à 850 millions d'euros en année pleine.

Il n'y a donc pas de raison de priver les patients de la possibilité de financer cette franchise par l'intermédiaire de leur assurance santé. Ils doivent pouvoir êtres libres de financer les franchises comme ils l'entendent : soit directement, soit par l'intermédiaire de leur complémentaire.

C'est pourquoi nous proposons de restaurer cette liberté de choix, en permettant aux complémentaires de rembourser les franchises, sans pour autant perdre le bénéfice des exonérations fiscales et sociales accordées aux contrats santé.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Alain Vasselle, rapporteur. Madame Payet, je suis au regret d'émettre un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 189 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 138 rectifié quater, présenté par MM. Virapoullé, Marini, Dériot, Milon et Souvet, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - Les modalités de mise en oeuvre de la franchise dans les départements d'outre-mer sont fixées par décret. Elles tiennent compte des dispositions législatives et réglementaires spécifiques appliquées aux prix des médicaments dans ces départements.

La parole est à M. Gérard Dériot.

M. Gérard Dériot. Cet amendement, que défends au nom de mon collègue Jean-Paul Virapoullé, a pour objet de préciser les modalités de mise en oeuvre de la franchise dans les départements d'outre-mer.

Dans sa décision du 12 août 2004 sur la loi relative à l'assurance maladie, le Conseil constitutionnel a validé le principe de la franchise, tout en soulignant que le montant de cette participation devait toutefois « être fixé à un niveau tel que ne soient pas remises en cause les exigences du onzième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 », aux termes duquel la nation « garantit à tous, notamment à l'enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé ».

Or, l'application immédiate et sans réserves de cette franchise dans les quatre DOM se heurte à deux éléments.

D'abord, une majoration de prix existante, de l'ordre de 30 % à 43 % selon les départements, rend difficilement applicable le principe d'égalité devant les soins imposé par le Conseil constitutionnel.

De surcroît, cette majoration n'a pas, à l'heure actuelle, de base légale.

En effet, avant l'ordonnance du 20 août 1998, un arrêté préfectoral fixait les majorations applicables dans chaque DOM. Or, l'article L. 753-4 du code de la sécurité sociale a abrogé l'article L. 593 du code de la santé publique, qui permettait au préfet de déterminer par arrêté le montant de ces majorations. De facto, les arrêtés préfectoraux existants n'ont plus de base légale.

Un rapport de la Cour des comptes de 2003, conforté par un rapport de l'IGAS, l'inspection générale des affaires sociales, publié en 2005, a pointé du doigt le fait qu'à l'heure actuelle aucun arrêté interministériel n'a été pris sur la base de l'ordonnance de 1998 précitée.

Dès lors, je le répète, les arrêtés préfectoraux qui continuent de s'appliquer sont dépourvus de toute base légale. Le prix des médicaments remboursés par les quatre caisses de sécurité sociale des départements d'outre-mer est donc fixé illégalement.

Cette situation, choquante d'un point de vue juridique, constitue une injustice à l'égard des populations d'outre-mer, puisque les surcoûts supportés n'ont jamais été quantifiés de manière juste, précise et légale.

Le présent amendement vise donc à rendre compatibles deux exigences.

Il s'agit, premièrement, d'une exigence sociale : la franchise ne peut être appliquée aujourd'hui dans les DOM de la même manière qu'en métropole, compte tenu du prix des médicaments ; un décret définira un montant compatible avec la situation juridique et économique existante.

Il s'agit, deuxièmement, d'une exigence juridique : une étude doit fixer le montant économiquement correct de ces majorations dans les meilleurs délais.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Alain Vasselle, rapporteur. M. Virapoullé s'est déjà exprimé très clairement sur le sujet. Je ne m'étendrai donc pas, d'autant que M. Dériot vient de rappeler l'essentiel.

Sur ce problème juridique, nous allons écouter avec intérêt Mme le ministre, qui va sans doute nous préciser si le Gouvernement a l'intention de prendre l'arrêté rapidement.

Cela étant, la commission s'en remet à la sagesse du Sénat sur cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. J'ai déjà expliqué les principes généraux de la franchise, mais je voudrais m'attarder sur la situation très spéciale de nos départements d'outre-mer.

Le dispositif prévu est assorti de garanties permettant de protéger l'accès aux soins des plus fragiles et jouera évidemment dans les DOM comme en métropole. Les assurés de ces départements bénéficieront exactement des mêmes garanties. L'effort demandé est donc identique.

Il importe de préciser que l'exonération des bénéficiaires de la CMU-C permettra d'apporter une garantie supplémentaire dans les départements d'outre-mer, dans lesquels le plafond de ressources pour bénéficier de la CMU-C est plus élevé qu'en métropole, afin de tenir compte d'une situation économique moins favorable. Il s'agit d'un élément très important, qui tient compte de la spécificité des DOM.

