M. le président. L'amendement n° 266, présenté par MM. Desessard et Muller et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

Alinéa 2, seconde phrase

Supprimer les mots :

et par d'autres personnes morales de droit public.

La parole est à M. Jacques Muller.

M. Jacques Muller. Cet amendement de repli vise à clarifier qui sera, au final, propriétaire du capital de La Poste.

En effet, que recouvre la notion de personne morale de droit public ?

Il peut s’agir d’abord de l’État ou des collectivités territoriales. Cependant, l’État, qui ne peut plus, ou plutôt ne veut plus apporter sa contribution au développement du service public de La Poste, recherche pour celle-ci d’autres financements publics, notamment auprès des collectivités territoriales. Mais ces dernières ont déjà bien du mal à faire face aux conséquences d’un transfert continu de compétences en provenance de l’État… Les élus locaux ne cessent d’ailleurs de déplorer cette situation.

Parmi les personnes morales de droit public figurent également les établissements publics, c'est-à-dire les hôpitaux, les établissements culturels, les universités, les lycées. Bien évidemment, ils n’entreront pas au capital de La Poste.

Enfin, il y a la Caisse des dépôts et consignations, établissement public autonome placé sous le contrôle du Parlement. « De par son positionnement historique, sa neutralité et son expérience au service de l’intérêt général, la Caisse des dépôts et consignations joue son rôle de tiers de confiance au service des acteurs publics et du développement local » : elle peut donc investir dans La Poste, cela étant permis tant par le droit national que par les textes européens. Toutefois, si La Poste devient une société anonyme, elle le fera suivant une autre logique et exigera un rendement équivalent à celui qu’espèrent les investisseurs classiques, sa doctrine d’investissement indiquant que « la Caisse des dépôts et consignations peut en effet attendre un retour financier significatif […] de participations substantielles dans des grandes entreprises françaises dont la rentabilité est “indexée” sur la croissance mondiale ».

Voilà qui peut avoir de graves conséquences ! En effet, rien n’empêcherait demain la Caisse des dépôts et consignations de céder tout ou partie de ses actions de la SA La Poste si elle jugeait au final cet investissement insuffisamment rentable.

Pour éviter tout risque de privatisation rampante, il nous semble essentiel d’écarter clairement toute autre personne morale de droit public que l’État du capital de La Poste.

M. le président. Les trois amendements suivants sont identiques.

L'amendement n° 26 est présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 265 est présenté par MM. Desessard et Muller et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

L'amendement n° 441 rectifié est présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste et apparentés.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 2, seconde phrase

Après les mots :

 l'État

supprimer la fin de cette phrase.

La parole est à M. Thierry Foucaud, pour défendre l’amendement n° 26.

M. Thierry Foucaud. Par cet amendement, nous souhaitons inscrire dans la loi que l’État sera le seul détenteur du capital de La Poste. Eu égard à la frénésie de privatisations du Gouvernement, nous ne sommes pas assurés que les autres personnes morales de droit public ne céderont pas, à terme, leurs actions.

De plus, le service postal, service public national, doit rester la propriété de la collectivité. Or la collectivité, c’est l’État, et personne d’autre !

Les exemples de promesses non tenues ou de mensonges éhontés ayant précédé le passage d’entreprises publiques sous le contrôle d’intérêts privés ne manquent pas ! Ces entreprises sont alors devenues des machines à produire des centaines de millions d’euros de retour sur investissement pour les actionnaires, au détriment bien sûr des investissements nécessaires à leur développement et à leur performance, voire de la sécurité des usagers et de la population en général. Je pense notamment, à cet instant, à France Télécom, à EDF ou à GDF.

Je ne m’étendrai pas ici, faute de temps, sur les dégâts causés aux entreprises elles-mêmes, affectant leur capacité à exercer leur métier ou l’entretien des équipements, ce qui engendre pannes et accidents. Le service rendu à la population est toujours moindre, à notre avis, et facturé toujours plus cher.

