M. Dominique Leclerc, rapporteur. L’amendement n °49 vise à accélérer le calendrier de la mise en œuvre de la réforme des surpensions. Il reprend l’esprit des dispositions de la proposition de loi que j’évoquais tout à l’heure, cosignée par André Lardeux, Catherine Procaccia et un grand nombre de nos collègues.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les différents amendements ?

M. Dominique Leclerc, rapporteur. Vous comprendrez aisément, monsieur le président, que les amendements nos 464 rectifié, 226 rectifié, 407 et 409 reçoivent un avis défavorable de la commission.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Yves Jégo, secrétaire d'État. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’amendement n° 464 rectifié, qui vise à suspendre momentanément l’entrée en vigueur du dispositif institué par l’article 63.

Honnêtement, je ne vois pas l’intérêt de différer d’une année l’entrée en vigueur d’une réforme dont on accepte le principe.

M. Gaston Flosse. L’intérêt, c’est tout simplement de permettre la concertation !

M. Yves Jégo, secrétaire d'État. Mais, monsieur le sénateur, contrairement à ce que certains prétendent, la concertation a déjà eu lieu.

M. Gaston Flosse. C’est faux !

M. Yves Jégo, secrétaire d'État. Mais non ! L’examen du dispositif en conseil des ministres a été précédé d’une concertation.

À cet égard, je souhaite apporter une précision qui fera sans doute plaisir à M. le rapporteur. À l’origine, la position du Gouvernement était très proche de celle qui est aujourd'hui défendue par la commission des affaires sociales. Nous proposions également de stopper l’attribution de cette indemnité à de nouveaux bénéficiaires à compter du 1er janvier 2015, ce qui aurait conduit à l’extinction progressive du dispositif.

Et c’est justement en écoutant les syndicats, en négociant longuement avec eux, que nous avons écarté cette option. Bien entendu, il était impossible de rencontrer toutes les organisations représentatives au plan local, mais ce n’est pas très grave puisqu’elles sont toutes affiliées à de grandes centrales syndicales. C’est donc avec ces dernières que nous avons discuté et conçu la réforme.

D’ailleurs, la CFDT, qui est – je le rappelle – le premier syndicat de Nouvelle-Calédonie et l’un des plus importants de Polynésie française, est favorable au dispositif que nous vous proposons. Qui peut croire qu’elle soutiendrait une réforme décidée en l’absence de toute négociation ? Ce serait lui faire insulte ! En réalité, nous avons longuement discuté.

M. Gaston Flosse. C’est faux !

M. Yves Jégo, secrétaire d'État. À mon sens, la proposition des auteurs de cet amendement est un peu démagogique. Contrairement à ce que certains voudraient faire croire, il n’est pas possible de modifier l’équilibre général de la réforme, car nous sommes bel et bien parvenus à un point d’équilibre. On peut l’accepter ou le refuser, ce qui est tout à fait légitime, mais différer d’un an l’entrée en vigueur du dispositif ne changerait rien.

D’ailleurs, cela fait dix-huit ans, depuis 1990, que l’on reporte une telle réforme. Il est un moment où les atermoiements doivent cesser.

L’amendement n° 226 rectifié concerne le système de retraite complémentaire. Nous devons effectivement travailler sur cette question en discutant avec les organisations syndicales, fidèles à l’esprit de dialogue qui a été le nôtre jusqu’à présent.

Simplement, dans la mesure où la réforme n’entrera en vigueur dans son intégralité que dans vingt ans, nous avons largement le temps de concevoir et d’instituer un dispositif adapté d’ici à cette échéance. Il n’y a donc aucune raison de ne pas mettre la réforme en œuvre ou de ne l’appliquer que partiellement.

Au demeurant, monsieur Virapoullé, sans une réforme d’ensemble, il y aurait un grand risque de voir l’ITR disparaître complètement pour des raisons constitutionnelles. En effet, ce dispositif, qui ne s’adresse pas à tous les territoires, n’est pas équitable. Si nous ne mettions pas un terme à cet état de fait, sa pérennité serait à la merci de n’importe quelle saisine du Conseil constitutionnel, voire du Conseil d'État.