Monsieur le sénateur, votre préoccupation est liée au prix du médicament dans les départements d'outre-mer. Il nous faut incontestablement chercher à remédier à cette situation, qui pénalise le pouvoir d'achat de nos concitoyens dans ces départements.

Vous le savez, la défense du pouvoir d'achat est une priorité forte du Président de la République. Mon cabinet a déjà pris contact avec celui de mon collègue Christian Estrosi, pour mettre en oeuvre dans les plus brefs délais une baisse significative des marges de distribution des médicaments dans les départements d'outre-mer.

Le Gouvernement souhaite également demander aux services de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, ainsi qu'à ceux de l'IGAS de se rendre sur place pour étudier la réalité des surcoûts et faire des propositions en vue d'un règlement définitif de cette question.

Monsieur le sénateur, je vous demande de transmettre ces éléments de réponse à M. Virapoullé, au nom duquel vous avez défendu l'amendement. Lui-même m'avait personnellement interpellée sur ce sujet dont il est l'un des plus éminents spécialistes. Il est, d'ailleurs, depuis toujours un ardent défenseur des départements d'outre-mer.

Au bénéfice de ces explications, je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement.

M. le président. Monsieur Dériot, l'amendement n° 138 rectifié quater est-il maintenu ?

M. Gérard Dériot. Madame la ministre, à la lumière de vos explications, j'accepte de retirer cet amendement. Mon collègue Jean-Paul Virapoullé sera sûrement satisfait lui aussi de votre réponse.

M. le président. L'amendement n° 138 rectifié quater est retiré.

Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune, et qui ont trait aux accidents du travail et aux maladies professionnelles.

L'amendement n° 335, présenté par Mme David, MM. Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - Les salariés victimes d'accident du travail tel que défini par l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale et les salariés atteints d'une maladie professionnelle telle que définie à l'article L. 461-1 du même code sont exonérés du dispositif prévu au présent article.

La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. Dans la continuité de nos amendements précédents, celui-ci vise à exonérer de cette fameuse franchise les salariés victimes d'accidents du travail ou de maladies professionnelles, les AT-MP.

Mes chers collègues, si vous n'acceptez pas notre proposition, ces femmes et ces hommes seront condamnés à payer de leurs poches pour des frais de santés imputables aux indélicatesses, voire aux fautes inexcusables - pour reprendre la qualification employée par certains tribunaux -, commises par d'autres, à savoir leurs employeurs.

Trouvez-vous normal que des salariés soient contraints de subir financièrement les contrecoups d'une responsabilité imputable non pas du tout à eux-mêmes, mais bien à leurs employeurs ?

Trouvez-vous légitime de faire peser le prix de vos franchises sur des salariés qui se voient atteints dans leur intégrité physique, parce que leurs employeurs les ont exposés à des facteurs contagieux ou n'ont pas respecté les règles d'hygiène et de sécurité qui leur sont pourtant imposées ?

Pour ma part, je tiens à vous le dire, j'estime que cette situation est inacceptable et qu'elle s'apparente à une double peine. En définitive, le seul reproche que l'on puisse faire à ces salariés pour les punir est d'avoir fait leur travail et répondu aux ordres ! Ils payent pour leurs employeurs, qui sont pourtant les seuls responsables.

À l'évidence, mes chers collègues, ces franchises médicales représentent une profonde injustice, que vont subir de plein fouet les victimes d'accidents du travail et de maladies professionnelles. Je vous invite donc à voter cet amendement.

M. le président. L'amendement n° 443, présenté par MM. Godefroy, Cazeau et Domeizel, Mmes Demontès, Le Texier, Jarraud-Vergnolle, Campion, San Vicente-Baudrin, Printz, Schillinger, Alquier et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans le troisième alinéa du texte proposé par cet article pour le III de l'article L. 322-2 du code de la sécurité sociale, après les mots :

au cours d'une hospitalisation

ajouter les mots :

ainsi que les victimes d'accidents du travail et des maladies professionnelles.

La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.

M. Jean-Pierre Godefroy. Au même titre que l'amendement précédent, cet amendement a pour objet d'étendre aux victimes d'accidents du travail et de maladies professionnelles l'exonération de la franchise prévue pour les femmes enceintes, les mineurs âgés de moins de seize ans et les bénéficiaires de la couverture maladie universelle complémentaire.

Vous n'ignorez pas, madame la ministre, que la législation spécifique dont relèvent les accidentés du travail et les personnes atteintes de maladies professionnelles prévoit la gratuité des soins. Or tel ne sera plus le cas.

En effet, ces victimes bénéficient d'un droit à réparation et d'une prise en charge relevant non pas de l'assurance maladie, mais de la branche accidents du travail-maladies professionnelles, financée par les entreprises.

Déjà pénalisées par le caractère forfaitaire de la réparation qui leur est servie, les victimes sont ainsi amenées à financer une partie des soins que leur état requiert.

Le fait d'assujettir ces personnes aux franchises revient à les mettre à contribution pour des soins nécessités par la réalisation de risques professionnels imputable à leurs entreprises.

