M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Dans ce cas, il va consulter un médecin du secteur 1.

M. François Autain. Par conséquent, cette notion de tact et mesure est périmée ! Elle était peut-être valable voilà trente ans, quand faire preuve de tact pouvait signifier pratiquer des honoraires inférieurs aux tarifs opposables, mais, à ma connaissance, tel n’est plus le cas aujourd’hui.

Je trouve très critiquable la passivité dont fait preuve le Gouvernement, qui se comporte comme si les dépassements d’honoraires étaient une fatalité contre laquelle il ne pouvait rien.

Fixer un plafond d’honoraires ne signifie nullement, pour autant, que les médecins pratiqueront du jour au lendemain le tarif maximal autorisé : ce serait mal connaître la profession médicale, dont nous avons tous ici souligné le sens de l’éthique. En revanche, cela permettrait de pénaliser plus fermement qu’ils ne le sont aujourd'hui les médecins appliquant des tarifs abusifs. Je rappelle que, à l’heure actuelle, le conseil de l’Ordre des médecins ne sanctionne ses membres que lorsque ceux-ci pratiquent des dépassements d’honoraires trois fois supérieurs au tarif opposable, alors que le Conseil d’État préconise que les dépassements d’honoraires n’excèdent pas le double de ce tarif. Nos collègues du groupe socialiste se sont d’ailleurs conformés à cette dernière recommandation en rédigeant leur amendement.

En fait, la véritable question, c’est celle de la rémunération des médecins ! Nous ne résoudrons le problème des dépassements d’honoraires qu’en revalorisant les honoraires des médecins, en particulier les tarifs opposables. Or le Gouvernement s’y refuse, pour des raisons que, personnellement, je ne comprends pas. Malheureusement, il est donc à craindre que nous ayons à nouveau ce débat lors de l’examen du prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale !

(M. Jean-Léonce Dupont remplace M. Roland du Luart au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. Jean-Léonce Dupont

vice-président

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 494.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Fichet, pour explication de vote sur l'amendement n° 752.

M. Jean-Luc Fichet. Ces notions de « tact » et de « mesure » ne cessent de me surprendre.

Je tiens à la disposition de la Haute Assemblée et du Gouvernement le devis récent d’un chirurgien qui, pour une intervention remboursée à hauteur de 500 euros par la caisse de sécurité sociale, prévoyait un dépassement d’honoraires de 1 500 euros. La patiente devait certifier par écrit qu’elle détenait les moyens de s’acquitter de ce montant. Sans cela, l’opération, pourtant indispensable, n’aurait pas lieu ! Se trouvant dans une situation d’urgence, cette personne a signé le devis et subi l’intervention, mais elle a dû s’endetter pour régler ce dépassement d’honoraires de 1 500 euros ! Peut-on parler ici de tact et de mesure ?

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Elle aurait dû aller à l’hôpital !

M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.

M. Guy Fischer. Le problème posé est celui des politiques tarifaires. Le Gouvernement se refuse aujourd'hui à revaloriser les honoraires de différentes professions médicales. Or ce sont les patients qui en subiront directement les conséquences. La sécurité sociale a beau jeu de laisser se généraliser la pratique des dépassements d’honoraires, notamment parmi les spécialistes, puisque ce seront toujours les tarifs opposables qui serviront de base au remboursement.

Pour les chirurgiens, dont les tarifs n’ont pas été revalorisés depuis de très nombreuses années, le montant annuel global des dépassements d’honoraires s’élève à environ 470 millions d'euros. Ainsi, je connais un chirurgien de très grande réputation qui pratique un dépassement d’honoraires moyen de 1 100 euros par intervention. C’est le deal pour être opéré par ses soins !

Il ne s’agit pas pour nous de jeter l’opprobre sur les professions médicales. Le problème de fond est celui de la revalorisation des tarifs, qui n’ont pas été relevés depuis des décennies. On laisse pourrir la situation au détriment des patients ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Je voudrais appeler nos collègues au tact et à la mesure. Chacun a pu s’exprimer ; il est temps, maintenant, de passer au vote et de poursuivre le débat.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 752.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 269, présenté par M. Houpert, est ainsi libellé :

Supprimer le cinquième alinéa (4°) du texte proposé par le 2° du II de cet article pour l'article L. 162-1-14-1 du code de la sécurité sociale.