Enfin, j’évoquerai la situation du personnel de La Poste, qui est scindé par de véritables fractures statutaires : certains agents, les plus anciens, ont le statut de fonctionnaire, tandis que d’autres, embauchés sous contrat de droit privé, connaissent souvent la précarité.

Tout cela fait fortement penser à la privatisation de France Télécom, expérience cruelle s’il en fût, en particulier pour les salariés de l’entreprise…

Parce que nous sommes attachés à la défense du service public postal et que les usagers ne doivent pas être sacrifiés, nous vous invitons, mes chers collègues, à adopter cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Jacques Muller, pour présenter l'amendement n° 265.

M. Jacques Muller. Puisque vous persistez à croire que le changement de statut juridique reste la meilleure solution pour assurer l’avenir de La Poste, la moindre des choses serait de garantir les missions de service public et les emplois. Or la seule façon d’y parvenir est de garantir que seul l’État aura voix au chapitre, en prévoyant qu’il sera l’unique détenteur du capital de l’entreprise La Poste. Cela permettra de préserver un service public de qualité pour les usagers, tout en protégeant les conditions de travail des agents.

En effet, chacun le sait, ce changement de statut risque de se faire au détriment du personnel, dont l’effectif est passé de 280 000 agents en 2004 à 257 000 en 2008. Plus précisément, cette évolution reflète deux tendances contraires : le nombre des fonctionnaires a diminué de 190 000 en 2004 à 151 000 en 2008, soit une baisse de plus de 20 %, tandis que l’effectif des contractuels a augmenté de 16,5 %.

Comme nous l’avons déjà dit, la dégradation des services de La Poste est observée partout, que ce soit en milieu urbain ou en milieu rural. Le changement de statut, lié à l’ouverture à une concurrence débridée, fait craindre la poursuite des licenciements et la suppression de bureaux de poste au nom de la sacro-sainte rentabilité.

L’État a une vraie responsabilité dans l’évolution de la gestion de cette entreprise. Le fonctionnement d’un service public de qualité, attentif aux besoins des usagers, ne peut s’accommoder d’une réduction du nombre des fonctionnaires. Il est donc essentiel que La Poste ne quitte pas le giron de l’État. (M. Jean Desessard applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour présenter l'amendement n° 441 rectifié.

M. Claude Bérit-Débat. Le présent amendement vise à réaffirmer notre refus de la transformation de La Poste en société anonyme. Comme nous l’avons déjà précisé, ce refus se fonde sur le constat simple que ce changement de statut ne se justifie pas économiquement. Il représente même une menace au regard du maintien des garanties de service public et risque d’accroître les inégalités territoriales entre les Français.

Quoi que vous en disiez, monsieur le ministre, la menace de privatisation est bel et bien réelle. Vous voulez engager définitivement La Poste dans une course à la rentabilité et à la concurrence, ce qui ne peut se faire, nous le savons, qu’au détriment des citoyens et des usagers du service public.

Pourtant, rien n’oblige le Gouvernement à ouvrir le secteur postal à la concurrence et à le privatiser. En effet, aux termes d’une communication de la Commission européenne du 26 septembre 1996 sur les services d’intérêt général en Europe, « la neutralité à l’égard du statut public ou privé des entreprises et de leurs personnels [est] garantie par l’article 222 du traité. La Communauté ne remet nullement en cause le statut, public ou privé, des entreprises chargées de missions d’intérêt général, et n’impose donc aucune privatisation. » Il s’agit donc bien d’un choix idéologique de votre part ! Ce choix, vous l’assumez, monsieur le ministre, mais nous ne pouvons y souscrire, d’autant que le facteur est aujourd'hui moins présent qu’hier sur notre territoire et que les bureaux de poste ont souvent disparu, comme en témoigne la situation de nos campagnes.

Je veux rappeler avec fermeté que La Poste n’est pas et ne peut être une entreprise comme les autres : elle incarne ce service public à la française que les citoyens veulent préserver, comme ils l’ont affirmé avec force lors de la votation citoyenne du 3 octobre dernier.