Au surplus, ces dispositions ne dégagent aucune économie substantielle pour l'assurance maladie et ne bénéficient qu'aux seuls employeurs qui financent la branche AT-MP.

Par conséquent, elles pénalisent davantage encore les victimes d'accidents du travail et les personnes atteintes de maladies professionnelles, qui sont les seules à ne pas être intégralement indemnisées pour le préjudice qu'elles ont subi.

Pour les mêmes raisons, nous avions déposé un autre amendement, tendant à exonérer ces victimes de la participation forfaitaire de un euro instaurée sur chaque consultation, mise en place par la loi de 2004. Celui-ci a malheureusement été déclaré irrecevable sur la base de l'article 40 de la Constitution.

Madame la ministre, je vous conjure d'examiner objectivement la situation particulière des victimes d'accidents du travail et des salariés atteints de maladies professionnelles, car ils sont non pas des malades comme les autres, mais bien des victimes, qui subissent les conséquences d'un accident ou d'une maladie imputable à un tiers. En ce sens, ils ne peuvent être assimilés au reste de la population pour le paiement des franchises.

Nous l'avons déjà dit à propos de la participation forfaitaire de un euro : il n'est pas normal que les accidentés du travail et les personnes atteintes de maladies professionnelles ne soient pas exonérés du paiement des franchises. Cela n'a rien à voir avec l'assurance maladie ! Leur faire payer les franchises serait tout à fait injuste, car, je le répète, ce sont des victimes et non des malades comme les autres.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Alain Vasselle, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Il est évident que la prise en charge des accidents de travail doit être élevée, ce qui est d'ailleurs prévu dans les textes en vigueur. Mais il convient aussi de ne pas opposer les malades les uns aux autres. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. Guy Fischer. Vous osez dire cela !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. L'exonération de franchise que vous proposez n'est pas justifiée. En effet, personne n'est responsable de sa maladie.

Je vous rappelle la philosophie de cette mesure : la franchise a pour vocation de contribuer à la prise en charge de nouveaux besoins de santé.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour explication de vote sur l'amendement n° 335.

M. Jean-Pierre Godefroy. Je me permets d'insister : notre amendement ne tend pas à opposer les malades les uns aux autres. C'est vous qui opérez une distinction entre les malades qui sont exonérés de la franchise et les autres.

Les accidentés du travail ne sont pas responsables de leur maladie ; ce sont des victimes.

Comment peut-on expliquer, madame la ministre, que les victimes de l'amiante soient obligées de payer des franchises médicales, alors même que, dans cette affaire, la responsabilité de l'État a été reconnue et la faute inexcusable de l'employeur retenue ? Le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante, le FIVA, a d'ailleurs été créé afin d'indemniser ces personnes, précisément parce que cette responsabilité a été reconnue.

Vous nous dites qu'il s'agit de malades comme les autres. C'est faux ! Ces malades sont victimes des conditions de travail qui leur ont été imposées. Ils peuvent, certes, contracter des maladies courantes. Mais la spécificité de la maladie professionnelle ou de l'accident du travail est liée au fait de l'employeur et à la mauvaise protection du travailleur.

Pour quelle raison ces malades subiraient-ils une « double peine », selon l'expression d'Annie David ? Ces cas ne relevant pas de l'assurance maladie, je ne comprends pas pourquoi vous rejetez notre amendement.

La branche AT-MP est financée par les entreprises. Dans ce cas, taxez les entreprises !

M. Gérard Dériot. C'est déjà fait, mon cher collègue !

M. Jean-Pierre Godefroy. S'agissant de l'amiante, dès lors que la responsabilité de l'État et la faute inexcusable de l'employeur ont été reconnues et qu'un fonds spécial d'indemnisation a été créé, il est tout de même un peu fort de faire payer des franchises aux victimes de ces maladies professionnelles. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.

Mme Annie David. Il n'est évidemment pas question, pour nous, d'opposer les malades les uns aux autres. C'est vous, madame la ministre, qui opposez les malades et les bien-portants, puisque vous faites payer la franchise par les seules personnes qui achètent des médicaments !

Nous souhaitons que soit reconnue la responsabilité des employeurs en matière d'accidents du travail et de maladies professionnelles. Nous avons proposé, hier, des amendements en ce sens. Vos propos ont alors été significatifs, madame la ministre, de votre volonté de continuer à exonérer les entreprises qui ne respectent pas la loi, notamment en matière de conditions d'hygiène et de sécurité.

Vous avez rejeté tous nos amendements en expliquant qu'il fallait renflouer les caisses. Malheureusement, c'est bien de cela dont il s'agit. Face aux victimes de l'amiante ou d'autres produits chimiques présents dans les entreprises, vous répondez que les caisses de la sécurité sociale sont vides. C'est tout de même dommage !

Je ne comprends vraiment pas votre position, madame la ministre.