Nous devons donc mettre en œuvre la réforme dans son intégralité et, au cours des vingt prochaines années, pendant qu’une génération continuera de bénéficier de l’ITR, nous pourrons faire monter en puissance le dispositif appelé à remplacer cette indemnité.

Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’amendement n° 226 rectifié.

Monsieur le rapporteur, je ne vous cache pas que l’amendement n° 46 pose un problème au Gouvernement.

En proposant qu’aucun nouveau bénéficiaire ne perçoive l’ITR à compter du 1er janvier 2015, vous suggérez de revenir à ce qui était notre position initiale. Mais, comme je l’ai déjà indiqué, l’option que nous avons retenue résulte des discussions que nous avons eues avec les organisations syndicales.

Certes, je sais bien que la représentation nationale n’est pas engagée par les négociations que nous menons.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Non, mais elle les respecte !

M. Yves Jégo, secrétaire d'État. À l’instar de M. le président de la commission des affaires sociales, je pense effectivement qu’elle en sera respectueuse.

L’équilibre auquel nous sommes parvenus est un équilibre fragile. Nous voulons concilier les exigences de rationalisation formulées par les assemblées parlementaires et par la Cour des comptes, qui est tout de même – faut-il le rappeler ? – une juridiction, et les intérêts des fonctionnaires de l’État en poste dans les territoires concernés. À ce sujet, je profite de l’occasion qui m’est offerte pour exprimer la reconnaissance du Gouvernement envers ces agents et pour saluer la qualité de leur travail.

Monsieur le rapporteur, si nous adoptions votre amendement, nous remettrions en cause l’équilibre que je viens de décrire. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement sollicite le retrait de l’amendement n° 46.

L’amendement n° 47 vise à déterminer le montant du plafond des indemnités temporaires octroyées à compter du 1er janvier 2009. Or il s’agit d’une disposition d’ordre réglementaire. Au demeurant, le Gouvernement a pris des engagements, et je vous confirme que le plafond sera bien fixé à 8 000 euros.

En outre, grâce à l’adoption d’un amendement déposé par des députés du Pacifique, les disparités entre les collectivités de cette zone et celles de l’océan Indien ne seront pas trop significatives. D’ailleurs, monsieur Flosse, j’ai proposé aux intersyndicales de venir me rencontrer pour évoquer cette disposition.

Vous le voyez, pour moi, le mot « concertation » a une signification. Quand je convie les partenaires sociaux, c’est pour négocier sur des éléments concrets, et non pour adopter des postures dans un sens ou dans un autre.

Par conséquent, monsieur le rapporteur, le Gouvernement sollicite également le retrait de cet amendement.

L’amendement n° 407 vise aussi à inscrire dans la loi le plafond de l’indemnité pour les nouveaux bénéficiaires dans certaines collectivités ou départements ultramarins. Là encore, il s’agit d’une mesure d’ordre réglementaire.

En outre, afin de répondre à certaines critiques, pas toujours injustifiées, portées à l’encontre de l’application du dispositif dans le Pacifique, nous avons décidé d’instituer un palier spécifique à cette zone. Je le rappelle, l’ITR est de 75 % dans le Pacifique, contre 35 % dans l’océan Indien. Déterminer un plafond à l’ITR nécessite de fixer un palier pour le Pacifique, faute de quoi la réduction de l’indemnité serait trop brutale dans les premières années pour les populations concernées, même si, s’ajoutant aux pensions, il s’agit de sommes tout à fait considérables.

Quoi qu’il en soit, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement, ainsi que sur l’amendement n° 409.

L’amendement n° 48, qui concerne le lissage du plafonnement prévu par l’article 63, va me donner l’occasion de montrer à M. le rapporteur que le Gouvernement n’est pas fermé à tous les amendements déposés par la commission des affaires sociales. (Sourires.) En effet, le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat sur cet amendement.