Vous vous trompez de combat, monsieur le ministre, parce que vous ne tenez pas compte de la nature intrinsèque de La Poste. C’est d’ailleurs également pour cette raison que nous voulons supprimer les dispositions tendant à mettre en place un actionnariat du personnel. Les salariés de La Poste sont animés par les valeurs du service public et guidés par l’intérêt général ; en faire des actionnaires n’est pas compatible avec cette réalité. Ce n’est pas de cette entreprise-là qu’ils veulent, et ce n’est pas en tentant ainsi de les acheter que vous les ferez changer d’avis !

En conclusion, nous pensons que seul le statut actuel de La Poste peut garantir véritablement le maintien du service public territorial qu’assure aujourd'hui cette entreprise.

M. le président. Les trois amendements suivants sont identiques.

L'amendement n° 27 est présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 267 est présenté par MM. Desessard et Muller et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

L'amendement n° 433 rectifié est présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste et apparentés.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 2, seconde phrase

après les mots :

de droit public

Supprimer la fin de cette phrase.

La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l’amendement n° 27.

Mme Éliane Assassi. Cet amendement vise à supprimer la possibilité offerte aux salariés de participer au capital de l’entreprise La Poste.

En effet, si une partie du capital est détenue par des salariés, comment affirmer que l’entreprise La Poste restera publique, dans la mesure où ces salariés actionnaires ne seront tenus de conserver leurs parts que pendant deux années ?

M. Pierre Hérisson, rapporteur. Non !

Mme Éliane Assassi. À l’issue de ce délai, ils pourront donc les céder à qui bon leur semblera, puisque vous n’avez pas jugé utile de prévoir, afin de garantir que l’architecture initialement définie sera conservée, que les salariés ne pourront revendre leurs actions qu’à d’autres salariés ou à l’État. Il est simplement indiqué que cette participation des salariés doit être minoritaire.

On peut donc facilement imaginer le scénario suivant : 49,9 % des actions sont attribuées dans un premier temps à des salariés, avant d’être revendues, au bout de deux années, à de simples personnes privées, motivées uniquement par le profit réalisé par l’entreprise.

Selon nous, une telle disposition est pernicieuse et ouvre la voie à la privatisation de l’entreprise. D’ailleurs, nous nous sommes toujours prononcés contre ce type de dispositif. En effet, la participation et l’intéressement individualisent un peu plus encore les rémunérations au détriment des salariés, car ils se substituent tout bonnement, le plus souvent, aux augmentations de salaires, lesquels, dans le cas des postiers, ne sont pas mirobolants, c’est le moins que l’on puisse dire !

Quant à l’actionnariat salarié, n’oublions pas qu’il ne concerne, en général, que des cadres dirigeants, qui négocient par ce biais leur rémunération. Pour les autres, l’actionnariat salarié se résume souvent à une forme d’épargne forcée.

En faisant miroiter des gains boursiers à leurs employés, les entreprises leur font accepter de se serrer la ceinture ou de renoncer à certains de leurs acquis. Si l’actionnariat salarié transforme le monde du travail en un univers de petits boursicoteurs, ce seront toujours, au final, les grandes entreprises qui s’y retrouveront. En puisant de la sorte dans l’épargne de leurs salariés, ces entreprises se constituent des sources de financement fiables et peu exigeantes en matière de rentabilité financière.

À nos yeux, non seulement cette disposition ne fera très probablement pas gagner un euro de plus aux salariés, mais, de surcroît, elle aboutira à déconstruire encore un peu plus les relations de travail et les négociations collectives, en particulier en matière de salaires.

Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression, à l’article 1er, de l’exception relative à la part du capital pouvant être détenue au titre de l’actionnariat du personnel.

M. le président. La parole est à M. Jacques Muller, pour présenter l’amendement n° 267.

M. Jacques Muller. Cet amendement vise à ce que le capital de La Poste ne puisse être détenu que par l’État et d’autres personnes morales de droit public, à l’exclusion par conséquent du personnel.