La parole est à M. Alain Houpert.

M. Alain Houpert. Il n'appartient pas à l'autorité administrative de s’immiscer dans la relation entre le professionnel de santé et son patient, notamment quand il s’agit d’une situation d’urgence.

Cet amendement n’a pas pour objet de remettre en cause l’information écrite préalable du patient, mais il faut en finir avec l’épée de Damoclès qui menace les professionnels de santé. À mon sens, l’alinéa visé du texte pollue la relation entre le patient et le médecin. Il a beaucoup été question de tact et de mesure ; cela vaut également pour l’autorité administrative.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Milon, rapporteur. La mesure prévue fait partie du renforcement des sanctions en cas de carence du conseil de l’ordre professionnel concerné. Elle est donc nécessaire pour que l’article 18 ait toute sa cohérence.

Par conséquent, la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. J’ai déjà répondu à cette question lors de l’examen des amendements nos 865 rectifié et 630 rectifié, qui ont été retirés par leurs auteurs. Je ne peux que faire mienne la demande de retrait exprimée par la commission.

M. le président. Monsieur Houpert, l'amendement n° 269 est-il maintenu ?

M. Alain Houpert. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 269 est retiré.

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 93 rectifié est présenté par MM. Gilles et Leclerc, Mme Goy-Chavent, Mlle Joissains et Mme Bruguière.

L'amendement n° 866 est présenté par MM. P. Blanc et Laménie.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Au sixième alinéa du texte proposé par le 2° du II de cet article pour l'article L. 162-1-14-1 du code de la sécurité sociale, après le mot :

avis

insérer le mot :

conforme

L’amendement n° 93 rectifié n'est pas soutenu.

La parole est à M. Marc Laménie, pour présenter l'amendement n° 866.

M. Marc Laménie. Afin que les commissions prévues à l’article L. 162-1-14 soient crédibles, il paraît indispensable que les directeurs des organismes locaux d’assurance maladie soient tenus de suivre leur avis, d'autant que ces instances sont paritaires.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Milon, rapporteur. L’avis simple des commissions suffit. Prévoir un avis conforme alourdirait la procédure, dont je rappelle qu’elle ne se déclenche qu’en cas de carence du conseil de l’ordre concerné.

La commission demande donc le retrait de cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je partage l’avis de M. le rapporteur. J’ajoute que les directeurs des organismes locaux d’assurance maladie se montrent plus modérés que les commissions, puisque le montant global des pénalités qu’ils prononcent est inférieur à celui qui relève des commissions.

Le Gouvernement demande lui aussi le retrait de cet amendement.

M. le président. Monsieur Laménie, l'amendement n° 866 est-il maintenu ?

M. Marc Laménie. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 866 est retiré.

L'amendement n° 867, présenté par MM. P. Blanc et Laménie, est ainsi libellé :

Supprimer le septième alinéa du texte proposé par le 2° du II de cet article pour l'article L. 162-1-14-1 du code de la sécurité sociale.

La parole est à M. Marc Laménie.

M. Marc Laménie. Il n'appartient pas au directeur de l’organisme local d’assurance maladie de sanctionner les médecins qui pratiquent une discrimination dans l'accès aux soins ou qui exposent les assurés à des dépassements d'honoraires excédant le tact et la mesure. En effet, ces faits sont des manquements aux règles déontologiques et relèvent du conseil de l'Ordre.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Milon, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer la possibilité, pour le directeur de la caisse d’assurance maladie, de sanctionner les dépassements d’honoraires excédant le tact et la mesure ou les refus de soins. Il n’y a pas lieu de faire une exception pour ce type d’agissements. La commission demande donc le retrait de cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Même avis.