L’amendement n° 408, qui vise à fixer un plafond identique entre les bénéficiaires actuels de l’ITR et les futurs entrants, va à l’encontre de notre objectif de sortie en sifflet, voire de suppression progressive, du dispositif. Si nous instituons des plafonds très hauts, il y aura des problèmes de décrochage, même dans vingt ans, et nous ne parviendrons pas à amorcer l’évolution que nous souhaitons.

Par ailleurs, et je réponds ainsi à une question qui m’a été adressée, nous avons réalisé des simulations, mais je tiens à préciser que cette réforme a pour objectif principal non pas de permettre des économies, mais de rendre juste un système qui ne l’est pas.

Comme je l’ai indiqué tout à l’heure, sur les 80 millions d’euros concernant la Polynésie française, si la réforme est adoptée, dans une dizaine d’années, nous pouvons espérer une économie de 10 millions d’euros, dont 60 % serviront à abonder le fonds exceptionnel d’investissement pour l’outre-mer.

Vous le voyez, il s’agit de montants extrêmement faibles. Comme le démontrent les études réalisées sur le sujet, la réforme que nous proposons ne déséquilibrera pas les économies locales. Ceux qui prétendent le contraire font de la désinformation. Mais peut-être ont-ils des arrière-pensées liées à des combats autres que la recherche d’un système de retraites plus rationnel et plus juste…

Enfin, monsieur le rapporteur, l’amendement n° 49 appelle les mêmes observations que l’amendement n° 46.

Si nous décidions de cesser d’attribuer l’ITR à de nouveaux bénéficiaires dans six ans, nous déséquilibrerions la réforme, nous ne respecterions pas la négociation sociale et nous mettrions en difficulté l’accord que j’ai évoqué tout à l’heure.

C'est la raison pour laquelle le Gouvernement sollicite le retrait de cet amendement.

Mesdames, messieurs les sénateurs, la position du Gouvernement est une position d’équilibre. À ce titre, elle ne satisfait ni ceux qui voudraient aller plus vite et plus loin ni les partisans du statu quo. Ainsi, le chemin que nous avons choisi est sans doute étroit, mais je remercie ceux qui accepteront de l’emprunter, car c’est le chemin du progrès !

M. Michel Mercier. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Gaston Flosse, pour explication de vote sur l'amendement n° 464 rectifié.

M. Gaston Flosse. Monsieur le président, je souhaiterais joindre l’amendement n° 405, que j’ai cosigné avec M. Simon Loueckhote, à la discussion de l’amendement n° 464 rectifié. Ces deux amendements ont le même objet, à savoir le report de l’entrée en application du dispositif prévu par l’article 63 au 1er janvier 2010, plutôt qu’au 1er janvier 2009.

M. le président. Monsieur Flosse, l’amendement n° 405 ne peut faire l’objet d’une discussion commune avec l’amendement n° 464 rectifié, dans la mesure où il vise à compléter l’article 63 par un nouveau paragraphe.

En revanche, si vous le rectifiez en le rendant identique à l’amendement n° 464 rectifié, je pourrai donner satisfaction à votre demande. Que décidez-vous ?

M. Gaston Flosse. Les deux amendements ayant le même objet puisqu’ils tendent l’un et l’autre à repousser l’application de la réforme au 1er janvier 2010, j’accepte de rectifier l’amendement n° 405 dans le sens que vous indiquez.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Dans ces conditions, l’amendement n° 405 rectifié visera uniquement les paragraphes II, III, IV et V, sans incidence sur les autres dispositions de l’article.

Est-ce bien là votre souhait, monsieur Flosse ?

M. Gaston Flosse. Tout à fait, monsieur le président de la commission !

M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 405 rectifié, présenté par MM. Flosse et Loueckhote, et ainsi libellé :

I - Au début du II de cet article, remplacer le millésime :

2009

par le millésime :

2010

II - En conséquence, dans le premier alinéa des III et IV et dans les premier et deuxième alinéas du V, remplacer le millésime :

2009

par le millésime :

2010

Veuillez poursuivre, mon cher collègue.