La directive européenne n’impose pas d’ouvrir le capital de La Poste à d’autres entités que l’État. Une telle ouverture n’apportera rien au fonctionnement de l’entreprise ni aux usagers.

En revanche, céder des actions au personnel ne peut que faciliter, à terme, la privatisation partielle de La Poste, par la vente des parts concernées. Seul l’État doit financer le fonctionnement d’un service public par essence comme La Poste.

Par ailleurs, les agents de La Poste sont rémunérés dans le cadre d’un statut de la fonction publique ou dans un cadre contractuel. Ils ne sont pas censés pouvoir boucler ou arrondir leurs fins de mois en fonction de la rentabilité du service public postal ! Cette dérive illustre le dévoiement de l’esprit du service public qu’ils servent. L’objectif premier d’un service public est de répondre aux attentes et aux besoins des usagers, et non de maximiser le profit. Si l’on introduit une telle logique, quid de la présence postale sur l’ensemble du territoire, du prix unique du timbre, de l’accessibilité bancaire, etc. ?

Enfin, à qui seraient destinées ces actions ? Le salaire moyen d’un postier est d’environ 1 200 euros par mois : connaissez-vous beaucoup de personnes qui puissent se permettre de boursicoter avec un tel revenu ?

M. Jacques Muller. Cette mesure nous apparaît profondément injuste, car elle ne concernerait que la frange la mieux rémunérée des agents de La Poste, c’est-à-dire ceux qui ne souffrent pas des bas salaires.

Pour ces raisons, nous estimons que si l’objectif caché est de « faire une fleur » aux agents de La Poste, augmenter les salaires serait plus juste que de faire des plus aisés d’entre eux des actionnaires.

M. le président. La parole est à M. Michel Teston, pour présenter l’amendement n° 433 rectifié.

M. Michel Teston. Nous le retirons, car il est redondant avec l’amendement n° 441 rectifié, qu’a défendu M. Bérit-Débat.

M. le président. L’amendement n° 433 rectifié est retiré.

L'amendement n° 268, présenté par MM. Desessard et Muller et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

À l'exception de la part détenue au titre de l'actionnariat de ses personnels, 100 % du capital de La Poste est public.

La parole est à M. Jacques Muller.

M. Jacques Muller. Il s’agit là encore, bien entendu, d’un amendement de repli.

Si l’on doit transformer La Poste en société anonyme, il est essentiel que 100 % de son capital soit public. Comme je l’ai dit précédemment, la directive européenne n’impose nullement d’ouvrir le capital de La Poste à d’autres entités que l’État, et cette ouverture n’apportera rien au fonctionnement de l’entreprise, ni aux usagers.

Ainsi que l’a indiqué récemment Mme Christine Lagarde lors d’une interview, « les acteurs qui vont entrer au capital seront des acteurs publics, notamment la Caisse des dépôts et consignations ». Comme nous ne pouvons pas nous contenter de paroles prononcées par des membres du Gouvernement dans les médias – les Français ne cessent d’ailleurs de constater que nombre d’engagements ne sont pas tenus ! –, nous proposons d’inscrire clairement dans la loi que le capital de La Poste devra rester public à 100 %, à l’exception de la part détenue au titre de l’actionnariat du personnel. Nous essayons de trouver un compromis !

M. le président. L'amendement n° 269, présenté par MM. Desessard et Muller et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Les parts du capital de La Poste sont incessibles à d'autres catégories d'acteurs que les trois susnommées.

La parole est à M. Jacques Muller.

M. Jean Desessard. Les gens de l’Est sont infatigables ! (Sourires.)

M. Jacques Muller. La sphère publique est mouvante. L’exemple de France Télécom, où la part de capital détenue par l’État s’est progressivement réduite à 27 %, nous l’a montré.

Même si, à la date de publication de ses statuts initiaux, il est prévu que le capital de La Poste soit détenu en totalité par l’État, ces statuts pourront ensuite être modifiés par décret du Conseil d’État. Rien ne garantit donc, en l’état actuel du texte, que l’État, les autres personnes morales de droit public ou les personnels actionnaires conserveront leurs parts.