M. le président. Monsieur Laménie, l'amendement n° 867 est-il maintenu ?

M. Marc Laménie. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 867 est retiré.

Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 496, présenté par MM. Autain et Fischer, Mmes David, Hoarau, Pasquet et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Dans la première phrase du dixième alinéa du texte proposé par le 2° du II de cet article pour l'article L. 162-1-14-1 du code de la sécurité sociale, remplacer les mots :

peuvent faire

par le mot :

font

et les mots :

peuvent être

par le mot :

sont

La parole est à Mme Isabelle Pasquet.

Mme Isabelle Pasquet. Par cet amendement, nous entendons renforcer les sanctions encourues par les professionnels de santé qui se trouveraient dans une situation de récidive en matière de discrimination illégale dans l’accès aux soins.

En effet, la rédaction proposée dans le projet de loi prévoit qu’en cas de récidive « les sanctions prononcées en vertu du présent article peuvent faire l’objet d’un affichage au sein des locaux de l’organisme local d’assurance maladie et peuvent être rendus publiques ». Nous ne nous satisfaisons pas de cette demi-mesure : dès lors que le professionnel de santé est en situation de récidive, les sanctions prises doivent impérativement être affichées et rendues publiques.

Les pratiques visées dans cet article sont tout simplement contraires aux valeurs fondamentales de notre société et à l’engagement pris par le médecin devant ses pairs lorsqu’il prête serment. De très nombreux sénateurs ont présenté ce serment comme fondamental : certains ont même affirmé qu’il justifiait la participation des médecins à la direction de l’agence régionale de santé, l’ARS, dans la mesure où il exclut tout conflit d’intérêts.

Nous voulons bien croire en la valeur de ce serment, mais il faut alors prendre les mesures appropriées pour sanctionner sa violation, a fortiori en cas de récidive. Quelle sanction plus efficace que de rendre automatiquement publique la violation, par un professionnel de santé, de cet engagement pris devant ses pairs et devant la collectivité ?

M. le président. L'amendement n° 753, présenté par MM. Cazeau et Le Menn, Mmes Alquier et Blondin, M. Botrel, Mme Campion, M. Chastan, Mme Chevé, MM. Daudigny et Daunis, Mme Demontès, M. Desessard, Mme Durrieu, MM. Fauconnier et Fichet, Mme Ghali, M. Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, MM. Jeannerot et Lagauche, Mmes Printz et Le Texier, MM. Mirassou et Rebsamen, Mme Schillinger, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans le dixième alinéa du texte proposé par le 2° du II de cet article pour l'article L. 162-1-14-1 du code de la sécurité sociale, remplacer (deux fois) le mot :

peuvent

par le mot :

doivent

La parole est à M. Yves Daudigny.

M. Yves Daudigny. La condamnation judiciaire d’un médecin au motif de récidive de refus de soins est un fait grave. Il convient d'appliquer avec fermeté le principe de publicité d’une telle condamnation.

Il est tout de même incroyable, alors que vous faites de la sanction de la récidive l’alpha et l’oméga de toutes les politiques publiques, que vous prôniez ici la retenue à l’égard des médecins refusant de soigner les plus démunis. Il y a là deux poids, deux mesures !

« Les responsables doivent être punis », entend-on souvent dire du côté de l’Élysée. Comment les médecins coupables de refuser leurs soins à des malades pour des raisons illégales pourraient-ils ne pas être concernés par cet adage présidentiel ? Comment occulter les statistiques, le quotidien des patients, les témoignages recueillis dans nos permanences et les faits eux-mêmes ? Les refus de soins sont de plus en plus fréquents et sont commis par un nombre sans cesse croissant de médecins.

Il est grand temps d’enrayer cette dérive et de réprimer fortement les agissements de ces professionnels de santé –40 % des spécialistes et 9 % des généralistes –…

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. C’est faux !

M. Yves Daudigny. … qui sélectionnent leurs patients en fonction de leurs revenus. Nous avons une obligation de résultat, l’obligation de faire cesser la banalisation de cette violence symbolique envers les plus fragiles.

En agissant avec mollesse, vous encouragez la récidive, créant ainsi un véritable sentiment d’impunité. C’est d’ailleurs au sein des territoires de relégation de la République – zones urbaines sensibles, territoires ruraux – que cet état de fait est le plus marqué. Tous les jours, la population manifeste son exaspération, mais, devant l’incapacité de l’État à apporter une réponse appropriée, elle adopte souvent une attitude de repli sur soi et renonce aux soins.