M. Gaston Flosse. Lors de la reprise de la séance, j’ai cherché à dépassionner le débat.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Nous l’avons bien senti !

M. Gaston Flosse. Je voulais que nous puissions discuter sereinement de l’article 63 et de ses amendements. Mais, monsieur le secrétaire d’État, vos commentaires sur nos propositions me poussent à sortir encore de mes gonds !

Il est tout de même regrettable que vous osiez accuser les élus ultramarins de désinformation, alors que c’est vous qui vous en rendez coupable !

Vous prétendez que des discussions auraient été menées avec les syndicats. Mais la vérité est que vous avez seulement consulté les grandes centrales syndicales, comme la CFDT ou FO, c'est-à-dire des organisations qui ne représentent pas les fonctionnaires d’État en Polynésie française. Ces derniers ont leurs propres syndicats, purement locaux, bien que parfois rattachés à de grandes centrales. Et ce n’est pas aux directions parisiennes de la CFDT ou de FO de s’exprimer au nom des fonctionnaires basés en Polynésie française, à 20 000 kilomètres de distance ! Soyons raisonnables.

Vous n’avez procédé à aucune consultation avant la décision du Conseil des ministres. C’est après cette dernière que vous êtes venu rencontrer les syndicats en Polynésie française.

Il est faux de prétendre, comme vous le faites, que les discussions durent depuis 1990. Certes, les présidents des commissions des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat ont essayé chaque année de faire adopter cette réforme de l’ITR, mais ils n’y sont jamais parvenus, parce que le Président de la République de l’époque, Jacques Chirac (Murmures sur les travées du groupe socialiste), s’est toujours opposé à toute atteinte aux droits des populations d’outre-mer. Il faut dire qu’il existait alors une culture de l’outre-mer qui a disparu aujourd'hui.

M. le président. La parole est à M. Richard Tuheiava, pour explication de vote.

M. Richard Tuheiava. L’article 63 a suscité le dépôt de vingt amendements, soit le nombre le plus élevé d’amendements par article au sein de ce PLFSS, hormis l’article 45, ce qui donne une idée de l’importance de ce débat.

Nous discutons en ce moment non pas uniquement d’un article relatif à une réforme budgétaire, mais du modèle de société que le Gouvernement entend mettre en place en outre-mer pour les vingt prochaines années.

Il a été question tout à l’heure d’un fonds exceptionnel d’investissement pour l’outre-mer. Dès lors, pourquoi l’Assemblée nationale a-t-elle adopté un amendement de M. Censi visant à redéployer les économies réalisées par la réforme de l’ITR au profit de la ligne budgétaire « éducation et programmes pédagogiques » dans le cadre du budget général de l’État ? Nous nous attendons d’ailleurs à voir surgir d’autres amendements de ce type dans les prochains mois !

S’agissant de la consultation préalable, à l’évidence, nous, parlementaires, la concevons d’une certaine manière, et le Gouvernement, d’une autre. C’est déjà ce que j’ai constaté hier soir, lors du débat sur l’article visant les retraites des pilotes de transports aériens.

Il faut tout de même rappeler que, selon l’information qui avait été donnée aux organisations syndicales, représentatives ou non, le projet de réforme de l’ITR visé par l’article 63 était destiné à corriger les abus et non pas à aller jusqu’à la suppression de l’indemnité.

Il est certes possible de consulter les organisations syndicales sur une partie d’un projet de loi, mais, en l’occurrence, la question qui se pose est de savoir si les organisations syndicales représentatives de l’outre-mer ont été consultées au sujet de la suppression de l’ITR.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Yves Jégo, secrétaire d'État. Monsieur Flosse, je n’ai aucune envie de polémiquer avec vous ni avec aucun des membres de cette assemblée et je me félicite que, à la reprise de nos travaux, vous ayez trouvé un ton nouveau et cessé de personnaliser le débat à l’extrême, comme vous l’avez fait en fin d’après-midi. En effet, le projet qui vous est soumis émane non pas d’un homme en particulier, fût-il secrétaire d’État, mais du Gouvernement de la France, que j’ai l’honneur de représenter dans cette enceinte. Nous ne gagnerons rien à personnaliser le débat, sauf à changer sa nature, qui est celle de la défense de l’intérêt général.