Cet amendement vise précisément à inscrire dans la loi que seuls ces trois acteurs pourront participer au capital. En effet, en tant qu’actionnaire principal, l’État a un véritable rôle à jouer dans la gestion de l’opérateur historique qu’est La Poste. Pour éviter les graves problèmes rencontrés notamment par la société anonyme France Télécom, il est indispensable que les pouvoirs publics assument pleinement leurs responsabilités économiques, financières, sociales et écologiques. L’État ne doit pas pouvoir se déposséder de ses parts de capital au profit d’acteurs privés.

Si cet amendement n’était pas adopté, nous aurions, une nouvelle fois, la preuve que la voie à la privatisation est largement ouverte.

M. Jean Desessard. Très bien !

M. le président. L'amendement n° 270, présenté par MM. Desessard et Muller et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Toute prise de participation au capital de La Poste est conditionnée à l'acceptation d'une clause d'incessibilité.

La parole est à M. Jacques Muller.

M. Jean Desessard. Moi, je me réserve pour samedi et dimanche ! (Sourires.)

M. Jacques Muller. « Je l’affirme, parce que c’est un engagement du Gouvernement : EDF et Gaz de France ne seront pas privatisés. » Tels étaient les propos, le 15 juin 2004, de M. Nicolas Sarkozy, alors ministre d’État, ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. On connaît la réalité d’aujourd’hui !

Monsieur le ministre, nous voulons bien vous faire crédit quant à votre volonté de ne pas privatiser La Poste une fois son nouveau statut adopté. Mais, dans ce cas, vous ne pourrez que soutenir cet amendement de précision, visant à empêcher les futurs actionnaires de la société anonyme La Poste de vendre leurs parts.

Nous avons évoqué le fait que, dans le cadre du régime de droit commun des sociétés anonymes, la nature publique d’un actionnaire n’était en aucun cas une garantie de comportement vertueux de sa part. Le cas de la Caisse des dépôts et consignations est là pour nous le rappeler. Il peut en être de même, ni plus ni moins, pour les salariés de La Poste, qui pourraient ne pas résister à la tentation d’effectuer une plus-value financière en cédant leurs actions.

Dès lors, nous proposons d’inscrire dans la loi une clause d’incessibilité, en vue d’apporter une garantie juridique supplémentaire quant au maintien de La Poste dans le giron public.

Si le Gouvernement est bel est bien déterminé à conserver la nature publique de La Poste, à ne pas se dédire et donc à ne pas laisser se répéter un scénario similaire à celui qui a prévalu pour GDF, il donnera, j’en suis sûr, un avis favorable à cet amendement de précision.

M. le président. L'amendement n° 272, présenté par MM. Desessard et Muller et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Toute prise de participation au capital de La Poste est conditionnée à l'acceptation d'une clause d'incessibilité jusqu'en 2020.

La parole est à M. Jacques Muller.

M. Jacques Muller. Il s’agit à nouveau d’un amendement de repli,…

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est même du repli intégral !

M. Jacques Muller. … notre objectif étant de tenter de limiter la casse.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est très difficile !

M. Jacques Muller. Nous proposons d’assortir l’attribution des actions de la future SA La Poste d’une incessibilité temporaire de près de dix ans. Je présume que l’incessibilité totale de ces actions nous serait refusée…

Ce type de démarche est connu du monde des affaires et du droit des sociétés. À titre d’exemple, Nestlé et la richissime famille Bettencourt ont signé un pacte d’actionnaires concernant la holding L’Oréal, qui inclut des clauses de préemption et d’incessibilité temporaire d’actions. Je dirai, pour paraphraser le slogan fameux de cette marque, que La Poste vaut bien, a minima, une clause d’incessibilité !

M. le président. L'amendement n° 271, présenté par MM. Desessard et Muller et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

La cession d'actions de toute autre catégorie d'acteurs que l'État ouvre droit à préemption de celui-ci sur ces actions.

La parole est à M. Jacques Muller.