Or n’est-ce pas le devoir de la nation que de protéger en priorité les plus faibles ? Les médecins généralistes sont les premiers informés des refus de soins. Nombre d’entre eux nous disent être « dégoûtés » par les attitudes discriminatoires de certains de leurs collègues, mais pourquoi avertir aujourd’hui les autorités des actes d’un médecin qui sera absous demain ?

Il est de notre devoir de rendre obligatoire la publication de la condamnation judiciaire des médecins fautifs, car refuser des soins pour des motifs discriminatoires est un acte grave. Tel est l’objet de l’amendement n° 753.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Milon, rapporteur. La commission estime qu’il faut laisser au directeur de l’organisme local d’assurance maladie la liberté d’apprécier si la publication de la condamnation d’un médecin se justifie ou non. Elle émet donc un avis défavorable sur les amendements nos 496 et 753.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. On ne peut souscrire à un dispositif qui risquerait de causer un préjudice excessif à certains professionnels de santé dont la gravité du comportement n’est pas avérée.

La mesure proposée toucherait non seulement les récidivistes et les médecins auteurs de manquements graves, mais également des professionnels sanctionnés par exemple pour non-communication à leurs patients de l’information écrite prévue lorsque le coût total d’un soin comprenant un dépassement d’honoraires est supérieur ou égal à 70 euros. Dans un tel cas de figure, la punition infligée serait véritablement disproportionnée.

L’affichage de la condamnation doit être une possibilité, nous sommes d’accord sur ce point, mais cela ne doit pas être une loi d’airain s’appliquant à toutes les infractions. Ce serait hors de propos. Les modalités de l’affichage seront fixées par voie réglementaire. Seront précisés quels manquements particulièrement graves donneront systématiquement lieu à un affichage.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 496.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 753.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 754, présenté par MM. Godefroy, Le Menn et Cazeau, Mmes Alquier et Blondin, M. Botrel, Mme Campion, M. Chastan, Mme Chevé, MM. Daudigny et Daunis, Mme Demontès, M. Desessard, Mme Durrieu, MM. Fauconnier et Fichet, Mmes Ghali et Jarraud-Vergnolle, MM. Jeannerot et Lagauche, Mmes Printz et Le Texier, MM. Mirassou et Rebsamen, Mme Schillinger, M. Teulade et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans le dixième alinéa du texte proposé par le 2° du II de cet article pour l'article L. 162-1-14-1 du code de la sécurité sociale, après les mots :

d'assurance maladie

insérer les mots :

, dans la salle d'attente du professionnel concerné ou à défaut son lieu d'exercice

La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.

M. Jean-Pierre Godefroy. L’article 18 prévoit que les sanctions prononcées à l’encontre d’un professionnel de santé jugé coupable de discrimination pourront être affichées dans les locaux de l’organisme local d’assurance maladie.

Cette mesure va dans le bon sens, mais, à notre avis, elle n’est pas suffisante.

En effet, bien qu’interdites et sanctionnées, les discriminations dans le domaine de l’accès aux soins, notamment pour des motifs financiers, existent toujours. De nombreux Français en sont victimes.

En 2006, le fonds CMU a publié les résultats d’une enquête réalisée dans le département du Val-de-Marne,…

M. Guy Fischer. Cela concerne Mme Procaccia !

M. Jean-Pierre Godefroy. … relative aux refus d’accès aux soins opposés aux bénéficiaires de la CMU-C. Cette enquête révèle que les discriminations sont toujours d’actualité et nombreuses. Ainsi, le taux de refus de soins était de 1,6 % chez les médecins généralistes du secteur 1, mais atteignait 16,7 % pour les médecins généralistes du secteur 2. Pour ce qui concerne les spécialistes, ce taux s’élevait à 41 %, secteurs 1 et 2 confondus. Pour les dentistes, il était de 39,1 %.