Je vous confirme à vous-même, ainsi qu’à monsieur Tuheiava, que les consultations ont eu lieu dès la fin août et durant tout le mois de septembre, avant le passage du texte en Conseil des ministres, lequel l’a approuvé le 13 octobre, après que la CFDT, notamment, a donné son accord. En effet, c’est grâce à la discussion avec les syndicats que le texte qui vous est soumis aujourd'hui est beaucoup moins restrictif. Je l’ai déjà dit à deux reprises, mais j’espère que, cette fois-ci, vous me croirez.

Quant aux organisations syndicales de terrain, elles ont toutes été entendues. Je n’ai pas la totalité du dossier entre les mains, mais je peux vous citer le texte suivant émanant de la Confédération syndicale des travailleurs de Nouvelle-Calédonie, qui compte parmi les nombreux syndicats d’outre-mer ayant apporté leur soutien à cette réforme : « Dans un pays où beaucoup de retraités touchent moins de 50 000 francs de retraite par mois pour survivre, il est malsain et provocateur que des soi-disant responsables syndicaux appellent à manifester pour maintenir un système d’injustice sociale qui fait augmenter de manière injustifiée les retraites de certains. Nous conseillons au gouvernement français de supprimer d’urgence cette prime qui lui ferait économiser environ 1,5 milliard d’euros par an, rien qu’en Nouvelle-Calédonie. »

Ce n’est pas parce que vous êtes contre cette réforme qu’il faut nier le fait qu’un certain nombre de syndicats la soutiennent. Ils en ont le droit et sont aussi représentatifs que les autres. Il faut respecter ceux qui n’ont pas la même position que vous : c’est cela la démocratie sociale, c’est cela la démocratie telle qu’elle doit s’exercer dans cette assemblée.

Je vous invite à abandonner l’idée selon laquelle nous aurions effectué un passage en force, sans aucune concertation. D’ailleurs, le débat de ce soir montre que chacun peut s’exprimer. Je conçois parfaitement que des divergences existent, mais, de grâce, ne dites pas des choses qui ne sont pas vraies !

J’ai la preuve que les organisations syndicales nationales et locales ont été consultées et que certaines d’entre elles ont donné leur accord, notamment l’Union des syndicats des ouvriers et employés de Nouvelle-Calédonie, l’USOENC, le premier syndicat représentatif de la Nouvelle-Calédonie, dont les représentants, que j’ai rencontrés la semaine dernière à Nouméa, ont réitéré publiquement leur soutien à cette réforme.

Il ne s’agit pas d’opposer les uns aux autres. Je comprends parfaitement que certains syndicats soient contre ces dispositions, en raison notamment d’intérêts corporatistes, tout à fait légitimes au demeurant. En revanche, je ne peux laisser penser que le Gouvernement n’aurait pas joué le jeu de la concertation.

Croyez-moi, j’ai dépensé beaucoup d’énergie, passé du temps, de nombreuses nuits dans les avions, pour faire en sorte que cette concertation existe. Si le texte qui vous est proposé aujourd’hui n’est pas la traduction exacte de la position de la commission des affaires sociales et de la commission des finances de la Haute Assemblée, c’est bien parce que des progrès ont été faits grâce aux discussions avec les syndicats. C’est ainsi que je conçois le dialogue social.

M. le président. La parole est à M. Simon Loueckhote, pour explication de vote.

M. Simon Loueckhote. Monsieur le secrétaire d’État, je regrette que vous vous référiez à ce syndicat, dont les membres sont opposés à la France.