M. Jacques Muller. Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, je suis convaincu que vous allez exprimer un avis favorable sur cet amendement ! En effet, il est sous-tendu par la même idée que le précédent, à savoir garantir le maintien du caractère public de l’actionnariat de la société anonyme La Poste.

Vous allez certainement m’opposer le fait que l’on ne peut interdire aux futurs actionnaires de la SA de céder leurs parts. Mais vous conviendrez tout de même que l’on doit accorder à l’État un droit préférentiel d’acquisition de toute action de La Poste qui serait cédée par son détenteur. Il serait paradoxal que le Gouvernement rejette cet amendement, car il s’agit d’une pratique commune dans le monde des sociétés et des affaires.

Si, demain, la Caisse des dépôts et consignations ou un actionnaire salarié décide de céder des actions, il est impératif que l’État ait la priorité pour les racheter.

M. le président. L'amendement n° 336, présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Après le 1er janvier 2010, les parts du capital de La Poste ne seront cessibles qu'à l'État ou à d'autres personnes morales de droit public.

La parole est à M. Michel Teston.

M. Michel Teston. Pour les raisons que j’ai déjà exposées à propos de l’amendement n° 432, je retire également cet amendement.

M. le président. L’amendement n° 336 est retiré.

L'amendement n° 582, présenté par MM. Fortassin, Tropeano, Charasse et Collin, Mmes Escoffier et Laborde et MM. Mézard et Milhau, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 2

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« La part de l'État dans le capital 100 % public du groupe La Poste ne peut être inférieure à 51 % du capital.

La parole est à M. François Fortassin.

M. François Fortassin. Cet amendement vise à garantir le caractère d’actionnaire majoritaire de l’État parmi les actionnaires publics, précision qui ne figure pas dans le texte.

En effet, tel qu’elle résulte des travaux de la commission, la rédaction du projet de loi prévoit que le capital de La Poste, hormis l’actionnariat du personnel, est détenu intégralement par des personnes publiques, sans pour autant indiquer quelle est la part de l’État dans ce capital.

C’est pourquoi, afin de garantir l’engagement majoritaire de l’État par rapport à d’autres actionnaires publics, le présent amendement vise à préciser que la part de l’État dans le capital ne peut être inférieure à 51 %.

Une telle précision est, selon nous, de nature à prévenir un certain nombre de dérives qui pourraient se faire jour dans un avenir plus ou moins proche.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Pierre Hérisson, rapporteur. L’adoption de l’amendement n° 31 rectifié interdirait à d’autres personnes morales de droit public que l’État, telle la Caisse des dépôts et consignations, de venir renforcer les fonds propres de La Poste. Or la participation au capital de ces personnes morales de droit public ne peut en rien être assimilée à une privatisation de La Poste.

La commission demande donc à ses auteurs de bien vouloir retirer cet amendement. À défaut, elle se verrait contrainte d’émettre un avis défavorable.

L’amendement n° 567 tend à préciser que l’État est actionnaire majoritaire de La Poste. La commission souhaite entendre l’avis du Gouvernement sur cet amendement, qui lui paraît de bon sens.

L’amendement n° 266 vise à limiter la détention du capital de La Poste à l’État et au personnel de la future société anonyme. Son adoption empêcherait l’entreprise de bénéficier des capitaux indispensables à son développement que peut lui apporter la Caisse des dépôts et consignations. La commission demande à ses auteurs de bien vouloir retirer cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

En ce qui concerne les amendements identiques nos 26, 265 et 441 rectifié, la commission a déjà eu l’occasion de s’exprimer sur le sujet. La Poste a besoin d’autres capitaux que ceux que pourra lui apporter l’État. La commission émet donc un avis défavorable.

La commission est également défavorable aux amendements identiques nos 27 et 267, qui visent à interdire toute participation des personnels de La Poste au capital de leur entreprise. Une telle participation constituera pourtant un moyen efficace de motivation et, partant, d’amélioration de la performance de l’entreprise. (Protestations sur les travées du groupe CRC-SPG.)