Une autre enquête, réalisée par Médecins du monde dans onze villes de France, fait apparaître qu’un dentiste sur deux a refusé l’accès aux soins à des titulaires de la CMU ou de l’AME. Elle fait également état de l’attitude méprisante, voire dédaigneuse, de secrétaires médicales ou de praticiens dentistes à l’égard des bénéficiaires de l’une de ces prestations leur demandant un rendez-vous. Certains patients se sont attiré les réponses suivantes : « Non, nous, on ne prend pas ça ! » ou : « La CMU ? Non, non, non, pas ici ! » Cela rappelle le médecin que j’ai cité tout à l’heure et qui disait ne faire que du « haut de gamme »… Que devient alors le serment d’Hippocrate ?

Je pourrais enfin évoquer l’étude du CISS, le collectif interassociatif sur la santé, dont vous avez pu prendre connaissance, mes chers collègues.

Vous en conviendrez, ces chiffres et ces comportements sont inacceptables et ne peuvent être tolérés ni par les assurés sociaux, ni par les pouvoirs publics, ni par les médecins. Ils sont contraires aux pratiques républicaines, à la déontologie médicale, ainsi qu’à l’objectif constitutionnel d’accès aux soins pour tous.

C’est pourquoi nous proposons de compléter le dispositif figurant à l’article 18 en prévoyant l’affichage de la sanction dans la salle d’attente du praticien jugé coupable de discrimination. Il nous semble normal que les patients soient informés des éventuelles sanctions infligées à leur médecin, ce qui sera sans aucun doute bien plus dissuasif qu’un affichage dans les locaux de la CPAM, que personne ne consultera.

J’ajoute que cet amendement relève de la transparence et de l’honnêteté dont doit faire preuve un praticien à l’égard de ses patients. En effet, il s’agit d’une information relative à l’exercice de sa profession et au respect des lois de la République : une éventuelle condamnation doit donc être rendue publique, y compris par affichage dans le cabinet du praticien.

M. Gilbert Barbier. Il faudra des inspecteurs pour contrôler l’affichage !

M. Guy Fischer. Cela créera des emplois !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Milon, rapporteur. La commission émet un avis défavorable. Comme vient de le faire remarquer Gilbert Barbier, qui vérifiera l’affichage des condamnations dans les salles d’attente des médecins ? Pourquoi ne pas imposer carrément la mention de la condamnation sur les ordonnances ? Cela pourrait aller très loin !

Si le refus de soins est bien évidemment tout à fait condamnable, cela ne doit pas pour autant conduire à proposer des mesures inadmissibles.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Même avis.

M. le président. La parole est à Mme Colette Giudicelli, pour explication de vote.

Mme Colette Giudicelli. Je prends la parole pour la première fois dans cet hémicycle. (M. Jean-Pierre Fourcade applaudit.)

Mme Colette Giudicelli. Il est insupportable que l’on puisse accuser les médecins de comportements discriminatoires, injurieux et méprisants. Si je ne le déclarais pas publiquement, je ne dormirais pas tranquillement cette nuit ! (Exclamations amusées sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.) À en croire les sénateurs siégeant de l’autre côté de l’hémicycle, les médecins de gauche seraient vertueux, tandis que les médecins de droite seraient méprisants et insultants. De telles insinuations sont scandaleuses et inacceptables ! En tant que citoyenne, je tenais à le souligner. (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.)

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Je comprends l’objet de l’amendement n° 754, défendu avec fougue par notre collègue Jean-Pierre Godefroy, mais la mesure proposée pose un certain nombre de problèmes.

En particulier, on ne peut pas imaginer que la sanction infligée à un médecin puisse être affichée dans sa salle d’attente ad vitam aeternam. De plus, la condamnation peut suffire à changer son comportement et à le rendre plus respectueux de la loi.

La mesure présentée par nos collègues nous semble donc inopérante et même dangereuse, car elle stigmatiserait le médecin pour une durée non définie. L’amendement n° 754 étant à mes yeux imprécis et inapplicable, je ne le voterai pas.

M. François Autain. C’est dommage !

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Godefroy. Je suis tout à fait navré que vous ne vous associiez pas à notre démarche, madame Goulet !