Voilà tout juste six mois, ce syndicat a bloqué une grande entreprise française présente en Nouvelle-Calédonie depuis plus de cent ans et lui a fait perdre plusieurs centaines de millions d’euros ! (MM Jean-Paul Virapoullé et Gaston Flosse applaudissent.)

Le leader signataire du texte que vous nous avez lu a été payé plusieurs dizaines de millions d’euros pour rester tranquille ! Et c’est cette référence que vous prenez ?

M. Yves Jégo, secrétaire d'État. Parmi d’autres !

M. Simon Loueckhote. Ce faisant, vous condamnez l’ensemble des Français qui vivent dans cette collectivité d’outre-mer.

M. Simon Loueckhote. Peut-être devrais-je entonner la Marseillaise dans cet hémicycle ? Est-ce cela que vous voulez, monsieur le secrétaire d'État ?

M. Yves Jégo, secrétaire d'État. Je la chanterai avec vous !

M. Simon Loueckhote. Souvenez-vous, mes chers collègues, j’ai tenu les mêmes propos de révolte lorsque l’on a empêché les Français de s’exprimer sur une partie du territoire national, en Nouvelle-Calédonie en l’occurrence.

Je suis scandalisé par les propos que je viens d’entendre, monsieur le secrétaire d'État ! La CFDT n’est pas présente en Nouvelle-Calédonie !

M. Yves Jégo, secrétaire d'État. L’USOENC !

M. Simon Loueckhote. L’USOENC n’est pas la CFDT ! Vous avez parlé de la CFDT ! Cessez la désinformation ! Contrairement à ce que vous dites, ce n’est pas nous qui faisons de la désinformation, c’est vous !

M. le président. Mes chers collègues, gardons autant que faire se peut le ton calme qui sied au Sénat !

La parole est à M. Jean-Paul Virapoullé, pour explication de vote.

M. Jean-Paul Virapoullé. Je fais partie de ceux qui veulent avancer, faire deux grands pas, comme je l’ai dit précédemment, c'est-à-dire supprimer les abus et plafonner l’ITR.

En revanche, je ne veux pas avancer dans le brouillard et dans le mensonge.

En 2000, la suppression des primes de déménagement a été votée. Le gouvernement Jospin à l’époque – tous les gouvernements tiennent le même discours, quelle que soit leur couleur politique – nous avait annoncé que les collectivités d’outre-mer allaient récupérer le produit de cette réforme. Or c’est budgétairement impossible.

Aujourd'hui, je vote la réforme de l’ITR parce que les abus sont intolérables et que le plafonnement du dispositif s’impose, mais non pas pour la carotte, autrement dit pour l’illusoire récupération des économies réalisées au profit des investissements outre-mer.

Ainsi, lorsque le ministère de l’éducation nationale, comme les autres ministères, les douanes, la police, la fonction publique gèrent leur budget du personnel, ils gardent les crédits qui lui sont affectés. Personne ne vient en fin d’année apporter son obole pour l’investissement outre-mer.

Cette carotte, c’est de la roupie de sansonnet ; elle ne vaut pas un kopek ! Je vous en prie, monsieur le secrétaire d’État, soyons responsables et dignes dans cette réforme. Ne racontons pas n’importe quoi pour endormir les gens !

J’ai quarante ans de vie politique. Grâce à ceux qui m’ont fait confiance et, peut-être pour cette raison, j’avance dans la transparence, dans l’honnêteté. Je suis pour une réforme, pour que nous avancions dans un climat de responsabilité et de solidarité partagées.

Mais, de grâce, ne faites pas croire aux départements et territoires d’outre-mer qu’ils vont récupérer un seul centime d’euro de cette réforme. Je n’accuse personne de mensonge, mais je dis cela au nom du respect que je dois à celles et à ceux qui m’ont fait confiance en m’envoyant dans cette Haute Assemblée qui fait honneur à la France et à la démocratie. (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 464 rectifié et 405 rectifié

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 40 :

Nombre de votants 341
Nombre de suffrages exprimés 340
Majorité absolue des suffrages exprimés 171
Pour l’adoption 144
Contre 196

Le Sénat n'a pas adopté.

Je mets aux voix l'amendement n° 226 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Monsieur le rapporteur, les amendements nos 46 et 47 sont-ils maintenus ?

M. Dominique Leclerc, rapporteur. La démarche de la commission des affaires sociales, les propositions qu’elle a avancées, les positions qu’elle a prises ne se sont jamais situées que dans le cadre des retraites.

Nous le savons, il existe depuis un certain temps des spécificités dans certains corps sociaux ou dans certaines zones géographiques, qui permettent que trente années cotisées équivalent à quarante annuités validées, avec des fiscalités très éloignées des nôtres, puisque certaines sont même négligeables.

La commission des affaires sociales considère qu’aujourd'hui les paramètres doivent se rapprocher et devenir identiques pour tous nos concitoyens, quel que soit le régime dont ils relèvent.

Notre discussion porte sur les pensions d’État. Dans le cadre de la réforme de 2003, certains efforts ont été demandés aux agents des trois fonctions publiques de la métropole. En contrepartie de ces avancées, qui tendaient à se rapprocher de celles qui étaient exigées des salariés du privé, certains accommodements ont été créés. Je pense plus particulièrement au régime additionnel de la fonction publique qui est en place, à la satisfaction de tous les fonctionnaires de l’État, depuis maintenant un certain nombre d’années.

M. Guy Fischer. Quatre ans !

M. Dominique Leclerc, rapporteur. Oui !

Monsieur le secrétaire d'État, je vous ai alerté sur le problème des compensations. Vous comprendrez qu’aujourd'hui, dans un souci d’équité, de transparence, de rapprochement de certains critères, nous imaginions la création d’un régime additionnel, identique à celui des fonctionnaires de la métropole, qui soit applicable à l’ensemble des territoires ultramarins. Nous sommes là dans une démarche de logique et de justice.

J’ai évoqué les courriers électroniques que j’ai reçus. Si certains étaient agressifs, d’autres nous encourageaient à continuer, sur le fondement de considérations semblables.

Toutes ces iniquités, toutes ces différences sont de plus en plus difficilement comprises, et je n’évoque pas les abus, car nous sommes bien conscients qu’ils sont marginaux.

Mes chers collègues, je vous rappelle, car d’aucuns l’oublient souvent, que le salaire des fonctionnaires ultramarins est composé du traitement indiciaire, auquel s’ajoutent des indemnités et des primes diverses, qui sont la contrepartie de la vie chère et de l’éloignement. Une fois à la retraite, le montant de la pension de ces fonctionnaires est calculé sur le seul régime indiciaire, hors primes : pour les plus petits salaires, cela peut provoquer une baisse conséquente !

C’est pour cette raison qu’il serait intéressant de faire bénéficier du régime additionnel de la fonction publique l’ensemble des agents de la fonction publique d’État et de la fonction publique territoriale, qu’ils soient de métropole ou d’outre-mer.

Nous sommes conscients d’avoir fait avancer la réflexion aujourd'hui et nous assumons la responsabilité du débat qui vient d’avoir lieu.

Nos collègues de gauche ont beau jeu de protester : il est plus facile de ne rien faire, cela permet d’éviter les critiques. Il n’est qu’à voir le destin du rapport Rocard que j’ai évoqué tout à l’heure !

Aujourd'hui, notre système de retraite est en difficulté pour les raisons que vous connaissez. Il revient donc au Parlement de prendre avec le Gouvernement des mesures courageuses. Celle qui est proposée à l'article 63 en est une. Je regrette seulement, mais très vivement, la date qui a été retenue car, d’une certaine façon, elle nous déconsidère : 2028, c’est vraiment trop loin ! Un terme médian aurait pu être trouvé : j’ai proposé la date de 2015, un peu par esprit de provocation, il est vrai, mais nous aurions pu nous accorder sur une échéance plus réaliste.

Cela dit, monsieur le président, je retire l'amendement n° 46 ainsi que l'amendement n° 47.