Je ferai observer à Mme Giudicelli qu’il n’a jamais été question de médecins de droite ou de gauche ! Nous avons de surcroît pris la précaution de dire qu’il s’agissait de cas fort heureusement minoritaires, voire exceptionnels.

Mme Colette Giudicelli. Vous ne l’avez pas dit !

M. Jean-Pierre Godefroy. La sanction ne doit pas être affichée éternellement, j’en conviens. Cela étant, pour de nombreuses autres professions, les sanctions prononcées sont rendues publiques et affichées. Dans nos communes, lorsque nous sommes amenés à procéder à la fermeture administrative d’un établissement avec l’aide du commissaire de police, la durée de cette mesure est affichée.

En l’occurrence, prévoir l’affichage à la CPAM est une bonne mesure, mais qui prendra connaissance des informations ainsi diffusées ? Dans les cas de manquements graves, tels les refus de soins, un affichage aisément accessible est souhaitable, comme pour toutes les autres professions. Ce serait même dans l’intérêt du monde médical, dont la grande majorité des membres, bien sûr, se comportent bien. Notre tâche est de combattre ceux qui ne respectent pas les lois de la République. Tel est le cas des praticiens qui refusent leurs soins aux personnes relevant de la CMU : ils doivent être sanctionnés ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Il convient de souligner, à ce stade du débat, que, en cas de manquements graves, la possibilité de l’affichage de la sanction est déjà prévue dans les textes, que ce soit dans les locaux de la caisse d’assurance maladie, dans le cabinet du médecin ou par voie de presse. Nous reviendrons sur ce sujet dans quelques instants.

Cependant les auteurs de l’amendement n° 754 préconisent de rendre obligatoire l’affichage pour tous les manquements, graves ou bénins, même ceux qui s’assimilent plutôt à des inconséquences. C’est un véritable lit de Procuste !

Pour notre part, nous voulons déterminer par voie réglementaire – la loi n’est évidemment pas le véhicule approprié – les cas où ces dispositions extrêmement pénalisantes pour les professionnels seront appliquées. L’affichage doit être réservé à des sanctions pour manquements graves. Mon désaccord avec les auteurs de l’amendement n° 754 porte sur le caractère obligatoire du dispositif présenté.

M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny, pour explication de vote.

M. Yves Daudigny. Parler de médecins communistes ou socialistes vertueux et de médecins sympathisants de l’UMP critiquables est hors de propos ! Je le répéterai autant de fois que nécessaire : dans cet hémicycle, il n’y a pas des amis ou des ennemis des médecins ! Ce qui est en cause, c’est le respect de la loi et, le cas échéant, l’instauration de sanctions.

De manière générale, le Gouvernement prône une grande sévérité à l’encontre des récidivistes. De deux choses l’une : soit ce principe s’applique à tous, y compris aux médecins, soit l’on fait preuve de mesure, mais pas seulement à l’égard des médecins. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 754.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 92 rectifié, présenté par MM. Gilles et Leclerc, Mme Goy-Chavent, M. Vasselle, Mlle Joissains et Mme Bruguière, est ainsi libellé :

Après les mots :

en cas de récidive

rédiger comme suit la fin du dixième alinéa du texte proposé par le 2° du II de cet article pour l'article L. 162-1-14-1 du code de la sécurité sociale :

et après épuisement des voies de recours, par voie de presse.

La parole est à M. Dominique Leclerc.

M. Dominique Leclerc. La publication dans la presse des sanctions en cas de récidive, après épuisement de toutes voies de recours, doit relever des seules juridictions de droit commun.

Sachons nous aussi agir avec tact et mesure. Certains s’expriment avec une sévérité digne de procureurs ! L’amendement n° 92 rectifié n’a aucune visée politique. Il s’agit simplement de faire preuve de modération et de bon sens. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. le président. L'amendement n° 868, présenté par MM. P. Blanc et Laménie, est ainsi libellé :

Dans la première phrase du dixième alinéa du texte proposé par le 2° du II de cet article pour l'article L. 162-1-14-1 du code de la sécurité sociale, après le mot :

récidive

insérer les mots :

et après épuisement des voies de recours

La parole est à M. Marc Laménie.